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Notice sur Nicolas
Remy - L. Leclerc - 1853
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Sorcellerie dans
le Bl�montois
M�moires de
l'Acad�mie de Stanislas (Nancy)
1853
Notice sur Nicolas
Remy par M. L. Leclerc
Incedit per ignes...
DISCOURS DE R�CEPTION
MESSIEURS,
Pour un r�cipiendaire le meilleur de tous les exordes
est un remerciement, non pas dans les termes vagues et
pompeux d'une banalit� polie, mais parti du coeur, et
simple comme la v�rit�.
Permettez-moi donc de vous remercier avant tout de
l'honneur que vous m'avez fait, en m'appelant � vous
avec une spontan�it� qui devait en doubler le prix � mes
yeux.
Cet honneur que les plus dignes n'obtiennent souvent
qu'apr�s une longue attente, vous me le d�cerniez au
lendemain de mon retour dans notre belle province, comme
pour consacrer une fois de plus l'heureuse et antique
alliance de la magistrature et des lettres, et ratifier,
en quelque sorte, par vos libres et intelligents
suffrages le choix du Souverain.
Tant de bont� m'inspirait une profonde reconnaissance et
je me croirais bien coupable de vous en apporter
seulement aujourd'hui l'expression, si ce retard ne
tenait � des causes diverses, connues, toutes plus
fortes que mon impatience et ma bonne volont�.
Je me trouve ainsi au moins deux fois votre d�biteur,
car les int�r�ts accumul�s d'une dette longtemps impay�e
deviennent bient�t un second capital et, � cette s�ance
m�me, je voudrais, en vous satisfaisant d'une mani�re
compl�te, pouvoir me dire enfin lib�r�.
Mais comment atteindre mon but ? Qu'offrir � une Soci�t�
savante dont presque tous les membres sont des ma�tres
dans l'art de penser ou d'�crire, et qui a, par cela
m�me, le droit de se montrer exigeante envers ses
derniers venus ?
Je me proposais d'abord de vous retracer la vie si
simple, si bien remplie, si justement honor�e, de mon
pr�d�cesseur (1). Mais M. Parade comptait autant d'amis
que d'�l�ves et il avait trouv� d�j� dans l'un d'eux (2)
le plus exact, le plus �loquent et le plus autoris� des
historiens. Apr�s avoir lu ces pages �crites avec son
coeur par un homme du m�tier, il m'a fallu renoncer � mon
dessein. Personne ne dira mieux d�sormais les travaux,
les services, les m�rites de celui qui fut, du 26 juin
1838 au 29 novembre 1864, le Directeur �minent de
l'Ecole foresti�re de Nancy (3).
Si cette consid�ration ne me permet point de vous
soumettre l'unique biographie contemporaine qui pourrait
avoir ici dans ma bouche quelque �-propos, elle me
laisse du moins couvert le champ plus vaste des si�cles
pass�s, et je vais leur demander, pour sujet de mon
discours, l'un des noms les plus fameux de l'ancien
ordre judiciaire du pays.
Plusieurs raisons m'y d�terminent.
G�n�ralement bien accueillies de l'auditoire, auquel
elles n'imposent qu'une attention restreinte et sans
fatigue, les notices individuelles ont presque toujours
pour leurs auteurs tout l'attrait de la difficult�
vaincue et d'une sorte de cr�ation; soit qu'elles
r�habilitent un personnage trop s�v�rement jug�, soit
qu'elles fournissent sur ses habitudes, son caract�re,
ses ouvrages, sa personne, des d�tails curieux et
in�dits.
Quand le biographe d�couvre, � grand'peine, un lieu, une
date, un mot, un fait, m�me le plus petit, se rattachant
� son h�ros, et qu'avec ces mat�riaux, longtemps �pars
et ignor�s, il parvient � le faire, pour ainsi dire,
revivre sous nos yeux, il �prouve une joie �gale � celle
du peintre ou du statuaire qui, en l'absence du mod�le,
� l'aide de r�miniscences habilement provoqu�es, fait
sortir d'une simple toile ou d'un bloc de marbre un
saisissant portrait.
Ne sait-on pas, d'ailleurs, qu'en �crivant l'histoire de
certains hommes, on �crit celle de toute une �poque, de
ses id�es, de ses pr�jug�s, de ses grandeurs, de ses
mis�res, et qu'on apporte ainsi sa modeste pierre au
majestueux �difice qui doit �tre un jour l'histoire
g�n�rale, l'histoire de tous ?
A ce point de vue, je me plais � le dire, parce qu'on
l'oublie, peut-�tre, un peu trop, je resterai fid�le �
la pens�e de notre bien-aim� fondateur. Si je consulte,
en effet, les premiers statuts par lui donn�s � la
Soci�t� Royale des Sciences et Lettres de Nancy (4), je
constate qu'il lui assigne surtout la mission de r�unir
et de mettre en oeuvre les documents historiques d'un
peuple dont il faisait le bonheur, et qu'il voulait,
sans doute, consoler � l'avance, de sa nationalit�
perdue, par le glorieux souvenir de ce qu'il avait �t�.
I
Nicolas Remy est n� �
Charmes, Vosges, dans le premier tiers du seizi�me
si�cle (5), sans qu'on puisse, d'une mani�re certaine,
assigner � sa naissance une date plus pr�cise.
Il appartenait � une de ces familles pl�b�iennes,
morales dans leurs habitudes, simples dans leurs go�ts,
intelligentes, laborieuses, au sein desquelles la
magistrature aime � se recruter et se recrute toujours
avec profit. Il n'y trouva point la fortune, mais le
quotidien et salutaire exemple de toutes les vertus
domestiques, et cette heureuse m�diocrit� qui place les
�mes d'�lite dans les meilleures conditions de succ�s,
parce qu'elle leur apprend � ne chercher qu'en
elles-m�mes les moyens de l'obtenir et de l'honorer.
Il sut de bonne heure se suffire, et, apr�s avoir
assid�ment suivi les Universit�s de France (6), devenu
licenci� �s loix, il se fit professeur de litt�rature et
de jurisprudence, non-seulement pour ne relever que de
lui dans la satisfaction de ses besoins, mais encore
afin de se mieux pr�parer au sacerdoce judiciaire par
l'un des plus p�nibles et des plus f�conds noviciats.
Cette �preuve volontaire ne dura pas pour lui moins de
vingt ans, et il devait en avoir � peu pr�s quarante,
lorsque, le 25 mars 1570, un de ses oncles maternels,
Fran�ois Mittat, lieutenant-g�n�ral au baillage de
Vosges, sollicita l'autorisation de lui transmettre des
fonctions que la vieillesse et les infirmit�s ne lui
permettaient plus de convenablement remplir (7).
Nicolas Remy avait bient�t, dans cette premi�re charge,
donn� sa mesure et le Duc de Lorraine, comprenant tout
le parti qu'il pouvait en tirer, l'attacha � sa personne
en qualit� de secr�taire ordinaire, le 4 novembre 1575
(8).
Il allait ainsi devenir le confident intime et
l'interpr�te habituel d'un des princes les plus
distingu�s de son temps. C'�tait le Duc Charles III,
surnomm� le Grand, le fils de Christine de Danemarck, le
gendre de Henry II et de Catherine de M�dicis, le
petit-neveu de Charles-Quint, le proche des Guise,
l'�mule de Henri IV (9)
En reprenant � Nicolas Remy la lieutenance-g�n�rale de
Vosges, pour l'appeler dans sa capitale, le Duc ne
voulait pas seulement demander � son intelligence, � sa
discr�tion, � son z�le, des services personnels, il
songeait aussi, dans l'int�r�t de la justice, � utiliser
sa science de jurisconsulte, et, l'ann�e suivante, en
1576, il en faisait l'un des membres du Tribunal des
�chevins de Nancy (10).
Par la nature de ses pouvoirs et l'�tendue de son
ressort, le Tribunal des �chevins ou du change, auquel
nos annalistes aiment � donner les noms de Tribunal
souverain du Prince (11), constituait, en r�alit�, apr�s
les Assises de la chevalerie, la plus haute juridiction
du duch� (12).
On ne devait l'honneur d'y si�ger, ni au hasard de la
naissance, ni � un de ces tristes march�s qui faisaient
ailleurs descendre la plus noble fonction au niveau de
la plus vile marchandise, mais � des moeurs
irr�prochables, � une longue exp�rience et � de fortes
�tudes. D'apr�s un contemporain, plus en situation qu'un
autre d'en dire son sentiment (13), il se composait de ��
gradu�s, personnes excellentes et bien choisies,
instruites en mati�res civiles et criminelles � (14).
Les mati�res civiles et criminelles se partageaient, en
effet, ses longues audiences.
Il jugeait, au civil, avec ou sans appel, les affaires
des gentilshommes, anoblis et autres privil�gi�s, hors
les cas que r�servait la coutume (15).
La qualit� des justiciables r�v�le ici l'importance des
juges, � une �poque o� l'aristocratie se refusait �
admettre l'�galit� devant la loi; et cependant, si, le
Tribunal des �chevins n'avait connu que des litiges
civils de la noblesse lorraine, le souvenir en serait,
sans doute, depuis longtemps effac�; mais il faut
surtout voir en lui un Tribunal de r�pression; et, c'est
en l'envisageant sous cet aspect, que l'on comprend la
notori�t� dont il jouissait et que lui a conserv�e
l'imagination d'un peuple ignorant, superstitieux et
effray�.
Au criminel l'autorit� du Tribunal des �chevins
s'�tendait � toutes les parties de la Lorraine; s'il
n'instruisait et ne jugeait les proc�s que dans la
pr�v�t� de Nancy, de partout ailleurs les proc�dures
devaient lui �tre toujours communiqu�es, afin qu'il
donn�t pr�alablement son avis.
Cet avis, d'abord facultatif, devint peu � peu
obligatoire, encourag� par le prince dont il augmentait
l'influence et auquel il permettait de surveiller et de
r�gulariser dans ses Etats le plus important des
services publics et le plus redoutable des droits de la
puissance souveraine, celui de punir (16).
Les membres de la chevalerie eux-m�mes, ces
gentilshommes si fiers de leur origine, si jaloux de
leurs pr�rogatives, subissaient la loi du Tribunal des
�chevins, quand ils se rendaient coupables d'un d�lit ou
d'un crime, sans autre faveur que l'adjonction, dans
tous les cas, de quelques-uns de leurs pairs ou
l'�vocation au conseil du Duc, s'il s'agissait
d'affaires touchant le point d'honneur (17).
Nicolas Remy fut, pendant quinze ann�es, l'un des
membres les plus instruits, les plus laborieux, les plus
fermes du Tribunal des �chevins. Que, dans
l'appr�ciation de certains faits, son �nergie ait
d�pass� le but, je n'h�site pas � le reconna�tre, me
r�servant toutefois de plaider tout � l'heure les
circonstances att�nuantes devant l'histoire, ce grand
jury, dont toutes les sentences ne sont pas des
verdicts, et qui doit � ceux qu'il condamne, sinon
l'indulgence, du moins la plus exacte justice, la plus
scrupuleuse impartialit�.
Quand ici j'�voque l'histoire, le mot peut para�tre
ambitieux, et pourtant, il n'est que vrai; car, de nos
vieux magistrats Lorrains, bien peu ont, autant que
Nicolas Remy, attir� les regards des historiens et,
laissant dans l'ombre ce qui le recommandait � l'estime
des hommes, les historiens n'ont cess�, sous l'empire
des id�es modernes, de le traiter, comme juge, avec une
excessive rigueur.
Il ne pressentait pas les col�res qui s'attaqueraient un
jour � sa m�moire et contre lesquelles on dirait que le
prince cherchait � le prot�ger par les t�moignages
r�p�t�s de sa confiance, de son approbation et de sa
faveur.
Des lettres patentes du 9 ao�t 1583 lui conf�r�rent la
noblesse, sans attendre qu'avec le temps elle f�t pour
lui la cons�quence naturelle et r�guli�re de l'exercice
de ses fonctions (18).
Le 1er ao�t 1589 il entrait au conseil priv� en qualit�
de conseiller et sans cesser d'�tre �chevin (19).
Le conseil priv� l'aurait, du reste, � lui seul,
maintenu dans la sph�re de ses aptitudes sp�ciales,
puisque ce conseil s'occupait des mati�res de
l�gislation, de justice, de gr�ce puisque c'�tait de
plus, et tout � la fois, une Cour d'appel et une Cour de
cassation (20).
Nicolas Remy y rendit de nouveaux services qui, de plus
en plus appr�ci�s, lui valurent, le 24 ao�t 1591, le
titre de procureur g�n�ral de Lorraine (21).
Ce titre avait plus d'importance encore qu'aujourd'hui
il conf�rait des attributions nombreuses et diverses,
les unes purement judiciaires et de police, les autres
essentiellement politiques. Ainsi, le procureur g�n�ral
devait veiller � la s�curit� des personnes et au
maintien de l'ordre public; ne laisser impunie aucune
infraction � la loi p�nale; d�fendre devant toutes les
juridictions, les plus �lev�es aussi bien que les plus
humbles, les int�r�ts du prince, ceux des veuves et des
orphelins. Et puis, quand les Etats s'assemblaient pour
voter des subsides entendre les dol�ances du peuple,
pourvoir � quelque n�cessit� impr�vue et urgente, il y
prenait la parole, comme ferait aujourd'hui un ministre,
au nom du Souverain (22). Car, Messieurs, pour le dire
en passant, avec un de nos plus illustres et de nos plus
regrett�s confr�res (23), la Lorraine poss�dait un
gouvernement repr�sentatif et constitutionnel, alors
qu'en France les assembl�es de la nation, tomb�es dans
le discr�dit, ne se r�unissaient presque plus, et que
l'Angleterre elle-m�me, apr�s avoir subi les convulsions
de la guerre civile et la honte du r�gicide, s'essayait
� la pratique, encore bien imparfaite, de la libert�.
Les forces d'un seul homme n'auraient pas suffi �
l'accomplissement de tous ces devoirs; aussi le chef du
Parquet pouvait-il en d�l�guer une partie � des
substituts de son choix (24).
Mais, en d�pit de ses auxiliaires et de sa vigueur
exceptionnelle, Nicolas Remy, presque septuag�naire,
commen�ait � sentir le poids des ans il r�solut de
transmettre sa charge � son fils Claude, probablement
l'a�n�, qui acqu�rait de plus en plus � Paris l'habitude
des affaires et la science du droit.
Le 26 ao�t 1599, c�dant aux instances de sa belle-fille,
la Duchesse de Bar (25), Charles III accorda � son
procureur g�n�ral la faveur qu'il lui demandait; et, �
cette faveur d�j� si grande, il en joignit une autre
plus grande encore, parce qu'elle �tait plus rare, celle
de continuer ses fonctions, �� soit en l'absence ou en la
pr�sence du nouveau titulaire, tant et aussi longuement
qu'il le voudroit � (26).
Aux yeux du Prince, Nicolas Remy justifiait par sa
valeur personnelle et ses bons offices, une d�rogation �
la r�gle commune. Pour lui, il n'avait pas �t� seulement
un magistrat de l'ordre le plus �lev� et un conseiller
fid�le, il avait �t� encore, quand il le fallait, un
n�gociateur habile.
On le voit, selon la coutume du temps, souvent au
dehors, charg� de missions d�licates, presque toujours
en compagnie des personnages les plus consid�rables,
dont les noms, par leur rapprochement, ajoutaient encore
� l'�clat du sien (27).
Il remplissait aussi quelquefois un r�le plus facile et
tout honorifique. Pour n'en citer qu'un exemple, quand
la petite ville de Marsal, envahie d'abord par les
Huguenots, qui s'y livraient � tous les d�sordres, et
tomb�e plus tard en la puissance de Charles III, � la
suite d'un si�ge et d'un assaut, dut passer, en vertu du
trait� de Saint-Germain-en-Laye, des mains de l'Ev�que
de Metz en celles du Duc de Lorraine, celui-ci envoya
son procureur g�n�ral en prendre officiellement
possession (28).
On sait que cette formalit� diplomatique, emprunt�e au
droit Romain, s'accomplissait g�n�ralement avec une
certaine pompe et que les hautes parties contractantes
s'y faisaient repr�senter par des mandataires dignes
d'elles.
A quelque point de vue qu'on se place et sans trop
s'arr�ter � de menus d�tails indiff�rents � l'histoire,
mais que les allures plus modestes de la biographie
autorisent, on peut donc dire que, au dix-septi�me
si�cle, dans notre Lorraine, peu d'existences ont �t�
plus honor�es et mieux remplies que celle de Nicolas
Remy.
Vous n'en connaissez cependant encore que moiti� apr�s
vous avoir montr� l'homme public s'�levant de lui-m�me,
et par son m�rite, d'une humble position au fa�te des
dignit�s, il me reste, par l'exacte appr�ciation de ses
ouvrages, � vous montrer l'�crivain et l'homme priv�.
II
A la fin de sa longue
et laborieuse carri�re, Nicolas Remy avait plus que tout
autre acquis le droit au repos; mais chez lui les forces
paraissaient grandir avec l'�ge, et il ne voulut, �
l'imitation du grand Arnaud (29), se reposer que dans
l'�ternit�.
Au moment o� les mieux dou�s d�posent la plume que leurs
d�biles mains se refusent � tenir, il reprit la sienne
avec plus d'ardeur et de suite.
Jusque-l�, absorb� par les exigences journali�res de
fonctions multiples, la po�sie et l'histoire ne
charmaient que de loin en loin ses loisirs. De toutes
ses veilles il ne lui restait que des notes rares,
br�ves, sans lien entre elles, et sans utilit� pour ses
successeurs; la pens�e lui vint de laisser apr�s lui
quelque chose de plus durable, en mettant � profit son
exp�rience et ses souvenirs.
De cette pens�e sortit un premier livre dont tout le
monde conna�t le titre, dont on parle souvent, mais que,
de nos jours, personne ou presque personne n'a lu, et
sur lequel il faut, par cela m�me, que je m'arr�te un
peu plus, afin de vous le faire appr�cier.
Apr�s m'avoir entendu, vous vous �tonneriez que ce livre
ait �t� pour son auteur une oeuvre favorite, si vous ne
saviez que le vieux juge, comme le vieux soldat, aime �
parler de ses campagnes et � en redire les moindres
particularit�s.
Dans le cours du dix-septi�me si�cle, en Lorraine plus
qu'ailleurs (30), la sorcellerie compta de nombreux
adeptes malgr� ses lumi�res et son noble coeur, Charles
III pr�cha contre eux une v�ritable croisade (31); les
magistrats � tous les degr�s re�urent des ordres pr�cis,
r�p�t�s, s�v�res en moins de quinze ans huit ou neuf
cents p�rirent sur le b�cher, apr�s avoir subi la
torture (32), et la Demonolatrie (33) n'est pas autre
chose que leur lamentable histoire �crite en assez bon
latin.
Nicolas Remy ne s'y pose pas en novateur (34) il suit
modestement la trace de ses devanciers; il croit ce
qu'ils ont cru il affirme ce qu'ils ont affirm�
seulement, � l'appui de leurs affirmations et de leurs
croyances, il apporte des preuves nouvelles, et ces
preuves il les emprunte aux proc�s qu'il a instruits ou
jug�s.
Il cite les noms, les lieux, les dates, le fait en
lui-m�me, ses circonstances accessoires, les t�moins,
leur demeure, toutes choses qui rendaient le contr�le
facile, et qui, v�rifi�es ou pouvant l'�tre par les
contemporains, excluent � ses yeux, d'une mani�re
invincible, la supposition d'un mensonge ou d'une erreur
(35).
Son langage, parfois tr�s-imag�, porte, du commencement
� la fin, la vive empreinte d'une profonde conviction il
s'�tonne que, quand la sorcellerie se r�v�le aux hommes
par tant de malheurs et de crimes, on ne la reconnaisse
pas � ces signes, comme � fum�e on reconna�t l'existence
du feu (36) ; il invoque souvent son propre t�moignage,
raconte ce qu'il a vu ou entendu (37) et s'excuse de
d�fendre, trop �nergiquement peut-�tre, ce qu'il atteste
sous la double garantie de son exp�rience et de sa bonne
foi (38).
Ce qu'il atteste est cependant bien �trange et on
s'�tonne que des hommes s�rieux et instruits y aient
jamais cru.
Il nous montre le d�mon prenant toutes les formes pour
aborder ses victimes (39); exploitant leur faiblesse,
leur ignorance, leur pauvret�, pour les s�duire; faisant
appel, pour atteindre le m�me but, aux passions qui les
agitent le plus, � la vengeance, � la haine, � l'amour,
� la cupidit� (40); se les attachant par des serments
ex�crables (41) leur imprimant sur le corps, en un lieu
qui devenait insensible, le stigmate de ses ongles (42)
les souillant de son contact impur (43) les soumettant
aux devoirs du plus honteux servage (44) leur imposant
les plus douloureux sacrifices (45); infligeant � leur
d�sob�issance les traitements les plus cruels (46).
Les sorciers, ou plut�t les sorci�res, partout et de
beaucoup plus nombreuses (47), ne tardaient pas � se
repentir (48); mais leur petit ma�tre (49), c'est ainsi
qu'elles appelaient le diable, les retenait sous sa
domination par des menaces terribles et ordinairement
suivies d'effet (50). Il ex�cutait, d'ailleurs, envers
elles, quelques-unes de ses promesses; car, si son or
�tait poussi�re, si ses caresses �taient glac�es et
st�riles (52), jamais contre un adversaire ou un ennemi
elles n'invoquaient en vain son secours (53) il les
associait dans une large mesure � l'exercice de son
pouvoir il leur remettait d�s le premier jour une poudre
noire qui tuait, une poudre grise qui rendait malade,
une poudre blanche qui gu�rissait (54). Il leur
apprenait � composer certaines mixtions dont la vertu
op�rait des prodiges (55) il leur apprenait aussi �
amonceler les nuages, � former les brouillards, la
gel�e, la gr�le, � lancer la foudre et, � l'aide de ces
mal�fices, � d�truire en un instant les esp�rances du
vigneron et du laboureur (56).
Je n'ose pas ranger parmi les moyens de s�duction du
malin esprit ces assembl�es nocturnes o� les sorci�res,
trompant leurs maris, et s'�chappant par le tuyau d'une
chemin�e (57), se rendaient, � travers l'espace, le
mercredi et le samedi, � cheval sur un manche � balais
ou sur le dos. d'un bouc o� elles dansaient en rond,
retourn�es et masqu�es pour ne pas se reconna�tre (58)
o� elles prenaient enfin un repas inconsistant, f�tide,
sans pain, sans sel (59), au milieu d'une effroyable
musique dans laquelle un b�ton creux, un cr�ne et des os
servaient d'instruments (60).
Ces derniers r�ves, enfants d'imaginations en d�lire,
d�passaient toutes les limites assign�es � la cr�dulit�
aussi Nicolas Remy h�site-t-il, non pas � les raconter,
mais � y ajouter une foi enti�re, et il conc�de que
quelques-unes de ces femmes qui disaient avoir assist�
au Sabbat pouvaient bien �tre les dupes d'une illusion
du sommeil ou des sens, parce qu'on a constat� avec
certitude qu'elles dormaient chez elles au moment m�me
o� elles se croyaient assises au banquet de Satan (61).
Dans le m�me ordre d'id�es, et � ses heures de doute, il
h�site �galement � admettre la soudaine et fr�quente
m�tamorphose des sorciers et des sorci�res en chiens, en
chats, en loups, parce que Dieu qui a cr�� l'homme � son
image et � sa ressemblance, un peu au-dessous de l'ange,
n'a pas pu permettre au d�mon de d�naturer son oeuvre et
de la r�duire aux proportions d'un animal (62).
Et ces deux concessions ne sont pas les seules qu'il
fasse au bon sens et � la r�alit�. D'autres semblent
pr�tes � lui �chapper encore celles-ci trop ind�cises
pour qu'on en saisisse bien l'�tendue celles-l� plus
accentu�es, mais, pour ne pas blesser de chastes
oreilles, impossibles � dire ici (63).
Nicolas Remy n'avait rien � nous apprendre de la
proc�dure de son temps on traitait les sorciers comme
les autres criminels (64) on les soumettait � la torture
le bourreau devenait l'auxiliaire des juges les
gr�sillons, les tortillons, l'�chelle arrachaient dans
de longs interrogatoires, et par d'atroces douleurs, des
aveux suspects et, ces aveux une fois obtenus, le
patient montait au b�cher pour y expier un crime
imaginaire, et plus d'une fois victime d'une odieuse
d�lation (65).
Les enfants seuls �chappaient � cet affreux supplice on
se contentait de les faire passer nus trois fois sous
les verges pr�s du lieu o� leurs p�res l'avaient subi
(66). L'auteur de la Demonol�trie aurait voulu
qu'infect�s d'un vice incurable, qu'issus d'une race �
jamais maudite, on les trait�t comme leurs a�n�s; et
c'est, sans doute apr�s avoir lu sa longue dissertation
sur ce triste sujet (67), qu'� la fin du si�cle dernier
l'un des meilleurs historiens de notre province lan�ait
contre lui l'anath�me et le comparait � Torquemada (6S).
Ce s�v�re jugement d'une conscience indign�e et que des
consciences plus calmes, et non moins honn�tes (69), ont
depuis accept�, doit-il �tre, en d�finitive, le jugement
de l'histoire ?
Je ne le pense pas, et, ou je me trompe, ou vous ne le
penserez pas plus que moi.
Pour juger un homme d'une mani�re �quitable, il ne faut
pas appliquer � ses actes les r�gles abstraites et trop
absolues du juste, du bien, du vrai il. ne faut pas
surtout le s�parer de ses contemporains il importe au
contraire de le replacer dans le milieu o� il a v�cu et
de bien conna�tre les id�es qui y avaient cours et qui
ont exerc� sur lui une secr�te et irr�sistible
influence.
L'esprit a, comme le corps, ses maladies �pid�miques,
pr�jug�s ou erreur.
Lorsqu'ils r�gnent en ma�tres, lorsque surtout ils
proc�dent d'un sentiment religieux, les pr�jug�s nous
aveuglent au point d'obscurcir � nos yeux la lumi�re et
d'encha�ner notre libert�.
L'erreur, l'erreur commune, ressemble � l'air qui nous
entoure, qui nous enveloppe, qui nous p�n�tre, que nous
respirons et que nous ne pourrions pas, sans cesser de
vivre, ne pas respirer; elle est si subtile, si
puissante, si in�vitable, que dans les transactions
humaines, quand plus tard on la d�couvre, la loi
elle-m�me lui attribue la force et l'autorit� du droit
(70).
Comment d�s lors, Messieurs, je vous le demande, dans le
jugement � porter sur un homme, ne tenir aucun compte
des pr�jug�s et de l'erreur, auxquels il a fatalement
pay� son tribut (71) !
Aujourd'hui que la raison �mancip�e et plus s�re
d'elle-m�me a rel�gu� les mal�fices, les sortil�ges, le
sabbat, au rang de ces contes dont s'effrayait ou
s'amusait notre enfance, on n'en parle plus que pour en
rire mais autrefois, il y a moins de deux cents ans,
tout le monde y croyait, tout le monde, le peuple, les
classes �lev�es, le Prince (72). Les magistrats
eux-m�mes, quoique plus instruits, partageaient
l'opinion g�n�rale au lieu de voir dans les sorciers des
dupes, des malades, des hallucin�s, des fous (73), et de
les traiter avec mis�ricorde et piti� (74), ils y
voyaient les ennemis de Dieu, les fl�aux de la soci�t�
et ils se constituaient les vengeurs de l'un et de
l'autre, bien convaincus que, plus ils se montraient
inexorables et mieux ils s'acquittaient d'un grand et
saint devoir (75).
Sur ces d�plorables aberrations de la justice humaine et
sur leur cause la D�monol�trie ne laisse aucun doute
c'est au nom du salut public et la main sur l'Evangile
(76) que les juges envoient � la mort tant de
malheureux.
Dans l'accomplissement de leur t�che si ingrate, ils
n'�prouvent pas le moindre scrupule (77) ils se sentent
d'autant plus � l'aise qu'ils ne redoutent pas qu'on les
accuse d'ob�ir � la crainte d'un danger personnel; ils
savent que, par un bienfait sp�cial de la Providence,
d�mons et sorciers ne peuvent rien contre eux (78).
Nicolas Remy insiste avec complaisance sur ce
merveilleux privil�ge, cite ses preuves et en prend
occasion pour exhorter les juges de la terre � la
confiance et � la fermet�, en leur rappelant, avec un
mot des Saintes Ecritures, qu'ils sont presque des
Dieux, Deos uti se appellans (79).
Malgr� l'approbation qu'il leur donne, des sanglants
holocaustes dont il se fait trop facilement l'historien,
il ne doit cependant accepter que sa part effective de
responsabilit�. Or, au Tribunal des Echevins, il ne
si�geait pas seul il si�geait en compagnie des
magistrats les plus savants, les plus sages de la
contr�e (80), et, alors comme aujourd'hui, � la suite
d'une d�lib�ration consciencieuse et libre, la sentence
exprimait le sentiment de la majorit� (81).
Et puis, ce qu'on parait ignorer, c'est que, pour le
crime de sorcellerie, le Tribunal des Echevins n'avait
pas, m�me dans la pr�v�t� de Nancy, une comp�tence
exclusive (82); les justices seigneuriales et communales
en connaissaient au moins une fois sur trois, et, chose
digne de remarque ! dans ces justices particuli�res, le
droit de juger n'appartenait pas aux officiers du
seigneur ou de la commune, mais d la multitude, multitudinis suffragiis. Le peuple assembl�, apr�s avoir
ou� le rapport des proc�z, asseyait son jugement (83).
Que signifient ces mots multitudinis suffragiis qui se
trouvent dans la Demonol�trie ou ceux-ci, le peuple
assembl� dont se sert le duc Charles IV dans son
ordonnance du 6 octobre 1629 ? Quelle que soit leur
g�n�ralit�, ces mots ne sauraient s'appliquer au peuple
tout entier, alors trop ignorant pour jouer un aussi
grand r�le ils ne concernent �videmment que quelques
hommes �lus ou choisis dans son sein (84). En quel
nombre, par qui, sous quelles conditions, avec quelles
garanties d'aptitude et de moralit� ? Je n'ai pu le
d�couvrir. Mais le fait lui-m�me, l'intervention du
peuple dans l'administration de la justice criminelle,
reste indubitable et je l'invoque avec un patriotique
orgueil, parce qu'il prouve que la Lorraine, dot�e d�j�,
comme on l'a vu, longtemps avant sa r�union � la France,
d'un gouvernement constitutionnel, jouissait aussi, dans
sa forme primitive, du jugement par les pairs,
c'est-�-dire de l'institution du jury.
Pour revenir � mon sujet, ai-je besoin de montrer
combien cette institution all�ge encore la
responsabilit� de l'homme dont je plaide ici la cause ?
Peut-on �quitablement le rendre responsable de
condamnations auxquelles ni lui, ni ses coll�gues n'ont
concouru ? Que dis-je, Messieurs, non-seulement le
Tribunal des Echevins ne concourait pas aux
condamnations �man�es des justices seigneuriales, mais
il exer�ait sur elles une b�nigne et salutaire influence
; il n'intervenait dans les proc�dures que pour
s'assurer de leur r�gularit� et de la suffisance des
charges ; il n'intervenait dans la peine que pour lui
assigner � l'avance une limite qu'en aucun cas elle ne
devait d�passer (85). Il �tait tout � la fois un
mod�rateur et un guide, et, dans l'ordre d'id�es qui
nous occupe, il y a plus d'honneur que de d�savantage �
avoir �t�, comme Nicolas Remy, l'un de ses membres
influents.
Si le juge me para�t excusable, je me sens plus
d'indulgence encore pour l'�crivain, quand je songe � la
bonhomie avec laquelle il livre son oeuvre au lecteur.
Pour excuser ce qui lui manque, en la forme, sous le
rapport de la m�thode et de l'art, il explique qu'il en
a d'abord r�uni les mat�riaux sans intention de les
utiliser jamais et que, press� plus tard par ses amis de
les mettre en oeuvre, il n'a pas eu le temps de les
mettre en ordre, ce qui donne � son livre l'apparence
bizarre ou d'un v�tement form� de diverses �toffes, ou
celui d'une ville � l'origine et aux accroissements
successifs de laquelle aucun plan n'a pr�sid� (86). Ces
comparaisons pleines de modestie ne manquent pas de
justesse; on voudrait trouver dans les parties d'un
tout, relativement consid�rable, plus d'harmonie, de
coh�sion, et de suite mais la critique s'arr�te � la
pens�e qu'avec ce p�lem�le d'observations erron�es et de
faits incroyables, l'auteur, en d�pit de ses divisions
et de ses subdivisions d'apparence scientifique, n'avait
pas l'ambition t�m�raire de composer ce que, dans la
langue de la science, on nomme trait�.
Telle qu'elle est, la Demonol�trie a fait de Nicolas
Remy tout au moins l'�gal des Delrio (87), des Leloyer
(88), des Boguet (89), des de Lancre (90), et des Bodin
(91). Peut-�tre m�me, son titre, dont g�n�ralement on se
contente sans aller plus loin (92), lui a-t-il valu une
plus grande et plus triste c�l�brit�.
Aussi l'histoire a-t-elle �t� pour lui bien plus
impitoyable que pour eux elle n'en a pas fait seulement
une sorte de bourreau sous la toge, elle a voulu lui
infliger encore la peine du talion et en faire un
sorcier. On lit, en effet, dans un livre moderne et
int�ressant sur les sciences occultes, que d�sesp�r� ��
de n'�tre pas cru sur parole quand il affirmait que
presque tout le monde �tait coupable de magie, il finit
par se d�clarer sorcier lui-m�me et fut br�l� sur ses
propres aveux (93). �
Pour le venger de cette supposition gratuite, qui ne
tendait � rien moins qu'� le rendre ridicule apr�s
l'avoir rendu odieux, il m'a suffi d'en interroger
l'auteur ; sa r�ponse courtoise et franche me permet de
vous assurer que, sur la foi d'un autre, il a pris un
conte en l'air pour la r�alit� (94).
J'en ai fini, Messieurs, avec la Demonol�trie; malgr�
mon vif d�sir d'�tre bref, je m'y suis longtemps
attard�, parce qu'aux yeux du plus grand nombre,
derri�re elle disparaissent tous les autres titres de
Nicolas Remy; il en a cependant de bien meilleurs et de
plus s�rieux.
Je rencontre d'abord, dans l'ordre des dates, le Recveil
des principaux points de la remontrance faite �
l'ouverture des plaidoieries du Duch� de Lorraine, apr�s
les Rois en l'an 1597 (95).
Autrefois, comme aujourd'hui, � certaines �poques de
l'ann�e, le Procureur G�n�ral entretenait ses coll�gues
des devoirs, de la discipline, des moeurs judiciaires, et
Nicolas Remy �tait dans l'exercice de sa charge quand il
pronon�a le discours dont je donne ici l'indication.
La Lorraine entrait en possession de sa coutume �crite
(96) les avocats, d�sormais s�par�s des procureurs (97),
allaient pr�ter un serment professionnel et renouvel�
tous les ans (98).
C'est ce serment que, le 21 janvier de l'ann�e susdite,
Nicolas Remy prit pour texte de sa Remontrance, en
mettant en saillie, avec beaucoup de pr�cision et de
nerf, les principales obligationss qu'il imposait au
Barreau.
Il y recommande le respect des magistrats, celui des
!us, style et coutumes, le choix des bonnes causes et
des bons moyens, l'abr�viation de la justice et de ses
d�lais, la mod�ration dans les honoraires, l'urbanit� et
la convenance dans les relations confraternelles.
Ce discours de rentr�e, le premier ou l'un des premiers
que l'on connaisse (99), est un curieux sp�cimen de
l'�loquence du temps; mais il ne donne pas de la mani�re
d'�crire de Nicolas Remy une id�e aussi exacte et aussi
compl�te qu'une autre production due � ses veilles et
qui nous permet de le regarder comme l'un de nos plus
illustres anc�tres, en m�me temps qu'elle le place au
premier rang de nos historiens. Je veux parler, aucun de
vous ne saurait s'y m�prendre, du Discours des choses
advenves en Lorraine depuis le d�cez du Duc Nicolas
iusques � celuy du Duc Ren� (100).
Dans cette remarquable et instructive monographie, la
langue du XVIe si�cle devient plus correcte et plus
concise sous la plume de Nicolas Remy on y rencontre
moins d'inversions et de r�miniscences latines, moins
aussi de locutions emprunt�es au patois Lorrain, et,
apr�s une ou deux pages, on se voit bien rarement arr�t�
par un mot dont on ignore ou dont on ne devine pas le
sens.
Le style a quelque chose de si ferme, la raison a
quelque chose de si droit que les r�flexions morales,
souvent m�l�es au r�cit, ressemblent � ces axiomes qui
se transmettent d'�ge en �ge comme d'indiscutables
m�rit�s (101).
Le fond, du reste, ne le c�de en rien au m�rite de la
forme.
Assez rapproch�, par sa naissance, du r�gne de R�n� II
pour en recueillir les derniers �chos, mais pas assez
pour que son impartialit� en ressent�t quelque g�ne,
Nicolas Remy se trouvait dans les conditions les plus
favorables � un historien; sa haute position lui faisait
ouvrir toutes les archives il avait � sa disposition,
comme il nous l'apprend lui-m�me (102), des manuscrits
pr�cieux, des documents contemporains; il poss�dait
notamment la Chronique Lorraine dont il ne nous reste
que des copies imparfaites, et dont il suit si
exactement la version que, sans trop de t�m�rit�, on
peut y reconna�tre, avec l'un de nos plus �rudits
confr�res, ceste m�dalle cooverte de ro�lle que le
hasard lui a fait d�couvrir et qu'il offre, dans sa
pr�face au comte Palatin du Rhin, apr�s lui avoir donn�
quelque polissure affin d'y faire revivre les v�ritables
traicts de sa premi�re perfection (103). �
Aid� d'un guide aussi s�r, il marche droit au but, sans
se laisser aller � des digressions inutiles, et si,
parfois, il peut craindre qu'on ne l'accuse de manquer �
cette r�gle �l�mentaire et de bon go�t, il prend soin de
s'en d�fendre en termes qui d�sarment le lecteur le
moins indulgent et le plus press� (104).
Il expose les faits dans leur ordre, � leur date; il
assigne � chacun d'eux une place proportionn�e � son
importance et � l'int�r�t qu'il doit �veiller.
C'est assez dire qu'il consacre ses meilleures pages �
la lutte glorieuse et supr�me dans laquelle le Duc de
Lorraine avait presque autant � redouter les ruses et
tes perfidies de son alli�, le vieux roi de France,
Louis XI, que les emportements et les convoitises du duc
de Bourgogne, ce Chartes le T�m�raire, si digne de son
nom qu'il r�vait l'empire du monde et ne craignait rien
autre chose que la chute du ciel (105).
A c�t� des grandes sc�nes du drame �mouvant et terrible
qui devait finir sous les murs de Nancy par la victoire
du jeune et vaillant Ren� II et la mort de son puissant
agresseur (106), on rencontre partout d'int�ressants
�pisodes ; ici, la description d'une petite ville assez
bien trait�e pour qu'on y entrevoie ou qu'on y devine le
lieu natal de l'auteur (107) ; l�, une �num�ration non
moins complaisante et un peu hyperbolique de nos
richesses locales (108) ; ailleurs, les navrantes
p�rip�ties de deux si�ges (108a), une harangue du duc de
Bourgogne, chef-d'oeuvre d'habilet� et de clairvoyance
(109), le discours d'un Bourgmestre de Zurich plus
remarquable encore par le bon sens et l'honn�tet� (110),
le d�vouement individuel pouss� jusqu'� l'h�ro�sme
(111), les coupables d�faillances d'une noblesse ingrate
et bient�t ramen�e par la fortune du Prince au sentiment
de l'honneur et de la fid�lit� (112). Tout cela expos�
en ce langage substantiel et simple, qui convient tant �
l'histoire et dont elle perd toujours � s'�carter.
Une question de droit public tr�s-d�licate et
tr�s-controvers�e se posait, pour ainsi dire, au
frontispice de son livre, celle de savoir si, en
Lorraine, les femmes h�ritaient de la couronne, �
l'exclusion des collat�raux, et Nicolas Remy la r�sout,
non pas en philosophe ou en publiciste, d'une fa�on
sp�culative et � l'aide de consid�rations tir�es de la
politique ou de l'int�r�t des peuples, mais en
historien, qui interroge les faits, et en jurisconsulte,
qui connait et qui applique la loi; il rappelle le
testament du duc Charles II, l'approbation qu'il a re�ue
non-seulement de l'assembl�e des Etats, mais encore du
concile de B�le, et enfin et surtout �� les us et
coustumes suivant lesquels les filles � faute de fils ou
de leur repr�sentant excluent tous autres du parent� en
la succession de leur p�re et m�re (113). �
Et quelque laconique qu'elle f�t, cette solution
empruntait une autorit� si grande � la renomm�e de
science et de droiture de son auteur qu'un peu plus tard
Charles IV chercha � emp�cher la r�impression de
l'ouvrage o� elle se trouvait consign�e, quand, dans son
ambition turbulente et inqui�te, il voulut, au d�triment
de sa cousine germaine, et � l'aide d'une odieuse
com�die, attribuer � son p�re Fran�ois, comte de
Vaud�mont, une couronne qu'il se proposait de bient�t
lui reprendre (114).
Serait-ce parce qu'on y lisait la d�monstration du droit
h�r�ditaire de sa fille a�n�e Nicole que le bon duc
Henry crut devoir donner sa haute approbation au
Discours des choses advenues en Lorraine depuis le d�cez
du Duc Nicolas iusques � celuy du Duc Ren� ? Je
n'oserais pas le pr�tendre mais je sais que ce discours
a valu � son auteur une marque de la munificence ducale
le 7 mars 1609, le tr�sorier g�n�ral lui versait 1,000
fr. (115) et la pi�ce comptable qui fournit ce
renseignement en donne un autre que je me garderai bien
de n�gliger.
Elle prouve que Nicolas Remy avait re�u la mission de
r�diger par �crit et qu'il a r�dig�, en un volume, le
recueil des �dits et des ordonnances de la Province. Ce
recueil qui lui avait demand� beaucoup de peines et de
soins, il aurait voulu le mettre en lumi�re mais, pour
des causes rest�es inconnues, le duc de Lorraine lui
refusa cette petite satisfaction d'amour propre, en lui
allouant, � titre de consolation et de r�compense, une
somme de 3,000 fr.
payable en trois ann�es cons�cutives sur les recettes en
bl� de Charmes et de Ch�tel (115 a).
Il faut, Messieurs, regretter aujourd'hui un travail
confi� � d'aussi habiles mains et qui r�sumait, en
d�finitive, avec la coutume et son style, toute la
l�gislation du duch� (116).
Nicolas Remy, � peu pr�s octog�naire, n'imposait pas
toujours � sa verte vieillesse d'aussi rudes et d'aussi
longs labeurs. Selon le pr�cepte d'Horace, il calculait
ce que ses �paules pouvaient porter (117), r�glait avec
intelligence l'emploi de son temps et savait pr�venir
l'ennui et la fatigue de l'�tude par sa vari�t� (118).
Sous ce rapport d'immenses ressources s'offraient � lui;
il connaissait aussi bien la langue d'Hom�re et de
D�mosth�nes que celle de Virgile et de Cic�ron (119)
l'antiquit� sacr�e ou profane pouvait ainsi, chaque
jour, lui ouvrir ses tr�sors la science moderne
elle-m�me d�couvrait � ses yeux �merveill�s des horizons
sans cesse agrandis d�j�, dans son admirable structure,
le corps humain n'avait plus pour lui de secrets (120);
mais la po�sie surtout r�pondait aux besoins de sa
nature ardente et riche, et instinctivement il lui
demandait ses plus fr�quentes et ses plus ch�res
distractions (121). Il faisait des vers latins aussi
bien que Guy Coquille (122) et Estienne Pasquier (123);
il en a laiss� beaucoup, tous d'une forme irr�prochable
et quelques-uns tr�s-heureusement inspir�s. Les
meilleurs, au nombre de 967 pr�c�dent la D�monol�trie
(124) et lui servent d'introduction; apr�s les avoir
lus, on pourrait fermer le livre, car le livre, dans sa
prose, n'apprend rien de plus et ne renferme rien de
mieux.
On doit ranger parmi les d�lassements po�tiques de
Nicolas Remy la relation latine de l'entr�e solennelle �
Nancy de Marguerite de Gonzague, seconde femme du duc de
Bar, depuis Henri II (125).
Cet opuscule de 16 pages, sorti des presses de Clairlieu
et devenu tr�s-rare, a, � cause de son extr�me raret�,
toute la valeur d'un diamant dans l'�crin d'un
bibliophile, mais je ne crois pas qu'il ajoute quelque
chose � la r�putation de l'�crivain.
Je pr�f�re de beaucoup le petit po�me consacr� � l'�loge
du duc Charles III; on y sent d'un bout � l'autre le
souffle divin d'une na�ve admiration, d'une sinc�re
gratitude et d'une profonde douleur (126).
Lorsqu'en 1611 la capitale de la Lorraine voulut, d'une
mani�re r�trospective, f�ter le joyeux av�nement de son
nouveau duc, ce fut encore � Nicolas Remy, malgr� son
grand �ge, qu'elle envoya son ambassadeur (127), pour
obtenir de lui un programme que Son Altesse, par un
sentiment d'�conomie tr�s-louable, ne permit pas
d'ex�cuter. L'ancien procureur g�n�ral s'�tait charg� de
la harangue officielle, et le vieux po�te des
inscriptions versifi�es selon le go�t du temps.
III
Depuis que ses
fonctions ne retenaient plus Nicolas Remy � Nancy dans
sa maison de la rue du Hault-Bourget (128) et pr�s de sa
paroisse de Notre-Dame (129), il vivait retir�, tant�t �
Charmes (130), o� reposaient les cendres de son p�re, ce
praetor urbanus (131) dont il ne parle jamais qu'avec
v�n�ration, tant�t � sa petite campagne de Saint-Mard
(132), o�, � l'exemple de Lhospital (133), il cultivait
ses fleurs et r�coltait ses fruits; heureux de jouir
encore, au terme de sa longue vie, d'une �me saine dans
un corps sain (134); satisfait comme le sage d'une
m�diocrit� � laquelle le Prince ajoutait ses largesses;
entour� des soins les plus intelligents et des �gards
les plus tendres fier d'une descendance nombreuse et
dont l'a�n� portait d�j� tr�s-dignement son nom (135).
Il go�ta ce bonheur jusqu'au mois d'avril 1612 (136).
La mort ne pouvait pas le surprendre; elle pouvait
encore moins l'effrayer; car il avait cette foi robuste,
cette foi de nos p�res, qui, avant la derni�re heure,
entrouvrait � leurs yeux les portes du ciel.
De m�me qu'il admirait tout dans la nature, tout lui
plaisait dans la religion, ses dogmes, sa morale, sa
liturgie, ses rites, ses pompes; les cloches
elles-m�mes, si souvent accus�es d'importunit�,
trouvaient en lui un g�n�reux d�fenseur s'il combattait
le pr�jug� vulgaire qui attribue � leur sonnerie le
pouvoir de conjurer la foudre, il leur savait un gr�
infini d'appeler les fid�les � la pri�re (137), et, pour
les chanter, il e�t �t� bien certainement avec Schiller
(138) contre Boileau (139).
On aime, Messieurs, � voir ainsi ce magistrat qu'une
peinture grossi�re (140) et la tradition tromp�e nous
repr�sentent avec un visage presque farouche, et, sur
son si�ge, s�v�re jusqu'� la cruaut�, appara�tre au
contraire, quand on l'�tudie dans ce qui nous reste de
lui, c'est-�-dire dans ses ouvrages, simple comme un
enfant, �mu comme un po�te, croyant comme un ap�tre,
accessible enfin � tous les sentiments honn�tes,
g�n�reux et bons.
L'harmonie rena�t alors dans cette remarquable
personnalit� le noble coeur explique les grandes pens�es
et les grands services.
Messieurs, on r�p�te tous les jours que notre �poque
est, en histoire, l'�poque des r�habilitations, et je
confesse que beaucoup de celles que l'esprit de parti a
tent�es me laissent incr�dule ou m�content.
Je n'ai donc eu ni la volont� ni le pr�somptueux espoir
de r�habiliter Nicolas Remy; je voudrais seulement, pour
me servir d'une expression judiciaire en parlant d'un
magistrat, que cette notice si incompl�te, malgr� sa
longueur, �veill�t chez un autre la pens�e �quitable et
lib�rale d'instruire � nouveau et de r�viser
impartialement son proc�s.
Ces r�visions d�sint�ress�es, consciencieuses,
inoffensives, faites sur pi�ces, � deux ou trois si�cles
de distance, n'ont rien de suspect elles n'inqui�tent
personne mais elles honorent les compagnies savantes qui
les accueillent et ne peuvent �tre qu'un utile et tardif
hommage rendu � la v�rit�.
NOTES
Dom Calmet,
Biblioth�que Lorraine, ou histoire des hommes illustres,
qui ont fleuri en Lorraine, dans les trois Ev�ch�s, dans
l'Archev�ch� de Tr�ves, dans le duch� de Luxembourg,etc,
col. 802-803. - Dom Ambroise Pelletier, Nobiliaire
armorial g�n�ral de la Lorraine et du Barrois, p. 690. -
Chevrier, Histoire militaire, eccl�siastique, politique
et litt�raire de Lorraine et de Bar, t. IX, p. 74-77, et
M�moires pourr servir � l'histoire des hommes illustres
de Lorraine t. I, p. 125-129.
Ces trois auteurs, et tous ceux qui se sont apr�s eux
occup�s de Nicolas Remy, ne savaient presque rien de sa
vie; ils ne connaissaient ni le lieu de sa naissance, ni
l'�poque de sa mort, ni les nombreuses fonctions qu'il a
remplies, ni l'existence, ni les titres de tous les
ouvrages qu'il a compos�s; ils ont �t� jusqu'� le
confondre avec l'un de ses fils. Pour rectifier ces
erreurs et combler ces lacunes, il fallait plus que de
pures et simples affirmations, il fallait apporter des
preuves, indiquer des sources et les notes qui suivent
pourvoiront, je l'esp�re, dans une suffisante mesure, �
cette n�cessite.
Je dois � l'obligeance aussi infatigable qu'�clair�e de
M. Henri Lepage, archiviste du d�partement de la
Meurthe, tous les documents tir�s de l'ancien Tr�sor des
Chartes de Lorraine ; et, avant de m'en servir, je me
plais � lui offrir ici l'expression de ma vive et
sinc�re gratitude.
(1) M. Adolphe-Louis-Fran�ois Parade, n�
� Ribeauvill� (Haut-Rhin), le 11 f�vrier 1802, Directeur
de l'Ecole Foresti�re de Nancy, Officier de l'Ordre
imp�rial de la L�gion d'honneur, Chevalier des Ordres de
Saint-Stanislas de Russie, de Notre-Dame de Conception
du Portugal, de Charles III d'Espagne, appartenait �
l'Acad�mie de Stanislas depuis le 6 f�vrier 1863. Il est
mort � Am�lie-les-Bains, le 29 novembre 1864, avant
d'avoir, pour ainsi dire, pris possession de son si�ge.
(2) M. Tassy, aujourd'hui Conservateur des for�ts.
(3) M. Parade, sa vie et ses oeuvres.
(4) M�moires de la Soci�t� Royale des sciences et
belles-lettres de Nancy, T. I, p. 100 Statuts du 27
d�cembre 176i, art. 35 et 36.
(5) M. Dupin, Eloge de Guy Coquille, p. 4-5.
La naissance de Nicolas Remy ne doit �tre ni ant�rieure
� 1525, ni post�rieure � 1530, c'est-�-dire qu'elle se
reporte � peu pr�s au temps o� Guy Coquille, qui fut,
lui aussi, Procureur g�n�ral de sa province, naissait �
Decize, en Nivernais. Il a eu ainsi, et comme lui, pour
contemporains et pour �mules, les plus savants
jurisconsultes et les plus grands magistrats Dumoulin et
Cujas, Antoine Loisel, Estienne Pasquier, les fr�res
Pithou, Gilles Lemaistre, Chr�tien de Lamoignon, Michel
de l'Hospital, Christophe de Thou, Achille de Harlay...
(6) Dom Calmet, Histoire de Lorraine, T. V, col.
765-771. - De Rog�ville, Dictionnaire historique des
ordonnances et des tribunaux de la Lorraine et du
Barrois, T. II, p. 489-499, 508-509, 626. - Chevrier,
Histoire de Lorraine et de Bar, T. IV, p. 206-221.- M.
Neveu-Lemaire, Discours de rentr�e, prononc�, � Nancy,
le 3 novembre 1864, p. 8-20.
Les Universit�s de France, que Nicolas Remy a suivies et
dont parlent les Lettres patentes auxquelles j'emprunte
ce d�tail, �taient probablement celles de Paris,
d'Orl�ans ou de Toulouse, les plus c�l�bres d'alors.
Canoniquement institu�e, � la demande du cardinal de
Lorraine, par une bulle du 5 d�cembre 1572, l'Universit�
de Pont-�-Mousson n'ouvrait ses classes de grammaire
qu'au mois d'octobre de l'ann�e suivante et son �cole de
droit que cinq ans plus tard, en 1578, avec le concours
de l'Ecossais William Barclay, et, bient�t apr�s, sous
le d�canat de Gr�goire de Toulouse, l'un des meilleurs
�l�ves de Cujas.
(7) B. 39� f� 205 (*). Lettres patentes.
�� CHARLES, etc. L'humble supplication de nostre cher et
f�al Fran�ois Milalte, lieutenant g�n�ral en nostre
bailliage de Vosge, avons receue, contenant que... se
sentant vieil et caducque... et ayant d�sir de veoir
continuer sa parent� en nostre service, � l'imitation de
ses ancestres, et qu'� ces fins il auroit, depuis
quelque temps, retir� en grande instance ung sien nepveu,
nomm� Me Nicolas Remi, licenci� ez loiz des universitez
de France, o� il auroit vers� l'espace de vingt ung ans,
faisant profession, la pluspart d'iceulx, d'enseigner
tant les lettres humaines que les droictz; nous
suppliant tr�s-humblement vouloir donner et conf�rer �
sondict nepveu ledict estat et office de lieutenant
g�n�ral en nostredict bailliage de Vosge, comme idoine,
suffisant et capable pour le faire et exercer; lequel
estat, � ceste occasion, il remettoit volontairement
entre noz mains. S�avoir faisons que nous, ce que dict
est consid�r�,... ayant �gard et consid�ration au bon et
fidel rapport.qui nous a est� faict des sens, science,
preudhommie, int�grit�, exp�rience, litt�rature et bonne
diligence estans en la personne dudict Me Nicolas Remi,
son nepveu, et qu'il est besoing et requis prouveoir
audict estat...
de lieutenant g�n�ral, tant pour l'administration de la
justice a qu'� la conservation de noz droictz et
aucthorit� audict bailliage de Vosge, pour ces causes...
avons, ce jourd'huy, audict Me Nicolas Remi, son nepveu,
donn�, conf�r� et octroy�... ledict estat. � charge
toutefois qu'il fera sa r�sidence au lieu de
Mirecourt... Donn�es en nostre ville de Nancy le...
vingt-cinquieme de mars mil soixante-dix.... �
(*) Dans cette formule abr�g�e, et qui se reproduira
souvent, la lettre B. signifie Tr�sor des Chartes,
anciens fonds de la Chambre des Comptes de Lorraine ; le
chiffre qui suit est le num�ro d'ordre da volume; le
dernier, celui de la page, recto ou verso.
(8) B. 45, f� 115, v�. Lettres patentes.
�� Charles, etc. Comme nagu�res nous ayons reprins en noz
mains l'estat de lieutenant g�n�ral du bailliage de
Vosges des mains de nostre am� et f�al Nicolas Remy,
licenci� ez loix, afin de le retirer � nostre service et
pr�s de nostre personne; s�avoir faisons que, pour les
sens, discr�tion, s�avoir et preudhomie estans en la
personne dudict Remy, avons icelluy, pour ces causes et
autres bonnes consid�rations nous mouvans, prins et
retenu, prenons et retenons par ces pr�sentes en esat de
secr�taires des nostres, aux droictz, honneurs,
franchises, libertez, irnmunitez, pr�rogatives et aux
gages que cy-apr�s luy ordonnerons sur nostre estat...
Donn�es en nostre ville de Nancy, le quatri�me jour du
mois de novembre a mil ve soixante quinze.... �
(9) Dom Calmet, Histoire de Lorraine, T. V, col.
631-902. Chevrier, Histoire de Lorraine et de Bar, T.
IV, p. 440-258.- Digot, Histoire de Lorraine, T. IV, p.
145-.403. - Joseph-Fran�ois Coster, Eloge de Charles
III, dit le Grand, Duc de Lorraine, Marchis, Duc de
Calabre, Bar, Gueldres, etc.
Le Duc Chartes III, dont l'heureux et long r�gne,
commenc� le 12 juin 1545, ne finit que le 14 mai 1608,
avait �pous� Claude de France, le 22 janvier 1559.
Personne n'ignore que la Lorraine a d� � sa vigoureuse
et intelligente initiative de nombreuses ordonnances sur
les mati�res les plus importantes et les plus diverses,
la r�daction de ses principales coutumes, la
substitution d'une Cour souveraine au Tribunal des
Assises, la dotation de ses h�pitaux, l'extension de son
territoire, les fortifications de ses places fronti�res,
celles r�put�es admirables de sa capitale, la ville
neuve de Nancy, son �glise primatiale, l'ordre et
l'�conomie dans les finances, l'efficace protection des
sciences, des lettres, des arts, de l'industrie, et du
commerce, le calendrier Gr�gorien. II avait une
instruction vari�e et solide; il parlait presque toutes
les langues de l'Europe, et, s'il faut en croire Dom
Calmet, il �tait si beau que tous les autres souverains
voulaient avoir son portrait.
(10) B. 1172, f� 166, v�. Compte du Tr�sorier g�n�ral.
On ne trouve pas, au registre des Lettres patentes,
celles qui ont conf�r� � Nicolas Remy le titre
d'Echevin, mais on y suppl�e par les comptes du
Tr�sorier G�n�ral de Lorraine, o� il figure pour la
premi�re fois � ce titre en 1576. - Les �chevins
touchaient 50 fr. chacun, le Ma�tre-Echevin en touchait
400.
(11) J.-J. Lionnois, Histoire des villes vieille et
neuve de Nancy, depuis leur fondation jusqu'en 1788, T.
I, p. 311.
(12) M. Auguste Prost, Notice sur le Ma�tre-Echevinat �
Metz, M�moires de l'Acad�mie imp�riale de Metz, ann�e
1853, p. 144-157. - L'Abb� Clouet, Histoire de Verdun et
du pays verdunois, T. I, p. 428. - Stile pour
l'instruction des proc�s �s sieges tant sup�rieurs des
Bailliages de Nancy, Vosges et Allemagne, qu'inf�rieurs
des Pr�costez et Mairies estans �s districts et ressorts
d'iceux, tit. art. 1 et 2. - Recueil des �dicts,
ordonnances et r�glemens de tr�s-magnanime, auguste et
puissant Prince Charles IV, Duc de Lorraine et de Bar et
de aucuns serenissimes Ducs, ses devanciers et
prog�niteurs.
1307-1631. Code manuscrit de la riche collection de M.
Beaupr�, conseiller honoraire de la Cour Imp�riale de
Nancy, tiv. II, p. 30-52. - De Rog�ville, Dictionnaire
historique des ordonnances, T. I, p. 60-64 et 552. -
J.-J. Lionnois..., Ibid, T. I, p. 311 et T. III, p.
32-33 et 70.
L'Echevinat � Nancy n'avait point comme � Metz et �
Verdun, un caract�re mixte, c'est-�-dire tout � la fois
municipal, administratif et judiciaire; les Echevins
n'�taient que des juges, juges ayant des attributions
particuli�res comme tribunal, et de plus juges
assesseurs, non-seulement au Bailliage, mais encore � la
Pr�v�t� et � la Gruerie de Nancy.
A la fin du seizi�me si�cle, ce tribunal se composait de
quatre membres, dont l'un prenait le litre de
Ma�tre-Echevin; peut-�tre m�me, dans l'origine, ne se
composait-il que de deux, ce qui expliquerait pourquoi
Nicolas Remy l'appelle toujours coll�ge des Duumvirs,
Duumvirorum Nanceianorum collegium.
Il tint d'abord ses s�ances sur la place des Dames, �
l'h�tel du Change, qui lui donna son nom, et dans la
suite seulement � l'H�tel-de-Ville, dont la d�molition,
en 1751 ou 1752, a fait la place Mengin.
Quatre r�glements successifs, en date des 23 mai 1606,
25 janvier 1608, 31 d�cembre 1610 et 1er f�vrier 1616,
fournissent des renseignements pr�cis et curieux sur son
organisation int�rieure et sur ses travaux.
Il si�geait le mardi et les trois jours suivants, avant
ou apr�s la messe: depuis P�ques jusqu'� la Saint-Remy,
le matin, de sept heures � dix heures, le soir, de deux
heures � cinq heures; depuis la Saint-Remy jusqu'�
P�ques, le matin, de huit heures � dix heures, le soir
de une heure � quatre heures. Les absents et les
retardataires, sans motifs l�gitimes, payaient 2 fr.
d'amende.
Le Greffe, situ� proche la salle d'audience, restait
ouvert en �t�, le matin de six heures � onze heures, le
soir de une heure � six heures en hiver, de sept heures
� onze heures, et le soir de une heure � quatre heures.
Le Greffier apportait avant l'audience au Ma�tre
�chevin, en la chambre du conseil, tous les proc�s, dans
la huitaine au plus tard de leur mise en �tat, et
celui-ci les distribuait, d'une mani�re �gale, aux
Echevins charg�s d'en faire le rapport par extrait fidel
et exact et non verbalement et de bouche. L'exactitude
et la fid�lit� de ce rapport �taient, d'ailleurs,
contr�l�es par la lecture des pi�ces soigneusement
inventori�es.
Le rapporteur opinait le premier et les autres apr�s
lui, � commencer par le dernier re�u.
Les opinants devaient �tre au nombre de cinq au moins,
s'ils �taient six, et qu'il y e�t partage, au civil, la
voix du Ma�tre-Echevin l'emportait; mais, au criminel,
on remettait l'affaire � un autre jour, pour entendre te
septi�me, ou, � son d�faut, le plus ancien avocat du
si�ge.
Le Ma�tre-Echevin r�digeait les jugements rendus sur
plaidoiries et le rapporteur ceux des proc�s par �crit.
Tous les jugements �taient intitul�s du nom du Bailli,
ou de son lieutenant et des Maitre-Echevin et Echevins;
aucun ne pouvait se rendre hors de l'auditoire; les
simples d�crets, que les Echevins donnaient chez eux,
�chappaient seuls � cette r�gle absolue et d'ordre
public.
Afin de pr�venir les sollicitations indiscr�tes, le nom
du rapporteur demeurait toujours inconnu aux parties.
La taxe des d�pens et des �pices se faisait par la
compagnie enti�re.
Les Echevins s'assemblaient, aux jour et heure convenus
entre eux, dans la chambre du conseil, dont chacun avait
la clef, pour y entendre les rapports, d�lib�rer,
r�soudre les proc�s et faire toutes autres choses
concernant le fait de leur charge et devant �tre
exp�di�es hors des audiences.
Le Ma�tre-Echevin et les Echevins, ainsi que les
avocats, portaient la robe longue et le bonnet carr�,
pendant tout le temps qu'ils vaquaient aux devoirs de
leurs fonctions ou de leur minist�re, � l'audience et au
Palais. Le Clerc jur�, c'est-�-dire le greffier, et son
commis, portaient au contraire la robe courte et une
toque.
Le Ma�tre-Echevin jouissait de toutes les pr�rogatives
d'un chef de compagnie, quoiqu'il n'en pr�t pas le
titre. Il faisait observer les r�glements, ordre et
respect dus a la Justice. Il pr�sidait en l'absence du
Bailli et de son lieutenant il avait la garde du sceau
qu'il apposait � tous les actes qui devaient en �tre
rev�tus il convoquait extraordinairement ses coll�gues
dans les cas requ�rant c�l�rit� il mettait les scell�s
sur les biens des mineurs d�c�d�s et des absents.
Le Bailli ne d�lib�rait pas avec les Echevins, mais il
avait une juridiction sp�ciale et toute personnelle. En
cas d'urgence, sous le titre de commissions ou de
lettres du Bailli, il rendait des sentences provisoires,
que, dans notre droit moderne, on appellerait des
ordonnances de r�f�r�. - En mati�re ordinaire, � moins
que les parties ne s'adressassent � lui, de leur gr� et
consentement, pour �tre jug�es, ses pouvoirs se
bornaient aux actes pr�paratoires et d'instruction
qu'�num�rent, dans leur vieux langage, les art. 1 et 2
du titre Ier du Stile pour l'instruction des proc�s
autres que ceux port�s devant les assises. - Il assurait
l'ex�cution des sentences rendues sur le fonds des
proc�s. - Il exer�ait enfin un pouvoir disciplinaire �
l'�gard des sergents, qu'il r�voquait en cas de
malversation.
Les vacances et f�ries des fenaison, moisson et vendange
se r�glaient � l'audience, les avocats ou�s et de l'avis
du Bailli.
Par ordonnance du 22 d�cembre 1633, en attribuant au
Tribunal des Echevins la connaissance des affaires
contentieuses des mineurs et de celles se rattachant �
l'administration de leurs biens, le duc Charles IV cr�a
deux nouveaux offices d'Echevins et en porta � 9 le
nombre qui s'�tait d�j� progressivement �lev� de 4 � 7.
M�me avant l'ordonnance pr�cit�e, les affaires des
mineurs avaient toujours eu en Lorraine un caract�re
particulier et privil�gi�, � ce point, que, dans les
premiers temps, on leur assignait des audiences
sp�ciales et on en tenait registre � part.
(13) L'avocat Guinet.
(14) Dom Calmet. Histoire de Lorraine et de Bar. -
Dissertation sur l'ancienne jurisprudence de Lorraine. -
M�moire sur l'�tat des duch�s de Lorraine et de Bar,
auquel ils �toient avant la guerre de 1633. T. III, col.
ccxxxiii.
(15) Cout�mes anciennes du Duch� de Lorraine, tit. I,
art. 5. Recueil du Stile � observer es instructions des
Proc�dures d'Assizes, �s Bailliages de Nancy, Vosges et
Allemagne, tit. i, art. 5. - Stile pour l'instruction
des proc�s �s si�ges tant sup�rieurs des Bailliages de
Nancy, Vosges et Allemagne qu'inf�rieurs des Pr�vostez
et Mairies estans �s districts et ressorts d'iceux. Tit.
VIII, art. 4, 5, 6, 7, 8, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16,
17. - De Rog�ville, Dictionnaire, T. I, p. 60-61 et
64-65.- Guinet, M�moire sur l'�tat des Duch�s de
Lorraine et de Bar. - Dom Calmet, Hist. de Lorr., T.
III, col.ccxxix-ccxxxi. - Aug. Digot, Hist. de Lorr., T.
V, p. 90-92, 96. -
M. le comte d'Haussonville, Histoire de la r�union de la
Lorraine � la France. T. I, p. 444-445.
Au civil, le Tribunal des �chevins remplissait les
fonctions du Bailliage; on pourrait m�me dire que, �
Nancy, il �tait le Bailliage, s'il n'avait eu, en
certaines mati�res, des pouvoirs autres et plus
consid�rables.
Il jugeait toutes les affaires personnelles des
gentilshommes de l'ancienne chevalerie, des nobles,
anoblis et autres privil�gi�s il jugeait aussi leurs
affaires r�elles, moins celles qui s'intentaient au
petitoire, �� pour fiefs, arri�re-fiefs, chasteaux,
maisons fortes, rentes, revenus, revenus et droits
seigneuriaux, francs aloeuds, nobles enclav�s esdit
Bailliage, pour villes ou �� villages, droits de
patronage lay et pour toutes autres choses de pareille
nature et condition �.
L'appel n'�tait interdit qu'exceptionnellement et dans
des cas tr�s-rares lorsqu'il s'agissait de salaires,
loyers, gages, merc�des de serviteurs et manouvriers,
legs pieux bien reconnus, trait de bouche, choses mises
en d�p�t en mati�re de saunage; dans les cinq cas de
chose jug�e, de serment loqu�, acte de trouble et
nouvellet� faite depuis an et jour injure et crime;
enfin, dans toutes les instances introduites par un
�tranger contre un r�gnicole pour chose n'exc�dant pas
la valeur de 100 fr.
Presque toutes les affaires jug�es en dernier ressort se
traitaient sommairement et de plain, nonobstant toutes
f�eries et vacances et elles ne comportaient qu'une
sorte de recours en cassation par la voie de plainte au
Conseil du Duc, en faute de justice.
Dans les autres affaires, quand il y avait appel, la
sentence, ou pour me servir de l'expression consacr�e
par l'usage et trop justifi�e par le profond sentiment
de la faillibilit� humaine, le semblant �tait d�f�r� �
Messieurs de l'Ancienne Chevalerie au droict de l'h�tel
de Monseigneur; ce qui explique cette �trange formule
des arr�ts en cas de confirmation, �� le droict de
l'h�tel de Monseigneur le Duct dict que le semblant des
Ma�tres-Eschevins de Nancy est bon � et en cas
d'infirmation, �� le droict de l'h�tel de Monseigneur le
Duc dict, en infirmant le semblant des Ma�tres-Eschevins
de Nancy, que... � ; suivait le dispositif en termes
brefs et pr�cis.
L'appel devait �tre interjet� sur-le-champ, si les
parties ou leurs procureurs assistaient � l'audience, et
relev� par l'appelant dans la quinzaine, avec
consignation d'une somme de six francs. �� Des quels six
francs, dit Guinet, le Greffier du Bailliage, pour
instruire et mettre le proc�s dans le sac, le cacheter
et le porter au Greffier de l'Assise, prenait six gros
et on bailloit autres six gros au Greffier de l'Assise
pour toutes choses, et il �toit oblig� d'en charger son
registre, et de le rapporter au Greffier du Bailliage,
avec l'arr�t de l'Assise le tout cachet�. Les autres
cinq francs se mettoient dans le sac, et appartenoient
aux Gentilshommes, qui ne prenoient point �pices, ni
autres profits, et venoient expr�s � l'Assise � leurs
frais, pour rendre la justice; et quant � ces cinq
francs, ils ne les partageoient pas; pour l'ordinaire
ils les bailloient partie � leurs Greffiers, partie aux
pauvres.
�� La forme de prononcer �toit par �crit au bas de la
sentence,... et le cachet secret appos�, qui �toit des
al�rions de cire verte, et le papier dessus, et sign�
par le Greffier de l'Assise ; laquelle �tant finie, ceux
qui vouloient poursuivre et qui croyoient avoir gagn�
leur proc�s, faisoient assigner leurs parties devant les
Juges dont �toit appel, pour voir faire l'ouverture du
droit revenu de l'h�tel de Monseigneur le Duc ; et, �
l'audience, le Greffier du Bailliage ouvroit le sac et
en faisoit lecture, et on en demeuroit l�, pour ex�cuter
ce qui �toit ordonn� sans autre longueur; point d'appel,
point de r�vision, point d'opposition, point de requ�te
civile, point de proposition d'erreur, point de chicane
plus avant. �
La proc�dure ant�rieure � l'arr�t se recommandait par
une simplicit� au moins aussi grande. �� Il n'y avoit
point de griefs, point de production nouvelle, point
d'intervenant. �
S'il s'agissait d'un proc�s par �crit, �� on jugeoit
pr�cis�ment sur la sentence, dont �toit appel, et sur
les �critures et pi�ces sur lesquelles elle avoit �t�
rendue. Si c'�toit une sentence d'audience, les avocats
qui avoient plaid� bailloient pardevant les Juges des
�critures d'agr�ment qui d�voient �tre agr��es de part
et d'autre, c'est-�-dire que l'on demeurait d'accord que
c'�toit ce qu'on avoit plaid�, et ces �critures, avec
les extraits de la demande et de la sentence, faisoient
toute l'instruction. On les enfermait dans un sac, puis
on les portoit comme les autres par �crit. �
Quand un interlocutoire paraissait utile, comme une
enqu�te, une vue des lieux ou toute autre proc�dure du
m�me genre, �� le Bailli nommait un commissaire, qui
�toit d'ordinaire le Lieutenant g�n�ral, que l'on
appeloit le Lieutenant du a Bailli, ou quelqu'honn�te
praticien bien connu, qui se transportaient sur les
lieux. Les enqu�tes faites se lisoient en l'Assise, on y
en ordonnoit. Les nullit�s, reproches et contredits se
baillaient sur-le-champ enfin toutes les longueurs et
tous les frais �toient bien retranch�s ; ce qui arrive
toujours, quand les Juges baillent leurs preuves gratis.
�� On ne faisoit qu'une enqu�te, et si le demandeur, par
exempte, avoit fait l'enqu�te, si elle �toit suffisante,
on pronon�ait : le Demandeur en a assez fait, et rien de
plus ; mais cela signifioit que les conclusions de la
demande lui �toient adjug�es avec d�pens. Si elle n'�toit
pas suffisante, on disait : un tel a peu fait, et rien
de plus ; mais cela signifioit qu'il perdoit son proc�s.
Quoiqu'on ne donn�t point d'�critures, ni point de
griefs � l'Assise, n�anmoins on faisoit des factums et
des remontrances imprim�es que l'un distribuoit �
Messieurs de l'Ancienne chevalerie ; on les sollicitoit
m�me tant que l'on vouloit, quelque grands seigneurs
qu'ils fussent et quelque pauvres que fussent les
parties ; ils les recevoient toujours et les �coutaient
et les avocats avec beaucoup d'honn�tet�; et comme ces
messieurs avoient des amis et leurs avocats pour leurs
affaires particuli�res, s'il se pr�sentoit quelque
question difficile � juger, o� ils n'eussent point
d'engagements, ils les consultoient volontiers et s'en
instruisoient avec sinc�rit� et on ne trouvait parmi ces
grands seigneurs aucun soup�on de corruption. �
Celui qui d�sertait son appel ou y renon�ait, encourait
une amende de deux francs.
(16) Dom Calmet, Histoire de Lorraine, T. III, col.
ccxxxiii-ccxxxiv et T. V, col. 883-884. - J.-J. Lionnois,
T. I, p. 311-313 et T. III, p. 33 et 34. Aug. Digot,
Histoire de Lorrarie, T. V, p. 96-97. Dumont, Justice
criminelle des Duch�s de Lorraine et de du Bassigny et
des Trois-Ev�ch�s, T. I, p. 73-78. -B. 2197. Pi�ces
justificatives du compte du domaine d'Amance pour
l'ann�e 1615.
Il n'est pas, en Lorraine, de point de droit criminel
plus clairement �tabli que l'obligation pour tous les
Tribunaux d'adresser avant le jugement leurs proc�dures
au Tribunal des Echevins de Nancy, afin d'obtenir son
avis. Et cependant cette obligation, n�e peu � peu de
l'usage, ne repose � l'origine sur aucun texte ; elle
ressemble � ces f�condes et nombreuses conqu�tes que les
Juristes ont faites en France, sur le pouvoir f�odal, au
profit de la royaut� et que le l�gislateur n'a
r�glement�es que beaucoup plus tard.
Gr�ce � l'avis qu'on lui demandait toujours et qu'il
devait toujours �mettre, le Tribunal des �chevins
constituait bien moins un Tribunal, dans le sens
rigoureux de ce mot, qu'une sorte de Chambre des mises
en accusation.
Sur le vu des pi�ces, et en assembl�e sp�ciale, il
disait si des charges suffisantes s'�levaient contre
l'accus� ; il indiquait aussi la peine � appliquer mais
cette indication de la peine, pas plus que la
d�claration de charges suffisantes, ne liait le Juge ;
elle n'avait pour lui d'autre valeur que celle d'un
maximum qu'il ne pouvait pas d�passer.
L'avis des �chevins �tait le plus souvent demand� deux
fois ; la premi�re, avant la question et pour savoir
s'il convenait d'y appliquer l'accus� ; la seconde,
apr�s cette terrible �preuve, et pour en appr�cier les
r�sultats. L'avis d�finitif relatait presque toujours
celui qu'on pourrait appeler l'avis interlocutoire.
�� Les maistre eschevin et eschevins de Nancy, qui ont
veu derechef le pr�sent proc�s extraordinairement
instruict par les pr�vost et gens de justice d'Amance
contre la d�nomm�e..., et notamment ce qu'a est� faict
depuis leur advis du deuxi�me du pr�sent mois, dient
que, pour r�paration dudict crime dont ladicte pr�venue
est suffisamment convaincue, y a mati�re d'adjuger au
sieur procureur g�n�ral de Lorraine ses fins et
conclusions du 25e septembre dernier. Faict � Nancy, en
la chambre du conseil de l'Auditoire, le 5e d'octobre
1615. �
Voici, d'apr�s le d�nombrement de la Lorraine, dress�
par le Pr�sident Alix, en 1594, le nom des villages qui
composaient la pr�v�t� de Nancy et dans lesquels le
tribunal des Ecbevins instruisait etjM~6a!)< les proc�s
crimines:
Nancy, Saint-Nicolas, Art-sur-Meurthe, Champigneulles,
Dombasle, Frouard, G�rardcourt, Heillecourt, Houdemont,
Houdelmont, Jarville, Laxou, Lupcourt, Ludres,
Laneuveville-devant-Nancy, Malz�ville, Max�ville,
Manoncourt-en-Vermois, Pulnoy, Pierreville, Parey-saint-C�saire,
Richardm�nil, Varang�ville, Vandoeuvre, Ville-en-Vermois,
Villers-l�s-Nancy, Azelot, Anthelupt, Bouxi�res-aux-Dames,
Burthecourt-aux-Ch�nes, Cr�vic, Eulmont, Flainval,
Flavigny, Grandvezin, Hudiviller, Lay-saint-Christophe,
Sommerviller, Benney, Bosserville, Cr�v�champs,
Crantenoy, Ceintrey, Dommartemont, Essey-l�s-Nancy,
Fl�ville, Gerb�court, Harou�, Herb�mont, Haplemont,
Jevoncourt, Lenoncourt, Lemainville, Laneuveville-devant-Bayon,
M�r�ville, Messein, Maron, Neuviller-sur-Moselle, Ormes.
Affracourt, Pulligny, Pixer�court, Saint-Max, S�champs,
Saint-Remimont, Saulxures-I�s-Nancy, Vaudeville,
Tomblaine, Vaudigny, Voin�mont, Ville-s.-Madon,
Xirocourt.
Quelque �tendue qu'on suppose la Pr�v�t� de Nancy, j'ai
peine � admettre que le Tribunal des Echevins ne jugeait
pas les proc�s criminels au del� de ses limites je
regarde comme beaucoup plus vraisemblable, eu �gard �
son importance hi�rarchique et judiciaire, qu'il pouvait
les juger dans tout le Bailliage et, si je n'affirme son
droit � cet �gard que pour la pr�v�t� de Nancy, c'est
parce que je n'ai trouv� qu'en ce qui la concerne, des
jugements criminels rendus par le Tribunal des Echevins.
Dans d'autres, dans celle d'Amance notamment, les
jugements criminels �manaient de la Justice locale, et
des lors se pr�sente la difficult� de concilier ce droit
de la Justice locale avec celui du Tribunal des
Echevins, s'il existait, � moins d'attribuer comp�tence
concurremment et simultan�ment � tous deux.
(17) Mory d'Elvange, Etats, Droits, Usages en Lorraine,
p. 5. - J.-J. Lionnois, T. I, p. 311-312. - Dumont,
Justice criminelle, T. I, p. 104-105.
Les lettres patentes du 1er septembre 1595 portaient ��
que les proc�s criminels de ceux de l'Ancienne
Chevalerie et autres leurs Pairs-fielv�s en Lorraine,
pr�venus de crime,... seront faits, instruits et jug�s
par les Ma�tre-Echevin et Echevins de Nancy et
assisteront � l'instruction et confection d'iceux en
nombre �gal Gentilshommes de la qualit� avant dite, pour
� cette fin nomm�s et d�put�s, lesquels avenant qu'ils
reconnoissent le d�linquant avoir �t� contraint du point
et sentiment d'honneur, de tomber en l'inconv�nient dont
il sera recherch�, lui en feront rapport et � ses
successeurs ducs, et pourront supplier d'en connoitre, �
ce que si le point d'honneur l'a pouss� � cet
inconv�nient, il lui plaise d'en retenir la connoissance,
y appelant les gentilshommes j� d�put�s et autres leurs
pairs en nombre plus grand, tel qu'il lui plaira mieux
ordonner si du contraire, il se trouve que l'acte ne
soit commis par sentiment d'honneur, soit le pr�venu
renvoy� par devant les Juges premiers, auxquels pour le
parach�vement du proc�s, assisteront comme auparavant
les dits Gentilshommes j� d�put�s jusqu'� sentence
d�finitive exclusivement ; la r�solution et
prononciation de laquelle sera et demeurera auxdits
Ma�tre-Echevin et Echevins seuls. �
Aux Etats de 1607, les membres de la Chevalerie
obtinrent un droit de r�cusation dont le duc se
r�servait d'appr�cier l'exercice; ils obtinrent aussi
que les Gentilshommes commissaires assistants au proc�s
auraient communication des conclusions du Procureur
g�n�ral et de la sentence du Tribunal des Echevins avant
sa prononciation, pour qu'ils pussent, en cas de rigueur
excessive, solliciter du Prince l'ordre d'une autre
r�solution ou la gr�ce du coupable.
(18) B. 53, f� 24, v�. Lettres patentes. - Dom
Pelletier, Nobiliaire, p. 690. - Lallain de Montigny,
Annoblis tant du duch� de Lorraine que de celui de Bar,
par le duc Ren�, avec le blason de leurs armes �
commencer depuis p. 69. J.-J. Lionnois, T. I, p.
313-314. - Bernard de la Roche-Fiavin, Treize livres des
Parlemens de France, liv. x, chap. 5, p. 591. - Emmery,
Recueil des Edits, D�clarations, Lettres Patentes et
Arr�ts du Conseil enregistr�s au Parlement de Metz,
ensemble des arr�ts de R�glement rendus par cette cour,
T. II, p. 609. - Le vicomte de Bastard d'Estang, Les
Parlements de France, T. I. p. 258. - M. de Lacuisine,
le Parlement de Bourgogne depuis son origine jusqu'� sa
chute, T. I, p. 57. - M. G -M.-L. Pittot, Histoire du
Parlement de Sandres, T. II, p. 312-323. - Emmanuel
Michel Histoire du Parlement de Metz p. 289-291.
�� Pour ce est-il que nous, aians plaine et certaine
congnoissance des louables, fidelles et vertueux
d�portemens qui sont en nostre am� et f�al Nicolas Remy,
licenci� ez droitz, conseiller et secr�taire des nostres
et eschevin en la justice ordinaire de ce lieu de Nancy,
tant en l'exercice de sesdicts estatz et offices,
desquelz l'aurions express�ment honnor� pour ses vertus,
apr�s qu'il se seroit voluntairement d�mis en noz mains
de la lieutenance g�n�rale au bailliage de Vosges, qu'�s
ex�cutions de belles et honnorables charges � luy par
nous d�f�r�es et commises, pour l'enti�re et parfaicte
asseurance qu'avons de ses int�grit� de meurs,
preud'homie, idoint� et suffisance, mesme qu'il se
seroit comport� en chacune d'icelles avec tel acquis et
satisfaction de son debvoir, que nous en aurions
tousjours receu bon contentement, et noz subjectz, � qui
il auroit attouch� support et soulaigement; pour ces
causes et autres justes consid�rations ad ce nous
mouvans, avons icelluy... annobly et annoblissons...
VouIons... que luy et ses enfans masles et femelles, nez
et � naistre, descendans de luyen l�al mariage. soient �
toujoursmais tenus, traictez et r�putez pour nobles...
sans ce qu'ilz soient tenus ne puissent estre
contrainctz... d'en payer � nous et � noz successeurs
ducz de Lorraine aulcunne finance, laquelle, de nostre
gr�ce sp�ciale, avons quict�e, remise et donn�e...
audict Nicolas Remy en faveur et contemplation de ce que
dessus... Que furent donn�es � Thiecourt, le neufi�me
jour d'aoust l'an de gr�ce Nostre Seigneur mil cinq cens
quatre vingt et trois...
Nicolas Remy portait d'or, �cartel� en sautoir d'azur, �
deux serpents volants, affront�s d'argent, mouchet�s,
allum�s et arm�s de gueules, et, pour cimier, un serpent
de l'�cu.
Sous l'ancienne monarchie fran�aise, les fonctions
judiciaires exerc�es pendant un certain temps au sein
d'une cour souveraine suffisaient pour conf�rer la
noblesse.
Dans des lettres patentes du janvier 1583, Chartes III
d�clare que le Maitre-Echevin et les Echevins de Nancy
jouissent �� des franchises, libert�s, exemptions,
pr�rogatives et immunit�s de noblesse telles et
semblables que peuvent �tre celles dont usent et peuvent
jouyr les conseillers des cours du Parlement du royaume
de France. �
(19) B. 58, f 222. Lettres patentes.
�� ...Comme, par bonne exp�rience, nous avons remarqu� et
congnu les sens, discr�tion, preudhommie, habiliit�,
suffisance, dext�rit�, vertuz, science et autres bonnes
et louables parties estans en la personne de nostre am�
et f�al conseillier secr�taire ordinaire des nostres et
eschevin en la justice de Nancy Mre Nicole Remy;
consid�rant mesmement que, depuis dix-neuf ans en��
qu'il est � nostre service, nous l'avons employ� �
diverses charges et commissions pour noz importans
affaires, dont il s'est fidellement acquit�, � nostre
contantement; et soit que, pour l'enti�re confidance
qu'avons en luy, et affin de luy donner occasion de
continuer de bien en mieulx, nous ayons advis� et
d�lib�r� le gratiffler et honnorer de quelque estat
honnorable proche de nostre personne, condigne � ses
vertuz et m�rites; S�avoir faisons que nous, ce que
dessus favorablement consid�r�, et pour aultres bons et
justes respectz nous mouvans, avons retenu... ledict Mre
Nicole Remy en estat de conseillier en nostre Conseil
priv�... et aux gages de quatre cens frans par chacun
an, que luy avons ordonn� et establi, pour cause dudict
est�t; et moyennant quoy, les deux cens frans qu'il
souloit tirer de nous d'estat de secr�taire, demeureront
estainctz... en quoy sy n�aulmoins n'entendons
comprendre son estat d'eschevin, que voulons estre par
luy exerc� comme il faisoit auparavant... �
(20) De Rog�ville, Dictionnaire, T. I, p. 369. - Dom
Calmet, T. III, col. cxxxiii-ccxxxiv, et T. V, col.
885-886.
Quand on se pourvoyait au conseil du prince, au lieu de
dire appel, On disoit plainte; et on consignait une
amende de 30 fr.
Le duc si�geait en personne, d�s huit heures du matin,
entour� des princes de sa Maison, des conseillers d'Etat
et des quatre ma�tres des Requ�tes.
�� Le ma�tre des Requestes en quartier rapportoit les
requ�tes sur lesquelles on prenoit r�solution; apr�s on
faisoit entrer les avocats et leurs parties seulement;
ceux dont il falloit plaider la cause, qui �toient
introduits par l'huissier du conseil. Ils plaidoient
avec leurs robes et t�tes nues devant le duc, apr�s une
r�v�rence. L'avocat plaidoit sommairement et
cavalli�rement celui qui d�duisoit le fait plus
nettement et bri�vement �tait le mieux �cout� ; on y
m�loit quelques raisons de droit que l'on vouloit ; on
r�pliquoit de m�me sur-le-champ; et apr�s avoir conclu,
les parties et les avocats sortoient. On opinoit et le
ma�tre des Requ�tes dressoit l'arr�t en son logis, qu'il
rapportoit le lendemain au m�me conseil, pour voir si c'�toit
l'intention du Duc et de son conseil. Il y avoit des
secr�taires du Conseil qui retiroient des mains du
ma�tre des Requ�tes en quartier, les requ�tes cott�es et
les minutes des arr�ts, qu'ils mettoient en forme sur
papier, les faisoient signer par le duc et les
contresignoient pour les d�livrer aux clients; car
toutes exp�ditions du conseil �toient sign�es du duc. �
Les recours en gr�ce se jugeaient aussi sur le rapport
du ma�tre des Requ�tes en quartier, qui se faisait
apporter les informations �� et si le duc tenoit le cas
r�missible, il accordoit la gr�ce par un simple d�cret,
sans autres frais. �
(21) B. 61, f� 197. Lettres patentes.
�� ...Comme nous ayons appell�. George Mainbourg � l'estat
de maistre des requestes en nostre hostel, et, par
raison de ce, l'estat de procureur g�n�ral de Lorraine,
qu'il souloit tenir par cy-devant, soit pr�sentement
vacquant et de besoing y prouvoir et establir personnage
capable et � nous fidel, affin que noz droictz,
aucthoritez et jurisdictions soient bien et diligemment
gard�es, conserv�es et maintenues, et nostre peuple
soulag� et secouru de justice; s�avoir faisons que,
recongnoissant de longue main les scavoir, exp�riance,
suffisance, preudhommie, dilligences et autres bonnes et
louables parties estans en la personne de nostre
tr�s-cher et f�at conseiller d'Estat et eschevin en la
justice de Nancy, Nicol Remy, ainsy que les effects nous
l'ont faict congnoistre depuis vingt deulx ans que nous
l'avons appelle � nostre service, tant en l'estat de
lieutenant g�n�ral au bailliage de Vosges, secr�taire
ordinaire des nostres, eschevin de ladicte justice de ce
lieu et conseiller en nostre conseil priv�, qu'aultres
plusieurs notables commissions particuli�res �squelles
nous l'avons emploi�, o� il se seroit comport�
tellement, que nous avons recongnu le fruict de son
labeur au bien et advancement de nostre service et �
nostre contantement; nous, pour ces causes, avons ledict
Remy cr��, ordonn�, nomm�... nostre procureur g�n�ral au
duch� de Lorraine. luy donnant pouvoir, puissance,
commission et mandement sp�cial de garder, poursuivre,
pourchasser, d�mener et deffendre toutes et une chacune
noz causes, pr�tentions, demandes, actions et d�nonces
contre tous et envers tous, tant en demandant qu'en
deffendant, et faire poursuittes de toutes amendes,
exc�s commis et d�tictz qui se feront et commettront en
nostredict duch�, � ce que pugnition et corection s'en
ensuivies sans estre d�laisses, impugn�s, et
g�n�rallement faire, dire, procurer et besongner en tout
ce qu'il congnoistra. estre requis pour la conservation
de noz droictz et aucthoritez, ainsy qu'� bon et loial
procureur appartient, et mesmement de prouvoir et faire
substitutz audict duch�, o� il verra estre de besoing,
manutention de nozdictz droictz et auchtoritez, et ainsy
que par cy-devant ses pr�d�cesseurs audict office ont
accoustum� faire � condition que, pour la taxe de la
finance dudict estat, il nous paiera la somme de deux
mil cinq cens frans... Au moyen de quoy avons permis...
audict Remy qu'il puisse disposer librement, en son
vivant, vingt jours avant son d�c�s, dudict estat de
procureur, � personne capable et ydoine, en nous paiant
la quart partie de ladicte somme de deux mil cinq cens
frans. �
Les gages du Procureur g�n�ral de Lorraine �taient de
cinq cents francs et ceux de son substitut de Nancy, de
cent francs le substitut de Lun�ville n'en recevait que
trente.
(22) De Rog�ville, Dictionnaire t. II, p. 224-226.
(23) M. Victor de Saint-Mauris, d�c�d� le 27 ao�t 1868,
membre honoraire de l'Acad�mie de Stanislas, �tudes
historiques sur l'ancienne Lorraine, T. I, p. 133. - Dom
Calmet, Histoire, T. III, col. CCXXXI-CCXII, T. V, col.
CCXLIII-CCXLVI, et p. 882-883. - M. le comte d'Haussonville,
T. I, p. 430-439. - Augt. Digot, M�moires de l'Acad�mie
de Stanislas, 1854, p, 29-138.
(24) De Rog�ville, Dictionnaire, T.II, p. 225. -
R�glement �tabli par les Etats du 4 d�cembre 1532, art.
6 : �� Il ne commettra aucuns substituts �s villes ou
l'on a accoutum� en avoir, qui ne soient gens de bien et
de bonne fame, diligens et s�avans � entendre les
affaires de notre souverain seigneur et � ses d�pens. �
(25) Dom Calmet, Histoire, T. V, col. 857-864. - Mme la
comtesse d'Armaill�, Catherine de Bourbon, soeur de
Henri IV, 1559-1604 p. 246-316.
Charles III voulait, par sa condescendance et ses
bont�s, faire oublier � sa bru la froideur de l'accueil
que la catholique Lorraine faisait � la fervente
calviniste. Les mortelles tristesses de la Fille de
France ont inspir� � une plume f�minine et
tr�s-aristocratique quelques pages pleines de charme et
de v�rit�.
(26) B. 70, f� 109, V. Lettres patentes, et B. 1292, f�
180 vo. XIe compte du Tr�sorier G�n�ral de Lorraine,
Claude de Malvoisin. - De Rog�ville, Dict., T. II p.
257.
�� ...Receue avons l'humble supplication et requeste de
nostre tr�s-cher et f�al conseiller en nostre Conseil d'Estat
et procureur g�n�ral de Lorraine, Mre Nicolas Remy,
contenant que j� par longue espace d'ann�es, il
entretient aux estudes ung sien filz, nomm� Claude Remy,
pr�sent r�sidant et receu en estat d'avocat en court de
Parlement � Paris, eu intention de le rendre idoinne et
capable pour estre emploie � nostre service nous
suppliant tres-humblement, suivant le pouvoir � !uy
donn� par noz lettres d'institution et establissement
dudit estat de procureur g�n�ral de Lorraine, d'en
prouvoir iceluy son filz. S�avoir faisons qu'aians en
bonne et favorable recommandation les agr�ables et
fidelz services dudit Nicolas Remy, p�re, mesmement nous
estans amplement inform�s des sens, suffisance,
capacit�, s�avoir et exp�rience dudit Claude Remy, filz,
nous, pour ces causes et autres bons respects nous
mouvans, notamment en faveur de nostre tr�s-ch�re et
tr�s-am�e belle-fille Madame la duchesse de Bar, qui
nous a pri� et requis, avons, d�s � pr�sent, cr��,
nomm�, estably. ledit Claude Remy, filz, en estat et
office de nostre procureur g�n�ral... Et affin de donner
audit Remy, filz, tant plus de moien et commodit� de
continuer, poursuivre ses estudes et se fa�onner � la
praticque en ladicte court de Parlement � Paris, pour le
rendre tousjours tant plus ydoine et capable � exercer
ledit estat de procureur et s'acquicter d'autres
affaires ausquelles il pourra estre employ� pour nostre
service, nous avons octroi� et permis. audit Nicolas
Remy d'exercer ledit estat et office de procureur
g�n�ral de Lorrainne et d'en con tinuer les charges et
fonctions tant et sy longuement qu'il voudra, soit en
l'absence ou en la pr�sence d'iceluy Remy, son filz, et
sans que pour ce n�antmoins il soit de besoing ny
n�cessaire que ledit Claude Remy, filz, en obtienne
cy-apr�s autres provisions ny lettres de nous plus
expresses, nonobstantes toutes ordonnances que pourrions
avoir faictes cy-devant, contraires � la teneur de
cestes, et ausquelles nous avons pour ceste fois
d�rog�... �
C'est en 1606 que Claude Remy a touch� ses gages pour la
premi�re fois d'o� l'on doit induire que c'est � cette
�poque aussi qu'il a pris possession effective de sa
charge et que son p�re y a d�finitivement renonc�.
Claude Remy a �t� remplac� comme procureur g�n�ral de
Lorraine par Claude d'Hacourt, le 16 juillet 1631.
(27) B. 1215, f� 387 v� et 413 v�. B. 1217, f� 373 v� -
B. 1244, f� 338. - B. 1257, f� 340. - B. 1261, fos 262,
265, 266. - B. 1265, f� 281 v�. - B. 1268, f� 270 v�. -
B. 1274, f� 239, 240 v�. - B. 1285, f� 238. - Comptes du
tr�sorier g�n�ral de Lorraine pour les ann�es 1588,
1589, 1596,1599,1600,1601,1602,1603,1605.
Nicolas Remy se transporta seul, pour le service de Son
Altesse, � la Mothe en 1587, � Pont-�-Mousson en 1589, �
Toul en 1596.
Des difficult�s s'�l�vent, en 1599 avec le comte de
Zollern, en 1600 avec le duc de Deux-Ponts et le comte
de Nassau, en 1602 avec la France et le pays Messin, en
1603 avec les Ma�tre-Echevin, Treize et Communaut� de
Metz, en 1605 avec le comte de Nassau et, pour les
aplanir, Nicolas Remy assiste, au nom de son ma�tre, �
des conf�rences ouvertes � Bitche, � Hornbach, � Toul, �
Nomeny, � Saint-Avolt.
Il avait pour coll�gues, tant�t le sr de Raigecourt,
gouverneur de Bitche, le lieutenant g�n�ral du comt� de
Vaud�mont et Fran�ois Lepois ; tant�t Jacques Bournon,
pr�sident de la Cour des Grands-Jours de Saint-Mihiel,
Georges Mainbourg, conseiller d'Etat, et Jean Bourgeois,
procureur g�n�ral de Lorraine et Barrois tant�t le baron
de Cr�hange, bailli d'Allemagne.
La d�pense de ces commissaires s'�levait quelquefois �
des sommes assez importantes 295 fr., 399 fr., 779 fr.,
800 fr., 2,004 fr.
(28) B. 1240, f� 298, v�. Compte du tr�sorier g�n�ral de
Lorraine. Dom Calmet, Hist. de Lorraine, T. V, col.
758-759 et Notice de la Lorraine, v�, Marsal - Art�z� de
la Sauvag�re, Recherches sur la nature et l'�tendue d'un
ancien ouvrage des Romains, appel� commun�ment
Briquetage de Marsal, avec un abr�g� de l'histoire de
cette ville, p. 33-35.
Henri Lepage, Le d�partement de la Meurthe, statistique
historique et administrative, 2� partie, p. 353; et Les
communes de la Meurthe, T. II. p. 9-10.
Mandement du 25 janvier 1594 : �� Au sieur Nicolas Remy,
Procureur G�n�ral de Lorraine, la somme de cent quarante
sept francs, neuf gros, huit deniers, pour remboursement
de semblable somme qu'il a frai� et despenc�, allant, de
l'ordonnance de Son Altesse, prendre possession de
Marsal, ses appartenances et d�pendances au nom
d'Icelle... �
Le trait� de paix de Saint-Germain-en-Laye, conclu en
1594, entre le roi de France Henri IV et le duc de
Lorraine, ne faisait qu'affermir aux mains de ce dernier
la propri�t� de Marsal que, par un contrat d'�change du
14 d�cembre 1593, le cardinal de Lorraine, �v�que de
Metz, avait c�d�e au duc Charles III, son p�re.
(29) Nisard, Histoire de la litt�rature fran�aise, liv.
III, ch. 5 � 5.
(30) J.-F. Huguenin, Les chroniques de la ville de Metz,
p. 112, 253, 259, 285, 287, 676. - Journal d'Aubrion,
Bourgeois de Metz, p. 200-204. - Histoire g�n�rale de la
ville de Metz, par des Religieux B�n�dictins de la
Congr�gation de St-Vannes, T. II, p. 651. - Journal de
Jean Bauchez, p. IX-X, 219-220.- Proc�s pour sorcellerie
et jugements rendus par les justices de Metz,
Plappeville, Antilly, Woippy, Vali�res, Vezon, Sainte-Iure,
Talange et Vic pendant les ann�es 1576, 1588, 1594,
1595, 1602 et 1622, avec les informations, d�positions
de t�moins et condamnations.- Catalogue des manuscrits
de la ville de Metz, n� 9. Dom Calmet, Hist. de Lorr.,
T. VII, col. 30-35.-Lionnois, T. II, p. 349-363.-
Richard, Traditions populaires, croyances
superstitieuses, usages et coutumes de l'ancienne
Lorraine, p. 256. - M. Viville, Statistique du
d�partement de la Moselle, T. II, p. 212-213, 320-322,
392, 420, 445-446. - Dumont, Justice criminelle, T. Il,
p. 23-61 et 69-95. - E. de Bouteiller, Les sorciers de
Plappeville. L'Austrasie, revue de Metz et de Lorraine,
T. III, p. 149-164. - Louis Spach, Lettres sur les
archives d�partementales du Bas-Rhin, p. 247-250. -
Renouard, Histoire de la m�decine, T. II, p. 117.
Si ce fut surtout au XVIIe si�cle que les pr�tendus
sorciers d�sol�rent la Lorraine, ils y avaient fait
longtemps auparavant leur premi�re apparition; d�s le
XIVe le pays messin en comptait d�j� quelques-uns.
En 1372, a une bourgeoise de Mets, nomm�e Bietris, fille
a de Symon de Halefedange, et son mari et deux aultres
femmes, furent arses entre les deux ponts, pour tant
qu'elles usoient de certains voeulx et charmes et
auttres cais deffendus par a l'esglise, et pour le
pareil cas fut prins Willamme de Chambre, a nepveu �
maistre Williamm le seelleur, lequel s'estrangla en a la
prison et fut trayn� en l'isle et li� � ung pal; et l�
fut ars a comme les aultres, tout mort quil estoit. �
Plus tard, en 1445, �� on prit � Verdun trois sorci�res
servantes de tous les ennemis de l'enfer qui par leurs
sortil�ges firent tonner, gr�ler et caus�rent des
temp�tes si furieuses que les bleds, les vignes et les
maisons de plusieurs villages furent saccag�s. La
premi�re, appel�e Jeannette, �toit boiteuse; elle avoit
d�j� �l� prise � St-Germain-les-Metz, pour un fait � peu
pr�s pareil et avoit �t� marqu�e au visage avec un fer
chaud, avec menace de la br�ler, si jamais elle
r�cidivoit. Elle fut reprise du c�t� de Verdun pour
avoir recommenc� ses mal�fices. Apr�s lui avoir refait
son proc�s, elle fut a marqu�e de nouveau au visage et
condamn�e au feu. Le nom qu'elle portoit dans les
assembt�es de sorciers �toit Lochatte, celui du diable
son ma�tre Cloubaut; l'hommage qu'elle lui rendoit
consistoit � lui baiser le derri�re. La seconde, nomm�e
Jeanne s'appeloit dans les assembl�es, Chamet; elle
avoit pour ma�tresse Marquelse et pour ma�tre Carbolette,
� qui elle baisoit le dos. La troisi�me, enfin, appel�e
Didet, femme du ma�tre �chevin de Verdun, se nommoit
dans les assembl�es Hapillat et avoit pour ma�tresse
Jacob�e et pour ma�tre Grispanier, qu'elle baisoit sur
la bouche et � qui elle offroit les rognures de ses
cheveux et de ses ongles, au lieu que les deux autres
offroient une poule. Celles-ci furent br�l�es, et la
femme du ma�tre �chevin, en consid�ration apparente de
son �tat, fut sauv�e. �
A partir de cette �poque, sous l'influence croissante de
l'ignorance et de la mis�re, les sorciers devinrent de
jour en jour plus nombreux, et l'histoire locale n'eut
plus qu'� enregistrer � chaque page, avec leurs tristes
exploits, les sanglantes repr�sailles d'une soci�t�
troubl�e par la peur.
Il ne faut pas croire, du reste, que la Lorraine
souffrait seule de ce mal �trange; l'Europe enti�re
semblait, comme elle, frapp�e de vertige les pays
protestants eux-m�mes n'�chappaient pas � la contagion,
et on ne doit pas s'en �tonner, quand on songe que
Luther partageait, � l'�gard des sorciers, les pr�jug�s
du vulgaire et racontait ses luttes incessantes avec le
diable qui, sous la figure d'un moine, venait argumenter
avec lui.
(31) Recueil de documents sur l'histoire de Lorraine,
868. Extrait des coupures de Bournon, p. 35. - Aug.
Digot, Hist. de Lorr., T. V, p. 115-116.
Les pr�d�cesseurs de Charles III s'�taient montr�s moins
s�v�res que lui. Le duc Raoul se contentait de d�cr�ter
�� que celui qui feroit magie, sortil�ges, billets de
sort. seroit honni et payeroit 10 livres tournois � et
le duc Antoine ordonnait, � son tour, en 1529, �� que
l'on ne proc�d�t pas l�g�rement � sa prise, si doncques
ne fust qu'il y eust partie formelle. �
(32) Sprengel, Histoire de la m�decine, T. III, p. 232.
- Michetet, la Sorci�re, 4� �dit., p. 198. - P. de
Lancre, L'incredulit� et mescr�ance dv Sortil�ge
plainement convaincve, ov il est amplement traict� de la
v�rit� ou illusion du Sortil�ge, de la Fascination, de
l'Attouchement, du Scopelisme, de la Diuination, de la
Ligature ou Liaison Magique, des Apparitions ; et d'une
infinit� d'autres rares et nouveaux subjects, p.584.
Huit o� neuf cents ! ce chiffre est �norme, sans doute;
mais il le fut bien davantage ailleurs. Dans le seul
�lectorat de Tr�ves, il s'�leva � six mille cinq cents
en quelques ann�es ! A Toulouse, quatre cents
d�monol�tres mont�rent au b�cher en un jour sous le
r�gne de Fran�ois Ier, cent mille furent, en France,
d�f�r�s � la justice
(33) NtGOLAI REMIGII Sereniss. Dvcis Lotharingiae a
concitiia interioribvs, et in eivs ditione Lotharingic�
cognitoris publici DENONOLATRAE LIBRI TRES. - Ex
Iudiciis capitalibus nongentorum plus minus hominum, qui
sortilegii crimen intra annos quindecim in Lotharingi�
capite luerunt. - Ad illustrissimum Principem,
amplissimumque Cardinalem Carolum a Lotharingi� -
Lvgdvni. in officin� Vincetii, M.D.XCV. - In-4� prelim.
12 ff. y compris le titre texte, 394 p.
La D�monol�trie a �t�, l'ann�e suivante, imprim�e �
Cologne et � Francfort : Colonioe Agrippinae apud
Henricum Falkenburg, anno 1596. pet. in-8�. -
Francofvrti in officin� Palthenii. M.D.XCVI. pet. in-12.
L'�diteur de Francfort a ajout� au titre primitif :
Miris ac iucundis narrationibus, variarum naturalium
qusestionum ac mysteriorum Daemonicorum discussionibus,
valde suaues et grati, adque sales mouendos inprimis
apti. �
Mes renvois se r�f�rent tous � l'�dition fran�aise, de
beaucoup la plus belle et la meilleure.
�� (34) Demonolatria, ad lectorem, in fine.
�� Quamquam hic mihi bene conscius sum, nihil certandi
scripsisse studio, nihil quo ex argumenti novitate
admirationem moverem, gratiam captarem; sed tant�m in
eum veritatis scopum, quo muiti alii, quorum tamen minus
instructa esset jaculis pharetra, quam nostra nunc est,
collimasse (sic) atque oculorum aciem direxisse. �
(35) Id., epistola dedicatoria, in medio.
�� Sed c�m hoc ne sic quidem validum ad persuasionem
videretur (quis enim, eo orationis genere, ipsam etiam
veritatem mendacii suspectam non habeat ?) adhibui quae
ad eam assearendam momenti atque authoritatis plurimum
apud homines habere solent, rerum, personarum, locorum,
atque temporum, quae intercessissent, peculiarem, certam
ac luculentam desiagnationem. �
(36) Id., ibid. et lib. III, cap. 1 et 12, p. 305 et
580.
�� Verum c�m ea sive deliratio, sive impietas habeat
conjunctam atque implicatam societatem veneficii
alior�mque scelerum quae se facil� produnt, mirum est
quod aliquando ex fumo ignem non deprehenderint. �
Nicolas Remy d�clare ailleurs, � deux reprises
diff�rentes et � peu pr�s dans les m�mes termes, que
vouloir expliquer les sortil�ges et les mal�fices, par
des causes naturelles, c'est vouloir mesurer ou toucher
le ciel en �tendant la main.
�� Quae omnia si quis velit ad certum naturae modum atque
ordinem referre, nihilo plus agat quam si caelum, pass�
a manu, demetiri tentet. �
�� Ut qui velit ea ex causis naturalibus aestimare,
nihilo plus agat, quam si conetur digito ipsum coelum
attingere. �
(37) Id., epistol. d�dic.
�� Cert� mihi cui � t�t annis contigil de iis qua; in
Lotharingia capitaliter admissa sunt judicia exercere,
jam nihil reliqui esse putavi, quin pleraque omnia, quae
de istiusmodi maleficiis vel ad prodigium narrantur vera
ducerem, an praeterea qualia ipse ex quaestionum quae de
iis habitae in manus meas pervenere inspectione comperi,
m�moriae ac litteria proderem. �
(38) Doempl. ad lectorem, in fine.
�� Fit enim ut, quae quis praesens vel vidit, vel audivit,
ea orationis majore narret fiduci�, praefacriusque,
adversus eos qui contr� sentiunt, defendat.�
(39) Id., lib. I, cap. 7 et 23.
(40) Id., lib. I.cap.
(41) Id., lib. I, cap. 18.
(42) Id., lib. I, cap. 5, p. 47 et 48. - J.-J. Lionnois,
T. II, p. 355-353. - Dumont, Just. crim., T. II, p.
34-35.
En indiquant que quelquefois le D�mon choisit pour
d�poser son empreinte l'endroit du corps o� s'est faite
l'onction du Bapt�me, Nicolas Remy le compare au voleur
de brebis qui, apr�s avoir effac� la marque du
propri�taire, y substitue la sienne.
�� His adeo barbarae atque inhumanae servitutis veluti
tesseris inustos ac insignitos etiamnum hodie habet
Diabolus quos recens sibi addixit praecipueque, aiunt
non nulli, e� in parte corporis quae, � sacrorum
Antistite in die cujusque initiali chrismate fuit
delibuta, uti fures abacti pecoris signa suis impressis
immutare solent. �
Et cette marque du d�mon n'�tait pas seulement
insensible, une aiguille profond�ment enfonc�e dans la
chair n'en faisait pas sortir la plus petite goutte de
sang. �� Et quod magis mirum a videri possit, totus ille
locus ita exsanguis est ac sensu labefactatus, ut ne
admissa quidem acus altissim� aut dolorem faciat, aut
sanguinis minimum eliciat. �
Aussi les magistrats commen�aient-its presque toujours
par faire rechercher sur toutes les parties du corps,
m�me les plus secr�tes, cet endroit priv� de sensibilit�
et de sang, sans prendre le moindre souci de la pudeur
de l'accus� ou de l'accus�e, et en appelant � leur aide
ou le bourreau ou la personne vile du lieu. �� Idque ita
jam pro comperto habent rerum capitalium vindices, ut
inde quaestionis ac tormentorum saepe initium faciant.
(43) Doemonol. lib. l, cap. 6.
(44) Id., lib. cap. 20, p. 144.
�� Sed praetera, dictu indignum ! ab invitis ingerenda
esse oscula Daemonis podici, postquam is sese immutavit
in hircum horridum ac mutt� gravius olentem quam haedi
solent ineunte brum�, multi memorant. �
(45) Id., Iib. i, cap. 15.
(46) Id., ibid.et cap.17.
(47) Id., lib. III, cap. 12, p. 386. - Pierre de Lancre,
Tableav de l'inconstance des mauvais des Anges et
D�mons, ou il est amplement traict� des Sorciers et de
la Sorcellerie. Livre tr�s vtile et n�cessaire non
seulement aux luges, mais � tous ceux qui viuent sous
les loix Chrestiennes - Avc un discours contenant la
proc�dure faicte par les Inquisitions d'Espagne et de
Navarre � 53 magiciens, Apostats, luifs et Sorciers en
la ville de Logrogne en Castille, le 9 novembre 1610. En
la quelle on voit combien l'exercice de la lustice
enFrance est plus iuridiquement traict�, et auec de plus
belles formes qu'en tous autres Empires, Royaumes,
R�publiques et Estats. Liv. Ier, Disc. 3, chap. 2, p.
54. - J. Bodin, La D�monomanie des Sorciers. - Le
docteur F�lix Marchal, tableau historique, chronologique
et m�dical des maladies end�miques, �pid�miques et
contagieuses qui ont r�gn� � Metz et dans le pays
messin, depuis les temps les plus, recul�s jusqu'� nos
jours, p. 216.
�� Sed mares, lic�t id infrequentia quidem, aequ� sibi in
hoc obsequii genere devotos, addictosque habet Daemon. �
Tout en reconnaissant avec Nicolas Remy que les hommes,
eux aussi, devenaient les disciples du diable, les
autres d�monologues constatent que le fait �tait
tr�s-rare; Jean Bodin va m�me jusqu'� pr�tendre, dans sa
r�futation du livre de Wyer, qu'il y avait cinquante
sorci�res pour un sorcier, et quand Pierre de Lancre
cherche � expliquer cette singularit�, il ne trouve rien
de mieux que ceci
�� Bodin dict tr�s bien que ce n'est pas pour la
foiblesse et fragilit� du sexe, puisqu'on voit quelles
souffrent la torture plus constamment que les hommes...
ce seroit plus t�st la force de la cupidit� bestiale qui
pousse et r�duit la femme � des extr�mitez es quelles
elle se iette volontiers pour io�ir de ses app�tits,
pour se venger, ou pour autres nouueautez et curiositez
qui se voyent es dictes assembl�es. �
Dans sa savante et fid�le nosographie messine, M. le
docteur Mar�chal exprime � peu pr�s la m�me opinion,
mais en un langage dont la science att�nue la crudit�.
�� Nous ferons remarquer sans y insister pour le moment,
combien le nombre des femmes condamn�es comme sorci�res
est infiniment plus consid�rable que le nombre des
hommes accus�s du m�me fait; cette disproportion n'a
rien d'�tonnant quand on songe � la fr�quence des
hallucinations chez les femmes et � l'impressionnabilit�
physique et morale dont les hyst�riques et les chloro-an�miques
sont dou�es. �
(48) Daemonol. lib. III cap. 6.
(49) Dumont, T. Il, p. 53-54. - Dom Calmet, Hist. de
Lorr., T. VII, col. 32.
Magistellus, ce mot, diminutif de magister, se retrouve
sans cesse sous la plume de Nicolas Remy. - Le Diable
avait en Lorraine diff�rents noms Persin, Persil, Napnel,
Joli-bois, Saute-Buisson, Verdelet, Bonnot.
(50) Daemonol. lib. I cap. 13 et lib. III, cap. 6.
(51) Id., lib. I, cap. 4, p. 46. �� Nihit eorum quae
promittunt ex se tradere possunt daernones ; sed visu
tantum quaedam inania suis cultoribus afferunt, varia
prorsus et instabilia... testas ac carbones... arborum
folia... calculum ferrugineum, qui etiam contractu primo
facil� in frusta dissiliret. �
(52) Id., lib. I, cap. 6.
(53) Id., lib. II, cap. 7, 12, 13, 14, 15.
(54) Id., lib. I, cap. 2, p. 36-37.
�� Minutum pulverem, primo quoque congressu, administrat
diabolus, qui morbi necisve certissimam, cui ita
constituerit, causam praebeat.eum qui necat atri, qui
morbum tantum facit cinertiti, aliquando etiam ruffi
esse coloris;... tertium accipiunt albi coloris, cujus
vel aspersione, vel in esculentum poculent�mve
immissione, morbus proputsetur. �
(55) Id., lib. I, cap. 3 et 14, p. 120 lib. II, cap. 3.
(56) Id., lib. I, cap. 25.
(57) !d., lib. I, cap. 14, p. 120. �� Sed, ut ad
intermissum de nocturnis illis conventibus sermonem
redeam, juvat, quo magis eorum veritatem adjuvem, modum
quoque et viam, qu� ad illos properatur, exponere. Ac
prim�m vulgatissima ea ab omnibus perhibetur, quae per
camini vaporarium esse consuevit. �
(58) ld., lib. I, cap. I, p. 121; cap. 17, p. 134-135 et
cap. 18.
�� Quibus omnibus et hoc obiter non erit absurdum
adjicere, quod de die, quo sic un� conveniunt, ab illis
vulgo dicitur... Omnes quorum quaestiones capitales
hactenus in Lotharingi� expendere licuit, non aliis
noctibus, qu�m quae proxim� praecedunt diem vel Jovis,
vel Dominicum, ejusmodi conventus agitari autumant.
�� Porro circulares esse omnes choros, qui sic agitanlur,
atque ab aversis saltatoribus, uti una Gratiarum in
choro depingitur, tripudiari affirmant sagae... Addit
Sybilla Morelia gyrum semper in loevam progredi. Dubium
quae tam praeposteri ordinis causa atque occasio, nisi
si forte ea est, ne se recta atque ex adverso intuentes
tam facil� agnoscant. Nam non leve periculum esse putant
in judicio, quod qui ejus sceleris fiunt manifesta de
conseils saep� apud quaestorem vi tormentorum
profitentur. Ob idque et saep� personati, ut alibi
dictum a est, conveniunt. �
(59) Doemonol. lib. i, cap. 16, p. 127-128.
�� Ac prim�m in confesse est omnibus, quos sic daemon sua
dignatur mens�, adeo omnes ejus epulas sordere, sive
earum apparatus oculis, sive odor naribus percipiatur,
ut vel famelico ac latranti stomacho facil� nauseam
parere possint... Cibos illic, aiunt, apponi omnium
generum, sed adeo viles, illiberales, ac mal� conditos,
ut vix sint vescendo. Nicolaus Morelius ita tristem,
austricum atque atque amarum esse illis gustum, ut
sumptos confessim, prae molestia, sibi necesse
fueritexpuere. Vinumpraetera, instar atri atque
insynceri sanguinis, in sordido aliquo simpulo
epulonibus solitum propinari. �
D'autres moins difficiles ou moins sinc�res que Nicolas
Morel pr�tendent qu'� ce banquet du diable, rien ne
manquait que le pain et le sel : �� Nullarum fer� rerum
copiam illic deesse praeterquam salis et panis. �
(60) Doemonol. lib. t, cap. 19, p. 141.
�� Ergo miris modis illic miscentur ac turbantur omnia,
nec ull� oratione salis ;exprimi queat, qu�m strepant
sonis inconditis, absurdis ac discrepantibus. Canit hic
ad tibiam, vel veri�s ad contum aut baculum aliquod,
quod fort� humi repertum buccae, ceu tibiam admovet...
Ille pro lyra equi calvariam pulsat ac digitis concrepat...
Alius fuste vel clava graviore quercum tundit; unde
exauditur sonus ac boatus veluti tympanorum vehementius
pulsatorum. �
(61) ld., lib. I, cap. 14, p. 110.- Histoire de Metz t.
III, p. 165.
�� Res est controversa et plena dissensionis, inter eos
qui haec sagarum tractant portenta; eae ne rever� ad
illos quos sic jactant daernonum conventus avolent ac
pr�sentes iis adsint.. Nam et certis authoribus
compertum habemus extitisse, quae, c�m domi, im� in
eodem c�m marito cubili, manifest� pernoctassent,
recenserent tamen postero man�, ac confidenter dicerent
multa ad ejusmodi conventus pertinentia, quibus se
superiore nocte interfuisse affirmarent. �
Aux auteurs dont il parle ici, Nicolas Remy aurait pu,
cinquante ans plus tard, ajouter le c�l�bre Gassendi,
dont le t�moignage se fortifie de la confiance qu'il a
inspir�e, m�me en cette mati�re d�licate, aux savants
B�n�dictins. �� Ce philosophe, chanoine et pr�v�t de la
cath�drale de Digne, rapporte qu'un jour �tant all� dans
une terre de sa pr�v�t�, il vit, en y arrivant, les
paysans attroup�s autour du berger du lieu. Il en
demanda le sujet. On lui r�pondit que ce berger �tait
sorcier. Notre savant charm� de s'instruire par lui-m�me
du fait de la sorcellerie, demande qu'on lui confie le
berger. Il le m�ne en sa maison, l'interroge et le
berger confesse qu'il est r�ellement sorcier, qu'il ira
au sabbat la nuit prochaine; que M. Gassendi
l'accompagnera, s'il le veut. Le philosophe accepte la
proposition et dit � cet homme de l'avertir de l'heure
du d�part. Lorsqu'elle fut venue, le berger tira de sa
poche un pot de graisse, dont il avala une certaine
quantit� et dit � M. Gassendi de faire de m�me. Celui-ci
feignit de ne pouvoir prendre cette graisse qu'il ne
l'e�t mise dans du pain � chanter; prit le pot, entra
dans son cabinet, substitua de la confiture � la graisse
et vint se mettre au coin du feu pr�s du berger qui se
coucha par terre. Il ne tarda pas � s'endormir, et d�s
que la graisse commen�a � se dig�rer, il entra dans une
agitation extraordinaire, qui dura jusqu'au lendemain
matin qu'il s'�veilla et dit � M. Gassendi : Oh ! oh !
monsieur, on vous a fait bien de l'honneur; vous avez
bais� le cul du grand bouc, etc. Ce pauvre malheureux
croyoit avoir �t� au a sabbat, et n'avoit pas chang� de
place. �
(62) Doemonol. lib. II, cap. 5, p. 237.
(63) Id., lib. i, cap, 6.
(64) Dumont, Justice criminelle, T. I, p. 78-90 et T.
II, p. 34. - Doemonol. lib, m, cap. 8, p. 351 et 355.
M. Dumont a, en termes souvent indign�s, d�crit avec une
saisissante exactitude toutes les phases de cette
proc�dure impuissante et barbare dont Nicolas Remy
appelle les moyens de preuve, c'est-�-dire les
instruments de supplice, exquisitae Judicis artes, comme
il appelait la mis�re de la prison, le commencement du
salut, carceris miseria salutis initium.
(65) M�moires du marqui de Beavau pour servir �
l'histoire de Charles IV, p. 10-11 - Calmet, Histoire de
Lorr., T. VI, col. 41-42, note. - J.-J. Lionnois, T. Il,
p. 344-349 et 373-376.- Chevrier, Hist. de Lorr., T. IX,
p. 75-76.- Henri Lepage, Andr�. des Bordes ; Episode de
l'histoire des sorciers en Lorraine. Bulletins de la
Soci�t� d'Arch�ologie Lorraine, T. VII, p. 5-55. - M. le
comte d'Haussonville, T. p. 155-158. - Dumont, T. II, p.
198-200. - Aug. Digot,T.V,p. 120.
L'accusation de sorcellerie �tait une arme des plus
redoutables dans la main d'un adversaire ou d'un ennemi.
Il suffisait qu'un sorcier ou, une sorci�re, aux prises
avec le tourmenteur, signal�t l'homme. le plus innocent
et le plus inoffensif du monde comme l'ayant vu au
sabbat, pour que cet homme dev�nt bient�t lui-m�me un
accuse. Les situations les plus �lev�es ne mettaient pas
� l'abri d'une poursuite et en devenaient quelquefois
l'occasion. Sans remonter jusqu'� Jeanne d'Arc, ce pieux
et touchant symbole du d�vouement, de l'abn�gation et du
patriotisme, notre histoire locale a conserv� le
souvenir de deux noms qui mettent en vive lumi�re cette
triste v�rit�. Andr� Desbordes, seigneur de Gihaumeix et
Melchior de la Vall�e, chantre de la coll�giale
Saint-Georges, avaient �t� les familiers et les conseils
du duc,Henri; � la mort de ce, prince, son neveu, depuis
Charles IV, ne leur pardonna point de s'�tre, autant
qu'ils le pouvaient, oppos�s � son mariage avec la
princesse Nicole, en recommandant de pr�f�rence le baron
d'Ancerville, b�tard d'un Guise. Pour se venger d'un
fait qu'il aurait eu grand peine � �lever � la hauteur
d'un crime, il leur imputa des sortil�ges et six
commissaires, plus faciles � convaincre que des juges,
accept�rent cette imputation comme une r�alit�.
Le marquis de Beauvau raconte ainsi ce qu'il savait de
ce curieux proc�s
�� Dans le commencement du r�gne, un nomm� Desbordes,
valet de chambre, et fort affectionn� au feu duc Henri,
avec un autre homme dit le chantre l'un de ses
aum�niers, et qui avait eu aussi grande part en ses
bonnes gr�ces, furent poursuivis criminellement, �tant
tous deux soup�onn�s de sortil�ges. Le sieur Sarazin,
�chevin en la justice de Nancy, assez cr�dule et
rigoureux, � ce que l'on dit, sur cette mati�re, leur
fut donn� pour commissaire, et les ayant jug�s
suffisamment convaincus de ce crime, il les condamna �
�tre a br�l�s; ce qui fut ex�cute. Pour le premier, j'ai
oui dire qu'il avoit fait souvent certains tours de
souplesse de corps, qui paraissoient extraordinaires, et
m�me surnaturels, et qu'il avoit confess� son crime sur
le point d'�tre ex�cut�; mais pour le chantre il mourut
constamment, sans le vouloir jamais avo�er, protestant
toujours qu'il n'en �toit point coupable. Il confessa
seulement qu'il ne laissoit pas de m�riter justement la
mort, pour divers sacril�ges qu'il avoit commis, comme
d'avoir d�jeun� quelquefois avant de dire la messe, et
d'�tre tomb� dans d'autres irr�gularit�s. Cependant,
comme c'�toit lui qui avuit baptis� la duchesse Nicole,
ce fut une des causes qu'on all�gua depuis, pour la
pr�tendue dissolution de son mariage d'avec le duc son
mari, sur ce qu'ayant �t� baptis�e par un sorcier, il n'avoit
pu conf�rer ce sacrement. Que le duc pr�supposoit avoir
�pous� une chr�tienne et qu'elle ne pouvoit l'�tre faute
du bapt�me. Qu'ainsi ayant �t� abus�, le mariage par
cons�quent �tait nul. �
Dom Calmet est venu � son tour compl�ter, en ce qui
touche Andr� Desbordes, le r�cit de l'historien de
Charles IV :
�� On raconte de lui une infinit� de faits fort
extraordinaires; par exemple qu'il ordonnoit aux
personnages d'une tapisserie de se d�tacher et de venir
faire la r�v�rence � la compagnie; qu'il commanda un
jour � trois pendus de descendre et de venir faire la
r�v�rence au duc Henri et qu'ils ob�irent; qu'il avoit
une bo�te � plusieurs cellules, qu'il dressoit une table
qui se couvroit de toutes sortes de mets, � mesure qu'il
ouvroit les petites chambres de sa boite qu'il se
mettoit � cheval sur un tonneau et s'en servoit comme
d'une monture. Un de ses t�moins l'accusa de l'avoir
rencontr� hors de la porte Notre-Dame qu'on venoit de
fermer sur le soir et que lui ayant dit qu'il voudroit
qu'on lui donn�t du pied au c... et qu'il f�t dans son
lit; qu'il re�ut de lui ce coup et qu'effectivement ce
m�me soir il s'�toit trouv� dans son lit. �
C'est sur la foi d'all�gations aussi absurdes qu'on
condamnait au dernier supplice m�me les gentilshommes,
quand la vengeance, la jalousie ou l'int�r�t leur
suscitaient des d�nonciateurs.
La sentence de mort pronon�ait toujours la confiscation
des biens du condamn�; et, avec sa malveillance et sa
l�g�ret� ordinaire, Chevrier suspecte l'impartialit� du
prince ou du seigneur haut justicier que cette
confiscation enrichissait, et qu'il accuse,
non-seulement de provoquer les poursuites, mais encore
d'acheter des t�moins. Ai-je besoin de dire que pas un
mot de ce que j'ai lu, soit dans la D�monol�trie, soit
ailleurs, n'autorise cette grave et audacieuse
supposition !
En semblable mati�re, tout �tait, d'ailleurs, incroyable
et je n'en voudrais d'autres preuves que les
condamnations prononc�es, avec toutes les formalit�s
judiciaires, contre des animaux. Presque tous ces
animaux avaient d�vor� des enfants, mais il est bien
probable qu'on reprochait de plus � quelques-uns leur
complicit� ou leur connivence avec des sorciers.
(66) Doemonol. lib. n, cap. 2. p. 200-201.
�� Extiterunt et alii plures nostr� memori� sic ab
ineunte aetate in malam rem a parentibus abducti, quos,
quoniam doli jam capaces videbantur, censuimus nos
Duumviri damnandos, ut nudi ter virgis coederentur
circum eum locum, ubi vivi parentes comburerentur. Quod
et ab eo tempore fer� sic est usurpatum. Sed ne hac
quidem ratione nunquam putavi plen� legibus esse satis
factum. �
(67) Id., ibid., p. 201-208.
(68) L'abb� Bexon, Histoire de Lorraine, T. I, p.
261-267.
(69) M. de Saint-Mauris, Etudes histor., T. Il, p.
46-47. Cet auteur appelle Nicolas Remy un boucher.
(70) Error communis facit jus. Argum. legis 3, ff. de
officioPrsetorum.
(71) Dumont, Justice criminelle, T. II, p. 61-68.
En se pla�ant le premier � un point de vue raisonnable
et vrai, pour juger Nicolas Remy, M. Dumont a commenc�
une oeuvre de justice, que je voudrais, sinon finir, du
moins continuer.
(72) Le comte de R�sie, Histoire des sciences occultes,
T. II, p. 352 et suiv., 365 et suiv. - Joseph Bizouard,
Des rapports de l'homme avec le D�mon, T. IV, liv. 23,
cbap. 4, p. 517-525. - Richard, Traditions populaires. -
Pommerel, Les sorcelleries Lorraines. - Revue spirite,
Journal d'�tudes psychologiques.
Notre si�cle, trop content de tui-m�me, a-t-il bien le
droit de s'�tonner d'une cr�dulit� si facile et si
grande, quand hier encore, malgr� ses lumi�res, il
interrogeait les tables tournantes et se pr�occupait des
esprits frappeurs ! quand, aujourd'hui m�me, le
spiritisme a, dans la presse, un organe mensuel l Il
n'est pas vrai de dire que les croyances superstitieuses
du moyen �ge ont compl�tement disparu; on les retrouve,
partout et sans cesse, � l'�tat de traditions
populaires, en Bourgogne, en Franche-Comt�, en Auvergne,
en Champagne, en Normandie, en Bretagne, dans le M�doc,
l'Agenois, le Morvan, la Bresse, le Rouergue, le Quercy,
le Maine, le Perche, le Poitou, le Berry, tout le Midi
et les d�partements qui avoisinent les Alpes.
On y montre le lieu o� se tenaient les assembl�es du
Sabbat, pr�s d'une fontaine, ou d'une mare, sous un
arbre s�culaire, dans une vall�e profonde, ou sur un
mont escarp�. On s'y adresse avec confiance aux
gu�risseurs et aux devins. On y signale avec effroi
certains individus aux allures suspectes, � la mine
sinistre, comme jetant des sorts aux animaux et aux
hommes. Les apparitions, les fant�mes, s'y m�lent aux
r�cita des longues veill�es d'hiver. Les loups-garous y
effraient le soir les enfants, les femmes, les voyageurs
attard�s...
Notre Lorraine, si positive et chez laquelle la
sorcellerie a caus� cependant tant de ravages et fait
tant de victimes, ne devait pas �tre moins longtemps
accessible que les autres provinces de France � toutes
ces mis�res, � toutes ces faiblesses de l'esprit et
chacun de nous peut, sans peine, en retrouver autour de
lui les derni�res traces mat effac�es.
(73) Le docteur F�lix Mar�chal, Tableau historique... des
maladies end�miques... p. 209.
A c�t� de ces dupes, de ces malades, de ces hallucin�s,
de ces fous, qui composaient le gros de l'arm�e des
pr�tendus sorciers et qu'il fallait �clairer, absoudre
ou gu�rir, il y avait, en bien plus petit nombre, des
fourbes, audacieux et habiles, qui, � l'aide de
pratiques myst�rieuses et coupables, cherchaient �
satisfaire leurs passions ou � servir leurs int�r�ts ou
leur haine; � ces derniers seulement la justice aurait
d�, comme aujourd'hui, r�server ses rigueurs.
(74) Tableav de l'hiconstance des mavvais Anges...
Pierre de Lancre entrevoyait cette v�rit�, lorsque, dans
sa d�dicace � M. de Sillery, chancelier de France, il
disait �� C'est � vous droictement � ietter l'oeil
partout et reiettant le soing sur les bons pr�lats de ce
royaume (les quels se trouueront, peut-estre, plus
heureux que les luges) les exhorter de veiller sur leur
Bergerie, la multiplicit� des condamn�z � mort iusques
icy ayant faict voir � tout le monde que le sortil�ge
est vn crime ou maladie parfois autant ou plus digne de
commis�ration que de chastiment. �
Je constate � regret que Nicolas Remy ne partageait pas
ce sentiment et ne tenait pas non plus ce langage au
cardinal de Lorraine.
(75) De Lancre, L'incr�dulit� et mescr�ance.... p. 36-37.
- Dom Calmet, Hist. de Lorr. T. VII, col. 31-32-35. -
Joseph Bizouard, T. M, p. 3-5 et T. III, p. 447-435.
Les magistrats charg�s de la r�pression en mati�re de
sorcellerie �taient d�j� de leur temps l'objet de vives
attaques; on les accusait surtout de poursuivre une
chim�re et il semble qu'ils n'aient voulu laisser �
personne le soin de les d�fendre quand on voit l'un
d'eux s'exprimer ainsi
�� En chasque village trouuer vne Royne du sabbat que
Sathan tenoit en d�lices comme une espouse priuil�gi�e
confesser les mesmes caresses, dire les mesmes choses
tout � vn coup, et tout en mesme temps quelles auoient
veu en public et en priu� : et tous les sorciers
d'Allemagne, d'Italie, d'Espagne, d'Angleterre, et de
toutes les autres contr�es de France, et en fin de tout
l'Europe dire mesme chose. Est-il possible que si c'estoit
resuerie, illusion ou songe, que mesmes songes
roulassent dans la ceruelle de gens composez de si
diuerses humeurs? Les vns m�lancholiques, les autres
ioyeux; les vns collerez, les autres paisibles, les vns
vieux, les autres jeunes, les autres de bon aage. Et tel
qui estoit fils de sorcier, dire la mesme chose et les
mesmes circonstances du sabbat que son p�re, ayeul ou
ayeule sorciers auoient dict et d�pos� en justice cent
ans auparauant.
�� Ce n'est pas tout en mesme temps, en l'ann�e 1609, que
nous vacquions par commission souueraine qu'il avoit
pieu � sa Majest� donner � monsieur le Pr�sident d'Espaignet
et � moy, on vaquoit aussi en Espagne et Nauarre � mesme
inquisition et recherche, i'en ay les proc�dures en
espagnol; si bien qu'il s'y trouue que ce sont mesmes
accusations, mesmes circonstances, et mesmes
d�positions. Toutes les sorci�res, soient Fran�aises,
Espagnolles, ou Nauarroises, comme s'exer�ant � mesmes
abominations, se trouuoient attainctes de mesmes crimes
et affligeoient le monde de pareilles maladies.
�� Et, apr�s tout, la France, l'Italie, l'Allemagne,
l'Espagne, l'Angleterre, Flandres et les Pays-Bas, bref
toute l'Europe estant touch�e de ceste maladie, est-il
possible que tous les peuples resuent, et s'ils resuent
se peut-il faire que tant de gens si esloign�s et si
dissemblables ayent mesmes resueries et mesmes
grotesques, facent mesmes songes, estans si diuers
d'humeur ? ayent le Diable en apparition en mesme forme,
ayent pareilles visions, pareilles c�r�monies, maux
semblables ? Et ne se trouuans aux sabbats encourroient-ils
mesmes deffauts et le tout se passeroit-il ainsi auec
mesmes circonstances et mesmes folies ? �
A la fin du si�cle dernier, Dom Calmet a apport� � la
d�fense de notre ancienne magistrature la bienveillance
et la mod�ration de son caract�re.
�� Plusieurs lecteurs traiteront tout ceci de r�veries et
je ne doute pas qu'il n'y ait en effet beaucoup
d'imagination dans ce qu'on raconte des sorciers. Mais
comment se persuader qu'une infinit� de proc�dures
faites avec tant de soin et de maturit�, par de
tr�s-graves magistrats, et par des juges tr�s �clair�s,
soient toutes fausses ? Que des effets aussi r�els que
ceux que raconte, par exemple, M. Remy, homme grave et
savant, et dont il a rempli les trois livres de sa
D�monol�trie, ayant exerc� pendant plus de quinze ans
l'office de juge et de procureur g�n�ral de Lorraine;
que tout ce qui a �t� �crit sur ce sujet par Binsfeld,
suffragant de Tr�ves, homme tr�s-sage et tr�s-capable ;
que tous les proc�s de sorciers et de sorci�res dont les
greffes et les archives de la province sont remplis, ne
contiennent que des illusions et des fausset�s ? Si l'on
nous citoit des choses �loign�es, arriv�es dans un autre
pays et dans un si�cle d'ignorance et recul�, je m'en
d�fierois beaucoup davantage; mais les auteurs dont j'ai
parl�, vivoient dans le si�cle m�me o� ces choses se
passoient. Ils les entendoient et en �toient tr�s-bien
inform�s. Ils ont �crit dans le temps le plus �clair� et
le plus f�cond en hommes habiles qu'ait eus la
Lorraine...
�� On dira, si l'on veut, que tout cela n'est qu'une
maladie de ce temps-l�, ou une esp�ce de convulsion,
semblable � peu pr�s � celle qu'on a vue ci-devant dans
les sauteurs ou les danseurs qui parurent dans le
dioc�se de Tr�ves et aux environs, dans le XIVe si�cle,
ou dans les Flagellants du XIIIe; qu'ainsi sur la fin du
XVIe si�cle aura r�gn� la maladie des sorciers et des
sorcelleries. On en croira ce qu'on voudra ; il me
suffira d'avoir ici rapport� historiquement ce que c'�toient
que ces gens qui parurent en ce temps-l� dans le dioc�se
de Tr�ves et dans la Lorraine. Il est certain qu'alors
on ne doutoit nullement dans le pays de la r�alit� et de
l'existence des sorciers, puisqu'on les rechercboit et
qu'on les punissoit publiquement des plus rigoureux
supplices; et l'on ne peut nier que les princes, les
�v�ques et les juges n'aient tenu, en les poursuivant
par les plus s�v�res ch�timents, une conduile tr�s-sage
et tr�s-louable, puisqu'il �toit question d'arr�ter le
cours d'une impi�t� tr�s-dangereuse et d'un culte
sacril�ge, ridicule, abominable, rendu au d�mon, qui
s�duisoit et perdoit une infinit� de personnes et
causoit dans l'�tat mille d�sordres tr�s-r�els. �
Enfin, de nos jours, Nicolas Remy et ses nombreux
coll�gues ont trouv�, dans un membre du barreau de
Paris, M. Bizouard, un d�fenseur encore plus �loquent et
plus convaincu.
�� Que la sorcellerie, � dater surtout du XVe si�cle, f�t
une maladie singuli�re, ou les uns se croyoient les
meurtriers et d'autres les victimes, il est constant
qu'une telle maladie a s�vi, comme autrefois la peste ou
la l�pre, comme aujourd'hui le chol�ra. Qu'il existe ou
non des esprits qui aient donn� � certains hommes le
pouvoir de causer tant de maux, le fl�au n'en a pas
moins s�vi cruellement sur nos p�res. Pour peu que nous
r�fl�chissions, au lieu d'accuser les magistrats de
cette �poque de cr�dulit� et de cruaut�, nous
essayerions de d�couvrir la nature et les causes de ce
fl�au, et si malheureusement il survenait de nouveau
parmi nous avec quelques changements dans sa
manifestation, n'�tant point pris au d�pourvu, peut-�tre
alors nous serait-il donn� d'en att�nuer les effets
d�sastreux, s'il ne doit jamais repara�tre, soyons
justes, du moins r�serv�s, envers ces magistrats appel�s
� statuer sur des faits si peu connus de nous. En tout
cas, que ce f�t une folie sui generis dans les accus�s
qui avouaient, dans leurs accusateurs, dans les t�moins
qui d�posaient, et une erreur invincible dans les
magistrats qui condamnaient, f�licitons-nous de n'�tre
pas contemporains d'un pareil malheur ! Mais n'accusons
pas trop l�g�rement nos Anc�tres; sachons que
g�n�ralement des juges consciencieux et int�gres
n'�pargnaient ni temps, ni �tude pour examiner ces
proc�s extraordinaires : les populations atterr�es
demandaient que justice f�t faite, tous les crimes
�taient pour elles �vidents et horribles. Si nous avions
� examiner les m�mes faits, si nous avions, comme les
magistrats de ce temps, le spectacle d'un mal�fici�
atteint subitement d'un mal �trange apr�s quelques
gestes, quelques paroles ou un simple attouchement, que
dirions-nous ? si des m�decins nous d�ctaraient que
cette maladie ne trouve d'analogue dans aucun trait� de
pathologie, si des t�moins non suspects d�posaient
contre les accus�s, si ceux-ci faisaient des aveux, si
nous avions enfin, comme ces magistrats, le spectacle
plus affreux encore d'un adulte ou d'un enfant
manifestant ce qu'on appelait les signes �vidents de
possession si peu connus aujourd'hui, que ferions-nous
de plus ? Avec toute notre science du XIXe si�cle,
ferions-nous mieux. Avant de r�pondre, compulsons ces
proc�dures, et non les �crits modernes qui les
d�naturent � dessein, et en attendant, on le r�p�te, ne
nous h�tons pas trop d'accuser de cruaut� ou de
cr�dulit� la magistrature et le clerg� pour avoir ch�ti�
ces pr�tendus monomanes. Au milieu d'une �pouvante aussi
g�n�rale, n'y aurait-il eu de la part du sorcier que la
seule intention de causer le mal, bien manifest�e par
des pratiques simplement ridicules, d�s qu'elles
devenaient la cause d'un mal tr�s-r�el dans des
imaginations effray�es, ces monomanes m�ritaient une
rigoureuse r�pression supposons : qu'il y ait de nos
jours des natures �tranges assez perverses pour vouloir
�pouvanter des femmes et des enfants, et convaincues que
le moyen tout pu�ril dont elles usent peut causer l'�pitepsie
ou la folie et m�me la mort, le magistrat devrait-il
rester dans l'inertie ?
(76) Doemonol. kib. III, cap. 12, p. 386. - Louis Spach,
Histoire de la Basse-Alsace, p. 209.
Apr�s avoir donn� pour �pigraphe � son livre ce verset
du L�vitique : Vir sive mulier, in quibus Pythonicus vel
divinationis fuerit spiritus, morte moriayur, Nicolas
Remy invoque, dans son dernier chapitre, l'autorit� de
l'Evangile, qui, malgr� la douceur et l'indulgence de sa
doctrine, prononce la m�me sentence, dans son style
all�gorique et figur�, contre ceux qui se s�parent du
Christ. �� In novo instrumento, quod jam mitiorem,
moderatioremque doctrinam continet, tamen gravissima
sententia pronuntiatur : eum palmitem, qui in Christo
non manserit, foras ejiciendum esse atque in ignem
mittendum. Omnino id dicitur et sine exceptione. Quod si
jus civile vetat nos distinguere ubi lex ipsa non
distinguit, quid faciendum tandem putabimus in Evangelio
cujus majestas est supra legem; cuique quicquam vel
addere, vel detrahere piaculum est sempiternis tuendum
flammarum incendiis. �
Pierre de Lancre s'inspirait aussi, dans sa s�v�rit�,
d'un texte religieux : maleficos non patieris vivere.
Exode, 22.
Les Juges protestants ne maniaient pas avec moins
d'�nergie le marteau des sorciers (*), que les Juges
catholiques; �� ils rivaiisaient dans l'application des
lois rigoureuses port�es contre des crimes imaginaires;
car les partisans de chaque culte voulaient, dans la
punition des coupables, faire preuve de z�le pour la
cause de Dieu contre le r�gne occulte du d�mon. �
(*) Malleus maleficorum; c'est ainsi qu'on nommait le
code de proc�dure nquisitoriale � la fin du XVIe si�cle.
(77) Daemonol. lib. III, cap. 12, p. 393-394.
Nulle part Nicolas Remy ne r�v�le mieux la pens�e intime
et inexorable qui pr�sidait � toutes ses sentences que
dans la derni�re page de la D�monol�trie; on voit qu'il
a voulu que, par sa clarl� et son �nergie, cette page en
f�t comme le r�sum� et la p�roraison.
�� Vae igitur illis, ut cum Isaia loquar, qui sic foedus
cum morte percusserunt et cum inferno pactum fecerunt...
Vae quoque illis qui adeo horrendi atque execrandi
criminis odium deprecantur, poenasque minuunt,
excusatione metus, aetatis, sexus, imprudentiae, atque
aliarum id genus rerum, quas ne in levioribus quidem
praetexere quisquam sana; mentis audeat...
�� Equidem non verebor qui sim tam longo et diuturno
maleficorum examinandorum usu exercitatus ac contirmatus,
pal�m atque ing�nue de iis sententiam meam ostendere ac
ipsam quantum potero proferre lucem veritatis. Videlicet
t�t impietatibus, veneficiis, portentosis libidinibus
flagitiosisque facinoribus vitam illis apert� esse
inquinatam ac contaminatam, ut � jure esse non dubitem
omnibus tormentis excruciatos igni interficere; tum ut
debitis poenis sua expient scelera, tum ut aliis sint
documento.ac magnitudine supplicii eos deterreant. �
(78) Doemonol. lib. I, cap. 2, p. 38-40. - Bizouard,
T.III, liv.XIV,ch.7,p.446.
�� C'�tait un aliome en d�monologie qu'un sorcier ne peut
rien contre ses juges. �
Nicolas Remy rappelle � ce propos l'objurgation
furibonde qu'une sorci�re lui a un jour adress�e en
plein tribunal �� Qu�m ben� agitur vobiscum, � Judices,
quod nobis in vos nihil quiequam licet ! nam nulli sunt
mortalium quos tam lubenter, insidiis nostris, appetamus,
qui sic gentem nostram omnibus poenis suppliciisque
prosequimini �
(79) Doemon. lib. I, cap. 10, p. 96 et lib. II, cap. 4,
p. 226 ; cap. 11, p. 275 et epist. dedic.
Nicolas Remy recommande aux simples mortels trois moyens
plus faciles et non moins eflicaces de se pr�server des
emb�ches du d�mon la propret� des mains, la pri�re et la
pratique des vertus chr�tiennes.
�� Monebat ne, insalutato numine, illotisque manibus,
man� domo pedem efferret, si se � sagarum insidiis tutum
cuperet ac securum.
�� Quin igitur adeo saevae truculentaeque bestiae
opponimus solidae fidei clypeum, spiritus gladium,
galeam salutis, alia quasi succenturiata praesidia,
temperantiam, integritatem, vigilantiam, jejunia,
precationes, obsecrationesque assiduas, ac praesertim
antelucanas et matutinas; nam iis certo suos conatus
prohiberi atque infringi ipsae etiam sagae profitentur.
� Nicolas Remy avait remarqu� que nulle part la
sorcellerie ne s'�tait plus d�velopp�e que dans les
villages o� la parole de Dieu se donnait plus rarement
et moins bien, �� apud quos aut frigidae, aut rarae, aut
omnino nullae conciones habentur de Deo, deque quae
fidem (cujus praesidio praecipu� tuti sumus a
veteratoris illius insidiis) in Christianorum mentibus
stabiliunt, fovent ac conservant. �
(80) M. Dumont, Just. crim., T. II, p. 62-63.
Nicolas Remy a eu successivement pour coll�gues au
tribunal des Echevins Nicolas Olry, Philbert Philbert,
Aubry Tarat, Claude Maimbourg, Chr�tien Philbert,
Antoine Bertrand et Nicolas Bourgeois. - Nicolas Olry
Ma�tre-Echevin en 1576, l'�tait encore en 1591.
M. Dumont se trompe quand, pour en att�nuer la
responsabilit�, il parait admettre que la plupart des
condamnations dont Nicolas Remy �voque partout le
souvenir dans sa D�monol�trie, ont �t� prononc�es
pendant qu'il exer�ait les fonctions de Procureur
G�n�ral ; ces condamnations se rapportent toutes �
l'�poque o� il appartenait au tribunal des Echevins, et
c'est � ce dernier titre qu'il doit surtout en r�pondre.
(81) Code manuscrit de 1307 � 1631.- Nous avons d�j� vu
qu'au tribunal des Echevins la voix du Ma�tre-Echevin
n'�tait pas pr�pond�rante, en cas de partage, quand il
s'agissait d'affaires criminelles et qu'on y exigeait
toujours la majorit� effective des voix. Les accus�s y
trouvaient une garantie plus rassurante encore pour
informer, il fallait l'autorisation pr�alable du
tribunal et on confiait l'information � l'un de ceux qui
en avaient reconnu la n�cessit�.
(82) Dans la pr�v�t� de Nancy, compos�e de 74 communes,
il existait de nombreuses seigneuries particuli�res, et
ces seigneuries, ayant presque toutes droit de haute,
moyenne et basse justice, �chappaient � la juridiction
du tribunal des Echevins.
(83) Doemonol. lib. I, cap. 2, p. 41. - B. 7354. Pi�ces
justificatives du compte du domaine de Nancy. - J.-J.
Lionnois, T. I, p. 305-308 et T. III, p. 33-34. - Aug.
Digot, T. II, p. 116-117 et 395, 397-398.
Nicolas Remy raconte d'abord que, lorsqu'il trouvait
d�crits, au cours d'un proc�s criminel, quelques poisons
� l'usage des sorciers, il les faisait, dans la lecture
publique des pi�ces, passer sous silence par le
greffier, afin de pr�venir le danger de leur
divulgation; puis il continue : �� Sic enim sunt in
Lotharingi� rerum capitalium judicia, ut imperitae atque
adeo armatae multitudinis suffragiis, cum summ� ditione,
ac citr� provocationem in reum in publico expositum
reddantur, ex Nanceiani tamen Duumvirat�s sententia, ad
quem de tot� re prius referri oportuit. �
Ces quelques mots r�sument dans leur �nergique concision
tout un syst�me de proc�dure criminelle. La justice se
rendait publiquement, in reum in publico expositum ;
sans appel,
cum summ� ditione; d'office, citr� provocationem ; par
une multitude ignorante et arm�e, imperitae atque adeo
armatae multitudinis suffragiis ; d'apr�s l'avis du
tribunal des Echevins, auquel il fallait pr�alablement
en ref�rer pour le tout, ex Nanceiani tamen Duumvirat�s
sententia ad quem de re tot� prius referri oportuit.
Cette affirmation d'un homme aussi initi� que Nicolas
Remy aux principes de l'organisation judiciaire de son
temps, aurait � elle seule une autorit� consid�rable, et
elle est de plus confirm�e par le pr�ambule de l'�dit du
31 ao�t 1698, o� le duc L�opold, rentrant dans ses Etats
et voulant y r�former la justice, s'exprimait ainsi :
�� Etant inform� que dans aucunes villes s'y trouvant
deux juridictions, l'une baillag�re et l'autre
pr�v�tale, l'une et l'autre manquaient d'officiers; que
ceux des H�tets-de-Ville nomm�s actuellement � la
pluralit� des voix des Bourgeois, connaissent en
quelques endroits, non-seulement de la Police mais aussi
de la juridiction ordinaire en toute sorte de mati�res,
quoiqu'ils n'y soient aucunement vers�z... �
Une ordonnance du 6 octobre 1629 �clairait d�j� la m�me
question d'un jour non moins vif; car le duc Charles IV
y disait : �� que sur les remontrances � lui faites par
son Procureur g�n�ral des grands abus et d�sordres qui
arrivent ordinairement aux jugemens qui se rendent �s
proc�s criminels qui s'instruisent par les juges
ordinaires du bailliage des Vosges, par le moyen et la
diversit� d'opinions qui se rencontre entre aucuns
particuliers d'entre le peuple assembl� pour ou�r la
lecture des proc�s et pour asseoir jugement contraire �
l'avis qui a �t� pris par des Ma�tre-Echevin et Echevins
de Nancy, ce qui produit de tr�s-grands inconv�nients...
Pour � quoi obvier, selon l'obligation qu'il a de
maintenir la justice en son lustre et m�me de l'�lever
au degr� le plus �minent, il fait savoir qu'� l'avenir
il ne sera loisible au peuple assembl� pour proc�der au
jugement d'un proc�s criminel d'adjuger par leur
sentence aucune peine autre plus grande, soit de mort,
fouet, bannissement perp�tuel, torture, confiscation de
biens, que celle de laquelle les dits Maitre-Echevin et
Echevins auront donn� avis, auquel ils seront oblig�s de
se conformer, sans augmenter la punition port�e par
icelui, sous quelque pr�texte que ce soit, � peine de
nullit� de leurs jugemens et des d�pens, dommages et
int�r�ts des parties, ou de leurs successeurs; demeurant
seulement loisible au dit peuple assembl� pour proc�der
au dit jugement, de mod�rer la peine ou de l'adoucir,
sans pouvoir l'aggraver pour quelque consid�ration que
ce soit... �
En transcrivant toute enti�re cette ordonnance de
Charles IV, l'abb� Lionnois ajoute : �� Tel �tait le
droit du peuple en Lorraine, et dont il a joui jusqu'�
l'invasion de la France dans ce duch�, o� l'on admit les
lois du Royaume. �
Ce droit du peuple en Lorraine n'avait rien d'aussi
absolu que le langage de l'abb� Lionnois le ferait
supposer; il ne s'appliquait pas notamment au tribunal
des Echevins de Nancy, qui jugeait sans le concours de
la multitude, comme le prouve la sentence suivante et
toutes celles qu'il m'a �t� donn� de consulter
�� Veue la proc�dure extraordinairement instruicte par
nous les Ma�tre-Eschevin et Eschevins de Nanci, �
requeste du sieur procureur g�n�r�t de Lorraine, �
l'encontre Ysabelle Girarde, femme � Jan Masson,
demeurant � Benney, pr�venue de sortil�ge et v�n�fice,
s�avoir les interrogatoirs � elle faictz et ses
responses � iceulx portantes, ses confessions et
d�n�gations et variations, les conclusions dudict sieur
procureur et tout ce que faisoit � veoir et consid�rer
en ladicte proc�dure, disons que, par icelle, ladicte
pr�venue est suffisamment attaincte etconvaincue dudict
crime de sortil�ge et v�n�fice par sa propre confession
et recognoissance volontaire, pour r�paration de quoy
l'avons condamn� et condamnons � estre estrangl�e � un
poteau, apr�s avoir aulcunement senti le feu, pour estre
par apr�s son corps brusl� et r�duict en cendres au lieu
accoustum�, tous et un chacun ses biens d�clairez acquis
et confisquez � qui il appartiendra, les fraiz de
justice raisonables pr�alablement prins sur iceulx, par
nostre sentence, jugement d�finitif et a droict prononc�
judiciairement en l'auditoire de Nanci le cinqui�me
juillet 1608. �
Rien dans cette condamnation capitale ne r�v�le la
pr�sence de l'�l�ment populaire et je crois qu'il en
�tait ainsi de toutes les sentences �manant des justices
ducales.
Les Ducs de Lorraine, qui supportaient avec une grande
impatience l'intervention de la Chevalerie dans le
jugement des affaires civiles, avaient du voir d'un oeil
plus ja)oux encore la participation du peuple au
jugement des affaires criminelles et tout mettre en
oeuvre pour la faire cesser.
Les Seigneurs moins puissants que les Ducs et dont les
justices n'offraient pas aux justiciables, sous le
rapport du personnel, les m�mes garanties de savoir et
d'impartialit�, continu�rent seuls, comme par le pass�,
� punir les coupables avec le concours d'une sorte de
jury.
Il en fut de m�me, et � plus forte raison, des communes
qui avaient re�u des chartes particuli�res ou qui
avaient �t� admises � jouir de la loi de Beaumont.
Cette loi confiait en effet, l'administration des
int�r�ts communs � un Mayeur et � des Jur�s, �lus pour
un an, et ce Mayeur et ces Jur�s administraient aussi la
justice, ce que rend indubitable, non-seulement les
termes expr�s de la loi, mais encore le partage, entre
le Seigneur, le Mayeur et les Jur�s, de toutes les
amendes prononc�es pour d�lit ou pour crime.
Art. IX. ln e�dem vill�, consensu omnium vestrum, Jurati
constituuntur, et Major similiter, qui fidelitatem nobis
jurabit et de redditibus et provintibus villae
ministralibus nostris respondebit.
Sed nec tempore Major et Jurati ultra annum, nisi de
voluntate omnium in officiis remanebunt.
�� Art. XXIV. Nulli burgenses Bellimontis ad aliam
justitiam de alio burgensium clamorem transferre licebit,
quandiu alter justifias villae stare voluerit.
�� Art. XXXI. Si quis contradixerit judicio Juratorum et
eos de falso judicio per testimonium Juratorum de
Brueriis comprobaverit, centum solidos solveot Jurati;
si autem eos convincere non poterit, centum solidos
solvet et expensam juratorum ; domino videlicet
sexaginta solidos, Majori quinque solidos, Juratis
trigenta quinque solidos.
�� Art. XXXII. Judicium Juratorum stabile erit, nisi
aliquis, accepto statim consilio, judicium contradixerit.
De ces textes de la loi de Beaumont, ici en vigueur, l�
en d�su�tude, on doit raisonnablement induire que si,
dans les derniers temps, le jury, existait en Lorraine,
il y existait, bien moins � l'�tat d'institution
proprement dite, qu'� l'�tat de souvenirs plus ou moins
vivaces et de vestiges plus ou moins effac�s. Et
j'incline � penser que ces souvenirs et ces vestiges se
sont conserv�s dans les Vosges plus longtemps
qu'ailleurs, parce que, d'une part, c'est plus
particuli�rement � l'occasion des d�sordres et des abus
commis dans le Bailliage des Vosges que l'ordonnance du
6 octobre 1629 a �t� rendue, parce que, d'un autre c�te,
on ne trouve, que relativement � ce Bailliage, rapport�e
avec quelque pr�cision et quelques d�tails, la mani�re
dont les Jur�s fonctionnaient encore � l'�poque o� la
Lorraine devint une province fran�aise.
L'abb� Lionnois fournit � cet �gard des renseignements
curieux, dont il n'indique pas la source, mais qui
ressemblent au t�moignage d'un contemporain.
�� Dans la ville de Mirecourt o� �toit �tabli un grand
Bailliage, le Pr�v�t avoit la connaissance et
l'instruction des proc�s criminels, non-seulement contre
les Bourgeois de cette ville, mais encore contre les
�trangers trouv�s d�linquans dans la Pr�v�t�, mais les
jugements se rendoient par le peuple de la mani�re
suivante.
�� Si le Pr�v�t estimoit que le pr�venu m�rit�t punition
corporelle, il commandoit aux Mayeur et Bourgeois de
s'assembler en armes sous la halle de Mirecourt o� il le
faisoit mener par deux fois, � deux jours diff�rents,
entre lesquels il en mettoit un ou deux d'intervalle,
s'il le jugeoit � propos. Le Greffier lisoit � haute
voix la proc�dure, apr�s quoi le pr�venu �toit reconduit
en prison.
�� Le Pr�v�t remettoit ensuite le proc�s aux Echevins du
Mayeur, qui le portoient ou l'envoyoient � leurs frais
aux ma�tre Echevin et Echevins de Nancy, pour avoir
avis.
�� Lorsque le proc�s �toit rapport�, le Pr�vot faisoit
conduire le pr�venu pour la troisi�me et derni�re fois
sous la halle ; la proc�dure �toit lue de nouveau, puis
remise entre les mains du Mayeur qui, sur la r�quisition
du Pr�v�t, ordonnoit � ses Echevins de donner sentence.
Ceux-ci munis du proc�s se retiroient � part, et avec
l'avis des bourgeois, ils formoient la sentence. S'ils
condamnoient � mort le pr�venu, il disoient qu'il doit
amener. Le Pr�v�t leur demandoit comment ? Ils se
retiroient encore et revenoient ensuite dire : qu'il
doit amener de corps. Enfin s'�tant retir� et revenant
pour la troisi�me fois, ils pronon�oient la sentence qui
�toit ex�cut�e � l'instant. �
(84.) J.-J. Lionnois, T. II, p. 355-360.
Outre les �l�ments de solution que, sur ce point
tr�s-obscur, on peut emprunter � l'art. 9 de la loi de
Beaumont, je remarque que dans un proc�s de sorcellerie,
instruit � Fontenoy-leCh�teau contre la nomm�e Claudon
Voillaume d'Amercy et dont l'abb� Lionnois donne les
parties principales, on voit partout figurer, � c�t� du
maire, deux bourgeois, Jean Corbot et Jean Durand, lurez.
Il est vrai que, dans une autre proc�dure, que je
poss�de et qui concernait la nomm�e Barbeline, femme de
Claudon Didier, les deux bourgeois assistent � toutes
les phases de l'instruction en qualit� de ~emo!H~s mais
t�moings ou jurez, peu importe, leur assistance �tait
pour la pr�venue le gage d'une justice exacte, sinon
bienveillante.
(85) Ordonnance du 6 octobre 1629.
(86) Doemonol. ad lectorem.
��Dum igitur modo hoc, mod� illud, prout unum quodque
sibi animus per occasionem decerpit, usurpo, ac seorsum
attingo ; idem usuvenit mihi quod iis solet, qui, �
qu�que veste quam concinnant, segmenta in cistam prim�m
quidem abjiciunt acervatim ac negligenter ; post ubi in
aliquem numerum jam accrevisse putant, retractant
diligentius singula, atque ex commodissimis quibusque
centonem aliquem colligunt...
�� Haec sic singula prim�m alligi, ut nihil minus
cogitarem qu�m ea aliquando concinnare atque in unum
corpus redigere; sed ipsa jam per partes informata
materia atque equidem haud omnino poenitendo labore
tandem pervicit, ut in hanc, qu� nunc prodit, formam
quantumvis rudem sinerem coalescere.Veluti quae ex
temere prim�m sparsis aedificiis progressu temporis
coagmentantur urbes, inordinatas incompositasque viarum
regiones habent; quia scilicet non fuit ab initio
destinata collocationis universa certaque facies... Haec
nunc, lector, tibi videnda exhibeo modic� ac fideliter
denarrans quae ipse diuturno usu atque observatione
comperi. �
(87) Martin Antoine Delrio, n� � Anvers le 17 mai 1551,
mort � Louvain le 19 octobre 1608 d'abord s�nateur au
conseil souverain de Brabant, puis auditeur de l'arm�e,
Vice-Chancelier et Procureur g�n�ral, enfin J�suite �
Valladolid, �� savant mais cr�dule �, disent les
biographes; ce sont ses Disquisitionum magicarum libri
sex, Louvain, 1599, in-4�. qui lui ont valu surtout
cette r�putation de cr�dulit�.
(88) Pierre le Loyer, n� � Nuill�, Anjou, le 24 novembre
1550, mort conseiller au Pr�sidial d'Angers en 1634. ��
C'�tait un prodige d'�rudition, mais il n'avait ni go�t,
ni jugement �.
Il composa plusieurs ouvrages, plus �tranges les uns que
les autres, et dont le moins mauvais est peut-�tre
Quatre livres des spectres ou apparitions et visions
d'esprits anges et d�mons se montrans sensiblement aux
hommes. Angers, 1586 in-4�.
(89) Henri Boguet, n� dans le XVIe si�cle, � Pierrecourt,
successivement Bailli de Gray, Grand Juge de la terre de
Saint Claude et conseiller au Parlement de D�le. On a de
lui une vie de saint Claude, un commentaire des coutumes
de Bourgogne et le Discours sur les sorciers, in-8�.
Paris, 1603.
(90) Pierre de Lancre, n� � Bordeaux d'une famille de
robe, au cours du XVIe si�cle, mort � Paris en 1630. Il
exer�ait les fonctions de conseiller au Parlement de
Bordeaux, lorsqu'on l'envoya dans le pays de Labourd, en
Gasgogne, pour y poursuivre les sorciers qui infestaient
cette province. C'est le souvenir de ces poursuites qui
lui a inspir� les deux ouvrages dont j'ai donn� plus
haut les titres.
(91) Jean Bodin, n� � Angers vers 1530, fut Procureur du
Roi � Laon, ou il mourut de la peste en 1596. D�put� aux
Etats de Blois en 1576, il y prit place dans les rangs
d'une sage opposition; il emp�cha notamment l'ali�nation
du Domaine et l'amoindrissement des Etats qu'on voulait
r�duire aux proportions d'une simple commission, dont
les membres devaient �tre choisis par la cour dans les
trois ordres. Les six livres de la R�publique lui ont
fait la r�putation d'un profond politique et beaucoup
plus d'honneur que la D�monomanie des Sorciers. In-4�,
Paris, 1581. - Grosley, d'accord en cela avec Guy Patin,
suppose qu'en �crivant ce dernier livre, il ob�issait �
un secret calcul qui tenait � sa position. Il n'admet
pas que Bodin �� homme instruit et esprit ind�pendant �
ait cru aux sorciers, comme il feint d'y croire.
D'autres ont voulu �� qu'il fut tout � la fois
protestant, d�iste, sorcier, juif, ath�e �. D'Aguesseau,
meilleur juge, le signale comme �� un digne magistrat, un
savant auteur, un tr�s-bon citoyen. �
(92) Dom Calmet, Hist. de Lorr., T. VII, col. 30-35. -
M. Bizouard. T. II, liv. VII, chap. 3, p. 200-212.
Dom Calmet et M. Bizouard sont les seuls auteurs dont
les appr�ciations sur Nicolas Remy t�moignent de la
lecture patiente et consciencieuse de la D�monol�trie.
(93) Eliphas L�vi, Dogme et Rituel de la haute magie, T.
Il, p. 234-235.
(94) En r�ponse � ma lettre du 16 novembre 1868, M.
Alphonse-Louis Constant (Eliphas L�vi) m'�crivait le 20
m�me mois :
�� ...Le fait que j'avance m'a �t� afirm� par un
journaliste distingu�e, M. Alexandre Erdan, qui avait
fait de s�rieuses recherches pour la composition d'un
livre, moins s�rieux peut-�tre dans sa forme, qu'il a
intitul� La France mystique et qui ne se trouve plus en
librairie ; je ne poss�de pas ce livre et j'ai cess�
d'�tre en relation avec M. Erdan, qui depuis plusieurs
ann�es est en Italie. Vous voyez que, malgr� mon grand
d�sir de vous �tre agr�able, je ne puis vous fournir les
preuves que vous me demandez. �
(95) Aug. Digot, Notice biographique et litt�raire sur
Florentin le Thierrat. M�moires de t'Acad�mie de
Stanislas, ann�es 1849, p. 265-266.
RECtEIL DES PRINCIPAUX POINTS DE LA REMONSTRANCE faitte
� l'ouuerture des plaidoiries du Duch� de Lorraine,
apr�s les Rois, en l'an 1597, par Nicolas Remy,
conseiller de son Alteze en son Conseil d'Estat et son
procureur G�n�ral en Lorraine. A Metz, par Abraham Faber...1597,
in-4� 16 ff. pagin�s de 2 � 30.
Cette remontrance a �t� reimprim�e dans une collection
in-18, dont j'ignore le titre, et o� elle occupe les
pages 703 � 746.
Elle a valu � son auteur, de la part de Florentin le
Thierriat, une pi�ce de vers d�j� inser�e dans les
M�moires de l'Acad�mie de Stanislas, et trop m�diocre
pour que j'ose me permettre de la donner ici une seconde
fois.
(96) M. Beaupr�, Essai historique sur la r�daction
officielle des principales coutumes de la Lorraine et du
Barrois, p. 67-99.
La r�daction des Coutumes de Lorraine, propos�e aux
Assises de la chevalerie, des le 27 f�vrier 1584,
n'�tait achev�e que onze ans plus tard, et, par un �dit
dat� seulement du 1er juin 1595, le Duc Charles III
ordonnait �� de mettre le tout soubz la presse, pour en
donner � chacun une certitude et clart� plus grande. �
La presse, � l'imitation sans doute des commissaires
r�dacteurs, ne fut pas non plus tr�s-rapide dans
l'accomplissement de son oeuvre, car la premi�re �dition
connue des Coutumes de Lorraine porte la date du mois de
juillet 1596. Elle parut chez J. Janson, imprimeur
ordinaire et jur� de Son Altesse. On y lit une adresse
des Etats de Lorraine au duc en remerciement de ce qu'il
a fait �� � leur humble requeste, mettre en escrit ce
qu'auparavant, soubz l'assurance et certitude de leur
preud'hommie, avoit est� remis et confi� � leur seule
m�moire, � fin que par prinse d'un mot pour l'autre,
l'artifice des subtilz alambiqueurs du droit n'ait tant
de force d'en corrompre et d�torquer le sens, ni de
tordre autrement le n� � justice. �
Quoique Nicolas Remy ne figure nulle part au nombre des
commissaires des Etats pour la r�daction des Coutumes,
Chevrier affirme et je crois qu'il a concouru � cet
important travail, au moins comme l'un des membres du
Conseil ducal charg�s d'y mettre la derni�re main, avant
son homologation.
(97) De Rog�ville, Dictionnaire, T. I, p. 53 et T. II,
p. 366-372.
L'Ordre des avocats a d� �tre, en Lorraine, contemporain
de la Facult� de Droit de Pont-�-Mousson; avant elle on
plaidait sans grades. Les Procureurs tenaient leur
mandat de la confiance des parties et d'une commission
du Bailli. Les avocats ne voulurent pas seulement s'en
s�parer, ils demand�rent, et ils obtinrent m�me un
instant, leur compl�te suppression.
(98) Voici la formule du serment comment� par Nicolas
Remy:
�� Vous reuererez le Magistrat de ceste Court, auec tel
respect d'honneur qu'� luy appartient et signamment
lorsquil seerra en ce throne et sanctuaire de Iustice
pour l'administration d'icelle. - Vous ne prendr�s
sciemment en main cause apparemment iniuste et o� vous
la descouurir�s telle, apr�s t'auoir prince, la
quitter�s et abandonner�s du tout. - Vous ne proposer�s
en plaidant, soit verbalement ou par escrit, faicts et
articles calomnieux et impertinens, et n'alleguer�s ou
soustiendr�s vs, styles et coustumes que vous ne
s�achi�s es!re vrayment re�eus et pratiqu�s en ceste
Court. - Vous ne chercher�s fuytes et dilays seruans �
retarder le cours et le progr�s de la cause. - Vous n'exiger�s
de voz parties salaire excessif et ne paschiser�s auec
elle de la quote de la liste. - Vous n'interrompr�s le
plaidoy� de vostre partie et n'estriuer�s auec elle de
propos aigres, picquans et immodestes. �
(99) REMONTRANCES faites aux ouvertures de la St-Martin
de la cour souveraine de Lorraine et Barrois, par les
advocats g�n�raux en icelle, depuis l'ann�e 1705 jusqu'�
l'ann�e 1717 inclus.
La Remontrance de Nicolas Remy est la premi�re qui ait
�t� imprim�e en Lorraine; plus tard, Ren� Charlot et P.
Deschamps, imprimeurs ordinaires de S.A.R., ont donn�,
sous le titre qui pr�c�de et en un vol. in-4� de 307
pages, celles de MM. Bourcier de Villers et Bourcier d'Autrey.
(100) M. Beaupr�, Recherches sur les commencements et
les progr�s de l'imprimerie en Lorraine jusqu'� la fin
du XVIIe si�cle, p. 234-235. 313, 376-378.
Le DISCOVRS DES CHOSES ADVENVESEN LORRAINE, depuis le
d�cez du duc Nicolas, iusques � celuy du duc Ren�, a �t�
imprim� trois fois 1� Av Pont � Mousson, Par Melchior
Bernard, imprimeur de Monseigneur le Duc de Lorraine, en
son Universit�. 1605, pet. in-4�. - Pr�lim. 4 ff. non
chiffr�s y compris le titre; texte pagin� de 1 � 196 et
suivi d'un feuillet non chiffrr� pour l'errata. - 2� A
Espinal, par Pierre bouton, 1617, pet. in-4�. Pr�lim. 4
ff. Texte pagin� de 1 � 158. - 3� Aussi � Espinal, par
Pierre Hovion, imprimeur de Son Altesse. M.DC.XXVI, pet.
in-8�, 2 ff. liminaires et 171 page de texte.
La premi�re �dition est, sous tous les rapports,
tr�s-sup�rieure aux deux autres; elle a un beau titre et
un beau portrait de Ren� II, grav�s par Alexandre
Vall�e. De mauvaises copies de ce titre et de ce
portrait se retrouvent dans la seconde �dition; le titre
a disparu dans la troisi�me, et le portrait, grav� sur
bois, vaut moins encore que celui de l'�dition
pr�c�dente.
Les deux premi�res �ditions sont rares; la troisi�me est
� peu pr�s introuvable je renvoie, dans ces notes, � la
seconde.
(101) Discours des choses advenues, p. 15, 34, 37,
39-40, 45, 82, 86, 90, 95-96, 111, 114, 119, 127,129,
132, 144,145,148,152-153.
(102) Id., p. 77.
(105) M. l'abb� Marchal, Recueil de documents sur
l'Histoire de Lorraine, 1859, p. v-vi.
(104) Disc. des choses advenues, p. 14, 133, 149.
(105) M. de Barante, Histoire des ducs de Bourgogne, de
la Maison de Valois. R�gne de Charles-le-T�m�raire, 6�
�dit., T. VII, liv. VII, p. 239 et 247-249.
(106) Disc. des choses advenues, p. 96-114.
Livr�e le 5 janvier 1477, la bataille de Nancy
s'�levait, par l'importance de ses r�suttats, � la
hauteur d'un fait europ�en; aussi a-t-elle �t� souvent
d�crite avec d�tails, mais, par aucun historien, d'une
mani�re aussi dramatique et aussi simpte, dans son vieux
et na�f langage, que par Nicolas Remy.
(107) Id., p. 17-18.
�� Charmes est vne ville esleu�e sur vn petit tertre, le
pied du quel la Moselle arrouse du cost� du Septentrion.
Elle a � dos vers le midy vne petite prairie aboutie d'vne
haute colline plantureuse en vignoble, et � ses flancs,
tant du dessus vers le levant que du dessoubs vers le
ponent, de belles et amples campagnes, au trauers des
quelles ceste riuiere roule ses eaux auec vne telle
inconstance et imp�tuosit� qu'il n'y a moyen de la
contenir en son lict et en empescher les saillies et
desbordements.
�� Aussi en r�compense de ce mauuais voisinage elle
foisonne en tant de sortes de poissons et si d�licieux
que le dommage s'en noye aucunement dans le proufit. Et
en est au demeurant le seiour si aggreable, pour la
bont� et cl�mence de son air, que nulle ville de tout le
pays lui querelle ce pardessus. �
Fran�ois, de Neufch�teau, disait plus tard, dans son
po�me des Vosges
Des hauleurs de Chat�, contemplez la Moselle !
Que Charme est bien plac� ! que cette rive est belle !
(108) Disc. des choses advenues, p. 30-31.
(108 a) Id., p. 23-25, 50-51, 53-58, 66-68, 71, 80-85,
106-107.
(109) Id.,p. 27-31.
(110) Id., p. 72-73. - Dom Aubert Roland, La guerre de
Ren� II, duc de Lorraine, etc., contre Charles Hardy,
duc de Bourgogne, p. 254-257. - Huguenin jeune, Histoire
de la guerre de Lorraine et du si�ge de Nancy, par
Charles-leT�m�raire, duc de Bourgogne, p. 204-205.
M. Huguenin, qui juge le discours du bourgmestre
Waldmann comme je le juge moi-m�me, le donne presque
textuellement et en son entier. Le cordelier Dom Aubert
Roland n'avait fait, avant lui, que l'amplifier � la
fa�on de Tite-Live.
(111) Disc. des choses advenues, p. 43-44, 74.80, 83-84,
87-88.
(112) Id.,p. 25, 31, 119.
(113) Id., p. 2-3. - Vignier, La v�ritable origine des
tres!es maisons d'Alsace, de Lorraine, d'Avstriche, de
Bade et de quantit� d'autres, p. 203.
En transcrivant, au milieu de ses travaux g�n�alogiques
si consciencieux et si justement estim�s, l'opinion de
Nicolas Remy, Vignier indique assez toute la valeur
qu'il y attachait.
(114) M. Beaupr�, Recherches, p. 376-378.
(115) B. 1317, F� 242. Compte du Tr�sorier g�n�ral de
Lorraine.
�� Au sr Nicolas Remy, Conseillier d'Estat de Son Alteze,
la somme de mil francs que, pour ceste fois, sa dite
Alteze luy at donn� et octroy� en consid�ration des
peines et travaulx qu'il a employ� au livre par luy
faict et mis en lumi�re des vie et gestes du feu Duc
Ren�, trisayeul � S. A.. et pour l'encourager de tant
plus de mettre � chef le recueil, au quel il travaille,
des ordonnances tant de feu S.A. que de la Regnante. Par
mandement du vij de mars 1609.
(115 a) B. 1332, f� 236. Compte du Tr�sorier g�n�ral de
Lorraine, pour l'ann�e 1611.
�� Au sr Nicolas Remy, Conseillier d'Estat de S. A., la
somme de mil frans sur et en d�duction de trois mil
frans que sa dite Alteze luy a accord�s en trois ann�es
cons�cutifves � recevoir en trois cens reseaulx de bled
des receptes de Chastel et Charmes, en consid�ration des
bons services qu'il a faict � feu S.A. et � la Regnante,
nommement pour les grands et laborieux travailles qu'il
a employ�, du commandement de feu S. A. � compiler et
rediger par escript en ung seul volume toutes les
ordonnances des feuz ducz de Lorraine, et le quel volume
il a mis ez mains de S. A. pour estre tenu au Tr�sors de
ses chartes, n'ayant voulu, pour aucune raison, qu'il
passe soub la presse, comme estoit l'intention dudit a
sieur Remy. �
(116) Le Recueil des Ordonnances r�dig� par Nicolas Remy
ne se trouve plus au Tr�sor des Chartes o� le duc Henry
para�t cependant l'avoir d�pos�, et on ignore absolument
ce qu'il est devenu.
(117) Horatii Flacci, De Arte poetica, v. 38-40.
Sumite materiam vestris, qui seribitis, Bqaam
Viribus, et versate diu, quid ferre recusent,
Quid valeant hameri.
(118) Doemonol. epist. dedic.
�� Ut soleo temporibus negotia mea dividere ac laboris
taedium varietate quantum possum effugere. �
(119) Doemonol. ad lectorem.
Dans sa D�lmonol�trie, Nicolas Remy fait preuve d'une
�rudition vraiment prodigieuse et beaucoup plus commune
alors qu'aujourd'hui. Il invoque, sans cesse, l'Ancien
et le Nouveau Testament, les P�res de l'Eglise, les
philosophes, les historiens, les po�tes de la Gr�ce et
de Rome, et puis et surtout, tous ceux qui, avant lui ou
en m�me temps que lui, s'�taient occup�s de mati�res se
rattachant plus ou moins � son sujet. Il esp�re, par ce
luxe de pr�c�dents et d'autorit�s, plus facilement
dissiper les scrupules et les doutes des personnes
rest�es jusque-l� �trang�res aux choses de la
sorcellerie. �� Ut et hunc scrupulum dubitationemque ex
illorum animis evellerem, qui ad ea peregrini atque
hospites fort� acc�d�rent, non piguit a ex locupletibus
et luculentis authoribus iis consentanea quaedam
breviter adjungere; siquidem rerum similiter gestarum
commemoratio non parvam veritati lucem authoritatemque
afferre perbibetur. �
(120) Id., lib. III, cap. 1, p. 302-303.
(121) Id., epist. dedicat.
�� Sed c�m � re judiciari� subtraherem me ad amaeniora
studia, ac fort� ex recenti vel auditione, vel lectione,
adhuc haeereret aliquid de sagarum praestigiis ac
incantationibus; id quasi po�ticum aliquod figmentum
arripiens, (nam fer� affinitatem aliquam habere videntur)
inde versus aliquos conficiebam ac post in adversaria
negligenter rejiciebam. �
(122) Les oeuvres de maistre Guy Coquille, sieur de
Romenay, in-fol., Bordeaux, M.DCCIII. Pr�face. M. Dupin,
Eloge de Guy Coquille, p. 7-8, 21-22, 46.
Guy Coquille avait de bonne heure, comme Nicolas Remy et
tous les grands magistrats de la Renaissance, contract�
le go�t tr�s-vif de la po�sie latine. Si sa muse se
faisait le plus souvent l'�cho discret de ses joies
intimes et de famille, quelquefois aussi elle �clatait
en patriotiques accents. Ainsi � l'heure m�me o� le
chancelier de l'Hospital, retir� dans sa terre du Vignay,
�crivait son fameux excidat illa dies ! le vieux
Procureur g�n�ral du Nivernais, en d�plorant, lui aussi,
les horreurs de la Saint-Barth�l�my, se rendait du moins
ce consolant t�moignage que, gr�ce � lui, la ville de
Nevers y avait �chapp�.
Sed sola fer� orbs Nivernica clemens
Abstinnit misera et crudeli caede suorum.
(123) Les oeuvres d'Estienne Pasquier, in-fol.
Amsterdam, M.DCCXXIII, t. II. col. 830. - M. Dupin,
Eloge d'Estienne Pasquier, p. 55, 60.
Pour �tre juste, j'aurais d� dire que Nicolas Remy
faisait aussi bien les vers que Guy Coquille et qu'il
les faisait beaucoup mieux qu'Estienne Pasquier. Ami de
Ronsard, alors fort � la mode, et qu'il cherchait �
imiter, le savant auteur des Recherches de la France
versifiait tr�s-m�diocrement en latin et en fran�ais.
(124) In Doemonolatrioe librum primum periocha, cap. VII
et VIII, p. 4.
Nicolas Remy vient de nous faire l'histoire de ces 967
vers je voudrais maintenant, par la citation de
quelques-uns, permettre de les appr�cier tous et je
choisis le portrait du diable :
Illud inauditum eerl� est, aapraque fidem, quod
Non exhorrescit mulier spectare maritum,
Cui ferrugineos flagrantia lumina vultus
Accendunt, nasus crispanti prominet uneo,
Aspera frons extat resupinis cornibus, aures
Arrecte villis horrent, immanis anhelat
Rietes, sulphureum patulo de gurgite odorem
Undat inaequali per rugas ordine mentum
Impexum setis, nutens, enorme, repandum.
Adde quod incurvos extremis artubus nugues
Exerit; haud aliter qu�m dente harpago minaci :
Quod vasto informis se attollit corpore, quodque
Gutture vox illi presso interclusa remugit
Debilis ex imo testae velut excita fundo.
(125) Qvae svnt ad XVII Cal. IVL, An. M.DC.VI. honoris
ergo exhitibitaq. aduentante prim�m ad vrbem Nanceium
Sereniss. Margarita Sereniss. Principis Henrici Barri
Ducis coniuge.
Clari-loci Ad Nanceium.- Excudebat Joannes Sauine
typographus. 1608 Pet. in-8� de 8 ff.. titre compris,
pag. de 3 � 16. - Au milieu du titre une gravure ovale
repr�sente un guerrier tenant de la main droite une �p�e
nue, et de la gauche un bouclier sur lequel on lit : le
esp�re en Dieu qvi maidera.
(126) Her�vm Sereniss. potentiss. atqve optimi Principis
Caroli III. Dvcis Calabriae, Lotharingia;e, Barri,
Guetdriae, Marchisii, Marquionis Mussiponti, comitis
Vademontani, Albimontis, Zutphen. Clari-loci Ad Nanceium.
Excudebat Joannes Sauine Typographus. 1608. Pet. in-8�
de 6 ff., titre compris, page de 3 � 11. M�me gravure
que sur le titre de l'entr�e de Marguerite de Gonzague.
(127) M. Beaupr�, Recherches, p. 239-240 et 243-246. -
Henri Lepage, les Archives de Nancy, T. II, p. 203-205.
L'ambassadeur envoy� � Nicolas Remy fut Florent Drouin,
charg� lui-m�me d'une partie des pr�paratifs de la f�te.
La harangue et les vers compos�s par Nicolas Remy ont
�t� imprim�s sous ce titre :
Qvse primvm Solennivs in vrbem Nanceivm ingredienti
Henirico II Duci Lotharingie XII cal. Maias anni M D.CX.
Ciues adornabant nisi, ut sumptibus parceretur,
veluisset eius Celsitudo.
- Nanceii, in oedib. Clari-loci per Joannem Sauine
Typographum. 1640. Pet. in-8� de 8 ff., titre compris,
pagin�s de 3 � 14.
M. Beaupr� a p�remptoirement �tabli que ces trois
opuscules, aujourd'hui rarissimes et dont il est
l'heureux possesseur, appartenaient � Nicolas Remy. En
chargeant de leur impression Jean Savine, apr�s avoir
fait imprimer la D�monol�trie, chez Vincent, � Lyon, Les
Principaux points de sa remontrance chez Faber, � Metz,
et le Discours des choses advenves, chez Melchior
Bernard, � Pont-�-Mousson, l'auteur a prouv� qu'il avait
le sentiment du beau, l'amour des livres et cette
conviction que l'�crivain manque � l'un de ses devoirs
essentiels envers le lecteur, quand il se contente de
satisfaire son esprit, sans se mettre en peine de
satisfaire aussi ses yeux.
Melchior Bernard et Jean Savine passaient, en Lorraine,
pour des imprimeurs distingu�s, et Vincent et Faber ne
jouissaient pas, en France et dans le Pays messin, d'une
moins bonne r�putation.
(128) B. 7396. Roolle des Bourgeois, manans et habitans
de Nancy et de la ville noeuve du dit lieu, pour la
lev�e des solz, en l'ann�e mil cinq cens quatrevingtz et
neuf.
LE HAULT BOURGET.
...
Me Nicolas Remy, Eschevin.
...
(129) J.-J. Lionnois, T. I, p. 201-202, 357-358 et le
plan de 1611, n� 21. - Henri Lepage, Les Archives, T.
III p. 342.
L'�glise Notre-Dame occupait tout le c�t� m�ridional de
la place de l'Arsenal. Le 3 juin 1598, Nicolas Remy y
fit baptiser son fils Charles, probablement le dernier.
- Le p�re devait avoir 70 ans !
Le 12 ao�t de la m�me ann�e, la fille Anne de
Claude-Marcel Remy recevait aussi le bapt�me dans la
m�me paroisse. En 1598, le p�re et le fils ont donc eu
tous deux, � deux mois d'intervalle, les joies de la
paternit� !
(130) Doemonol, lib. I, cap. 17, p. 168. - Dom Calmet,
Biblioth. Lorr., col. 590 et 857-859. - Henri Lepage,
Archives de Nancy, T. II, p. 203-204. - Fran�ois de
Neufchateau, Les Vosges.
J'ai dit en commen�ant que Nicolas Remy �tait n� �
Charmes et je crois �tre le premier qui ait donn� cette
indication, cependant bien facile � donner, puisque
l'auteur de la D�monol�trie la donne lui-m�me, � propos
d'un incendie qui avait, dans son enfance, �clat� �
Charmes, et � la suite duquel on remarqua sur les d�bris
de l'�difice incendi� des empreintes attribu�es aux
ongles ou aux griffes du diable.
�� Et memini, me nondum ex ephebis egresso, c�m Charmis
(*) (quae mihi patria est) fulmen universas aedes
propinqui mihi hominis esaet pervagatum, ad extremum eam
porticum qua id se foras ejecerat inscriptam profundis,
frequentibusque ungnium vestigiis reliquisse. Quae, c�m
populares rei novitate adducti, magn� cum admiratione,
certatim inviserent, accurri et ipse e�que praesens vidi,
non sine aliqu� narium offensione, c�m sulphuris
teterrimo nidore aedes illae adhuc oppletae essent. �
(*) Le texte porte Chermis, mais c'est �videmment une
erreur, car on lit plus loin, p 306, non pas Chermarum,
mais Charmarum praetor.
Comme tous les coeurs bien n�s, Nicolas Remy conservait
le souvenir et le culte de la patrie; il aimait Charmes,
il y venait souvent, et, puisqu'on a la preuve qu'il s'y
�tait retir� � la nn de sa vie, on peut, sans trop de
t�m�rit�, aftirmer qu'il y mourut.
Un peu apr�s lui, Charmes a vu na�tre l'auteur de la
Recherche des Sainctes Antiquitez de la V�ge, Jean Ruyr;
et, vers la m�me �poque, tout pr�s de Charmes, Claude
Gel�e, dit le Lorrain, naissait aussi � Chamagne, dont
les vertes et riantes prairies semblent avoir servi de
fond � ses immortels tableaux.
Ah faul-il s'�tonner qu'en ces lieux pleins d'attraits,
De l'aimable nature �piant les secrets,
Gel�e ait pu tracer ces riants paysages,
Ces ciels purs, ces beaux soirs, ces vaporeux nuages,
L'air qui joue � travers ces �pis ondoyants,
Ces arbres agit�s et ces lointains fuyants ?
Ce grand peintre naquit au pied de nos montagnes ;
Il a dans ses tableaux transport� nos campagnes.
(131) B. 4024, B. 4032, B. 4033. Compte du Domaine de
Charmes. - Doemonol. lib. III, cap. I, p. 306.
En entrant dans la magistrature, Nicolas Remy resta
fid�le aux traditions de sa famille. Sa vocation
judiciaire s'�tait form�e comme se forment les
meilleures; sans contrainte, d'elle-m�me,
instinctivement, au foyer domestique, au contact et �
l'exemple de son p�re G�rard Remy et de son a�eul
Nicolas Remy; tous deux pr�v�ts de Charmes, le premier
en vertu d'un acte de l'autorit� publique, le second �
la suite d'une sorte d'ench�re et sous la promesse de
payer �� chacun an la somme de quatrevingtz quinze
florins, dix gros pi�ce de principal, avec les droitz
accoustumez, assavoir douze florins pour les espices,
neufz florins pour les porcs, soixante libvres cire et
cinquante resalx avoinne, comme au plus offrant et
dernier ench�rissant, � la chandelle... �
(132) Doemonol. lib. I, cap. 5, p. 51. - Michel,
Statistique administrative du d�partement de la Meurthe,
p. 483. - Henri Lepage, Le D�partement de la Meurthe, T.
Il, p. 511 et les Communes, T. II p. 473.
�� Dum in Sanmardano nostro rusticor. � St-Mard est un
tr�s-petit village de l'ancienne province de Lorraine,
situ� dans une gorge, � droite de la Moselle, � 5 kil.
de Bayon. On le dit fort ancien, quoiqu'aucun titre ne
le mentionne. Si Nicotas Remy y avait une campagne, il
ne para�t pas qu'il ait �t� le seigneur du lieu; car,
d'apr�s les seuls documents qu'on connaisse, la haute,
moyenne et basse justice appartenait d'abord, pour des
parts in�gales, au comte d'Haussonville et au marquis de
Blainville, et, plus tard, au chevalier Drouot,
conseiller en la chambre des Comptes de Lorraine.
(133) M. Dupin, Inauguration du tombeau et de la
chapelle du chancelier de Lhopital en 1836 et Discours
de rentr�e prononc� le 9 nov. de la m�me ann�e.
(134) Doemonol. lib. III, cbap. XII, p. 370.
Mens sana in corpore sano.
Nicolas Remy se louait surtout de ses yeux qui le
servaient � merveille.
(135) Dom Ambroise Pelletier, Nobiliaire p. 690.
Nicolas Remy avait �pous� Anne ou Chr�tienne Marchand,
fille de Henry Marchand et de M�line Le Galland. Il en
eut au moins sept enfants : I. Claude ou Claude Marcel,
Procureur g�n�ral de Lorraine, du 26 ao�t 1599 au 16
juillet 163, �poque de sa mort; II. Emmanuel, Echevin �
Nancy le 5 f�vrier 1603, puis Gouverneur de la saline de
Marsal; III. African, dont la jeune muse s'est associ�e,
par un quatrain, � celle de ses fr�res a�n�s, pour
saluer l'apparition de la D�monol�trie; IV. Charles,
baptis� � l'�glise Notre-Dame le 3 juin 1598; V.
Claude, dame de Rosi�res-en-Blois et du Breuil; VI et
VII. Deux filles mari�es, l'une � Fran�ois Vernet, de
Neufch�teau, et l'autre � Gaspard Vall�e, Pr�v�t de
Charmes.
De cette famille, � l'origine, si nombreuse, il ne reste
pas aujourd'hui un seul repr�sentant direct. M. Millet
de Chevers, premier Pr�sident de la Cour royale de
Colmar sous la Restauration, se disait l'arri�re-neveu
de Nicolas Remy, et on assure que M. le comte Henry de
Saint-Germain �lev� la m�me pr�tention, mais sans avoir,
ni l'un ni l'autre, aucun acte, aucun titre, qui
�tablisse ce lien de parent� �loign�e. Le premier
poss�dait le portrait du Procureur g�n�ral de Lorraine,
qu'il a l�gu� � sa petite-fille, Mme la comtesse de
Montangon, et le second conserve pr�cieusement, dans ses
archives domestiques, les lellres-patentes par
lesquelles le duc Charles III a conf�r� la noblesse �
son fid�le conseiller le 9 ao�t 1583.
(136) B. 1317, f � 242.- Chevrier, Hist. de Lorr. T. IX,
p. 77, et M�moires pour servir � l'histoire des hommes
illustres... T. I, p. 129.
Apr�s avoir d�finitivement r�sign� ses fonctions de
Procureur g�n�ral en 1606, Nicolas Remy n'avait plus de
gages, lorsque, par un mandement sp�cial du 7 mars 1609,
le duc Henri, en lui maintenant son titre de Conseiller
d'Etat, lui accorda �� doresnavant et par chacun an, au
terme et jour de No�l, sa vie durante, la somme de trois
cens frans. �
C'est � cette derni�re lib�ralit� du prince qu'on doit
de conna�tre l'�poque du d�c�s de Nicolas Remy. On lit,
en effet sur le compte du Tr�sorier g�n�ral de Lorraine,
pour l'ann�e 1612, en marge du nom du Conseiller d'Etat
�m�rite : �� Obiit au mois d'april 1612. �
En pr�sence de cette mention officielle et irr�cusable,
que devient la t�m�raire affirmation de Chevrier que
Nicolas Remy est mort au mois de janvier 1600 !
La date du mois d'avril, d�j� si pr�cise, pourrait le
devenir plus encore.
On se souvient que le duc de Lorraine avait donn� � son
ancien Procureur g�n�ral une somme de 3,000 fr., payable
en trois ann�es cons�cutives, 1611, 1612, 1613, sur les
recettes en bl� de Charmes et de Ch�tel, pour un Recueil
des �dits et ordonnances de la province. Or, Nicolas
Remy n'a profit� que des deux premi�res annuit�s, et sa
seconde quittance porte la date du 13 avril 1612. La
troisi�me et derni�re quittance a �t� donn�e par son
fils a�n�, Claude-Marcel, qui signe tant en son nom
qu'en celui de ses coh�ritiers. Nicolas Remy est donc
mort en avril, et dans la seconde quinzaine de ce mois.
(137) Doemonol. lib. I. cap. 26,p. 165-166 et lib . II,
cap. XI, p.276.
�� Quo magis demiror quorundam in censendis christianorum
moribus inconsideratam, supinamque sapientiam, qui, si
quod nolanis de mane datur signum, quo excitentur
homines ad tam salutares ac pias preces et iis quasi
oscitantibus auris a vellicetur ; id illic� damnent
atque improbent, quia nimirum ab illis usurpatur �
quibus in constituend�, colend�que religione dissentiunt.
(138) Das Lied von der Glocke - M. Duchesne, Le chant de
la Cloche ou le po�me de la vie, M�moires de l'Acad�mie
de Stanislas, ann�e 1866, p. 21-47.
Qui ne conna�t ce petit chef-d'oeuvre, si difficile �
traduire et qui a trouv�, nagu�re, au sein de L'Acad�mie
de Stanislas, un si exact et un si habile traducteur
(139) Boileau, Les embarras de Paris. Satire IV.
J'entends d�j� partout les charettes courir,
Les ma�ons travailler, les boutiques s'ouvrir
Tandis que dans les airs mille cloches �mues
D'un fun�bre concert font retentir les nues
Et se m�lant au bruit de la gr�le et des vents,
Pour honorer les morts font mourir les vivants.
(140) Ce grossier portrait, que reproduit fid�lement la
gravure plac�e en t�te de la pr�sente notice, doit �tre
lui-m�me la copie d'un portraite ex�cut� en 1590. En
conservant � la l�gende de cette copie le mill�sime
primitif et en donnant � Nicolas Remy le titre de
Procureur g�n�ral en la cour souveraine de Lorraine et
Barrois, on a commis un double et �vident anachronisme
car, en 1590, la cour souveraine de Lorraine et Barrois
n'existait pas encore et Nicolas Remy n'est devenu
Procureur g�n�ral que le 24 ao�t de l'ann�e suivante. |