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La Presse
28 septembre 1914
EN LORRAINE
La capture d'un convoi de la Landwehr
La division fran�aise camp�e
sur la Vezouse, apr�s une marche de nuit de flanc le long du
canal de la Marne au Rhin, avait r�ussi � r�occuper Avricourt.
La position des Allemands, battue par le fort de Manonviller,
menac�e -au nord par la marche de nos trompes, �tait devenue
intenable. Apr�s un violent duel d'artillerie, l'ennemi �vacuait
la ville fronti�re, se retirant en pays annex� dans la direction
de Richecourt.
Dans la journ�e du 21, tandis que nos troupes fortifiaient la
position conquise, barricadant les rues du village et garnissant
d'artillerie les collines du Sanon, nos a�roplanes signalaient
un retour offensif des Allemands, � 15 kilom�tres au sud, sur le
sentier de Richecourt � Blamont. Ainsi donc, l'ennemi n'av ait
repass� la fronti�re � Avricourt que pour rentrer chez nous
quelques heures plus tard, vers Richecourt.
Par la ligne Richecourt-Blamont, impraticable � l'artillerie,
les Allemands ne pouvaient acheminer que de l'infanterie sans la
faire soutenir par le moindre canon. Il y avait certainement l�
une feinte d'attaque plut�t qu'une attaque r�elle. N�anmoins,
plusieurs colonnes ennemies franchissaient les cr�tes, se
dirigeant vers les lignes de la Vezouse, priv�e de La division
qui l'occupaient la veille, et l'avait quitt�s pour r�occuper
Avricourt. Il semblait m�me que les Allemands, loin de
dissimuler leur mouvement, avaient � coeur de signaler leur
pr�sence, car les colonnes suivaient bien ostensiblement les
cr�tes au lieu de se dissimuler dans les vall�es. Ces mouvements
�tranges dur�rent toute la journ�e du.21.
Notre �tat-major n� pouvait �tre dupe : L'ennemi cherchait �
tout prix � attirer notre attention dans la direction de la
Vezouse. Mais dans le but de tenter une op�ration dans, la
r�gion d'Avricourt ? En vain nos aviateurs avaient survol� la
vall�e du Sanon, ni l�, ni sur la rive parall�le du canal, nos
aeros n'avaient d�couvert rien d'insolite. On d�cida alors
d'envoyer un peloton de cavalerie explorer la for�t du Paray,
inaccessible par son feuillage dense � l'oeil de nos
observateurs.
Cependant, au sud, l'infanterie allemande avan�ait toujours,
r�occupant sans peine Blamont d'abord, Dom�vre ensuite, laiss�s
vides de troupes par notre avance sur Avricourt. D'Avricourt,
nos canons avaient bien tent� de saluer l'entr�e de l'ennemi
dans la vall�e de la Vezouse, mais sans grand succ�s, vu la
grosse distance. Restant donc dans une expectative prudente,
notre �tat-major, tout en faisait surveiller par quelques
pelotons de dragons les colonnes allemandes, d�cida de laisser,
avancer l'ennemi, s�rs que nous �tions, � l'heure voulue, de
repousser ais�ment une division de fantassins, que n'appuyait
aucune artillerie et dont la cavalerie �tait insuffisante. Il y
avait, sans nul doute dans cette marche des Allemands au sud,
une feinte pour nous obliger � d�garnir les abords d'Avricourt.
Notre �tat-major ne tarda pus � avoir l'explication de cette
tactique. Ce que n'avaient pu nos reconnaissances d'avions,
notre raid de cavalerie venait de l'accomplir. Une estafette
accourait, en effet, au soir du 21, annoncer au quartier d'
Avricourt que nos cavaliers avaient d�couvert, cach� dans la
for�t de Paray, un train d'�quipage ennemi consid�rable.
L'estafette, vu le nombre. important de troupes ennemies,
accompagnant le convoi, demandait � toute vitesse du renfort
pour l'attaque prochaine.
Nous avions l� l'explication de la feinte allemande vers le sud,
feinte qui ne tendait qu'� nous attirer sur la Vezouze, afin
qu'au nord d'Avricourt, les �quipages ennemis attard�s pussent,
durant la nuit, repasser sans encombre la fronti�re.
Notre �tat-major donna rapidement ses ordres.. Des l'aube, la
for�t du Paray �tait cern�e par un r�giment-de chasseurs
d'Afrique. Sur la ligne Manonviller-Avricourt, quatre batteries
battaient la route. Les �quipages ennemis �taient pris. Un bref
combat sous bois eut raison de leur r�sistance. A 11 heures du
matin, l'ennemi se rendait.
La prise �tait d'importance. Tout le train de la landwehr
bavaroise tombait entre nos mains avec son personnel,
conducteurs, boulangers, infirmiers. Un bataillon entier du 4e
corps compl�tait la prise. De plus, nous capturions vingt autos-
de ravitaillement, y compris deux autos des postes, appartenant
aux 9e et 10e corps allemands; Parmi les tra�nards faits
prisonniers dans la m�me affaire, se trouvaient des soldats des
8e, 13e et 14e corps. Ce m�lange h�t�roclite �tait la preuve du
d�sarroi dans lequel la la bataille de la Marne avait jet� nos
ennemis, et du d�sordre de sa retraite vers la Meuse et
l'Argonne.
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