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Est-R�publicain
3 mai 1919
La renaissance de Bl�mont
M�thode et courage. - Une ville d'histoire.
Le pass� assure l'avenir
Parmi les villes lorraines o�
l'oeuvre de la reconstruction se poursuit avec le plus de
m�thode et de courage, il faut citer Bl�mont, dans
l'arrondissement de Lun�ville.
Bl�mont, situ� tout � proximit� du front, a beaucoup souffert,
quoique ne pr�sentant pas heureusement, l'aspect de compl�te
d�solation de certains autres bourgs. Il y a une lourde besogne
� r�aliser, mais enfin elle ne d�passe pas les forces humaines.
La municipalit� de Bl�mont a confi� la direction des travaux
communaux de reconstruction � un architecte nanc�ien, actif,
jeune, aux initiatives hardies, M. L. Lavocat, et ils seront
ex�cut�s par une entreprise dont il serait superflu de faire
l'�loge : la maison France Lanord et Bichaton.
Passons rapidement en revue les �difices communaux de Bl�mont
qu'il s'agit de reconstruire. C'est d'abord le bel h�tel de
ville � arcades ; il a �t� bien ab�m� et les Allemands se sont
servis de sa salle des f�tes pour y organiser de bruyantes
r�jouissances ; il faudra ensuite refaire l'�glise qui
pr�sentait un certain caract�re.
Le �� saint Maurice �, patron de Bl�mont, dont la statue de
quatre m�tres de hauteur s'�levait entre les deux tours, a �t�
atteint par un obus et projet� sur le perron o� il s'est
naturellement bris�.
Le vieux coll�ge a subi �galement de s�rieuses atteintes ; il
connut, jadis, une heure de c�l�brit� ; les enfants du pays de
Metz suivaient ses cours en grand nombre ; nous avons conserv�
un tr�s vivant souvenir d'une visite que nous y f�mes il y a
bien des ann�es d�j�. Son jardin �tait charmant, propice aux
r�veries, et on croyait qu'allait appara�tre, au d�tour d'une
charmille, le bonnet carr� des professeurs d'autrefois.
Le coll�ge a re�u, pendant la guerre une compagnie de Chinois
qui est maintenant � Gogney, et on peut dire que �� Fils du Ciel
� n'ont point contribu� � son meilleur entretien.
M. Lucien Lavocat, qu'un certain nombre de Bl�montois ont bien
voulu charg� �galement, de leurs int�r�ts particulier, s'occupe
aussi des �coles communales et maternelles, de l'hospice de la
ville, des lavoirs publics.
L'oeuvre de la reconstruction ,a � sa t�te l'excellent M. Bentz,
maire et conseiller g�n�ral. M. Bentz habite encore, pour le
moment, � Malz�ville, dans la maison de M. Edgar Thomas,
imprimeur, mais, sous peu de jours, il compte rentrer dans son
cher Bl�mont.
M. Bechmann, fabricant de velours ; M. le docteur Hanriot,
pr�sident de la Soci�t� de tir jadis si prosp�re ; M. Lucien Labourel, fils du toujours regrett� ancien maire, lui pr�tent
leur g�n�reux et absolu concours.
Pauvre Bl�mont ! Avant la grande �preuve, il comptait 1,670
habitants. 800 � peine sont revenus au foyer, le long de la
Vezouze et de son charmant affluent la Voise.
La maison de M. Burrus y montre ses murs lamentables, non loin
des ruines du ch�teau des comtes.
Ce ch�teau de Bl�mont a une glorieuse histoire. En 1636, le duc
de Saxe-Weimar s'approcha de la ville ; elle �tait d�fendue par
un Klopstein qui la br�la et se r�fugia ensuite dans le ch�teau.
Il y fit une r�sistance h�ro�que. Furieux, au m�pris du droit
des gens, les re�tres le pendirent � la porte et pass�rent la
garnison au fil de l'�p�e. En 1638 M. de Feuqui�res br�la
l'antique manoir des sires, puis comtes de Bl�mont,
irr�ductibles ennemis, pendant des si�cles des �v�ques de Metz.
La petite ville est d'ailleurs tout impr�gn�e de tradition ;
elle remonte au lointain des �ges, puisque, d�s 661, il en est
question dans la charte de l'abbaye de Senones.
Pour ne parler que des temps modernes, elle est la, patrie de
maints officiers et du grand juge de Napol�on, R�gnier, a�eul de
ce charmant duc de Massa, qui a laiss� un si brillant souvenir
dans-la soci�t� parisienne des Tuileries et de Compi�gne.
Nous avons encore connu � Bl�mont le g�n�ral Marin, fils d'un
tanneur, et qui passait pour un des premiers cavaliers de la
g�n�ration d'apr�s 70.
Bl�mont revivra, ses demeures ont des soubassements solides. Et
puis, voyez-vous, l'exemple du pass� est toujours l� pour donner
des motifs de haute esp�rance en l'avenir. Au 17e si�cle,
ravag�e par la guerre, Bl�mont n'avait plus que 75 feux ; 100
ans plus tard, Bl�mont comptait 290 maisons et 400 m�nages.
Admirable vitalit�, merveilleuse �nergie de notre race lorraine,
toujours battue par les orages, toujours sortir plus vaillante
des temp�tes atroces, du fer et de la flamme !
L�ON PIREYRE. |