Marcel Rol (1876-1905), créateur de l'Agence Rol

Le 17 septembre 1905, après une journée de reportage photographique sur les pentes du mont Ventoux, Marcel Rol monte à bord de la voiture du coureur automobile Jules Collomb. Celui-ci le conduit à Carpentras, où il doit prendre le train pour Paris. Le véhicule va trop vite et fait une embardée en freinant dans un virage : Marcel est éjecté de la voiture et meurt sur le coup.  

C’est la fin brutale d’une « success story ». 

La presse de l’époque salue le caractère de l’homme et son habileté professionnelle.

"Nous l'aimions tous" dit Jean Lafitte dans L’Echo de Paris, « [ce] photographe-reporter si sympathique ».

Le Monde illustré ajoute qu’il était "très intelligent, très adroit", et Georges Lefèvre dans L’Auto assure que "c'était un grand, fort gaillard plein de vie, travailleur acharné, qui à force de persévérance, avait réussi, après des débuts très pénibles, à forcer la fortune à lui sourire". 

Marcel Rol est issu d’une famille provençale. Son grand-père paternel Jean-Joseph Rol (1819-1896) s’était lancé dans le commerce des graines de vers à soie à Vaison-la-Romaine. Marcel y naît, mais passe son adolescence à Paris où ses parents sont marchands de vins et restaurateurs vers 1890. Il étudie au lycée Charlemagne, puis effectue son service militaire entre 1896 et 1899. Il atteint le grade de sergent. 

Sa carrière de photographe débute vers 1900. Après un séjour à Londres en 1901, sans doute pour se former, il est commis chez le photographe Branger. Au cours de l’année 1903 Marcel travaille pour la revue Armes et sports. Son nom et son visage apparaissent alors dans la presse.

Son rêve, créer une agence, fournir à la presse des images qui portent son nom, se réalise dès le 24 décembre 1903. L’agence s’appelle Rol-Tresca car Rol s’est associé avec Louis-Pierre Tresca (1873-1957), autre photographe d’Armes et sports. Le siège de l’agence est fixé au 37 de la rue Joubert, dans le 9e arrondissement de Paris. Leur collaboration cesse à la fin de l'année 1904 et Marcel Rol crée alors une nouvelle agence appelée Marcel Rol et compagnie.

Marcel et ses collègues de l'agence parcourent la France et une partie de l’Europe au cours des années 1904 et 1905 même si beaucoup de photographies sont prises à Paris et dans les environs proches.

Dès 1904, Marcel réalise des prouesses en fournissant la presse très rapidement. Le 8 avril 1904, il se trouve à Monaco et transmet à son agence des photographies qui vont paraître deux jours après dans la très rare presse quotidienne illustrée de l'époque, en l’occurrence dans le New-York Herald, édité à Paris.

Marcel est souvent aidé par les services logistiques des revues : un chauffeur l'emmène, accompagné d'un journaliste - Edouard Pontié à plusieurs reprises - sur le lieu des reportages. Mais en général c’est le train qui amène le photographe et remporte les plaques de verre photographiques au retour.

Au cours de l’année 1904, Marcel réussit à faire publier au moins 30 photographies par chacun des périodiques illustrés suivants : Le Monde illustré, Paris illustré, La Vie au Grand Air, Touche à Tout, L’Automobile, Le Yacht. Son principal commanditaire est la revue Armes et sports (unie à Armée et marine en 1904) qui publie au moins 200 photographies de l’agence.

L’année 1905 est celle du véritable essor. Du 1er décembre 1904 à fin juin 1905, Marcel Rol fournit très régulièrement en photographies le tout nouveau journal sportif Les Sports, qui le qualifie à plusieurs reprises d’envoyé spécial, notamment à Monaco où il est présent le 30 mars 1905, un jour après son mariage à Paris.

Il répond toujours à des commandes du journal Armée et marine, pour lequel il se déplace à Brest le 10 juillet 1905. 

Marcel prend une quarantaine de clichés de la flotte française et de l’escadre anglaise réunies pour les fêtes de Brest, manifestation de l’entente cordiale entre les deux pays. Deux jours plus tard, les journaux Le Matin et le New-York Herald publient quelques-unes de ces photographies conservées par la BnF. La revue Armée et marine en publie d’autres le 20 juillet, dont la suivante :

L’efficacité de Marcel est remarquée par les journalistes de L’Auto. A partir du 7 juillet 1905 les photographies de son agence paraissent presque chaque jour dans le journal sportif le plus diffusé. Il remplace Maurice Branger, qualifié jusqu’alors de « photographe de L’Auto ». 

Marcel Rol est devenu incontournable : ses photographies paraissent dans une trentaine de périodiques en France et s’exportent aussi en Angleterre (The Graphic), en Espagne (journal ABC, revue Ilustracion artistica), aux Etats-Unis (Motor Age). 

Les 9 et 10 septembre 1905, Marcel photographie en Italie les coureurs automobiles qui vont participer à la Coupe Florio : la BnF conserve 27 photographies prises par Marcel lors de cet événement organisé à Brescia. Le portrait de Raggio, vainqueur de l’épreuve, fut publié par L’Auto (le 11 septembre), Le New-York Herald (le 12 septembre), Le Monde illustré et Le Sport universel illustré. 

Malheureusement une semaine plus tard, un accident stoppe son odyssée. Il n'a pas le bonheur de connaître sa fille, prénommée Marcelle, née le 29 septembre 1905. Toutefois les clichés qu’il a pris le jour de sa mort lui ont survécu, révèle L’Automobile. En effet, la BnF en conserve quelques-uns. Et malgré la mort de Marcel, l'agence Rol allait encore exister 32 ans.

Pour en savoir plus :

1. Article de blog sur les liens entre les images du fonds Rol numérisées et leurs parutions dans la presse 

2. Lien vers les photographies Rol parues dans la revue L'Automobile, ajoutée dans Gallica en juin 2025 après sa numérisation effectuée au centre Joël-le-Theule de Sablé

3. Lien vers les photographies Rol parues dans le journal The New-York Herald en 1904-1905

4. Lien vers les photographies Rol parues dans L'Illustration entre 1904 et 1907

5. Lien vers les photographies Rol parues dans Armes et sports entre 1904 et 1907