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II
Plus de sept ans s'�taient
�coul�s depuis que Chr�tienne avait, bien malgr�
elle, quitt� ce pays. Elle le trouvait
politiquement tr�s chang�. Pendant les six
premi�res ann�es, tout le pouvoir avait
appartenu � ce comte de Vaud�mont qu'elle avait
si longtemps maintenu dans une condition
subalterne, et c'est lui qui avait sign� les
lettres patentes. Son fils Charles �tait, en
1559, devenu majeur, non du fait de son �ge,
seize ans moins un mois, mais du fait de son
mariage, la Coutume de Lorraine, titre IV,
article 12, d�clarant majeures toutes personnes
mari�es. Le contrat avait �t� sign� le 19
janvier, le mariage religieux c�l�br� le 22, et
c'est le contrat seul qui avait produit la
majorit� puisque, d�s le lendemain 20, Charles
III signait ses premi�res lettres patentes (46).
D�s lors, il gouverne, mais comme il est en
France et y restera encore plusieurs mois, il y
a une sorte de partage, sinon du pouvoir, du
moins des fonctions. : Charles signe quelques
actes importants, par exemple la nomination d'un
chef du Conseil, d'un grand ma�tre des finances,
d'un premier chambellan, d'un secr�taire d'Etat,
ou le don d'une for�t (47) ; Vaud�mont, qui
r�side � Nancy ou � Nomeny, et qui agit, non
plus comme tuteur, mais comme lieutenant g�n�ral
de son neveu, signe les actes beaucoup plus
nombreux qui r�glent des affaires secondaires.
Aucun document n'�mane plus de Chr�tienne, sauf
ces lettres patentes du 31 octobre 1559 qui
constatent sa pr�sence � Nancy, mais c'est l� le
don d'une pr�bende en la coll�giale de Deneuvre,
et nous avons expliqu� plus haut qu'elle avait
toujours conserv� la collation des b�n�fices
eccl�siastiques.
Il est � remarquer que le duc et sa m�re sont
rentr�s en m�me temps en Lorraine, peut-�tre �
pareil jour, puisque Charles III est � Nancy le
3 novembre au plus tard (48). A-t-il tenu � �tre
dans sa capitale pour y recevoir sa m�re, ou
bien a-t-il craint qu'arrivant la premi�re, elle
ne s'installe au pouvoir et ne fasse quelques
difficult�s de le lui restituer ?
Si la Lorraine est chang�e, Chr�tienne ne l'est
pas moins. Brant�me nous affirme qu'elle est
encore belle, mais elle n'est plus jeune,
puisqu'elle a trente-huit ans, et les projets de
la remarier, continuels dans les premi�res
ann�es de son veuvage, ont cess�. C'est le lieu
d'�num�rer ces projets dont plusieurs paraissent
n'avoir �t� que des bruits publics sans
consistance, comme il s'en produit toujours, et
de notre temps encore, au sujet des princesses
du sang. En 1547, on parle de son mariage, avec
le fils de Sigismond-Auguste, roi de Pologne, et
comme elle va alors � la di�te d'Augsbourg, on
veut que ce soit pour arranger cette union
d�sir�e par l'empereur (49). Selon Brant�me,
Fran�ois, fils a�n� de Claude, duc de Guise,
aurait d�sir� l'�pouser et lui en aurait parl� ;
tr�s fi�re, elle aurait r�pondu qu'elle ne
voulait pas devenir la femme d'un cadet de la
maison de Lorraine apr�s l'avoir �t� de l'a�n� ;
Guise, bless� de ce m�pris, aurait, en 1552,
conseill� � Henri II de la traiter avec rigueur
(50). Chr�tienne �tait veuve depuis juin 1545
et, en d�cembre 1549, Fran�ois de Guise �pousa
Anne d'Est�, fille du duc de Ferrare ; c'est
donc entre ces deux dates que se placerait cette
demande en mariage, qui reste hypoth�tique,
puisqu'elle n'est rapport�e que par Brant�me,
trop friand d'anecdotes pour s'inqui�ter
beaucoup si elles sont vraies. En 1550,
Chr�tienne va � une nouvelle di�te d'Augsbourg,
et alors il est question de l'unir au duc
d'Holstein, fr�re du roi de Danemark ; il semble
que Charles-Quint d�sirait cette union, mais
elle refuse de voir Holstein et M. Zeller croit
qu'elle r�vait d'�pouser son cousin germain,
l'infant don Philippe, qui sera Philippe II,
veuf depuis 1545 de Marie de Portugal, et qui
n'�pousera Marie Tudor qu'en 1554 (51). En 1551,
c'est � Emmanuel-Philibert, fils a�n� du duc de
Savoie, que Charles-Quint veut donner sa ni�ce
(52). Ce prince l'avait bien servi � la guerre,
et il �tait tout � fait dans la mani�re de cet
empereur de r�compenser les services par des
mariages brillants, sans trop se pr�occuper de
l'avis des int�ress�es ; d'ordinaire les
princesses de sa famille acceptaient docilement
ses d�cisions, mais cette fois il ne r�ussit
pas, peut-�tre parce que Chr�tienne savait plus
jeune qu'elle de six ans celui qu'on lui
destinait. Enfin, en 1553, un ambassadeur de
Venise annonce que Fr�d�ric, �lecteur palatin,
beau-fr�re de Chr�tienne, songe � marier
celle-ci � Albert, margrave de Brandebourg.,
afin d'exciter ce prince contre le roi
usurpateur du Danemark (53).
Maintenant qu'il n'est plus question de
Chr�tienne, trop �g�e pour convoler de nouveau,
c'est � ses filles, encore bien jeunes, Ren�e
quinze ans, Doroth�e quatorze, que les faiseurs
de nouvelles veulent donner des �poux. Fran�ois
II a �t� sacr� � Reims le 18 septembre 1559 ;
Charles 111 et sa femme Claude assistaient � la
c�r�monie, apr�s laquelle le roi et Marie Stuart
les reconduisent jusqu'� Bar-le-Duc. Il faut
trouver un motif secret � cette d�marche bien
naturelle et Chantonnay, ambassadeur du roi
catholique aupr�s du roi tr�s chr�tien, s'en
charge : dans une lettre � la duchesse de PRime,
il indique que la duchesse douairi�re de
Lorraine viendra aussi � Bar avec ses filles et
qu'on traitera du mariage de celles-ci avec les
fils du duc Fran�ois de Guise (54). Nous verrons
plus loin que ces deux jeunes filles se
marieront, non pas en France, mais en Allemagne,
unions bien conformes aux sentiments
imp�rialistes de leur m�re.
Car celle-ci est toujours aussi attach�e � sa
famille maternelle, c'est-�-dire � la maison
d'Autriche, et elle le prouve lorsque son cousin
germain, qui sera deux ans plus tard l'empereur
Maximilien II, est couronn� roi des Romains. En
plein hiver, elle entreprend un long voyage pour
assister � la c�r�monie qui se fait � Francfort
le 24 novembre 1562. Ce qui lui vaut une mission
de Catherine de M�dicis, avec laquelle elle est
alors en relations amicales, et qui la qualifie
��ma soeur �. La reine l'approuve de n'avoir pas
emmen� avec elle sa belle-fille Claude, puis
sachant que Maximilien a des sympathies pour le
protestantisme, elle prie la duchesse
d'expliquer � lui et aux princes allemands les
causes de la r�cente guerre de religion et de
d�mentir ce que le prince de Cond� leur a fait
croire (55).
D'autre part, Chr�tienne va � Reims avec son
fils et sa bru pour le sacre de Charles IX, qui
a lieu le 5 mai 1561, et elle fait dans la ville
cette entr�e pompeuse qui choque un peu
Catherine de M�dicis (56). A-t-elle donc
renonc�, peut-�tre � la pri�re de Charles III et
de Claude, � son attitude hostile envers la
maison de Valois ? Va-t-elle enfin observer
cette neutralit� dont l'oubli lui avait valu de
si cruelles �preuves ? Il s'en faut. Si elle a
maintenant des rapports de courtoisie avec les
souverains de la France, si elle leur rend �
l'occasion de menus services, elle reste
toujours Habsbourg dans le fond de sa pens�e et
de son c�ur, et ne songe qu'� �tre utile aux
deux branches de cette maison, celle de Madrid
et celle de Vienne. On le vit bien en 1564 dans
deux circonstances : au mois de mars, le
cardinal Granvelle, principal ministre de
Philippe II, se rendant des Pays-Bas en
Franche-Comt�, devait n�cessairement traverser
la Lorraine, mais ne comptait point passer par
Nancy. La duchesse lui envoya un de ses
gentilshommes pour l'engager � s'arr�ter dans
cette ville et il fit un d�tour en vue de la
satisfaire. Il ne resta pas plus de vingt-quatre
heures � Nancy, les 18 et 19 mars, mais cela
suffit � Chr�tienne pour se plaindre de beaucoup
de personnes : de sa bru qui repr�sentait � la
cour de Lorraine l'influence fran�aise, du roi
de France et de sa m�re auxquels elle pr�tait
des desseins pervers, de son cousin, Philippe
II, et de son oncle, l'empereur Ferdinand Ier,
qui ne lui t�moignaient pas assez d'attachement
et ne paraissaient pas s'int�resser � ses
projets sur le Danemark. Granvelle et Chr�tienne
se connaissaient depuis longtemps, puisqu'ils
avaient n�goci� ensemble � Cercamp et �
Cateau-Cambr�sis, qu'auparavant ils avaient
fr�quent� la cour de Bruxelles ; ils n'eurent
pas de peine � s'entendre pour contrebattre
l'influence fran�aise en Lorraine (57).
Puis, un fils, qui sera le duc Henri II, �tait
n�, le 8 novembre 1563, du mariage de Charles
III et de Claude de France. Dans les familles
princi�res, le choix des parrains et des
marraines avait toujours une signification
politique. On le vit bien pour le bapt�me
d'Henri, qui se fit � Bar-le-Duc, le 7 mai 1564.
Le roi Charles IX et sa m�re Catherine devaient
tenir l'enfant sur les fonts, mais Chr�tienne
proposa - et imposa - en outre le roi Philippe
II et elle-m�me, de sorte que le jeune Henri
aurait deux parrains et deux marraines, au
m�pris d'un d�cret du concile de Trente qui
interdisait cette pluralit�. La th�ologie �tait
sacrifi�e � la politique. Elle aurait voulu
faire �chouer cette c�r�monie, car se rappelant
ses �preuves de 1552, elle se figurait que, sous
pr�texte du bapt�me, Charles IX viendrait avec
une forte arm�e et mettrait la main sur la
Lorraine. Rien de tel ne se produisit. La cour
de France arriva � Bar d�s le 1er mai avec une
suite nombreuse ; on y voyait le po�te officiel,
Pierre de Ronsard, qui ne manqua pas d'�crire
des vers de circonstance. Le roi donna des f�tes
splendides qui laiss�rent aux habitants du
Barrois mouvant une haute id�e de la puissance
fran�aise. Philippe II, qui r�sidait alors �
Madrid, �tait repr�sent� par le comte de
Mansfeld, gouverneur du Luxembourg ; ce
personnage subalterne et peu accompagn� fit
assez pi�tre figure et Chr�tienne, nous l'avons
dit en retra�ant son caract�re, trouva mesquine
la bague de 3.400 �cus qu'il lui offrit au nom
de son ma�tre. Sur tous les points, la maison
d'Autriche �tait �clips�e par la maison de
France, au grand d�pit de l'orgueilleuse
duchesse. Elle manifesta sa mauvaise humeur en
se disant malade et en arrivant avec ses deux
filles au dernier moment (58).
Si Chr�tienne n'a pas toujours � se louer de la
cour de France, ni m�me des cours de Vienne et
de Madrid, en revanche elle a les meilleurs
rapports avec la cour de Rome. Dans les
instructions qu'il donne en 1567 � Piersanti,
son envoy� en Lorraine, le pape, saint Pie V,
loue sa vertu, sa prudence, sa pi�t�, son z�le
pour la foi catholique. Elle-m�me, �crivant � ce
pape en 1566, proteste que son fils et elle
seront toujours de d�vou�s serviteurs du
Saint-Si�ge et mettront tous leurs soins �
maintenir leurs sujets dans la foi catholique
(59). Vers le m�me temps, un acte pontifical
permet � Chr�tienne, � son fils et � ses filles
de choisir un clerc qui aura le pouvoir pour les
absoudre de toute censure eccl�siastique (60).
La duchesse tenta d'utiliser ces bonnes
dispositions de la cour de Rome pour faire
aboutir une entreprise de son fils. Depuis
l'occupation de Toul par la France en 1552,
l'�v�que de Toul, qui �tait alors Toussaint d'Hoc�dy,
�tait fort embarrass� par le temporel de son
�v�ch� : il lui fallait le d�fendre contre les
attaques des huguenots, contre les pillages des
arm�es qui passaient sans cesse dans cette
r�gion fronti�re, contre les officiers du roi de
France qui voulaient s'en emparer. Il s'avisa,
en 1562, de le vendre au duc de Lorraine qui
�tait plus que lui de force � le prot�ger. Mais
l'accord du duc et de l'�v�que ne suffisait pas
pour r�aliser ce transfert de territoire : le
chapitre de Toul protesta avec �nergie en 1563,
le pape et l'empereur cass�rent la cession en
1564. Chr�tienne �crivit � Pie V, � son oncle,
Ferdinand Ier, pour les prier de renoncer � leur
opposition, mais n'obtint rien ; Rome alla
jusqu'� menacer d'excommunication Charles III et
Hoc�dy s'ils persistaient dans leur dessein, et
l'�v�que, effray�, r�voqua la cession en 1565.
Le 24 mars de cette ann�e, Chr�tienne �crivait
encore � Granvelle pour le faire intervenir dans
cette n�gociation (61).
Toutes ces affaires si vari�es ne suffisaient ni
� l'activit� de Chr�tienne, ni � son ambition ;
elle en eut encore une autre qui fut son ��grand
dessein � et sa pens�e de tous les instants :
r�cup�rer le tr�ne de Danemark qui avait �t�
ravi � son p�re, Christiern II, en 1523, apr�s
quatre ans seulement de r�gne. Quand elle �tait
encore fort jeune, sa tante, la reine de
Hongrie, avait d�j� fait, en 1539, une tentative
pour conqu�rir le Danemark avec l'aide des ducs
de Mecklembourg et d'Oldenbourg, et le rendre �
ses ni�ces ; elle avait �chou� (62). Ni elle ni
son fr�re n'avaient �t� d�courag�s, car, en
1546, Charles-Quint �crit � Marie pour lui
signaler des n�gociations en vue d'assurer �
leurs ni�ces au moins une indemnit� ; il est au
reste d'avis de faire la sourde oreille, preuve
qu'il envisage une reconqu�te totale (63).
Pendant les vingt-cinq ans o� elle gouverne les
Pays-Bas, Marie de Hongrie a des relations
extr�mement tendues avec le Danemark ; il y a
des actes de piraterie continuels entre Danois
et N�erlandais, et le roi de Danemark ferme le
Sund aux marins des Pays-Bas. Chr�tienne est
donc encourag�e par l'exemple de son oncle et de
sa tante � revendiquer sa couronne.
Cependant elle se tient tranquille tant qu'elle
gouverne la Lorraine, ayant assez � faire dans
ses duch�s et �tant trop loin pour agir sur le
Danemark. Mais quand son fils gouverne, elle a
des loisirs. De plus, en 1559, elle apprend en
m�me temps la mort de son p�re Christiern II, et
celle de Christiern III, fils de celui qui
l'avait renvers�. Dans l'�t� de 1560, elle fait
le voyage d'Heidelberg pour se concerter au
sujet des affaires du Danemark avec sa s�ur
a�n�e, Doroth�e, veuve depuis 1556 de l'�lecteur
palatin (64). Elle n'aboutit pas. En 1562, le
nouveau roi de Danemark, Fr�d�ric II, lui fait
des avances et propose une entrevue pour arriver
� une r�conciliation. Il charge le porteur de sa
lettre, un certain Paul de Zara, de s'entendre
avec Chr�tienne, - ��Votre Dilection �, comme il
l'appelle, - sur le lieu de cette entrevue,
Munster ou Oldenbourg, et sur l'�poque. Pour ne
pas s'y rendre, Chr�tienne pr�texte les affaires
de France ; la premi�re guerre de religion vient
d'�clater, son fils est le beau-fr�re du roi
Charles IX, le cousin du duc de Guise, qui
commande l'arm�e ; elle ne peut s'absenter en un
pareil moment (65). Il est clair que, pas plus
que son oncle et sa tante, elle ne veut
envisager une transaction.
Puisqu'elle repousse tout accommodement, elle
est cons�quente avec elle-m�me, mais insoucieuse
des droits de sa s�ur a�n�e en prenant hardiment
le titre de reine de Danemark. Dans un acte de
1563, elle se qualifie : ��Chrestienne, par la
gr�ce de Dieu, royne n�e de Dennemarck, Su�de,
Norv�gue, etc., duchesse douairi�re de Lorraine,
Bar, Milan, etc. � (66). Et cette pr�tention est
reconnue de divers c�t�s : en 1569, dans une
lettre � la duchesse de Nemours, Catherine de
M�dicis appelle Chr�tienne ��la royne de
Danemark � (67). Elle a ce m�me titre dans la
d�dicace d'un livre italien qui d�crit en 1568
le mariage de sa fille Ren�e avec le duc de
Bavi�re (68). Enfin, on lit Christiana regina
sous son portrait dans une fresque du clo�tre de
Saint-Di�, qui comm�more son passage dans cette
ville en mai 1547, mais a d� �tre peinte quelque
temps apr�s (69).
Elle ne s'en tient pas l�. Elle forme des plans
pour se mettre en possession de son royaume �t
des m�moires lui sont pr�sent�s par des
personnes expertes pour lui expliquer les
pr�paratifs � faire. Le cardinal Granvelle et le
baron de Bollwiller, un capitaine alsacien qui
est tr�s d�vou� � la maison d'Autriche et �
Chr�tienne en particulier, examinent ces
m�moires et donnent leurs avis qui sont
encourageants (70). Ces m�moires paraissent
r�dig�s en 1564, ils ne sont pas sign�s, mais la
duchesse devait conna�tre parfaitement leurs
auteurs. Le moment est favorable pour agir,
�crit l'un d'eux, car le roi qui occupe le tr�ne
de Danemark paye ses soldats en si mauvaise
monnaie, n'ayant pas cours en Allemagne, que
personne ne veut plus entrer � son service. Un
autre conseille de s'assurer l'appui du roi de
Su�de et du ��Moscovite �, c'est-�-dire du tsar
Ivan le Terrible. Quatre autres m�moires sont
rest�s manuscrits, ils n'ont aucune date, mais
leurs auteurs, sauf un, se font conna�tre : l'un
est Pierre Oxe, sans doute un Danois, qui est
tr�s attach� � Chr�tienne et qu'elle fit nommer
chambellan du duc et capitaine de Schaumbourg.
Un autre a pour titre ��Articles de l'homme
congneu sur le n�goce que l'on scait �, et
exprime l'opinion de l'�v�que d'Osnabruck. Le
troisi�me est r�dig� par Guillaume de Grombach
et Joachim Zitzeritz ; le dernier, �uvre
d'Herbert von Langsen, traite, non plus du
Danemark, mais de la Su�de qu'il faut enlever au
roi Gustave Vasa qui la tyrannise (71).
Rien de tout cela n'aboutit ; l'argent et les
alli�s manquaient sans doute, et ni le duc
Charles III, ni l'empereur, ni le roi d'Espagne,
ne voulaient risquer leurs forces dans une
entreprise aussi lointaine et aussi incertaine.
En 1569, Granvelle avertit Philippe II que
Chr�tienne songe toujours � recouvrer le
Danemark, que constamment elle lui �crit ou lui
fait �crire par son conseiller, Silliers, pour
qu'il prenne cette entreprise � c�ur. Je lui ai
r�pondu, ajoute-t-il, que le roi a d�j� assez
d'affaires sur les bras (72). Mais Chr�tienne ne
renoncera pas � ses vues sur le Danemark ; Elle
pensera � ce pays jusqu'� la fin de sa vie,
quand, retir�e en Italie, �g�e et malade, elle
est moins que jamais en �tat de conqu�rir un
royaume.
Ainsi, malgr� ses capacit�s r�elles, Chr�tienne
n'avait pas r�ussi dans ses entreprises au
dehors. Vers la fin de son s�jour en Lorraine,
elle eut une compensation par le brillant
mariage de sa fille a�n�e Ren�e, Il avait �t�
question de plusieurs partis pour cette jeune
fille, par exemple, en 1565 et 1566, du roi de
Su�de, de don Juan d'Autriche, du duc d'Urbin
(73), mais ces projets n'avaient pas abouti ;
elle avait maintenant environ vingt-quatre ans,
�ge auquel la plupart des princesses d'alors
�taient mari�es depuis longtemps. En 1567 parut
un autre pr�tendant, le prince bavarois
Guillaume, fils du duc Albert V, qui sera duc
lui-m�me en 1579 sous le nom de Guillaume V et
sera surnomm� le Pieux, ou le Religieux, � cause
de son attachement extr�me � l'Eglise
catholique. Le d�vouement � cette Eglise n'�tait
pas moindre dans la maison de Lorraine et ces
convictions communes rapprochaient les deux
familles et facilitaient leur alliance. Il y
avait du reste un interm�diaire puissant,
l'empereur Maximilien II, qui �tait proche
parent des deux �poux (74). Le contrat fut
pass�, le 3 juin 1567, � Munich (75). Peu apr�s,
et au plus tard en septembre, le prince bavarois
vint en Lorraine pour voir celle qui lui �tait
destin�e et pour la c�r�monie des fian�ailles
qui se fit sans doute � Bl�mont, r�sidence
habituelle de la m�re de Ren�e (76). Le mariage
fut c�l�br� le 22 f�vrier 15'68 (77), dans la
r�sidence de l'�poux, c'est-�-dire � Munich, o�
Chr�tienne �tait venue avec ses deux filles, o�
s'�tait rendu aussi le comte de Vaud�mont avec
sa femme et sa fille Louise, la future reine de
France, qui tenait la tra�ne de la mari�e (78).
Le contrat de mariage ne fut ratifi� par
Chr�tienne et Charles III que le 28 d�cembre
1568 (79).
Tout cela, ce sont en quelque sorte les affaires
�trang�res de la duchesse douairi�re. Il faut
voir comment elle se comporte dans l'int�rieur
du duch�. Pour y r�ussir, il serait bon de
conna�tre exactement o� elle r�side, mais nous
ne le savons que bien mal. Faute de documents,
il y a de telles lacunes dans son itin�raire
qu'on ne peut sans imprudence en tirer des
conclusions. Il semble qu'elle se partage le
plus souvent entre Nancy, la capitale des deux
duch�s, et Bl�mont, la capitale de son douaire,
sauf � para�tre quelquefois dans d'autres
villes, Bar-le-Duc, Ch�tel-sur-Moselle,
Gondrecourt, par exemple. Si elle vient
fr�quemment � Bl�mont, tr�s petite ville o� les
distractions ne doivent pas �tre nombreuses, c'e
n'est pas que l'administration de ce comt�
r�clame sa pr�sence, c'est que l� elle est seule
ma�tresse et ne rencontre aucune contradiction.
A Nancy, il en va autrement. Chr�tienne s'en
explique � Granvelle quand il passe en Lorraine
en mars 1564 et laisse voir qu'elle s'entend mal
avec sa bru, Claude de France ; elle se plaint
qu'on la dessert aupr�s de la reine-m�re,
Catherine de M�dicis, en lui r�p�tant que sa
fille n'a pas ce qui convient � son rang. C'est
faux, affirme Chr�tienne, car en un an elle a
d�pens� plus de 60.000 francs, rien que pour ses
menus plaisirs (80). Grave accusation, et qui
semble au moins exag�r�e, car en 1562, Claude
n'a re�u du mois d'ao�t au mois de d�cembre que
14.565 francs pour toute sa d�pense, ordinaire
et extraordinaire (81). Au vrai, Chr�tienne et
Claude appartiennent � deux g�n�rations
diff�rentes, qui n'ont pas les m�mes id�es, les
m�mes go�ts, et qui se comprennent mal. Surtout
elles repr�sentent deux politiques diff�rentes,
l'espagnole et la fran�aise, qui, en d�pit de la
paix de Cateau-Cambr�sis, continuent �
s'affronter.
Malgr� ces difficult�s avec Claude, la duchesse
douairi�re reste en bons termes avec Charles, et
quand celui-ci s'absente de ses Etats, ce qui
est fr�quent dans les premi�res ann�es du r�gne,
il confie la r�gence � sa m�re. Peu de temps
apr�s sa rentr�e en Lorraine, Charles III est
pri� par son beau-fr�re, Fran�ois II, de venir
le voir � Paris. Il accepte d'autant plus
volontiers qu'� ce moment ses sujets insistent
pour qu'il pr�te le serment habituel de
respecter leurs privil�ges ; il esp�re se
soustraire � leurs instances en s'�loignant. Au
d�but de 1560, en f�vrier sans doute (82), il
promulgue des lettres patentes disant : Il nous
est souvent n�cessaire de nous absenter de nos
duch�s, et par suite de les confier � une
personne s�re. Nous avons suppli� notre m�re, la
duchesse douairi�re Chr�tienne, de bien vouloir
assumer cette charge, parce qu'elle nous a
toujours port� affection de bonne m�re et parce
qu'elle est ��congnoissante et vers�e �s plus
haultes n�goces d'entre les plus grandz princes
chrestiens �. Elle a bien voulu condescendre �
notre requ�te et nous l'avons �tablie r�gente et
gouvernante en nos pays. Nous ordonnons � tous
nos vassaux et sujets de lui ob�ir comme � nous
m�me et nous promettons � notre m�re d'avoir
pour agr�able tout ce qui sera ordonn� par elle.
Voil� Chr�tienne heureuse et glorieuse, car elle
est de nouveau au pouvoir et elle y est seule,
elle n'a m�me plus pour la limiter le tr�s
faible contr�le de son beaufr�re, Nicolas, qui
signait apr�s elle les lettres patentes.
Maintenant, ces lettres portent une seule
signature, la sienne. Elle est plus ma�tresse en
Lorraine qu'elle ne l'a jamais �t�, mais ce
n'est que pour un temps assez court. Les lettres
�mises par elle sont comprises entre le 14 mars
et le 31 ao�t 1560, ce qui fait cinq mois et
demi de r�gence, - de r�gne. Toutes ces lettres
sont pareilles quant � leurs formules ; la
suscription est : ��Chrestienne de Danemarck,
duchesse douairi�re de Calabre, Lorraine, Bar,
Gueldre, Milan, comtesse de Bl�mont, r�gente et
gouvernante �s pays de nostre tr�s cher et tr�s
am� filz, Charles, par la gr�ce de Dieu duc de
.... � tous deux qui ces pr�sentes verront,
salut. � Et � la fin, on lit : ��Car tel est
nostre vouloir. En tesmoing de quoy, nous avons
� ces pr�sentes sign�es de nostre main fait
mectre et appendre le grand seel die nostre dict
filz. � Quant � la date, Chr�tienne ne se
conforme pas dans ces lettres � l'usage lorrain
qui �tait de commencer l'ann�e � la f�te de
l'Annonciation (25 mars) ; elle la commence �
P�ques, non pas sans doute parce que c'est
l'usage de France, mais parce que c'est l'usage
de ce Brabant o� elle a �t� �lev�e (83). Elle
est si habitu�e � ce style de P�ques qu'elle lui
restera fid�le jusqu'� la fin de sa vie, quand
elle r�sidera en Italie o� ce style n'a jamais
�t� en vigueur.
Pendant ce laps de moins d'une demi-ann�e,
Chr�tienne promulgua cinquante lettres patentes.
Vingtdeux traitent de menues affaires
administratives, nominations de fonctionnaires
et de pr�bendiers, acensements, confirmations
d'acqu�ts, autorisations diverses. Trois
seulement de ces actes m�ritent une mention : le
11 mai, Chr�tienne renouvelle pour trois ans, �
G�rard Fredeau, le bail de l'imp�t sur la sortie
des marchandises (84) ; Le 4 ao�t, elle cr�e �
Bussang, aux sources de la Moselle, un march�
franc tous les samedis, dans l'int�r�t des
ouvriers qui travaillent aux mines nouvellement
d�couvertes en ce lieu (85) ; le 17 ao�t, elle
prescrit aux religieux de l'ordre de saint
Fran�ois, qui errent dans le pays, au scandale
de tous, de rentrer dans leurs couvents, ou bien
d'exhiber les dispenses qu'ils pr�tendent avoir
(86). Les vingt-huit autres lettres sont des
lettres de r�mission pour meurtre. Dans le
chapitre sur la justice, nous avons not� que
lorsqu'elle exer�ait la tutelle, Chr�tienne
usait de son droit de gr�ce avec mesure et
discernement. Maintenant, elle para�t avoir le
pardon beaucoup plus facile et c'est ceci,
plut�t qu'un accroissement subit de la
criminalit�, qui explique ce nombre �lev� de
lettres de r�mission dans un temps si court.
Beaucoup des meurtres dont il s'agissait �taient
commis depuis longtemps et leurs auteurs,
craignant une punition s�v�re, s'�taient enfuis
des duch�s. Apprenant que Chr�tienne �tait
r�gente et qu'elle se montrait cl�mente, les
coupables rentr�rent, lui pr�sent�rent leurs
suppliques et re�urent d'elle des lettres de
r�mission qu'ils n'auraient sans doute pas
obtenues de son fils. Faire gr�ce n'�tait-il pas
pour la duchesse une fa�on d'affirmer son
pouvoir ?
La duchesse fut encore r�gente � deux reprises,
en ao�t 1561 et en juillet 1566 (87). Mais ces
nouvelles r�gences furent beaucoup plus br�ves
et ne furent pas marqu�es par une aussi grande
activit� de la titulaire. C'est sans doute dans
l'un de ces cas que Charles III transmit le
pouvoir � sa m�re par des lettres sans date, o�
il la loue de s'�tre ��employ�e � la
pacification universelle de toute l'Europe,
selon qu'il est notoire � (88).
Pr�cis�ment peut-�tre parce qu'elle s'�tait
montr�e indulgente � des meurtres dont beaucoup
avaient �t� commis au sortir des cabarets,
Chr�tienne se montra s�v�re pour ces maisons,
causes de tant de disputes, de tant de sang
vers�. Une premi�re ordonnance, du 21 ao�t 1560,
est faite pendant cette longue r�gence dont il
vient d'�tre question et doit s'appliquer aux
deux duch�s de Lorraine et de Bar ; elle
interdit la fr�quentation des cabarets, � peine
de 30 francs d'amende. Une seconde, du 22 ao�t
1565, �tablit la prison en cas de r�cidive ; la
derni�re, du 6 mars 1566, porte l'amende de 30 �
50 francs (89). N'ayant pas le texte, mais
seulement de br�ves analyses de ces diverses
ordonnances, nous ne savons pas si les deux
derni�res sont faites pour l'ensemble de l'Etat
lorrain, ou seulement pour le douaire de la
duchesse. Ce qui reste acquis, c'est que cette
femme fut un adversaire d�cid� ^ de l'ivrognerie
et par suite un pr�curseur.
Bien qu'elle n'e�t plus qu'� de rares
intervalles un Etat � gouverner et son prestige
� maintenir, elle menait grand train et avait �
son service un personnel nombreux et de choix.
Il est curieux de comparer les maisons de
Chr�tienne, duchesse douairi�re, et de Claude,
duchesse effective. Celle-ci a autour d'elle
huit dames d'honneur et huit demoiselles
d'honneur (90) ; en 1561, sa belle-m�re a douze
demoiselles d'honneur ; elle a en outre huit
gentilshommes dont le plus en vue est ce
Fran�ais �migr�, M. de Montbardon, que nous
avons d�j� cit� plusieurs fois, trois
conseillers, deux aum�niers, un m�decin, un
chirurgien, un apothicaire ; elle a aussi des
pages et quantit� d'hommes et de femmes dans les
emplois inf�rieurs (91). Une maison aussi
nombreuse co�te cher ; le compte de Pierre Jault,
secr�taire et tr�sorier de Chr�tienne, compte
allant du 14 d�cembre 1560 au 12 novembre 1563,
inscrit pour ce laps de temps 50.382 fr. 11 gros
de gages et 195.992 fr. 1 gros d'autres
d�penses; au total 246.375 fr. de Lorraine (92).
Pour faire face � ces grosses d�penses,
Chr�tienne a des ressources vari�es : en 1562,
le tr�sorier g�n�ral de Lorraine lui verse
21.900 fr. pour son entretien et celui de ses
deux filles pendant les 365 jours de l'ann�e, �
raison de 60 fr. par jour (93). Bien entendu,
cette sorte de pension lui est pay�e
r�guli�rement tous les ans. Elle ne couvre que
les d�penses ordinaires, les d�penses
exceptionnelles donnant lieu � des allocations
suppl�mentaires. Ainsi, en 1561, Chr�tienne
re�oit 6.000 fr. de l'argentier de son fils au
moment de partir ��pour le voyage de Reims �,
c'est-�-dire pour le sacre de Charles IX,
c�l�br� dans cette ville le 5 mai 1561 (94).
Elle peut ainsi tenir son rang � cette imposante
c�r�monie et fait � Reims cette entr�e qu'a
d�crite Brant�me, dans un carrosse superbe
tra�n� par quatre chevaux blancs de toute beaut�
attel�s de front (95). Puis elle a les revenus
de son douaire, compos� de deux fiefs d'�tendue
in�gale, Bl�mont et Deneuvre. Elle les
administre avec soin et voulant conna�tre
l'�tendue de ses droits sur ces terres, elle se
fait remettre, en avril 1564, tous les titres
qui les concernent ; quand elle les restitue un
an apr�s, en mai 1565, au Tr�sor des chartes de
Lorraine, elle a eu le temps de les �tudier de
pr�s (96). Cette m�me ann�e, elle fonde �
Bl�mont un bureau de charit� qui donne aux
voyageurs pauvres la passade, c'est-�-dire un
repas et un g�te (97). En 1569, elle favorise la
translation � Dom�vre, dans le Bl�montois, de
l'abbaye de chanoines r�guliers de Saint-Sauveur
(98).
Tout pr�s de Baccarat, qui appartenait �
l'�v�ch� de Metz, Deneuvre �tait le chef-lieu
d'une pr�v�t� lorraine et poss�dait une
coll�giale o� le corps du duc Fran�ois Ier,
l'�poux de Chr�tienne, avait �t� d�pos� plus
d'un an, en attendant qu'on p�t c�l�brer les
fun�railles. C'est aussi � Deneuvre qu'avait �t�
pass�, le 6 ao�t 1545, le pacte de tutelle entre
la duchesse et son beau-fr�re, Nicolas, �v�que
de Metz. De tels souvenirs devaient attacher
Chr�tienne � cette bourgade. Elle fit
reconstruire, de 1586 � 1589, le pont de pierre
lanc� sur la Meurthe, qui avait �t� emport� par
une crue (99). Le bois de la Moncelle �tait
rest�, semble-t-il, indivis entre Metz et
Lorraine et les habitants de Baccarat et de
Deneuvre y avaient des droits d'usage sur
l'�tendue desquels s'�levaient de fr�quentes
disputes entre ces deux communaut�s. Pour y
mettre fin, Chr�tienne passa, en 1567, avec
l'�v�que de Metz, un trait� qui lui assurait la
pleine propri�t� de 500 jours de ce bois (100).
Cette princesse r�sidait assez souvent �
Deneuvre, et, d�sirant lui �tre agr�ables, des
�tymologistes improvis�s, comme la Renaissance
en a produit beaucoup, pr�tendirent que ce nom
de lieu venait de Danorum opus et que le village
et son ch�teau auraient donc �t� construits par
de lointains compatriotes de Chr�tienne de
Danemark. On sait maintenant que la forme la
plus ancienne de ce nom est Danubrium, qui se
lit dans des chartes de ia premi�re moiti� du
XIIe si�cle, et qui parait venir du celtique,
Dano-briga, le ch�teau de Danos (101).
Et, enfin, Chr�tienne poss�da quelque temps et
exploita � son profit Rosi�res-aux-Salines. Le
28 mars 1563, Charles III lui fit une donation
viag�re de la saline, de la ville et de la
pr�v�t� de ce lieu pour l'indemniser de ce que
lui avait co�t� l'�ducation de ses deux s�urs
(102). Le cadeau n'�tait pas de grande valeur,
car l'exploitation de la saline �tait arr�t�e
depuis 1484, mais Chr�tienne la restaura, fit
reprendre le travail et mit sur la grande porte
ses armes avec une inscription qui relatait ses
titres, y compris celui de reine de Danemark, et
apprenait aux passants qu'on lui devait le
r�tablissement de cette saline (103). Le 17 mai
1585, elle fit une ordonnance pour r�gler la
marche de l'exploitation et d�terminer les
attributions des officiers attach�s � la saline
(104). Que se passa-t-il ensuite ? Chr�tienne
s'aper�ut-elle que l'entreprise rapportait peu,
ou m�me co�tait, que Rosi�res ne pouvait pas
lutter contre la concurrence des autres salines
lorraines ? Nous ne le savons pas ; ce qui est
certain, c'est que, d�s le 30 d�cembre 1565,
elle r�troc�dait la saline � son fils et que, le
15 janvier 1566, celui-ci lui assignait en
compensation une rente viag�re de 4.000 �cus au
soleil, soit 16.000 francs de Lorraine, sur la
caisse du tr�sorier g�n�ral (105). De plus,
Charles qui, en 1562, lui avait donn�, sa vie
durant, la jumenterie de Portieux, pr�s de
Rosi�res, transforma, le 1er juin 1566, ce don
viager en pur don, de fa�on qu'elle p�t engager
ou vendre cette jumenterie s'il lui plaisait
(106).
Il reste � �num�rer quelques faits plut�t
anecdotiques que politiques relatifs �
Chr�tienne pendant cette p�riode de sa vie. On a
peu de renseignements sur son �tat de sant� ; il
semble pourtant que, dans l'�t� de 1566, �tant �
Bl�mont, elle a fait une maladie assez s�rieuse
pour inqui�ter son fils et d�ranger ses projets.
Il se trouvait alors � la cour de France ; il en
partit en poste au mois de juillet pour se
rendre � Bl�mont, et apr�s un s�jour de peu de
dur�e dans cette ville, il en repartit au mois
d'ao�t, �galement en poste, pour retourner � la
cour, apr�s avoir distribu� 50 �cus d'or aux
gens de la maison de sa m�re (107).
Pr�c�demment, en novembre 1562, Charles III est
pass� � Bl�mont quand il se rendait � Francfort
pour le couronnement de Maximilien II. Comme
Chr�tienne assistait �galement � cette
c�r�monie, il est probable que la m�re et le
fils ont fait route ensemble de la Vezouse au
Mein. Mais avant, ils eurent une affaire de
famille � r�gler : Nicolas, comte de Vaud�mont,
l'extuteur de Charles III, se plaignait de
n'avoir pas re�u tout ce qui devait lui revenir
dans la succession de son p�re. Pour le
satisfaire, Charles III lui donna
Pont-Saint-Vincent qu'il r�unit � son comt� de
Chaligny, et ce don fut inscrit dans une
convention sign�e � Bl�mont le 21 novembre 1562
(108). Chr�tienne a d� assister � ces
n�gociations qui se passaient chez elle et, avec
sa dext�rit� de diplomate accomplie, aider � la
conclusion de l'arrangement entre l'oncle et le
neveu.
Mazarin se faisait gloire d'avoir donn� Colbert
� Louis XIV ; Chr�tienne a pu se louer d'avoir
donn� � son fils Thierry Alix, ce remarquable
fonctionnaire, qui, comme greffier, puis
pr�sident de la Chambre des comptes de Lorraine,
rendit de signal�s services, et qui trouva
encore le temps de r�diger d'utiles travaux
historiques et g�ographiques. C'�tait un prot�g�
de Chr�tienne qui l'avait connu jeune et aid�
dans ses �tudes. Alix est probablement l'auteur
d'un Discours sur la souverainet� du duch� de
Lorrame compos� en 1564 ; il y plaide la cause
de sa protectrice, disant au duc qu'il ne doit
se fier qu'� ses p�re et m�re pour la direction
de sa politique ; comme Charles III n'a plus de
p�re, c'est donc de sa m�re seule qu'il lui faut
prendre conseil (109). Celle-ci fut
reconnaissante et, lorsqu'en 1569 Alix fut nomm�
pr�sident de la Chambre des comptes, le duc
d�clara faire ce choix sur le conseil de sa m�re
(110).
Les grands personnages �taient souvent pri�s,
d'�tre parrains ou marraines d'enfants
appartenant � d'autres familles, parfois � des
familles tr�s modestes. A notre connaissance,
Chr�tienne se pr�ta deux fois � faire ces
fonctions. En novembre 1562, il s'agit d'une
fille d'une des premi�res maisons du duch�,
Christine Claude, fille de feu Olry du Ch�telet,
seigneur de Deuilly, et de Jeanne de Sc�peaulx,
qui est baptis�e dans l'�glise de la coll�giale
Saint-Georges de Nancy. Selon l'usage d'alors,
on lui donna un parrain, qui est Nicolas de
Lorraine, l'oncle du duc, et deux marraines,
Chr�tienne, la duchesse douairi�re, et Claude,
la duchesse r�gnante. L'enfant, qui faisait sous
de tels auspices son entr�e dans la vie, fit
bien son chemin ; elle devint demoiselle
d'honneur des filles de Charles III et �pousa
ensuite Jean d'Haussonville, seigneur de
Saint-Georges (111). En 1567, Chr�tienne est
marraine du fils d'un simple sommelier de
Lun�ville, Jacques Waltin, auquel elle donne le
pr�nom de Chr�tien (112).
CHAPITRE XII
CHR�TIENNE EN BAVI�RE ET EN ITALIE
I. Chr�tienne en Bavi�re (1568-1575), puis de
nouveau en Lorraine (1575-1578). - II.
Chr�tienne en Italie (1578-1590). - III. Sa mort,
ses fun�railles.
I
Le mariage de sa fille Ren�e
avec le prince h�ritier de Bavi�re fut un
�v�nement d�cisif dans la vie de Chr�tienne de
Danemark en lui assurant un point d'appui et au
besoin un asile hors de cette Lorraine o� elle
ne Ise plaisait gu�re. Nous avons dit les
raisons multiples qui la mettaient en mauvais
termes avec la noblesse lorraine, et par suite
avec toute la nation, puisqu'en Lorraine la
noblesse dirigeait l'opinion. Il serait utile de
conna�tre aussi quels rapports elle pouvait
avoir avec son fils et sa belle-fille ; par
malheur, ces rapports nous pouvons plut�t les
soup�onner que les conna�tre. Il n'y a, pour
cette p�riode de l'histoire lorraine, ni
m�moires, ni journaux intimes qui nous
r�v�leraient les secrets de la cour et de la
famille ducale ; les lettres missives ne
manquent pas, mais ne touchent gu�re � ces
questions d�licates. Les hauts personnages qui
les �crivent gardent sur leurs dissentiments une
discr�tion fort louable en somme, mais fort
d�cevante pour nous. Nous avons vu qu'en 1564,
Chr�tienne se plaint au cardinal Granvelle de sa
belle-fille. Le motif avou� de ces plaintes est
que la jeune femme d�pense trop ; leur vraie
raison nous para�t �tre que Claude a de
l'influence sur son mari et que l'influence de
cette fille de France combat celle de
Chr�tienne, toute d�vou�e � l'Empire et �
l'Espagne. En 1567, un Belge, le pr�v�t
Morillon, �crivant au cardinal Granvelle, lui
parle de la mani�re d'�tre de Charles III avec
sa m�re ��� laquelle il est fort subject et
ob�issant � (113). Le duc avait alors
vingt-quatre ans ; il est peu probable qu'il se
laiss�t mener aussi docilement que le croit cet
�tranger dont le t�moignage nous atteste surtout
l'esprit de domination de la duchesse
douairi�re.
Le mariage de Ren�e de Lorraine a �t� b�ni �
Munich le 22 f�vrier 1568. Sa m�re l'avait
accompagn�e jusque-l�, ce qui est normal. Ce qui
l'est moins, c'est que, la c�r�monie faite,
Chr�tienne est rest�e en Bavi�re. De Munich elle
adresse des lettres les 28 f�vrier et 1er avril
1568 � Chantonnay, fr�re du cardinal Granvelle,
et l'un des meilleurs diplomates de Philippe II
(114), le 29 avril, m�me ann�e, au roi Charles
IX (115). En 1569, elle est toujours en Bavi�re,
elle y est m�me malade, comme nous le dirons �
la fin de ce chapitre, et nous l'y trouvons
encore l'ann�e suivante. En effet, le 14 juin
1570, Charles III conf�re la r�gence de ses
duch�s � sa femme Claude pour aller visiter sa
m�re ��estant d�tenue de maladie au pays de
Bavi�re � (116). Et alors, elle a �lu domicile �
Friedberg, sur le Lech, pr�s d'Augsbourg ; il y
a l� un ch�teau du XVIe si�cle qui fut la
r�sidence habituelle de plusieurs princes de la
maison de Bavi�re. Elle �crit de Friedberg �
Chantonnay les 16 mai et 18 juin 1570 (117). En
1571, toujours de Friedberg, elle envoie des
instructions les 28 f�vrier, 9 et 11 juin, �
Louis de La Mothe, ma�tre des requ�tes de son
fils (118) ; le 20 d�cembre, elle donne l'ordre
d'apurer les comptes de son douaire, et Nicolas
Goutti�re, un de ses serviteurs, fait deux
voyages pour lui porter, � Friedberg, des fruits
de ses jardins de Bl�mont (119). D'autre part,
de janvier � juin 1571, une vingtaine de lettres
lui sont adress�es � Friedberg, en Bavi�re
(120). En 1572, elle �crit de Friedberg � son
fils le 2 avril et le 17 d�cembre ; de m�me en
1573, le 18 f�vrier, puis elle est le 12 juin �
G�ppingen, en Wurtemberg (121), mais pour
revenir bient�t en Bavi�re, car nous avons le
compte des d�penses qu'elle fit dans ce pays
d'avril � juillet 1573 (122). Nous voyons aussi
que Charles III donne 300 fr., en 1573, � un
charretier, pour mener � Friedberg cinq pi�ces
de vin qu'il lui envoie (123).
A la fin de cette m�me ann�e se produit un
�v�nement qui aurait pu la ramener en Lorraine :
Catherine de M�dicis, accompagnant son fils
Henri, qui va prendre possession du tr�ne de
Pologne, s�journe � Bl�mont du 29 novembre au 3
d�cembre 1573, et c'est l� que la m�re et le
fils se s�parent. Chr�tienne de Danemark
est-elle venue � Bl�mont, qui lui appartient en
propre, pour y recevoir ces h�tes illustres ? Il
ne semble pas, car elle n'est nomm�e ni dans les
M�moires de Marguerite de Valois, ni dans ceux
de Cheverny, qui rapportent bri�vement ce s�jour
� Bl�mont (124). Sans doute son fils s'est-il
charg� de faire les honneurs du domaine maternel
et Chr�tienne est-elle rest�e en Bavi�re,
boudant � la fois la cour de France et la cour
de Lorraine, comme elle l'avait fait dix ans
auparavant quand ces deux cours avaient �t�
r�unies pour le bapt�me de son petit-fils �
Bar-le-Duc. En 1574, elle est encore en Bavi�re,
car elle �crit de Friedberg � son fils le 7
juillet, et sa plus jeune fille, Doroth�e, qui
l'avait accompagn�e en Allemagne, �crit du m�me
lieu, le 8 novembre, au chapitre de Saint-Di�
(125). En 1575, toujours de Friedberg, elle
donne des ordres, le 28 f�vrier, pour
l'apurement des comptes de son douaire, et, le
26 avril, elle accorde une pension annuelle de
10 �cus � sa lavandi�re, Pentecoste C�sar (126).
Cette m�me ann�e, Charles III qui a fait peindre
par M�dard Chuppin, son peintre attitr�, les
portraits de ses fils, Henri et Charles, les
envoie � sa m�re en Bavi�re (127).
Et c'est peu apr�s, � la fin de 1575, que
Chr�tienne revient en Lorraine. Pour l'y d�cider
- ou l'y r�signer - il ne faut pas moins qu'un
�v�nement d'importance, le mariage de sa seconde
fille. Il semble que ce retour fut pr�par� par
des n�gociations entre la, m�re et le fils, car
en cette ann�e, Charles III lui d�p�che
successivement Adrien de Garanci�res, mar�chal
des logis de son h�tel, puis un tr�s haut
personnage, African, baron d'Haussonville,
mar�chal de Barrois, dont le voyage co�te un
millier de francs (128). Enfin, elle se d�cide,
et cette fois le duc lui envoie son muletier,
Pierre Andrault, avec huit mulets pour ramener
ses bagages (129). Chr�tienne arrive � Nancy en
novembre 1575, apr�s une absence de pr�s de huit
ans (130). Elle ne devait pas y retrouver sa
belle-fille, Claude, qui �tait morte le 20
f�vrier pr�c�dent.
Doroth�e avait trente ans accomplis, elle
�pousait Eric ou Ernest, duc de Brunswick et de
Lunebourg, qui, �lev� dans le luth�ranisme,
s'�tait fait catholique et mis au service de
Philippe II. C'est sans doute � la cour de
Munich que les futurs �poux s'�taient rencontr�s
et avaient sympathis�. Le contrat fut sign� �
Nancy le 30 novembre 1575 ; le mariage fut
c�l�br� � Nancy �galement, en la coll�giale
Saint-Georges, le 20 d�cembre. Il fut honor� de
la pr�sence d'une reine, Elisabeth d'Autriche,
veuve de Charles IX, qui retournait dans sa
famille en traversant la Lorraine (131).
Chr�tienne dut �tre fort satisfaite de la
pr�sence de sa petite-cousine � cette f�te et du
mariage m�me. Si son fils avait pris femme dans
la maison de France qu'elle n'aimait pas,, ses
deux filles �taient mari�es � des princes de ce
Saint-Empire qui avait toutes ses pr�dilections
et leurs �poux �taient des champions d�termin�s
de la cause catholique qu'elle-m�me soutenait de
son mieux.
Apr�s ce mariage de sa fille, la duchesse reste
deux ans et demi dans les Etats de son mari et
de son fils. On a peu d'indications sur cette
p�riode de sa vie. Elle entretient avec sa
famille autrichienne une correspondance suivie
dont il nous reste quelques bribes : en d�cembre
1576, des lettres de la veuve de Maximilien II,
mort le 12 octobre de cette ann�e, et de son
fils, Rodolphe II, qui la remercient de ses
condol�ances, r�clament ses pri�res pour le
d�funt et promettent de lui rendre service en
toute occasion, comme cet empereur lui-m�me l'a
toujours fait (132) ; deux lettres de don Juan
d'Autriche des 2 f�vrier 1577 et 5 f�vrier 1578,
qui la mettent au courant de ce qui se passe aux
Pays-Bas et la remercient de sa bonne volont�
pour les affaires du roi d'Esipagne (133).
Elle-m�me �crit de Pont-�-Mousson, le 19 mai
1577, � son gendre, le duc de Bavi�re, une
lettre de simple politesse qui ne nous apprend
rien (134). A la fin d'ao�t 1577, Charles III
est � Bl�mont, donc chez sa m�re (135). C'est
sans doute la derni�re fois qu'il y vient,
puisque, l'�t� suivant, celle-ci partira pour
l'Italie. Sait-il d�j� ce projet de voyage et
est-il venu pour l'en entretenir, peut-�tre pour
essayer de l'en dissuader ? Enfin, nous voyons
que, le 6 mai 1578, � Deneuvre, Chr�tienne
affranchit la maison qu'un de ses bourgeois de
Bl�mont poss�de � Fr�monville (136), dernier
acte, � notre connaissance, qu'elle signe avant
de quitter la Lorraine.
II
Car, pendant l'�t� de 1578,
Chr�tienne part pour l'Italie avec l'intention
ferme, semble-t-il, de s'y fixer et d'y terminer
sa vie. Quels peuvent �tre les motifs de cet
exode ? Brant�me, � la fin de la notice qu'il
lui consacre, explique qu'elle avait fait des
v�ux aux sanctuaires d'Italie, et qu'�tant
afflig�e de la goutte, elle voulait �tre �
port�e des bains o� elle pourrait se soigner
(137). Ce sont l� sans doute les raisons
officielles r�pandues dans le public, et qui
sont faibles. Il ne manquait pas en Lorraine de
sanctuaires v�n�r�s o� la duchesse aurait pu
satisfaire sa pi�t� ; il n'y manquait pas non
plus de stations thermales r�put�es. Les eaux de
Plombi�res �taient alors bien connues, puisque
le mari de Chr�tienne en avait us� en 1545, et
que, sans parler d'autres baigneurs moins
illustres, Montaigne fera, en 1580, le long
voyage de Bordeaux � Plombi�res pour venir s'y
baigner. Non loin de la Lorraine, les eaux de
Spa n'�taient pas moins renomm�es, car le duc
Charles III et son fils, le cardinal �v�que de
Metz, y feront diverses cures � la fin du XVIe
si�cle. Le climat de la Lorraine n'est pas
toujours agr�able, mais ne pouvait gu�re
effrayer une femme n�e dans le froid Danemark et
�lev�e en Belgique. Elle avait en Lorraine une
petite souverainet�, Bl�mont et Deneuvre, avec
des revenus assur�s. Enfin, elle ne pouvait plus
arguer de dissentiments avec sa bru, puisque
celle-ci �tait morte depuis trois ans. Les m�mes
raisons qui expliquaient sa retraite en Bavi�re
dix ans auparavant la d�cid�rent sans doute �
partir pour l'Italie : elle souffrait,
croyons-nous, d'�tre confin�e dans
l'administration de son douaire, de ne pas
gouverner son fils et l'Etat lorrain, de voir
Charles entretenir d'�troits rapports avec la
maison de France qu'elle n'aimait pas, et aller
tous les ans � Paris. Enfin, son esprit inquiet
et susceptible la faisait ne se trouver bien que
l� o� elle n'�tait pas, et, apr�s avoir go�t� de
la Lorraine, des Pays-Bas, de la Bavi�re, elle
voulut essayer de l'Italie, se rappelant
peut-�tre qu'elle y avait pass� une ann�e de sa
prime jeunesse, comme femme de Fran�ois Sforza,
et pensant y retrouver cette fra�cheur
d'impressions et cette all�gresse qui ne
d�pendent pas du lieu qu'on habite, mais de
l'�ge qu'on a.
Il semble que Chr�tienne se rendit en Italie en
passant par le col du Brenner et par Trente, car
en cette ann�e 1578, le duc paye 72 francs � un
homme de Bl�mont pour la d�pense qu'il a faite
de Trente � Nancy en ramenant son coche, ceci en
plus des 60 �cus que Chr�tienne lui avait remis
� Trente (138), Ce col du Brenner, qui s'ouvre �
1.367 m�tres de haut, est du reste un des plus
praticables des Alpes et cet itin�raire fit sans
doute passer la duchesse par Munich o� elle put
voir encore une fois sa fille Ren�e. C'est en
plein �t� qu'elle fit ce voyage, puisqu'� la fin
d'une lettre du 26 ao�t, le cardinal Granvelle,
qui �tait alors � Rome, annonce � Marguerite de
Parme que Chr�tienne vient d'arriver � Milan
(139). Elle commen�a, en vue de recouvrer la
sant�, par faire un p�lerinage � Notre-Dame de
Lorette, pr�s d'Anc�ne ; la maladie l'emp�cha de
pousser jusqu'� Rome et le pape Gr�goire XIII
lui �crivit pour lui exprimer ses regrets de ne
pas l'avoir vue (140). Et apr�s, elle alla
s'�tablir dans cette ville de Tortone, au sud du
P�, sur la route de Milan � G�nes, que son
premier mari, Fran�ois Sforza, lui avait
attribu�e comme douaire. Tortone, dit Mor�ri
dans son Dictionnaire, est une des plus petites
et des plus pauvres villes d'Italie ; aussi
est-ce sans doute par raillerie que les gens du
pays prirent L'habitude de l'appeler Madame de
Tortone, ��pas beau nom pourtant, ny digne
d'elle �, observe Brant�me (141). Et cependant,
elle faisait assez grande figure en Italie pour
causer, en 1580, une plaisante m�saventure au
cardinal Granvelle. Celui-ci, qui r�sidait alors
� Madrid, avait �crit � Marguerite de Parme,
retir�e en Italie, une lettre sur le dos de
laquelle il n'y avait que ��A Madame �. Au vu de
cette adresse, le service des postes du temps
n'h�sita pas � faire remettre la lettre �
Chr�tienne. Par bonheur, ajoute Granvelle, il
n'y avait rien dans cette lettre qui ne p�t �tre
lu (142).
Dans ce douaire de Tortone, la duchesse
pr�tendait �tre compl�tement ma�tresse. D�s
1564, elle demandait au cardinal Granvelle,
quand il passa � Nancy, de le poss�der en toute
souverainet� et non pas comme vassale de
Philippe II (143). Elle revint � la charge par
l'entremise de Jean de Pange, qui fut
ambassadeur de son fils aupr�s, du roi
catholique de 1580 � 1582, et pr�tendit que
Tortone lui appartenait en pleine propri�t� et
devait apr�s elle rester au m�me titre dans la
maison de Lorraine. Philippe consentit seulement
que la ville p�t �tre transmise � sa fille
Doroth�e (144). C'est l� tout ce que nous savons
sur ce douaire italien dont les titres et les
comptes, s'ils existent encore, doivent �tre
conserv�s dans la p�ninsule.
Nous sommes mieux inform�s sur l'administration
par Chr�tienne de son douaire lorrain. Malgr�
l'�loignement, elle est consult�e jusqu'� la fin
de sa vie sur les plus minimes affaires, par
exemple, en 1586 sur la vente des bl�s de ses
greniers, en 1587 sur une difficult� relative �
l'aide, en 1588 sur la nomination d'un clerc
jur� � Bl�mont et de chanoines dans la
coll�giale de cette ville. Ses ambitions ont d�
se restreindre � un �troit domaine, mais restent
toujours aussi tenaces. Le compte de ses
recettes et de ses d�penses pour 1589 nous a �t�
conserv� (145) ; on y voit qu'elle touche chaque
ann�e 27.750 fr. sur la saline de Salone, 16.000
fr. pour celle de Rosi�res, et que la taxe des
lettres patentes scell�es du grand sceau de son
fils lui rapporte 2.612 fr. Avec les produits
des terres de Bl�mont et de Deneuvre, la recette
totale de cette ann�e se monte � 74.431 fr. ; la
d�pense est de 53.988 fr., dont 12.614 fr.
envoy�s en deux fois � la duchesse, � Tortone,
et 25.000 fr. qui ont �t� vers�s au sieur de
Ch�tenoy, tr�sorier des guerres de Charles III ;
il reste donc un reliquat de 20.443 fr., qui
seront port�s en recette au compte de l'ann�e
suivante, 1590. Ainsi, les finances de
Chr�tienne sont dans une situation prosp�re, au
moins en cette ann�e 1589. En outre, quand est
lev�e une aide g�n�rale octroy�e par les Etats,
les sommes per�ues sur Bl�mont et Deneuvre ne
sont pas pour le duc, mais pour sa m�re, qui les
inscrit en recettes dans son compte de 1585
(146). En revanche, celle-ci, nous venons de le
dire, octroie de fortes subventions � la caisse
militaire de son fils.
Entre la Lorraine et Tortone, il y avait dans
les deux sens une correspondance administrative
continuelle. Les agents de Chr�tienne dans son
douaire lui envoient des rapports d�taill�s sur
l'�tat de ses affaires ; ainsi, en 1585,
Dominique Jacquemin, avocat � Nancy, lui rend
compte du voyage qu'il a fait � Bl�mont et �
Deneuvre pour visiter ses greniers (147), et
d'autres agents s'excusent d'avoir tard� � ou�r
les comptes de ces deux domaines, en faisant
valoir qu'ils �taient occup�s ailleurs au
service du duc, qu'ensuite la peste s'est
d�clar�e � Nancy et les a dispers�s (148).
Chr�tienne, de son c�t�, �crit en 1582 � ses
conseillers en Lorraine, qu'elle leur adjoint un
G�nois, Gieronimo Bozomo, pour les aider �
apurer les comptes de ses receveurs (149). Le 20
mars 1587, elle promulgue trois ordonnances
applicables � tout son douaire : la premi�re se
propose d'y pr�venir la disette, et, pour ce
faire, la duchesse ne voit pas de meilleur moyen
que de s�vir une fois de plus contre les
taverniers et cabaretiers, et de limiter
�troitement le nombre des convives aux repas de
bapt�mes, de noces, et de fun�railles. La
seconde est dirig�e contre l'usure et d�fend de
percevoir �n int�r�t annuel sup�rieur � 7 %. La
troisi�me assure le respect du dimanche et
interdit de s'occuper ce jour-l� d'oeuvres
serviles, sous peine d'une amende qui est de 10
fr. pour le premier d�lit, de 25 et de 50 fr. en
cas d'e r�cidives (150). Et le 26 avril 1590,
quatre mois avant de mourir, Chr�ti�nne nomme
encore pr�v�t de Deneuvre son sommelier, Nicolas
Billon (151).
Ses sujets lorrains lui doivent divers
bienfaits. En 1588, inform�e du courage avec
lequel, l'ann�e pr�c�dente, les bourgeois de
Bl�mont avaient d�fendu leur ville contre les
Allemands, elle leur permit de porter de 15 � 20
deniers la gabelle qui se levait, au profit de
leur communaut�, sur chaque mesure de vin vendue
� Bl�mont (152). A une date que nous ne pouvons
pr�ciser, elle manda � son receveur de Deneuvre
de verser tous les ans 96 fr. � un r�gent qui
serait capable d'enseigner les enfants de ce
bourg ; apr�s sa mort, les habitants de Deneuvre
suppli�rent le duc de confirmer sa donation, et
un arr�t du Conseil du 10 juin 1591 maintint
cette allocation destin�e � ��instruire la
jeunesse ez bonnes lettres et en toute pi�t� et
vertu � (153). Comme autres �uvres pies,
Chr�tienne b�tit pr�s de Deneuvre, au lieudit La
Rochotte, une chapelle sous l'invocation de
sainte Marie-Madeleine, et le pape Gr�goire XIII
confirma cette fondation par une bulle des ides
de d�cembre 1579 (154) ; elle donna, en 1589,
deux cents francs aux carmes de Baccarat et cent
aux s�urs grises de Lun�ville. Chaque ann�e,
elle alloue cent francs � chacun des couvents
des cordeliers de Nancy et de Raon-l'Etape et
des clarisses de Pont-�-Mousson et de
Bar-le-Duc, et quatre-vingts francs � la
coll�giale Saint-Georges de Nancy pour chanter
un Salve Regina tous les samedis et aux f�tes de
la Vierge (155).
Si la duchesse veille � la bonne administration
de son douaire, elle continue � s'int�resser au
petit Etat lorrain et � la famille ducale, �crit
et re�oit des lettres nombreuses et n'ignore
rien de ce qui se passe. Les lettres qui nous
restent d'elle et de ses correspondants sont
certainement une faible portion de ce qu'ils ont
�crit ; elles nous permettent du moins de nous
faire une id�e des questions trait�es.
Chr�tienne a d� adresser bien des missives � son
fils, le duc Charles III ; des deux que nous
avons encore, toutes deux de 1587, l'une, o�
elle dit son espoir de le voir ceindre bient�t
la couronne de France, nous para�t un faux assez
maladroit (156) ; nous n'avons aucune raison de
suspecter l'autre o� elle recommande � Charles
le marquis Gabriel de Malespine, gentilhomme
italien qui a servi le roi de France et va
maintenant servir en Lorraine (157). Les lettres
de subalternes sont nombreuses : en 1588, c'est
une humble femme, Mayelle Geoffroy, sans doute
attach�e au service des petites filles de
Chr�tienne, qui l'assure que celles-ci sont en
bonne sant� et que Mesdames Catherine et
Elisabeth se perfectionnent en toute vertu (158)
; puis, Michel Bouvet, secr�taire des
commandements, homme r�solument optimiste, qui
affirme que Mademoiselle de Bouillon, princesse
de Sedan, est r�duite au d�sespoir par l'avance
des troupes lorraines et ne peut se tirer du
p�ril qu'en �pousant le comte de Vaud�mont,
troisi�me fils du duc de Lorraine, que l'arm�e
navale d'Espagne a remport� une victoire sur
celle d'Angleterre (159) ; cette lettre est du
18 ao�t 1588, et, � cette date, le d�sastre de
l'Invincible Armada �tait complet. Le 23
d�cembre de la m�me ann�e, Claude Gu�rin,
surintendant de Chr�tienne dans son douaire
lorrain, lui mande que Nancy est ravag� par une
maladie contagieuse et que Charles III a, depuis
huit ou neuf semaines, une fluxion des jambes
(160).
Dans les derni�res ann�es de leurs vies, ces
deux femmes qui ne s'aimaient gu�re, Chr�tienne
de Danemark et Catherine de M�dicis, unirent
leurs efforts pour marier l'a�n�e des filles de
Charles III, qui �tait leur petite-fille �
toutes deux. N�e en 1565, �lev�e � la cour de
France, Christine de Lorraine avait vingt ans et
ses a�eules voulaient la donner �
Charles-Emmanuel de Nemours (161). Sans qu'on
sache bien pourquoi, ce projet n'aboutit pas, et
peu apr�s fut n�goci�e une autre alliance avec
Ferdinand de M�dicis, grand-duc de Toscane.
R�sidant en Italie, Chr�tienne �tait toute
d�sign�e pour servir d'interm�diaire. Aussi
quand, en f�vrier 1589, Charles III envoie �
Florence, pour n�gocier ce mariage, un de ses
chambellans, Jean de Lenoncourt, bailli de
Saint-Mihiel, il lui recommande de passer par
Tortone � son retour et d'y prendre les ordres
de Chr�tienne (162). A ce moment, Catherine
venait de mourir, mais son fils, Henri III,
quoiqu'aux prises avec la Ligue, trouva le temps
de s'int�resser � l'avenir de sa ni�ce et les
pourparlers r�ussirent. Le contrat fut sign� �
Blois, le 25 f�vrier 1589, et le mariage par
procuration se fit le lendemain (163). Il
fallait une femme de la maison de Lorraine pour
conduire Christine � son mari ; s,a m�re �tait
morte depuis longtemps et sa grand'm�re en trop
mauvaise sant� pour affronter ce voyage. Sa
tante Doroth�e se chargea de cette mission ;
elle alla chercher Christine � Lyon et
l'accompagna � Florence o� la c�r�monie
d�finitive fut c�l�br�e le 30 avril (164). Ce
mariage n�cessita l'envoi, entre Nancy et
Tortone, de nombreux messagers, dont les
d�penses de voyage sont inscrites dans le
registre de comptes du tr�sorier g�n�ral de
Lorraine pour 1589 (165).
En 1590 encore, diverses communications sont
�chang�es. En mai, le sieur de Reynette met
Chr�tienne au courant de ce qui se passe en
France o� Henri IV vient de gagner la bataille
d'Ivry et bloque Paris ; en juin,
Charles-Philippe de Croy, marquis d'Havr�, lui
�crit que Charles III assi�ge Marsal avec 14
canons, 4.000 hommes de pied, 1.500 cavaliers
(166). Jean Terrel, secr�taire du duc, est
envoy� � Lyon, puis � Tortone ; Gleysenove,
autre secr�taire, re�oit 250 �cus pour aller �
Tortone, puis � Florence (167).
Nous venons de nommer la seconde fille de
Chr�tienne, Doroth�e ; celle-ci avait perdu, en
novembre 1584, son mari, Eric, duc de Brunswick
; d�s lors, elle r�side souvent � Tortone,
aupr�s de sa m�re, et quand elle est en
Lorraine, elle la renseigne sur ce qui se passe.
Les lettres de Doroth�e n'ont pas �t�
conserv�es, mais nous avons encore huit lettres
de la duchesse � sa fille (168), �crites de 1581
� 1589, et le contenu de ces lettres laisse un
peu soup�onner ce qu'�taient les lettres de
Doroth�e. En 1581, Chr�tienne explique � sa
fille qu'elle lui �crit en italien, n'ayant
aupr�s d'elle personne qui sache �crire en
fran�ais, ce qui nous fait voir qu'elle dictait
au moins quelquefois ses lettres ; en 1582, elle
s'excuse de ne pas lui �crire plus souvent,
g�n�e qu'elle est par son �ge et par sa mauvaise
sant�. En octobre 1588, elle lui demande comment
se passent les Etats de Blois.
Chr�tienne ne limite pas ses relations � la
Lorraine. Elle a d'excellents rapports avec la
cour de Rome, et, en 1578, Gr�goire XIII lui
�crit pour la louer de sa pi�t�, de son z�le
religieux, de son d�vouement au Saint-Si�ge
(169). En 1586, Sixte-Quint lui permet, en
raison de son �tat maladif, l'usage de la viande
et du laitage pendant le Car�me et l'autorise �
se faire dire la messe dans son oratoire quand
elle r�side � Tortone (170). Elle fait donner
par ce m�me pape, en 1589, une pr�bende � son
chapelain, Laurent del Bosco (171). Elle a des
rapports fr�quents avec son cousin, le roi
catholique, car, en 1585, elle ne paye pas moins
de 403 fr. � Philippe de La Voyepi�re, banquier
� Lyon, qui se charge die faire parvenir ses
paquets en Espagne et aussi ailleurs; (172). En
1588, elle sert d'interm�diaire dans une assez
singuli�re tractation : le sieur Allegris,
commis aux finances du roi d'Espagne aux
Pays-Bas, verse au sieur de Ch�tenoy, tr�sorier
de Chr�tienne en Lorraine, 38.900 �cus d'Italie,
qui font en monnaie de Lorraine 179.920 fr., et
Ch�tenoy transmet cette somme au tr�sorier
g�n�ral du duc de Lorraine (173).
Mais ce sont surtout le Danemark et la Su�de qui
l'occupent et qui la passionnent. L'�ge n'a
diminu� ni ses ambitions ni ses esp�rances, et
par une curieuse incons�quence, cette femme qui
pr�tend ne pouvoir vivre qu'en Italie, pense
sans cesse � aller r�gner sur des pays
septentrionaux. On a vu au chapitre pr�c�dent
que le baron de Bollwiller avait favoris� ses
pr�tentions ; elle le r�compense, en 1581, par
une pension annuelle de 300 �cus, faisant 1.425
fr. de Lorraine (174). En 1588, encore, un de
ses agents, Simon Losson, lui adresse un rapport
sur l'�tat du royaume de Danemark, o�,
assure-t-il, la noblesse est fort irrit�e contre
le roi (175). Elle est du reste encourag�e dans
ses desseins par Gr�goire XIII, qui voit dans le
succ�s de cette princesse si d�vou�e au
Saint-Si�ge, un moyen de r�tablir le
catholicisme en Su�de, et qui lui adresse, le 28
avril 1581, une lettre pressante (176). C'est
sans doute cette intervention du pape qui ach�ve
de la d�cider. Sa soeur a�n�e, Doroth�e, est
morte en 1580 sans laisser d'enfants. Chr�tienne
est donc seule pr�tendante et ne fait tort �
personne en affirmant ses droits ; par une
d�claration r�dig�e en latin et dat�e de Tortone,
et du 28 juillet 1581, elle prend le titre de
reine de Danemark, Su�de et Norv�ge (177). Par
suite, voici la suscription pompeuse qui se lit
au d�but de lettres patentes du 30 septembre
1582 : ��Crestienne, par la gr�ce de Dieu, royne
de Dannemarck, Su�de, Norv�gue, des Goths,
Vandales, Esclavons, duchesse de Slesvick,
Holstein, Storman, Dietmarsch, Lorraine, Bar et
Millan, marquise de Dorthonne, comtesse d'Oldembourg,
d'Elmenhorst, Bl�mont, et dame de Deneuvre �
(178).
Il ne suffisait pas de prendre ce titre de
reine, il fallait le faire admettre par les
puissances, ce qui n'alla pas sans difficult�,
entre autres avec le cousin de la nouvelle
Majest�, Philippe II. A son habitude, celui-ci
tergiversa, de sorte qu'en 1584, la question
n'�tait pas encore r�solue ; un secr�taire
d'Etat, don Juan de Idiaquez, demande au
cardinal Granvelle si Chr�tienne peut sceller
ses lettres au roi d'un cachet o� elle prend le
titre die reine de Danemark. Et Granvelle r�pond
� Idiaquez : puisqu'on apostille ces pi�ces et
qu'on y inscrit la d�cision du roi, c'est
presque comme si on lui reconnaissait ce titre.
En effet, lorsque d'autres prennent des titres
auxquels ils n'ont pas droit, on les invite �
refaire leurs suppliques (179).
En Lorraine, il fut plus facile � Chr�tienne de
faire admettre sa nouvelle dignit� et une des
pi�ces du Palais Ducal de Nancy en a conserv� le
souvenir. Le 16 f�vrier 1587, le contrat de
mariage de Jean, baron d'Haussonville, avec
cette Claude-Chr�tienne du Ch�telet, dont nous
avons dit au chapitre pr�c�dent qu'elle �tait la
filleule de la duchesse douairi�re, ce contrat
�tait sign� dans le Palais Ducal ��en la chambre
appel�e vulgairement de Sa Majest� de Dannemarc
estant au bout de la gallerie au dessus du jeu
de paulme � (180).
Pour mieux affirmer sa dignit� de reine,
Chr�tienne donna � l'un de ses secr�taires
italiens, Carlo Civaleri, les titres prestigieux
de conseiller d'Etat, grand chancelier,
surintendant de sa maison (181).
III
Il nous faut ici faire un
retour en arri�re pour r�unir les quelques
indications que nous avons sur la sant� de
Chr�tienne de Danemark. Cette sant� para�t avoir
�t� normale pendant la premi�re moiti� de sa vie
; elle se maria � vingt ans, eut trois enfants
en quatre ans et ne semble pas avoir souffert de
ces naissances rapproch�es. C'est vers l'�ge de
quarante ou quarante-cinq ans qu'elle commence �
�tre �prouv�e par divers maux. Elle �tait fort
goutteuse, �crit Brant�me, qui l'a bien connue
(182), et la goutte fut, autant peut-�tre que le
mal de Naples, le fl�au du XVIe si�cle.
L'arthritisme, dont la goutte est une des
manifestations, �tait commun chez les Habsbourg
; Charles-Quint, l'oncle de Chr�tienne, en fut
afflig� de si bonne heure qu'il lui fallut
abdiquer � cinquante-six ans, �tant � bout de
forces, et qu'il mourut deux ans plus tard. Le
mal fut aggrav� chez lui par des exc�s de table
; y eut-il pareille erreur de r�gime chez sa
ni�ce, nous ne savons.
Nous avons dit plus haut qu'en 1566, Chr�tienne
para�t avoir fait une maladie s�rieuse ; l'ann�e
suivante, une de ses amies, la comtesse d'Aremberg,
passe en Lorraine pour la voir et la trouve en
si triste �tat qu'on suppute ce qui arriverait
si elle mourait (183). En 1569, le cardinal
Granvelle �crit � Philippe II avoir re�u une
lettre de Silliers, secr�taire et homme de
confiance de la douairi�re, l'avisant que
celle-ci est gravement malade en Bavi�re (184).
Le mal dure encore en 1570, puisque son fils
donne la r�gence � sa femme Claude pour venir la
voir (185). Admettons qu'elle se porte mieux les
ann�es suivantes, mais le 7 f�vrier 1574, son
gendre, Guillaume de Bavi�re, adresse au
cardinal Granvelle une lettre r�dig�e en latin
que nous r�sumons : je ne puis me dispenser de
vous faire savoir en quel mis�rable �tat de
sant� j'ai trouv� ma belle-m�re, la duchesse
douairi�re de Lorraine. Le pire, c'est qu'en
elle le moral est aussi affect� que le physique,
et cela vient du long retard du r�glement de ses
affaires avec le roi catholique. Je vous prie
d'intervenir afin de h�ter ce r�glement (186).
On est tent� de croire que le prince bavarois
exag�re pour apitoyer le roi d'Espagne, mais six
mois plus tard, un bref du pape, en date du 17
juillet 1574, nous apprend que Chr�tienne ne
peut plus, pour raisons de sant�, s'appliquer �
la lecture de l'office divin, qu'elle le
remplace par la r�citation du Rosaire ; qu'en
cons�quence, le pape attache � cet exercice une
indulgence sp�ciale (187). Le 13 janvier 1576,
ayant � r�pondre � une lettre d'Henri III,
Chr�tienne dicte sa r�ponse � un secr�taire,
grave atteinte au protocole d'alors, qui veut
qu'on n'adresse au roi que des lettres
autographes. Elle s'en excuse sur ce que ��
estant en continuelle infirmit� qui me rende si
d�bile que ne me puis beaucoup ayder de la
plume... � (188). Elle a sans doute les doigts
d�form�s par la goutte. En octobre 1578, le pape
lui mande qu'il l'aurait vue avec plaisir si sa
sant� lui avait permis de venir � Rome (189) ;
en mai 1579, Chr�tienne �crit � sa fille
Doroth�e qu'elle est trop mal portante pour lui
faire une longue lettre (190) ; en octobre de la
m�me ann�e, elle explique que son voyage de
Lorraine en Lombardie l'a beaucoup fatigu�e �
cause de la maladie dont elle est �prouv�e
depuis si longtemps (191). Toutes ces
indications concourent � prouver que la sant� de
Chr�tienne est de plus en plus d�labr�e et font
comprendre qu'elle n'ait pas atteint sa
soixante-dixi�me ann�e.
Les ann�es suivantes, on ne trouve plus
semblables plaintes ; sans doute le climat de
l'Italie et l'usage des eaux ont apport�
quelques am�liorations � sa sant�. C'est �
l'automne de 1590 que la situation s'aggrave.
Dans le compte du tr�sorier g�n�ral de cette
ann�e, on voit qu'une somme de 1.436 fr. a �t�
vers�e � Jean des Porcelets de Maillane,
chambellan du duc et gouverneur de Toul, pour
les frais du voyage qu'il a fait � Tortone �
cause de la maladie de la reine de Danemark ; il
est parti le 11 septembre et n'est revenu qu'�
la fin de novembre (192). Or, le jour o�
Maillane partait pour ce long voyage, la m�re de
Charles III venait de mourir. Voici, en effet,
ce qu'on lit dans l'Obituaire du couvent des
cordeliers de Nancy, document quasi officiel,
aussi digne de foi, quand il s'agit die
personnes de la maison ducale, qu'un registre
d'�tat civil de maintenant :
Quarto idus septembris (10 septembre) 1590,
obiit Tortone in partibus Lombardiae serenissima
domina, domina Christiana Austriae,
illustrissimi ducis Francisci a Lotharingia
charissima conjux, ac Daniae regina... cujus
corpus illinc delatum cum sponso in choro
ecclesise nostrae tumulatum jacit (193).
Maillane est donc arriv� trop tard, et s'il est
rest� si longtemps en Italie, c'est qu'il a d�
s'occuper du transport de la d�pouille mortelle
et du r�glement de la succession de la d�funte.
Il avait re�u des instructions qui pr�voyaient
le d�c�s et sont r�sum�es dans les lettres
patentes du 9 septembre 1590 lui donnant tout
pouvoir pour agir au cas o� ce d�c�s se produira
(194). Instructions d'autant plus n�cessaires
qu'alors Charles III est constamment �loign� de
Nancy ; en juin 1590, il assi�ge et prend Marsal
; en ao�t, il est aux eaux de Spa pour se
soigner ; en octobre, il prend Villefranche sur
la Meuse, pr�s de Stenay ; puis il assi�ge
Sainte-Menehould. Le 20 juillet, le duc avait
nomm� son fils, Charles, cardinal-�v�que de
Metz, son lieutenant g�n�ral pendant toutes ces
absences (195), et c'est celui-ci, nous allons
le voir, qui r�glera les obs�ques de son a�eule.
Il avait �t� d�cid� de ramener en Lorraine le
corps de Chr�tienne. Ce transport a d� se faire
peu de temps apr�s sa mort, quand les passages
des Alpes �taient encore praticables ; Maillane
�tant rest� en Italie pour liquider la
succession, le convoi fun�bre �tait conduit par
Francesco Visconti, ma�tre d'h�tel de
Chr�tienne, dont les documents fran�ais �crivent
le nom Viscomte ou Vice-comte, et il �tait
arriv� � Deneuvre avant le 14 novembre. Ce
jour-l�, les surintendants du comt� de Bl�mont
et de la terre de Deneuvre �crivent au receveur
de Deneuvre que le cardinal de Lorraine estime
convenable de retenir Visconti pour qu'il
assiste aux services fun�bres qui se feront en
l'�glise coll�giale de ce lieu ; ils lui
recommandent donc de r�gler toutes les d�penses
qui seront faites par ce ma�tre d'h�tel et par
ses serviteurs, et aussi de payer honn�tement
les pr�tres qui participeront � ces services
(196).
Le corps de Chr�tienne resta dans la coll�giale
de Deneuvre jusqu'au 23 avril 1591. Est-ce parce
que ce bourg �tait sa r�sidence pr�f�r�e en
Lorraine, ou parce que, quarante-cinq ans
auparavant, le corps de son mari, mort �
Remiremont, y avait �t� amen� et y �tait rest�
assez longtemps, nous ne savons. Toujours par
ordre du cardinal de Lorraine, quarante-huit
livres de cire jaune furent d�livr�es en 1590
pour les cierges qui br�leront autour de son
catafalque, et en 1591, on br�le encore
cinquante-six livres de cire (197). Enfin, le 23
avril 1591, le corps fut transf�r� � Nancy (198)
et inhum� � c�t� du duc Fran�ois Ier dans le
ch�ur de l'�glise des cordeliers, comme
l'indique l'obituaire de ce couvent dans la
notice que nous avons reproduite plus haut. Il
semble que cette inhumation ne donna lieu �
aucune c�r�monie importante, et on ne voit pas
que la cour de Lorraine ait pris Le deuil.
Lepage explique cette abstention en disant que
le duc �tait alors � la t�te de ses troupes, en
guerre contre les partisans d'Henri IV (199).
C'est une erreur ; il a pass� ce mois d'avril
1591 � Nancy ; toutes les lettres patentes qu'il
lui arrive de rendre sont dat�es de cette ville
et il ne reste qu'un petit nombre de jours pour
lesquels on ne peut affirmer o� il se trouve
(200). S'il n'a pas voulu donner � ces obs�ques
l'�clat habituel, c'est tr�s probablement pour
un motif d'�conomie. Il �tait en pleine guerre
depuis plusieurs ann�es, il venait de d�penser
des sommes �normes pour entretenir ses arm�es,
se voyait � court d'argent, oblig� de pr�lever
sur ses sujets des emprunts forc�s ; il lui
�tait impossible de faire � sa m�re une pompe
fun�bre analogue � celle que Chr�tienne avait
faite � Fran�ois 1er, et qui avait d� entra�ner
une forte d�pense.
Plus tard, fut affect�e sp�cialement � la
s�pulture des membres de la maison de Lorraine,
la Chapelle ducale, dite Chapelle ronde,
commenc�e en 1607 o� 1608, b�nite en 1612. Les
restes de Fran�ois et de sa femme y furent
transf�r�s et r�unis dans le m�me mausol�e, sur
lequel une inscription courte et �quitable
conserve le souvenir de Chr�tienne (201). Ce
transfert a d� se faire d�s 1611, car un m�moire
de cette ann�e relate la fourniture par le
menuisier ducal de quatre cercueils pour le duc
Antoine et Ren�e de Bourbon, pour le duc
Fran�ois et Chr�tienne de Danemark, et indique
que ces cercueils sont d�pos�s ��au caveau sous
la neuve chapelle joindant l'�glise des
cordeliers � (202). C'est l� que le libraire
Nicolas vit, en 1742, Chr�tienne dans son
cercueil, et constata que le corps �tait peu
d�compos� (203).
S'il n'avait fait � sa m�re que des obs�ques
tr�s simples, Charles III ne tarda pas � fonder
pour elle un service anniversaire. Ses lettres
patentes du 5 juillet 1592 d�clarent que ��comme
prince chrestien et catholicque �, il �tablit
quatre services fun�bres, chacun compos� de
vigiles et de trois messes hautes, pour chacune
des quatre personnes suivantes : le duc Antoine
et Ren�e de Bourbon, ses a�eux, le duc Fran�ois
Ier et Chr�tienne de Danemark, ses p�re et m�re.
Ces services seront c�l�br�s au jour
anniversaire de leur mort, et ici Charles
indique le 11 septembre comme le jour du d�c�s
de sa m�re (204). Nous avons dit plus haut que
l'obituaire des cordeliers date cet �v�nement du
10. Il est difficile de choisir entre deux
documents �galement qualifi�s, et mieux vaut les
concilier en admettant que Chr�tienne est morte
dans la nuit du 10 au 11 septembre 1590. Et
c'est le 11 septembre que sera c�l�br� son
anniversaire dans les ann�es suivantes (205).
La liquidation de sa succession fut longue. Elle
avait pour tr�sorier un Italien nomm� Desiderio
Basso; en 1593, Charles III chargea de v�rifier
ses comptes son secr�taire d'Etat, Jean Voillot,
et Francisco Carcano qui �tait son agent �
Milan. Ceux-ci reconnurent que les recettes
faites par Basso s'�levaient � 41.742 livres
milanaises, et que sa d�pense �tait de 23.700
livres. Le compte ainsi arr�t� ne fut ou� et
approuv� par la Chambre des comptes de Lorraine
que le 20 d�cembre 1602 (206). Quelques-unes de
ces d�penses d�j� anciennes m�ritent d'�tre
relev�es : 100 ducatons faisant 570 1. � Jean
Colombas, argentier de la reine de Danemark, que
le duc lui octroie en r�compense de ses services
; 132 1. pour le transport de Milan � Strasbourg
de trois coffres contenant la chapelle de ladite
reine et diverses hardes (207). Mais, pour en
avoir fini avec le tr�sorier de sa m�re, Charles
III n'�tait pas � l'abri de toute r�clamation.
En 1596, un G�nois, Jean-Baptiste Raggio,
pr�tend que Chr�tienne devait 10.000 �cus � son
oncle d�funt et demande � les toucher (208). En
1600, se payent encore des pensions accord�es
par Chr�tienne � Asselin, pr�v�t de La Chauss�e,
et � Genevi�ve Padouant, sa femme (209).
ADDITIONS ET CORRECTIONS
Au terme de cette �tude sur
Chr�tienne de Danemark, nous ne pouvons pas nous
emp�cher de penser que, dans ses longues ann�es
de retraite en Bavi�re, puis � Tortone, cette
princesse aurait eu le temps d'�crire des
m�moires qui eussent �t� pleins d'int�r�t, car
elle avait connu beaucoup de personnages de
premier plan, assist� � des �v�nements graves,
pris part � des n�gociations d�cisives. �'e�t
�t� une fa�on agr�able d'occuper ses loisirs, et
aussi une occasion d'exhaler ses rancunes, qui
�taient nombreuses, et c'est ce que font la
plupart des m�morialistes. Mais ce n'�tait pas
encore la mode pour les femmes d'�crire leurs
m�moires ; les plus anciens m�moires f�minins
qu'on ait en France sont ceux de Marguerite de
Valois, la premi�re femme d'Henri IV, qui est
d'une g�n�ration plus r�cente. Il semble que si,
apr�s sa mort, des Porcelets de Maillane ou
Voillot avaient trouv� dans ses papiers une
r�daction de ce genre, ils n'auraient pas manqu�
de l'envoyer � leur ma�tre. Il y a donc peu de
chances de retrouver dans quelque biblioth�que
d'Italie des m�moires ou une �bauche de m�moires
de Chr�tienne de Danemark.
La princesse dont ce livre retrace la vie est
appel�e Christine par tous les historiens
lorrains. Ce sont les �crivains hommes d'Eglise
du XVIIIe si�cle, Benoit Picart, le p�re Hugo,
dom Calmet dans ses deux �ditions qui, les
premiers, l'ont nomm�e ainsi. Et les historiens
du XIXe si�cle, de Digot � Pfister, lui ont
conserv� ce nom.
Mais toutes les lettres missives de la m�re de
Charles III - dont nous avons publi� un certain
nombre dans la Revue historique de la Lorraine
de 1931 et dans l'Annuaire de la Soci�t�
d'arch�ologie de Metz de 1931 - sont sign�es ��
Chrestienne �. Ses lettres patentes, encore plus
nombreuses, portent ��Chrestienne � au
commencement de la suscription et en signature.
Nous lui avons donc restitu� ce nom, le seul
qu'elle ait port� et sous lequel elle ait �t�
connue.
Au temps de Chr�tienne de Danemark, l'ann�e
commen�ait en France � P�ques, f�te mobile, en
Lorraine � l'Annonciation (25 mars). C'est
seulement en 1564 pour la France, en 1580 pour
la Lorraine, qu'il fut prescrit de commencer
l'ann�e au 1er janvier. Pour l'�poque ant�rieure
� ces deux termes, nous corrigeons toutes les
dates qui sont comprises entre le 1er janvier et
les f�tes de P�ques ou de l'Annonciation,
c'est-�-dire que nous ajoutons une unit� au
mill�sime des �v�nements ou des documents, de
mani�re � ramener ces dates anciennes � notre
usage actuel. Nous n'avons pas cru n�cessaire,
chaque fois que nous faisons cette correction,
de le sp�cifier.
Dans le registre de comptes B 1094, fol. 99,
nous voyons qu'en 1553, Nicolas, comte de
Vaud�mont, accorde 600 francs ��pour certaines
et raisonnables causes � � Marguerite du
Ch�telet, secr�te en l'�glise de Remiremont. Ne
serait-ce pas pour l'indemniser des tracas que
lui avait caus�s le proc�s soutenu par elle
contre les autres chanoinesses et que nous avons
analys� aux pages 86-88 ?
Page 93, il est question du proc�s de Claudine
Boussart en 1545 ; dans B 1084, fol. 84 v�, est
inscrite une d�pense de 200 francs en sa faveur.
C'est donc que la pension qui lui avait �t�
assign�e en 1543 (non par Ren�e de Bourbon,
morte d�s 1539, mais par le duc Antoine)
continuait � lui �tre pay�e comme il convenait,
puisque son innocence �tait reconnue.
Page 130, ligne 2, lire : secr�taire au lieu de
: successeur.
Page 138, note 1, lire : Arch. M.-et-M., B 1113,
fol. 32.
Page 146, note 1, lire : Boutaric au lieu de :
Boustric.
(1) Arch.
M.-et-M., B 2,7, fol. 204, 223 v�, 152 v�, 212,
B 3268, B 3406, fol. 22 v�, B 30, fol. 240 v�, B
33, fol. 174 v�, B 3411, B 32, fol. 97.
(2) Ibid., B 3408, fol. 25 ; PARIS,
N�gociations, p. 42, 43.
(3) Ibid., B 33, fol. 65.
(4) HENNE, t. X, p. 2,60-274 ; CALMET, Hist. de
Lorr., t. V, p. 714.
(5) GRANVELLE, Papiers d'Etat, t. IV, p. 485, n.
2.
(6) Arch. M.-et-M., B 27, fol. 204, 223 v�, 212,
152 v�.
(7) Ibid., B. 30, fol. 240 v�.
(8) Ibid., B. 33, fol. 174 v�.
(9) Ibid., B. 32, fol. 97.
(10) Ibid., B 681, N� 23.
(11) GRANVELLE, Papiers d'Etat, t. IV, p.
699-702.
(12) ROMIER, t. II, p. 222-223.
(13) Arch. M.-et-M., B 1094, fol. 113.
(14) Ibid., B 3408.
(15) Ibid., B 1110, fol. 50.
(16) Ibid., B 1092, fol. 55.
(17) D'apr�s le D�nombrement de Thierry Alix, p.
105-107.
(18) ROMIER, t. II, p. 266.
(19) Ibid., t. II, p. 251, 268-269 ; DE THOU, t.
II, p. 563.
(20) B. N., Coll. lorr., 253, fol. 22.
(21) DE RUBLE, p. 3-5, 14.
(22) Ibid., p. 6, 10.
(23) CALMET, Hist. de Lorr., t. VII, preuves,
col. 193.
(24) DE RUBLE, p. 18 ; cf. dans les Papiers
d'Etat de Granvelle, t. V, p. 411-419, les
lettres �chang�es entre Chr�tienne d'une part,
Le conn�table et le cardinal de Lorraine de
l'autre.
(25) DE RUBLE, p. 19-21.
(26) Ibid., p. 23.
(27) Ibid., p. 25-26.
(28) GRANVELLE, Papiers d'Etat, t. V, p. 538.
(29) ROMIER, t. II, p. 344.
(30) DUMONT, Corps diplomatique, t. V, 1re
partie, p. 40.
(31) ROMIER, t. II, p. 344-3415.
(32) DE THOU, t. II, p. 660-665.
(33) BRANT�ME, t. IX, p. 626.
(34) DE THOU, t. II, p. 563.
(35) Papiers d'Etat de Granvelle, t. V, p. 228.
(36) Ibid., t. V, p. 582-584.
(37) Ibid., t. V, p. 228-229.
(38) BRANT�ME, t. IX, p. 621.
(39) Laubespine au roi, le 27 juillet 150'9,
dans PARIS, N�gociations, p. 42-43.
(40) CALMET, Hist. de Lorr., t. V, col. 714-715
; GRANVELLE, Corresp., t. I, p. 12,6 ; PIRENNE,
Hist. de Belgique, t. III, p. 395.
(41) PARIS, N�gociations, p. 66.
(42) GACHARD, p. 399.
(43) GRANVELLE, Corresp., t. VI, p. 60, 66.
(44) Lettre sans date, qui doit �tre de juillet
1559, dans les Papiers d'Etat de Granvelle, t.
V, p. 623.
(45) Ibid., t. V, p. 625.
(46) J.S.A.L., 1895, p. 172.
(47) Arch. M.-et-M, B 33, fol. 21, 22, 23, 24
v�, 37.
(48) Ibid., B 33, fol. 71.
(49) ZELLER, dans M.S.A.L. 1923-25, p. 362, n.
1.
(50) BRANT�ME, t. IX, p. 627.
(51) ZELLER, ibid., p. 380, n. 1.
(52) ROMIER, t. I, p. 484.
(53) DRUFFEL, t. IV. p. 204, n. 3.
(54) MAGNIENVILLE, p. 69, 164.
(55) Lettre du 5 d�cembre 1562, dans lies
Lettres de Catherine de M�dicis, t. I, p. 441. -
Quelques semaines plus tard, Chr�tienne �crit �
Catherine qu'elle a fait sa commission, (Ibid.,
t. 1, p. 443, n. 1).
(56) BRANT�ME, t. IX, p. 630 ; PARIS,
N�gociations, p. 867, o� Charles IX lui-m�me
atteste la pr�sence de la duchesse dans une
lettre � son ambassadeur en Espagne.
(57) PFISTER, Le cardinal Granvelle � Nancy,
dans M.S.A.L., 1910, p. 297-314.
(58) CALMET, Hist. de Lorr., t. V, col. 737-739
; PFISTER, article pr�cit� ; divers articles du
chanoine Auguste HUMBERT, dans les Annales de
l'Est de 1928 et 1929, et dans le Bulletin de la
Soci�t� des Lettres de Bar-le-Duc de 1926 et
1928.
(59) Mgr BONNARD, p. 35, 36, 349.
(60) B. N., Coll. lorr., 28, f. 217. - Ce
document n'est pas dat�, il doit �tre ant�rieur
� 1568, date du mariage de Ren�e, fille a�n�e de
la duchesse.
(61) Eug. MARTIN, t. II, p. 17-18 ; Mgr.
BONNARD, p. 35-37 ; PIMODAN, p. 46-53 ; CALMET,
Hist. de Lorr., t. III, preuves, col. 432.
(62) HENNE, t. VII, p. 275-277.
(63) DRUFFEL, t. I. p. 26.
(64) RAHLENBECK, p. 36 ; Arch. M.-et-M., B 3271.
(65) B. N., Coll. lorr., 2,9, fol. 100, 101.
(66) Mandement du 10 juillet 1568 au pr�v�t de
Bl�mont (Arch. M.-et-M., B 3277).
(67) Lettres de Catherine de M�dicis, t. III, p.
229.
(68) J.S.A.L., 1879, p. 145.
(69) M.S.A.L., 1887, p. 220-227.
(70) Papiers d'Etat de Granvelle, t. VII, p.
558-588.
(71) Ces quatre m�moires sont r�unis dans un
manuscrit de lia Collection de Lorraine � la B.
N. consacr� � Chr�tienne, le ms. 29, fol. 46,
94, 98, 104 ; le m�moire de Langsen est
ant�rieur � 1560, date de la mort de Gustave
Vasa.
(72) Correspondance de Granvelle, t. III, p.
463.
(73) Papiers d'Etat de Granvelle, t. IX, p. 661
; Correspondance du m�me, t. II, p. 185. - Le
mariage avec le roi de Su�de e�t scell� une
alliance gr�ce � laquelle ce roi devait
conqu�rir le Danemark et la Norv�ge, garder
celle-ci et rendre le Danemark � Chr�tienne.
(74) Selon Rahlenbeck, p. 36, ce sont les
J�suites qui auraient fait ce mariage pour avoir
un appui en Allemagne, mais cet historien �tant
port� � voir partout les intrigues des J�suites,
il n'y a pas lieu de retenir cette assertion.
(75) CALMET, Hist. de Lorr., t. V, coll. 748.
(76) DEDENON, p. 28. - Un compte de 1568 (B
3277) parle de r�fections au ch�teau de Bl�mont
en vue de ce mariage ; il faut, croyons-nous,
entendre : fian�ailles. Un autre oompte (B 8639)
mentionne le passage � Sainte-Marie-aux-Mines,
Saint-Di� et Raon, du prince de Bavi�re et de sa
m�re.
(77) Il n'y a pas lieu de faire � cette date la
correction du style ; en Allemagne, l'ann�e
commen�ait alors au 1er janvier.
(78) La description du mariage est dans le
J.S.A.L., 1879, p. 142-148, d'apr�s une relation
allemande de l'�poque.
(79) CALMET, Hist. de Lorr., t. V, col. 748.
(80) Papiers d'Etat de Granvelle, t. VII, p.
43:8.
(81) Compte incomplet de l'argentier du duc pour
1562 (Arch. M.-et-M., B 1132, fol. 22-23). - Les
menus plaisirs devaient faire partie de la
d�pense extraordinaire.
(82) Ces lettres sont dat�es de ��l'an de gr�ce
1559, avant Pasques, usage de Toul �, ce qui les
met dans les premiers mois de 1560 de notre
calendrier, et probablement en f�vrier, puisque
Chr�tienne fait acte de gouvernement au milieu
de mars. On les trouve aux Arch. M.-et-M., B
416, fol. 100, B 417, fol. 6 v�. Elles sont
publi�es par Magnienville, p. 166-168.
(83) GIRY, p. 1218.
(84) Arch. M.-et-M., B 33, fol. 152 v� ;
ROG�VILLE, t. II, p. 275. - A cette question des
droits de sortie se rapporte aussi une lettre
missive que Chr�tienne �crit, le 18 juin 1560,
au gouverneur de Metz (Annuaire de la Soci�t�
d'arch�ologie de Metz, 1931, p. 151).
(85) Arch. M.-et-M., B 33, fol. 177.
(86) Ibid., B 33, fol. 178 v�.
(87) Ibid., B 486, a, 76, p. 28 ; B 719, n� 24.
(88) Ibid., B 416, fol. 100 v�.
(89) ROG�VILLE, t. I, p. 115.
(90) MAGNIENVILLE, p. 83-84.
(91) Arch. M.-et-M1., B 1134, fol. 23-30, 37-45,
57 v�.
(92) Ibid., B 1140.
(93) lbid., B 1130, fol. 63.
(94) Ibid., B 1134, fol. 5.
(95) BRANT�ME, t. IX, p. 630.
(96) Arch. M.-et-M., B 578, n� 48 ; B 709, n�
72.
(97) DEDENON, p. 28.
(98) Ibid., p. 30.
(99) BERNHARDT, p. 151, 283-284.
(100) B. N., Coll. lorr., 28, fol. 207.
(101) C'est l'opinion exprim�e par un grand
celtisant, Henri D'ARBOIS DE JUBAINVILLE, dans
les M�m. de l'Acad. de Stanislas, 1887, p. 79.
(102) Arch. M.-et-M., B 315, fol. 98.
(103) LEPAGE, Statistique Meurthe, t. II, p.
493.
(104) Arch. M.-et-M., B 881, n� 79.
(105) Ibid., B 37, fol. 133.
(106) Ibid., B 37, fol. 130.
(107) Ibid., B 1143, fol. 197, 216 v�.
(108) FOURNIER, p. 133.
(109) Recueil de documents sur l'histoire de
Lorraine, t. I, 1855, p. 192 ; M.S.A.L., 1857,
p. 116-117.
(110) Ibid., p. 119.
(111) Arch. M.-et-M., H 9108.
(112) Ch. DENIS, p. 1.
(113) Correspondance de Granvelle, t. II, p.
493.
(114) Biblioth�que de Besan�on, collection
Granvelle, ms. 56, fol. 12 et 20.
(115) R.H.L., 1931, p. 25.
(116) MAGNIENVILLE, p. 176.
(117) Biblioth�que de Besan�on, collect.
Granvelle, ms. 58, fol. 24, 42.
(118) B.N., Coll. lorr. 28, fol. 99 ; R.H.L.,
1931, p. 27 ; Annuaire de la Soc. d'arch�ologie
de Metz, 1931, p. 153.
(119) Arch. M.-et-M., B 3427, fol. 1, 35 v�.
(120) B.N., Coll. lorr. 29, fol. 162-200.
(121) R.H.L., 1931, p. 28-30 ; Arch. M.-et-M., B
3431.
(122) Ibid., B 1162.
(123) Ibid., B 1161, fol. 299.
(124) M�m. de Marguerite, p. 36-37 ; M�m. de
Cheverny, dans Collect. Michaud et Poujoulat,
lre s�rie, t. X, p. 472.
(125) R.H.L, 1931, p. 30 ; M�m. de l'Acad. de
Stanislas, 1935-1936, p. 55.
(126) Arch. M.-et-M., B 3434, fol. 1 ; B.N.,
Coll. lorr., 28, fol. 253.
(127) Arch. M.-et-M., B 1166, fol. 357.
(128) Ibid., B 1166, fol. 288-289.
(129) lbid., B 1166, fol. 282.
(130) J.SA.L., 18716, p. 111.
(131) Pour plus de d�tails, voir notre
biographie de Doroth�e dans les M�m. de l'Acad.
de Stanislas. 1935-1936, p. 38, 57.
(132) B. N., Coll. lorr., 29, fol. 148
(traduction fran�aise).
(133) Correspondance de Granvelle, t. VI, p.
521, t. VII, p. 572.
(134) B.S.A.L., 1904, p. 287.
(135) Arch. M.-et-M., B 565, n� 36.
(136) Ibid., B 578, n� 94. - Fr�monville, canton
de Bl�mont.
(137) BRANT�ME, t. IX, p. 632.
(138) Arch. M.-et-M., B 3286, fol. 102.
(139) Correspondance de Granvelle, t. VII, p.
149.
(140) Mgr BONNARD, p. 48.
(141) BRANT�ME, t. IX, p. 632.
(142) Correspondance de Granvelle, t. VIII, p.
71.
(143) M.S.A.L., 1910', p. 307.
(144) DAVILL�, Pr�tentions de Charles III, p.
37-38 ; Correspondance de Granvelle, t. X, p.
65.
(145) Arch. M.-et-M., B 1220.
(146) Ibid., B 1207, fol. 7.
(147) B. N., Coll. lorr., 29, fol. 16-19.
(148) Ibid., fol. 7-14.
(149) Ibid., fol. 253.
(150) Arch. M -et-M., B 846, nos 19-21 ; la
premi�re ordonnance est r�sum�e par LEPAGE,
Communes Meurthe, t. I, p. 149-150. - Ces trois
ordonnances sont dat�es de Nancy, indication
certainement fictive.
(151) Ibid., B 5172.
(152) B. N., Coll, lorr., 29, fol. 27.
(153) Arch. M.-et-M., B 5174.
(154) Ibid., B 644, n� 65.
(155) Ibid., B 1220, fol. 9 v�.
(156) Voir l'�tude que nous en avons faite dans
R.H.L., 1931, p. 14-32.
(157) TUETEY, t. II, p. 83.
(158) B. N., Coll. lorr., 28, fol. 259.
(159) Ibid., 28, fol. 223.
(160) Ibid., 28, fol. 233.
(161) Lettres de Catherine de M�dicis, t. VIII,
p. 225, 372.
(162) LEPAGE, Instructions de Charles III, p.
93.
(163) DAVILL�, Pr�tentions de Charles III, p.
171.
(164) M�m. de l'Acad. de Stanislas, 1935-1936,
p. 44.
(165) Arch. M.-et-M., B 1217, fol. 336 v�, 378,
383, 385, 390 v�.
(166) B. N., Coll. lorr., 28, fol. 2-46, 248.
(167) Arch. M.-et-M., B 1225, fol. 258, 259.
(168) B. N., Coll. Lorr., 28, fol. 34-67. - Ces
lettres ont d� entrer � la B.N. avec les autres
papiers de Doroth�e, qui sont volumineux ; voir
ce que nous en disons dans les M�m. de l'Acad.
de Stanislas, 1935-1936, p. 51-52.
(169) Mgr BONNARD, p. 48.
(170) B.N., Coll. lorr., 28, fol. 218-219.
(171) Ibid., 28, fol. 237.
(172) Arch. M.-et-M., B 1207, fol. 15 v�.
(173) B.N., Coll. lorr., 235, fol. 163.
(174) Arch. M.-et-M., B 1207, fol. 10.
(175) B.N., Coll. lorr., 28, fol. 321.
(176) THEINER, t. II, p. 262.
(177) Arch. M.-et-M., B 416, fol. 102-103 ;
publi�e par LEPAGE, dans le J.S.A.L., 1873, p.
170-171.
(178) Arch. M.-et-M., B 3442.
(179) Correspondance de Granvelle, t. XI, p.
294, 342, 351, 354.
(180) CALMET, Maison du Ch�telet, preuves, p.
216.
(181) B. N., Coll. lorr., 28, fol. 314 ; 29,
fol. 2.
(182) BRANT�ME, t. IX, p. 632.
(183) Correspondance de Granvelle, t. II, p.
493.
(184) Ibid., t. III, p. 463.
(185) MAGNIENVILLE, p. 176.
(186) Correspondance de Granvelle, t. V, p. 27.
(187) B.N., Coll. lorr., 28, fol. 213.
(188) R.H.L., 1931, p. 31.
(189) B.N., Coll. lorr., 28, fol. 214.
(190) Ibid., 28, fol. 18.
(191) Ibid., 29, fol. 231 v�.
(192) Arch. M.-et-M., B 1223, fol. 373- v�. Ce
texte est reproduit par LEPAGE dans le J.S.A.L.,
1873, p. 164, avec une erreur de lecture qui a
quelque importance : l� o� il met ��vers l'unzi�me
de septembre �, il faut lire ��d�s l'unzi�me �.
(193) Biblioth. de Nancy, ms. 2133, fol. 93. -
Le Dictionnaire de MOR�RI, v� Lorraine, t. IV,
p. 1029, met � tort le d�c�s de Chr�tienne au 10
d�cembre, et cette erreur est reproduite dans
une note des Lettres de Catherine de M�dicis, t.
VIII, p. 372.
(194) Arch. M.-et-M., B 59, fol. 269 v�.
(195) lbid., B 59, fol. 167 v�.
(196) Arch. M.-et-M., B 5172, publi� par LEPAGE,
dans le J.S.A.L., 1873, p. 165-166. - Dans la
m�me liasse est un re�u d'un h�telier de
Deneuvre, de 280 fr., qui lui ont �t� pay�s pour
la d�pense de Visconti, de deux serviteurs et de
trois chevaux..
(197) Arch. M.-et-M., B 5172, B 5173, fol. 47
va.
(198) J.S.A.L., 1873, p. 168.
(199) Ibid., p. 169.
(200) Arch. M.-et-M., B 61, fol. 96-138.
(201) Publi�e par LIONNOIS, t. I, p. 150.
(202) Arch. M.-et-M., B 7363.
(203) PAYARD, p. 350, note.
(204) R.H.L., 1931, p. 183.
(205) H. Roy, p. 87.
(206) Arch. M.-et-M., B 1237.
(207) Ibid., fol. 4 v�.
(208) B. N., Coll. Ion., 28, fol. 57.
(209) Arch. Meuse, B 1710.
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