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Contribution � l'histoire d'Herb�viller
 


Le Pays lorrain
1964


Contribution � l'histoire d'Herb�viller
(Meurthe-et-Moselle)

Le grand historien de la Lorraine, Henri Lepage, a �crit dans l'Annuaire de la Meurthe de 1858 (1) qu'il serait tr�s d�sirable que l'on �tudi�t la situation des classes agricoles et bourgeoises en Lorraine, la condition des habitants des villes et des campagnes. Nous croyons nous �tre conform�s ici � son d�sir.
L'on conna�t le r�le important que jou�rent au d�but de la R�volution, particuli�rement en Lorraine, les hommes de loi, qui se retrouv�rent si nombreux � l'Assembl�e Constituante. Or ce r�le ne fut nullement improvis�. Depuis longtemps d�j�, dans les petites villes et m�me dans les anciens villages, ils consolidaient avec t�nacit� leur emprise. Tandis que les seigneurs, insouciants et trop souvent absents, se contentaient, dans beaucoup de cas, de percevoir leurs revenus et perdaient le contact avec la population, leurs repr�sentants, avocats, procureurs, maires, juges, tabellions, huissiers, gruyers, hauts officiers, formaient un r�seau si serr� qu'ils �taient, en r�alit�, d�j� les v�ritables ma�tres du pays bien avant la r�union des �tats g�n�raux.
Leur action a sans doute �t� �tudi�e. Mais ce que l'on sait moins, c'est que leur puissance n'aurait pas �t� ce qu'elle fut si, en plus de leur mainmise sur la proc�dure et l'administration, ils ne s'�taient r�v�l�s des terriens qui s'efforc�rent, par un travail long et patient, d'augmenter en m�me temps, pour leur compte personnel, leurs possessions territoriales, tout pr�ts d�j� � remplacer ceux qu'ils repr�sentaient.
Ce travail incessant de remembrement, d'acquisition, morceau par morceau, doit �tre �tudi� de tr�s pr�s, dans les archives notariales, par qui veut conna�tre les origines et la formation des hommes de loi. C'est ce que nous avons tent� de faire en prenant un exemple-type, celui d'une des plus anciennes familles d'Herb�viller- Launoy, les Pierron. Comme on le sait, cette localit�, qui avait titre de ch�tellenie au XVIIIe si�cle, �tait alors du dioc�se de Metz et de la subd�l�gation de Vic depuis 1756, par une de ces anomalies, fr�quentes � l'�poque, qui t�moignent de l'enchev�trement des souverainet�s.
C'est sous la date du 31 d�cembre 1693 que nous trouvons pour la premi�re fois mention d'un Pierron, dans un acte sign� J. Laurent, notaire � Bl�mont. Il s'agit d'un �change d'h�ritages entre Nicolas Pierron, fermier, qui poss�dait d�j� alors le moulin de Saint-Martin (2), et les autres hoirs de Fran�oise Michel.
Il ne sera ensuite plus n�cessaire aux habitants d'Herb�viller d'aller � Bl�mont pour la r�daction de ces ventes, toujours sur parchemin, souvent avec sceau. Ils vont d�sormais avoir un notaire dans leur localit� m�me, assur�ment plus importante alors qu'aujourd'hui. Nous avons, en effet, un acte de N. Jacquot, �� tabellion de la terre et seigneurie d'Herb�viller Launoy �, en date du 9 mars 1728, par lequel Nicolas Toussaint, ancien maire � Herb�viller, �� reconnaissait volontairement et confessait � avoir vendu � �� honn�te homme � Claude Claudel, laboureur, demeurant audit Herb�viller-la-Tour, et � sa femme Jeanne Malay, un pr� au lieudit Les Grands-Pr�s, contenant un jour 11 toises, soit 58 toises de haut et 4 toises et demie de large, born� par le sieur Jean Thiry p�re, au


Porte d'une maison d'Herb�viller

sud, et la confr�rie Notre-Dame au nord, au prix de 150 livres et principal et 7 livres 10 sols, plus le �� vin que ledit vendeur a re�u comptant des mains dudit acqu�reur �. Si nous avons mentionn� cette transaction, c'est que nous retrouverons ci-apr�s un Claudel comme vendeur.
C'est sous la date du 25 novembre 1737, donc au moment o� la Lorraine perdait son ind�pendance, que nous trouvons la premi�re acquisition d'Alexandre Pierron, �� maire, juge et haut officier de la terre et seigneurie d'Herb�viller Launoy � donc l'homme le plus important de cette localit� que l'on pouvait alors appeler une petite ville. La transaction s'effectua par-devant le �� tabellionnage de Messeigneurs � d'Og�viller, seigneurie qui appartenait alors au rhingrave (Rheingraf und Wildgraf ) de Salm, par un acte sur parchemin aux armes de ce prince m�diat. Charles-Fran�ois Jenirat, laboureur � Craon et sa femme Barbe-Genevi�ve Houillon vendaient � Alexandre Pierron, �poux de Barbe Boulang�, �� un gagnage (3) situ� � Saint-Martin, ban et finage (4) dudit lieu, consistant en terres arables et non arables, si aucunes y a, et pr�s, provenant de la succession de Jeanne Hasselot, vivante femme du sieur Charles Colin, vivant assesseur et garde-marteau (5) �s pr�vot� et gruerie (6) d'Einville � pour la somme de 400 livres tournois au cours de Lorraine en principal, �� et les vins � raison de 5 % �.
D�s lors, les achats d'Alexandre Pierron vont se succ�der.
Le 15 janvier 1751, par-devant Me Gauthier, successeur de Me Jacquot, Nicolas Claudel, laboureur demeurant � Og�viller (probablement fils de Claude, mentionn� ci-dessus) et sa femme Marie-Fran�oise lui vendent deux quarts vingt verges (7) de terre labourable au lieudit au rupt d'Armont, entre Jean Vourion au levant, Antonin Mathieu au midi, et sur le chemin de ville au nord; 1 homm�e (8) 9 toises 4 pieds � la Croix Jean-Fleurette; 5 homm�es 4 toises et demie sur le chemin des Cha�nes; la moiti� de 3 homm�es 5 toises 6 pieds proches les meix (9) au del� de l'eau sur le chemin de Badonviller; enfin 2 homm�es 15 toises 2 pieds et demi au lieudit Les Grands-Pr�s (mentionn�s ci-dessus). Le tout pour 130 livres au cours de Lorraine �� et les vins ordinaires qui ont �t� consomm�s entre les parties �.
La m�me ann�e encore, en 1751, Alexandre Pierron, toujours qualifi� �� juge, haut officier en la terre et seigneurie d'Herb�viller Launoy et y r�sidant � fait une nouvelle acquisition; il ach�te par-devant Gauthier, notaire � Bl�mont, � Jean Belleville, laboureur � Dom�vre et � �lisabeth Roussel sa femme, un champ labourable situ� au finage de Saint-Martin, soit six homm�es, 23 toises, 2 pieds, pour 68 livres tournois en principal, qui ont �t� pay�es aux vendeurs en esp�ces coursables (10) dont ils se sont tenus contents et satisfaits, en outre �� des vins � 5 % qui ont �t� consomm�s entre les parties �.
Peu apr�s, le 29 janvier 1753, Alexandre Pierron mentionn� cette fois comme �� maire,

Ch�teau d'Herb�viller

juge, haut officier et ch�telain des terres et seigneurie d'Herb�viller � achetait par-devant Bertin �� tabellion des terres seigneuries d'Herb�viller � � Joseph Stourme, laboureur � Saint-Martin, une pi�ce de terre situ�e sur le ban et finage de Saint-Martin pour 33 livres tournois.
Ce n'est pas tout. Le 26 mars 1753, par- devant Fran�ois D�charme, greffier et tabellion commis en la seigneurie d'Herb�viller, Alexandre Pierron, ch�telain, juge et haut officier en ladite seigneurie (la qualification de maire n'y est plus), achetait � Fran�ois Moitrier, laboureur � Og�viller et � sa femme Jeanne Claudel, 2 homm�es 15 toises de pr�s situ�s au lieudit aux Grands-Pr�s, pour 75 livres argent au cours de Lorraine de principal, sans oublier les vins ordinaires.
Alexandre Pierron, qui avait ainsi agrandi ses biens familiaux de Saint-Martin, transmit ses fonctions de maire, juge et haut officier d'Herb�viller � son fils Fran�ois qui v�cut peu de temps apr�s lui. Mais la veuve et les h�ritiers de celui-ci poursuivirent les achats.
Le 8 novembre 1779, par un acte sign� G�rardin, tabellion � Herb�viller, mais contr�l� et insinu� � Baccarat (qui d�pendait de Metz), ils achetaient de Jeanne-Agn�s Helluy, veuve de feu Cl�ment Hanus, en pr�sence de Jean Mouton p�re, charron, et de S�bastien Helluy, laboureur, une petite chenevi�re (11) sise sur le ban et finage d'Herb�viller, au lieudit Grand Meix pour 96 livres argent au cours de France.
Enfin, le 22 janvier 1780, les m�mes h�ritiers de Fran�ois Pierron, par-devant le m�me G�rardin, ach�tent � Luc Hachaire, laboureur � Herb�viller, avec le consentement de sa femme Marie Helluy, et assist� �� pour satisfaire au prescrit de la coutume de l'�v�ch� de Metz � de Fran�ois et S�bastien Helluy, le premier son fr�re, le second son cousin germain, de Jean Vourion p�re et de Jean Gled ses neveu et cousin germain, tous laboureurs � Herb�viller, une autre petite ch�nevi�re �galement sise au Grand Meix, pour 48 livres argent au cours de France.
Arrive la R�volution : elle n'appara�t ici, au point de vue de la propri�t� terrienne, que comme la cons�cration juridique d'un �tat de choses d�j� existant en fait. Les hommes de loi de Bl�mont, les Fromental, Lallev�e, Zimmermann, Klein, Mayeur, Batelot et autres, qui y exer�aient d�j� en fait la justice et l'administration, concentrent entre leurs mains les pouvoirs nominaux des seigneurs d�faillants et dirigent le nouveau district de Bl�mont (1790) (12), dans lequel Herb�viller fait partie du canton d'Og�viller.
Premiers b�n�ficiaires de la R�volution, nos hommes de loi sont aussi les premiers acqu�reurs de biens nationaux. Tel est le cas des Helluy qui, sous l'�gide de Fromental, procureur syndic, ach�tent le 10 janvier 1792 des terres, pr�s, friche et chenevi�res � Badonviller (13), le 14 f�vrier 1792 une maison et un jardin dans cette m�me localit� (14), le 8 octobre de la m�me ann�e un hallier � Bl�mont qui appartenait aux religieuses de cette ville et des terres � Pexonne (15), le 19 f�vrier 1793 des terres et pr�s � Vacqueville (16).
Mais les �v�nements d�passent rapidement leurs pr�visions. Un certain nombre �migrent, parmi lesquels des Pierron. Aussi verrons-nous leur nom sur la liste g�n�rale des biens des �migr�s du district de Bl�mont du 8 avril 1793 (17) : Fran�ois Pierron, pr�tre � Bl�mont �� a le bien de sa m�re dont son p�re jouit ainsi de son patrimoine �; Louis Pierron, m�decin � Strasbourg, �� a encore son p�re et sa m�re et n'a rien d'�chu �. Fromental faisait son possible pour sauver les siens sans se compromettre.
Quelques-uns cependant montent plus haut. Fuyant la situation quelquefois difficile et en tous cas jug�e par eux sans avenir dans laquelle ils se trouvaient plac�s en Lorraine, ils vont � Paris o� d'importantes fonctions leur sont d�volues. Tel fut le cas de R�gnier, futur grand juge et duc de Massa, et de Louis-Dominique Klein, �galement de Bl�mont. Ce dernier, qui devint successivement g�n�ral de division, comte de l'Empire, s�nateur, pair de France (18), avait pr�cis�ment �pous� en 1783 Agathe Pierron, fille de Fran�ois et d'Anne-Louise Helluy, qui eut dans sa dot la plus grande partie des propri�t�s de sa famille sur la commune d'Herb�viller. Le m�nage ne fut pas heureux, Klein r�pudia sa femme en 1808 pour s'unir avec une comtesse d'Arberg : il ne revint pas dans son petit pays. Agathe Pierron se retira jusqu'� sa mort survenue en 1820, � Herb�viller, et son fils, �douard Klein, officier en demi-solde apr�s 1815, vint habiter Lun�ville. En 1840, il vendit ses deux vignes, celle �� derri�re l'�glise � pour 750 F � Verdenal, meunier � Og�viller, et le �� vieux vignoble � pour 700 F � Prud'homme, d'Herb�viller. Lorsque lui-m�me mourut en 1843, ses filles vendirent � leur tour le reste des terres ayant appartenu aux Pierron � Herb�viller.
Dans le d�tail de cette vente, dat� de 1852, nous retrouvons pour la derni�re fois les acquisitions effectu�es si patiemment et avec tant de t�nacit� pendant un demi-si�cle par les Pierron. Mais ils r�sidaient � Herb�viller : du jour o� leurs descendants, appel�s � d'autres destin�es, quitt�rent leur lieu d'origine, le lien se trouva rompu.
Il s'agissait en tout d'une vingtaine d'hectares de culture ou de pr�s, chiffre d�j� assez �lev� pour un seul propri�taire dans un village lorrain - r�partis entre les bans de Saint-Martin, Herb�viller, Bl�merey (19), Dom�vre et Chazelles (20). Le prix de vente fut au total de 40 000 F, ce qui prouve que la valeur absolue de la terre avait baiss�. Par ailleurs, la population de la commune diminuait lentement : 635 habitants en 1800, 553 en 1860.
Chaque ban se subdivisait en saisons et les saisons en cantons ou lieudits, aux termes d'un morcellement en tr�s petits lots qui correspondront aux num�ros du cadastre.
La culture dans chacun de ces cantons �tait lou�e. Nous croyons devoir donner ci-apr�s les noms de ces locataires de 1852, car beaucoup d'entre eux achet�rent les parcelles dont ils avaient ainsi la charge; les habitants actuels d'Herb�viller retrouveront certainement sur cette liste les noms de leurs anc�tres et pourront ainsi mieux conna�tre l'histoire de leurs propri�t�s :
Jean-Fran�ois Cagelot, Joseph Didier, de Saint-Martin, Martin Philippe, berger � Saint- Martin, Vve Maurice, de Bl�mezey, Nicolas Simon, Jean-Fran�ois Melnotte, Marguerite Duprey, Jean-Baptiste Hasselot, Joseph Guise, d'Herb�viller, Joseph Sisler, Jean-Pierre Toulon, Antoine Voinot, Jean-Baptiste Pierrat, Nicolas Breton, Jean-Claude Simon, Charles Dourdain, d'Herb�viller, Mangin et Munier, d'Herb�viller, Dominique Putegnat, de Saint-Martin, Alexandre Godchaux, d'Herb�viller.
Une sorte de loi tendait ainsi, en Lorraine, � ramener la propri�t� arable � ce qu'une seule famille pouvait cultiver.
Hubert ELIE

(1) Page 42.
(2) Village voisin d'Herb�viller � droite de la Vezouse.
(3) P�turage.
(4) �tendue d'une juridiction ou d'une paroisse.
(5) Officier d�positaire du marteau avec lequel on marquait les bois.
(6) Juridiction de premi�re instance concernant les bois.
(7) Verge, � peu pr�s le quart d'un arpent.
(8) Homm�e, quantit� qu'un homme peut labourer en un jour. C'est en Lorraine seulement que ce terme signifiait une division de la terre d'environ 20 ares.
(9) Jardins.
(10) Qui ont cours.
(11) Terrain o� cro�t le chanvre.
(12) E. AMBROISE, Les derniers seigneurs du district de Bl�mont, M. A. S. 1913-1914.
A. DEDENON, Histoire du Bl�montois dans les temps modernes, Nancy. Vagner, 1930.
(13) Archives de Meurthe-et-Moselle, Q 431, n� 29.
(14) Id., nos 9, 31.
(15) Id., nos 38.
(16) Id., nos 9, 41.
(17) Archives de Meurthe-et-Moselle, Q 1033.
(18) DEDENON, Notice sur le g�n�ral Klein, dans Le Pays lorrain, ao�t 1930.
(19) Sur un �pisode concernant cette commune avant la R�volution, cf. abb� MATHIEU, L'ancien r�gime dans la province de Lorraine et Barrois, p. 264.
(20) Id., p. 263.

 

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