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1. RETOURS SUR UNE VIE MOUVEMENTEE N� en 1732 et mort en 1814, Laurent Chatrian aura v�cu 82 ans ; une longue vie, marqu�e par la rupture majeure de la R�volution qui le surprit � l'�ge de 57 ans. Ce fut durant les ann�es d'exil qui suivirent que Chatrian commen�a � se pencher sur son propre pass�. Dans les derni�res ann�es de sa vie, alors qu'il �tait rentr� en Lorraine depuis le Concordat, ses �crits autobiographiques se multipli�rent. Jet�s le plus souvent sous forme de brouillons sur des feuilles volantes, on ignore si ces courts textes �taient destin�s � entretenir sa m�moire personnelle, � justifier ses choix devant la post�rit�, ou � assouvir un go�t jamais d�menti de collectionneur d'existences, � commencer par la sienne. Ces morceaux �pars permettent de reconstituer sa vie, une vie d'abord remplie par ses fonctions pastorales, ainsi qu'il les �num�re sur une notice couvrant la p�riode pr�-r�volutionnaire : ��Laurent Chatrian, n� � Lun�ville le 4 mars 1732 ; fait pr�tre � Toul, le 18 [septembre] 1756 ; vicaire-commensal � Saint-Etienne, doienn� de Remiremont, le 2 mai 1757 ; � Remoncourt, do�enn� de Porsas, le 5 [novembre] 1763 ; � Brouville, do�enn� de Salm, le 8 janvier 1765 ; � Saint-Cl�ment, 1769 ; secr�taire-commensal de Mgr Drouas de Boussey Ev�que-Comte de Toul, le 8 mai 1771 ; provicaire-g�n�ral du dioc�se de Toul, le 28 [septembre] 1772. Cur� de Resson, do�enn� de Bar, le 4 [d�cembre] 1773 ; a �t� ensuite de sa permutation avec M. Mathieu, institu� cur� de Saint-Cl�ment et annexes, le 15 [octobre] 1777. Il a pris possession de cette cure le 27 janvier 1778 [...][8]. La distanciation permise par l'emploi de la troisi�me personne, associ�e au ton d�tach� et au contenu tr�s factuel, traduit le go�t pour la notice biographique. Chatrian �tait avant tout un collectionneur de faits et se livrait peu sur ses propres sentiments. On ne saura pas, par exemple, comme a pu �tre ressentie la disgr�ce apr�s les courtes ann�es pass�es aupr�s de Mgr Drouas, d'abord comme secr�taire, puis comme provicaire g�n�ral ; la mort subite de Mgr Drouas, survenue en 1773, a bris� net cette carri�re en revoyant Chatrian dans la campagne lorraine. Il semble que cette vie obscure comme cur� de Resson (1773-1777) et de Saint-Cl�ment (1778-1790) ait �t� du go�t de Chatrian ; il les r�suma par ces mots : ��Les instructions qu'il devoit � ses paroissiens, l'�tude de l'Ecriture Sainte et des P�res de l'Eglise, des recherches historiques sur la Lorraine en g�n�ral et sur le dioc�se de Toul en particulier, les compilations d'anecdotes eccl�siastiques et monastiques, pour lesquelles il avoit un go�t d�cid�, partag�rent exactement tout son tems �[9]. Chatrian voulait donner l'image d'un pasteur passionn� par son minist�re et l'�criture. Il est certain qu'il pr�f�rait observer la vie cl�ricale de son temps que d'y participer ouvertement. Son passage �clair � l'�v�ch� de Toul (1771-1773) reste toutefois une �nigme ; et s'il si�gea bri�vement aux Etats-G�n�raux[10], ce fut pour suivre docilement l'�v�que de Nancy, Mgr La Fare, dans sa campagne contre l'Eglise Constitutionnelle. Laurent Chatrian n'a donc pas �t�, malgr� les occasions qui lui furent donn�es, un grand acteur de son temps. Mais ce fut un fin observateur, qui consacra sa vie � coucher sur le papier les anecdotes eccl�siastiques qui parvenaient jusqu'� lui. 2. LE JOURNAL A SCANDALES D'UN CURE DE CAMPAGNE Laurent Chatrian aura men� une vie obscure de chercheur d'anecdotes : ici l'�uvre et l'homme fusionnent pour ne former qu'un. Cette �uvre, compos�e d'au moins 179 manuscrits, est assez diverse, refl�tant la vari�t� des centres d'int�r�t de son auteur, mais aussi une m�thode qu'il r�sumait ainsi dans un de ses brouillons : ��Il n'�toit pas un savant � d�couvertes et � compositions : son talent �toit de profiter de ses lectures ; il mettoit � part les choses singuli�res et curieuses, et en ornoit ses compilations : il y a du bon dans quelques uns de ses recueils �[11]. Dans cette tentative de construire sa propre m�moire, l'homme cherchait � laisser le souvenir d'un humble mais opini�tre compilateur. Il r�digea effectivement de bons pouill�s[12] et quelques monographies in�gales ; mais l'essentiel de son �uvre est constitu�e par son monumental Journal eccl�siastique dioc�sain, tenu sans interruption sous plusieurs titres[13] de 1764 � 1810 (55 volumes). Il s'agissait d'un recueil semi-public en ce sens qu'il �tait construit � la mani�re d'un v�ritable p�riodique avec page de titre factice ; Chatrian y compilait des vari�t�s sur divers sujets propres � int�resser un public eccl�siastique : �criture sainte, �loquence, po�sie, droit canon, histoire, sans compter plus de 500 notices bibliographiques... En s'inspirant des journaux existants, Chatrian s'amusait ainsi � produire son propre journal manuscrit, tant pour lui que pour son entourage : ��La distribution trop tardive des journaux de messieurs Joannet et Dinouart, jointe � la difficult� de se les procurer, tant � cause du prix exorbitant o� ils sont mont�s, qu'� cause de la n�gligence des libraires entreposeurs, nous a inspir� le dessein de remplacer ces deux ouvrages p�riodiques si utiles � messieurs les eccl�siastiques, par un journal travaill� � peu pr�s sur le m�me mod�le �[14] Ce journal manuscrit pouvant �tre communiqu� � d'autres eccl�siastiques voisins ou amis, une partie de son contenu posa rapidement des probl�mes de confidentialit�. C'est pourquoi, vers 1770, les anecdotes trop personnelles furent retir�es du journal dioc�sain et regroup�es dans une nouvelle collection de manuscrits r�serv�e � l'usage exclusif de son auteur. Ce Journal personnel commence au moment o� Chatrian entre au service de l'�v�ch�[15] en 1771 et s'ach�ve en 1812 (29 volumes). Egalement tenu sous plusieurs titres[16], le Journal personnel �tait tr�s diff�rent du Journal dioc�sain. R�dig� sous la forme d'un calendrier, il comportait g�n�ralement une page par jour[17] ; chaque jour �tant rempli de courtes anecdotes et nouvelles sur ses confr�res. Le clerg� lorrain d'Ancien R�gime y �tait racont� en fonction des choix tr�s personnels de l'auteur. Des obsessions ressortent, comme celle des moines, accus�s de tous les vices. Et en particulier, celle des chanoines r�guliers, dont le jeune Chatrian avait tant appr�ci� l'�ducation au coll�ge de Lun�ville qu'il avait fait le mur pour tenter de s'engager dans l'arm�e[18] ! Chatrian n'oublia pas ses anciens professeurs et leur accorda une place toute particuli�re dans son journal : dans les ann�es qui pr�c�dent la R�volution, il en parlait en moyenne une fois tous les 5 jours[19], le plus souvent pour d�crier leur laxisme en mati�re �ducative ou pastorale. Voil� comment Chatrian d�crivait le comportement du chanoine r�gulier Galland de Dommartin dans son Journal personnel du 13 avril 1775 : ��Il se loge � l'auberge et y laisse un cahier de chansons tr�s ind�centes. Cette affaire fait du bruit � Charmes. Con�oit-on la conduite d'un sup�rieur de laisser voyager un moine �tourdi, sans principes, sans d�cence, sans religion, dans un temps o� il doit assister aux offices de l'�glise dans sa maison ou du moins dans quelqu'une des maisons de sa congr�gation ? �[20] Chatrian �tait-il seulement � l'affut des pr�tres aux m�urs l�g�res, pour mieux d�noncer la mani�re dont ils s'�taient �loign�s de la gravit� religieuse ? Ou cherchait-il a r�gler des comptes avec son propre pass� en revenant sans cesse sur ces histoires de moines et de chanoines r�guliers, au point de r�diger un Calendrier historico-critico-monastique que l'abb� Vacant d�signera comme ��un des volumes o� son d�faut de charit� s'est le plus affich� �[21]... Le sujet revenait inlassablement, ainsi qu'on le rel�ve douze ans plus tard dans le Journal personnel de 1787 parmi de multiples invectives : ��Nous apprenons seulement une anecdote monastique, qui m�rite d'�tre consign�e dans ce journal : le R.P. Dumesnil, chanoine r�gulier, directeur de l'h�pital de Lun�ville, grand p�nitencier, & le plus rel�ch� de tous les confesseurs possibles, repris par ses propres confr�res sur sa pratique condamnable, persiste effront�ment � r�pandre � grands flots les absolutions les plus sacril�ges � des jeunes gens, qui ont l'habitude criminelle, homicide, etc, de la masturbation, il se contente, en leur donnant une absolution latine, de lire M. Tissot sur l'onanisme. Voil� une pratique du sacrement de p�nitence bien diff�rente de celle des Habert �[22]. Les termes employ�s sont �loquents... ��Nous apprenons seulement �, ��Cette affaire fait du bruit � : Chatrian serait-il un homme de la rumeur publique ? Ce n'est pourtant pas l'image qu'il chercha � donner de lui, lui qui voulut toujours passer pour un homme respectable, un homme de cabinet. 3. COMPILATEUR OU CALOMNIATEUR ? Dans les derni�res ann�es de sa vie, Chatrian d�crivait ainsi ses activit�s dans une de ses rares pages �crites � la premi�re personne : ��Rentr� en France, l'�tat actuel du minist�re me parut si d�plorable, que je renon�ai � m'y lier [...] Je me renfermai alors dans mon cabinet, et je me livrai � des lectures int�ressantes et � des compilations, qui n'�toient dans le fond que des compl�mens de plusieurs recueils commenc�s avant la R�volution, et que l'�migration forc�e avoit emp�ch� de continuer ou de finir [...] Mes �tudes ont pour objet l'�tat ancien et moderne de l'Eglise en g�n�ral, de celle de France en particulier, et sp�cialement celui du dioc�se actuel de Nancy [...] Je change de travail aussit�t que le sujet cesse de me plaire. Je commence souvent des �lucubrations que je ne finis point : j'exp�die des brouillons[23] et j'en fais de nouveaux �[24]. En se pr�sentant ainsi comme un homme d'�tude et d'�rudition, aux tendances misanthropes[25], Chatrian tra�ait de lui-m�me un tableau �logieux d�menti par la masse m�me des manuscrits qui nous a laiss�. Statistiquement, il aura �crit 3 pages par jour, avec un pic � 7 pages par jour autour de 1780[26] ; inutile de dire que la qualit� des investigations ne pouvait �tre toujours au rendez-vous. Son neveu, l'abb� de Girmont, a laiss� un t�moignage bien plus r�aliste sur la l�g�ret� avec laquelle Chatrian recueillait ses informations : ��Soit � Saint-Cl�ment, soit plus tard � Lun�ville, l'hospitalit� � l'�gard des confr�res �tait universelle et cordiale ; venait qui voulait, mais il fallait savoir attendre patiemment au salon l'heure du d�ner ; jusque l�, l'amphitryon �tait invisible. A midi sonnant, il sortait de sa biblioth�que, serrait la main � ses convives, sans les compter, et faisait gracieusement les honneurs de sa table. C'est alors que pleuvaient de toutes parts, les nouvelles de permutations et de r�signations, les anecdotes plus ou moins sal�es, les historiettes parfois invent�es le jour m�me et � dessein. On causait, on narrait, on devisait ainsi jusqu'� deux heures, puis, tout � coup, apr�s un adieu rapide � ses h�tes riant sous cape, Chatrian rentrait, majestueux, dans son cabinet de travail, pour se h�ter d'�crire tout ce qu'il venait d'entendre �[27]. Cette r�putation de comm�re est confirm�e par l'abb� Guillaume, pour qui Chatrian ��accueillait trop facilement, a-t-on dit, les r�cits dont on le savait impatient de grossir ses tablettes et, sans prendre le temps ni la peine d'en v�rifier l'exactitude, il se h�tait de les enregistrer, dans l'appr�hension d'en perdre le souvenir �[28]. La fr�quentation du Journal personnel donne raison � ces t�moignages ; on est frapp� par le nombre de fausses nouvelles que Chatrian a du lui-m�me corriger a posteriori dans la marge. Le Journal personnel de Chatrian a bien �t� le r�ceptacle de toutes les ragots eccl�siastiques circulant dans le Lun�villois. En cel�, le journal permet d'approcher une r�alit� historique trop souvent insaisissable : la rumeur, par sa production, sa circulation mais aussi sa rectification lorsqu'elle s'av�re infond�e. La nature m�me de ce journal, g�n�ralement vexant, parfois diffamatoire, conduisit l'auteur � le remplir avec la plus grande discr�tion. Le cur� de Saint-Cl�ment �tait conscient que ses anecdotes pouvaient discr�diter davantage une Eglise d�j� en position d�fensive dans la France des Lumi�res. Voil� pourquoi le journal �chappa � l'impression, comme l'ensemble des manuscrits de Chatrian : ��J'�cris sans contrainte ; je travaille sans ambition ; je n'ai jamais song� � faire g�mir la presse ; encore moins ai-je pens� � alimenter des langues m�disantes, ou � nuire � de bons pr�tres : j'esp�re que mes manuscrits tomberont en des mains prudentes, et que ceux qui y liront des anecdotes scandaleuses ou des r�flexions critiques, n'en feront d'autre usage que de g�mir profond�ment sur les maux de l'Eglise �[29]. Si Chatrian avait un tel souci de discr�tion, c'est bien qu'il se sentait membre � part enti�re de ce corps eccl�siastique qu'il critiquait avec tant de d�lectation dans l'intimit� de son journal. 4. UN REPRESENTANT DU CLERGE LORRAIN Chatrian consacra finalement toute son existence � raconter le clerg� lorrain, ce clerg� dont il avait l'honneur d'�tre un membre parmi tant d'autres. Lire le journal de Chatrian, c'est voir le monde avec les yeux d'un eccl�siastique qui ne s'int�ressait qu'aux autres eccl�siastiques. Aussi, Chatrian n'eut de cesse de se comparer � ses confr�res dont il soupesait chaque fait et geste. Dans un brouillon de notice autobiographique r�dig�e en fin de vie, Chatrian ne laissait entrevoir aucun doute ni remord. En guise de souvenir, il dessinait un mod�le st�r�otyp� de ��bon cur� �, sans qu'on sache s'il croyait sinc�rement avoir v�cu d'une mani�re aussi exemplaire, ou s'il avait simplement cherch� toute sa vie � se rapprocher d'un id�al : ��Apr�s avoir �tudi� les humanit�s � Lun�ville, la philosophie et la th�ologie � Pont-�-Mousson, et au S�minaire de Toul, les autres sciences eccl�siastiques et les solides principes de religion dont il ne s'est jamais d�parti, il fut fait pr�tre par M. Drouas, et travailla, en qualit� de vicaire, dans plusieurs paroisses difficiles, o� il se forma � un p�nible minist�re. L'attachement qu'il t�moigna partout � la doctrine de l'Eglise, la r�gularit� de ses m�urs, son z�le pour le salut des �mes, et la connoissance qu'il avoit des saintes r�gles de la p�nitence, engag�rent enfin ses sup�rieurs � lui imposer la charge pastorale en le faisant cur� de [Resson] �[30] On remarquera que dans ce texte aux allures d'�pitaphe, Chatrian a soigneusement gomm� son passage � l'�v�ch� de Toul aupr�s de Mgr Drouas (1771-1773). Au lieu d'insister sur ce qui le s�parait des cur�s moyens, il d�cida au contraire de s'en tenir � ce qui le fondait dans la masse du clerg� lorrain, comme l'obtention de quelques vicariats et une liste de qualit�s consensuelles. Ce qui comptait pour Chatrian, c'�tait moins l'ambition personnelle que l'id�e de faire partie du premier corps de la soci�t� d'Ancien R�gime. Lui-m�me disait que l'on ��attribue � sa modestie le refus constant qu'il fit de faire imprimer un seul de ses ouvrages manuscrits �[31], et c'est peut-�tre vrai. Ces ann�es occup�es par un humble minist�re paroissial furent celles au cours desquelles Chatrian fut le plus en phase avec son id�al de petit b�n�ficier, sans �clat ni exc�s, occup� seulement � pointer tous ceux qui s'�loignaient de la ligne moyenne qu'il s'�tait fix�e. Ni aim� ni ha�, il ne laissa finalement qu'un souvenir fort lisse dans sa paroisse de Saint-Cl�ment[32]. Ces ann�es de minist�re r�gl� et discret prirent soudainement fin avec la R�volution. Ce fut pour Chatrian la rupture majeure de sa vie, mais aussi une �preuve r�v�latrice de la v�ritable valeur de chaque pr�tre. R�fractaire de conviction, il estimait disposer de la l�gitimit� n�cessaire � la d�nonciation des �gar�s : ��Il refusa donc un serment schismatique que sa conscience repoussoit avec force, et demeura inviolablement attach� � l'Eglise catholique, apostolique et romaine. D�pouill� de sa cure, menac� d'une d�tention qui pouvoit �tre suivie chaque jour d'un massacre constitutionnel, il a pris le parti d'�migrer, c'est-�-dire de s'�loigner d'une terre maudite qui alloit d�vorer quelques millions de ses meilleurs habitans, et de porter en Allemagne sa foi, ses esp�rances, sa soumission � la volont� de Dieu �[33]. Pour Chatrian, la R�volution ne pouvait faire l'objet d'aucune compromission. R�vant d'un corps eccl�siastique solidaire dans les �preuves, il consacra des centaines de pages � inventorier et � condamner les pr�tres ��r�volutionnaires �, les ��jureurs � et autres ��schismatiques �. Employant ses vieux jours non pas � faire le bilan de sa propre vie, mais � distinguer les ��bons � des ��mauvais � pr�tres, Chatrian s'emprisonna dans une reconstruction manich�enne de l'Eglise d'Ancien R�gime qui influen�a durablement les historiens eccl�siastiques lorrains. S'il faut d�passer cette classification d�pourvue de nuances, on reste frapp� par la coh�rence de l'univers mental d�voil� par ce cur� lorrain, comme un miroir de lui-m�me, mais �galement d'une culture eccl�siastique dans laquelle il baignait. CONCLUSION Le Journal personnel de Chatrian reste une source irrempla�able pour conna�tre le clerg� lorrain de l'Ancien R�gime finissant ; il l'est un peu moins pour les ann�es r�volutionnaires, lorsque les nouvelles se sont faites moins fra�ches et que les jugements de l'auteur se sont faits encore plus tranchants qu'� l'accoutum�e. Bien qu'en apparence d�sincarn�, le journal de Chatrian renseigne �galement sur son auteur. Ce ne sont pas les brouillons autobiographiques, pour ne pas dire hagiographiques, que Chatrian a griffonn�s en fin de vie qui nous renseignent le mieux sur le diariste : on y apprend davantage sur l'image qu'il avait de lui-m�me ou qu'il voulait donner, que sur sa v�ritable personnalit�. C'est en allant � sa rencontre au fil de ses recueils d'anecdotes que l'on d�couvre un homme au centre d'un r�seau d'informateurs plus ou moins fiables, passionn� par la rumeur et l'anecdote, qui se pressait de tout noter de peur d'oublier ce qu'on lui avait racont�. Et s'il entretint une telle passion pendant un demi-si�cle pour tout ce qui touchait au clerg� de Lorraine, c'est que Chatrian �prouvait une v�ritable passion pour un corps eccl�siastique dans lequel il d�sirait se fondre pour n'�tre qu'un maillon de la cha�ne. Et en cela, son journal sort de l'histoire anecdotique pour devenir un double miroir, celui d'un homme et celui d'un milieu, le bas clerg� lorrain d'Ancien R�gime. [1] HINGRE, ��Confesseurs et martyrs de la foi catholique pendant la R�volution �, Semaine religieuse de Saint-Di�, 1879.
[2]
Cit� par J.-M. ORY, ��Le journal d'un eccl�siastique lorrain � la fin de
l'Ancien R�gime �, dans Annales de l'Est, 1971, n�1, p. 51.
[3]
A propos d'Antoine Pierre (1720-1791), cur� de Saint-Boingt. Essai
d'une histoire critique du philosophisme fran�ois, Biblioth�que
Dioc�saine de Nancy (= BDN), MC 8.
[4]
A propos du sous-prieur de l'abbaye de Dom�vre Jean Fran�ois (1722-...).
BDN, MC 118 p.69
[5]
A propos de Claude Joseph Thomassin (1743-1800), vicaire de Jolivet.
Essai d'une histoire critique du philosophisme fran�ois, BDN, MC 8.
[6]
H.-J. THIRIET, L'abb� L. Chatrian (1732-1814), Nancy, Vagner,
1890, p. 38
[8]
BDN, MC 158
[9]
Feuille volante n� 137.
[10]
Il est dit dans le Dictionnaire de biographie fran�aise qu'il y
��si�gea obscur�ment �.
[11]
Feuille volante n�116.
[12]
Pouilli� eccl�siastique et civil du dioc�se de Toul, 1768 (BDN,
MC 141) et 1780 (BDN, MC 145 et 145 bis) ; Pouilli� eccl�siastique du
dioc�se de Nancy, 1779 (MC 147), Pouilli� du dioc�se de Saint-Di�,
1779 (Biblioth�que Dioc�saine de Saint-Di�-des-Vosges (= BDSD)).
[13]
Journal eccl�siastique du dioc�se de Toul (1764-1778, BDN, MC 47
� 70), puis Journal eccl�siastique du dioc�se de Nancy
(1779-1810, BDN, MC 71 � 100).
[14]
Cit� par H.-J. THIRIET, L'abb� L. Chatrian (1732-1814), p. 25
[15]
La s�rie commence � proprement parler en 1771, l'ann�e m�me o� Chatrian
devint secr�taire particulier de Mgr Drouas. Elle est pr�c�d�e par
plusieurs volumes d'Anecdotes Touloises qui semblent avoir �t�
compil�es apr�s coup pour rassembler les nouvelles des ann�es 1754-1771
(Anecdotes Touloises, Biblioth�que Nationale de France (= BNF),
NAF n� 4502 et BDN, MC 101-102). Il n'est pas anodin de constater que
les ann�es 1771 et 1772, au cours desquelles Chatrian recueillait les
rumeurs entendues � l'�v�ch�, ont �t� consid�rablement effeuill�es...
[16]
Anecdotes Touloises ou journal eccl�siastique toulois (1771-1777,
BDN, MC 103-109), puis Anecdotes de Lorraine ou journal
eccl�siastique lorrain (1778-1784, BDN, MC 110-116), Calendrier
historique et eccl�siastique du dioc�se de Nancy (1785-1791, BDN, MC
117-122), Calendrier historico-eccl�siastique (1792-1812, BDN, MC
123-131).
style="margin-top: 0; margin-bottom: 0"
[17]
Sauf sous la R�volution o� l'on trouve deux jours par page.
[18]
H.-J. THIRIET, L'abb� L.
Chatrian (1732-1814), p. 9.
[19]
Recensement fait d'apr�s les ann�es 1786, 1787 et 1788.
[20]
Journal eccl�siastique Toulois, 1775, BDN, MC 107.
[21]
J.-M.-A. VACANT, La Biblioth�que du grand s�minaire de Nancy,
Nancy, Berger-Levrault, 1897, p. 59.
[22]
BDN, MC 119, p. 81
[23]
Cette indication permet de mieux comprendre pourquoi les manuscrits
actuellement conserv�s sont si propres, �crits d'une graphie minutieuse
et sans ratures : Chatrian accumul� des brouillons avant de les mettre
au propre ; et ce n'est sans doute pas un hasard si l'essentiel des
�l�ments autobiographiques font partie des brouillons conserv�s sur
feuilles volantes, �crits � la fin de sa vie comme pr�misses d'un
testament moral qu'il n'aura jamais eu le temps de mettre en forme.
[24]
Feuille volante n�135
[25]
Chatrian est l'auteur de ces r�flexions � ce sujet : ��Heureux l'homme
qui [...] dou� d'ailleurs d'une imagination f�conde et riante, d'une
m�moire richement meubl�e, de quelques talens agr�ables, n'a pas besoin
de chercher hors de soi les mo�ens d'�carter l'ennui ; qui, toujours
bonne compagnie pour lui-m�me, ne connoissant point de meilleure soci�t�
que la sienne, peut se passer ais�ment de celle d'autrui [...] Heureux, en
un mot, l'homme qui sait �tre seul ! �. Cit� dans J.-M. ORY, ��Le
journal d'un eccl�siastique lorrain � la fin de l'Ancien R�gime �, p.
68.
[26]
Ibid., p. 76.
[27]
Cit� par H.-J. THIRIET, L'abb� L. Chatrian (1732-1814), p. 24
[28]
Cit� par J.-M. ORY, ��Le journal d'un eccl�siastique lorrain � la fin de
l'Ancien R�gime �, p. 53
[29]
Feuille volante n�135
[30]
Feuille volante n�137.
[31]
Feuille volante n�116.
[32]
Lettre du cur� Limon de Saint-Cl�ment �crite en 1879, cit� par J.-M. ORY,
��Le journal d'un eccl�siastique lorrain � la fin de l'Ancien R�gime �,
p. 56-57.
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