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Notice sur la vie et les travaux de l'abb� Gr�goire - 1922

(voir aussi les autres documents sur l'abb� Gr�goire)
 

 

Journal des d�bats politiques et litt�raires
17 d�cembre 1922

S�ance publique annuelle de l'Acad�mie des Sciences morales et politiques
[...]
Membre de la classe des sciences morales et politiques de l'institut national
(1750-1831)
par M. Charles Lyon-Caen, secr�taire perp�tuel

M. Charles Lyon-Caen a �crit une �tude des plus captivantes sur l'abb� Gr�goire qui, dit-il, a �t� �� un des personnages les plus originaux de l� R�volution �.
N� en 1750, � V�ho, village situ� � 20 kilom�tres de Lun�ville, d'une famille de modestes artisans, celui qui devait �tre l'�v�que constitutionnel de Blois fit ses �tudes au coll�ge de Nancy, que dirigeaient les J�suites. Ordonn� pr�tre, il fut professeur au coll�ge de Pont-�-Mousson, puis vicaire de Miramont-le-Haut, enfin cur� d'Emberm�nil.
Nous voici en 1789. Les Etats g�n�raux de 1789 sont convoqu�s, l'abb� Gr�goire y est envoy�, le premier de son ordre, par le clerg� de la Lorraine. Le 14 juillet il se r�unit au Tiers, si�ge comme secr�taire � la r�union du Jeu de Paume, et pr�te le fameux serment. A la Constituante, Gr�goire pr�side la s�ance de soixante-douze heures durant laquelle la Bastille fut assi�g�e et prise.
Dans la discussion relative � la d�claration des Droits, il pr�senta notamment deux motions dont la premi�re fut adopt�e. Il demanda que le nom de Dieu f�t plac� en t�te de ce monument constitutionnel. �� L'homme, dit-il � la tribune, n'a pas �t� jet� par le hasard sur le coin de terre qu'il occupe, et, s'il a des droits, il faut parler de Celui dont il les, tient. � Puis il insista pour qu'� la d�claration des Droits de l'homme et du citoyen, on joign�t celle de leurs devoirs. II y a entre les uns et les autres une �troite corr�lation, et, en se bornant � proclamer les premiers, on risque de favoriser le d�veloppement d'un individualisme exag�r�, au d�triment de l'int�r�t g�n�ral du pays.
La Constitution civile du clerg� une fois vot�e, le cur� d'Emberm�nil h�site, et avec lui tous ses confr�res; ces h�sitations sont d'autant plus grandes que le pape, consult�, gardait le silence et que le roi, apr�s avoir donn� des signes manifestes de r�pugnance et de r�sistance, avait fini par accorder sa sanction.
Gr�goire ne tarda pas � prendre une d�cision d�finitive. Il fut m�me le premier des pr�tres de l'assembl�e � pr�ter le serment � la tribune. Les premi�res paroles qu'il pronon�a furent pour montrer qu'il connaissait et comprenait les doutes de beaucoup de ses coll�gues et qu'il rendait hommage � leurs scrupules sans les partager. �� On ne peut se dissimuler, dit-il, que beaucoup de pasteurs tr�s estimables et dont le patriotisme n'est pas �quivoque, �prouvent des anxi�t�s parce qu'ils craignent que la Constitution fran�aise ne soit incompatible avec les principes du catholicisme. Nous sommes aussi invariablement attach�s aux lois de la religion qu'� celles de la patrie. Mais, apr�s, le plus m�r examen, nous d�clarons ne rien apercevoir dans la constitution civile du clerg� qui puisse blesser les v�rit�s saintes que nous devons croire et enseigner. � Aussit�t apr�s cette d�claration, Gr�goire pr�ta le serment dans les termes suivants �� Je jure de veiller avec soin aux fid�les dont la direction m'est confi�e, je jure d'�tre fid�le � la nation, � la loi et au roi, je jure de maintenir, de tout mon pouvoir, la Constitution fran�aise d�cr�t�e par l'Assembl�e nationale et accept�e par le roi, et notamment les d�crets relatifs � la constitution civile du clerg�. �
L'abb� Gr�goire est �lu �v�que constitutionnel dans le Loir-et-Cher et dans la Sarthe : il opte pour le si�ge de Blois et l'occupe jusqu'en 1801, �poque o� il doit se d�mettre. Tr�s aim� de ses dioc�sains, comme nagu�re, de ses paroissiens d'Emberm�nil, l'�v�que de Blois est envoy� � la Convention par le d�partement du Loir-et-Cher. M. Lyon-Caen nous le montre dans l'accomplissement de son mandat hostile � la royaut�, r�publicain dans l'�me, il assiste au proc�s de Louis XVI.
Gr�goire en �tait partisan et combattit l'argument tir� de l'inviolabilit� royale. Mais, en m�me temps, il rappelait qu'il �tait l'adversaire de la peine de mort, un reste, disait-il, de barbarie destin� � dispara�tre des codes de l'Europe. Il ajoutait que le ci-devant roi devait �tre le premier � b�n�ficier de l'abolition de la peine capitale.
Quand la sentence fut rendue, Gr�goire n'�tait pas pr�sent par suite, il ne prit pas part au vote. Il avait, quelque temps auparavant, re�u une mission avec trois membres de la Convention, H�rault de S�chelles, Jagot et Simon; ils avaient �t� charg�s de se rendre en Savoie et dans le comt� de Nice, r�unis � la R�publique en ex�cution du voeu spontan� des populations, pour y organiser l'administration fran�aise dans les d�partements du Mont-Blanc et des Alpes-Maritimes. Les trois coll�gues de Gr�goire estim�rent que, ne pouvant pas voter en s�ance sur une aussi grave question, ils avaient, du moins, le devoir d'exprimer publiquement leur opinion. Ils r�dig�rent un projet de lettre dans laquelle ils se d�claraient partisans de la condamnation � mort. Gr�goire ne consentit � donner sa signature qu'� l� condition que les mots � mort seraient supprim�s. Ainsi fut-il fait, et c'est du texte de la lettre modifi�e qu'il fut donn� lecture � la Convention. Les signataires furent m�me d�nonc�s au club des Jacobins pour n'avoir pas rempli compl�tement leur devoir de citoyens. Cela n'a pas emp�ch� plus tard des adversaires acharn�s de Gr�goire, qu'ils voulaient faire passer pour r�gicide, sp�cialement sous la Restauration, de faire reproduire la lettre en y r�tablissant les mots � mort...
Dans deux circonstances m�morables, l'�v�que de Blois montra la fermet� de son caract�re, son courage, la profondeur de ses croyances et sort attachement � ses fonctions �piscopales.
Le 17 brumaire, an II (7 novembre 1793), � la veille de l'�tablissement du culte de la Raison, eut lieu la sc�ne des abjurations. Les pr�tres du clerg� de Paris, ayant � leur t�te l'�v�que Gobel et accompagn�s de membres de la Commune, se pr�sent�rent � la barre de la Convention. Ils d�clar�rent renoncer � leurs fonctions de ministres du culte catholique et d�pos�rent leurs attributs sacerdotaux. Quelques-uns ne se born�rent pas � cette d�claration et fl�trirent les croyances qu'ils avaient jusqu'alors profess�es. Il s'en trouva qui pouss�rent le cynisme et la l�chet� jusqu'� dire qu'ils avaient �t� des charlatans et qu'ils �taient fatigu�s d'enseigner le mensonge. Gobel, dit-on, �changea sa mitre contre le bonnet rouge.
Pendant que se d�roulait cette sc�ne, Gr�goire prenait part aux travaux du Comit� d'instruction publique. Instruit de ce qui se passait, il entra dans la salle des s�ances et il monta � la tribune, pour affirmer �nergiquement sa foi et sa volont� de conserver ses fonctions d'�v�que. �� Ma croyance, dit-il, selon ce qu'il rapporte, est hors de votre domaine ; catholique; par conviction et par sentiment, pr�tre par choix, j'ai �t� d�sign� par le peuple pour �tre �v�que, mais ce n'est pas de lui, ni de vous, que je tiens ma mission. Agissant d'apr�s les principes sacr�s qui me sont chers et que je vous d�fie de me ravir, j'ai d�cid� de faire du bien dans mon dioc�se, je reste �v�que pour en faire encore. �
Ces nobles et courageuses paroles, furent couvertes par les hu�es de l'assembl�e. Pendant plusieurs mois, quelques-uns de ses coll�gues refus�rent de s'asseoir aupr�s de celui qui les avait prononc�es. Il fut d�nonc� dans les clubs, et des placards le signal�rent � la ̃ fureur de la multitude. Trois individus se pr�sent�rent le lendemain chez lui, pour t�cher d'obtenir qu'il r�tract�t ses d�claration de la veille. Voyant qu'ils n'y parviendraient ni par des promesses, ni par des menaces, l'un d'eux s'�cria �� Tu as mont� deux marches de l'�chafaud, tu monteras bient�t la troisi�me. - Je suis pr�t, r�pondit Gr�goire, vous pouvez en �tre assur�, je ne d�mentirai jamais mes croyances. �
Ici encore, on ne saurait mieux faire que de citer l'auteur de l'Histoire religieuse de la R�volution. Apr�s avoir admirablement d�crit cette sc�ne honteuse des abjurations, M. de La Gorce �crit �� En cette rage de s'abaisser, un seul homme garda le souci de la fiert� chr�tienne. Pendant la sc�ne qu'on vient de rapporter, l'abb� Gr�goire �tait au Comit� de l'Instruction publique. A la nouvelle du tumulte, il entra en s�ance rev�tu de sa robe �piscopale qu'avec une fi�re �nergie il s'acharnait � porter. A la h�te, il tra�a quelques mots o� se r�sumait sa profession de foi. Puis, il gravit la tribune. Gr�goire n'abdiqua ni sa qualit� d'�v�que, ni sa qualit� de chr�tien, il revendiqua l'une et l'autre, et, quelle qu'ait �t� la forme du discours, cela suff�t pour son honneur. �.
II faut encore mentionner une autre courageuse intervention de l'�v�que de Blois. Il fut le premier, apr�s le 9 Thermidor, � �lever publiquement la voix en faveur de la libert� religieuse...
Gr�goire prit part aux discussions relatives � la d�claration des Droits plac�e en t�te de la Constitution de 1793, comme il avait particip� � celles de la d�claration des Droits de 1791. Un titre y �tait consacr� aux rapports de la R�publique fran�aise avec les nations �trang�res. Il proposa d'y ins�rer quelques articles constituant une d�claration du droit des gens qui indiquaient les droits et les obligations r�ciproques des Etats. Sa proposition ne fut pas prise en consid�ration. Il serait, pourtant, bien utile de poser quelques principes clairs et pr�cis sur les droits et les devoirs des nations, aussi bien que sur ceux des citoyens. L'id�e de Gr�goire a �t� reprise r�cemment apr�s la derni�re guerre. Une grande association, l'Institut am�ricain de Droit international, a �tabli le texte de cette d�claration des droits et des devoirs. D'autres groupements analogues se pr�parent � imiter cet exemple qui, un jour sans doute, sera suivi par la Soci�t� des nations.
Gr�goire fut membre du Conseil des Cinq-Cents jusqu'en 1798 et, apr�s le 18 brumaire, il entra au Corps l�gislatif, � la pr�sidence duquel il fut �lu. Il comptait sur Bonaparte pour consolider la R�publique et les libert�s. Son illusion fut de courte dur�e. Gr�goire ne perdit pas une occasion de bl�mer le ma�tre qui, irrit�, fit tout pour emp�cher Gr�goire d'entrer au S�nat. Il fallut qu'il f�t pr�sent� trois fois par le Corps l�gislatif pour que Gr�goire f�t �lu. Il demeura, au S�nat, fid�le � ses id�es lib�rales et d�mocratiques; il continua son opposition � Bonaparte et vota contre le Senatus-Consulte �tablissant l'Empire.
Gr�goire ne fut pas au nombre des s�nateurs de l'Empire appel�s � faire partie de la Chambre des pairs apr�s le retour des Bourbons, et Napol�on ne l'appela pas dans la Chambre des Cent Jours.
Sous la seconde Restauration, il ne fut pas seulement laiss� de c�t�. Il fut l'objet de v�ritables pers�cutions.
De 1795 � 1803, il avait, comme membre de l'Institut, fait partie de la classe des sciences morales et politiques. Lors de la suppression de cette classe, en 1803, ses membres furent r�partis dans les autres classes. Gr�goire fut plac� dans celle d'histoire et de litt�rature ancienne. Bien qu'il ne f�t pas r�gicide et n'e�t accept� de l'usurpateur aucune fonction, il fut, avec 21 autres membres, exclu de l'Institut par l'ordonnance royale du 11 mars 1816.
Le gouvernement chercha m�me � retirer � Gr�goire ses moyens de vivre. Pendant plusieurs ann�es, la pension due aux anciens s�nateurs lui fut refus�e, au m�pris des dispositions de la charte constitutionnelle.
En 1819, Gr�goire fut �lu d�put� de l'Is�re. Cette �lection ne plut ni au roi, ni � la majorit�.
Et il fut l'objet de vexations et d'incorrections sans nombre ; puis, on r�solut d'annuler son �lection. M. Lyon-Caen conte ainsi l'incident :
La Commission, � la majorit�, conclut � l'annulation pour ill�galit�. De diff�rents c�t�s, pour �viter une discussion violente, on pressa Gr�goire de pr�venir la d�cision de la Chambre en donnant sa d�mission. Il crut qu'en suivant ce conseil, il manquerait � son devoir envers ceux qui l'avaient librement �lu. Aussi, le 6 d�cembre 1819, l'examen de la proposition de la Commission vint, en s�ance publique. Des d�put�s se prononc�rent pour l'annulation en invoquant l'un ou l'autre des motifs indiqu�s. Au milieu d'un effroyable tumulte, le Pr�sident posa ainsi la question �� Que ceux qui sont partisans de l'annulation de l'�lection de M. Gr�goire n'importe pour quelle raison... � A peine le Pr�sident eut-il prononc� ces mots qu'un grand nombre de d�put�s se lev�rent, au milieu des applaudissements et des cris de triomphe de la droite et du centre.
Ainsi, Gr�goire n'avait plus aucune fonction. Il lui restait seulement le grade de commandeur de la L�gion-d'Honneur qui lui avait �t� conf�r� avec le titre de comte comme une sorte d'accessoire de sa qualit� de s�nateur. Une ordonnance royale de 1816 avait prescrit � tous les membres de cet ordre de se faire d�livrer de nouveaux brevets. Gr�goire renvoya au grand Chancelier, le mar�chal Macdonald, son brevet originaire et lui �crivit une lettre pour lui expliquer sa d�termination de ne pas en demander un nouveau. Repouss� de l'Institut, repouss� de la Chambre des d�put�s, il d�clarait vouloir, � ces deux exclusions, en ajouter lui-m�me une troisi�me et renoncer � son grade.
La R�volution de Juillet r�jouit Gr�goire.
Il ne surv�cut pas longtemps � cette satisfaction. Frapp� d'un mal incurable, en 1831, il ne tarda pas � sentir les approches de la mort. Il exprima alors le d�sir que le cur� de sa paroisse (l'Abbaye-aux-Bois) v�nt lui administrer les derniers sacrements. Le cur� se rendit � cette invitation en compagnie d'un jeune pr�tre. Celui-ci voulut entamer avec le malade des discussions th�ologiques ; il lui fit entendre qu'il devait se r�concilier avec l'Eglise et que la condition pr�alable �tait la r�tractation du serment que, quarante ans plus t�t, il avait pr�t� � la constitution civile du clerg�. Gr�goire s'y refusa par cette fi�re r�ponse : �� jeune homme, ce n'est pas sans un m�r examen que j'ai pr�t� le serment que vous me demandez de renier ; ce n'est pas non plus sans de s�rieuses m�ditations au pied de la croix que j'ai accept� l'�piscopal, alors qu'il ne pouvait �tre un sujet d'ambition ; et, toutes ces choses, je les ai faites avant que vous ne fussiez au monde. �
Inform� de ce qui se passait, l'archev�que de Paris, Mgr de Qu�len, �crivit � Gr�goire une lettre pour le d�terminer � une r�tractation de son serment. Gr�goire eut assez de force pour y faire une longue r�ponse. Pendant quinze jours, jusqu'au moment o� l'agonie commen�a, cette correspondance continua par un �change de notes. Elle n'avait eu aucun r�sultat,. Gr�goire �tait demeur� in�branlable.
Des personnes qui encouraient le malade et lui-m�me s'adress�rent alors � l'abb� Guyon, nomm�, �v�que de Beauvais.
L'abb� Guyon loin de partager les opinions de Gr�goire, les avait souvent combattues, mais il crut que l'humanit� lui faisait un devoir de se rendre aupr�s d'un mourant abandonn� et, apr�s une derni�re tentative inutile faite aupr�s du chef du clerg� de Paris, il administra � Gr�goire les derniers sacrements, qu'il r�clamait avec tant d'insistance.
Gr�goire mourut le 28 mai 1831. Ses obs�ques eurent lieu trois jours apr�s, en l'�glise de l'Abbaye-aux-Bois que les pr�tres avaient d�pouill�e de tous ses ornements. La messe fut dite par un abb� �tranger � la paroisse, tr�s mal not� pour avoir baptis� un enfant dont Manuel �tait le parrain.
L'affluence fut consid�rable. Le gouvernement fit rendre au d�funt les honneurs militaires dus au commandeur de la L�gion d'Honneur, bien qu'il e�t refus� de faire renouveler en 1819 le brevet qui lui avait conf�r� ce grade. Au sortir de l'�glise, des jeunes gens d�tel�rent les chevaux du char fun�bre et le tra�n�rent � bras jusqu'au cimeti�re o� un hommage, fut rendu � Gr�goire par un de ses anciens coll�gues de la Convention, Thibaudeau.
Nous aurions aim� reproduire de plus larges extraits de la belle �tude de M. Lyon-Caen. La place nous fait d�faut. Voici quelques passages des pages par quoi elle se termine :
Peu d'hommes ont �t� l'objet de jugements plus contradictoires que celui dont je viens de retracer la vie et d'exposer les travaux. S'il a suscit� d'admiration des uns, si l'on est all� jusqu'� soutenir qu'il aurait d� �tre honor� comme un saint, il a �t� l'objet de l'animadversion et de la col�re des autres qui l'ont fl�tri comme un r�volutionnaire et comme un impie. Ces appr�ciations contraires remontent, en g�n�ral, � l'�poque m�me o� se posaient les graves questions d'ordre politique ou religieux sur lesquelles Gr�goire a d� se prononcer ou, tout au moins, � une �poque voisine. Alors, autour de ces questions, les passions violentes et aveugles des partis �taient d�cha�n�es.
Avec le temps qui s'�loigne, les passions s'apaisent et les discussions qui les ont provoqu�es ne pr�sentent plus gu�re qu'un int�r�t historique. Aussi semble-t-il que nous puissions porter actuellement sur Gr�goire un jugement impartial qui ne soit influenc� ni par les pr�f�rences politiques et religieuses.
Gr�goire a �t� un des personnages les plus originaux de la R�volution. I� a pu commettre des fautes. Mais on doit reconna�tre qu'il a montr� de rares et nobles qualit�s. Il a �t�, dans toute la force du terme, un homme de caract�re. Au milieu des �v�nements les plus divers, sous les r�gimes politiques les plus vari�s, sa conduite a �t� constante, conforme � quelques grandes id�es auxquelles il est demeur� inflexiblement fid�le. Jamais l'int�r�t du moment, jamais la menace, jamais le danger, n'a pu les lui faire abandonner. Aussi jamais les adversaires du pr�tre �� jureur �, de l'�v�que constitutionnel n'ont pu �lever un soup�on s�rieux contre le d�sint�ressement de l'homme d'honneur qui est rest� fid�le � ses voeux. Profond�ment attach� � la foi catholique, il a proclam� ses croyances, et, pour les d�fendre, il a parfois expos� sa vie. La R�publique ne lui �tait pas moins ch�re que la religion. R�publicain d�s la fin de l'Assembl�e constituante, il l'est demeur� sous l'Empire et jusqu'� sa mort. Dans toutes les assembl�es politiques, il a toujours combattu pour la libert�. D'un bout � l'autre de sa vie, il a �t� aussi le d�fenseur inlassable des esclaves, des malheureux, de tous les damn�s de la terre. S'il a prononc� trop souvent des paroles passionn�es, m�me violentes, il n'a particip� � aucun acte de violence. Il semble qu'il ait parl� avec exaltation pour se m�nager d'agir avec douceur. Il a montr� souvent une v�ritable g�n�rosit� envers ses plus fougueux adversaires, il a contribu� � leur sauver la vie.
Comment ne pas rappeler aussi qu'il a �t� l'�nergique d�fenseur des monuments et des richesses litt�raires et artistiques de la France et l'un des promoteurs d'�tablissements scientifiques qui ont surv�cu � toutes nos r�volutions et qui sont l'honneur de notre pays ? Aussi, en parlant de l'abb� Gr�goire dans cette s�ance acad�mique, je n'ai pas, me semble-t-il, seulement fait l'�loge d'un homme qui, apr�s avoir �t� t�moin et acteur dans les conflits les plus ardents du pass�, m�rite par ses hautes et rares qualit�s morales, d'�tre cit� en exemple, j'ai acquitt� une dette de reconnaissance.

 

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