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Lun�ville - La
commune - 1265-1589
(notes renum�rot�es)
M�moires de
la soci�t� d'arch�ologie lorraine
1868
Recherches
historiques sur la ville de Lun�ville
La commune
(1265-1589)
Droits et usages de Lun�ville et villages voisins
Par M. Alexandre Joly.
En l'an 1182, dans le
but d'achalander sa petite ville de Beaumont-en-Argonne
et d'y attirer des habitants, Guillaume de Champagne,
cardinal-archev�que de Reims, eut la g�n�reuse pens�e de
lui octroyer une charte d'affranchissement et de
coutumes, vulgairement appel�e Loi de Beaumont.
C'�tait un m�lange h�t�rog�ne de pr�rogatives
pr�cieuses, de pr�occupations pu�riles, de dispositions
p�nales, de concessions r�ciproques, entass�es
p�le-m�le, sans intention logique, ni but d�termin�,
mais qui r�alisaient un progr�s immense, dans ces temps
de violences, d'arbitraire et de barbarie, comme premier
pas vers le r�gime l�gal, � la faveur duquel les peuples
allaient passer de l'�tat de servage � celui de
bourgeoisie.
Quand la r�volution communale atteignit lentement nos
contr�es gallo-germaniques, la cause �tait gagn�e ; le
principe des affranchissements acquis � l'humanit�, Tout
retour vers l'ordre de choses ancien �tait, sinon
impossible, du moins impolitique ; toute r�sistance
s�rieuse de la part des seigneurs lorrains, sinon
impraticable - l'�v�nement l'a prouv�, - du moins
dangereuse, irritante, et la lutte ouverte
compromettante au dernier degr�.
Apr�s les r�sistances de Neufch�teau et une lutte
inutile avec les bourgeois, lutte qui prenait chaque
jour une nouvelle extension et mena�ait de se renouveler
sans fin, les ducs de Lorraine, de guerre lasse,
consentent enfin � affranchir leurs sujets. Ferry III,
sous l'influence lib�rale du comte de Champagne, sou
beau-p�re, met en franchise les principales villes et
bourgs de la Lorraine.
Des lettres de promesse, donn�es � Troyes, la veille de
la R�demption, l'an 1265, mettent � la Loi de Beaumont
(1) les villes de Nancy, Saint-Nicolas, Lun�ville,
Gerb�viller et Amance.
�� Je Ferris, dus de Loheraigne et marchis, fais � savoir
� tous que si je alois, en tout ou en partie, dont Dieu
me garde, contre les convenances contenues �s lettres
que mes tr�s-chier sires Thi�baut, par la gr�ce de Dieu,
roy de Navarre, de Champagne et de Brie, cuens palatins,
a donn�es et scell�es de son s�el, par ma pri�re et par
ma requeste, aux bourgeois de Nancy, aux bourgeois de
Port qu'on dit Saint-Nicolas, aux bourgeois de Leneville,
aux bourgeois de Gellibervillier et aux bourgeois de
Amance, de recongnoissance que je les ay mis � la loi et
� la franchise de Beaumont, ainsy comme ses lettres, qui
de ce sont faictes, le tesmoignent, et les devant dits
bourgeois en fussent plaintifs � Monseigneur le roy
devant dict, je veux et octroye, et l'ay voulu et
octroy� et requis au devant dict roy Monseigneur, qu'il
me contraigne ou face contraindre � garder et � tenir
les devant dictes convenances, par le mien prennant,
sans meffaire de ce que je tiens de luy en fi� et en
hommaige. Ce est � s�avoir, tous les fiez que je tiens
de luy qui sont en mon domaine, ou que l'on tient de moi
et ailleurs, partout o� l'on pourroit trouver du mien,
et qu'il les puisse saisir et tenir jusques � tant que
je eusse deffait ce que j'y aurois entrepris. Et ainsi
en oblige � tous mes biens especiaument au devant dict
roy Monseigneur.
�� Et dureront ces convenances et cest obligement, tant
comme mes sires li roy devant dict vivra ou je vivrai.
�� Et en tesmoignage de v�rit�, je en ai donn� �
Monseigneur roy, devant dict, ces lettres s�ell�es de
mon s�el, qui furent faictes et donn�es � Troyes, le
Grand-Jeudy devant la R�surrection de Nostre-Seigneur,
quant li miliaires courroit par mil deux cent et
soixante cinq ans (2) �.
Les seigneurs, en mettant les communes en franchise,
c�daient � l'entra�nement et � la force, on n'en saurait
douter; l'esprit r�volutionnaire des communes, avec ses
�meutes, ses exc�s et ses terribles r�pressions, ressort
avec �vidence du peu de d�tails que nous ont conserv�s
les chroniqueurs contemporains ; ils en voulaient �
Ferry III d'avoir mis un frein � leurs d�pr�dations, au
point de le surprendre dans un guet-apens et de
l'emprisonner. �� C'est apr�s avoir vainement essay�.par
men�es sourdes et brigues de traverser privil�ges et
franchises qu'avait Monseigneur donn� et gratifi�
certains lieux, qu'ils conspir�rent contre sa personne
(3) �.
Ils �taient donc int�ress�s � accorder le moins
possible, et, dans certains cas, � glisser; s'il �tait
en leur pouvoir, sur les dangereuses innovations
introduites par la Loi de Beaumont, vis-�-vis de
populations moins exigeantes que d'autres ou plus
port�es � se contenter de concessions mat�rielles (4).
C'est ainsi que la charte de Pont-Saint-Vincent est, �
peu pr�s, ce que nous connaissons sous le nom de Loi de
Beaumont : que celle de Ch�tel-sur-Moselle renferme, en
quinze articles, quelques-unes des stipulations de la
Loi de Beaumont m�lang�es avec d'autres toutes locales ;
qu'enfin les Droits et Usages de Lun�ville, octroy�s en
suite des lettres de promesse de 1265, n'ont gu�re que
des rapports g�n�raux, �loign�s, inconnus, sinon
contradictoires avec la Loi de Beaumont.
La Loi ou Coutume de Beaumont est donn�e en bloc et sans
r�serve � chacune des communes; mais aucune des lettres
qui constatent ce fait ne reproduit le texte de cette
loi. Dans les titres qui nous sont parvenus, elle n'est
jamais publi�e dans son int�gralit� (5) ; des lettres
d'affranchissement, accord�es par le m�me seigneur,
contiennent, d'un lieu � l'autre, des variantes
capricieuses que l'on ne peut expliquer par les
diff�rences de r�gime du sol ; et nous pensons, avec M.
No�l, �� qu'ils ont donn� en grand nombre, � des
communes, sous le nom de Loi de Beaumon t, des
stipulations diff�rentes et moins lib�rales (6) �.
Un fait qui induit � penser que les chartes r�ellement
conc�d�es ont �t� �crites, et que la plupart de celles
qui nous sont parvenues renferment bien tous les droits
des communes, c'est que, sous les r�gnes de Jean Il et
d'Antoine, diff�rentes localit�s perdirent les
privil�ges que leur assurait la Loi de Beaumont, parce
qu'elles ne purent reproduire les chartes qui leur
garantissaient ces franchises (7).
Dom Calmet, dans son Histoire de Lorraine, constate que
la Loi de Beaumont a �t� donn�e aux villes suivantes :
Montfort., Ch�tenoy, Bruy�res, Arches, Frouard et
Dampierre, en 1263; Nancy, Saint-Nicolas, Lun�ville,
Gerb�viller et Amance, en 1265; Varennes, en 1243.
Aujourd'hui, nous connaissons un bien plus grand nombre
de villes, notamment Pont-Saint-Vincent, Dolcourt,
Ch�tel-sur-Moselle, Charmes, Saint-Di�, etc.: sans
parler des recherches entreprises pour la Collection des
monuments du Tiers-Etat, qui mentionnent, dans la
Meurthe et la Meuse seulement, trente et une autres
villes dont les titres sont connus (8).
Les Droits et Usages de Lun�ville et villages voisins
forment un ensemble complet et satisfaisant, sans renvoi
ni r�serves ; il serait difficile de n'y voir qu'une
sorte de suppl�ment � la Loi de Beaumont. Leurs vingt
articles renferment, dans le vidimus des archives
municipales, deux cent cinq lignes in-folio. Il est vrai
que ce document reste absolument muet sur l'�tat des
personnes et les formes de la justice, tant au civil
qu'au criminel, et qu'il faut alors supposer qu'il y
avait, dans les institutions du temps, quelque
compl�ment de fait, maintenu � la satisfaction de tous,
qu'il �tait inutile de rappeler. On ne saurait,
n�anmoins, conclure formellement de ce silence le
maintien absolu ou l'abolition compl�te du droit de
main-morte.
Ce qu'il est permis d'affirmer, c'est que, sous Ren� Il,
la plupart des communes auxquelles on avait accord� des
chartes de r�glement de droits �taient loin d'�tre
affranchies et habit�es par des hommes libres (francs
bourgeois), c'est-�-dire, pouvant, � leur gr�, changer
de domicile, de seigneuries, se marier avec un sujet
�tranger, acqu�rir sans la permission du ma�tre, mourir
sans danger de tout perdre. Nonobstant le d�sir du
souverain d'am�liorer la condition de ses sujets par
l'abolition du droit d'aubaine et de main-morte dans ses
domaines particuliers, il y avait encore, en plein
dix-huiti�me si�cle, sous le r�gne de L�opold, des
main-mortables en grand nombre ; et il a fallu user de
force, tant le mal �tait inv�t�r�, pour amener les serfs
du domaine � accepter l'affranchissement qui leur �tait
pour ainsi dire impos�.
Il faut consid�rer aussi qu'au XIIIe si�cle, le pays
lorrain �tait constitu� ; sa chevalerie, justement
estim�e, rendait la justice au criminel (Assises), et
dans les grandes causes de temps imm�morial, jusque vers
la fin du XVIIe si�cle, sous Charles IV. Quant au civil,
l'institution r�cente des pr�v�t�s, qui remonte, dit-on,
� Mathieu Ier (1139-1176), et celle des bailliages �
Mathieu II (1220-1251), et peut-�tre au del�, compl�t�e
par l'adjonction des douze jur�s choisis, �lus
librement, par leurs pairs, dans le sein de la commune,
en mettant un frein � l'arbitraire des seigneurs et aux
iniquit�s de leurs justices, devait couper court � toute
r�clamation ult�rieure et enlever sa raison d'�tre �
toute esp�ce d'innovation, dans la l�gislation ancienne,
�crite ou coutumi�re du pays.
J'en reviens aux concessions mat�rielles qui ont d�
singuli�rement flatter nos bons a�eux, et ne suis
nullement �tonn� de la large place qu'elles occupent,
dans nos Droits et Usages, en comparaison des principes
abstraits sur lesquels se fonde le droit et s'appuie la
r�sistance.
En r�sum�; la Loi de Beaumont a �t�, pour nos contr�es,
un id�al, quelque chose d'analogue, en moindres
proportions, � la constitution anglaise vis-�-vis des
modernes constitutions de l'Europe ; les l�gislateurs
ont tenu compte du milieu dans lequel ils vivaient: ils
ont admis le principe, mais non la lettre.
ASSEMBL�E COMMUNALE.
Chaque ann�e, le premier mardi apr�s l'Epiphanie, jour
d'ouverture des plaids bannals ou annaulx, qui se
tenaient, en �� l'escoutoir �, auditoire des causes, �
l'�tage sup�rieur du b�timent des Halles (9); la
commune, convoqu�e, au son de la ban-cloche, se
r�unissait pour entendre la lecture de la charte,
formalit� par laquelle on ouvrait la s�ance avant de
passer � la discussion des affaires communales et de
proc�der � la r��lection des magistrats,
Le registre des R�solutions du Conseil de ville, pour
l'an 1590, nous a conserv�, avec des traces pr�cieuses
de l'antique c�r�monial, quelques traits de la
physionomie de ces assembl�es, dans le proc�s-verbal de
s�ance d'une de ces r�unions, qui fut pr�cis�ment la
derni�re.
�� Ledit jour, premier mardy d'apr�s l'Aparition Nostre
Seigneur (1590), environ l'heure de midy, estant ladite
commune, convocqu�e et amass�e, au son de la cloche, sur
la halle de ce lieu, les portes de la ville ferm�es, et
les clefs d'icelles apport�es sur table, comme il est de
coustume et anciennet� ; messieurs les magistrats,
officiers, gens de justice et gouverneurs de ville,
assis chacun en leur si�ge, � l'entour de ladite table,
les gouverneurs de l'h�pital et douze jurez de la ville
de part et d'aultre; et le reste de ladite communaut�
aux environs, apr�s que le cry a est� faict par ung des
sergents au Sr pr�vost, de par Son Altesse et de par
ledit sieur pr�vost, de faire silence jusques a ce que
les Droicts et Usages de la ville soyent leues, ou que
ceulx qui ne sont de ladite commune et desdits droits et
usages eussent incontinent � se retirer. Le clerc-jur� a
faict la lecture du roolle desdicts droicts et usages
contenant ce que sensuyt : �
�� L� sont les Droicts et les Usaiges que ceulx de
Lun�ville; de Viller; de Mesnil, de Moncel, de
Rehenviller et d'Auldom�nil ont; Lesquels Droicts et
Usaiges se renouv�lent chacun ans, au jour du plaid
bannal, que se tient le mardy apr�s l'Aparition Nostre
Seigneur, aincy comme il est dict dessus d'aneiennetey
PREMIER. - Les prodomes, de ceste ville, ont teil
ussaiges que, le lendemain de No�l, ils font lour grande
garde et la menue, et cil ne puellent trouver gardier ne
pourthier ils le puellent faire une autre fois.
II. - Encor ont les prodomes, de ceste ville, teils
usaiges que le, dimanche apr�s No�l, ils font quatre
messiers de qui qu'llz lour plai ; dous messiers pour
savellon et dous messiers pour fort terres, et doient
garder lesdits dous messiers, dez la ripvi�re de Vezue
(10), en ensa, et puellent panre, entre les dous yalwes,
lesquels des quatre messiers qui viennent devant, et on
bordin du Chasteil en Vezue, et en la ville, et en
foss�s de la forteresse de la ville, se ils sy treuvent
nuls maulfaitours. Et doient garder, les quatre
messiers, les biens desdits prodomes, sans rien panre ne
donner par maistrie, se �a n'est d'aulcuns prodomes que
lour veuille donner une quarte de vin ou dons, en
courtoisie, pour bien garder ses biens ; maix ils ne
doient rien panre pour soffrye, affaires, dopmaiges,
m�me doient rien panre du raichact des malfaitours
qu'ils trouveroient rnalfaisans ; et, on cas qu'ils
feroient le contraire, ils seroient en dangier du
pr�vost ; et doient rendre les dopmaiges ou gaiges �
ceulx � cui lesditz dommaiges seroient faicls, et
puellent panre que leur voulroit donner en mouesson du
bleif.
III. - Encor ont les prodomes, de ceste ville, teil
usaiges, qu'ils font aujourd'hui trois portiers pour
lour trois portes de cui qu'il lour plait ; et cil ne
les puellent faire aujourd'hui, ils les puellent faire
une autre fois.
IV. - Encor ont les prodomes, de ceste ville, teil
usaiges, que, auljourd'hui, ils font lour fouretiers por
garder lour fouresse, de cui quil lour plait; et ont
encore teil usaiges ceulx de ceste ville, Viller,
Mesnil, de Moncel, de Chanteheu de Huiveller (11) ;
c'est assaveolr, ceux que sont du signoriaige dame
Marguerite la Salvaige et de Jean de Toul, qu'ils
puellent aller � la quinzenne, en la fouresse, tailler
bois la vanredi ou la samedi de la saint Martin jusque
aux Bures (12); c'est assaveoir, chacun conduit une
charr�e. Et cilz qu'il nait point de charrois ils y puet
aller aultant de foy qu'il lour plait, et le fourestier
averoit et doibt avoir, pour son redevaiges, de chacun
conduit, ung tolloys et de ceulx de Chanteheu et de
Huiveller, de Moncel, des signoraiges de Jean de Toul et
de dame Marguerite la Saulvaige, chacun conduit doibt
audit fourretiers, le lendemain de No�l, ung pain
valessant doux toulloys, et cil que ne seroit point du
gaignaige ung toulloys.
V. - Encor ont les prodomes, de ceste ville, teil
usaiges, qu'auljourd'huy, ils font dons taillours pour
lever la taille que se paye � dous termes ; se leve la
moiti� � Pasques et l'aultre moiti� � la sainct Remig.
VI. - Encor ont les prodomes, de ceste ville, teil
usaiges, qu'auljourd'huy ils font lour eschevin et lour
clerc-jurey de cui qu'il lour plait.
VII. - Encor ont les prodomes, de ceste ville, tell
usaiges, qu'ils doient motre aux mollin dessoubz le
chasteau. C'est assaveoir : le resal sept deniers et
maille, fors du plus, plus et du rnoings, moings. Et
quand le bled du prodhomme ait demourez, ondit rnolin,
nuict et jour, et on ne le muet apr�s le premier qu'il
treuve mollans, il puet repanre son bleif, cil ly plait,
et aller motre o� qu'ils luy plairait, sans encoissons.
VIII. - Encor ont les prodomes, de ceste ville, teil
usaiges, qu'ils doient keure, on fours banal, l'ymal
pour dous deniers, fors du plus plus et du moins, moins,
auquel des fours bannals qu'ils lour plairait ; et se le
fournier coure mal le pain, que ce soit par son deffault,
il est tenu de rendre et de reffaire le deffault.
IX. - Encor ont les prodomes, de ceste ville, tell
usaiges, qu'ils ont lour entrecourt � Vix (13), �
Blammont, � Rembeviller ou � Chastel-sur-Mozelle ; et
celuy qui se fait contremander � Vy, il puet panre et
chergier la sienne chose, haultement, � toutes houres
qu'il ly plair, et c'ilz avoir besoing d'ayde pour la
chergier et pour mener ses biens � charroy de cheva, le
pr�vost, de ceste ville, ly doit faire avoir, parmey ses
deniers et coustenges, soffisamment on cas que le
pr�vost en seroit requis. Et se cil que se
contremanderoit par ln mani�re que dict est, se il se
fourdoubtoit de rien, le pr�vost de Lun�ville le doit
conduire jusques sur la ruy de Boncourt (14), � la ruie
par desa ; et le doit warder; de fort et de force,
jusques � l�, en cas que le pr�vost en seroit requis,
comme dict est, Et le maire de Vy le doit panre, luy
requis, sur ledit ruy de Boncourt, � la ruie par del�,
et mener � salvet� et garde du fort et de force; et en
semblant cas, cil que se contremanderoit � Blammon, le
pr�vost de Lun�ville, luy requis, le doit mener jusques
sur la ruy de Courbel (15) ; et le pr�vost de. Blammon,
luy requis, le doit panre et mener � salvet� et warder
du fort et de force ; et en semblant cas, qui veult
aller � Rembeviller ou � Chastel-sur-Mozelle; le pr�vost,
luy requis, le doit conduyre jusque � ban l'Abb�, tant
avant comme le do�en de ceste ville vait waigier ; et
puellent faire les hommes ou les femmes l'entrecourt, �s
lieux dessus dicts, lequel qu'il lour plait; et se la
femme ou l'omme vont en lours entrecours, et la nuit len
presse, et ils en puissent aller devant ceulx qui les
chasseroient, et quoyque ses dous pieds fuissent fors du
ban de ceste ville, devant qu'on metoit la main � eulx,
ils puellent devestir couste ou rnantel, sy les ont, et
seoir sus, toute la nui et, sen dangier, s'il lour
plait, de ceulx du lieu o� ils Ieroient partie; et dure
se ban jusques � la que les messiers puellent waigier.
Et ne doibt on, aux quatre villes, aux pr�vostez d'icelles,
ne aux marries d'icelles pr�vostez, ne vente, ne
paissages, fors que le denier annal; et puellent aller
plaidier, chastel finant, sans amendes et sans
coustenges, se ce n'est oncques de villenie dicte ou de
main misses, sont ne estoit batus au lieu; et ne debvons,
�sdits lieux, nulles parg�es fort que le dopmaige rendu
; et, en semblant cas, ont teil usaige ceulx desdictes
villes, pr�vostez et marries dessus dictes, sur nous.
X. - Encor ont les prodomes, de ceste ville, teil
usaiges, qu'ils ne douent ventes ne paissaiges �
Einville ne en la pr�vostez d'icelle, par de�� la
rivi�re de Sanon, ne � Baulzemont, � Marche (16), et ils
peont plaidier, de Chastel finant, sans amende et sen
coustenges, fors que de villenie dicte. ou de main
misse, ou son ne soit batus au lieu ; et peons aller sur
eulx sans paier parg�es, lorsque le dopmaige rendant ;
et, en semblant cas, ils ont teil usaiges sur nous.
XI. -~-Encor ont les prodomes, de ceste ville, teil
usaiges, qu'ils ne doient � Nancy ne � Port, fors que le
denier annal ; et, aucuns, ne font ils � nous en
semblant cas.
XII. - Encor ont les prodomes, de ceste ville, teil
usaiges, qu'ils puellent alIer plaidier � Haudonviller
(17), � Ma�reinviller, � Thi�balm�nil et � B�nam�nil sen
amende ne coustenges, de Chastel flnant, se �a ne soit
de villonie dicte ou de main misses, ou sont n'estoit
batus au lieu ; et ne doubvons nulles parg�es, sur eulx,
fors que le dommaige rendant ; et teil usaiges ont-ils
sur nous, en semblant cas, et ne dolent, ceulx de
Fremonville, point de vente en ceste ville.
XIII. - Encor ont les prodomes, de ceste ville, teil
usaiges, qu'ils puellent aller plaidier on ban de
Mortenne, de Chastel flnant, sans amende et coustenges,
se ce nest de villonie dicte ou de main misses, ou c'ilz
ne soit battuz au lieu ; et ne debvons nulles purg�es,
sur eulx, fors que le dopmaige rendant ; et aucy font
ils sur nous ; et ne debvons poinct fournir de xurtez en
toutes les villes dessus dictes, en plaidiant, ne eulx
sur nous en semblant cas.
Xllll. - Encor ont les prodomes, de ceste ville, teil
usaiges, qu'ils ont leurs pasturages en Charmoys, en
Brochie, en Vernel et en Mondon, jusques au ruy du Vehou
(18), et en Mo�en et en Blenchien (19) le haut et le
bas, sans rien ne aique retenir ; et puellent aller, nos
gerdiers, abrouver les gerdes, � wiez desoubz Bl�hoirs
(20), sans amende, mais que le dopmaige rendant.
XV. - Encor ont les prodomes, de ceste ville, tell
usaiges, qu'ils ont lour paixeur en la rivi�re de Murt,
dez la roche de Mont contremont, sur jusques � la viez
vanne de Belprey ; et en la rivi�re de Vezuse, d�s la
rlpvi�re de Murt contremont, sur jusques � rue du mollin
de Beillieu (21).
En la rivi�re de Mortenne, dez la rivi�re de Murt
contremont, sur jusques a la rue du mollin de
Meharmesnill (22) ; et puellent aller paixier � tout
quelle embaixe qu'il Iour plait, sen esbere gessant ; et puellent paixier � tout une trulle de sept pieds de long
et nuef pieds devant le filet, deudit paxour, et nuef
pieds derrier, en yawe, jusques � la goulle, Et s'yl
vait plus avant je ne m'en melle.
XVI. - Encor ont les prodomes, de ceste ville, teil
usaiges, au courestier qui tient le courestaige, que
celluy que ledit courestier doit chergier le via, panre
sur le maxel et mettre sur le chee ; et, tantost que le
tonnel est sur le pollain, il est en p�ril du courretier
jusques � tant qu'il est axie sur le chee ; et au
deschargier, tantost qu'il y met la main, il est en son
p�ril jusques � ce qu'il est aixie sur la maixeil ; et,
pour son droit, il doit avoir, de a cherr�e de vin, huit
toullois, et, de la demye cherr�e, quatre toullois et,
au descharger, aultretant et aultretant au xault.
XVII. - Encor ont les prodomes, de ceste ville, tell
usaiges, qu'il se puellent prester embaixes ; c'est
assaveoir : ymaul, bichet, cordes, pollains � voisin et
autre et aidier l'ung l'autre sans peure l'owier,
XVIII. - Encor ont les prodomes teil usaiges, qu'il
puellent panre ez entr�es de ville pour amendement de la
ville, sans encaissons ; et puellent aller on saulcy,
desoubz la vanne, pour panre des liens et pour coppeil
verges, pour cloire parois, sans encaissons.
XIX. - Encor ont les prodomes, de ceste ville, tell
usaiges, que, au ban-vin de ceste ville, qul dure ung
mois, c'est assaveoir quinze jours avant la Pentecouste
et quinze jours apr�s, et, par teil jour comme ledit ban
entre, il en doit ixir et � tel jour. Et quiconque
emportoise vin, defait le ban-vin, qui le prengne
aultrement ; et la warde qui fait le way, dudit ban-vin,
latent et puet avoir le vin et le pot, il lait wainguier
; et celuy qu'il emporteroit le vin, l'auroit perdu et
nen paieroit aultre amende; et son Iy avoit donn� le
vin, qu'il n'en heult fait nulz payement d'argent ne
dette, il n'en seroit � point de dangier et raveroit son
pot et son vin. Et cilz qui emporteroit le vin, il puet
humer son vin et ruer son pot, au mur, si ly plait,
devant que la warde dudit ban-vin y metoisse la main, et
n'en seroit en point de dangier, Et cilz qui sauroit le
ban-vin de Viller et de Mesnil, il puet faire venir
crier, en hault, son vin s'y li plait, quel est qu'il ly
plairait, jusques � sur l'uxei (23) du moutier St Remey
; et il puet en aller boire, audit ban-vin, et querry
vin en quelle embaixe qu'il lour plait, sans dangier.
XX. - Encor ont les prodomes, de ceste ville, teil
usaiges, qu'ils puellent aller au bois du. Blenchier
pour aporter, � leur copl, et se la warde du bois puer
oster la sarpe de celuy qui copperoit le bois, il l'ait
sans dangier, et ne seroit � aulcune amende ; et, s'il
se puet escoure de la warde, il en est tout quitte, et,
si la warde ait ung horrion, c'est pour luy (24),
L'authenticit� de cette charte ne saurait un instant
�tre mise en doute ; bien que le titre original en
parchemin soit perdu et que le vidimus du tabellion
Gu�rin ne nous transmette ni la date, ni le nom du
prince ou seigneur qui l'a ratifi� de son seing ; le
fait seul de la -pr�sence, en double copie, de cette
charte, sur les registres officiels de l'H�tel-de-Ville,
suffit pour augurer de l'importance qu'on y attachait ;
et, la lecture publique, � haute voix, que l'on en
faisait, annuellement, en pr�sence de la communaut�,
r�unie au son de la cloche, ach�ve d'�tablir son
identit� comme constitution de la commune et fondement
des droits de ses habitants.
Un passage de l'article IV renferme la date de cette pi�ce entre deux limites assez restreintes ; c'est celui
o� il est fait allusion aux �� signoraiges Jean de Toul
et dame Marguerite la Salvaige �. Mes recherches au
sujet de dame Marguerite, douairi�re, sans doute, de la
famille des comtes Sauvages du Rhin, et de l'�poque o�
elle v�cut, ont �t� jusqu'ici sans r�sultat ; tout ce
que l'on sait, c'est que cette puissante maison, dont
les ramifications nombreuses se sont r�pandues dans tout
le pays, a poss�d�, d�s les temps les plus recul�s,
jusqu'� une �poque avanc�e du moyen �ge, une part
importante dans la seigneurie de Lun�ville. Quant � Jean
de Toul, il n'y a rien de mieux connu. Jean de Neuviller,
connu, plus tard, sous le nom de Jean de Toul, second
fils de Ferry III, fut mis en possession de la
seigneurie de Lun�ville, pr�cis�ment en 1265, date de la
mise � la Loi de Beaumont des bourgeois. Jean de Toul
habitait Lun�ville et poss�dait de grands biens dans les
environs, notamment a Vitrimont, o� un canton du
territoire porte encore le nom de �� Fourri�re Jean- de
Toul �. Il mourut, en 1306, et fut enterr� � Beaupr�, o�
sa tombe se voyait encore � la fin du si�cle dernier.
C'est donc du vivant de Jean de Toul, dans l'espace
compris entre 1265 et 1506, peut-�tre � l'occasion de la
prise de possession de la seigneurie, que notre charte a
�t� promulgu�e, en ex�cution des lettres de promesse
donn�es � Troyes, par son p�re Ferry III, au
commencement de l'ann�e 1265. Sans doute, il a fallu le
temps de s'entendre, d'accorder ou de retenir certains
droits, d'�tablir les usages, de d�battre la quotit� des
redevances annuelles ou �ventuelles ; en un mot, de
proc�der r�guli�rement, article par article, � la
r�daction claire et d�finitive de cet acte important ;
emprunter, d'une part, � la Loi de Beaumont, �liminer de
l'autre; ajouter, en certain nombre, des clauses
d'int�r�t essentiellement local. Dans tous les cas, les
probabilit�s sont pour une date tr�s-rapproch�e de 1265.
PR�AMBULE. - Le caract�re r�volutionnaire et ombrageux
des premi�res communes, r�v�l� par des symboles ou
certains usages traditionnels, n'�chappera � personne.
La commune amass�e et r�unie au son de la cloche
(ban-cloche), dans un lieu public, accessible � tous (la
halle) ; les portes de la ville ferm�es..... et les cl�s
d'icelle apport�es, sur table, comme il est de coutume
et anciennet�.
TITRE. -- Les copies de la Loi de Beaumont qui ont �t�
adress�es, de diff�rents points, au minist�re de
l'Instruction publique, pour la Collection des monuments
de l'histoire du Tiers-Etat, portent toutes, celles qui
sont en latin : Liberum usum, et les traductions : Libre
usage (25): La charte de Lun�ville est intitul�e Droits
et Usages. C'�tait le premier mardi apr�s l'Epiphanie,
jour d'ouverture du plaid bannal ou des plaids annaux,
que se faisait, chaque ann�e, vers l'heure de midi, la
lecture publique, � haute voix, de ce document.
Art. 1er. - Prodomes (prud'hommes), c'est-�-dire,
prudentes hommes, ou probi homines. Dans le sens large
et vulgaire, devait signifier homme libre, ind�pendant
(26), et, dans l'esprit de la charte, franc bourgeois,
jouissant, � certaines conditions, des droits et
franchises communales. Cette d�nomination
caract�ristique, rapproch�e de l'injonction faite � ceux
qui ne sont pas de la commune, ni desdits droits et
usages, d'avoir � se retirer incontinent, laisserait
supposer qu'il y avait, en ville, plusieurs classes
d'hommes, notamment des non-affranchis.
Gardiers, c'est-�-dire p�tres; grande garde, troupeau
des b�tes �� armelines � (boeufs, vaches, chevaux); pour
Lizier, sans doute porcher, gardeur de porcs ; et menue
garde, troupeau des �� b�tes blanches � ( mou tons,
ch�vres, porcs). On sait que le troupeau communal
constituait" un droit � part, sujet � concession ;
c'�tait le lendemain de No�l que l'on r�organisait les
troupeaux.
Art. II. - Messiers, agents destin�s � la garde des
biens de la terre, dans les limites du ban.
Art. IV. - Fouretier, garde forestier. Origine de nos
affouages communaux.
Art. V. - La redevance de la franchise obtenue par les
bourgeois, pour droit et protection de la communaut�,
autrement dit la taille, se payait en deux termes,
moiti� � P�ques, l'autre moiti� � la Saint-Remy. D'apr�s
une note de M. Piroux, ancien lieutenant de police, la
ville payait encore, avant la R�volution, 146 fr. 6 gros
barrois, au roi, pour cet objet.
Art. VI. - L'�chevin ou jur� ; le clerc-jur�, greffier
et secr�taire de la mairie. Les douze jur�s (jurati,
asserment�s), choisis dans la commune, par les
bourgeois, donnaient leur semblant dans les causes
soumises � leur juridiction. Le pr�v�t remplissait les
fonctions d'officier de gendarmerie � la fois, et de
procureur ducal ; il arr�tait les coupables, instruisait
et poursuivait l'affaire ; le mayeur, chez nous �chevin,
pr�sidait le jury, recueillait les suffrages et
pronon�ait le jugement.
�� Le maire et les jur�s ne demeuraient en leurs offices
que par ung an ; si ce n'est par le consentement de
tous. � (Loi de Beaumont.)
La charte ne parle pas de la nomination qui avait lieu,
cependant, des deux gouverneurs de ville et de l'h�pital
et de leurs contr�les; quatre bourgeois, sur lesquels
deux remplissaient des fonctions analogues � celles de
maire et d'adjoint, les deux autres tenaient lieu de
commission administrative de l'h�pital.
Art. VII. - C'�tait en nature et au vingti�me, selon la
Loi de Beaumont. Plus tard, on en vint � payer en
nature, au vingt-quatri�me, � l'exception des chanoines
r�guliers, qui obtinrent de L�opold de ne payer que
douze deniers par resal. Bannaux : Lun�ville, Viller,
M�nil, Chanteheu, Rehainviller, H�rim�nil, Adom�nil, les
cens de la fourasse, les chanoines de Saint-Georges de
Nancy, Mississipi et les fiefs de Mehon et de
Dehainville,
Art. VIII. - Encore en nature, au vingt-quatri�me, selon
la m�me Loi. Il y avait d'anciennet�, � Lun�ville, deux
fours banaux : l'un aux environs de la place
Saint-Jacques, l'autre � la rue Hargaut. Plus tard, en
1732, on en �tablit un troisi�me au faubourg des Carmes.
A partir de 1723, il fut permis d'avoir un four dans
chaque maison, et, en 1729, on autorisa les locataires
desdites maisons � y cuire; il y avait � payer, pour
cela, un droit de four.
Il y eut aussi deux, et puis trois pressoirs banaux.
Art. IX. - Entrecourt, droit d'aller r�sider dans
certains lieux, sans risques ni forfaiture. Cet article
est, en tous points, fort remarquable. Quels temps que
ceux o�, pour aller � cinq lieues � la ronde, il �tait
prudent de se faire accompagner du pr�v�t ! Parg�es,
sorte d'amende impos�e au propri�taire de toute b�te
�gar�e et en rupture de ban, ind�pendamment du dommage.
(V. Ducange : Pergia, pargia.)
Art. Xl. - Plusieurs fois, dans le cours du XVIIe
si�cle, l'occasion s'est pr�sent�e de r�clamer le
b�n�fice de cet article en faveur des bourgeois de
Lun�ville, qui usaient librement de leur droit de
passage et de rente � Saint-Nicolas et � Nancy, pour
obtenir la lev�e de la saisie faite sur leurs
marchandises, par les fermiers de ces droits, dans les
lieux susdits. Toutes les d�cisions intervenues ont �t�
rendues conformes � l'ancien droit et usage,
Art. XIV. - Droit de p�ture. Le bourgeois ayant de temps
imm�morial le droit et la libert� de tenir des troupeaux
� part de b�les blanches, tant sur le ban de la ville
que sur les voisins ; pour r�primer les abus de ce
droit, emp�cher qu'il ne d�g�n�re en licence et ne
retourne au pr�judice du grand nombre, le Conseil de
ville propose, et le duc Henry approuve, � la date du 19
septembre 1622, le r�glement suivant :
1� Il ne sera loisible � chaque particulier de tenir des
troupeaux de b�tes blanches en plus grand nombre que
deux cent cinquante, tant brebis laiti�res, agneaux,
moutons et b�liers n�cessaires.
2� Les tenans bergerie pourront faire p�turer, � partir
de la Saint-Georges, � pareil jour de l'ann�e suivante.
3� Le lendemain de No�l, les gouverneurs de ville
pourront compter les b�tes blanches, afin de s'assurer
que le nombre fix� par chaque habitant n'est pas
d�pass�.
Art. XV. - Ce droit ancien de p�che a re�u diverses
modifications successives, restrictives ou purement
r�glementaires, � la suite de confirmations obtenues,
notamment sous Henry II, en 1618, L�opold en 1719, et
Stanislas en 1740.
Art. XVI. - Couretage de vin.- Etait-ce une sorte de
camionnage banal, combin� avec une ferme analogue �
notre droit actuel de mouvement, au moyen de laquelle la
ville et le seigneur levaient un droit ?
Art. XVIII. - Entr�es de ville, droit d'entr�e, appel�
plus tard droit de bourgeoisie ou redevance des nouveaux
entrants, qui se payait trente francs, appliqu� �
l'entretien de la ville et aux r�parations de ses
murailles.
Art. XIX. Ban-vin (foire ou march� au vin). Droit
qu'avait le seigneur d'accorder l'autorisation de vendre
du vin, dans son domaine, � une �poque d�termin�e, et il
pr�levait un imp�t sur cette vente ; ou bien de vendre
le propre vin de ses r�coltes, en d�tail, � l'exclusion
des habitants de ses terres.
Art. XX. - Droit d'affouage, � l'usage des indigents,
restreint � la charge � dos et limit� � la for�t de
Blanchien, qui appartient encore � la ville, On ne peut
se d�fendre d'un certain �tonnement, en pensant aux
singuli�res entraves apport�es � ce droit, qui devait
provoquer des rixes continuelles et peut-�tre l'effusion
du sang.
Entre la Loi de Beaumont et sa fille, la charte de
Lun�ville, il y a des ressemblances g�n�rales ou de
principe et des diff�rences.
Les ressemblances portent sur le droit d'entr�e ou de
bourgeoisie ; la taille payable en deux termes,
l'abolition des droits de vente (except� le droit sur
les immeubles, conserv� � Beaumont), la banalit� des
fours et moulins.
La nomination annuelle, par le suffrage unanime des
habitants, des jur�s, officiers et employ�s de la ville.
La d�cision en assembl�e g�n�rale des affaires
communales. Le pr�l�vement, par deux bourgeois, des
amendes et deniers communaux, vers�s entre les mains
d'un receveur, dit du domaine, officier aux gages du
seigneur.
Les droits d'affouage et de p�che.
Le plaid banal.
Les diff�rences notables portent principalement sur les
dispositions p�nales, qui comprennent trente et quelques
articles dans la version faite sur la copie du Tr�sor
des Chartes (27), et forment ce qu'il y a de plus
complet et de plus remarquable dans la Loi de Beaumont,
ainsi que sur le service militaire dont il n'est fait
aucune mention dans la charte de Lun�ville.
Ceux de Lun�ville avaient leurs entrecours, entre quatre
villes, � leur choix ; le droit d'aller plaider, dans
certaines communes voisines, sans rien payer;
l'exemption des parg�es (amendes) ; un r�glement
particulier pour le transport du vin et un ban-vin ; des
droits de p�turage tr�s-�tendus, et la facult� de
s'entre-servir, entre voisins, et de se pr�ter
mutuellement les mesures accoutum�es. Aucun de ces
articles n'est abord� dans la Loi de Beaumont.
L'enseignement qui ressort clairement de tout ceci,
c'est que le self-government, restreint, il est vrai,
aux franchises communales, �tait pratiqu� dans toute sa
force au XIIIe si�cle ; que la libert� �tait comprise
dans le sens le plus large et exerc�e de la fa�on la
plus compl�te, par nos pauvres communaux, d'une mani�re
plus imm�diatement utile, peut-�tre, au bonheur des
peuples et � la v�ritable ind�pendance des individus,
qu'� des �poques plus vant�es de l'histoire.
La commune transform�e en assembl�e d�lib�rante, au gr�
des gouverneurs de la ville ; le suffrage unanime
pratiqu� sans entraves, mais non toujours sans tumulte ;
voil� qui ressemble presque � une d�couverte.
Non-seulement les bourgeois nommaient directement leurs
magistrats, mais encore ils intervenaient directement et
sans interm�diaire dans leurs affaires. Chacun pouvait
prendre la parole pour ou contre les propositions mises
� l'ordre du jour, notamment lorsqu'il s'agissait
d'emprunt. L'initiative des gouverneurs de ville et leur
responsabilit� �taient r�duites d'autant ; leur
intervention dans les affaires communales se trouvait
ramen�e, pour ainsi dire, au r�le du pouvoir ex�cutif.
La pr�cieuse institution du jury, la conscience vivante
de la soci�t�, si efficace contre l'arbitraire, la
cupidit� ou la barbarie des juges iniques des seigneurs,
si rassurante pour la s�curit� des citoyens, par
l'avantage qu'elle offre de n'�tre juge que par ses
pairs, ne laissait gu�re � d�sirer qu'une plus grande
extension.
Ces assembl�es tumultueuses, mais essentiellement
d�mocratiques ; cette lave humaine, inculte, fougueuse,
bouillante, emport�e quand elle rompit les liens du
servage, avait besoin d'�tre r�gl�e. D�gag�e peu � peu
de l'�l�ment r�volutionnaire et refroidie dans le cours
du moyen �ge, elle ne laissait pas, dans sa d�cadence,
que d'exciter encore l'ombrage et les d�fiances du
pouvoir souverain.
Ces r�unions de bourgeois, sourdement frondeurs quand
ils n'osaient l'�tre ouvertement, soit avec les
seigneurs, soit avec le clerg� ; libres, chez eux, de
tout dire et de tout faire, � certain moment, ont pris
fin au XVIe si�cle, en 1589, sous l'influence,
croissante et devenue pr�pond�rante, des l�gistes et de
l'aristocratie bourgeoise, par la cr�ation du Conseil de
ville, sous Charles Ill.
(1) Il ne
faudrait pas prendre au pied de la lettre cette
pr�tendue mise � la Loi de Beaumont, en ce sens que
cette loi aurait �t� appliqu�e, purement et simplement,
aux villes ainsi affranchies. Dans l'�tat d'�motion des
esprits, le plus sage parti �tait de se r�signer et de
donner, aux moindres frais possibles, satisfaction �
l'opinion publique, comme on dirait aujourd'hui.
Promettre beaucoup, accorder peu, �luder surtout, autant
que possible, les innovations introduites par la loi de
Beaumont, par des concessions purement mat�rielles,
sujettes � redevances, aboutir, en un mol, � une
transaction. Telle est, du moins, par la comparaison des
lettres de promesse avec les titres d�finitifs,
l'interpr�tation � laquelle on est naturellement
conduit.
D'un autre c�t�, par une explication plus bienveillante
et peut-�tre aussi vraisemblable, nos communaux
pouvaient avoir des aspirations diff�rentes de ceux de
Beaumont, on trouver, dans les coutumes et les
institutions qui les r�gissaient, des choses utiles �
conserver; de l� des modifications, suppressions,
innovations, conformes aux convenances locales ou aux
n�cessit�s du temps.
L'ancien r�gime �tait �tabli sur le droit de conqu�te;
c'est un principe qu'il ne faut pas perdre de vue quand
on �tudie les institutions du moyen �ge ; il n'y avait,
en r�alit�, que deux classes d'hommes : les vainqueurs
et les vaincus ; les nobles et les serfs. Au-dessus de
tout, comme �l�ment de r�conciliation : l'Eglise.
(2) Cart. de Lorr., ms. conserv� � la Biblioth�que de
Nancy.
(3) M�moires de Louis d'Haraucourt. Voir M. Beaupr�,
Prison de Ferry Ill, br. in-8�, 1839 ; et le travail
rectificatif de M. le baron de Saint-Vincent, dans les
M�moires de l'Acad�mie de Stanislas, Nancy, 1866.
(4) Ceux de Dolcourt, affranchis des deniers (1337), en
gens pr�venus, eurent soin de sp�cifier en t�te des
lettres de promesse, qu'ils �taient tous manans et
habitants �� sans rien ne aiques retenir, aux droits us
et coustumes de nueve ville, c'est assaveoir au droit de
Belmont, nuement sans rien muer ne chaingier. � (M.
Lepage, Comm. de la Meurthe.) Donc il y en avait qui
muaient et chaingiaient.
(5) Ainsi, � Saint-Baussant, on remarque la restriction
suivante : �� Et demouront, en ladite ville, les mesures
telles comme elles estoient avant que ceste franchise
fut faicte �. (M. Lepage, Comm. de la Meurthe.)
(6) M. No�l, M�moires sur la Lorraine, n� 6.
(7) M. Le page, Statist. de la Meurthe, Introduction.
(8) No�l, Catalogue des collections, Suppl�ment. -
Viller-I�s-Lun�ville avait aussi une charte de r�glement
de droite, octroy�e par Jean II.
(9) A l'angle nord, form�, par la rue des Loups ou
Traversi�re, arec la rue de Metz.
(10) Vezouze.
(11) Huviller, aujourd'hui Jolivet.
(12) Veille de No�l.
(13) Vic.
(14) Village d�truit, entre Arracourt et Athienville.
(15) Localit� aujourd'hui inconnue.
(16) Maixe.
(17) Aujourd'hui Croismare.
(18) Probablement V�ho.
(19) For�t de Blenchien, qui appartient encore � la
ville.
(20). Bl�hors, ferme, commune de Damelevi�res; village
d�truit.
(21) Beaulieu, ferme, commune de Marainviller.
(22) Aujourd'hui Xermam�nil.
(23) L'huis, la porte de l'�glise abbatiale Saint-Remy.
(24) Transcrit en vidimus sur le Registre dei
r�solutions de l'H�tel-de- Ville, par Gu�rin, tabellion,
et collationn�, sur on �� rolleau de parchemin cousu en
trois pi�ces �, suivant qu'il conste par l'acte de
collation mis au bas du registre.
La m�me pi�ce existe, moins quelques articles, tomb�s
sans doute en d�su�tude, dans un Recueil d'actes
concernant la commune, transcrite, dit le vidimo mis au
bas, d'apr�s le �� rouleau dict chartres desdits de
Lun�ville, esquelles chartres on a coustome de faire
lecture haultement par chacun an aux plaids annaulx
dudit Lun�ville en pr�sence des sieurs officiers,
gouverneurs et communaut� dudit lieu �.
(25). Note d'Augustin Thi�ry, rapp. par M. No�l : suppl.
ou Calal. des Collect. lorraines.
(26) Voyez les M�moires du sire de Joinville.
(27) Archives de France. - Carton 207, n� 1. - Voir M.
No�l, Catal. Suppl. |