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98�me r�giment d'infanterie - 1914


Journal des marches et op�rations du 98e r�giment d'infanterie, du 2 ao�t 1914 au 6 septembre 1919
Colonel Gaube
Ed. 1924

[...]


CHAPITRE PREMIER
Du 2 Ao�t au 30 Septembre 1914
[...]

De Baccarat � Cirey-sur- Vezouze.

Le 13 [ao�t 1914], � 4 heures, la colonne est en mouvement ; il a plu toute la nuit et le ciel charg� de nuages est encore mena�ant. A 5 heures, nous traversons Rambervillers, et � 8 heures nous sommes dans les bois de la Raffle, au sud de Baccarat. Nous demeurons l� jusqu'� 16 heures ; on mange, on dort, on va aux renseignements aupr�s des cavaliers qui attendent eux aussi � Badm�nil. Ils ont appris par leurs camarades que la cavalerie allemande se montre inf�rieure � la n�tre. Leurs chevaux ne galopent pas, disent-ils ; leurs cavaliers refusent le combat individuel et d�s qu'ils se sentent menac�s, ils se r�fugient derri�re des couverts o� des tireurs post�s re�oivent les n�tres � coups de carabine. Cette tactique encore incomprise est consid�r�e comme un signe d'inf�riorit�.
A 17 heures, nous entrons dans Baccarat que nous trouvons rempli de troupes de toutes sortes.
 

Prise de contact

Le 14, d�part � 4 heures. Cette fois nous allons � l'ennemi, signal� � quelques kilom�tres au nord-est. D�s que nous atteignons le plateau au sortir de Baccarat, nous entendons le canon.
C'est donc bien vrai, nous y arrivons enfin. Le r�giment, en r�serve de D. I. prend d'abord position dans les bois de la Grande Voivre, puis progresse par Xermamont, et vers 19 heures, atteint les abords sud de Saint-Maurice o� il bivouaque dans les champs au sud-ouest, vers la cote 286. Devant nous, une compagnie (10e) et des cavaliers occupent le village en avant-postes.
Quelques bless�s passent dans des autos particuli�res r�quisitionn�es. Ce sont les premi�res douleurs rencontr�es ; elles nous montrent une des r�alit�s de la guerre. Les feux sont allum�s un peu partout ; les corv�es vont au bois et � l'eau.
Tout � coup, vers 21 heures, on crie �� aux armes � et de tous c�t�s on se pr�cipite ; mais ce n'est qu'une fausse alerte.
Une sentinelle, � Saint-Maurice, a tir� sur des groupes qui revenaient de la corv�e d'eau et qui n'avaient pas le mot.
Le calme revient vite, le repas continue ; puis, dans la nuit noire, sous un brouillard �pais, dans une humidit� qui p�n�tre, le silence s'�tablit partout ; on entend des ronflements, le repos a commenc�.
Nuit calme, ponctu�e de ci, de l�, par quelque coups de feu lointains de sentinelles s�rement plus �mues que menac�es.
Au jour naissant, le canon se fait entendre au milieu d'une fusillade nourrie. On prend les armes et on attend les ordres qui n'ont pas encore �t� communiqu�s.
Le 15, vers 7 heures, le r�giment se met en marche dans la direction de Cirey-sur-Vezouze. Entre Neuviller et Br�m�nil, la route sem�e d'effets de toute sorte, nous dit la h�te avec laquelle nos ennemis ont d� battre en retraite. Des bo�tes de conserves vides, des liti�res de paille, des fragments de tables prises dans les fermes marquent les emplacements occup�s la nuit pr�c�dente par les petits postes allemands. A Br�m�nil, nous croisons des bless�s du 121e, qui s'est battu la veille aux portes de Cirey. Les chars des paysans, dans lesquels on a plac� un peu de paille, emportent des grappes de petits bless�s ou quelques grands bless�s couch�s. Ils rient sous leurs pansements tout rouges ; nous les interrogeons pour nous tremper dans leur �me qui conna�t d�j� la souffrance. Apr�s un arr�t de plusieurs heures au sud-ouest du bois de Quaumont, vers la cote 407, nous traversons le village de Parux incendi�.
Dans les d�combres on voit le cadavre d'une femme calcin�e et tenant encore un enfant dans les bras. Au dehors, les traces multiples de tueries inutiles, de d�vastations que rien ne semble avoir motiv�es. Tout r�v�le d�j� la sauvagerie du syst�me de guerre dont nos ennemis ont fait leur r�gle. Le d�sir de combattre cro�t dans l'�me de chaque soldat avide de pouvoir enfin se mesurer avec un adversaire qui n'a encore donn� que des preuves de sa barbarie. Pr�s de Nonhigny, �galement d�vast� par le feu, un uhlan mort g�t dans uni foss� ; c'est le premier cadavre d'ennemi que nous rencontrons ; pr�s de lui, un va et vient continu s'�tablit ; les yeux de nos soldats semblent vouloir puiser dans ce spectacle le calme pour frapper sans piti�.

Cirey.

Avant d'atteindre Cirey, nous traversons, vers le bois de la Haie-de-Tracy, les champs o� le 121� a beaucoup souffert la veille des feux de mitrailleuses ennemies post�es aux abords sud de la localit�. Des habitants cherchent les cadavres � travers champs et les groupent sur le chemin o� des voitures viendront les prendre. La quantit� d'armes d�j� ramass�e t�moigne de l'importance des pertes de nos camarades.
Le 3e bataillon envoy� en avant-garde entre � Cirey aux derni�res lueurs du jour. L'accueil joyeux des habitants nous ait plaisir ; les vieux nous serrent les mains en criant �� Vive la France �. Les Boches sont partis il y a deux heures � peine apr�s avoir cribl� les murs de la ville de balles de fusil. Ont-ils voulu terroriser la population ? Est-ce une manifestation brutale de leur rage impuissante ou simplement l'effet d'une ivresse puis�e aux caves des habitants ? Deux compagnies sont install�es aux issues nord et est pour en assurer la garde. Un flot incessant de troupes nouvelles envahit la localit� ; la place centrale se garnit de plus en plus de batteries d'artillerie, puis de coloniaux. La pluie fait rage, et malgr� tout c'est un va-et-vient continu de corv�es de ravitaillement, d'isol�s qui parcourent les rues et visitent les �piceries pour se procurer quelques suppl�ments, de cavaliers qui portent des ordres. Une bonne humeur �vidente pr�side � tout cela et dit clairement que la fatigue, les privations, le temps n'ont encore eu aucune prise sur le moral des combattants.
Au cours de la nuit du 15, les 1er et 2� bataillons qui avaient �t� arr�t�s dans les bois de la Haie-de-Tracy, traversent la localit� pour gagner Tanconville o� ils devront cantonner ; mais, quand ils y arrivent, ce village regorge d�j� de troupes et force est de passer le restant de la nuit sur les bords de la route.
Le 16, le r�giment revient � Cirey, o� il est maintenu toute la journ�e � la lisi�re ouest, en r�serve de C. A. Les trains nous rejoignent dans la matin�e et permettent de ravitailler les troupes. Heureusement le soleil a reparu et l'on drogue ainsi sans trop d'impatience.
Au loin, aucun bruit d'artillerie, pas un coup de fusil. Nous savons que nos avant-gardes poursuivent l'ennemi qui n'oppose aucune r�sistance appr�ciable. D�j� elles ont p�n�tr� en Lorraine annex�e, et ce fait nouveau vient gonfler nos coeurs d'une douce joie qui contribue pour beaucoup � faire oublier les mis�res physiques des jours pass�s.

La fronti�re franchie.

Apr�s une bonne nuit � Cirey, nous repartons le 17, dans la direction de Bertrambois. C'est la derni�re localit� fran�aise avant la fronti�re franchie � midi sous la pluie qui tombe dru.
Apr�s le long d�fil� des colonnes d'artillerie qui nous ont pr�c�d�s, la route forme une nappe d'eau et de boue ; nous devons constamment l'abandonner pour passer � travers bois. Un soldat emporte le poteau-fronti�re : �� Je le planterai � la nouvelle fronti�re �, dit-il. Des batteries d'artillerie lourde, enlis�es dans la boue, ne peuvent plus avancer. Vers 14 heures, nous atteignons la lisi�re nord et le r�giment prend une formation de rassemblement sur la croupe sud-ouest de Niderhoff, face au nord-est.
Devant nous de larges ondulations d�couvertes, avec, dans le lointain, de grands bois sombres. Sans �tonnement et comme si l'ennemi n'existait plus, on s'�tablit en dehors des bois.
Mouill�s jusqu'aux os, nous allumons des feux de bivouac.
Enfin, apr�s plusieurs heures ainsi pass�es, nous nous remettons en marche et nous traversons bient�t Niderhoff, premier village lorrain annex�. Les habitants regardent ; leurs figures ne disent ni l'�tonnement ni la satisfaction. Que pensent-ils ? Comme nous aimerions le savoir ! Mais la marche nous entra�ne, et � 18 heures nous arrivons aux m�tairies de Saint-Quirin o� nous cantonnons.
Un vieillard � la figure bien fran�aise, qui s'est d'abord tenu � l'�cart, se laisse peu � peu aller � la confiance ; il causerait volontiers, mais il redoute les repr�sailles possibles apr�s notre d�part. Ses l�vres ne peuvent contenir les mots d'amour qui disent toutes ses esp�rances; il! parle de son jeune temps; il prononce �� France � avec une v�n�ration qui le soulage, mais aussi d'un ton de crainte qui dit ce qu'il aurait � redouter s'il �tait trahi.
Des reconnaissances d'officiers mont�s sont envoy�es dans les bois en vue de la marche du lendemain ; l'�paisseur des fourr�s et la boue ne leur permettent pas d'avancer.
Le 18, vers 10 heures, nous arrivons � Nitting. Nos avant-gardes ont atteint Hesse et Schneckenbusch. Le r�giment �tant en r�serve de D. I, re�oit l'ordre d'organiser la sortie nord de Nitting et d'y creuser des tranch�es. Le commandant Gaube convoque le maire et lui prescrit de mettre � sa disposition des travailleurs munis de leurs outils. �� Que ceux qui sont contents de voir la France revenue avec nous, se mettent au travail et nous aident. � Tous ob�issent et, se m�lant � nos hommes, creusent les tranch�es.
Vers 14 heures, la progression est rapide et la plaine qui s�pare Nitting de Hesse est travers�e en colonnes doubles largement ouvertes. A quelques centaines de m�tres au sud de Hesse, le r�giment est arr�t� ; on reste sur place dans la m�me formation et on attend. Comme la fatigue et la faim nous font trouver de plus en plus lourds ces arr�ts inexpliqu�s, la belle humeur nous quitte et on entend quelques plaintes. Enfin quand la nuit, est faite bien noire, l'ordre est donn� de cantonner � Hesse.
Nous sommes pr�venus cependant que les troupes y �tant d�j� tr�s nombreuses, la place affect�e au 98� sera tr�s r�duite. Les fourriers vont n�anmoins � la Mairie pendant que les bataillons s'�tablissent au bivouac contre le village.
D'immenses feux sont vite allum�s et bient�t on entend � travers les cris multiples �chang�s, le grincement caract�ristique des moulins � caf�. Brouhaha d'un champ de foire illumin� des feux de la Saint-Jean ; roulement des lourdes voitures de artillerie qui �tablit le parc au sud-est de Hesse ; cris de conducteurs encourageant leurs montures ; v�hicules qui, ayant pris dans l'obscurit� le tournant trop court, ont vers� dans le foss� et que des dizaines d'hommes essayent de redresser au milieu d'appels qui s'entrechoquent ; tel est le tableau bruyant de ce coin de terre o� de toutes les pens�es semble �cart�e la moindre pr�occupation de l'ennemi.
Nous passons la journ�e du 19 en position d'attente dans les champs, � la lisi�re sud-ouest du bois de Yungford, au nord de la voie ferr�e, en r�serve de D.I., et, la nuit venue, nous cantonnons � Hermelange.

Sarrebourg.

20 ao�t. - Le soleil se l�ve radieux. C'est le premier jour de combat du r�giment.
Le bataillon Besson (2�) se porte au bois de Yungford en soutien au 16� r�giment engag� � Schneckenbusch ; le bataillon Fabregues (1er) � gauche, marche de Hesse sur la ferme Mouchenhoff; le bataillon Gaube (3�) demeure momentan�ment en r�serve de D. I., au sud-est de Hesse. Une section de ce bataillon est envoy�e � Hesse pour faire abriter les habitants dans l'�glise et veiller � ce qu'aucun signal ne soit fait aux Allemands du haut du clocher. On a en effet acquis la certitude que des tirs d'artillerie ont �t� provoqu�s de cette mani�re sur quelques-unes de nos formations.
Vers 8 heures, le bataillon Besson se porte � gauche du 16e fortement contre-attaqu� vers Schneckenbusch par d'importantes forces ennemies. Le bataillon Gaube se porte au bois de Yungford. La compagnie de Beno�t, du bataillon Gaube, appuie bient�t le mouvement du bataillon Besson; mais insuffisamment soutenus par l'artillerie, 16� et 98� doivent se replier sur le bois de Yungford.
Les Allemands ne poursuivent pas.
A 17 heures, l'ordre d'attaque g�n�rale est donn� � toute la division. Au 98e, le bataillon Besson conservant la droite, doit se porter sur Schneckenbusch, o� il franchira le canal de la Marne au Rhin pour marcher sur Buhl, � l'est du ruisseau ; le bataillon Gaube au centre doit passer le canal � Neuhoff puis se porter sur Buhl et Neumuhl. Le bataillon de Fabr�gues � gauche, progresse plus � l'ouest du canal.
En voyant d�boucher notre attaque des bois au sud de Schneckenbusch, le tir de l'artillerie allemande prend une grande violence. Tout le front de bataille s'allume d'incendies provoqu�s par le feu dans les villages et dans les fermes. Mais partout la r�solution de marcher s'affirme par l'attitude superbe des troupes au milieu des flammes et des toitures qui s'�croulent.
�� Les braves gens �, ces mots reviennent constamment � la pens�e de ceux qui les voient � l'oeuvre.
A notre droite, dans Schneckenbusch, la lutte est terrible et le bataillon Besson ne peut pas franchir le canal.
Au centre, le bataillon Gaube et le 62� bataillon de chasseurs � pied franchissent le canal malgr� le feu intense que l'artillerie allemande dirige sur le pont de Neuhoff. Le d�ploiement se fait rapidement sur la rive nord et la marche sur Buhl est reprise; le bataillon de Fabr�gues � gauche, les chasseurs au centre, le bataillon Gaube � droite.
Malgr� la fusillade tr�s violente, nos tirailleurs gagnent du terrain, mais il se fait d�j� tard et bient�t le cr�puscule envahit tout. On ne distingue plus tr�s bien ce qu'on aper�oit ; une ligne sombre et impr�cise pr�s du sol indique seulement la position des fantassins allemands sur lesquels nous dirigeons nos feux.
La nuit est venue ; des lueurs d'incendie nous r�v�lent des mouvements de repli chez l'ennemi, et tout � coup, le silence s'�tablit. On n'entend plus que la voix des bless�s r�clamant du secours: Gri�vement atteint, le porte-drapeau a disparu. En le recherchant, on trouve le drapeau � terre ; on le remet au commandant Gaube.
La nuit profonde et silencieuse nous enveloppe ; les bless�s appellent ; des falots rouges commencent � sillonner la plaine ; des sonneries de trompettes dont nous ne connaissons pas la signification sont entendues du c�t� de l'ennemi ; tout devient myst�re, douleur et inqui�tude !
Il est impossible de continuer la marche sans savoir o� en sont nos voisins ; des patrouilles sont envoy�es dans toutes les directions. Pourrons-nous encore avancer ? Allons-nous �tre contre-attaqu�s ? le doute nous tiraille. Quoiqu'il en soit, apr�s cette dure journ�e d'attaques, qui, malgr� les lourdes pertes subies, nous ont permis de faire reculer l'ennemi, il ne saurait �tre question de se reporter en arri�re.
Les recherches des patrouilles n'ayant donn� aucun r�sultat, aucune liaison avec le chef de corps ne fonctionnant plus, le commandant Gaube se d�cide � aller en personne � la recherche du colonel, afin d'�tre fix� sur la situation du r�giment et sur les d�cisions � prendre. Au pont du canal, il trouve le lieutenant Marenda qui lui apprend que le colonel a �t� l�g�rement bless�, que les attaques du bataillon Besson n'ont pas pu d�boucher, que le r�giment a beaucoup souffert et que les d�bris des unit�s �puis�es attendent tapies contre les berges du canal, les ordres du commandement.

Repli sur Hesse.

Enfin, au milieu de la nuit, parvient l'ordre de se replier sur Hesse o� l'on attendra des instructions nouvelles pour reprendre l'attaque, le lendemain. Il pleut, la fatigue est extr�me, car c'est la troisi�me nuit sans sommeil ; depuis plusieurs jours, on vit Dieu sait comment !
Rieni � faire dans cette nuit noire pour essayer de se regrouper ; on s'empile dans les maisons, on s'installe sous les toits que l'artillerie a respect�s et, dans ce d�sarroi, s'il est impossible de savoir ce qui se passe dans les coeurs, aucune plainte, aucun murmure n'en r�v�le le trouble profond.

Retraite sur Nitting.

Au cours de la nuit, l'ordre arrive de se replier sur Nitting et de se regrouper. Les vides que la bataille a creus�s dans nos rangs commencent alors � �tre d�nombr�s. Nos pertes en officiers et en soldats ont �t� cruelles. Le commandant de Fabr�gues passe pour avoir �t� tu� de plusieurs coups de ba�onnette ; le sous-lieutenant Renaudin a �t� tu� ; les sous-lieutenants de Morgues, Brunet, Cognet, Lenouvel ont disparu. Le sous-lieutenant Labroqu�res a �t� tu� d'une balle � la t�te au cours d'une reconnaissance sur le pont de Schneckenbusch, en cherchant � rep�rer une section de mitrailleuses qui g�nait sa marche. Le capitaine Garnier, gravement bless� au ventre et le capitaine Migat qu'on avait d�pos�s dans une maison de Hesse n'ont pas pu �tre emport�s. Le lieutenant Descombat, porte-drapeau, a �t� emmen� ainsi que les lieutenants B�n�detti, Hahn, Treuvey. Malgr� les efforts multipli�s de toute la nuit, beaucoup d'autres bless�s ont d� �tre laiss�s sur place, faute de moyens de transport.
A 4 heures du matin, le r�giment regroup� tant bien que mal, effectue son repli sur Nitting, et prend position aux lisi�res du village, dans les tranch�es creus�es quelques jours auparavant.

Retraite sur les bois de la Mini�re.

Vers midi, l'ordre est donn� de franchir la Sarre sur les passerelles install�es par le g�nie au sud-ouest de Nitting et de se replier sur les bois de la Mini�re. L'artillerie lourde allemande qui voit commencer le mouvement, tire sur Nitting. Le bataillon Besson prend position sur les premi�res pentes, au sud de Lorquin, pour servir de soutien � l'artillerie, pendant que les deux autres s'�tablissent � la lisi�re m�me des bois, face au nord. Les hommes ext�nu�s de fatigue s'endorment aussit�t arr�t�s.
A 17 heures, aucun �v�nement nouveau n'est survenu ; le feu de l'artillerie allemande s'est calm� ; aucune infanterie ne s'est encore montr�e. Nous attendons las et pr�occup�s, quand un cavalier arrive au galop ; il faut se replier imm�diatement sur Hattigny, mais l'artillerie allemande en batterie vers Aspach nous interdisant la route au sud des bois, le r�giment doit suivre un itin�raire d�tourn� par Fraquelfing et gagner Bertrambois.
Quelques �l�ments passent cependant par Hattigny. A Bertrambois les difficult�s deviennent s�rieuses, car nous nous trouvons m�l�s � des troupes d'artillerie, d'infanterie et de cavalerie qui battent en retraite et arrivent de toutes les directions.
Il faut reformer une seule colonne sur la route de Cirey, tandis que des unit�s qui se trouvaient d�j� � Cirey sont port�es sur Bertrambois pour couvrir la retraite. Alors commence une marche p�nible, excessivement lente, constamment g�n�e par l'encombrement de la route et par le croisement des unit�s. Et cela dure des heures enti�res !
Enfin, vers 23 heures, nous arrivons � Cirey. Pendant qu'on attend les ordres pour le stationnement, les hommes s'assoient au bord de la route et s'endorment. Le canon ennemi tonne toujours au loin, vers le nord. Sa voix qui nous poursuit dans la nuit, souligne davantage encore la situation et fend l'�me. Enfin, apr�s une heure d'attente, l'ordre arrive de cantonner � Fr�monville que d'autres troupes occupent d�j�. Nous y arrivons vers une heure et on se tasse comme on peut dans les locaux encore disponibles.
Pendant cette marche en retraite, le commandant Besson a soudain disparu du c�t� d'Hattigny. Pr�c�dant son bataillon et parti � cheval dans la direction d'Hattigny pour faire une reconnaissance de terrain, il n'a pas reparu. Le colonel est � bout de forces ; le commandant Gaube, qui reste seul officier sup�rieur, assure l'ex�cution des ordres du commandement. La nuit n'est pas longue et d�s le lever du jour, il faut reprendre le mouvement de repli, en direction d'Harbouey.

Retraite sur la Mortagne.

A Harbouey, le r�giment est rassembl� dans un champ et les commandants d'unit�s regroupent leurs hommes. La fatigue est immense, mais chacun r�agit sur lui-m�me. Nos hommes sont affam�s. Les arbres fruitiers sont mis au pillage.
La troupe ne paraissant plus capable de soutenir un nouveau combat avant d'avoir pu prendre un peu de repos, le g�n�ral de division ordonne un repli par �chelons successifs pour prot�ger la retraite. Nous traversons Ancervillers et vers 12 heures nous arrivons � Montigny. Les convois de ravitaillement qu'on pensait y trouver, n'ont malheureusement pas pu nous rejoindre ; on ramasse alors les pommes de terre des champs, on d�valise les arbres, on allume des feux et chacun s'alimente un peu. Ayant mis sac � terre, tout � leur pr�occupation de cuisine, reprenant quelque repos d'esprit par ce seul fait que, prot�g�s par une arri�re-garde ils n'ont plus la hantise de l'ennemi, les nommes se sont vite ressaisis, les conversations se font plus bruyantes.
A 14 heures, sous une pluie torrentielle, nous reprenons la marche par Reherrey, Brouville, Azerailles, et � la nuit, nous atteignons le cantonnement de Glonville.
Le 23, la marche en retraite recommence et vers 10 heures nous arrivons � Fontenoy. Nous sommes d�j� brouill�s avec le calendrier et la vue des gens en habit de f�te et se rendant � l'�glise nous dit que c'est aujourd'hui dimanche. Nous faisons Une grande halte dans les vergers et chacun va de maison en maison en qu�te d'aliments. Les habitants sont d'ailleurs tr�s accueillants et beaucoup se privent de la messe pour pr�parer � manger � ceux qui le demandent. �� Prenez nos mirabelles, dit un paysan, il vaut mieux que ce soit vous qui en profitiez, que les Allemands. �
L'aum�nier de la division, l'abb� Lestrade, dit une messe � la m�moire de nos morts. A 13 heures nous repartons ; nous traversons Domptail, Xaff�villers, puis Saint-Maurice-sur-Mortagne et nous arrivons � Hardancourt o� nous devons cantonner. Le commandant Gaube fait d�ployer le drapeau et tout le r�giment d�file en lui rendant les honneurs. Aucun des anciens n'a perdu le souvenir de cette manifestation.

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