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Notes sur la myst�rieuse statue de saint Maurice
au sommet du fronton de l'�glise de Bl�mont


Suites � des dommages importants apparus sur l'ancienne �glise en 1850, il f�t d�cid� de lancer la construction de la nouvelle �glise, sur les plans de l'architecte L�on Vautrin (1820-1884). La premi�re pierre fut pos�e le 20 octobre 1852, et le 6 septembre 1856 la nouvelle �glise est b�nite. Le fronton est alors surplomb� d'une imposante statue de saint Maurice.

On sait fort peu de choses sur cette statue aujourd'hui disparue, et que Christian Pfister dans son Histoire de Nancy (Tome 2-1909) attribue au sculpteur lorrain Giorn� Viard (1823-1885) : �� On doit en outre � Viard de tr�s nombreux bustes, parmi lesquels nous citerons ceux de Digot, d'Alexandre de Haldat, de Braconnot, des deux g�n�raux Thiry, de Mathieu de Dombasle. Il est �galement l'auteur du colossal Saint Maurice, � l'�glise de Bl�mont. Cf. J.S.A.L., 1885, p. 108 �.
On notera comme seule r�f�rence de cette information la n�crologie parue en 1885 (voir ci-dessous les notes sur Giorn� Viard).

Cependant, on se rend compte sur les cartes postales �dit�es au cours du XX�me si�cle, qu'il existe des photos o� la statue est pr�sente, et d'autres o� elle est absente.

1856-1914
:
En 1908, Emile Badel ecrit dans �� L'Immeuble et la construction dans l'Est � (27 septembre 1908) : �� L'�glise de Bl�mont, malgr� son perron gigantesque et ses deux tours ajour�es, est �triqu�e et manque de proportions. Il y a notamment, au fronton principal, un �norme saint Maurice qui fait des miracles d'�quilibre pour se maintenir sur ce hauteurs. �
 

1914-1929 :

Si Emile Badel reprend une grande partie de son article en 1928 (1er janvier 1928), il doit cependant modifier cette partie sous la forme : �� L'�glise de Bl�mont, d�di�e � Saint Maurice avec ses deux tours �l�gantes, a �t� d�capit�e de la statue de son patron, jet�e bas par un obus fran�ais pendant la guerre. �
Cette information est rapport�e par Le Pays Lorrain d�s 1921 :
�� Bl�mont, se trouvant au front par sa situation, subit de nombreux bombardements qui firent plusieurs victimes et beaucoup de d�g�ts. La jolie �glise paroissiale qui ne date que de 60 ans, fut ab�m�e et la colossale statue de Saint-Maurice, son patron, oeuvre du sculpteur lorrain Jiorn� Viard (Pfister : Histoire de Nancy, II, p.15, note 1) �.
La date de ce bombardement est rarement pr�cis�e. Ainsi, dans Bl�mont la Vaillante, Constant Hertz �crit sommairement : �� Bombardements. - Bl�mont ayant �t� au front toute la dur�e de la guerre, a eu � subir de nombreux bombardements [...]. L'�glise, le presbyt�re, mon usine, ma maison ainsi que beaucoup d'autres, ont re�u de nombreux obus lanc�s par l'artillerie fran�aise de Montreux et de Montigny.[...] J'ai fait proc�der, second� par le capitaine des pontonniers, aux r�parations urgentes de l'�glise afin d'assurer la pr�servation urgente de ce beau monument. �
Mais il semble cependant que l'�v�nement s'est produit tr�s t�t, dans nuit du 14 au 15 ao�t 1914 lors de la reprise de Bl�mont par les troupes fran�aises, o� la statue projet�e sur le parvis par un obus fran�ais, s'est bris�e. Ainsi, saint Maurice n'apparait plus sur aucune des cartes postales repr�sentant l'�glise Bl�mont pendant toute l'occupation allemande (du 22 ao�t 1914 au 17 novembre 1918).

1929-1959 :
Emile Badel ajoute d'ailleurs le 14 mai 1929 : �� L'�glise Saint-Maurice de Bl�mont (au saint bombard� durant la guerre et qu'on va r�tablir pour 13.000 francs, alors qu'on aurait eu cette statue pour la moiti� � Nancy), est une mani�re de petite cath�drale en miniature, avec deux tours, rappelant de tr�s loin les clochers de Chartres ou de Cologne. �
L'estimation de Badel est inexacte : car c'est en f�vrier 1929 que la commune impute aux dommages de guerre la d�pense de 13.350 francs pour une nouvelle statue de 3 m 80 sur un socle en ciment teint� (maison Andriani et Bamfaldi, d�corateurs en ciment arm� � Belfort), privil�giant ce prix aux 37.000 francs demand�s pour une statue en pierre de savonni�re, du statuaire Victor Huel de Nancy (dont le p�re avait d'ailleurs �t� �l�ve de Viard). La nouvelle statue est donc peu couteuse, mais le ciment arm� va s'av�rer un choix non durable.


1959 � nos jours :

Car en juin 1959, la municipalit�, apr�s �� qu'une pierre venant de l'ogive centrale ext�rieure de l'�glise est tomb�e sur le parvis de l'�difice �, constate aussi que �� la statue de Saint-Maurice plac�e � l'extr�mit� de cette ogive tend � se d�sagr�ger et risque, en s'effritant de provoquer un accident. � La statue est donc d�finitivement descendue du fronton et remplac�e par une croix sommaire en pierre.

Quelques notes sur Saint-Maurice

Aucun des documents photographiques ne permet d'avoir une vue de d�tail de cette statue, mais on discerne cependant le saint rev�tu d'un costume de soldat romain et muni d'une lance, aspect que l'on retrouve traditionnellement sur de nombreuses repr�sentations de saint Maurice.

Car la l�gende de saint Maurice, �crite pour le premi�re fois dans la Passio Acaunensium martyrum (�crite entre 443 et 450) de l'�v�que Eucher de Lyon (370-450 ?), est celle du martyr de la l�gion th�baine :
Maurice commandait une l�gion, provenant de Th�ba�de en Egypte, compos�e de 6600 soldats chr�tiens coptes. Vers l'an 297, appel�e � renforcer l'arm�e de Maximien (Marcus Aurelius Valerius Maximianus Herculius, 250?-310) lors d'une exp�dition en Gaule, la l�gion franchit les Alpes, atteint le Valais, mais refuse d'ob�ir � l'ordre imp�rial d'y massacrer les chr�tiens convertis par Saint Materne. L'empereur punit alors la l�gion th�baine, stationn�e � Agaune (aujourd'hui ville suisse de Saint-Maurice), de d�cimation, puis r�it�re son ordre : nouveau refus, nouvelle d�cimation. Mais la l�gion sous les ordres du campiductor Exup�re, du senator militum Candide, et surtout du primicerius Maurice qui encourage les soldats � ne pas trahir leur foi, persiste � refuser de pers�cuter des chr�tiens. Maximien ordonne alors la mise � mort de toute la l�gion : sans discussion ni r�sistance, les Th�bains se livrent alors � leurs pers�cuteurs.

Les restes de saint Maurice auraient �t� exhum�s par Th�odore, premier �v�que connu d'Octodure (aujourd'hui Martigny), et fondateur du sanctuaire d'Agaune, d�sormais d�nomm� de Saint-Maurice. Un si�cle plus tard, la basilique d'Agaune est construite sur le lieu pr�sum� du massacre, et en 515, le roi burgonde Saint Sigismond, premier roi chr�tien au Nord des Alpes y fonde un monast�re d�di� � saint Maurice.
Le martyr de saint Maurice est tr�s controvers�, notamment du fait de l'inexistence de cette l�gion dans la liste des l�gions romaines de l'�poque.
D�j� l' �� Encyclop�die ou dictionnaire raisonn� des sciences, des arts et des m�tiers �, �dit�e entre 1751 et 1772 sous la direction de Diderot, consacre un long article � la �� L�gion Th�b�enne � et la qualifie de �� pure fable �.

Mais la l�gende de la l�gion th�baine contribue � d'autres �nigmes dont :
  • Le lieu : d�s le XI�me si�cle, certains auteurs affirment que la l�gion aurait �t� massacr�e au nord de la ville de Tr�ves en Allemagne, et des fresques baroques au plafond de la basilique Saint-Paulin de cette ville relatent cet �pisode l�gendaire.
  • La croix suisse : sur ces fresques, comme sur d'autres illustrations m�di�vales, figure la banni�re suppos�e de la l�gion th�baine. Mais des versions aux couleurs invers�es existent, d'o� une hypoth�se concernant les armoiries de la Suisse (croix blanche sur fond rouge), faisant ainsi remonter la croix f�d�rale � la l�gion th�baine.
  • La lance de saint Maurice. Les divers empereurs du Saint-Empire romain germanique int�grent au rituel de leur sacre une lance rapport�e d'Italie, � la fin du X�me si�cle, pr�tendument forg�e avec un clou de la Passion. L'empereur Henri IV (1050-1106) fait d'ailleurs placer sur cette lance une feuille d'argent qui d�signe cette relique comme clou de la Passion fix� � la Lance de Saint Maurice (�� ...CLAVI LANCEE SANCTI MAVRICII... �).Plus tard, dans le premier tiers du XIII�me si�cle, un document pontifical d�signe m�me cette lance comme une double relique : clou de la passion, et Sainte Lance (ou lance de Longinus) consid�r�e comme celle qui a perc� le flanc droit de J�sus lors de sa crucifixion. Une expertise faite au d�but du XX�me si�cle a cependant conclu qu'il s'agit d'une lance lombarde du VIII�me-IX�me si�cle, sans doute insigne royal burgonde li� au culte de saint Maurice. Mais s'�tait alors propag� la l�gende que Maurice de la l�gion th�baine avait utilis� la Sainte Lance de Longinus pour combattre...

Quelques notes sur Giorn� Viard

Giorn� Viard, est n� � Saint-Cl�ment (Meurthe-et-Moselle) le 23 janvier 1823 et est mort � Nancy le 10 mai 1885.

Giorn� est son v�ritable pr�nom : cependant, il signe ses oeuvres Jiorn� :
On peut supposer que l'artiste a choisi de contracter ses pr�noms sous cette forme, le registre de la commune de Saint-Cl�ment mentionnant sur l'acte de naissance les pr�noms de Jean Giorn�.

Les �� Catalogue des peintures, miniatures, aquarelles, dessins, sculptures et lithographies expos�s � Nancy... par les artistes lorrains � l'indiquent :

  • en 1843, ouvrier fa�encier, � Saint-Cl�ment : il pr�sente 2 pi�ces en terre cuite cette ann�e l�. Mais il semble qu'il s'adonnait d�j� au pl�tre, puisque le �� Catalogue des objets d'art et d'antiquit� expos�s au mus�e � lorrain � Nancy, de septembre 1852 signale �� Le Triomphe de Bacchus. Bas-relief en pl�tre. Premier ouvrage ex�cut� par Jiorn� Viard, lorsqu'il �tait encore ouvrier fa�encier. � Cette m�me ann�e, le journal �� La Presse � du 2/3 novembre 1843 nous informe que �� Le conseil-g�n�ral de la Meurthe s'est joint au conseil municipal de Nancy pour contribuer aux frais de l'�ducation artistique d'un jeune ouvrier potier, nomm� Jiorn� Viard, n� � Saint-Cl�ment, arrondissement de Lun�ville, qui, depuis son enfance, s'est fait remarquer par des travaux de fa�encerie qui d�notent une v�ritable vocation pour la sculpture �

  • en 1845, El�ve sculpteur � Nancy (il pr�sente 5 sculptures antiques)

  • en 1849, Sculpteur � Paris

Journal de la Soci�t� d'arch�ologie et du Comit� du Mus�e lorrain
1885


N�CROLOGIE
GIORN� VIARD

Le 14 mai a eu lieu l'inhumation, au cimeti�re du Sud, du sculpteur Giorn� Viard, mort, l'avant-veille, �g� de 62 ans, � l'hospice Saint-Julien, o� la Municipalit� de Nancy l'avait fait admettre avec la faveur d'une double pension. Quoiqu'il n'appartint pas � notre Soci�t�, on nous saura gr�, nous l'esp�rons, de lui consacrer quelques lignes dans ce Journal. Elles sont emprunt�es � un excellent article publi� par un de nos confr�res, et que tout le monde a lu avec le plus vif int�r�t.
Giorn� Viard �tait n� � Saint-Cl�ment, le 23 janvier 1824. C'est � l'�cole de cette petite commune qu'il apprit � lire et � �crire, juste ce qu'il fallait pour tenir imparfaitement ses comptes. Employ� � la fa�encerie, il manifesta de bonne heure un go�t pour le modelage, et fut employ� promptement aux ateliers de sculpture. Il acquit bient�t assez d'habilet� pour parfaire les reproductions de Cyffl� au sortir du moule. C'est dans ce travail d�licat de la retouche qu'il con�ut le sentiment de la forme et l'amour de la statuaire. Distingu� par Alexandre Geny, l'�minent collectionneur, il fut envoy� aux Beaux-Arts, � Paris, o� il apprit, dans l'atelier de Bonassieux, ce que le travail de la manufacture ne pouvait lui donner les doctrines et les traditions g�n�rales de l'art.
A son retour, au bout de quelques ann�es, sa premi�re oeuvre fut inspir�e par la reconnaissance. Il prit pour mod�le une petite fille de son bienfaiteur, aujourd'hui dominicaine, dont il sculpta un buste charmant.
Ses aptitudes le portaient d'ailleurs � traiter plus sp�cialement la figure, tandis que celles de son fr�re penchaient vers l'�tude et la pratique de l'ornementation.
Ses premiers essais � Nancy furent remarqu�s et lui attir�rent de promptes commandes. Depuis de longues ann�es, cette ville n'avait vu fleurir d'autres talents de sculpteurs que ceux, bien prosa�ques, de Jacquot, auquel on doit la statue de Stanislas et des fr�res L�py, dont le Ren� II a fait place � une oeuvre excellente et beaucoup plus digne de la vieille cit� des ducs.
Giorn� Viard revenait donc � Nancy au moment opportun, second� par la bienveillance d'amateurs et d'artistes d�licats, tels que Geny et Chatelain, sous les auspices desquels il produisit ses premi�res oeuvres.
Ce fut � lui qu'on songea lorsqu'il fut question de r�tablir, en 1850, la statue �questre du duc Antoine au-dessus de la porterie du Palais ducal. Son oeuvre eut un succ�s m�rit� aupr�s de tous les connaisseurs.
On sait que David d'Angers n'avait pu achever avant sa mort la figure de Drouot. Cette lacune mettait seule obstacle � l'�rection de sa statue sur une place de Nancy. Il restait � compl�ter la t�te de ce grand g�n�ral homme de bien. Giorn� Viard assuma cette t�che, et le seul �loge que les artistes accordent aujourd'hui � ce monument revient justement au modeste artiste nanc�ien qui a model� la figure.
Ce praticien habile, et auquel les critiques ne faisaient point d�faut se signala bient�t par de nouveaux travaux notamment par un buste de M. Le Forestier, ancien commandant des lanciers de la garde ; par la r�fection du beau l'�table de Florent Drouin, anciennement au vieux Saint-Epvre, et aujourd'hui au Mus�e lorrain ; par les belles cariatides du monument de la comtesse de Landreville, au cimeti�re de Pr�ville.
A ce moment s'�levaient les premiers contreforts de Saint-Epvre. M. Morey, toujours heureux d'encourager le talent, l'associa � son oeuvre, � la d�coration de laquelle il eut la plus grande part. C'est � son ciseau qu'on doit la statue b�nissant qui couronne le gable du portail central, au-dessus du tympan, sculpt� par M. P�ltre. Il accepta et mena � bonne fin l'entreprise consid�rable des diverses statues a�riennes qui animent les grandes lignes de l'�difice.
Peu apr�s, toujours associ� aux travaux de M. Morey, il sculpta pour la ville de Nancy de nombreuses statues ou m�daillons du palais des Facult�s, les quatre bustes du passage de Haldat, la statue de Charles III, malencontreusement plac�e � la Citadelle, les m�daillons de la partie restaur�e du Palais ducal, ceux de la cour int�rieure de l'h�tel-de-ville de Nancy, sur la rue de la Constitution, etc.

Parmi les bustes de notori�t�s lorraines dus � son ciseau, nous citerons notamment ceux de Digot, de de Haldat, de de La Salle, de Parade, des deux g�n�raux Thiry, de de Lambel (au mus�e de Bar), de Dom Calmet (d�truit dans l'incendie du Mus�e lorrain), de Gastaldy, du cur� Trouillet, d'Alexandre Geny et de son p�re, de Mathieu de Dombasle, de Lacordaire, de l'abb� Michel (du S�minaire), le m�daillon de l'abb� Gridel (des Jeunes -Aveugles), celui de notre confr�re M. Bretagne (1878). Il est �galement l'auteur du colossal saint Maurice, command� et sculpt� pour l'�glise de Bl�mont.
Son talent fut utilis� souvent par un grand nombre d'entrepreneurs et d'architectes pour la d�coration de diverses �glises du d�partement ou de l'Alsace-Lorraine. Sa derni�re oeuvre religieuse fut le saint Nicolas qui couronne la nouvelle paroisse de Nancy. Lorsqu'il assista au transport et � l'�rection de cette statue, il �tait d�j� atteint du mal qui le minait lentement et qui devait le mettre rapidement au tombeau.
Esp�rons qu'une modeste pierre tombale avec une inscription portant son nom avec la date de sa naissance et de son d�c�s recouvrira la d�pouille mortelle de ce pauvre artiste trop m�connu pendant sa vie et que l'on n'a glorifi� que tardivement.

 

R�daction : Thierry Meurant

 

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