l'.'t'ssssr. 'ES ME y?iï Mmïiï i'fm •>**£• 4 * #cir 'S39ó~ \ I V' A * Otz C L R lOSsTKX D£ LA NATLRK ET DE l. ART sjpi&X! isáík-ïA à' !>' > CURIOSITÉS de la nature ET DE L’ART, SUR LA VÉGÉTATION; 0 u L’AGRICULTURE ET LE JARDINAGE DANS LEUR PERFECTION; Où Von vcit Secret de la multiplication 6u Flcd, & les moyen* d’aug-mcnrer consi Jérablement le revenu des bien* âe li Campagne ; De nouvelles découvertes pour grossir , multiplier L embellir les Fleurs Ôc les Fruits, &c. Nouvelle Édition, rev&e , corrigée £> augmentée. I' De h culture du Jardin Potager,' D- De U culture âi, Jardin TruUîèr. Pstr M. l' Abbé de Vauemoni. Ch ci J_ PREMIERE PART DEí (y ' A PARIS, ^RENT DURAND, rue sT Giitíon. M. D C C, LIII. ^ re c Approbation &■ Privilège âu Roi. â T PRÉFACE. . _ jlj n’y a point de partie dans la Physique } qui nous doive tant intéresser 3 que la Végétation des Plantes ; non-seulement parce que la culture de laTerre est le premier Art dont les Hommes se sont occupés, mais encore par futilité qu on en retire,& parle plaisirqu’ii y a d’élever des fleurs ôc des fruits. Les Hommes ne vivoient,dans les qflus beaux jours du monde, que des seulsfruits de la terre : &: encore a présent on compte les fruits par- ^i nos délices, & entre les choses nécessaires. Nous tirons des Plants nos aìimens les plus ordinaires, des secours pour le rétablisse- Ist de notre santé, quand la ma- d? Ini a donné quelque atteinte. AJans l’état le plus florissant de la pépubliq ue Romaine, la louange a plus flateuse qu’on put donner à a P R t F A C E. unCitoyen de Rome,étoit de dire: qu-il étoit un bon Laboureur de ses terres.Et c’étoit à la charrue,qu’on alloit chercher ces Hommes incomparables, qui après avoir commandé les armées, battu les ennemis 6c rétabli la tranquillité dans l’Etat, s’en retournoient,du milieu des honneurs du triomphe, droit à lëur campagne labourer leurs tsrres. Je ne voudrois pas renvoyer les Hommes aux occupations pénibles de la vie Champêtre. Nos mœurs ne font plus les mœurs ds ces heureux tems. L’amour du repos, le luxe, la bonne chere, la volupté ont pris le dessus, & la culture de la terre n est plus le partage que des Hommes, qu on estimS malheureux, & nés pour le travail- Mais du moins je souhaiteroi 5 qu’on prît plus d’intérêt à faire va' loir ses terres, & qu on s’appliquá ( à perfectionner f Agriculture Lc h Jardinage, comme on a essayé df perfectionner les autres Arts q^ e: és D 11 n- m- ie- ms ievt coît :urs : leS éni- Nos :s d« ure- avo* ultU' ttag® KiwS ava’d teroi 5 re va' liquâ ( efic-l* ìjé ->! :ts q u ' Préface. font bien moins utiles à la vie. Nous Noyons dans les AÏÏes Philosophiques, de la Société Royale d’An- gleterre, que les Grands ôc les Sa- Va ns personnages qui la compo- font, ont fait là-dessus de belles découvertes. Mais ce n’eít pas assez que les Doctesayent de nouvelles lumières fur la culture ôt le ménage des terres ; il faut que ces con- noiflànces importantes fe répandent parmi les gens de la Campagne,auxquels ces fortes de travaux font à présent dévolus. En publiant c et ouvrage de Physique, j’ai def- foin de faire passer de chez les Sa- ' ast ts parmi le Peuple,tout ce qu on a découvert d’utile depuis quelque le ms, tant dans l’Agriculture, que dans le Jardinage, asm que tout le ^onde en puisse profiter, & qu’en ^ r< s a nt l a terre de nous donner de P u s abondantes & de plus riches Ornons, nous n’ayons plus sujet Appréhender ces affreuses difet- es de bleds qui désolent de fois-à a ntre la Ville ôt la Campagne. Je a if P R É F A e E. me ferois un plaisir singulier dé procurer par tout Tabondance-Cest dans cette vue que je communique dans ce Traité,toutes les expériences qu on a faites fur la multiplication du bled. Je ne puis pas comprendre commentilya desgens capables de faire mystère de secrets, pour la publication defquels on de- vroit, ce me semble, faire sonner la trompette : Certes il faut être dépourvu d’humanité, ôc avoir oublié que les Hommes font nos frétés, pour leur céler ce qu’il leur importe de fçavoir. J’enfeigne volontiers plusieurs moyens d’augmenter considérablement le revenu des biens de la Campagne,en communiquant la fertilité àla terre, & la fécondité aux Animaux.* Et je croi- rois n être pas digne d’être compté parmi les Hommes, si je cachois quelque chose là-deíïus. Dans la premiere Edition de cetf Ouvrage, j’ai expliqué avec plus d’étendue, qu’on n’a jamais fait,les Principes de la Végétation: mais Fr e’face. e omme il y a beaucoup de gens destinés à cultiver la terre, qui ne font pas accoutumés à découvrir dans les Principes toutes les conséquences qu’on en peut tirer pourla pratique, j’ai été obligé dans cette nouvelle Edition , d’appliquer les Principes de la Végétation à la pratique de ^Agriculture & du Jardi- riage, ainsi que je me l’étois d’abord proposé, comme il paroît par le ti- • tredu Livre : &ce que je ne pus a- lors exécuter par des raisons qu il importe peu as Public de sçavoir. C’est pourquoi j’ai ajouté à mon Ouvrage une seconde Partie, là on je donne tous les préceptes qu’on peut souhaiter, pour réussir avec de très-utiles ressources , dans la culture des Terres labourables, & de tous les Jardins,quissontaujour- d hui l’objet des foins,& les délices ? s Personnes curieuses , & de la P lu s haute condition. Je ne me fuis P as feulement appliqué à prescrire les régl es qu il faut suivre, dans la culture des Plantes, qui nous four- a iij ? R E’ F A C E. nissent la pi us grande partie de nos alimens, mais je me fuis encore attaché à donner la maniéré de bien élever les Plantes à fleurs, & les Plantes qui font usuelles dans la Médecine ; & je renferme une matière fi vaste &. fl intéressante, dans quatre fortes de Jardins, qui íont le Jardin Potager, leJardinPrui- tier, le Jardin à Pleurs & le Jardin deSotanique , ou de Plantes Mé- decina!es,quoiqu’on les puiífe fort bien cultiver toutes dans un seul ôc même Jardin. J’efpere que le Public , qui a fait tant d’honneur à la premiere Partie , où je ne traitois que des Principes de la Végétation , recevra avec plaisir la seconde , où je donne tous les détails nécessaires,pour obtenir de la terre le fruit des travaux,qui font indispensables dans la pratique de l’Agri- culture & du Jardinage. Inattention que j’ai eue, pendant dix ans que j’ai demeurai à Versailles , à observer tout ce qui se pratique, durant le cours de l’année, dans le Pre’facë. Potager du Roy, m’a mis en état de Pouvoir parler avec certitude, de Ce qu’il convient de faire pour la culture des Plantes Potagères, &: des Arbres fruitiers ; quand je n’au- r pis pas eu d’ailleurs autant de curiosité que f en ai eu toute ma vie, pour m’instruire de tout ce qui regarde le Jardinage,qui m’a toujours paru la plus belle & la plus utile partie de laPhy sique.Ceux qui conquissent la magnificence du Potager du Roy, & quifçavent que ce superbe Jardin est l’ouvrage de feu ^ïonsieur de la Quintinie, le plus expérimenté Jardinier qui ait ja- rnais été, ne douteront pas que ce ne . s °it la meilleure Ecole , où l'on Paisse apprendre la culture des Plantes, sur-tout si l’on considéré ssue ce Potager a été fait dans un endroit qu on n’auroit jamais choi- 11 j d on avoir pû en trouver un au- îre. C’est l e plus mauvais fond qu’il y a it peut-être au monde ; & l’on a eu a combattre & à vaincre, par des a itij P R E’F A C E. travaux infinis , ôc par des dépenses immenses,& qui passent i’imagina- tion , tout ce que la Nature pouvoir opposer de plus dur, de plus ingrat ôc de plus impraticable. Mais de qusi ne vient-on point à bout, lorsqu il s’agit de servir un Maître comme le nôtre? Dans mes difficultés Ôc dans ce que je n ai pas pû voir par moi-même, j’ai consulté les plus habiles Jardiniers, ôdes Ecrits de ceux qui ont fait part au Public de leurs pratiques ôc de leurs expériences. J’ai tâché d’assaisonner ces occupations de la vièrustique, de secrets curieux pour les Fleurs, ôc même pour les Fruits. Les jardins par leur beauté, par í’abondance ôc par les innocens délices qu on y trouvera, deviendront des Paradis terrestres. C’est pour cela que de tems en tems je tâche d’élever,vers l’Au- teur de la Nature, l’esprit par des spéculations philosophiques ôc su-? blimes, que j’ai accommodées, au tant que j’ai pû, à lapottée de toutes P R E* F A C E. les personnes qui pourront les lire. Ên découvrant tout le merveilleux du grand spectacle delaNatu- re dans la végétation desPlantes, je ne fais appercevoir tous les prodiges qui s’y font, que pour faire re- connoître qu’il faut nécessairement que la matière qui est route brute,ôc incapable de fe donner jamais à elie-même le mouvement, soit mue,ôt déterminée par une Intelligence infiniment sage^ôc toute puissante, pour produire des phénomènes si surprenans , & si propres à étourdir & à déconcerter notre orgueilleuse raison. C est ainsi que Grenade passe en revue preíque tout l’Univers, asin d en tirer d’excelleas sujets de méditation. Le Cardinal Bellarmin Jésuite na-t’il pas composé un Li- spirituel dans lequel il conduit •^me fidèle , par les Créatures , C0stttn e par autant d’échelons au ^reateur ; car, comme dit S. Paul, ' e $ perfections invisibles de Dieu , fa P H i$ance éternelle , fa Divinité font P R E’ F A C E. devenues visibles depuis la création du Monde , par la connoijsance que ses Créatures nous en donnent. Rom. ch. i. v. 20. Sainte Thérèse n’a -1 - elle pas rangé parmi les disgrâces de son sé- xe, le chagrin de n’avoir point les entrées dans les Ecoles des Philosophes , afìn d’y philosopher sur les secrets de la Nature? N’y a-t-il pas, dìt-elle, plusieurs choses dans le Ciel, dans les Eléments & dans tout l’ÍJnivers, qui nous sont cachées, & dont la connoissance nous feroit un aide à la piété ? Quel trésor de consolation ne trouve son pas dans la vue de tant de merveilles queDieu a opérées précisément pour nous dans la région du Monde élémentaire? Tout cela nous éléveroit à Dieu, & nous fourni- roit d’amples argumens pour célébrer fa gloire, fa puissance & ses miséricordes. C’est ainsi que cette sainte fille se plaignoit des usages du monde, qui interdiscntaux femmes l’entrée du Licée. h. de la Voie. P R E ï A C E. f a rf. Et L. du Château de l Ame , c hap.tj . habit. 5. II est certain que la contemplation des Cieux, de la~Terre & de la •Mer, présente à l’esprit d’admira- bles sujets de méditation. Ainsi Isaac alíoit le soir dans son champ, méditer les grandeurs de Dieu, par l’inspection des choses naturelles : à egrejsusfuerat ad meditandum in a S ro > inclinata jam die. Genef. cap . Xfh. v. 63. Jamaistems, & lieu, n ont été mieux choisis, pour se re-' €u eillir,ôtpour s’occuper delaSa- § e ffe, de la Justice, ôt de la Bonté de Dieu. J e crois avoir donné à cet Ouvrage toute la certitude, & l’évi- dence, qu’on peut éxiger en matière de Physique, où tout se dé- Cl ; de par le Raisonnement & par l'Exigence , qui doivent mutuelle- IÏXent s’appuyer & se soutenir. On trouvera que je n’ai point séparé c cs deux choses, & qu’elles marchent dans cette alliance qui fait toute la solidité de la Physique. Le P R E’ F A C E. raisonnement & l’expérience sont par-tout de concert. Je ne produis point d'Expérience, que je ne l’é- clairciffe , & ne la rassure par le raisonnement ; & pareillement , lorsque j’employe le raisonnement , je le justifie aussi tôt pat ì’Expérience, qui îe suit de si près, , dans le ij. Chapitre de son kpitre aux Ephésiens, lots qu après a Voit dsi q Ue p ar { a Naijsance natu~ re ^ e , nous étions enfans de colore, Mamus Naturâ jìliì irœ j il ajoute cnsiihe t Par la Grâce yous avez b P R E* F A C E. été sauvés , Gratìâ ejîis fahatì. Je déclare donc, que quand je nie fers de ce terme, c’est pour signifier ce que Dieu opéré dans les Mixtes,conlmesont,les Minéraux» les Plantesjôc les Animaux, parles loix générales du mouvement, oìt il a mis, & où il entretient la matière. Ces loix font le ressort, la vertu élastique, d'où résulte tout le mouvement des parties, soit sensibles, soit insensibles de la matière , dans l’ordre de la Nature. Ces loix sacrées , auxquelles Dieu ne déroge point,font laMécanique de tous les Phénomènes, qu'on observe dans le grand Automate de l’Univers. Ces loix font les principes du mouvement, du Repos , de la Contexture, de T Arrangement, & de toutes les Variations qui surviennent dans la matière , dont le Monde est composé. Ces loix enfin, c est ce que j'appel- le la Nature. Et en ce sens la Na- . ture est la cause de tout ce qui ss fait, & de tout ce qui se produft Préfacé; dans les substances matérielles. Maintenant nous célébrons la Nature , fans craindre de faire une chimère, ôc d’encenser une Idole, qui n est rien ; puisque par ce terme, hous entendons les loix générales du mouvement, dont Dieu est 1 auteur & le modérateur. Nous dirons que la Nature,ou le Sistême de ces loix , est ce que Marsile Fi- cin appelle f Organe , l’Art, l'Ins- trument de la Divinité, l’Œuvre de la Providence, le Mécanisme de Dieu : Natur'a Inftrumentum Di- umitatis , Ars Uei , Inftrumentum Providentiœ Dei , artificiofum Or- ganum. Nous ajouterons avec le même Philosophe , que la Nature, c est à-dire , la matière mise en mouvement, selon l’adorable sagesse de ces loix divines, est com- me un grand livre plein de la Divi„ 2 : » lin miroir ou 1 on volt Dieu ot la Providence très'senstblement: aturaefì velut liber unus Dìvinita- tjplenus DivinprumqueJpeculum.lua. •Nature considérée comme le con- P R E’ F A C È. cours de Dieu, présent, agiíîantpaib tout, mettant en mouvement toutes les causes secondes : la Nature dis-je, fous cette idée,ne peut être trop célébrée. Nous n’en saurions trop dire, quand nous en parlons : ou plutôt, nous en disons toujours trop peu, puisque c’est Dieu même. Ainsi nous dirons avec fioriture : 11 est bonde louer le Seigneur , & àe chanter à la gloire de votre Nom , o Très-Haut ! car vous m avez rempli de joie , Seigneur , dans la vue de vos créatures. C’est pourquoi je la ferai éclater , en louant les Ouvrages de vos mains. Que sjos pensées font profondes & impénétrables ! P faim. xci. V. i, 4, y. Vous êtes digne , Seigneur notre Dieu , de recevoir gloire , honneur & puissance , parce que vous avez créé toutes choses , & que c e ft par votre volonté quelles fubfistent , èr qu’elles ont été créées,, Apocalip. chap. iy, y. ij. CURIOSITÉS de la nature ET D E V A R T, ; SU R :L A VÈ G.È TA TION. " ê'R E M I E R E ■ P A R T I E. LES P.R INCIPÊS DE L A : Végétation, &xpliqag S _j démontrés o* appliqués à Agriculture & au. Jardinage . -Çh&pjtre Premier., Lejr Délices de J Agriculture & dtt Jardinage . A Ville a ses agrémens, auflï- bien que la Campagne: &fi la probité étoic la régie des actions des hommes, il me semble , que les douceurs de la société l' Partie. A 2 CUBIOSTTÉS devroient l’emporter fur le repos, & les charmes que la Nature nous présente dans la retraite & dans la solitude. Mais quelques vifs & brillans que nous pa- roissent les plaisirs de la ville, la dupli-' cité, qui en corrompt le commerce,' nous force à nous déclarer pour la simplicité de la vie rustique. Ses divertisse- mens ont moins de vivacité; ils sont moins piquans: peut-êtremême, qu’à moins d’être un peu Philosophe, & comtemplatif; on y trouvera presque tout sans pointe, bas, & insipide : mais si on y est privé de ces plaisirs d’éclat, & de bruit, on est amplement dédommagé par sinnocente tranquillité, qui régne dans ces lieux enchantés : où'Poli' n’entend que le chant des oiseaux, le doux murmure d’un ruisseau coulant sur un pré couvert de fleurs, & le frémissement d’un feuillage agité par un zéphiré rafraîchissant. Doit-on compter pour un léger agrément, le silence, ôi -l’inaction de tant de passions farouches , que le commerce des villes réveilr le, & dont les mouvemens furieux remplissent la société des hommes de trou-: blés, & de noirceurs ? C’est Pamour de cette heureuse tranquillité, dit Çicéron , qui en a porté plusieurs dans tous les tems, & de nos jours même, à quitte? Sur LA VÉGÉTÂT! OH. Z manîment des affaires publiques » pour goûter la douceur du loisir, & de Retraite. C’est ce qu’on a vû faire aux plus grands Philosophes, & à plusieurs a utres personnes d’un rare mérite, qui ié conduisant par des maximes pures & séveres , & ne pouvant s’acommo- âcr des mœurs, & des maximes du peuple,ni des Grands,se font retirés à la campagne , ôc ont sû trouver la douceur de leur vie dans la conduite de leurs affaires: A^ec populisme Principum mores ferre po- tuerunt: vixeruntqiie nonnulli in agrisj de- IzBati refuâfamiLiarL Cic.Of. 1. 1 . n. 6A. Si nous remontions à l’origine des choses, nous trouverions, selon le lan- S a ge des Poëtes, que l’âge d’or s’estpas- e - non dans les villes, mais dans les campagnes, où les premiers, les plus in- fiocens, & les plus heureux des hommes s a Pplìquoient à cultiver la terre, autant Pour l e plaisu-, que pour futilité. Ceux H U1 Ne font point étrangers dans la -Publique des ettres, sçavent ce Horace a chanté là-dessus dans ses oe les ’ On connoìt de reste le fameux Bousille . qui procul negotiis , Ut prìjcagens rncrtalium, -, “aterna rura bobus exercetfuis , Solutus omnifœnore • A i] 4 Curiosités Nec exciídtur clajjico miles truci , Nec horret iratum mare / Forumque vitat J &superba civium Potentiorum hmina. Si nous consultons l'Historien sacré de la naissance du monde, nous verrons » que Dieu avoir planté dès le comas mencement un jardin délicieux, dans » lequel il mit l’homme, qu’il avoir foras mé...... Le Seigneur Dieu prit donc » l’homme, & le mit dans le Paradis de » délices, afin qu’il le cultivât & qu’il le 30 gardât. Genes. chap. II. v. 8. i L’Agriculture étoit donc la premiers destination de Phomme. Destitution divine, ses mains pures & innocentes dévoient être occupées à la culture du jardin de délices. Ce travail n’auroit pas été pénible, comme il l’est aujourd’hui auX hommes qui bêchent la terre, ou qui travaillent à la vigne , avec une fatigue, qui est la juste peine du péché. Mais dans -le premier homme, ç’auroit été une culture pleine de délices, accompagnée de réflexions charmantes. II fe se- roit servi de cette culture, pour y pénétrer les secrets de la grandeur, & de 1* sagesse du Créateur, avec des vues profondes , & des considérations fans comparaison plus élevées, que ne peuvent A sur la Végétation. 5 ttr e celles des génies les plus éclaires. Po- s»us ejîhomoin ParaíiJo>àïi S. Augustin, l( t operaretar eum , per agt'icidtuïiim non Dboriosam * sed deliciojam ; & montent prudentis magna „ & utilia commonen - tem. DeGenes. aà. litt. lib.II. cap. xo. L’Agriculture , ajoûte 8. Augustin , etoit alors ,non le supplice d’un nomme condamné au travail ; mais la joie, Sc les délices d’un bienheureux, II en tiroir continuellement des sujets d’une contemplation sublime , proportionnée à ta sainteté de son état, & à l’élevation de son esprit. II admiroit cette liaison secrète, & ce rapport st essentiel de la culture, que les plantes reçoivent lur la terre, avec la vertu des influences , stue Dieu y répand du Ciel. De Genej . a d litt. lib. viij. c. 8. Quoique notre agriculture, compare avec les beauté! de ce jardin, qui àoit comme le chef-d’œuvre de la main Créateur, ne nous puisse donner 8^ une idée très-imparfaite de l’excel- ^nce des arbres , qu’Adamprenoit plairai 8 ^ ^Itiver avant fa chute ; cependant p m , ervei Ue s qu’enferme encore à pré- a culture de la terre , ne laissent pas de frapper notre esprit d’admiration, P°ur peu qu’on soit capable d’apevce- ' 01r de st belles choses. A iij 6 Curiosités En effet, qu’y-a-t’il de plus digne, je ne dis pas du premier homme , mais des Anges mêmes , que la considération des iecrets de ce grand spectacle de la Nature, loríque l’on perce les voiles, qui les couvrent, & que l’on pénètre jusque dans les trésors, qui y font cachés > en les rapportant à la cause.suprème qui en est la source? Car qui n’admirera, dit S. Augustin, cette vertu secrète deS graines, des semences, & généralement de tout ce qui sert de premier principe à toutes les plantes ; où Dieu renferme en un si petit espace , d’une maniéré fi imperceptible à nos sens, toute la beauté des fleurs, toute l’étenduë des plus grands arbres, & toute l’excellence, A la variété d’une infinité de fruits? Qui ex grano minutijjìmo seminis tantamjicul' neot arboris magnitudinemcreat . De' nique quàm multa ujìtata calcantur qufi conjìderata fiupentur sjicut ipsa vis Jemi' num? Epist.III. ad Volusian. C’est donc avec raison , dit ailleurs S» Augustin, que nous estimons que la culture des plantes & des arbres auroit été l’occupation du premier homme dans cS Jardin de délices, où Dieu l’avoit mis- Car enfin qu’y-a-t’il, ou de plus innocent que cet emploi, pour ceux qu* ont assez de tems pour s’y occuper 5 oU SUR LÀ VÉGÉTATION. 7 êô plus propre à élever l’efprit à Dieu , Pour ceux qui ont une affez grande étendue de génie pour approfondir cette foule de merveilles, qui y font voilées fous le cours ordinaire de la Nature ? Quid enim ho c opéré innocentais vocand- bus; aut qiád plenius magna considéra - tione prudentibus ? De Genef. ad litt. lib. Viij. cap. o. Une belle réflexion que fait là-defluS vu Interprète de ì’Ecriture-Sainre, c’est que si le premier homme, tout innocent qu’ilétoit, devoit travailler, & cultiver la terre : combien plus devons-nons tious-autres nous porter au travail, après fì chûte, Sc dans la misere 8c les ténè- bres, où son péché, & les nôtres nous °nt réduits ? C’est dans cette vue de travail, & de pénitence, que des personnes de piété s’appliquent quelcjuefois , íelon leurs forces, & leur état, à la culture de leurs jardins. C’est par cet esprit *fe mortification, qu’il saut tempérer ce qu'a de si doux & de fi agréable, le plaisir de cultiver de ses propres mains les plant es & les arbres, qui couronnent fi Jtaontiers de fleurs & de fruits, les foins, & les peines qu’elles éxigent de nous. H faut avouer que nous tenons toû- ïours beaucoup de notre premiere destination. Tout le monde s’empreffe d’a- A iiij 5 Curiosités voir des jardins ; &chacun donne autant qu’il peut, à ce penchant si naturel* Ceux qui ne peuvent se retirer à la campagne, ont des jardins à la ville. Ceu# qui n’en peuvent avoir deplein-pié avec leur maison , ou de niveau avec leut appartement, s’en font fur des balcons» ou fur des terrasses au-dessus de leur maison. Et quand on n’en peut pratiquer de toutes ces façons, on s’en fait a fa fenêtre; lesquels moins ils font dignes d’attention, plus sont-ils de vifs 6 forts argumens de fheureux état, d’où le péché nous a fait tomber; & de la secrète inclination, qui est restée dans le fond de notre cœur, pour notre première vocation. On ne s’étonnera pas après cela, íí tout ce qu’il y a eu de plus grand parmi les hommes, a eu du goût pour l’Agri- culture & le Jardinage. Je ne fçai pas si Salomon cukivoit de f ses mains Royales, les plantes de ses jardins, mais du moins il les connoissoiî à merveilles. II n’y a point eu dans ls monde de Physicien , si universellement sçavant dans la Botanique. Quand ls Texte sacré parle de sa vaste connoissan- cì dans la Physique des végétaux, il est a» dit, qu’il a traité de tous les arbres » » depuis le Cèdre qui est fur le Liban , sue. ii a. Végétation* 9 Jiisqu’à Phiffope qui fore de la muraille. « i liv. III. ch. IV. v. 33. L’Ecriture Sainte dit d’Ozias, Roi de ^uda , qui régna cinquante - deux ans avec beaucoup de çuistance &. de gloire ; qu’il avoir des Vignes , & des Vigne- « rons for les montagnes, & dans le « Carmel ; parce qu’il se plaisoit fort à « l’agnculture. Erat quippe homo agri- « culturx. deditus . Paralipn. lib. II. cap. XXVI. V. 10.- Cette occupation n’étoit point au dessous d’un Roi du peuple de Dieu : fur tout depuis que l’Auteur du Livre de l’Ecclésiastique fait du travail, ôc de l’agnculture un devoir aux hommes vertueux. Ne fuyez point, dit JeJus jih * de Simck, les ouvrages laborieux , ni * le travail de la campagne, qui a été * ordonné par le Très-haut. Non oderis * laboriofa. opéra J & rujiicationem creatam ab Alíti/Jìmo.Ecclesiasti. cap. VII. v. 16. LtsRois de rOrients’occupoient avec plaisir à la culture de leurs jardins ; & se lervoient des instruments à remuer la te rre, de la même main dont ils por- 5 ^tent l e Sceptre. II y a une chose nota- ole là-deffus dans l’histoire d’Esther, & stui prouve bien l’estime, que les plus gtands maîtres du monde ont toujours .íaite de l’agriculture. II est rapporté dans A y ìro Curiosités le I. chapitre d’Esther, que vers la fin de ce superbe festin qui dura cent quatre-vingt jours, & que le Roi Aísuérus donna aux Grands de fa Cour, il en ordonna un pour tous les habitans de la ville de Suze. II commanda, dit l'E' -° criture-Sainte J qu’on préparât un íes- »'tin pendant sept jours dans le vestibule » de son Jardin, & du Bois, qui avoir -> été planté de la main des Rois avec » une magnificence Royale. JuJJitsep * tem diebus convivium prœparari in vefti- lulo horti j nemoris, quoà Rtgto cultu > manu conjìtum erat. Esther. cap.I. v.p. Ce témoignage du Texte sacré, à ì’é- gard de ces puissans Rois de Perse, qui plantoient des vergers de leur main , «'accorde fort juste avec ce que dit Xé- nophon fur le chapitre de Cyrus le jeune. Cet Historien assure que ce jeune Prince n’étoit pas moins curieux d’en- tretenir la beauté de ses jardins, que de faire fleurir la paix, & l’abondance dans ses Provinces. Et devrai, c'estun fait reconnu pour constant, que les Rois de Perle, au milieu de tout le faste, & de tout le superbe luxe de leur Cour, vaquoient ordinairement à la culture de leurs jardins , quand les devoirs de la guerre ne les for joient pas à sortir de leurs Palais» S U K LA VÉGÉTATION. II Pline compte quatre Rois ; savoir Hiéron, Philométor, Attalus, & Ar- chélaiis, qui se sont fait un singulier plaisir du jardinage. II joint à ces quatre Rois deux Généraux d'Armée, Xé- t'ophon, & Magon de Cartilage, qui s étoient entierement tournés du côté de la vie champêtre. Hift. Nat. lib. xv 'ûu Cap 'ì\ Sénèque, parlant de Scipion l'Africain , dit: Ce grand Homme, la ter - r eur de Carthage , n’avoit qu’un petit champ, qu’il labouroitlui-même. Après le travail du labourage, auquel il s’exer- Çoit, il íe lavoit pour nétoyer son corps laie par la lueur, & la pouísiere, & imitent la vie des premiers hommes. Exer- c ^bat enim opéré se ^ terramque * ut moi fuit prscìs jfubigebat. Epist, 87. . C’est dans l’exercice de cette vie pé- n ible j que se forment les grands Hom- ®. es pour la guerre : & de cette Ecole, tqt Pline, j] n’ensort que d’illustres Capucines , de bons íoldats, gens pleins e droiture , & qui ne font point mal nui/r ntS ' àrMmr viri & milites ftre- „,,J lrni ex agricolis gignuntur * minimè- f T N.l. xviij.c.f. c L. Quintius Cindnnatus la- U ^ lt Quellement, quand il reçût Courier de la part du Sénat, qui A vj 12 C U BIOS ï TÉS l’avoit choisi pour Dictateur, dans utr extrême besoin de la République. Etant arrivé à Rome , où il fut reçu avec des applaudissemens infinis , il prit les Enseignes Romaines, se mit à la tête de Famée, & marcha aux ennemis qui te- noient le Consul Minutius , enfermé sur le mont Algide. 11 les défit entierement, & délivra le Consul, & l’arméeRomaine. En reconnoissance ils l’honorerent d’une couronne d’or, telle qu’on la don- noit à ceux , qui avoient fait lever le sié- pe de devant une ville. A Rome on lui décerna les honneurs du triomphe. Ayant ainsi sauvé la République, il se démit ds la Dictature , qu’il n’avoit gardée que seize jours ; & s’en retourna bien vîte labourer son petit champ, qui n’étoit que de quatre arpens. Diííaturam deposuit,di t Tite Live, ad agrum reverfus eft. Si on s’en rapporte aux conjectures de Sa vans de distinction, il faut croire» que les plus illustres familles de la Ré-ì publique Romaine, descendoient de Gardeurs de bestiaux, de Laboureurs, & de Jardiniers : mais de Jardiniers du dernier rang, qui ne cultivoient qus des légumes Sc des Jardins potagers» comme sont à Paris ceux qu’on nomme Maraîchers ; parce qu’ils cultivent leS marais des íauxbourgs de cette ville. sur e,aVégétation, tf C’est ainsi que les Pisons tirent leur nom-, des pois qu ils cultivaient :Lentulus tient son nom des lentilles, que la famille semait ordinairement. J babius vient de parens qui r malgré Pythagore , n'en Vouloienc qu’aux fèves. Cicéron prend son nom des pois chiches, que ses aieux faisaient venir dans leurs jardins. Lctéfii-, cinus s’étoit borné aux laitues. Pourfíor- tenjius j il y a bien de l’apparence qu’il tirait fa naissance de quelque Jardinier. Les Stolons doivent leur origine à des Vignerons, à des gens appliqués à tailler les vignes. Selon le même principe » Porcius était fils de quelque gardeur de cochons. Le pere d ’Ovinius gardait les moutons ; Bubulcus , les bœufs ',Vitulus , les veaux ; Caprilius les chèvres. C’est- la le raisonnement tout pur d ’Alexander a b Alexand.ro> lib. xvïij. cap . ip. Mais un bel Esprit de de-là les Monts,ne lui passe pas ces Etimologies-là. II les trouve badines & bizares. C’eít le célèbre Abbé Lancellotti. Farfallone L. pag. 144. Ce qu U y a de bon pour Alexander ab ■çlexandro , c’est qu’iì ne parle qu’aprës ^ ' stui le premier a publié ces tortes cft ^ ll ">°logies. Hist> Nat. lib. xviij . S il n'est pas constamment vrai. que ies plus illustres familles des Romains 14 Curiosités aient été nommées du nom des plantes qu’elles cultivoient par prédileélion ; du moins il est certain que des hpmmes illustres , & du premier ordre, ont donné leur nom à des plantes, dont ils ont les premiers reconnu la vertu singulière. C’est comme en parlent de fameux Bo-î tanistes. Mercure a donné son nom à la Mer- curiale, qu’il cultivoit, & à laquelle il a donné de la réputation. Chiron le Centaure nous a fait connaître la Centaurée. Achille, cet illustre Eleve de Chiron, a rendu célèbre la MUle-feuilles , que les Grecs appellent Achillœa ; parce qu’A- chille se servit de cette admirable Plante vulnéraire, pour guérir la blessure de iTélèphe, Roi de la Misie Asiatique. Télèphe ìui-même donna de la célébrité , & son nom au Telephium. Artémise, femme de Mausole, Roi de Carie, a rendu sameuíe Y Armoise que les Grecs, A les Latins nomment Artemijìa. Centius , Roi d’íllirie a découvert les vertus de la Gentiane. Lysimaque fils d’Agathoclès, a mis en usage la Lyjìmachia , dont les Botanistes exaltent tant les propriétés. Eupator, Roi de Pont, cultivoit sur la Végétation. i$ avec soin s Aigremoinc , qu’on appelle Eupatorium. Quoique les climats brûlans de l’A-' írique ne soient pas des terres propres a faire des jardins, cependant Maffinissa, Roi de Numidie, joignant sart & le travail à la Nature, se fit des jardins que l’hiíloire ne cessera jamais de célébrer. Il eut une affection si vive pour les arbres, que ses foins surmontèrent l’aridité du terroir. II y fit venir des fruits, qu’on n’avoit jusques - là crus destinés que pour des climats plus tempérés, & pour tin ciel plus doux & plus favorable. Ainsi l’Afrique fut elle même étonnée, devoir croître chez elle tant d’excellens. fruits, dont elle ne connoiísoit pas auparavant les noms. II n’est pas possible de n’être point touché des douceurs, qui font inséparables de la vie champêtre. Alftedius, dit que cette vie est une mer , un océan de plaisirs, & d’agrémens. fstrc vita eftma- re quoddam deUBationis > acjucunditatis, Rucyclopsd. lib. xvij. cap.6. pag.2269. Quel charme ! de voir des prairies bril- arites d'une vive verdure, & émaillées . une infinité de fleurs : un champ fer- tout couronné d’épis dorés ; cescol- sines ornées de vignes, & chargés de ïa stins qui promettent des ruisseaux de 1 6 Curiosités vm plus doux que le nectar : le creux des vallons retentir des concerts des Bergers, qui chantent innocemment, pendant que leurs moutons bondissants paillent Ther- be parmi les fleurs : un Laboureur rentrer le soir avec sa charue & ses boeufs, fatigués du travail de la journée , & qui va bien-tôt trouver dans le repos l’oubli de ses peines passées : les abeilles diligentes & industrieuses,revenir chargées d’un suc balsamique, qu’elles ont pillé fur les fleurs, & dont elles composent leur miel. Enfin la nuit couvre la terre de ténèbres ; & alors, tous les soucis s’éva- nouissent. Un charme puissant tient toute la Nature dans le silence, Sc dans un doux enchantement. Quand Virgile passe en revue ces plaisirs tranquiles, & innocens, il íë récrie : O bienheureux mortels ! qui faites votre séjour sur les collines, dans les vallons , Sc qui loin du bruit des armes , cultivez vos champs fertiles ; il ne manque rien à votre félicité, si ce n’est peut-être le seul plaisir de connoître le bonheur de votre état. Georg. hb. II. O! forturmos nimium^fua fi bona norìnt, Agrìcola.s quibus ipfia procul difiordi- bus annis Fund.it h.imo facilem viBum jufiijfima TelluSf SUR 1A VÉGÉTATION. I? Il y a tout de suite quatre-vingt vers, qui font une agréable description de la vie des villageois. Claudien représente assez bien les tranquilles jours d’un homme, qui vieillir doucement dans la terre, où il a pris naissance ; fans s’être jamais mêlé des affaires publiques ; & que la fureur de Voyager n’a point transporté dans des climats inconnus. Fehx qui propriìs cevum tranfegit itt arvìs; Ipfa domus puerum quem videt ipfafenem . baculo nitens 0 ìn qua reptavit arenit Unius mm.eratfa.cula longa cafa . > Sénèque le Tragique peint d’une mau tûere touchante cette honnête liberté* fa cette sécurité prétieuse , où l’on vit loin des villes. Hippolit. • iV on alia magis ejl libéras vitio caréns Ritusque melius vita quce Prìjcos colat > Quàm quce j reliclis manibus^campos amat. Non illum avarie mentis injlamm'atfuror; ^° n aura populi* & vulgus tnfidum bonis; pejiilens ìnvidìa J non fragilis favori ille regno servit ^ aut regno imminet+ tyei j metuj'que liber . Quand Alexandre considéra Dioge-' ì8 Curiosités ne dans son tonneau, & qu’il le vît íi content, il ne put s’empêcher de dire ; que cet homme étoit sage, grand, & heureux : & lui-même il s’estima peu censé, & d’un esprit bien petit, de ne se pouvoir loger à son aise, dans une maison moins grande que tout FUni- vers. C’est Juvénal qui le va dire à fa façon. Saty. 14. Senjît Alexander ^ testa cum vidit in illa Magnum habitatorem •• quantofelicior hic qui Nil cuperet, quam qui totum Jìbi postent orbem. S’il salloit suivre l’avis de Perse, il y; d bien des gens, qui déserteroient les lambris dorés, pour retourner à la métairie de leur pere, manger des châtaignes. C’est à peu près ce que ce Poète cit. II borne toute la batterie de cuisine à une marmite. Cela est trop rigide ; il seroit difficile d’en revenir là. Rure paterno Est tibi far modicum j, parum * &* stne labe falinum J Quid metuas ? stultrixque foci fecura pa- tella : Hoc fatis est. Avant que de donner ici place aux SU R L A. VÉ G ÉT AT I O N.' 19 doges, que les Modernes ont faits de la vie champêtre, il faut que Cicéron soit écouté. On peut l’appeller , par excellence , le Panégyriste de la vie particulière , & fur tout quand on la passe à la campagne. On feroit un volume de tout ce qu’en a dit cet homme du meilleur goût qui fût jamais. Ce Pere de l’Eloquence Romaine , fans cesse mêlé parmi tout ce qu’il y avoir de plus grand dans la République, n’ignoroit pas tout ce que la Cour & la ville peuvent ossrir ste plus spécieux aux hommes : cependant il compte pour rien tous ces objets cblouissans, en comparaison des inno- cens plaisirs, qui fe goûtent dans une honorable retraite à la campagne. Cet Orateur est dangereux fur ce chapitre. II emporte par ses brillantes descriptions l’efprit le plus affermi pour le séjour de la ville. II est capable de métamorphoser ïes campagnes en villes , & les villes en campagnes ; car enfin on ne Peut tenir contre la tendre peinture qu’ií fait à es plaisirs champêtres. En vérité f’us fa plume Lalius & Scipion ne fai- .P len t point une mauvaise figure, quand lls fortoient de Rome, pour aller à leur campagne, J’ai oui dire, c’est Cicéron S u i fait parler CraJJìis , que Ldius avoir coutume de mener presque toujours 20 Curiosités Scipion., pour partager avec lui les charmes de la solitude ; qu’ils y rajeunis- soient prodigieusement, devenans simples comme des enfans. Ils s’envoloient de la ville comme d’une prison, pour venir à la campagne ; & là ils quittoient les grands airs, les maniérés guindées, afin de vivre à la maniéré des premiers hommes. Je n’oserois pas dire de ces grands hommes, qui font si respectables, juíqu’à quels petits amusemens, ils passaient quelques heures du jour. Enfin ScAvula, qui les honoroit, le dit pourtant quelquefois. On voy oit ces personnages graves, sérieux, & du plus sublime mérite, s’amuíer à Cajete, & à Laurentin, à ramasser des coquilles, & de petits coquillages fur le bord de la mer, & jouer comme des enfans. Le latin de Cicéron est plus fort que ma traduction. Je n’ai pas pu bien rendre, à ma fantaisie, le mot de rujîicari. Je sens autre chose, & plus que je n’ai dit, en traduisant, Sr vivoient à la maniers des premiers hommes . Ceux qui connoissent les beautés de la latinité, pour se dédommager de ce qui manque à ma traduction , peuvent voir les paroles de Cir ceron , lib. 11. de Orat. n. 8. Entre cent beaux endroits de cet Auteur, je n en choisis plus que deux, Le sur la Végétation- 21 premier est cle la II. Oraison de Cicéron pro Sexto Roscio Amerino . Ce Sextus Ros- ctus étoit accusé d’avoir tué son pore. Erucius j qui piaidoit contre lui pour ses accusateurs , disoit que ce Sextus Ros- cius pouvoit s’être chagriné, de ce que son pere le tenoit toujours à la campagne, pour faire valoir ses terres, Lee. Cicéron releve à merveille cette prétendue raison de suspicion ; il accable cet Avocat de plusieurs belles raisons, qu’il tire de l’estime qu on a toujours eue pour le séjour de la campagne ; & prouve que ce qu ’Erucius prend pour un exil, etoit une marque certaine de la sincère prédilection de ce pere pour son fils. Nos aïeux, lui dit-il , n'ont pas parlé, comme vous, de l’agriculture. Les en- san,s favoris y ont été destinés par leurs peres. Qu’auriez vous dit, quand on ti- roit de la charue les Laboureurs , pour les faire Consuls f Attilius semoir son blé, quand on l’appella à Rome, pour 1 honorer du Consulat. C’est deçes gens- L qu’est venue la grandeur de la Répu- ^stue, Sc la majesté du nom Romain : „ Ce Ç[ue vous prene\ pour une vie obscure „ 7 n ^P ri sable j ejî uneproftjjiontoute hon nete -- & qui a ses asrèmens. N.' 42. us- ad 5 2. . Cicéron va encore plus loin. II sofi- 22 Curiosités tient dans son livre de la Vieillejse * que les plaisirs, que la Nature toute pure , & toute simple a préparés aux villageois, font ceux mêmes, qui conviennent le mieux à un Philosophe , & à un véritable Sage. C’est dans cet ouvrage, où Cicéron a déployé toutes les voiles de son érudition & de son éloquence , pour louer la vie rustique. II ne parle pas tant par étude, que par goût Sc par sentiment, comme il le déclare en débutant par ces paroles : Parlons maintenant de la félicité des Laboureurs , que véritablement je goûterois avec des plaisirs inexplicables. Le ménage, les jeux, les mets, & les délices de la campagne, tout y est fort exactement détaillé. On y voit, dit-il, meurir une grape de raisin avec plaisir. On se promène dans ses jardins ; on fait grèfer des arbres ; on fait serrer son blé, de peur qu’il ne devienne la proie des oiseaux; on va admirer les mouches à miel ; on goûte son vin. On décend dans la baste-cour, Sc on voit ses volailles & ses bestiaux-; on parle Physique, & on raisonne sur la force concentrée d’une petite graine , qui se dévelope dans la terre, & produit un si grand arbre. Je ne m’étonne pas, a- joute Cicéron, si tant dè grands hommes ont volontairement abdiqué les le ^ur la Végétation. 2Z grandeurs du gouvernement, pour se dé- Vouer à l’agriculture ; & si L. Quintius (-‘ìncinnatus étoit à sa charue, quand on IJ i vint annoncer,qu’il avoit été crééDic- Jateur. On peut être en effet très-agréa- olement à la campagne, quand on a foin faire dans la saison de bonnes provi- jons. Cicéron veut que le lard,les poules, j Agneau, les cabrils, le lait, le fromage, * e miel, les olives, une cave bien remplie, 4 chasse au poil & à la plume, de bons fruits, spiend’objet perpétuel de la per- tonne qui a soin de la table. 11 ne veut Point de jeux pénibles : il ne réserve aux Vieillards aparemment que le Tric-trac, oc les Echets. Après cela il se récrie : Je v fuxpajser mes vieux jours àla campagne*' ■ n y a point hors de là de vieillejse heureuse: c °rnme je pourrois vous le prouver par cent autres agrémens de la vie rustique j mais Je m apperçois quesay déja été fort long. , 0US me pardonnerez. : car enfin je parle e la campagne par inclination: d’ailleurs J? ne fuis plus jeune* & on dit que les vìeil~ nrdj aiment beaucoup à parler. Vous bien qu en faisant Féloga de la r 1 *je ne prétends pas la repréjenter Assauts. De Senectut. N.ji. $$. ■ xUand nous parlons ici de l’agricul- r *j par rapport à toutes fortes d’états ç'onditions, nous n’avons pas des- 24 C u r rosi Tés sein de remettre les hommes à la charue, & de les faire labourer la terre, comme faisoient Atûlìus ou Cincìnnatus parmi les premiers Romains ; ou de les engager à répandre du fumier fur un champ, pour l’engraister, comme font la plû-’ par des Rois, que chante Homere. On ne va plus de la charue au sceptre ; & on ne retourne point à présent du triomphe au labourage. Le rufticarì de L&hus ^ &, de Scipion, c’est de prendre aujourd’hui les plaisirs de la campagne , pour délasser l’esprit : & ce qu’il y a de pénible dans l’oeconomie rustique, on le fait exécuter par ceux que la nécessité-a réduits au travail. Chacun ne prend aujourd’hui la-dessus que ce que son état, sa condition, son âge, ses forces, la- bienséance permettent de prendre. Cependant la vie de la campagne ne doit pas être une pesante & molle oisiveté. Elle a ses devoirs ; & fur tout parmi les Chrétiens, dont les récréations font renfermées dans des espaces forts petits. Ainsi tout ce que nous avons dit, & ce que nous dirons, fur les douceurs de cette vie, ne doit pas être pris à la lettre, comme nous le trouvons dans les Ecrivains profanes, qui cherchoient fur la terre une félicité, que la loi de la mortification Evangélique interdit á l’hotn- slie sur la Végétation. 2 $ flie pécheur. Nous parlons des douceurs de la vie rustique, par rapport au tumulte, Sc aux embarras, que les diférentes passions des hommes excitent dans les villes. La vie de la campagne est plus propre au recueillement, 5c à la contempla- tlQ n. On rencontre incessamment sous ses yeux une infinité de belles choses, ttes-capables d’élever Fefpr.it à Dieu. Alors la Philosophie , & Fétude de la sature nourrissent la piété, Sc soutien- ^ e nt la Religion. Et on se perd sans réflexion dans le bruit des villes. On y est entraîné par les mêmes bagatelles dont íont occupés ces hommes tout de chair, S.ui ne réfléchissent jamais fur le néant ^ es choses présentes, Se fur ce qu’il y a * espérer ou à craindre dans la vie fu- fl»’e. LesPayens de bon esprit ont plaint aveuglement des hommes fur les atta- j emens frivoles, pour lesquels ils se °nnent tant, & de fi furieux mouve- ^nens.^ C’est en ce sens qu'o n est moins hors des villes , 5c que le séjour „yiM. caiT ipagne nous rappelle à la transe u , e 6c à Finnocence. Nous avons" J eun e a ’é tle charmante Lettre de Pline le L Fécrit à un de ses amis, au- sa S -r d se justifie íur sa retraite en exh 131 0n Laurentin : II la finit par ortercetami, à quitter pareillement h sortie. B 26 Curiosités la ville. On ne sauroit mieux peindre les minuties qui occupent les Grands à la ville , sc à la Cour. Tout est original dans cette Lettre. La voici de la Traduction de M. de Sacy. » C est une » chose étonnante de voir comment le » rems se passe à Rome. Prenez chaque *> journée à part : il n’y en a point qut » ne soit renjplie. Rassemblez-les tou- » tes, vous êtes surpris de les trouver st « vuides. Demandez à quelqu’un , qu’a- n_vez-vous fait aujourd’hui ? J’ai as- josistez, vous dira-t-il » à la cérémonie » de la robe virile qu’un tel a donnée » à son fils. J’ai été prié à des fian- » çailles, ou à des noces. L’on m’a de' » mandé pour la signature d’un testa-! jo ment. Celui-ci in’a chargé de fa eau- » se. Celui-là m’a fait appeller à une 30 consultation. Chacune de ces choses» jd quand on l’a faite, a paru nécessaire* «Toutes ensemble parodient inutiles*' » & bien davantage, quand on les ri' » passe dans une agréable solitude » 3»alors vous ne pouvez vous empêché » de dire, â quelle bagatelle ai- je peí' « du mon tems ? C’est ce que je répé tS » sans cesse dans ma terre de Taures »> tin ; soit que je lise , soit que j ^ 3» crive, soit qu’à mes études je mre' idc 5 cb eí peí"' :pét e ire»' ;’e' SURLAVéGÉTATlON. 27 sition influe tant sur les opérations de » ì’esprit. Ici je n’entends, je ne dis» rien, que je me repente d’avoir en- « rendu & d’avoir dit. Personne ne m’y « fait d’ennemis par de mauvais dis- » kvurs. Je ne trouve à redire à person- » î* e > sinon à moi-même; quand ce que « ï e compose n’est pas à mon gré, Sans « désirs , fans crainte, hors des atteintes « de la Satyre; rien ne m’inquiéte. Je » n e m’entretìens qu’avec moi, & avec * nies livres. O l’agréable ! ô l’inno- « cente vie*. Que cette oisiveté est ai- « niable, quelle est honnête , quelle» est préférable même aux plus illustres » emplois! Mer., rivage, dont je fais « r^on vrai cabinet ; que vous m’inspi- » •rez de nobles , d’heureuses pensées ! « Voulez-vous m’en croire, mon cher « t’ondanusi rompez au plutôt cet en-« Vainement de (oins frivoles qui vous » ^tachent à la ville ; adonnez-vous à °° etude 5 ou au repos: & songez que» ^ qu a dit si spirituellement notre ami ^ rtilius n’est que trop vrai r I r. isp°" AUf OS ÏLcc ïnfiniment mieux ne f aire que de r ai re •^ïEns : Adieu.. Satins est enim ... otiosurrt e Js e ses ne» des ou^ ses» foi sur la Végétation, zr Oera o mihijjì volare veftrum snjmum Superi animant benigni , dulci liceatfrui recejfu nunc ludere verjîbus jocofîs. -Oom Guévara, Évêque cîe Mondo- , Historiographe de Charles- V u int, dont il suiyoit la Cour, se plaint louvent de ne pouvoir parvenir à íe conter dans une retraite tranquille. Autant ^il dit de bien de la vie champêtre, litant dit-il de mal de la vie de la Cour. fait tout ce qu’il peut pour en détour- J er un Abbé qui s’ennuyoit de fa mai- °n Abbatiale, & que trop de repos em- ar tassoit. Le bon Evêque lui parle à Coeur ouvert. 11 ne fait bon ici * lui dit-il, ? u °-pour deux sortes de gens j pour lesfavo- ris -> fù y trouvent amplement leur dèfruc- tu ì &* pour les jeunes gens ^ qui nesçavent Ce que c’efl que cepays~ci .... Je vous di- « j ai » qu’il n’y a personne, qui ne íe« ^aíse d’être, ici ; mais la Cour amol- « ^ ellement le courage, que quoi- « chacun se propose de n’y pas« j. ses jours , personne n’en peut « .ottir. Sî quelque disgrâce en œ oigne quelqu’un, on remue ciel & œ ^te, on n’oublie rien pour y revenir; « ceux-là mêmes , qui font redeva- « es de leur présence ailleurs , ont « B iiij Z2 Curiosité s. » moins de raison là-deflus.... Demeu- » rez chez vous. Vous ne feriez pas si- » tôt ici, que vous voudriez être de re- » tour dans votre solitude de Montserrat. Epit. tom . J. Et dans une Lettre à Don François Cobos, après avoir fait un parallèle de la mer,& de la Cour, il finit par lui dire. Ne vous fie% guére à la mer * & point du tout à laCour-Cefont deux choses j belles à voir de loin J où il vaut mieux êtrespeElateur quaSleur . Un homme content de fa retraite, a dit depuis peu fur fa petite solitude : Je ne vois pas ici les vices ; Leur empire est ambitieux ; Ils dédaignent ces petits lieux, Où n'habitent pas les délices. Cette exécrable faim de l’or, N’a pas fait arriver encor L’art de tromper, Sc de surprendre ; Sur ces monts, & fous ces ormeaux Les embûches qu’on y vient tendre, Ne font que contre les oiseaux. On ne finiroit pas, si on vouloit don' ner ici place à tout ce qui s’est dit ds láeau & de touchant fur les plaisirs d® l’Agriculture & de la vie retirée. J- suffit d’avertir les personnes qui ont di» goût pour ces sortes d’ouvrages, áUR Êï Végétation, zz &ornavius dans son Amphitheatrumsa~ pientU Socratica Jocnferiœ , a recueilli soixante & quatorze pièces qui font autant d’éloges de la vie rustique, & par- wi lesquels il y en a plusieurs qui font d’une grande beauté. Le Cornes Rujîicus de Monsieur Pelletier, Ministre d’Etat, Est un recueil de ce qu’il y a de plus beau & de plus censé sur ce même sujet. Ce grand homme, en se dépouillant volontairement de tout ce qúe la fortune peut offrir de plus brillant & de plus dateur, a fait voir qu’il y a en- c ore dans le monde de ces sages, qui sa- v ent mettre le juste prix à quelque cho- Quand ce Ministre demanda au Roi *3 permission de se retirer , cet auguste “rince laissa bien connoître l’estime, ^ u e Sa Majesté saisoit d’une si honorable retraite, & ce que son grand cœur Pense sur le chapitre de la Cour. Le î/°i en suivant des yeux ce Ministre qui e retiroit, dit : Nous avons peu de per~ J ° n nes id qui soient capables d’en faire , -^u reste en recommandant la vie . bampêtre, & l’éìoignement de la ville , saut pas oublier qu’il y a trois sor- , es de solitudes ; que la premiere est ^réussi & blâmable; la seconde sort l pe cher f honneur s ni la difiinclion • parce que tout cela nefi que vanité : mais il faut aimer le travails lorsqu il contribue ausal llí de ceux qui nous font soumis . De Civdat’ Dei . lib. xix. cap • i§- sur t a Végétation. 37 » Chapitre II. V Anatomie des Plantes selon les nouveaux Physiciens. L A structure des Plantes n'est pas moins digne de l’attention des Philosophes , que la structure des animaux. La Nature par tout admirable, Test singulièrement dans la formation des Végétaux. On peut dire que c'est le régne de ses miracles : & si jusqu’ici on a trouvé dans l’anatomie des Plantes moins d’agrémens , que dans la dissection des Animaux, c'est qu’on s’y est moins appliqué. Si Galien a crû chanter un cantique Merveilleux à la louange de l'Auteur de *a Nature, en décrivant Pusage des parties des Animaux: Galen. de usu Part, liL iij. J’estime que ceux qui ont les premiers découvert Pusage des parties des “lantes , n’ont pas moins célébré la Puissance, & la sagesse de Dieu. Quand e n regarde avec les yeux de Pesprit cette Admirable Mécanique, on est volon- îler s porté à se récrier avec le plus élo- *j Uetl t des Prophètes : Ceft ici l’ouvrage u Seigneur le Dieu des Armées s afin.de z8 Curiosités faire connaître les merveilles de fa sagesse & la magnificence de fa puissance : IJàïe cap. 28. II saut avouer que les anciens n’y entendoient rien du tout, & qu’ils n’y voyoient goûte. II est vrai que nous devons beaucoup au secours du microscope , dont l’on ne connoît l’ufage que depuis peu de tems; & que les Physiciens qui ont été privés de cette heureuse découverte , n’ont pû aller bien loin. Que pouvoient-ils appercevoir fans microscope, dans la struéture des plantes ? C’est une organization composée de filets si déliés, de corpuscules si minces, de vaisseaux si étroits, de pores si serrés, que l’œil nud & désarmé ne peut jamais parvenir à les découvrir. Et combien de choses la nature a- t-elle mises encore au-dessus de l’atteinte du microscope, & que l’œil humain ne verra jamais ! Par le mot d ’ Anatomie , nous enten* dons ici une science qui sait connottrs les parties d’une plante par la dissection» & avec l’aide du microscope. La plante est un corps vivant sa° s sentiment, attaché à un certain endroit» où il végète j c’est-à-dire, où il se nourrit , pousse - augmente de volume , & produit des feuilles, des fleurs & ^ eS .sur la Végétation. 39 graines, op des fruits garnis de graines* O BSERVATIO N. 1 . Quand nous disons que la plante est un corps vivant j on suppose qu’elle renferme en elle un principe de vie qu’on peut appeller ame j d’où naissent les opérations de chaque plante, telles que font la nutrition > l’augmentation 8c la propagation. Quelquefois nous comprendrons toutes ces trois choses fous le íeul mot de Végétation qui les signifie en effet. II y a , ce me semble > de la raison à r econnoître une ame & une vie dans les plantes ; car enfin nous voyons par les choses qui se passent dans le cours de leur durée , qu’elles contribuent beau- c °up d’elles - mêmes à se nourrir, & à le conserver : ce que ne sont point les Minéraux qu’on appelle corps inanimés j Parce qu’ils ne contribuent rien par eux- ^êmes à leur nourriture , Sc à leur ac-i Cr °issement. Cependant en accordant une ame 8c 13)1 ?vie aux plantes, nous déclarons que ^ette ame, ou cette vie ne consiste que 'jans l’arrangement & la construction leurs parties essentielles ou organi- & Ues j & dans une disposition parti? 4 o Curiosités ticuliere de leurs pores , d’où il arrivé que les sucs de la terre y entrent, & s’y distribuent d’une maniéré propre à nou- rir les plantes de chaque espèce. Si Campaneile n’avoit donné aux plantes que cette ame mécanique, le - Sieur du-Val, Médecin de la Faculté de Paris, auroit un peu outré la dispute, en s’élevant avec tant de véhémence contre ce Dominicain. Je pourrois même ajouter qu’il lui impose cruellement , pour avoir le plaisir de le dénigrer. II est vrai que Campaneile, lib. iij. de sensu rerum. cap. xiv. accorde aux plantes le sentiment comme aux animaux. II semble même qu’il appelle les plantes des animaux immobiles : ani - malia immobilia. Mais je n’ai vu dans aucun endroit de ses ouvrages, qu’il ait dit que les plantes soient capables de raison, d’eíprit & d’intelligence, comme croyoient les Manichéens. C’est cependant ce qui lui impute le sieur du-Val. iV oici comme il parle : Ce font ces mimes dogmes des Manichéens j qu’a voulu folle* ment* témérairement & plus audacieufe- ment que savamment renouvellersje ne fçat quelnouveauPhilofophaJïre s impudent ca- lomniateur du grand. An flot e s & l’ennemi juré du Péripatétifmes FrereThomas Clochettes dit Campaneile s Dominicain'Cfá SUR LA VÉGÉTATION, fl ce fl ce viL& méprisable Marsyas* ce Pig- mée * ce Dave * ce Phaêtonce hibou* cette chauve-souris * ce Zoile J ce jaseur imperti- nent qui s élève contre le très-J'age Aristote* céft-à-dire * contre l’Apollon* le Hercule•* VOedipe * le Soleil * le Princesouverain de la Philosophie. Guiell. du-Val Phytolo- giagener. quasi. ïij.pag. 7 J. Cela eíì violent : Galien auroit sait saigner & purger ce Médecin-là, car apparament son sang n’étoit pas alors plus louable, que son ftile. Quoique le but de la Philosophie soit àe tempérer les passions, cependant on ft’en volt guére de plus vives, que dans les Philosophes en matière de dispute. Lucien dans son Dialogue intitulé, Jupiter le Tragique * raille assez finement leur soible sur ce point ; & il ne tient pas à lui qu’on ne croie, que les Philosophes répandent bien autant de bile, que ^e raisons dans leurs querelles ; & qu’íl »’y a peut-être pas moins de flegme ail-' leurs. A l’occasion d’une dispute publique q U i f e faisoit dans le Pécile d’A- *hêne; où un Épicurien combattoit la Providence des Dieux, & soûtenoit que tQ ut va à 1 aventure, contre un Stoïcien < ssû vouloit prouver le contraire ; lu-, cien représente les Dieux sort intri— gués ; de peur que si l’Épicurien avoit 42 Curiosités le dessus, on ne cessât de brûler l’en- cens , & de sacrifier sur leurs Autels. Pendant que toute la Cour céleste cher- . che les moyens d’arrêter cette dispute, Hermagoras survient qui les assure qu’il n’y a encore rien de perdu. Je viens dit-il, du Pécile „ f ai vu ce qui s’y passe* les Philosophes n'enfont encore qu’aux injures mais iïs etoient prêts d'en venir aux coups quand je fuis parti. 2 . Ce que Campanelle avance sur la sympathie & l’antipathie des plantes, dont les unes s’assectionnent, & les autres se haïssent, ne prouve pas qu’il ne faille composer qu-’une famille des végétaux Sc des animaux ; & que les plantes ayent du sentiment : outre que cette sympathie & cette antipathie d’hu- meur & d’inclination, sont de pures chimères. C’est un reste du Péripatétis- me, qu’il n’avoit pas encore abjuré est déclarant la guerre à Aristote. Après avoir expliqué la définition que nous avons donnée des plantes est général, il faut avertir que fous le nom de plante, nous comprenons les Arbres , les Arbrisseaux ^ les sous-Arbrisseaux ost Arbustes , & les Herbes. *' II y a des Végétations qui ne son* point renfermées dans notre division í comme sont toutes les espèces de Cham* sur la Végétation. 45 pignons, de Mousses ; les végétations marines, telles que sont toutes les espèces de Corail, de Coralloïdes, de Madrépores, de Palme-marines, ou Panaches de mer, &c. Ce ne sont pas en effet proprement des plantes ; & M. Rai n’en parle que comme de plantes imparfaites ; quoiqu’on ne puisse nier qu’elles appartiennent à la famille des végétaux : parce qu’elles prennent leur nourriture par des organes intérieurs, Ôc qu’elles ne croissent pas comme les pierres qui ne grossissent que par la matière qui leur survient extérieurement. Comme la division des plantes par genre , par espèce, par classes, nVst d’aucun usage pour entendre le Mécanisme de la nature dans la végétation , & qu’elle ne regarde que les Botanistes j nous leur abandonnons un soin où nous n’avons nul intérêt d’entrer. Afin de procéder par ordre dans I’A- natomie des plantes, il en faut considérer chaque partie l’une après l’autre. Ces parties ne se trouvent pas toutes en *neme tems dans une plante. Ce n’est que par succession de tems qu’elles se forment. Et les plantes en effet n’ont Pas des fleurs & des fruits dès les préférs jours de leur naissance. Les fleurs sont de la jurisdiction de Flore, qui ré- 44 Curiosités gne dans le Printems; & les fruits appartiennent à Pomone, à quíl’Automne est consacrée. Nous allons donc prendre une plante dès ía graine, & nous ne la quitterons point qu’elle ne soit elle-même en graine. Notre cours va être d egrano ad gra - num. Dans cet intervalle on compte ces huit choses différentes : i. La Grain» ; 2. la Racine ; z. la Tige ; 4. les Bourgeons ; y. les Branches $ 6 . les Feuilles , 7. les Fleurs ; 8. les Fruits. Nous en allons parler dans les articles suivans. Article Premier. La Graine. L A Graine est la semence que les plantes produisent pour la propagation & pour la conservation de leur espèce. II y en a autant de sortes, que d’espèces de plantes. La figure & la grosseur des Graines varient lelon les espèces ; & ce qu’on ne comprend pas, c’est que les grands arbres portent souvent les plus petites Graines. Ainsi il n’y a nul proportion entre la Graine & I 3 plante qui en provient. La Graine du Tabac est très-menue, une Fève commune est trois cens fois plus grosse* j & Feve ouverte le Parenchyme. f C la radicule oa la Racine ru* tS ' D la plume oulalìpe tiate- C D la. Jeune Plante sur la Végétation 1 . 45* j cependant la plante qu’elle produit, est I moins grande, qu’une plante de Tabac. II n’est pas possible de passer en re- ! vûe toutes les fortes de Graines, il faut s’arrêter à faire l’anatomie d’une , parcs qu’encore que toutes les Graines ne se ressemblent pas en plusieurs choses, il y L néanmoins toujours quelque analogie entre elles. Nous nous fixerons à la dissection--d’une grosse Fève, parce que ' toutes ses parties font plus sensibles, & 1 plus aisées à suivre, & à reconnoître. La Fève est revêtue de deux peaux qui se séparent aisément quand elle est ! encore verte. Ces deux peaux forment ce qu’on appelle l’écorce. La premiers peau qui est I’extérieure , se nomme Cuticule: & la seconde qui est la peau intérieure, est le Parenchyme. A l’extrémité la plus épaisse de la Fé- Ve, on volt dans la peau extérieure un ; , petit trou à passer la pointe d’une aiguille •& toutes les Graines qui ont des peaux dures & épaisses, font, toutes percées de la forte , quoiqu’on ne le puií- íe appercgvoir dans quelques-unes fans microscope. Les deux peaux étant levées, on troupe le corps de la Fève qui est toujours Partagé en deux lobes. II n’y a point de lobes dans le Blé. La Graine de Crelìon 11 a trois, H.6 Curiosités Vers la baze de la Fève, on découvre un petit corps organique dont la partie d en bas s’appelle Radicule, parcû que c’est l’origine de la Racine. La partie d’en haut se nomme Plume ; c’est d’elie dont sort la Tige. La Radicule se nomme aussi la Racine séminale. Le petit trou qui est vers l’extrémité la plus épaisse de la Fève, est destiné pour 1’entrée de quelques petites parties aqueuses qui puissent exciter la fermentation absolument nécesiaire à la germination de la Graine ; c’est-à-dire, afin que la Radicule & la Plume se développent , & s’étendent. La Radicule est la premiere à se déclarer; & elle est deja devenue Racine quand la Plume ne fait que commencer à s’aionger pour se fore mer en Tige. M. Greî que nous avons suivi jus-; qu’ici, trouvera bon que nous le quittions pour quelque rems. Nous ne pouvons pas convenir de ce qu’il ajoute fur la germination de la Fève, quand il dit que les deux lobes se changent en deux feuilles. La premiere figure qui est à la fin de son livre , fait voir tout ls contraire. Les feuilles naissent de la Plume à mesure qu’elle s’alo~ge & développe. II faut maintenant consulter ceux sur l a Végétation. 47 ■qui ont fait de nouvelles découvertes fur l’Anatomie des plantes, avec l’aide du microscope. Je ne crois pas qu’on Aille jamais plus loin, qu'est allé M. de Leeuwenhoelt, de la Société Royale d’Angleterre, dans ses savantes Lettres intitulées, Arcana Naturœ. Ce Curieux infatigable a reconnu, que dans plusieurs espèces de Graines, la plante y est toute entiere , & qu’on la distingue nettement avec le microscope. Elle y est à la vérité pliée, enveloppée ; mais pourtant spécifiquement - remarquable. Les feuilles & la racine y font dans une situation non confuse, mais dis-, dncte. Une Graine, dit-il très-sou- v ent, n’est point autre chose qu’une plante en raccourci. C’est une plante Concentrée, c’est une petite migniature, mais qui contient tout. II faut qu’il paris lui-même. II s’explique là-deífus ; c omme un homme plein & pénétré de m beauté de ses découvertes. Il y -a des Graines. des semences,» às M. de Leeuir enhoek J où l’on dé- « couvre encore plus distinctement, que» p a ns le Gland, & dans les Avelines,» es plantes toutes formées avec leurs « muiiles, leur tige, & leur racine. II est « mfe de voir par là, que la nature si « la £ e fait toutes sgs opérations par un « ^8 Curiosités «pareil mécanisme. Non - seulement » chaque Graine contient dans foi une «plante qui en doit naître; mais elle » renferme encore une matière blanche » que nous nommons Farine , pour nour- «rir la plante naissante jusqu’à ce » qu’elle ait une racine capable de l’ali- » menter des sucs de la terre. II y a ou* «tre cette matière farineuse une hu- » meur huiileuse, pour entretenir long- » tems dans la Graine le principe de la «vie, qui anime la petite plante con- «centrée. Sans cette huile vivifiante* « fans ce suc balsamique , elle se sèche- « roit & périroit. O Grandeur de Dieu ! » ô Sagesse inésable ! II n’y a point de «sexe parmi les plantes comme entre » les animaux, dont la propagation se » fait par le concours mutuel des deux « sexes. II íalloit donc pour la généra- » tion des plantes, que f Auteur de la «nature renferma dans chaque graine » pour la jeune plante, tous ce que le s » animaux dans leur formation , reçoi- » vent du pere & de la mere. A rexcep' n tion que la plante feule en produisant » fa graine , remplit le ministère des » deux sexes ; c’est par-tout la même » analogie, le même ordre & la même » sagesse. Les animaux formés du pere, » trouvent dans le sein de la mere leu? v nourriture St 7 R 1A VÉGÉTA TrOIs. 49 Nourriture. On croit que cette nourri- « tore se communique par le boyau <* ombilical. Dans la Fève que nous « avons quittée, ce petit embryon de « plante est attaché par un petit ligament * aux deux lobes , dont il tire fa nour- <* f tture. Voilà íusage des lobes qui ne « sc changent pas en feuilles J comme l’acc cru M • Crew. L’animal est-il né, le« Vaisseau qui lui fournissoit fa nourri- « ture est rompu , & se sèche. La petite « plante est-elle sortie d’entre les deux « Peaux qui l’enveloppoient avec les « deux lobes; sa racine & sa tige sont- « îlles développées, le petit ligament * Par oìi elle prenoit fa nourriture dans * * e sein de la graine , se roropt, le lé «c , & les lobes épuiíés pourrissent. « Cette Analogie entre la formation « de la plante , & la formaton de l’ani- « ^al, éclate encore plus distinctement, « h on compare une graine avec un œuf « d oiseau. Ce qu’il y a du coq & de la « j^ule dans l’œuf, est de la plante feu- « e dans une graine , qui n’est point au- « * re chose qu’un œuf de plante. Com- * 11)6 les plantes n’ont point de mouve « ^ e nt local, de mouvement progrelfif, « j.‘es ne peuvent se chercher comme « °dt les poissons, les oiseaux , les ani- aux de la terre , les reptiles, les in- « 1 Partie. Q $0 Curiosités » sectes, il faut donc que la plante ren- !» ferme dans chaque graine , la fécon- »dité qui vient du pere, & la nourri- ?» ture ‘que donne la mere. Les Poètes qui disoient que leurs Dieux étoient des deux sexes, auroient parlé plus sensément , s’ils favoient dit des Plantes. En un autre endroit M. de Leeuviren- Jioek compare la propagation des Plantes avec celle des poissons. Les poissons ont leurs œufs ; les plantes ont leurs graines qui font leurs œufs. II y a un rapport tout à fait semblable de part, Si d’autre: à cela près que la plante doit j dit notre curieux Physicien, remplir le! fonctions du mâle & de la femelle. » De toutes ces observations, il ek » faut conclure, ajoute M. de LeeuiveU' »hxk que Dieu très-bon , très-grand » » & très-fage Architecte de la machin? » de fUnivers, ne produit plus de noU" » yelles plantes, ni de nouvelles créattf" » res ; mais qu’ayant répandu de fa f?" » condité autant qu’ii lui a plû fur cels » qu il créa d’abord, il les rendit en" 9 ceintes de toutes les plantes & # p tous les animaux qui dévoient naitr? » dans la íuite de tous les siécles. » les plantes qui naissent à chaque P íltl ^ 9 tems, font auffi anciennes que le me# ìde. Je dis la mêipe chose des anima# ' L. tie na né Sc qu ÎP II Ke To de ter Pei £ìc Vej d’u c et Pa, he W Puì «et J >' ttlil tl)l K V í sur lá Végétation, ji Leurs petits font contenus dans la ma- « tiere qui remplit les vaisseaux sémi- œ, Raires des mâles,& ce qu’on appelle gé- « itération, n’est qu’un développement* 8c une manifestation d’un animal,» qui fut formé de Dieu peu de jours °c après la création du Soleil, de la* Lune & des Étoiles. Epift- 64. adeI1 nourrit pour végéter en hauteur & eí \ grosseur. Le reste passe au Parenchy me , & à la Peau qui en tirent l eU nourriture. -y, 4. Les Insertions font des entresla Biens, & des communications d u suK ri a Végétation, /x Tetichyme qui passent au travers du Corps ligneux , pour s’étendre jusqu’à ìa mouëlle. Leur usage est de servir de filtres, pour élabourer 8c perfectionner le suc dont le Corps ligneux se nourrit, & pour le distribuer à toutes les parties qui en ont besoin. y. La Mouëlle tire son origine im^ •ïlédiatement du Parenchyme de l’écor- Ce. Le suc passe à travers les insertions È our aller de l’écorce vers la mouëlle. -Ile est dans le centre de la plante, où. k Corps ligneux l’enveloppe 8c la conserve. La mouëlle est là comme une es- Pece de tonneau dans lequel le suc en- rre pour y fermenter , 8c pour s’y pu- r5 fier ; 8c quand le suc y a reçû sa dernie- J" 6 perfection, les insertions fervent à * e distribuer exactement par-tout. " M. Grevs dit, que les Racines de î^utes les Plantes ont de la mouëlle ; 8c > Rai dit que les Racines de la Nico- ^Ne 8c du Stramonium n’en ont point, ■^fitr’eux le débat. Il y a des Racines qui, coupées d’un c ^rtain sens , font voir des figures assez Plaisantes. La Racine de la Fougere, c t>upée obliquement, représente un Ai- ^l g s les ailes étendues, j. fi-a Racine de Pareira-Brava a dans Qtl centre un Soleil exactement destiné, Ç iiij y6 Curiosités & qui est entouré d’autant de cercles divisés par rayons, qu’elle a d’années. Article III. La Tige. L A partie supérieure de ia plante est , la Tige qui tient à la Racine. L’en- droit où la Tige & la Racine se joignent , s^appelle Liaison. Cette Tige s’é- iéve en haut íur la Racine qui en est la baze. Dans les Arbres, cette Tige s'appelle un Tronc ; dans certaines plantes, un Chalumeau ; dans les différentes fortes de Blés, un Tuyau. La Tige a, comme la Racine, -une Peau; un Parenchyme . un Corps ligneux j des Insertions , & une Mouette : Ët f u sage de ces parties est presque le même que dans la Racine. Comme M. de Leeuwenhœk a plus étudié que personne , la structure de la Tige de s plantes , & les fibres du bois, qui compose le Tronc des Arbres, il faut apprendre de lui ce que M. Gre'W'» & M. Hook ne nous ont point communiqué. M. de Leeuwenhœk dit, qu’il a observé de trois sortes de pores, ou de petits canaux dans la structure du bois de sur la Végétation, y-7 ’différens Arbres qu’il a examiné avec le microscope. De ces petits Tuyaux de communication , les uns vont de bas en haut, d’autres de travers ou horizontalement , c’est-à-dire, de la circonférence du Tronc au centre ; & enfin il y en a de troisièmes qui tournent en cercle Vers l’écorce de l'Arbre. L’usage de ces trois classes de pores ; est de porter & de distribuer éxacte- ment les sucs nourriciers qui montent de la racine, pour être l’aliment de toutes les parties de l’arbre. Ce savant Physicien ajoute que le commun du monde, qui croit que l’écorce du Tronc tire sa Nourriture de la Racine, est dans Ferrent. Car enfin , dit-il, l’écorce a pour nourricier le Tronc même avec lequel elle a communication par de petits radeaux , quelquefois circulaires ; tels qu’on les remarque aisément dans le bouleau , dans le Cerisier, dans le Pê- c her, &c. Cortices zrborum non ex radi- Ce . verùm ex ligno produci J & nuîrìri jïa « ^o. Epist. pag. 20. Tom. II. Le bois des Arbres n’est donc point a utre chose, qu’une infinité de Tuyaux ^°rts petits, ou de fibres creuses, par oà sucs nourriciers montent dans toute tendue de l’Arbre. Ou, si l’on veut, ^ Tronc est une espèce de tonneau qui C v 58 Curiosités empêche que ces sucs ne se perdent, & ne soient altérés, dit M. Malpighi, par l’intempérie de l’air. Fibres lignées tubur, lofa corpora . M. de LeeuWenhœk nous représente un tronc de Chêne , coupé hori son râlement, où l’on compte fort aisément dix-huit cercles très-bien figurés. Le nombre des cercles montre le nombre des années de l’arbre, ainsi ce Chêne avoir dix huit ans. II se forme chaque année un nouveau cercle entre l’écorce Sc le tronc. Ces cercles ne font pas également épais & nourris ; cela dépend de la fertilité de Tannée , car lorsque le tems a été favorable pour la végétation , le cercle a plus de volume» Quercus kabens oSodecim cìrculos JìgnA líarijjima & ìndubìtata oclodecim anno - rum ; ita ut quolibet anno * uno augeattíf sìrculo . Epist. Part. 2, pag. 15. tom. II- On peut donc s assurer de l’âge d’un arbre, en comptant le nombre de cercles, supposé que l’arbre soit encof e en âge de croître. On dit que les Chêne* croissent jusqu’à cent ans. Au-delâ de ce terme , il ne se forme plus de cercle* nouveaux. On peut dire alors d’uJ* Chêne ce qu’on dit, en terme de mans- ge , d’un cheval de huit ou neuf ans > éc qui n’a plus certaines dents dans » l J a. i. o S nW-Xv î Z H A E M-K V àZL).'.:r MU sur 1A Végétation? jrp bouche, qu’il ne marque plus. Outre ces cercles, il y a dans de certains bois dVbres des figures, qui font plaisir à voir, & qu’on admire comme autant de petits jeux de la nature. Dans le Gui-de-^hêne on y volt un soleil fort bien marqués Dans le Saule, on recon- noît la figure\ì’un serpent; & si on s’a- vifoit de pousser plus loin ces observations , on rencontreroit toujours quelque chose digne de f attention des Curieux. OBSERVATION. Il ne sera pas inutile d’obferver ici, *• Que ces cercles qu’on voit dans un tronc d’arbre , coupé horifontalement, Ne sont pas tout- à-fait ronds , & qu’ils dégénèrent toujours un peu en ovale; En forte que la mouëste n’est jamais exactement au milieu : 2 . Que l’arbre est tnieux nourri J & que les cercles font Plus épais ducóté duMidi. Au contrai- * e du côté du Septentrion, le tronc a t^oins végété, & le rayon du centre à la Circonférence est le plus court de tous. 11 n’y en a point d’autre raison que l’as. Pcéì & la chaleur du Soleil qui dilate les pores & les fibres de l’arbre , *5 tient en état de recevoir aisément les Ucs nourriciers. La partie du trône qui Ç vj 6o Curiosités est tournée au Septentrion , est desséchée par l’Aquilon, vent ennemi de la Végétation. Inexpérience confirme cette raison; car si on examine l’Ebéne, qui croît dans la Zone Torride, où le tronc de cet arbre est également échauffé de toutes parts par les rayons du Soleil, on trouve que les cercles décrits dans les fibres du bois , font tous parfaitement ronds, & exactement concentriques; parce qu’il se fait par tout une égale distribution des sucs de la terre. Cette observation sert à deux usages. i. Le premier, c’est qu’il est important , quand on transplante un arbre, de le remettre dans la même situation où il étoit, par rapport aux quatre points cardinaux du monde : c’est-à dire, qu’il faut mettre au Midy le côté de l’arbre qui y étoit, si on veut qu’il réussisse; car enfin si on expofoit au-Septentrion le côté qui étoit en premier lieu au Midi, l’arbre amaigrïroit certainement, parce qu’alorsles pores auparavant dilatés par la chaleur du Midy, s’étreciroient par le vent froid du Septentrion , & re- fuseroient le passage aux sucs ; & les pores qui auroient été refférés long-tenas par le froid du Septentrion , ne seroient pas en état de se r’ouvrir si-tôt à la chaleur du Midi. Pa y- Sepient- Irctx e. ' .'a . X Septent / * sur ia Végéta Tr on. 6 t 2. Le second usage, c’est que si on s’égare, & si on se perd dans un bois ou dans une forêt, il est aisé de se retrouver, en s’orientant. Voici comment on s’oriente ; on coupe une branche de quelque arbre ; on regarde le côté le moins nourri ; c’estle Septentrion : en regardant de ce côté là, l’on a le dos au Midi, rOrient à la droite,& l’Occident à la gauche. Sachant que le lieu où l’on doit aller coucher, est à l’Occident, on enfile fur la gauche. Dans la Zone Torride on ue sauroit faire ce petit manège qui est quelquefois d’un grand secours. Maiole dit que plusieurs grands Princes se sont perdus à la chasse dans des forêts , où croyant trouver beaucoup de plaisir , ils y ont éprouvés de piquantes inquiétudes; & que quelquefois ils y ont couru risque de la vie. Maiol. de Plantìs j Colloq. xxj. pag. 462. Voyez la figure d’un tronc a’Ebène , & celle d’un tronc d’arbre de nos climats Septentrionaux. §L Curiosité! Article IV. Les Bourgeons les Branches & les Feuilles. L Es Bourgeons ne font autre choie; que le tronc continue ; ainsi qui connoit le tronc, connoît ce que les Bourgeons font essentiellement, Les Branches font encore la même chose, puisque ce sont des Bourgeons, qui avec letems font devenus des Branches. Les Feuilles ne diffèrent pas beaucoup des Bourgeons; car enfinles Feuilles ne font d’abord que des Bourgeons qui fe font déployés & étendus. Lorsque les Feuilles font ployées; elles environnent les Fleurs , & ne les exposent au grand air que peu à peu, & à mesure qu’elles peuvent le souffrir. Quand elles font déployées, elles défendent les Fleurs & les Fruits des acci- dens qui leur pourroient nuire , & fur tout les Fruits délicats, comme les Fraises, les Raisins, les Meures, qui féche- roient & périroient fans la fraîcheur que leur conserve l’ombre des Feuilles. M. Rai n’est pas de ceux qui croient populairement, que les Feuilles n’ont été données aux arbres, qu’afin de nous sur la Végétation. 6 ? fournir une agréable fraîcheur, & pour empêcher que la grande chaleur du Soleil ne dessèche les Fleurs & les Fruits. S’il a raison, il faut se désabuser de cette opinion vulgaire : En effet ce savant Physicien prétend que les Feuilles servent à cuire, & à digerer l’aliment» & à le renvoyer bien préparé aux autres parties de la plante. M. Rai fuit en cela le sentiment de M. Malpighi ; cependant il est certain , que dès que les Fruits font meurs, les Feuilles tombent comme n’étant plus utiles dans la famille des végétaux. On fait même que fous la Ligne où il fait éternellement chaud,’ les Feuilles ne tombent jamais des arbres, parce qu’elles font nécessaires à former de l’ombre. Ainsi il fembleroit quasi que ce feroit là leur principale destination, Du moins cela nous est-il plus notoire» SUR LA VÉGÉTATION* 7$ ont été allumés fous terre dès le cçm- mencement. Ces feux souterrains font cause de la chaleur que nous expérimentons dans les eaux minérales. Scient. Nat. Part . iij. ch. 14. pag. 272. & 273. M. Voffius prouve par six ar-rumens qu’il y a des feux souterrains. 1. Par les Volcans: 2. par les exhalaisons & fumées de la terre: 3. par les fontaines qui font au haut des montagnes : 4. par les bains chauds : y. par les tremblemens de terre : 6. par la génération des métaux Lc des autres fossiles. Selon lui, les feux souterrains font de l’institution de la nature, & font la cause efficiente de ces divers phénomènes que nous vexons de rapporter. II dit que le Soleil du ciel ne portant pas son activité plus avant que dix pieds dans la terre, il est nécessaire qu’elle ait dans son sein un anti-so- lest, un soleil terrestre , un Soleil opposé pour y répandre de tous côtés fa chaleur par des voies & des soupiraux que la nature entretient. P rater illum Solem c trie stem quemdam agnofcere oportet qua- fi antiliou , five solem ^ vel ìgnem ad !-> v ersum : unie cacos per meatus je undique dijfundat. De idolat. Lib. ij. cap. 63. P a g. 644. Le P. Kirker Jésuite, remporte in- D iiij So Curiosités contestablement la palme touchant cette Physique souterraine. • Les Physiciens ne saisissent que balbutier, quand ils parloient de ce que la nature fait fous la terre. Mais cet homme de la plus belle imagination qui fut jamais , a pénétré dans les abymês les plus profonds, & il a découvert mieux que tous les Philosophes ensemble, tout le secret de la génération des minéraux. Enfin la Physique lui doit la connoissance de ce Pyrophylacium de ce 7 ré for de feu qui est dans les entrailles de la terre. B y a, dit-il, un trésor de feu souterrain qui íe manifeste par les soupiraux des volcans, & par ces exhalaisons & fumées' chaudes qu’on apperçoit sortir de la terre. C’est ce Pyrophylacium qui fait les bains chauds, par les exhalaisons & les vapeurs chaudes qu’il pousse en haut. Quand ces exhalaisons íe conduisent dans quelque caverne froide de la terre, elles se résolvent en eau , & forment - des fontaines & des ruisseaux. Elles dissolvent aussi les sucs métalliques , & contribuent à la produélion des' métaux , &c. Mund. Jubterran. Tom. i. lib- ■ iv.f j. cap. 2 & z. Aucun des Anciens ssa parlé si seníément fur cette Physi- <3 ue - . : Herbinius dit, que de ce trésor de feu SUR TA V ÈG É'T-'A T 10 N. Sl Souterrain, se forment les Catarafles de feu; c’est-à-dire, ces fourneaux souterrains qui fervent i. à former, fondre 1 & purifier des métaux dans le sein des- miniétìes, comme dans autant de creusets,fabriqués - par la nature; 2. Â.dis- tiler dans les creux de la terre , comme dans autant d’Alambics, les matières minérales,. asm d’élever vers la surface de la terre , des vapeurs chaudes & des esprits sulfureux 1 , alumineux, salins, vitrioliques,- nitreux -, sec- pour communiquer des vertus Médicinale» aux plantes, & aux eaux minérales. A la vue de cette disposition toute admirable ,' toute divine. & toute pour l'hqm- m.e, : pouvons-nous moins faire que dé Rous récrier avêcle Roi Prophète : Quê vos œuvres font, grandes sir excellentes „ Seigneur J Vous ave%fait toutes ckofei'apeò une souverain e fagejj'e : La terre eft tome: r emplie de vos.biens. Psialm. J03. v.2p- Je, ne pouvois mieux finit cette obftrVa- tton, fur le feu.souterrain, que pa récité- Judicieuse réfiexièrn d’Herbinius. De CátaraSt. admirahd . Munái s lib.j. Dif~ sert. 1. çap. 14. pag. ty. • II n’est. pas si facile de marquer oû îìiçu a placé la principale demeure d« feu qui-,.durant les trois premiers, 'jotirsi dq li cryafign , était diffus .& répandus D v 82 C xr R T O S T T É S dans toute ìa Région Libérée. On convient qu’il y en a une bonne partie dans le Soleil & dans les étoiles ; mais on n’est pas d’accord:où séjourne le feu du monde élémentaire. Aristote savoir placé dans le concave de. la Lune. Lib. I. Meteorolog. cap. z. On a crû durant deux: mille ans qu’il étoit là ; mais M. Defcartes l’en » chaste de nos jours, & malgré une st longue possession , les Péripatéticiens n’ont point pû faire valoir leurs fins de non-recevoir; le feu a été condamné de déguerpir, & d'abandonner le voisinage de la Lune , i°. Parcs qu’il ne servoit de rien en cet endroit , & qu’ìl ne daignoit pas méme dans les rigueurs de l’hyver, nous adoucir l’in— clémence de l’air ; 2°. Parce que dans les nuits les plus noires, il ne lui plaisoic pas de nous aider de fa lumière, & de réparer ce que nous perdons par l’absen- çedu Soleil & de la Lune. . , Dans le même tems que M. Descartes chassa le feu du concave de la Lune, M. Gassendi l’a chassé du centre de la Terre , où plusieurs Philosophes le lo^ geoient. A cause de sa situation on le nommo:t feu central ; mais comme M» Gassendi craignoit qu’il ne s’éloustîk là faute d’air. ou qu’il n’y mourût de faim, jl l’a tiré du centre de la Tetr sur la Végétation. 8z ks, & l’a renfermé dans des cavernes souterraines ou il ne manque ni d’air,' ni d’aliment. Dans ces antres profonds, il se repaît de matières grasses, oléagineuses-, sulfurées ; & quand l'air lui manque , il ouvre le haut des montagnes ,. 6c déchire les entrailles de la terre qui en souffre d horribles convulsions. La Sicile & le Royaume de Naples n'expérimentent que trop íouvent ce que peut faire ce feu : l’i'dée des désordres qu’il vient de causer par les épouventabíes tremblemens de terre, contre lesquels nous ne sommes pas encore rassurés, fait frémir. Dans la premiere Edition de cet Ouvrage , j’avois admis le feu central ; mais après avoir bien examiné les raisons que M. Gassendi apporte pour le combattre, j’ai crû que je devois fans façon désavouer mon premier sentiment , & na'en tenir aux feux souterrains, que personne ne conteste. Comme je suis persuadé que sans ce feu, il ne fe feroit point de génération métallique dans le sein de la terre, ni de végétation dans fa surface, je crois conséquemment, avec M. de St air ; que le feu souterrain n’est point allumé par le hasard, ni par l’cf- fervescence qui résulte du mélange de Quelques liqueurs propres à exciter du 84 Curiosités feu ; mais qu’il est dans les cavernes de la terre, par la sagesse de l’Auteur ds la nature. Stair Explorât. 6. pag. 324» n. 49. En effet pourquoi n’y aura-t-il pas dans la Terre des trésors de feu , comme il y a des réservoirs d’eau ? Le feu s’étend & communique fa chaleur par des soupiraux, comme l’eau se répand & coule par des canaux, dont la niasse de la Terre est toute remplie ; ainsi que le démontrent les fontaines, & comme le reconnoissent ceux qui travaillent aux minières. Voilà donc notre Acteur trouvé, pour faire entrer les sucs nourriciers dans les racines des, plantes : Le feu souterrain poulie ces sucs- jusqu’à la tige; alors la chaleur du Soleil survient, qui fait le reste, en les élevant jusqu’aux extrémités des branches : peut-être parce qu’il dilate les pores & leurs fibres, ou bien parce qu’il subtilise la matière des sucs, en les réduisant en vapeurs , & en fumées, ou plutôt parce qu’il fait tous les deux à la fois. Une chose qui me paroît aujourd^hui incontestable dans la végétation des plantes, c’est qu’il n’y en a point, qui ne vienne de graine. Les Anciens ont crû qu’il se saisoit dans la famille des yégétaux, plusieurs générations fans sur la Végétation. 85 ! semences. M. Rai est encore de cette opinion , à l’égard des plantes impartîtes , comme tont les Algues, les Co- : taux dans la jner, les Champignons , les Truffes & les Mousses fur la terre. ! Et même pour les plantes parfaites , il 1 penche encore beaucoup du côté des Anciens. Le Gui-de-Chêne qui vient d’aventure , lui semble une chose décisive sur ce point; & il s’en rapporte volontiers à Virgile qui a chanté. JEnúL ; vj. i Qualefiletsylvis brumalifrìgore Vifium Fronde vìrennovâ J quamnonsuafiminat ctrbos. Il faut laisser là M. Rai, & íe tour- n er du côté de M.. Malpighi,, qui voulant savoir à quoi s’en tenir là-deffus , sit l’expérience suivante , sur laquelle il a réglé ses sentimens. II mit de bonne íerre dans un vaisseau de verre qu’il Couvrit d’un voile st délié, que l’air, le Soleil & la pluie étoient les seules qui y pussent entrer. Aíïûré que le vent y’y pouvoit porter aucune graine , J 1 laissa ce vaisseau fort long tems exposé à l’air , à la pluie & au Soleil ; & il ft’y survint jamais la moindre apparence plante. II a conclu de-là, que fans 86 Curiosités semences il ne se sait point de générad tion dans la famille des végétaux. Mais on ne peut rien voir de plus Fort & de plus convaincant à cet égard, que ce qui est rapporté dans les Mémoires de l’Academie Royale des » Sciences. On y dit: L’on fait que » presque toutes les plantes viennent dé -> graine : il est à présumer que celles -> dont la graine nous est inconnue » » ne laissent pas d’en venir aussi ; mais ® que leur graine est imperceptible à » cause de ía petitesse.. Les An- » ciens ont assuré que les fougères ne » portent point de semence : Cepen- » dant les Modernes, après avoir bien -> considéré cette poussière qui fe trou- » ve fur le dos des feuilles, ont trouvé -> que c’est de la semence effectivement. ». On difoit que cette espèce de -> Lunarìa , dont certains ChymisteS » font tant de cas, n’avoit point de se- » mence : on y en a pourtant détou- » vert ; mais elle est si déliée, qu’on ne » la fauroit appercevoirlans microscope. ».... Les Modernes ont aussi décou- » vert que le Polipode a de la graine.... » M. Grew en a trouvé aussi fur le dos » des feuilles de l'herbe appellée Lan- » gue-de-Cers' . On a encore re- » connu que L’ OpiogloJJum >■& le Cap il- sur t a'Végétation. 87 laire d» Montpellier viennent d'une « gtaine très menue, preíque im- « perceptible. On ajoûte le Corail rou- « £ e ) parce qu’il y a apparence que ces n$ mettre en terre, & nous nela quit- ^rons point , qu elle n’ait produit une ì plante, & que cette plante ne se soit or- ^ee de fleurs, Le chargée dé Fèves. I . Quoiqu’il ssy ait pas un rapport en- tler entre la plante qui vient d’úne Fè- Ve, Le un Chêne qui se formé d’un gland y on rie laissera pas d’entrevoir la J'óute que la nature luit dans la pro- ductiop d’un Chêne, quand on décou- SS' C u r i o s r t Ê s vrira le chemin qu'elle tient dans fâ végétation d’une Fève. La nature, garde tellement Funiformité dans ses ouvrages., qu’on la reconnoît par-tout. E,lle ese par-tout la, même. Elle n’a qu une forte d’organe ; & un même mécanisme pour la génération de .toutes les- plantes, comme pour celle de tous les animaux.. Observation IL La Végétation LuneFbe. I. E petit corps que nous appel- Ions Fève , étant déposé dast^ une terre humide > vers l'équinoxe dst Printems,,commence par se gonfler , est se remplissant de ce suc vivifiant, dont la terre est imprégnée. Ce gonflement, se sait par la fermentation que cause dans son sein Fhumidité , qui s’y insinue par le. petit trou dont nous avon$ parlé. Alors Fécorce se crève néces-7 íairemem, afin de donner lieu à la dse ìatation du corps qui grossit. La prison étant ouverte, & les liens í^ompus * la Radicule pénètre dans la terre > & Plume s’alonge pour s’élever. Cette ptéç roiere démarche se nomme la Geriw níL ~ (ion. j qui n’est autre choie qu un gonfle' sur la Végétât i o n. 89 ®&ent que cause la fermentation dans ks parties de la Fève. C’est le premier développement qui arrive à. la petite Plante concentrée dans le corps de la graine, dont les parties se gonflent à Peu près de la maniéré, que fait une e Ponge dans Peau. 2. La Plume trouvant moins de chemin à faire en s’élevant du côté de la surface de la terre, fuit volontiers cette r °ute, & d’autant plus que fa pointe E eti haut. D'ailleurs la terre nouvellement labourée & remuée y est j e gere & aisée à percer. Enfin le So- e d , la rosée , Pair Sc la pluie, qui a gitent incessamment la surface de la *erre, ouvrent à cette Plume une facile sortie , & la sollicitent à s’élever. Peut- tír e aussi quelle fe porte en haut, par- £e que les parties qui la composent, *°nc plus volatiles, plus sublimées, plus ^alcées; & pour ainsi dire plus spi- Ruelles ^ que celles dont est composée Radicule, qui à peine est devenue Racine J que la Plume devient aussi tôt %e. Z. On volt croître dans le cœur de ftotre jeune plante, une espèce de filaient en droite ligne qui s’élève à me- tae qu e l a chaleur sublime le suc nour- ficier, Sc le pousse en haut. Ce fi l a m ent £0 Curiosités c’est la tige, à l’extrémité de laquelle la séve exaltée se porte abondamment » ôc là se forment des nœuds, des boutons , d’où vont bientôt naître des feuilles & des rameaux. 4. De ces petits bourgeons composés d’une matière pouflée précipitamment par la fermentation & condensée par la fraîcheur de Pair au bout des , branches, sortent des fleurs qui font d’autant plus variées dans leurs char- j mantes couleurs, que les matières sulfureuses lont plus abondantes dans la fève. Ces parties sulfureuses étant ce qu’fl y a de plus subtil dans les sucs nourriciers , elles montent fans difficulté à l’extrémité des branches où elles se coagulent. afin d’y donner ce vif & beau coloris, qui fait toujours le principal mérite des fleurs , & quelquefois le désespoir des Peintres les plus j habiles. ; y. Comme ces matières sulfureuses» qui colorent les fleurs, ont peu de confidence , le grand air a bientôt dévoré & détruit ces beautés frôles & délicates. La fleur fe fanne & périt, parcs j qu’un petit bouton tendre qu’elle a mis à couvert pour quelques jours, contre les attaques d’un air trop dur, lui coupe les vivres, fe retient tout Paliment 3 fs SUR LA VÉGÉTATION, pi ftourrit, se grossit & s’endurcit. Ce houton est le fruit naissant qui fuit la í fleur : c’est un enfant qui donne la mort à celle, dont il tient la vie. Ce que Rappelle ici fruit dans la Fé- Ve, est une gousse qui , au tems de fa maturité, íe trouvera remplie de qua- í îre ou cinq grosses Fèves semblables à i celle dont est née la plante que nous venons de suivre si éxactement. 6. La mort de la plante, selon le cours ordinaire de la nature, provient du défaut de ce précieux suc balsamique qui lait que toutes les plantes germent , s’enstent & croissent. Ce détaut de fève peut venir du champ, qui étant épuisé par les végétations passées , n’tst plus capable de rien produire. Ce défaut peut encore naître de la plante morne , dans les pores & dans la tige, êc dans la racine , étant trop desséchée par la grande chaleur de l’Été , ne peuvent se réouvrir pour donner entrée aux sucs nourriciers. La plante deve- nue dure & opiiée, n’est plus propre aux fonctions de la végétation. 11 n’y a plus de ressource, il faut qu elle périsse. Et dura rapit inclementia. mortis. Virg. Georg. Lib. Z. p 2 Curiosités ; Ces Principes posés, il est aisé d’ex- pliqúer tout ce qui arrive aux plantes de notre climat dans les différentes saisons de Tannée. ; 1. Au Printems, toute la famille des Végétaux engourdie durant le froid de' PHy ver qui fígeoit les sucs dans les pores de la terre, ou qui les retenoit dans les racines, se réveille alors, & se couronne de feuilles & de fleurs. Pourquoi ? Les sucs de la terre & le nitre de l’air mêlé avec les pluies, la grêle í &c la nège, se fondent, fermentent par la chaleur du Soleil qui s’approcbe de nous, & dans ce mouvement ils font disposés à monter des racines au haut des plantes où ils forment des feuilles &• des fleurs nouvelles. 2. Dans l’Eté on volt sécher & mourir plusieurs plantes. Pourquoi ? La chaleur de TEté est quelquefois si violente , qu’elle donne trop de mouvement aux sucs de la terre : ce qui est' cause qy’ils montent avec tans de précipitation , des racines dans la tige, & de la tige dans les branches , qu’ils ne s’y arrêtent pas assez long-tems pour s’y,. coaguler, & d’ailîeurs les pores des branches, ^élargissant par la vitesse*avet laquelle ces sucs passent, ils n’y peuvent plus être retenus ; ainsi la plante meurt faute cl’aliment. sur ; l ; a Végétation. 93 Oeil ainsi que le P. du Tertre, Jacobin,a remarqué que dans les Antilles, pe.ndant l’Hy ver , tout pousse, & ,que les campagnes font couvertes de verdure > 4c qtì’au contraire la plupart des plantes meurent dans l’Été, & les feuilles tombent des arbres, l’excès de la chaleur faisant en quelqúe maniéré en -cés I-fles l^s effete-, que l’excès du froid fait dans ’l'Êurop'e. fiifi.- général, des Antilles* ^Tom.lJi pag. 68. 2. Dans l’Automne les feuilles & les ‘fruits tombent. Cela vient de ce qúe la chaleur du Soleil diminuant chaque ■jour pardon éloignement, lés íucs ne montent plus à Pordinaire. Les feuilles de les fruits - cessa ns d’etrte hiiméclds & ■nourris, íe sèchent & tombent. 4. Durant l’Hyver, les arbres font dans l’inaction, & ne donnent aucun signe-de viejc’est que les arbres tirent leur nourriture dés'sucs de la terre ; or le froid de l’Hy ver fige ces íûcs, & resserre les pores des arbres z il ne faut'donc pas s ’étonner si les plantes privées de" ce hui les anime & les fait vivre, ne font "Visiblement aucune des fonctions de la végétation j 8c ss elles paraissent dans Lette nudité honteuse, dont parle Virgile, Géorgie. Lib. ij. 94 Curiosités Frigidus J & sylvis Aquilo decujjlt hortòrem II y a des arbres qui ne perdent point leur verdure dans l’Hyver. Ce foslf ceux que l’on nomme Arbres verdis - comme les Ifs , les Efpicias, les Houx. Leur vie est plus dure, leuxs feuilles font d’une coníisterrce plus ferme. Ils résistent mieux aux rigueurs du froid. Les Orangers font encore d’une vigueur plu* forte, ils donnent en tout tems des fleurs ou des fruits, ils ne font jamais, fans cette admirable verdure, qui fait l’or- peinent & le charme des Orangeries > durant les plus âpres gelées de I’Hyyer. Heureux les climats où les arbres ne fe dépouillent jamais de leurs feuilles, & où la Nature entretient un Printenrs éternel ! S. Augustin dit fort bien, que l’Ifle de fflos dans les Indes, est préférée à tous les autres terroirs, parçe que les arbres y conservent toujours leurs verdure. De Civitat.Dei J Lib. xxj. cap., y. y. Ceux qui habitent la Zone Tor-r ride, ont le plaisir d'ignorer ce que ç’est que nos froids & nos glaces du Septentrion. Legrand désordre que les froidures violentes de nos Hyvers causent dans la Nature , dont elles changent f 1 tristement toute la face, fait que j'hésite- sur la Végétation. 5)/ r ois à préférer notre climat, à ceux âvnr l’Été, quoiqu’incommode par ses chaleurs étouffantes, offre en tour tems stes ombrages verds pour se rafraîchir. •Ti me semble qu’il est bien agréable de v °ir les arbres toujours verds. Peut-être EN est-on moins touché, à cause de l’ha- hìtude & l’unisormité qui rendent bientôt les meilleures choses fades & in- hpides. On veut voir du. changement htr l a Scène. Et après tout, le goût ost si bizarre & st changeant , qu’cn pas encore pû s’afsûrer de ce que i £ s hommes aiment. Egésipe rapporte une chose curieuse : st dit que de ion tems il y avoit dans la ■Province de Memphis, un Térébinthe *uffi ancien que l’Univers, que c’étoit Nn des arbres que Dieu forma le troisième jour de la Création du monde, & Hue depuis cinq mille ans qu’il étoit là, st n’avoit jamais cessé un moment d’être v erd. JEgeJip. Lib.iv. cap. 23. Voilà un Ntbre dune longue vie. Nous en allons Voir un d’une vie très-courte. Aristote , après lui Cicéron , Boca- Ce j Cardan, Scaliger, de Mey , depuis peu Swammerdam traduit par M. shéyenot, ont parlé de YÊphémere J qui est un petit infecte, ainsi nommé, parce qu’il ne vit qu’un jour. Cet insec- §6 CURIOSITÉS te naît au Soleil levant : il est dans toit* | te fa perfection à midi, & il meurt ai* :Soleil. couchant. On le volt voler I e long des, rivières, vers la fin du me* 5 de Juin. Ainsi le cours de fa vie est ds seize heures. II est enfant lé matin» d’une stature parfaite à- midi, & vieil" lard le soir, dit Cardan : Epkemeriiï martepueri meridìe juvmis J senéx-vèspW' II n’y a pas seulement des Éphémères parmi les animaux , il y en a aussi pat" mi les .plantes, Il-n’y a point de plante plus Éphémère que le Lierre dont pat" le rÉcriture-Sainte. U ne vécut qu’ust jour. ■ t Lstnstoire dé cet arbrè est dans-le des" ; îiier Chapitre de la Prophétie de Jonas» où il est dit, v. 6 & 7. -> Le Seigneut --- notre Dieu fit naître alors un Lierre qct » monta furla tête de Jonas, pour lui fai" » re ombre, & pour le mettre à couvert, »parce qull étoit fort incommodé de 1-* » chaleur. Ce qu’il reçût avec une joi e ! -> extrême. Le lendemain j dèslepoit^ -> du jour, le Seigneur envoya un ver, q ul j» ayant piqué la racine du Lierre , 1? » rendit tout íèc. CHAPITRE sur la Végétation. §7 Chapitre IV. ■C? que c e(l que la Sève, ou ce que les Physiciens nomment Suc nourricier des fiantes. I L y a des Physiciens qui n’hésitent point à dire que l’eau feule est la nourriture des plantes. « C’est mon opi- -- thon, dit M. Rai ^ je sçai par mes ex- œ périences que cela est constant ; & * M. Sharroc nous a donné un Catalo- « gue des plantes, dont il a fait végé- « te r des rejetions dans des fioles de ver- œ re remplies d’eau. Elles y ont p ouste « a merveilles. Les voici : la Balíami- <- ^ue femelle, toutes les espèces de Men- , le Pouliot, le Sedum multisdum , la prunelle, le Creston d’eau, le Trèfle ~ e s prés à fleur rouge, la Pervenche, ^fìerba Dorìa ^ le Bacinet, la Berle, la Guimauve, le Lauro-Cerasus^ la Ger- ^andrée d eau, le Tripolium, la Remuée , la Nummulaire, le Vanax Co- 0ni j la Matricaria. _ M. Rai ne doute point que si M. sharroc avoit fait lá même épreuve fur e aucoup d’autres plantes, il n’eût re- s °nnu en elles la même facilité de se L Partie. E §8 Curiosités nourrir & de pousser des racines dans l’eau. Cest, dit-il, que i’eau n’est pas un élément pur & simple; elle contient beaucoup de petits corps hétéro' gènes, & sur-tout des parties salines» Slqua enim non ejìJimpUx & purum el(' mention se d multas heterogeneas parti - çulas prtferûmsalinas inje contimt . Hisi* Plant, lib. i. cap. 17. pag. 31. C’est en dire trop peu, que d’assureí que l’eau feule est l'aliment des plantes. M. Rai a bien reconnu qu’il falloir absolument quelque chose de plus puifqu’il ajoute que l’eau renferme des parties salines. En effet la fève qui nourrit les plantes , n’est pas de l’eau íeule. On a recon' nu que cette substance liquide est assaisonné d’un sel nitreux qui est répandu dans l'air, & fur toute la surface à 6 la terre. Sans doute elle contient encore souvent des parties sulfureuses, mercuriales , bitumineuses , vitrioliques > tartarjuses , métalliques, dont la te^ est d’ordinaire imprégnée. Ces matière 5 minérales fe détrempent par l’eau, ‘ e fermentent , s’élevent en vapeurs ^ en fumées , & font reçues dans les P 0 ' res des racines pour la nourriture de tige & des branches ; il est mefl^ certain qu’il s’y mêle quelques P as - SUR J^A VÉGÉTATION. £$>. tJ es terrestres très-lubtiles qui communiquent leur goût aux plantes, comme Expérience le fait reconnoître dans c ertains vins & dans beaucoup de légumes & de fruits qui sentent le terroir. M. Régis dit: 11 y a une expérience genéraíe qui fait voir que les plantes ne fe Nourrissent pas d’eau seulement ^ mats en~ c °re des sucs de la terre. On fait que les ter- res qiion ensemence toutes les années , sa- Ntaigrijent peu-à-peu ; dr quoiqu elles soient humectées des pluies comme à ì’ordi- Naire elles manquent de ces sucs qui Jont Nécessaires à la nourriture des plantes . De telle firte qu après cinq ou fix ans de récolte, 0n eft obligé de les laser reposer une année y °ude l es couvrir de fumier , ou d’y répandre de la marne ou de la glaise par-dessus+ pour ks rétablir dans leur fécondité. Ainsi sdï- Nierois mieux dire qu outre l’eau ^ il y a un c ertain sel nitreux qui esì répandu dans toute la surface extérieure de la terre j £r 5m étant dissous par l’eau des pluies j fait fermenter les sucs de la terre ; enforte que ^ es plus subtils font élevés, pour porter la Nourriture aux plantes. Physique liv. 6 . IO. n. 8. pag. 494. Tom. 2. Et pour dire quelque chose de plus frécis ; j’ajoute que cette précieuse sé- Ve est l’ouvrage de diverses fermenta- E ij ïoo Curiosités tions, qui se sont dans la terre, en plusieurs maniérés, que les expériences des Chymistes aident beaucoup à nous faire comprendre. EXPÉRIENCES sur la Fermentation. Ce n’est pas fans raison que les Platoniciens disent que le feu eíl l’ame du monde. Si le feu étoit éteint dans la Nature , il ne se feroit plus de générations* Les minéraux, les végétaux & le 5 "animaux qui font les trois famille 5 du monde élémentaire, ne se pourroient perpétuer dans la fuite des siécles. Tout périroit, & on ne verroit rien renaître* Un Hyver éternel tiendroit tous le 5 Etres engourdis , & défigureroit la face de la terre. II n’y auroit par-tout qu’une affreuse image de la mort. iVlarsue Fi- cin , le plus savant interprète de Platon, dit que la terre d’elle-mème sans aéliof & fans vie , devient animée & agissante par un feu intérieur qui réchauffe , l’ a ' nime & la vivifie. Terïam per Je torpe «' tem J ignts conjortio aâionem J vìtamf lt nancifci. In Lima:, pag. 68y. C'est donc le feu souterrain qùi donne la vie aux plantes, parce que c et jui qui leur prépare, leur íU " , * re * SUR £A VÉGÉTATION. 10/ leur distribue les sucs nourriciers aux- ff u els tout l’ouvrage de la Végétation e st redevable de son commencement, âe son progrès & de fa perfection. Ce sou souterrain est ce fameux Archée , stue les Chymistes imaginent être au ç entre de la terre pour cuire les métaux ^ sos minéraux , & pour être le principe de la vie des végétaux , en fermen- sont & en préparant les íucs dont la sorte est imprégnée ; car enfin c’est par a fermentation que ces sucs que nous a Ppellons fève, sont digérés & prépa- sos. C’est par cette même fermentation S u Us sont mis en mouvement, & qu’ils ° nt poussés à la surface de la terre, Pour être introduit par les pores des ra- sones dans les fibres des plantes. Cette fermentation n’est donc pas ici objet si indifférent qu’on se le pour- peut-être imaginer. C’est la méca- soque de la Nature pour la nourriture es plantes. Or si on connoissoit bien jï ne fois cette mécanique naturelle, il er oit aisé à l’Art, qui doit imiter la Na- /f re , de se substituer à sa place, & d’o- P r er par une mécanique artificielle p° Ut ce que la Nature même sait selon Loix & ses régies invariables. ^ Ue lle ouverture cette connoissance ne Osi neroit-elle point pour l’ Agriculture E iij 102 Curiosités & pour le Jardinage que nous avofl* dessein de perfectionner dans la fuite de ce livre. Où n’iroïr point l’Art, f* nous savions une fois les allures & l eS voies de la Nature ? Lorsque nous au' rons découvert comment la terre fe pr e ' pare, comment les sucs fe digèrent, & fe mettent en mouvement par la set' mentation , nous aurons le secret de fol' liciter les plantes, & d’en obtenir toU £ ce que nous voudrons. La fermenta'' tien est donc une introduction aux plé cachés mystères de la Végétation. A a .contraire , si on ignore cette fermenta' lion , on n’ira jamais qu’à tâtons dans Jardinage & dans l’Agriculture ; on 1,5 marchera que par le chemin battu & °T dinaire ; & on ne fera jamais en état d rien inpover, & de rien perfectionné dans la culture des plantes. La fermentation est un combat viol é desels hétérogènes qui se dissolvent tent Gr se mêlent dans un liquide ; ou l’on veut, c’est un mouvement violent sels Aikalins J Gr desels acides dissous un liquide. Ce mouvement celle lorísi , ces sels fe font réciproquement pém tr & rajsaftés les uns des autres. , j Nous nommons sel Acide , celui si a de l’aigreur, & dont la surface est h riffée de pointes fermes & aiguës. SUR LÀ VÉGÉTATION. IOZ , Le Vitriol est le plus fort des Acides, parmi lesquels on met le Sel marin , le Salpêtre , le Soufre J leVinaigre Sc V Alun. Les liqueurs acides rougissent la teinture du Tournesol. •L’acide est corrosif, il pénétre , dissout Sc corrompe la substance des c boses. Le Sel Alkali a de l’acreté, & fa surface est raboteuse & toute pénétrée de pores. Comme ce sel est vuide & poreux, il est disposé à se joindre facilement à tous les acides. Les Chymistes c ompare ce sel à une terre vuide, telle qu étoit celle de ia création , aux trois ! Premiers jours du monde, avant qu’elle Lt allumée par les rayons du Soleil, Hui s’étant incorporés dans cet Aikali * °nt composé ensemble tous les corps de ! ta Région élémentaire. En effet le Tar- tr e qui est le plus puissant de tous les sels Alkalins, quand il est mêlé avec ‘esprit de Vitriol, qui est un sort Acide, ils font une soudaine ébulíitìon Sc Coagulation, & de liquides qulìs étoient, d s’en ferme un corps solide. C’est par I Cç tte union que les Philosophes expliquent la compoíìtion de tpus les corps , qui ne font point autre chose que des Acides Sc des Alkalis bien réunis én- tamble. E iiij 104 Curiosités Outre le Tartre, on met parmi les féls j Alkalins, Y Alun catin ainsi nommé, par- ce qu’il fe prépare dans un plat. C’est le Sel de Soude. C’est ce sel qui a sait nom- . mer Alkalis , tous les sels poreux, car en Arabe AI signifie Sel, & Kali veut dire Soude, qui est une plante que les Espagnols cultivent, & qu’ils brûlent, afin d’en tirer le sel cjue nous appelions Alkali. On en fait du verre & du savon, &c. On range ordinairement parmi leS Alkalis la Cendre gravelée & tous les Sels lexiviaux & artificiels, qui fe ti- > rent des plantes. Les Cartésiens attribuent la cause de la fermentation à la matière subtile» qui en s’insinuant avec les pointes de l’Acide dans les pores de l’Alkali, yi j produit une violente agitation , & cause cette chaleur que nous observons danS les corps qui fermentent. Pour nous, nous attribuons ce mou-^ vetnent violent à des particules ignées qui étoient concentrées dans l’Alkali, & qui s’en échappent par la liberté que leur procure l’introduction des pointes j de l’Acide, en ouvrant & rompant les parties intégrantes de l’Alkali. Ces pa r ' ticules ignées s étant ainsi échappées» causent la chaleur , l’éfervescence» & sur la Végétation, ioy Quelquefois du feu & de la dame que vous ne .voyons jamais íàns admiration dans les fermentations. L’huile de Vitriol versée dans l’eau commune ft.it une fermentation où il y a de la chaleur fans éfervescence. 2 . Tantôt un sel acide se mêle avec un Alkali : de ce mélange il en résulte Une fermentation & une chaleur très- senfible. C’est ainsi que 1 esprit de Vitriol & l’huiìe de Tartre qui séparément n’ont rien de chaud, étant mêlés, font une chaleur surprenante. z. Tantôt un sel volatile ou nítreux se mêle dans la terre avec une substance sulfureuse. U se forme de ce mélange une éfervescence, qui met le tout en mouvement, d’où s’élevent une infinité de parties très-subtiles. 4. Tantôt les eaux qui coulent dans les sinuosités de la terre, tombent fur du soufre & sur de la chaux, qu’elles enflâment : II s’en éleve des exhalaisons très-propres à la nourriture des plantes & pour produire la variété de ces fleurs charmantes & de ces fruits savoureux , qui flattent st agréablement les íens. y. Tantôt le nitre mêlé avec l’esprit de Vitriol sait de la fumée, & forme des vapeurs qui s élèvent. . 6. Tantôt l’esprit de nitre mêlé aveç E v io 6 Curiosités' Fétain , excite une chaleur véhémente. 7. Tantôt il ne faut que deux goûtes d’eau pour faire bouillonner , HÇmenre dans un violent mouvement des marie- j res qui étoient farts action.' SionVeríe | peu-à-peu la. plus violente eau forte fur. ì Façier, este ne produira aucun mouve- 1 ment ; mais si on y ajoute feulement j deux goûtes d’eàu, cë mélange bouil- ! ìonnera tout d’un coup avec une grande i véhémence. C’est ainsi queTeau for- ; te avec f étain , rie lait aucun mouve-- ' ment ; mais en y j errant quelques goûtes d’eau, on v excitera un bouillonnement très- violent. j 8. L'huile de Tartre mêlée avec Feaiï forte, dans laquelle on a dissout.de la íimaiíle de fer, non-fêulement excite une.tíervefcence, mais encore elle produit de la flâme. De Stair. P'iyjlclog' nov . experiment. Explorât, iq. n. Z- pag. fj. Une expérience ra vidante & qui démontre à vûe d’ceil le progrès d’une Végétation singuliers, c’est celle qus M. Rouviere, Conseiller.dé Ville, &T Maître Apoticame à Paris , a découverte en philosophant p. qu’il Et voir avec la satisfaction d’une nombreuse aí- semblée. de persori'ceîr de Considération dans. son cours de Chymie, en 1 ytât SUR LAs'VÉG é T ATION. IO7 Tu Jardin des Apoticaires , & qu’il a depuis fait imprimer dans ton Tra té de la Fermentation, en 1708. Voici comme il fit cette expérience. » Je » versai, dit-il, dans un grand verre 50 bien sec une once d’huile de Gayac » bien rectifiée , & je jettai dessus *> autant d’esprit de Nitre bien dé- » flegme ; il s’excita d’abord dans ce » mélange une fermentation aíìez for- » te ; il sortit ensuite une fumée sort * épaisse ; & la fermentation étoit pref- » que finie , lorsque je fus agréablement *> surpris de voir qu’il s’éisva avec beau- x coup de vitesse hors du verre , un » corps rare & spongieux , hapt d’envi- *ron deux pieds, d une figure aiîéz bi- *zarre,& d’un brun argenté. Je refis 59 quelques jours âpres la me me expe- *rience, & je mis cette íeconde lois- » un quart plus d’esprit de Nitre, que * d’huiie de Gayac , ce qui produit;: u» * nouveau Phénomène , car la liqueur » s’enfiamma fi for: . que tout le corps *-rare & spongieux, haut d’environ * deux pieds, parut tout en feu. Page I32, 135 & 134. io. Je ne fàurois mieux finir Veilles, de la fermentation , que Tutre expérience des plus fin celle oui s’est faite pubii ces m nu r 1 qucm :er~ me res* .enc 108 CuRiosrTÉs dans l’Académie Royale des Sciences î Sc qu’on nomme la Fulmination dans U liquide* On prend un Matras à long col ; ost y verse une chopine d’eau, deux onces d’huile de Vitriol, & puis on jette dans ces deux liquides de la limaille de Fer j 31 íe fait alors une puissante éfervefcen- ce, & il fort par le col du Matras une fumée ou vapeur fort épaisse. Si on approche de cette fumée une Bougie allumée, toute la matière circule en feu dans le Matras , & fort enfin par le col avec bruit, comme le tonnere qui fuit l’éclair. Ces expériences nous forment une belle image des combats & des fermentations qui íe font dans la terre, lorsque la pluie vient à la pénétrer. Enfin qui pourroit concevoir toutes les différentes combinaisons qui résultent des divers mélanges de tant de sels dispersés dans le sein de la terre, lorsque seau vient à les dissoudre Sc à leS faire fermenter ? Combien de fèves différentes P Combien de divers sucs nourriciers doivent naître de ces mélanges pour la végétation des plantes ? Cette fève est un Prothée qui prend toutes fortes de figures. Elle fe change en feuilles, en fleurs, en fruits, en SUR E À VÉGÉTATION. 10^1 feoìs, en écorce, en mouëlle , en gom- Me, en résine : & toutes ces choses va- Went selon la différence des plantes» dont les espèces font innombrables. Ce 11 e ft pas encore tout. II ne faut pas abandonner si vite une énumération de Merveilles, que l’Auteur de la Nature cesse point à’opérer dans le régné des végétaux. Si nous suivons cette fève, dans l’in- compréhensible filtration qui s’en fait P^r les pores des plantes, nous allons la v °ir se métamorphoser en bien des façons. Elle devient puante dans l’Ail êt dans l’Oignon ; odoriférante dans 'Oeillet & dans le Jasmin ; poison Mortel dans l'Aconit & dans, la Ciguë ; coptre-poison dans l’Athora & dans la Rubarbe; amére dans l’Absin-^ the & dans la Coloquinte ; douce dans la Canne à sucre & dans la Réglisse ; ai gre ou ílyptique dans les Groseilles & dans les Citrons ; froide dans les qua- Me semences de Courge, de Citrouille» de Melon & de Concombre ; chaude dans les quatre semences d’Anis, de Eé- si ouil, de Cumin & de Carvi ; ca- tharctique dans le Séné & dans l’Agaric ; ptarmique, carminativefudori- fique , diurétique; & que sçai-je , dans Un e infinité d'autres plantes, dont je - ÏÍÒ CtTRIÒSÎTÉS île connois pas les noms, & encoré înoins les vertus. ' II faût avouer qu’il n’y a point â'en-> droit dans la végétation, où la subtilité & la souplesse de la séve paroisse plus admirable , que dans les arbres greffés. ■ Disons auffi que dans le Jardinage * & peut- être dans la Nature , il n’y a tien de comparable à l’art de greffer. Cicéron s’est bazardé à le dire le premier : Nec conjitiones moM deleclant ,/ed étìam infitiones J quibus nihil invenit agriculture folertius. De Senect. n.yq.. Sans les Greffes & les Ecussons, no? Jardins fruitiers í'eroient peu de chose- Nous aurions été réduits à nous contenter des fruits que le climat ou le hasard nous auroient donnés. Nous serions privés d’une infinité de douceurs que l’invention de greffer nous a procurée. Les Solitaires & les Sages qui vont respirer I air pur & innocent de îa campagne trouvent aalis fart de greffer & de cultiver leurs arbres, la plus agréable, la plus vive & la plus chrétienne, récréation, qu’il y ait peut-être fur la terre. II est surprenant que nous ne cfiions pas à qui nous sommes redevables d’un secret qui sait fomentent 5c la SUR LÀ VÉGÉTATION; Ils richesse de nos’Jardins, & les plus in- flocens plaisirs des honnêres-gens. : . Tbéophraíïe : nòus.íáit la - dessusorà ^rai conte. C’est ce Théophráste , qui le premier des Grecs a écrit fur les plants ; &. q'ói. en mourant le plaignoit iì douloureusement de la Nature, de ce ^u’elle a donné une si longue vie aux Cerfs se aux Corbeaux , pendant que ks hommes-vivUnt ír peuc Ge-Philofo-r phe •dic, iqu'4n Oiseau-avané avalé un fruit.-en < jçttà par házard ie-novân dans Ufie-fente qúi étóit à une branche-d’ar- ^ r e ; & que Je suc de l’arbre s’étant joint 8 l’amande du noyau, elle s’y attacha r Rerma & poussa comme les autres "tanches. , ■ ; ’ Pline fait un autre conte, qui ne vaut guère mieux. Selon lui, un paysan fort 8 Wte palissadoit son Jardin avec des perches vertes; & pour empêcher que | es houts d’en bas ne pourrissent sitôt, d s'a'viíVde les ficher dans des troncs de dferre qssii avoir couche autour de sons jardin. Ces perches, dít-il surent saisis par les sucs vivacec de ces troncs de '-srre, dont elles tirèrent un très bon; aliment, Lc poussèrent comme si elles; e ussent été plantées er pleine terre. Htjì» tyat. Ub. xvij . cap. xq. Voilà tout ce que nous en saurons j ïïí Curiosités ou plutôt nous n’en saurons rien; car enfin ce que content I héophraste & Pline, a tout-à fait l’air fabuleux.* . Ce qu’il y a de vrai, c’est que h greffe est le triomphe.de fart fur la Nature. Un arbre par ce secret change d’efpèce, de sexe, de tête, au gré du Jardinier. D’un Amandier on en fait un Pêcher. On métamorphose un Coignas- fier en Poirier. On force une Epine branche de produire des Averolles. On détermine un Amandier à porter deS Prunes. Virgile dit plus que tout cela. Par cette invention, dit-il, on a confondu & mêlé les espèces des arbres» pour leur faire porter des monstres de fruits. On a greffé des Vignes fur des Noyers, & fur des Oliviers, pour avoir des grapes d’huile. On a greffé des Pommiers fur des Platanes, & fur des Frênes ; des Cerisiers fur des Lauriers; deS Maronniers fur des Hêtres; des Chênes fur des Ormes ; des Noyers fur des Arhoisiers. Les Philosophes si attentifs à admirer les jeux de la Nature, ont été étonnés de voir dans la famille des Végétaux, de nouveaux phénomènes s expliquer: Tels font ces jeux de 1 Art qui fe joue de la Nature même , -Lcqui la force à nous dorvner de nouvelles espèces de fruits: Jusques là qu’ort a pà ■> sur la Végétation, nz a joûte Virgile, des Cochons manger du gland fous des Ormes . Géorgie, lib. II. Inferitur ver h exfœtunucìs arhutus korrida ; à fieriles Platani malos gejfere valentes; Çaftaneœfagus ^ Ornufque incanuit albo flore P y ri glandemque sues fregêre fui Vlmis. Mais n’oublions pas que c’est la fève hui fait toutes ces métamorpholes biza- res & incompréhensibles , ou plutôt c est elle feule; qui se masque, & fè transfigure fous tant de formes différends. Quel charmant spectacle ! Cette sé- dans le tronc d’un Amandier doit produire un fruit dur, sec & cassant, ■^ès-lors qu’elle entre dans l'écusson â un Prunier qui est enté fur ce tronc, e sie change subitement de détermina- don , & forme un fruit d’une chair fine, tendre, bien fondante, d’une eau douce & sucrée, d’un goût relevé, & quelquefois parfumé. Cette fève dans le donc étoit le suc nourricier d’une amande ; & dans f écusson, un moment après, f est l’aíiment d’une prune. Cette ‘évecoagulée, dans le tronc d’un Amandier . devient une amande ; cette mê- fève un peu plus haut figée dans une greffe de Pêcher, devient une pêrj ïi4 Curiosités che. Quelchangement dans un si petíí espace de rems ! C’est par ce même art que la fève acerbe d'un sauvageon s’a- doucir, & devient délicieuse, en passant par une greffe de Poirier, de Beuré ou de Bergamote. Pline parle d’un arbre qu’il a vû à Tibur, sur lequel on avoir enté tant de greffes'différentes, qu’on y voycit en même tems toutes sortes de pommes & de poires, des noix, des figues, du raisin , des pêches, &c. II ajoute que cet arbre ne vécut pas long-tems : Sed lotie bre- vis fuit vita. Hist, Nat. lib. xvij. cap. i< 5 . Bâtiste-à-Porta dit: J’ai vu un arbre que j'appellois par plaisir, f honneur & les délices du Jardin où il étoit. II portoit des grappes de raisin fans pépins ; toutes fortes de cerises fans noyaux, des pêches, des oranges, des noix. II avoir toujours des fleurs, ou des fruits. Magia. Nat* \ lib. iij. cap. T p. pag. 164. M. Boy le a vû fur un vieux Pomier vingt-trois fortes de greffes de pomes différentes, & qui portoient la plupart du fruit. Tout cela esi merveilleux & inexplicable. II ne faut point se flatter. Je ne | hisserai pas de faire ici comme les Philosophes , & de parler comme plusieurs qui ne veulent jamais demeurer court; car enfin se taire, ce seroit mal rem- SUR t A VÉGÉTATION. ìïf "plir un personnage qui oblige à expliquer aux autres, ce qu’on ne comprend pas souvent soi-même. Je dirai donc , quand nous voyons que la fève qui a coulé par les vaisseaux d’utfe plante saunage , pénétre encore ceux de la greffe , ll íaut penser que cette séve qui s’étoit ajustée d’une certaine façon, en entrant dans la racine du sauvageon, s’ajuste d’une autre maniéré , lorsqu’elle entre dans les pores de la grefe ; ce qui fait que les fruits font de bon goût, & ne tiennent en rien de l’acreté du tronc sauvage par où la séve a passée d’abord. Cela est aisé à deviner. C est-là pourtant de la Philosophie. Boy L Tentamin. Physiologie. Tentam. ij. pag. 42. Ne dirons-nous rien de la séve de là vigne ; non pas celle qu’elìe distile quand elle pleure au mois ae Mars, mais celle qui fait en Septembre le plus doux plaisir des vendanges ; P. J. Sachs a sait un volume de plus de 700 pages, intitulé AMPELOGRAPHlA J pour décrire l’excellence & les merveilles de la Vigne. P. A . Canonherius a composé un pareil Traité sur les admirables Vertus du Vin ; il rapporte tout ce que les Poètes anciens & modernes ont chanté , pour célébrer ies divines vertus de cette charmante liqueur, mais ii sauf Ìl6 C U RÍÒSITÉS avouer que le peu que l’Auteur du Livré de l’Ecclésiastjque en a dit, est plus énergique que tout ce que l’entoûsiasme ou la fureur poétique a pû inspirer aux favoris des Muses. Le Vin réjouit le Cœur. Vinum laetificat Cor. Ecclefast. cap. p. v. 20. C’est là tout dire. Mais Canon- herius ne manque pas de condamner sévèrement l’usage excessif du vin, & surtout ceux qui provoquent les autres à boire. II s’éleve avec la derniere force contre ces proses rimées,que des gens oisifs ont composées exprès, pour exciter les hommes aux excès de la table. En voici une qu’iirapporte, pag. yoi. Quicumque vult ejfefrater , Bibat bis J ter & quater j Bibat semel &* Jecundò Donec nihilsit infundo. Bibat hera J bibat herus , Ad bibendum nemoserùs * Bibat ifie j bibat ifta Bibat fervus cum ancilla * Et pro Rege £r pro Papa * Bibe vinum Jìneaqua; Et pro Papa J 6 r pro Rege Bibat vinum fine lege j Hoec una efl lex Bacchica Bibentiumfpes unica , Lrc. sur t a Végétation, hj Ce sont ces sortes de chantons Bacchique qui animent les bûveurs, que le Prophète Isaie condamne, quand il dit, Le Luth & la Harpe; les Flû -r tes &. les Tambours , & les vins « les plus délicieux se trouvent dans vos « festins, vous n’avez aucun égard à <* l’eeuvre de Dieu , & vous ne confidé- « rez point les ouvrages de ses mains, «c Chap. J. v. 1 2 . II ne suffit pas de savoir ce que c’est que la fève; il reste encore une grande difficulté, sur laquelle il est important de s’expliquer. On convient que l’ou- Vrage de la Végétation se fait par le tïioyen de la fève; mais on n’est pas d’accord fur son mouvement dans les plantes. Les Anciens ont crû qu’elle Riontoit perpendiculairement par les tubes fibreux de la racine & de la tige, 8c qu’elle se portoit ainsi jusqu’aux extrémités des feuilles & des branches, triais les nouveaux Physiciens ont reconnu que cette fève monte, & descend plusieurs fois avant que de se Coaguler, & de se changer en matière Végétale : ils appellent ce flux & reflux de la fève , Circulation , & soutiennent que cette fève circule dans les plantes, comme le sang dans les animaux. M. de la Quintinie fameux par son grand Ii8 CuRiosrTÊs ouvrage fur l’AgricuIture, conteste cette circulation, & dit: Je ne puis m imaginer j quand commence cette circulation * ni en quel endroit elle commence : Et je ne vois pas ni fa nécejjìté j ni son utilité . j En Physique on ne croit pas souvent les ■ honnêtes gens, fur leur parole; il faut donc des preuves pour rendre cette circulation incontestable. Observation I. La circulation de la Sève dans les Plantes expliquée & démontrée. O N s’est assuré par diverses expériences , que le suc dont les plan- l tes í'e nourrissent après avoir monté dans la tige, & dans les branches, pour leur nourriture , & pour leur accroissement, descend dans la racine, afin de remonter derechef avec de nouveaux sucs, dans le haut des plantes. C’est par ce mouvement que le fait la végétation, parce que les sucs dans cette circulation se subtilisent, se coagulent , prennent de la coníistence, & deviennent corps solide , en se corporifiant avec ^ plante. Les Physiciens nomment fort à propos ce mouvement, Circulation, p arcC SUR LA VÉGÉTATION. HÇf que ce mouvement circulaire se fait dans les plantes , à peu près comme la circulation du lutí nourricier , & du íang se fait dans les animaux. Hervée est le premier qui a découvert la circulation du íang dans les animaux, & M. Mal- pighi est le premier qui a reconnu la circulation de la fève dans les plantes, ^oici les expériences fur quoi on fe fonde présentement. EXPÉRIENCES. 1. Quand on arrache une plante avec ses racines, & qu’on n’en met que quelques unes tremper dans de l’eau ; °n observe que les racines qui n’y sons point, ne laissent pas de se conserver, & de croître. Ce qui ne pourroit pas arriver, st l’eau qui est montée dans la tige , n’en defcendoit pour se communiquer aux racines qui font hors de l’eau. Il y a donc dans les plantes des Vaisseaux, pour ramener vers la racine, les sucs qui ont été élevés dans la tige. Or ce mouvement de monter & de descendre pour remonter, c’est la circula- tlo n même. 2. Quand on coupe l’écorce dê certains arbres, on volt que le bord supérieur de l’écorce se gonfle, & se nourrit Ì 20 Curiosités plus que la partie inférieure. Ce qui arrive , parce que les sucs en retournant vers la racine, se trouvent arrêtés , ne pouvant passer outre , à cause de la solution de continuité qui se rencontre là. Donc les sucs descendent, & ont par conséquent des tuyaux ouverts pour retourner de ìa tige à la racine. Z. On a observé que dans les herbes à lait, comme les Tithymales, si on les ferre fortement avec une ficelle dans le milieu de la tige , il se fait une tumeur & une enflure au-dessus de la ligature. Cela ne se feroit point, si les sucs qui montent des racines, n’y retournoient pas , & s’ils n’étoient arrêtés dans leur retour par la ligature. 4. Quand on peut rencontrer par ha- zard un arbre qui est porté par deu* grosses racines dont l’une est découverte d’environ un pied & demi, on en fait une expérienee qui met la circulation de la séye au-dessus de toute contestation. On coupe la racine découverte a quatre doigt de terre, cette solution de continuité empêche le suc de monter & de communiquer déformais par-là au haut de cette racine, & au tronc. Cependant l’an suivant, la partie de la racine qui étoit demeurée jointe au tronc » poussera des feuilles ôc des branches* Cette irt?rçtcmipe-à íz Racinp StfR LA VÉGÉTATION. 121 Cette production ne vient pas d’en bas, puìfqu’il n’y a plus de communication par-ìà avec la terre; elle vient donc des lues qui refluent d’en haut vers cette r acine. Ce flux & reflux des íucs nourriciers, c’est la circulation dont il s’a- gtt. La figure aidera à entendre ce petit Manège. J. On fçait que le Saule, la Vigne, le bouleau , l’Osier , les Groseiíiers, le sureau, le Sycomore & plusieurs au- sortes de plantes, poussent des ra- Clt ies par le bout de leurs branches, Suand on les met en terre. II y a donc Qes pores & des petits canaux pour c °nduire la fève qui entre par l’extré- J^ité des branches, & qui remonte vers a Partie qui étoit racine auparavant. Cette expérience en suggéré d’autres 5 Ul font plaisir à voir, & qui sont toutes e puissantes preuves de la circulation e la fève dans les plantes, k ^1 on met en terre l’extrémité d’une Ranche de ces arbres ou arbrisseaux ° nt nous avons parlé , cette extrémité 1 eri( f racine. Si après cela on retranche i branche entierementde l’arbre, & ' g.° n en fiche en terre l’autre bout, il ^eraquecette branche prendra racine i^ 2S ^ eux ì^outs. Etant ainsi en terre ït > ^ eux extrémités, elle a la figure Partie. F 122 Curiosités d’un arc: coupez Tare par ie milieu i . vous avez deux arbres donc chacun &. ses racines : ce qui prouve invincible- . ment qu’il y a des vaisseaux de haut en. bas pour ia deicente de la fève, comme.. > il y en a de bas en haut pour la faire j monter. C’est fur ce même principe qu’on a fait une expérience assez curieuse, & qui a fort bien réussi. La voici : Si dans un arbre on coupe l’extrémité d’une racine , lorsque la séve est en mouvement pour monter, il distillera plus de sucs par cette racine , que par l’extrémité d’une branche qu’on aura coupée vers la cime de 1 arbre. La raison de cela eft évidente ; c’est que comme il monts plus de sucs au dessus de la racine coupée , il en descend à proportion davantage , & par conséquent il s’en évacue beaucoup plus par cette amputation*. C’est une expérience tirée des Afà s - Philosophiques de Mestìeurs de la Société Royale d’Angleterre. Januar. 1669 * pag' 2 £r if. Junii î 66$. Tarn. pag- 141...... iqy. On s’imaginera peut-être que ces sottes d’expériences ne sc font que parm 1 les Philosophes, & qu’excepté ces ge^ 5 > contemplatifs, personne n’y prend inte' fçt. Nous avons preuves en main, 4 l * ‘sur la Végétation. I2Z Contraire. Nous savons que leSéréniffi- we Electeur de Brandebourg , & la Sé- r énissime Electrice son épouse, ont pris un plaisir singulier à voir faire de pareilles expériences dans leurs Terres, où l’on e nchérissoit encore fur ce que nous a- ^°ns dit de la maniéré de planter des tanches d’arbres par le bout d’en haut j Car enfin Conjlantmus Hugenius- nous ?Pprend quson poussait ces expériences îusqu’à planter les arbres entiers, les ^anches en bas, & la racine en haut ; êt que ces Augustes Personnes se sont ‘ a st souvent un divertissement de voir, P ar une métamorphose inconnue auK ^aciens, les branches se changer en raines, & les racines devenir des bran- c lies. Voici comme s’en explique Hu- ë e nius dans fa Lettre du 17 Décembre •*686, à M. de Leeuvenhœk. Je ne cesse point, Monsieur, de * °Uer votre industrie infatigable à dé- <* couvrir dans la Nature des secrets peu -- ^nnus des' Anciens. Je ne « Sjai si vous avez jamais oui parler de « P a nter les arbres renversés; en sorte « ^ Ue les racines sont vers le Ciel & * changent en branches. Ce petit « anége se fait avec des listeaux. <* ^°n Jardinier jusqu’ici n’y a pû ré u s- « r * Mais je sçai pourtant que cela se « F ij 124 Curiosités » fait avec succès; & j’ai Ià-dessus des » Auteurs trop graves pour en douter. » C’eû le Sérén.ísime Eieóteur de Bran- -> debourg & son Epouse , qui étant ® ici il y a quelque te ms, m’afsurerent x> qu’ils avoient dans leurs Terres beau- s>.coup de ces arbres renversés ; & qu’ils »poulsoient beaucoup mieux que les » autres, &c. M. de Leeuvrenhœk , en communiquant cette Lettre à Meffieurs de la Société Royale d’Angleterre ■> il leur rend compte des expériences qu’il a faites lui-même depuis vingt ans fur la végétation de ces arbres renversés, Au mois d’Avril 1686, je fis, dit-il, j planter par mon Jardinier un Tilleul en cette maniéré : la racine étoit en terre ; mais peu avant. Les branches & la tête de l’arbre y étoient auffi; & pour les y tenir axrêtées, on se servoit de crochets de bois. Dans cette situation mon Tilleau étoit tout à la fois planté paf les deux bouts, & le tronc étoit co.xhe Ù quatre doigts de terre. En Avril i6b'8» je trouvai que les branches avoient fait beaucoup de racines. Je coupai les bouts des branches deux doigts en terre ; & 1 j’en tirai tout le pié de l’arbre, où ! étoient les anciennes racines, je lele- 1 VAÎ en l’air, &l’appuyai avec une bonus Pag . ri.f /„ ■ ; fr//'‘■'"f , -4 r b ne Plante pan lej Brandie*? S U B : LA VÊGé ÍA-TÍON. 12/ fourche, de peur que le vent ne l’agitât« Le 26 Mai suivant, je reconnus avec plaisir , que ces anciennes racines, devenues branches, avoient poussé plus de int boutons , dont quelques-uns déja Ouverts, formoient de verds & agréables petits rejettons. Depuis cc tems-là óe Tilleul s’est accoutumé à cette situation , & fait tout devoir de bon arbre ; ayant consenti sans façon que ses premiers racines devinssent des branches nouilles, & que les anciennes branches fe Rangeassent en de nouvelles racines, voilà la métamorphose. Et si cette expérience toute plaisante ne démontre P a s, qssil y a dans les arbres des tubes Poreux, pour que la íéve monte & def- inde également, je ne sçai ce que c’efl ^e démonstration en matière de Physique. La figure que je donne ici, fait voir, c °mme se sait cette belle expérience. , Nous savons donc présentement que e suc circule dans les plantes ; ensorte le même^c passe plusieurs fois par jRte la plante, allant de la racine aux Ranches , & des branches retournant à ^ reine par des vaisseaux que les nou- s atix Physiciens nomment Circulatoí- '**.» dont les uns servent à porter le suc R 1 monte, & les autres à reporter ce- 111 qui descend. F iij C OÏIOSITÉs L’expérience nous a convaincus qué ces tuyaux circulatoires font en effet de deux forces. Voici l’expérience qui belle. EXPÉRIENCE. Si l’on prend une branche d’Orme» & qu’on la coupe de maniéré qu’on puis' se ajuster deux entonnoirs à ces deux extrémités , on verra que l’eau que l’oi* versera dans l’enronnoir du bout d’en haut de la branche, paífera & descendra à merveilles. Au contraire , fi dan* l’entonnoir du bout d’en bas de la branche , vous versez de l’esprit de vin , ll s’insmucra parfaitement bien , & coulera dans les petits vaisseaux, par où Je fus; monte de la racine aux branches; & ** vous y mettez ensuite de seau, elle n fi paífera pas : ce qui fait voir évidert 1 ' ment que les sucs qui montent des s*' ci nés aux branches , font très-subtils fy très-remplis d’efprit ; & que ceux st ul deícendent pour être derechef cust s ' digérés & iublimés , font plus fiers & plus aqueux. Quand on connoit ainsi le mouy e ' ment des sucs nourri! iers, on est en .d’expliquer certains phénomènes furp s ^, nants qu’on observe dans les plantes , ^ qui ont donné de l’exercice aux Ph J * ■' SUR X A V É G È T A T 10 N. \Tf tbphes. Je mets parmi ces phénomènes , ce qu’on dit vulgairement, qu’il y a des plantes qui s’aiment & qui vivent Volontiers ensemble, pendant qu’on en Voit d’autres qui font mal-endurantes, 8c qui ne fe peuvent souffrir. C’est ce 'que les Physiciens du te ms que les hommes ne raiíbnnoient guéres , rangeoient 'parmi les qualités occultes, & ce qu’ils appelloient Sympathie & Antipathie ; e’est fur quoi il est maintenant aisé de philosopher avec succès, depuis qu’on a reconnu la nature de la fève, & les vaisseaux circulatoires par où elle monte & 'descend. Nous devons ces découvertes au savant & patient usage que Messieurs Malpighi, Rédi, Rai, Grcsr 8c Leeuwenhœk ont fait de leurs Mi-, crofcopes. Observation II. Sur la Sympathie & r Antipathie des Plantes. I Es anciens Philosophes ont dit bien j des pauvretés fur le mutuel amour 8c l’aversion réciproque des plantes. II vst vrai qu’ils ont eu recours aux mots Pompeux de Sympathie & d’ Antipathie vomme à un azile spécieux pour cacher íeur ignorance. Selon les Naturalistes ? Ï2S Curiosités il y a des plantes qui se cherchent, 8c qui vivent ensemble avec tout sacrement poffible. II y en a d’autres qui ne se peuvent souffrir, & dont Je voisinage est également mortel aux unes & aux autres, M. Bacon , Chancelier d’Angleterre , s’est moqué de ces haines prétendues, & de ces amitiés imaginai- res. Voici, selon ce grand homme, tout le mystère. Deux plantes qui íe nourrissent d’un même genre de suc , se nuisent extrêmement quand elles font trop proches. Le partage de la nourriture qui convient à toutes deux, amaigrit l’une & l’autre. Obefl vicinia alterâ aiteram fraudante. Voilà Y Antipathie’ Au contraire, deux plantes auxquelles il faut pour aliment des sucs tout différons , végètent & fleurissent ensemble parfaitement bien. Planta idolis non unius j Gr fucco diverfò alenda amicâ conjun£lione gejïiunt. Voilà la Sympathie• Silv. Cent. V. n. 480 & 481. Mais le mystère étant ainíi dévoile par une explication si simple, la Philosophie devient à la portée de tout le monde, son crédit diminue ; & auprès du peuple, elle perd la révérence qui lui est due. Quoi qu’il en soit ainsi , il y a de la sympathie selon le principe de Bacon, entre le Liguer & la Rue. II n’y sur l"a Végétation. 129 a point de querelle pour l’alimem. Le suc qui convient à la Rue, n’accomode pas le Figuier. Leur bonne intelligence durera éternellement. II y a de la sympathie entre l’Ail & la Rose. II faut un suc odorant à la Rose, & un suc puant à l’Ail. Cela étant, rien n’empêche que la Rose ne vive avec l’Ail dans un même terrain, puisque i’Ail ne court point sur la Rose pour lui voler sa nourriture : quand mente la Rose a l’Ail pour voisin , elle en est & plus belle & plus odoriférante. Au contraire, il y a de l’Antipathie entre le Romarin, la Lavande, le Laurier , le Thym, la Marjolaine qui ne sau- toient que beaucoup souffrir ensemble , parce qu’il leur saut des sucs nourriciers tout semblables : ainsi ces plantes s’af-j fament les unes & les autres, & dépérissent visiblement, lorsqu’elles font Voisines. Les Relations que nous avons des Molucques , représentent l’arbre qui. Porte le Girofle , comme un arbre mal endurant. 11 ne souffre, dit-on , aucune herbe , ni aucun arbre près de lui , parte que son excessive chaleur attire toute '•humidité de la terre.- Jly a une furieuse antipathie entre. íe F w szo Curiosités Chou & le Cyclamen , entre la Ciguë & la Rue , entre le Roseau & la Fougère. Ces plantes s’en veulent si terriblement , dit le P. Kirker Jésuite, cju’elles ne peuvent demeurer ensemble dans la sphère l’une de l’autre. Leurs combats font tellement cruels , qu’il faut qu’une des deux plantes périsse, & souvent l’une & l’autre sèchent sur pié. & meurent de douleur. Aiebfœvas lu£las ineunt ut utrumque viribus dejïitu- tum marcefcens contabescat. Art. Magnet. Lib. iij. cap. 2. pag. 494. Voilà ce qu’on nomme une haine irréconciliable. On n’auroit pas crû qu’il y eût tant de mutinerie, Sc une discorde si meurtrière dans la famille des Végétaux. Peut-être que les Philosophes chaussent quelquefois 3 e Cothurne des Poètes, a fin de rehausser & d’enfler leur stile. Ce savant Jésuite donne la raison du dépérissement de ces plantes qui se haïssent : il dit que c’est qu’il s’exhale du corps de certaines plantes, une vapeur, une exhalaison» une mauvaise haleine qui ne plaît point du tout à d’autres; & que quand une plante délicate a le malheur de se trouver dans la sphère d’odeur d’une plante punaise, elle souffre, dépérit sans cesse» & meurt enfin de dégoût. Planta erin n Jìve vapore ,sive exhalations certas quaj'■ Sur la Végétation, iz, dam sph&ras caufantur, intrà quas alia conflit ut a altérant. C’est ainsi qu’il explique l’antipathie de certaines plantes. Je m’accomoderois plus volontiers de la Physique de Bacon, qui attribue le dépérissement de cette plante au vol que fa voisine íaìt fur elle d’un aliment dont elle a besoin. Gemini enim prtedones terrain infedent in mutuamperniciem. Simile q nid iicitur deÁrundine^atqueFilicejitra- queJucçulentd.alteraque alteram frustrante.... Idem de Cicuta & Ruta, quas ve- hementessucci trahaces vocare liceat. Cen- tur. V. n.qp 2 . Cela est bien expliqué 6c satisfait l’efprit. - Par-là tombent les grands mots de Sympathie & d’Antipa- thie. 11 n’y a pas plus d’Antipathie entre deux plantes , qu’entre deux mâtins qui se mordent & le déchirent pour se disputer un os que l’un & l’autre vou- droient avoir. Les qualités occultes du Pé- lipatétifme ruineux, ou pour parler comme le P. Kirlter, de la Populace Philosophique j ut plebei Philofophi opinan- tur , n’ont que faire là. Chacun entend la Physique de Bacon : c’est que la bonite Philosophie est facilement entendue de tout le monde. Et pourquoi ne le seroit-elle pas , puisque le grand Li- v te de la Nature qui ne contient que trois feuillets» le .Ciel, la Terre 6c la F vj ï 32 Curiosités Mer, est également ouvert, disoit íî bien S. Antoine, pour tous les hom- mes! USAGE . Asm de terminer nos réflexions par quelque chose d’utile& de pratique ; nous disons., d’après Bacon , qu’uncurieux qui veut que les plantes de son jardin réussissent bien , doit éviter de mettre ensemble celles qui se nourrissent > d’un même suc. Ainíì je ne planterois pas dans le même endroit les plantes aromatiques. Les Catarctiques ne se- roient point ensemble. Je séparerois les amères, à moins qu’on ne voulût éprouver, si par-là on en pourroit augmenter ou diminuer les vertus bonnes ou mauvaises. Cette imagination de Bacon ouvre le chemin à un grand nombre d’ex- périences très-curieuses pour le Jardinage , & qu’on pourroit rendre utile? pour la Médecine. Evt.es oportet hef' barumvìcin'tam eodemgaudentìumfucco- •• Sin efficaciam herb& extenuare libeat ^ con• fut tum alias ejufmodi in proximo jungere; ut sxilescat virtus . Cent. V. n. q8§. sus, l-a Végétation. iD Observation III. Le mouvement de la Sensitive * expliqué» C Ampaneile, vraisemblablement j n’a pas eu connoissance de la-Srn- Jitive qu’on nomme autrement la plante pudique ou vergtgneuje, paree que dës qu’on la touche, elle ferme ses feuilles» le meut précipitamment, & semble fuir» S’il avoir connu cette plante, il n’au- roit pas manqué d’en faire, non pas feulement un Zoophite , c’est-à-dire une Plante animal s mais un animal même dans toutes les formes. II auroit triomphé. Aristote & les Péripatéticiens: étoient gens perdus. Après tout, son triomphe n’auroít été qu’un vain fantôme. Voici pourquoi. Avant que de nous engager a explî-í quer machinalement le mouvement delà Sensitive, il faut avouer que la chose n’est pas aisée, & que quand on a fait tout ce qu’on a pû, on ressent bien que tout ce qu’on a dit est beaucoup amdesi- sous d’une bonne démonstration. Ouest convaincu fans nul doute que la Sen- jitive n’a pas plus de sentiment qu’un chou, mais la Nature nous a caché: comment ce mouvement si subit se fait ì'3 4 Curiosités dans cette plante quand on la touche J & pourquoi la même chose n'arrive pas, lorsqu’on touche un chou, ou une autre plante. Cela supposé, il faut remarquer que toutes les espèces de Sensitive J & même plusieurs plantes Légumineuses qui ont leS feuilles opposées comme les a la Senfiti- vc J paraissent se sanner au moindre froid. Durant la fraîcheur de la nuit, elles tiennent leurs feuilles jointes & serrées , jusqu’à ce que le Soleil revenu sur l’horilon , ait échauffé l’air. Cela est exactement vrai dans la Sensitive que j’ai nommée tout cet Eté Paresseuse , par- ce qu elle n’ouvroit ses feuilles que quelque tems après le lever du Soleil. Ainsi cette plante est plus ou moins fannée, à proportion que la nuit est plus vu moins froide. Eile est dans le même état en plein jour, quand on la vient de toucher. Ses feuilles paraissent un peu flétries, & font fermées assez tristement, en la même maniéré qu’on les voit fermées durant toutes les nuits. Ainsi le froid & ie toucher causent les mêmes symptômes dans la Sensitive. L’un & l’autre dessèchent , & font fermer ses feuilles. Tous deux produisent dans ses feuilles la même contraction. Donc fi nous pouvons découvrir, comment I? 1 SUR LA V É G É T A TI ON. isf froid est la cause efficiente de ce mouvement , de cette contraction & de cette espèce de dessèchement, ce sera une voie pour parvenir à reconnoître, comment: íe toucher, soit de la main, soit par le ministère d’un bâton, peut opérer les mêmes phénomèmes que nous admirons toutes les fois que nous touchons cette plante. Je m’imagine que la Sensitive étant véritablement une plante très-délicate j & que la froidure un peu piquante, offense mortellement, comme le savent si bien les Curieux qui se donnent la peine d’en élever, il doit arriver né- ceslairement que le froid resserre ses pores & ses fibres; de telle forte qu’il fait retirer le suc vaporeux qui entretient le verd charmant deses feuilles, & le précipite vers la racine. Ce suc qui rernplis- soit & gonfloit les vaisseaux circulatoires , étant dissipé, il doit arriver à cette plante ce qui arrive, quand sur la fin ■de l’Été , elle lèche sur pied faute de sucs convenables à sa nourriture; ses feuilles se rident, se joignent & se serment. C’est ainsi que nous voyons la couverture d’un livre qu’on lit devant le feu , se retirer par la dissipation de l’humidi- té que le feu emporte. Si la contraction & le rétrécissement CuRrosrTás qui se font dans la Sensitive, ruinent li structure de ses pores, & l’arrangemenî de ses fibres ; de telle forte que les sucs repoussés vers la racine , ne puissent plus remonter & reprendre leur cours ordinaire, la plante meurt ; comme il arrive dans les premiers froids piquants de quelques nuits de l’Automne. Je crois que la même chose se palis quand on touche la Sensitive : les sucs, par le mouvement qu’on imprime dans les branches & dans les feuilles , se retirent , & se portent vers la racine. En effet, il faut observer que le simple tou- cher ne produit pas toujours cet effet : il faut très-souvent frapper vivement les branches, & leur donner des secousses pour ébranler la plante , afin d’en faire évacuer les sucs. La retraite subite de ces sucs cause la contraction des petits tuyaux qui cessent d’être gonflés, ÔC produit le dessèchement des feuilles & le mouvement par lequel elles se serment? jufqu’à ce que, quelques momens après r les sucs remontant, elles se rouvrent? & reprennent leur premiers vigueur. C’est à peu près comme M. Rai raisonne fur ce point. Le sentiment, dit- il, est tellement le préciput des animaux , que la Philosophie en fait leus différence spécifique» Cependant il y K sur la Végétation, iz-/ des plantes dans lesquelles on remarque une assez vive apparence de sentiment. On appelle ces sortes de plantes Vives j Virgogneufes Sensitives Pudiques „ parce qu’elles s’écartent & se retirent lorsqu’on les touche. Quelques-uns ont Voulu conclure de-là, que toutes les plantes ne font pas destituées de sentiment. En le leur refusant, nous tombons dans un grand embarras; car com-, ment expliquer d’une maniéré mécanique ce mouvement qui nous surprend toutes les fois que nous le voyons. Cela Ue se sait-ií point comme le mouvement des poumons qui s’étendent quand sts sont remplis d’air, & qui ro.nbent âe se resserrent, lorsque l’air est expiré? L’air froid fait fermer les feuilles de la Sensitive ; peut-être parce que le froid répercute les sucs & les fait rebrousser chemin vers la racine. N’y-a- t il pas toute l’apparence possible que celui qui touche une plante de Sensitive j comprime les petits tuyaux qui portent le suc ? Après quoi les feuilles. les branches Sc la tige même épuisées de la sub- stance qui les gonfloit, se doivent rétrécir & flétrir. Voilà toute la prétendue pudeur de cette plante. Fieri enim po - te ft -- ut tam digiti quàm aëris ambien- tis frigus spirïtus contrastât * £r cont 1z8 Curiosités denset eorumque motum fìftat ; adeòijílt folia contrahit dr collabascere fœciau Híst« •Plantar* Lib. xviij. cap. ij. pag.c/78. Nous voyons un pareil phénomène ■dans la plante qu’on appelle la Rose de Jerico. Quand elle est pleine de lues, elle est ouverte à merveilles. L’humidi- té en est-elle évaporée, elle íe ferme Le le recoquille d’une maniéré surprenante. Est-elle toute recoquillée, si on en met tremper le pied dans de l’eau tiède , elle le r’ouvre , íe développe & s’é-* tend à mesure que Thumidité remonte par les pores dans toutes ses branches. Si cela íe fait si vite dans une plante sèche depuis quinze ans, comme ma Rose de Jérico, La même chose doit arriver incomparablement plutôt dans tine plante vive , & dont la conformation des parties n’a point été dérangée par un long dessèchement. Ceux qui ne font pas accoutumés à ces contemplations physiques , ont peine à régler leur imagination fur ces mou- vemens- si lubits, ils n’en peuvent pas convenir : il faut faire quelque chose pour eux, & les mener à ces connoissan- ces sérieuíes par un petit jeu où il ne faut que des yeux. Nous Remprunterons de M. Bacon , Chancelier d’Angleterre» sur tï Végétation, EXPÉRIENCE. II n’est pas imaginable combien uni peu d’humidité peut causer d’altération & de mouvement dans une plante même forte & hors de terre. II en faut voir Inexpérience pour croire , & nous la prendrons , dit M. Bacon , des Joueurs de Gobelets & des Faiseurs de tours de mains & d’adresse qui la font bien valoir quelquefois parmi le peuple à qui il est facile d’imposer. Voici ce que c’est. Quand on a perdu quelque choie dans une maiíon, & qu’on soupçonne quelqu’un de savoir prise , on se íert du petit manège lui— vant pour lui faire avouer le fait, ou pour le déterminer à restituer. On prend de la ba' be d’avoine sauvage , quand elle est encore un peu verte. On tord ce petit poil d’herbe , on en sait une petite- croix que l’on donne à la personne suspecte , & sur laquelle on doit avoir une présomption si sorte , qu’elle tienne lieu d’évidence & de démonstration. On donne pareillement aux autres personnes de la maison de petites croix , mais faites avec de la paille da froment ou de ségle, ou d’un brin da foin, n’importe , pourvu que toutes les Ì40 CíTRrOSlTÉS croix se ressemblent à peu près. On coupe une pomme ou une poire par la moitié. On dit qu’il faut que chacun plante fa petite croix dans cette pomme, & que la croix du coupable ne manquera pas de faire plusieurs tours. Afin de les inférer plus facilement dans la pomme, on perce avec une épingle , Fendroit où chacun veut placer la sienne. II faut laisser la liberté de choisir le lieu. Ces croix ne íont pas si tôt plantées, que la petite barbe d avoine sauvage, infiniment sensible à l'htimidité, se remue aussitôt , se détord & fait sort visiblement plusieurs tours, au grand étonnement des spectateurs. Sylva Sylv. Cent. v. n. 494. II faut ici avertir que je n’ai pas traduit exactement M. Bacon , & que j’ai presque substitué une expérience entiers à la place de la sienne qui est embarrassée , obscure & capable d'autoriser fa superstition. Les Curieux se servent de cette barbe d’avoine pour lervir d’Index ou d’aiguille aux Hygromètres, qui font de petits instrumens composés en maniéré de cadran , afin de reconnoître les divers dégrés de sécheresse & d’humidi-. té qui sont dans l’air. StTR LA VÉGÉTATION. 141 Chapitre V. La maniéré de tirer le Suc des Liantes, Utilité des ce Suc. L Es Sucs, des plantes font un des plus riches fonds de la Médecine. Les minéraux & les animaux , à proportion ne lui fournissent pas tant de secours & de remedes contre les différentes maladies auxquelles l’homme est exposé. Ces Sucs qui font le sang des plantes, tiennent des sucs de la terre , d’où elles tirent leur aliment j les qualités qu’elles ont. Ainsi on a reconnu qu’il y a des Sucs, 1. aqueux, 2. vineux, 3. oléagineux. 4. gommeux, y. résineux, 6 . bitumineux. II y en a de toutes fortes dç coupleurs. Selon Fernel , il n’y auroit que Neuf sucs difFérens , puisque, suivant les anciens Médecins, il réadmet que neuf fortes de faveurs. Sapor . AcerAcidus , Linguis Salfus . Aufttrus . Dulcis . Amarus . Acerbus , înfipidus. Fernel de Medicam. Vir. Lib. f. c. 3. p. 347, 5q8. Pline compte treize sortes de saveurs les sucs. II n admet aucune saveur Ï42 Curiosités dans l’eau pour qu’elle soit bonne. Sentirì quidem aquce foporem ullumsuccumvè, vi- tium eft. Hist. Nat. Lib. xv. cap. xxvi j. M. Grew va plus loin : il trouve dans les plantes seize sortes de saveurs que M. Rai rapporte fort exactement. 1. Amants, comme l’Absinthe. 2. Dulcis * comme le Sucre z. Acidiis J comme le Vinaigre. 4. Saisies j comme le Nitre, y. Calidus J comme le Girofle. 6 . Fngidus J comme le Sel de Prunelle. 7. Aromaticus J comme la racine d’I- ris de Florence. 8. Naufeosus ^ comme la Rhubarbe. 5». Vapidus s comme les Bols, le blanc d’œuf. 10. OnBaqfus comme FHuile. 11. Pemtrans ; comme la racine & les feuilles de Concombre sauvage. 12. Stupefaciens J comme la racine d’Hellebore. 15. Adflringens J comme la Noix de Galle. 14. Pungens ^ comme le Sel Ammoniac. 17. Intermittens J comme la racine de Dracontium , dont faction cesse Sc puis recommence. id. Tremulus J comme la Pyrèthre. SUR LA VÉGÉTATION. I43 M. Rai qui se moque des Signatures des plantes comme inutiles, pour con- noître leurs vertus , fait au contraire un cas infini de leurs saveurs „ qu’il regarde comme des moyens assurés pour découvrir leurs facultés spécifiques. II avertit qu’on ne s’y sautoir trop occuper. Eifl*. Plant. Lib. i. cap. xxiv. pag. 47. fftc, II remarque fort utilement que le Ja- lap , la Mercuriale & la Bellis qui ont la même faveur, ont en effet pareillement la même vertu catarctique. De-là il toncíut que les plantes dont les saveurs font différentes, n’ont pas certainement les mêmes qualités; & qu’il y a autant de différence entre leurs vertus , qu’il y en a entre la saveur de la Rhubarbe, & la saveur qu Lapathum. Voilà.un beau chemin ouvert, pour aller loin dans la connoissance des propriétés des plantes. 1. Ces sucs sortent quelquefois d’eux- mêmes , & se coagulent en gomme ; comme font la Mirrhe , le Bdellium, la gomme Tacamahaka, le Storax, le Benjoin , le Baume naturel & toutes les Gommes. 2. Quelquefois les sucs sortent par ^incision de leur écorce pour être ensuite desséché au Soleil, comme sont les sucs de la Scammonée , de l’Aloès, du *Wot, &c. Ï44 Curiosités z. On tire des sucs par contusion » & par expression , comme les sucs oléagineux ou les sucs aqueux que l’on tire de feuilles, de fleurs ou de graines. 4. On tire encore des sucs par le moyen du feu , quand les parties deS plantes font sèches. Ce qui se fair alors par l’addition de quelque liqueur. 5. II y a aussi une cinquième maniéré de tirer les sucs, particulièrement les sucs des arbres. Elle le fait par la Tére- bration ; c’est- à-dire, en perçant le tronc d’un arbre avec un tariere , lorsque la séve, vers le commencement du Prin- tems, commence à monter. C’est de cette derniere maniéré d’ex- traire le suc des arbres dont j’ai dessiein de parler ici. II me semble qu’elle a été inconnue aux anciens ; du moins je n’ai point connoissiance qu’aucun en ait fait mention. Si cela étoit ainsi, nous tiendrions des Anglois cette invention qui peut avoir de très-grandes utilités. I. M. Bacon , Chancelier d’Angle- terre , parle de cette Térébration ; mais il ne la propose que comme un remeds pour faire mieux fructifier les arbres» c’est pouf cela qu’il la compare à la saignée. II y a j dit-il, plusieurs avantages à percer sur la Végétation. 14s à percer le tronc des arbres ; on les délivre d’un excès ou d’une réplétion de sucs qui nuit à leur > fécondité. D’ailleurs cette opération, par laquelle on évacue des sucs inutiles , mal digérés, doit être regardée comme une sueur favorable qui peut beaucoup contribuer à rendre les fruits d’un meilleur goût. Ce n’est pas l’abondance du sang qui sait. la santé & l’embonpoint des animaux. Trop d'aliment surcharge & sait de Mortelles obstructions. La Térébration dans les arbres, c’est une saignée salutaire. II ne fort par cette évacuation que des sucs inutiles & superflus. La plénitude d’humeurs est un grand mal. L’est par les larmes que répand la Vigne , qu’elle se purge de quantité d’hu- tneurs qui la noyeroient : elle s’en dé- J^arge pour ne réserver que des sucs bien cuits , bien digérés, sublimés, exaltés, tels qu’on les goûte dans les rai- fins ou dans la délicieuse liqueur qu’un Vigneron diligent en tire dans la saison, solon les réglés de l'Art. Qbservatio de vrboribus perforandis & fie feìiciore illis lrtc rememo conferendo j quaz fruílus quo- yutjuaviores , meliorefque tejìatur . re je£lo per fudorem viliore ^ inutìlique/ucco . * * • • Quodfrucíibus terebratio arborum efl a * ^dsanguinis mijsw,&c> Sylva,Jylvarum. Partie. -' Q Ï 4 6 Ctmosnís Çentur. v, n. 463 , 464. pag. 249. Comme on ne porte pas tout d’ufl coup les nouvelles découvertes au point de perfection où elles peuvent aller , on a bien enchéri fur les premieres vûes de M. Bacon,. 11 faut avouer que Messieurs de la Société Royale d’Angle- terre , ont tellement perfectionné cette Térébration , qu’ils n’on rien laissé à faire là-dessus aux autres Physiciens. Leur génie, si propre à découvrir de nouvelles choses, & à les conduire jufqu’n leur- perfection , leur fait épuiser tout ce qui fe peut imaginer pour rendre leurs découvertes agréables & utiles. La Térébration des arbres en est une preuve bien manifeste. Ils l’ont mise en régie, & réduite en méthode. Ensuite jls ont trouvé que ces sucs tirés par cette Térébration méthodique, avoient de grandes utilités. Voici l’ordre qu’il y faut garder, selon le Docteur Tonge. II y a , dit-il * différentes maniérés de tirer le suc d un arbre. Pour en avoir beaucoup , il suffit pas d’entamer l’arbre légeremen £ avec un couteau. II faut percer le trône du côté d u Midi, passer au-delà de ^ jnouëìle , & ne s’arrêter qu’à un pouce près de l’écorce qui est du côté du Sepr tentrion. On doit conduite le tarière * êL .At4>re ïionton tire la Ifd’ienicU h fmtnfruigu Aà mm wÎmÌhW sur-la Végéta t r o n. 147 Se telle forte que le trou monte toujours, afin de donner lieu à f écoulement de la fève. II est bon d’observer que le trou doit être sait proche de la terre. 1. Pour ne point gâter le tronc de l’arbre. 2. Afín qu’il ne soit point besoin d’un long tuyau pour conduire la séve dans le vaisseau qui la doit recevoir. Ail. Pki- losoph. Aprilis 1669., pag' f 1 - Voyez la figure. Une racine coupée par l’extrémité rend plus de suc qu’une branche ; par- ce qu’il en monte au- dessus de la racine, plus qu’au-dessus de la branche : ainsi l’écoulement doit être plus abondant. II est probable, que plus les arbres approchent de leur perfection, plus il en distille de fève. Le tems de percer les arbres pour en extraire le suc, c’est depuis la fin de Janvier, jusqu’au milieu du mois de Mai. Le Noyer ne se doit percer qu’à la fin de Mars. M. Midfori de Dv.rham ^ homme d’une attention rnerveill.use à ramasser & à conserver des sucs, allure que le Peuplier & le Frêne font inondés de fève dès le iy de Mars; & que le Sycomore donne des lues mêmes en pleine gelée; en forte que les gouttes en distillant , se glacent, Ail> Phi ofoph, Ja~ G ij 148 Curiosités nuarii 1669.pag.1j &■ 16. Les arbres ne donnent aucun suc en Automne , & n’en donnent au PrintemS qu’environ durant un mois. Quand le Printems est trop sec , on tire très-peu de fève. S’il est beaucoup humide, il en distille davantage, & toujours à propor-* tion de ce qu’il en monte par les pores du tronc. Pag. 18. La Térébration ou le percement des arbres se sait avec plus de succès à midi dans la chaleur du jour , parce que les sucs font d’ordinaire plus en mouvement. La chaleur fait monter la sève. C’est un alambic fait de'la main de la Nature, les alembics artificielsn’en font que des copies. Les arbres qui fournissent abondamment des sucs , font le Peuplier, le Frêne , le Plane, le Sycomore, le Saule, le Bouleau, le Noyer, le Chêne, l'Ormeau, l’Erable, &c, M. Ratrai , savant Ecossoïs, dit, qu’il lait par fa propre expérience, que dans le Printems , on pourroit en un mois , tirer du Bouleau, une assez grande quantité de sève, pour égaler le poids de l’arbre avec ses branches, ses feuilles, & ses racines. AB. Philijoph. Jamtarii j 669. pag. 3, Le Docteur Hamjus est descendq Sur LÀ Végétation. 145? de la Térébration des arbres, à la ponc- îion des plantes. 11 a trouvé le secret de tirer des têtes de Pavot, l 'Opium , le plus pur j qui fut jamais. II commence par exposer au Soleil, durant qyelques heures , les plantes entieres ; ensuite il en pique les têtes, & en peu de tems il en tire plein une taise d’argent de suc de Pavot qui est l 'Opium véritable, & qu’on ne sauroit assez payer. Aft< Phi - losoph. Januar. 1 66 p. pag. 4. Ceux qui savent en quel état Y Opium vient de la Grèce ou de l’Egypte, estimeroient infiniment celui du Docteur Hervejus. Ï1 est certain que le bon Opium ne vient point jusqu’à nous , que les Etrangers qui le tirent des têtes de Pavot, le gardent pour leur usage , & qu’ils ne nous envoyent que le Meconium, qui n’est qu’un suc tiré par express on, & qu’ils font épaissir pour en faciliter le trans- Port. Le Meconium est beaucoup insé- tieur en activité à Y Opium , mais d’ail- le-U . il est mêlé de beaucoup de parties hétérogènes & impures. C’est pour ce- a que les Chymistes en font un extrait S» ils appellent Laudanum. C’est ainíï S[ u en parle M. Charas dans son incom- î^table Pharmacopée. La difficulté «c S 1 ) il y a d’avoir un Opium découlé de » 1)1 - même sans aucun mélange, & « G iij Yfô C ce r o s r T í s -> les impuretés qu’on remarque efi ce- » lui qu’on nous apporte, qui, à propre-! » ment parler, n’est qu’un Méconium , » ou un l'uc exprimé des têtes de Pavot, » ont obligé les Chymistes à chercher . » des moyens pour en faire la purifi- » cation. Pkarmacop. Royale J Ckymique chap. yi. pag. y2Z. On volt de-là combien il seroit utile de perfectionner, ce qu’on appelle la Térébration des arbres , la PonSlion des plantes, & la Taille de la Vigne. Par cette voie on tireroit deS sucs admirables, & qui seroient sans doute d’un grand usage pour la Médecine, & peut être même pour les besoins de la vie, comme nous allons voir. II. On ne peut douter que la Méde- ! ci ne ne tirât de merveilleux secours de ces sucs, pour la santé des hommes. Ce - que nous avons vu au sujet de YOpìurrij en est dé j a une preuve tout-à-sait convaincante. Mais ce qu’on a déja essaye de faire fur les Pavots, le peut aussi pratiquer fur les Péones mâles , & fur plu-! ' sieurs autres plantes fingulieres dont ^ on célébré les vertus. Où cela ne con- duit-il point ! On aura par là tout ce qu il y a de plus essentiel & de pl uS actif dans les plantes. On tirera lc J Gommes, les Résines, les Teintures» ^ les Sels, les Odeqrs, &c. Rien n’éch?* SUR t A VÉGÈÏÀTIOîT. ïfï Pér’a aux personnes curieuses & diligentes qui voudront se faire un trésor tous les remedes que produisent les Végétaux contre tant de maladies qui désolent les hommes. AB. Philojoph. Ja- nuarii 1 66p. pag. 4. M. Evelin est déja en état de publier j a l’occasion du sac de l’Orme, un reme- de qu’on a trouvé en Italie, & qui est un spécifique contre les fièvres. On dit pareillement que le suc de Chêne est un remede souverain pour arrêter les pertes de sang qui viennent par la voye des urines, de quelque cause quelles puissent naître. Le suc de Sureau est d’une excellence qui est au-dessus de tous les éloges pour prévenir, ou pour guérir l’hyaro piste. On fera par cette méthode tout ce que les aîembics & l’art pénible de dìstiter , n’ont jamais pû faire. Nous tirerons l’esprit des plantes, non quand elles seront flétries , macérées , triturées ; mais ìorsqu’elles seront encore pleines de vie & de vigueur. Et alors combien de force & de vertu n’en doit-on pas attendre f AB. Philosopha Januar. 1669. ptrg. 4. Secret précieux pour les démangeaisons &* pour les plaies des jambes. Voici une belle expérience. Le Sed G iiij ïj'a Curiosités crétaire qui dresse les Actes Philosopîií- ques de la Société Royale d’Angle- terre , dit : J’avois une démengeaison dans les mains, & quelquefois dans les bras qui me rongeoit, & me dévoroit, jusque dans le fond des chairs, à la honte de plusieurs habiles Médecins de mes amis dont les remèdes, les saignées, & les purgations ne purent jamais me soulager. Tout ce furieux mal fut guéri en peu de jours, par le moyen de la gomme de Prunier qu’on avoit fait dissoudre dans du vinaigre. Je ne veux pas omettre que quelques jours avant l’ufage de la gomme, je me fis appliquer de fois-à-autre, des feuilles de vignes,' & même des grains de raisin écrasés , qui faisoient très - heureusement couler de ces ulcérés l’humeur qui me dévoroit. A£l. Philojoph. Januar. 1669, 5 - Je dois ajouter ici , qu’un homme fort incommodé des maux qu’il avoit aux jambes , s’en est parfaitement guéri, en pratiquant ce que j’avois dit de la gomme de Prunier, & des feuilles de vigne , dans la premiere édition de cet Ouvrage. II ne faut pas oublier ce que les Sa- vans d’Angleterre ont dit fur le sac de Noyer j cet arbre qui a nourri les pré? SUR LA VÉGÉTATION. Ij"? miers hommes durant le siécle d’or ; c’est-à-dire, pendant les beaux jours de la simplicité & sse ^innocence du monde ; s’il en r aut croire les Poètes. Les Anciens ne parlent du Noyer qu’avec honneur; ils, disent que cet arbre étoit consacré à Jupiter, & que les Noix étoient sa nourriture par excellence. Juglans * quasi Jovis glans. Après cela il ne faut pas s’étonner fi le bon goût des Anciens s’est renouvelé de nos jours, & si quelque grand personnage a voulu rater du plat de Jupiter. Messieurs de la Société Royale d’Angleterre nous assurent que de nos jours, il s’est trouvé un Roi dans l’Europe qui a bû long tems du suc de Noyer , & qu’il en a tiré beaucoup de soulagement dans ses infirmités. Addito exempta 1 cujusdam Régis moderni in Europa * qui multùm fucci Juglandis bibit ; indèque multàm commodi fendre. A ci. Philosopha O3obr.i668. Tom.IJA. pag.^$o. C’est pourquoi ces Messieurs prient instamment les personnes aftèéUonnées au bien public de travailler de leur part à per- feélionner le secret de la Térébratiom des arbres pour en extraire les sucs , qu’on reconnoîtra bien-tôt être d’uiî grand usage, tant pour la conservation, que pour le rétablissement de la santé» r5-4 . Curiosités Puisque nous avons tant philosophé fur ces sucs, je me hazardtrai à dire une pensée qui me vient. Quand il s’a- git du bien public , ne doit-on pas risquer quelque choies II y a des 8avans qui sont d’avis que la Manne de Calabre & la Manne de Bríançon, ne sont que la Tranffuiation d’une humeur qui transpire du Frêne & du Mélèze. Si cela est par la térébration , ne pourroit- on pas tirer en Mars des sucs de ces arbres? faire facilement & en grande quantité cette Manne qui ne se recueille qu’a- vec beaucoup de soin & de peine en Juin , Juillet, Août & Septembre? Je crois que cette fève épaissie » feroit la même chose que la Manne : Messieurs de l’Académia des Sciences ne sont pas fort éloignés de ce sentiment ; & l’expérience qu’ils ont faite, autorise beaucoup ma conjecture. Voici ce qu’iis rapportent. II y a quelques années que l'on prit soin de laver une grande quantité de feuilles de TilleauX de la grande allée du Jardin Royal, dans un sceau d’eau, jusqu’à la rendre fort douce.. On la lit évaporer à moitié, & on en fit boire trois verrées à un malade de Paroisse qui avoit besoin d’être purgé. Cette boisson fit aussi bien qu’une p û!anne laxative ordinaire. Ce qui con- SUR LA VÉGÉTATION, r p j* firme la pensée des Cordeliers. Angélus P aléa & Bartholonuus ab urbs veterì qui ont commenté Mésué, & qui les premiers, c’est-à-dire en i , ont proposé que la Manne de Calabre ne tomboit point du Ciel ; mais qu’elle tranfíudoit au travers des feuilles de Frêne à feuilles rondes. Sur cela ©n peut avancer que la Manne de Calabre n'est qu’un sel essentiel du Frêne , mêlé avec une partie considérable de souffre. En effet la Manne deBriançon n’est que le sel efientiel du Mélèze , pareillement mêlé avec du souffre. Mémoires de l’A- cadem . des Sciences 1699. pag. lòl. M. Reneaume a reconnu aussi la matière de cette transsudation, ou ces sucs transpires au travers des feuilles d’Era- ble. Voici comme on en parle dans ^Histoire de la même Académie. M. Reneaume a trouvé fur les feuilles d’u- ne espèce d’Erable. Acer montanum can- didum C. B. F. Une humeur visqueuse qui ne pourroit être qu’une transpiration lensible de la plante...... Elie est d’une douceur plus agréable que la Manne , & approche du sucre. Quelques Auteurs ont parlé du suc que l’on tire de PErable auPrintems par incision, & ils ont même connu ce suc pour être bon; à boire, & d'un goût approchant du 3 u> G vj r/6 Curiosités ere. Hìft. de íAcadem. des Scierie. 1 699; pag. 6s. Four confirmer ce que dit M. Re- neaume , Rajouterai que j’ai dans mon Cabinet, un Sucre fait du suc d’E- rable dans le Canada. Je tiens ce Sucre de la libéralité de M. de Viller- mont, connu par fa curiosité fur les choses naturelles, & célébré parles belles R dations qu’il a dans les Indes d’Orient & dans les Indes d’Occident. Ce Su^re n’èst point autre chose, que le suc d’Erable. On a épaissi ce suc par l’évaporation, en la même maniéré qu’on épaissit les sucs tirés de cannes à Sucre, pour en faire de la Cassonnade. Ce suc d’Erable est une délicieuse boisson, & d’un usage excellent pour les maladies de poitrine & du foie. Moins il y a de façon dans les remedes, & plus ils font efficaces. Van-Helmont s*est déclaré pour le suc de Bouleau. II n’auroit pas tenu à lui d’en faire une Panacée, ou un reme-, de universel contre toutes sortes de maladies. Cet Auteur est admirable fur son suc de Bouleau. II prétend d’abord que le Bouleau est en ce payx-ci, ce que le bois Néfrérique est depuis trois mille ans dans les Indes c’est à dire, un remede souverain contre la Pierre, sur la Végétation, ifs & contre les douleurs de la Néfretique. Eníuite il vient au suc de Bouleau, 6c dit : J’ai observé que c’est un usage ordinaire aux Princes d’Allemagne, de boire tous les jours durant le mois de Mai, une verrée de suc de Bouleau^ comme un spécifique contre la Pierre. Us gardent ce suc dans des bou eilles , & versent par-dessus environ deux doigts d’huile d’Olive, pour empêcher que Pair n e gâtent cette excellente liqueur, ce pur baume qui est inestimable. Ce suc rafraîchit les entrailles, guérit les chaleurs de foie, est souverain contre la Gravelle, la douleur des reins, la Colique. II foulage fur le champ, & guérit ensuite. Van Helmont va jusqu’à lui donner la vertu de réconcilier les personnes mariées, que des maléfices & des enchantemens ont brouillées. Obfervavi Principibus Germanise fuijfe vernaculum * quòd contra Lithiafim* quotannis in Mai» biberent quotidie hauftum liguons é corti- ce vulneratce BetuU ...... Redaâlus jum ergo agnoscere liquorem illum 0 fponte è ramis vulneratis jiuentem tam abundè , ejse merum Lhfuajis Balfamum ^ &c. De Li- thias.cap. 8. §.25% pag.48. Les sucs ou les larmes qui coulent de la Vigne, après qu’elle a été taillée, ont pareillement beaucoup d'uià? ìs8 Curiosités ges dans la Médecine. Le Savant M, Sachs en célébré les vertus dans íòn AMP ELOGRAP HIA. lib. IL se&. III . pag. 72. 1. Ce suc pris intérieurement est un grand remede contre la Pierre des reins & de la Vessie. 2. Ce suc épaissi qu’on trouve en forme de gomme, autour de la Vigne étant dissous dans un vin , & bû à jeun , pousse dehors les petites pierres & les fables. 3. Un verre de ces larmes rappelle les íens & la raison d’un homme, que la liqueur de Septembre à gâté. Si tant est qu’un homme raisonnable puisse noyer 1a raison par l’excès du vin. 4. En se lavant de cette liqueur, on se guérit de la Galle. de la Lèpre & de toutes les maladies de la peau. y. Quelques goûtes versées dans l’o- reille , guérissent la surdité» 6. Ce suc éclaircit, & fortifie considérablement la vue, en s’en mettant soir & matin quelques gouttes dans les yeux.. 7. On en compose I’exceîlent Baume Ampelofla!agma j en exposant ce suc an an durant au Soleil. II s’épaissit en confidence de miel & alors c est jtm Baume précieux pour nétoyer &c sur r,A Végétation. ïjpj guérir toutes sortes de plaies & d'ul- ceres. Pline, en peu de lignes, dit l’usage qu’on en faiíoit de ion tems. Les larmes des Vignes font comme une espèce de gomme ; elles guériílent la galle, la lèpre , les chaleurs de foie , pourvû qu’on se lave auparavant avec de seau où l’on a mis fondre du Nitre. Ce même suc mêlé avec de l’huile, est un dépilatoire certain, & fait tomber les cheveux, íì on s’en frotte souvent. Lachryrrue vitìum qu£ velutì gummi efì * lepras & lichenas , fcr pforas nitro anteprœparatassanau Ea~ dem cum oleo sapiùs pilis illitìsphilothrì ef- fettum habet. Hist.Nar.Lib. iij. Prami. II est constant, & on se l’imagine- ra aisément que ces sucs qui coulent d’eux-inêmes , doivent être beaucoup plus naturels & plus efficaces, que ces sucs & ces extraits qu’on fait selon les réglés des Pharmacopées. De l’aveu. même des Artistes, ils tourmentent lqs plantes, & ils emploient des voies violentes , comme la contusion, la trituration , la fermentation, la combustion * la macération, la putréfaction, la distillation , pour composer leurs Extraits» Dans ces opérations les plantes doivent perdre beaucoup de leur propre substance t _ & de leqr vertu salutaire. Car en- i 6 o . Curiosités fin, n’est-il pas tout visible, que dans ces préparations violentes & forcées, on perd la partie la plus essentielle des Végétaux ? Du moins ne peut-on nier, qu’en travaillant fur les Aromates, les parties tenues, volatiles, fugitives, ne s’envolenr & n’échapent par ces dissipations qui font inséparablement attachées à l’incinération ? On doit conclure de-là, que les sucs tirés des arbres par la Térebration , ou des plantes par la Ponffion j font tout ce qu’on peut avoir de plus parfait en matière de sucs. Ce n’est pas encore là tout l’avanta- ge de cette curieuse opération : du moment qu’on auroít des sucs plus parfaits & plus naturels , conséquemment on auroit des sels d’un vertu beaucoup plus analogue avec la vertu des plantes. Ce qui ne fe trouve pas assurément dans les sels qu’on tire par la calcina- tion. II y a long-tems qu’on accuse les sels tirés des cendres , d’être caustiques, & d’avoir trop d’acrimonie, par- ce qu’ils font dépouillés des autres parties essentielles qui composent la plante , & que faction violente du feu a détruites & consumées. O i ne peut nier que le feu n’ait ravagé & dissipé les qualités sulfureuses, & les qualités mercuriales de la plants, Voilà une SUR L A VÉGÉTATION. ïóí] terrible décomposition & un dépérisse-; ment, sur quoi on ne peut avoir trop de reproches à se faire. Au contraire i des cinq Principes des Chymistes, le Sel, le Souffre, le Mercure & la terre j se trouvent dans les sucs coagulés.’ II n’y manque que la feule Eau. I)onc le suc coagulé renferme plus exactement l’essence & les vertus d’une plante que le sel qui en est tiré par l’incinération , suivie de l’évaporation , dans lesquelles tout le volatile de la plante doit être étrangement dissipé. Les habiles de la Profession ont raisonné tout de même. Les sucs concrets,' coagulés, ou le sel succulent ^ comme l’appelle si bien Laurembergius * & après lui Schroderus son Apologiste, a deux avantages fur le sel tiré par la voie de Pincinération. i. II est plus doux, plus tempéré, moins sec & moins mordi-] cant. 2. II tient encore de la plante, le Souffre & le Mercure, que le sel tiré des cendres n’a plus du tout. Solsucculen~ tus quiin succis concrescit preftantior, eji sale pet calcinationemfa&o* i. Quiasal cineritius non retinet mercuriales , fui - phureas qualitates. 2. Quia induit ab igné magnam acnmoniam Gr calorem. Arnold. Schroderus com. Gunth. Billich. QuatíL; ix & x. pag. ±i. î6z C u r r o s r t é s Nous avons fur cela le témoignage dé M. Homberg , si solidement savant dans la belle Chymie. Ií déclare qu’il a reconnu , que dans les différentes Analyses qu’il a faites des plantes , celles où l’on employé le grand feu, ne font pas si propres pour découvrir les vrais principes & les vertus d’une plante, parce que le feu change trop leur arrangement naturel & leurs dégrés de vola- tilité & de fixité , & même diffìpe ces principes, fans qu’il soit possible d’em- pêcher cette perte. Mémoires de ÍAca-i. démie R. des Scienc . 1701. pag. 116± 117. Au reste la chose parle d’elle- même. II est donc très-utile de perfectionner ce que les Physiciens Anglois ont fil bien commencé ; & par ces sucs tirés íï naturellement, on prépare à la société des hommes des secours par lesquels ils pourront s’aífurer une vie assez longue & aussi vigoureuse que celle des Patriarches. Le suc du Frêne est fort recommandé contre le poison , & contre la morsure des serpens. Pline parle de cet arbre , comme d’un merveilleux vulnéraire , & il assure que dans toute la'Na- ture, il n’y a point de spécifique pour la guérison des plaies, à contré les v§i sur t'À Végétatiôîí. r§z' fiins qui íoit comparable au suc de Frêne. Voici la description qu’il en a faite d’après ses propres expériences. Le suc du Frêne, dit-il, est un puissant remede contre les blessures des serpens ; il íuffit d’en boire pour être guéri. II ne faut, pour guérir une plaie , que mettre dessus des feuilles de cet arbre. Je ne crois pas que la Nature produise rien qui soit d’un si prompt & assuré secours. Le Frêne est d’une vertu si puiss santé contre les serpens, que soit le matin , soit le soir, lorsque sombre de cet arbre s’étend fort loin, il n’y a point de serpent qui ose y passer. Au contraire il s’ensuira de toutes ses forces. Et je sçai par des expériences que j’ai faites, qu’un serpent étant enfermé entre des feuilles de Frêne, & un feu bien allumé, il íè jettera plutôt au-travers du feu, que de traverser par-dessus les feuilles. Contra, serpentes verò fucco exprejfo ad potum ô* impofita ulceribus opifera ac nihil œque reperiuntur Fraxini folia. Tantaque ejl vis„ ut ne matutinas quidem* occidentes' ve umbras , quàm funt longìsïìmte ^ serpens arborts ejus attingat J ctdeò ìpsamproculsu- giat j experti prodamus > fi fronde eâ gyro claudatur ignìs £r serpens * in igriem potins quàm in sraxìnum fugereserpenwnì Hist, Nat. lib. xvj. cap. 13. ï (>4 C U R I O S I T á s Quand Pline parle d’après les Mémoires qu’on lui a donné , il m’est suspect ; mais lorsqu’il parle d’après les expériences qu’il a faites , je compte dessus, parce qu’il étoit d’une exacte probité. Depuis Pline on a reconnu beaucoup d’autres facultés dans le Frêne. On en dit aujourd’hui tant de choses admirables , que s’il y en avoir la moitié de vrai, il faudroit avouer qu’on trouveroit dans ce seul arbre une Pharmacopée en- tiere ; & il suffîroit, pour faire une boutique d’Apoticaìre , d’avoir des feuilles, du bois & du suc de Frêne. Le P. Schott Jésuite, a recueilli avec soin les 37 vertus que les Allemands attribuent à toutes les parties de cet arbre. 1. Le bois de Frêne porté fur foi,’ guérit le cours de ventre , la colique & les Histériques. II faut qu’il touche à la peau. 2. II arrête les Hémorragies, & toutes sortes de pertes de sang. 11 le faut tenir dans la main jusqu’à ce qu’il soit échauffé. 3. II empêche que la Gangraine ne íe. mette dans une plaie, & la guérit promptement, si on râpe de ce bois dans de l’eau froide, & qu’on en lave le mal plusieurs fois par jour. SU K LA VÉGÉTATION. T6/ H. En tems de maladie contagieuse, une cueillerée de suc de F rêne bûe à jeun, met en état de ne craindre, ni les fièvres pourprées , ni même la peste. 5. En cas de poison, il n’y a qu’à boire du suc de F rêne ; c’est un puissant antidote contre toutes sortes de venins. 6. Le suc de Frêne éclaircit la vue & la fortifie, pourvu qu’on s’en lave les yeux soir & matin. 7. Ce même suc bû le matin , guérit la douleur des reins, fortifie le cœur, & abbat les vapeurs. 8. Ce suc mis chaud dans les oreilles, guérit la dureté d’oreilíe, Ia-surdité qui n’est pas invétérée, & les maux intérieurs d’oreille. 9. Le suc de Frêne , bû le matin, guérit les maux de la Ratte, les Pulmo- niques, les Hydropiques, ceux qui font attaqués de fièvres malignes, de la petite vérole &c de la peste. 10. Dans les grandes douleurs de tête, il faut se mettre sur le front , un linge trempé dans ce suc, après qu’on l’a fait un peu bouillir avec autant de Vin, 11. Pour les chancres naissants, il y faut seulement appliquer un linge bien ^oux, & trempé dans le suc tiède de ■^rêne. Cela arrête le progrès du mal, ^ fond les duretez. 266 Curiosités II y a 37 articles de cette force , qui contiennent les vertus de ce merveilleux suc balsamique, & qu’on trouvera rapportés au long par le P. Schott, dans son Livre intitulé: Joco-seria Natur. Art. Ctnt. iij. Propojît . c. §. 3. pag. 299. III. Les sucs peuvent encore fort bien servir de boiflon. Le suc de Sycomore , non - seulement est doux & agréable à boire, mais même il est très- bon pour la santé. Le suc de Bouleau n’a rien de désagréable. L’usage en se- roit excellent pour ceux qui sont sujets à la pierre & à la gravelle. On ne sau- roit dire ce que vaut le suc de Noyer, pour adoucir le sang 6 c les humeurs. Le Docteur Longe dit, qu’avec le suc du Sycomore, on fait de la bière incomparable. Voici ses propres termes. 'Avec un boisseau d’orge 6 c une petite mesure de ce suc doux, on sera de la bière aussi bonne, & aulïï forte que s’il y avoir quatre boisseaux d orge avec la feule eau ordinaire ; & même cette bière fera meilleure que celle de Mars qui est si estimée. Puis il ajoute, afin de bien conserver ce suc qu’on a recueilli durant un mois pour faire de la bière , il faut l’exposer au Soleil dans deS bouteilles de verre, & ne l’en pas retirer , qu’on n’ait toute la quantité de sd*5 SUE tA VÉGÉTATION. l6j qu’on veut avoir. Quand vous avez assez de suc, il faut y mettre un pain de pur froment, qui soit bien mince & bien cuit, sans être pourtant brûlé. Et quand vous voyez que votre lue fermente & se gonfle, ôtez le pain, Sç mettez cette liqueur dans des bouteilles de verre que vous boucherez avec du liège & de la cire par-deflus. Si vous mettez quelques clous de giroufle dans chaque bouteille, votre suc se conservera un an, Sc vous aurez une boiiïon charmante & tout-à-fait salubre. C’est par-là que j’ai conservé pendant plus d’un an du suc de Bouleau, sans qu’il y soit survenu aucun mauvais goût. Aá. Philosoph. Aprilis 1669. Tom. y. pag. 52. Ceux qui vivent à la Campagne peuvent agréablement,. & même avec utilité s’occuper à tout ce petit ménage- ìà. Les Aétes Philosophiques de la Société Royale d’Angleterre , parlent de plusieurs personnes , Sc même d’unç Dame de Condition qui est une grande ménagère fur ces fortes de sucs qu’elle fait à merveilles faire fermenter , 6c conserver long-tems. Si j’avois quelque chose à ajoûter â toute cette Physique fi curieuse , c’est qu’il n’y auroit en Normandie, qu’à percer les Pommiers au mois de Mars* f i68 Curiosités afínd’en tirer le cidre qui ne se saitqu’en Septembre. On éviteroit beaucoup de travail & de dépense. La façon du cidre est longue & pénible. Par-deflsus tout cela on seroit en sûreté contre beaucoup d’accidens. Car enfin souvent après avoir vû avec joie les arbres tout chargés de fleurs, la gelée d’une mauvaise nuit sait tout périr, & détruit les flateuses espérances qu’on avoir conçues de remplir ses tonneaux. Peut-être même, qu’outre cette vendange prématurée dont on se seroit saisi au Printems, on ne laisseroit pas d’avoir encore la vendange ordinaire dans l’Automne. Cette fève qui monte dans les arbres en Mars, est si abondante , que quelque évacuation qui s’en fît alors, il en resteroit toujours suffisamment pour fournir à la nourriture, & à la perfection des fleurs & des fruits. C’est du moins le raisonnement du Docteur Tonge. 11 est, dit-il, même possible , que les arbres dont on a tiré le lue , profiteront mieux , Sc porteront plus de fruits, comme il y a des gens que les fréquentes saignées engraissent. PoJJìbile-eji et 'mm ^ ut arbores melius crefcant & plures producant fruc- tus .... Quemadmodùm quidam magispin " guescunt frequentioribus vem seftionibus * i Act* SUR LA VÉGÉTATION. I§9 Act. Philosoph. Februar. 1669. Tom. IV. pag.'yiq.. Ce Savant est fort pour la saignée des ^rbreà. Qui auroit crû que la Médecine Galénique dût être encore utile dans la famille des Végétaux! Ne pourroit on pas faire la même manoeuvre á i’égard des Vignes ? Si la fève qu’cîles vcrient au P.intems, étoit bien fermentes , Lc préparés avec quelque peu de giroste, de canelle , &c. ce ftroit une ambrofie qui ne íëroit pas indifférente aux gens entêtés de boire du suc de la Vigne, & à qui l’eau est odieuse. J ai lu quelque part dans les Actes Philosophiques, qu il y a des arbres dont on ne tireroit pas beaucoup de suc, & on compte parmi ceux-là , les arbres dont la fève est gommeuse. Ce sont des observations à faire. use -m- Partie . H 170 CuEiosrTÉs Chapitre VI. Le Nitre est le Sel de fécondité , & sa vertu est merveilleuse pour la multiplication , tant 'dam la famille des Végétaux que dans la famille des Animaux. L E Sel-nitre & le Salpêtre font ía même chose, & s’il y a quelque différence, c’est que le Nitre est un Salpêtre plus fin Sc plus pur que le Salpêtre commun. Je n’ai point lû de Philosophe, qui définisse mieux le Nitre, que fait M. Lé- mery : c’est, dit-il, un Sel empreint de quantité d’esprits de l’air qui le rendent volatile. Cours de Chymie I. Part. c. i6. pag. 277. Ce Sel fe tire des pierres, des terres, des plâtras Sc des matériaux des vieux bâtimens qu’on a démolis, comme on le peut voir à l’Arsenal de Paris, oà se sait le meilleur Salpêtre qui soit dans l’Europe. Le Nitre est d’un grand usage dans la Chymie & dans la Médecine. On en fait le Cristal-minéral, le sel Poly' çhreste , l’Eau-sorte, l’Eíprit de Nitre, sur la Végétation. 171 qui est la meilleure de routes les Eaux- fortes, pour la dissolution des métaux. Laissons donc le Nitre entre les mains des Chymistes & des Médecins, potir le déterminer à leurs usages ; & ne le regardons présentement que par la faculté qu’il a de contribuer puissamment à la propagation des plantes & des animaux. Nous remarquerons feulement que les Physiciens qui en ont fait l’Anali r e , y ont trouvé un sel tout semblable au Sel-marin ou au Sei-gemme. II arrive même que quand on fait bouillir le Salpêtre trop long-tems dans de seau, les esprits se dissipent, & il ne reste plus stu'un sel semblable à notre sel commun. Ce qui donne lieu de croire que l g Nitre ou Salpêtre n’est que le sel £°mmun plus rempli d’esprits, qu’il ne * e st ordinairement. Auífi verrons-nous' ^ans la fuite que le Sel-marin aide à la Multiplication des grains , comme le -alpêtre ; & qu’au fond il y a peu ~ e _ différence entr’eux pour cet effet-là. v msi tous les éloges magnifiques qu’on a fait de tout tems, peur célébrer l’ex- ^ellencedu Sel, conviennent également Nitre. Avant Phtcn, on avoir composé des H ij 172 Curiosités Livres exprès . pour étaler le mérite du Sd ; & ce Philosophe parle d'un pareil ouvrage dars ion Livre intitulé Convi- vium. Quant à lui, il appelle sérieusement le 8.1, Leïon, une chose divine j & il n’héílte point à dire, que le Sel est l'ob- jet de la prédiction de Dieu : Sal Deo amicum corpus ■ C est dans son Timee j qu il parle d> la sorte. Platon pourroit bien avoir pris ce sentiment dans les Livres de Moyse qu’il avoit certainement bien étudié , & d où il a tiré une quantité de choses qu'il a mê ées dans ses Ouvrages. Ce qui a fait dire à S. Clément d’Asexundrie , que Platon n’est point autre chose que Moyse qui parle Grec . Quid enim eft Plato ^ nfi Mofes qui loquìtur Atticè ? Strima*'. Lib. j. pag. 34,2. En estet, ce que Platon dit de la dilection que Dieu a pour le sel, revient entierement à ce que rapporte Moyse au suiet des Oblations qui doivent toutes être aflfctiíònnées avec du Sel, pour être agréables à Dieu. Vous assaisonnerez avec du Sel tout ce que vous offrirez en Sacrifices £r vous ne retrancherez point de votre Sa' crisse le hel de C Alliance que votre Die# a faite avec vous. V jus offrirez le Sel dans toutes vos Oblations. Lévitiq. cha' pitre II. v. 13. Les Fayens se sont auíîl imaginés, sur la Végétation. 175 que leurs Dieux s’imérefíoient fort à la fortune du Sel. Athénée raconte avec tout le flegme d’un Philosophe, qu’il y avoit à Tragèse dans la Troade , une minière de Sel, où il etoit libre â chacun d’en prendre selon son besoin ; mais qu’auffi-tôt que le Roy Lysnnaque 7 eut mis un impôt, tout le Sel disparut , & la minière se trouva épuisée. Ce Prince, dit Athénée,' abolit l’im- Pôt, & à l’instant le Sel y revint auflì abondamment qu’auparavant, Lib. iij. cap. 1 . Si le. Sel entre pour quelque chose dans les affaires de la Religion, il est d’un bien pi us grand usage dans les choses de la vie. ■Les Tartares Orientaux ne s’en peuvent passer. Des qu’ils cessent d’en user, * e ur íang se corrompt, leurs lèvres & Lurs gencives se pourrissent, & il leur prend, des difienteries mortelles. Marc. Paul. Lib. ij cap . 3 S. Il y a des lieux en France où l’on rsonne du Sel une fois la lemaine aux Chevaux, aux Bœufs & à tous les ani- rtla ux domestiques , fans quoi on les P er d par la mortalité qui s’y met. M. Voííìus estime que le Sel a été ap- P e flé une ckose divine à cause de la ver- lu qu’il a de préserver de la corruption. H iij 174 Curiosités De Idoloïat. Lib.vj. cap. 18. pag. Les Romains ne donnoient le nom de Sacrée à leur table, que quand on avoir mis le Sel dessus. Lorsque la salière manquoit, on regardoit la table comme profane. Sacras facitis men~ sas (alìnorum appojìtu. Arnob. Lib. ij. Raisons à ce qui regarde-la multiplication des grains & des animaux. i. Ce n’eíl point par un jeu de mots que, Pline a dit : Sale & Sole nïhïl totis coKpor'ibus utilius .• Qu-’il n’y a rien de plus utile à tous les corps élémentaires, que le Sel & le Soleil. Htjî. Nat.Lib • xxx). cap. p. 11 Fa dit par la grande con- noiíì'ance qu’il avoit des choies naturelles. Selon lui, 1e Sel fait l’agrément des alimens du corps, comme les bons mots, les apophthegmes, les rencontres ingénieuses , les pointes d’esprits , les railleries fines & délicates font les délices de Fefprit dans la société des Savans. C’est pourquoi, dit-il, on appelle en Latin Sales tous ces petits jeux d’efprit. Et comme les récompenses & les honneurs dont on couronne le mérite Sc la vertu, font les plus doux charmes de la vie , quand on en jouit dans un glorieux repos : voilà pourquoi , ajoute Pline, on nomme Salarìum J les pensions & les appointemens qu’on ac- sur la Végétation. 175 cordoit aux Officiers de l’armée. C’est toujours Pline quiparle. iVar. Líb.xxxj. ca P ' 7 * II avoir fort bien reconnu qu’il y a . plantes qui poussent beaucoup Riieux dans les eaux salées, qu’ailleurs, & que le Sel contribue non-seulement à ^eur multiplication, mais à les rendre d’un meilleur goût. Peculariis Meiicìmz Rapkano ^ Bet humoris Luxuria . &'c. Hist. Nat. Lib. ix. cap. 2. Vallefìusj Médecin de Philippe II, Roi d E pagne , est bien du sentiment, que le Sel contribue extrêmement à la fécondité. En répondant à çeux qui pensent autrement, il leur dit : Je crois bien que là où le Sel domine excessivement, il ne s’y peut faire de génération- De là vient l’horrible stérilité de la mer de Sodome, qu’on appelle la Mer morte. Elle est d’une salure extrême. Aucun animal n’y peut vivre; dès qu’on y jette ' un poisson , il expire auffi-tôt ; mais quand le Sel est dans un dégré tempère, il rend les eaux tres fésondes. En ester SUR LA VÉGÉTATION.' I77 st n’y a en aucun endroit du monde un fi vis penchant à la propagation , que parmi L-s h ibitans de la mer ; & il ne se trouve point de pere ailleurs qui í’e puisse glorifier d’une aussi nombreuse postérité, qu’il en est parmi les poissons. Cumsaisu- go intra quamdam medìocritatem efi ^ ut in ftïariipfus aquaifacitfacundiffïmas ; nulli- bi enirn mundi adeò luxuriaiur generandi facultas s n que eft tam multiplex genera- r-c>. DeSacr. Philofoph.cap.xxxiv. pag. Z06. Donc le Sel est un principe de fécondité parmi les animaux. M. de la Chambre est tout-à-fait du mêmesentiment. Qui voudra,examiner, dit-il, le principe de la fécondité des Animaux, trouvera qu’il n’y en a point d’autie que le Sel ; car toutes leurs semences font salées : c’est pourquoi les •Poètes qui ont été les premiers Philosophes , ont feint que Vénus étoit st de de i Océan , & que la Dé.sse Sa’acia en «toit la femme, pour nous apprendre que Sel est le principe de ìa fécondité, Sc stu'il n’y a point d élément st fécond que m Mer, qui produit incomparablement fdus d’anímaux , plus grands , píus di- v ers, plus sains & de plus longue vie , S u e tous les autres. Aissi om-iis toujours donné plus d’onfan- a. x Dieux de Mer, qa’à ceux de 1 t rr> Et les H v i y S Curiosités Prêtres d’Isis qui connoiffoient cette vertu du Sel, n’en usoient jamais pour se conserver dans la pureté , que de- mandoit leur Ministère. On a observe que les peuples maritimes qui usent de viandes salées, font plus populeux Sc robustes que les autres ; que les brebis qui le nourrissent d’herbes salées, qui font aux rivages de la mer, font plus d’agneaux & de meilleur goût. Discours du Débordement uu Nil. 1. Part. Art. pag. i8. 2 . Cela étan#, doit-on s’étonner que Vig-mere, dans son fameux Trairé du Feu 8c dû Sel, dise hardiment que le Sel est la prymiere origine des Mé- taux , des plantes pareillement, & même des Animaux... 11 est j íe récrie-t’i! r la vie de toutes choses» Sans le Se 1 r la Nature ne peut rien produire, selon le Philosophe Morien. Aucune choss ne peut être engendrée , dit Raymond Lúlle. A quoi tous les Philosophes Cbymistes adhérent. Rien n’a été crée ici bas , dans le monde élémentaire, ds meilleur, ni de plus précieux que le Sel- II y a donc du Sel en toutes choses, 8c rien ne pourroit subsister, si ce n’étoit 1^ Sel qu : y est mêlé, lequel lie les parties ensemble. Autrement elles s’en iroieÇ £ ea poudre iu palpable, pag. 2 ^ 2 > sctr la Végétation. 179 II finit son Traité par une observation qui est tout-à-sait de notre sujet, & qui montre combien le Sel contribue à la Végétation, à la multiplication duBlé, & même du Raisin. Nous voyons, dit- il, que fur les chaussées & levées des Marais Salins de Xaintonge , où l’on porte les fanges, qui font aussi, salées que la mer propre » il se produit dts meilleurs Bleds qu’il est possible, & en fort grande quantité ; & des Vins aussi fort excellens. pag. 266. Ce stile est du seizième siécle. Je le passerois volontiers , mais le P. le Moine Jésuite ne le pouvoit souffrir; & quand il vouloir citer un Auteur d’un stile barbare, aussitôt le Gotique de Vigénere paroissoit sur la scène-* De l’Hifl. Dijs. Vl. art. 3. p. 233. 3. Palissy qui publia au commencement du dernier siécle, son Livre intitulé , le moyen de devenirrìcke , n’est pas d’un stile beaucoup plus châtié. Aussi philosophe t-il comme Vigénere. II est l’adorateur du Sel, II le fait entrer partout, II n’y auroit rien de bien sait, sans le Sel, dans les minéraux, dans les Végétaux & dans les animaux. Sans le Sel, tout feroir perdu. Ces Philosophes de grand jugement ne se trompent pas, Palissy est si d’accord avec Vigénere, ssue ce qu’il dit, c est Vigénere tour i8o Curiosités pur. Voici comme il parle en Dialogi- ste : » .Te té dis qu’il y a un grand » nombre de Sels, qu’il est impossible à » nul homme de les nommer ; & je » dis davantage, qu’il n’y a nulle choie B en ce monde où il n’y ait d u Sel, b fuit en l’Homme, soit dans les ani- » maux , toit dans les plantes. Je dis b encore plus, que nulle chose vége- b tative ne po .rroit végéter sans 1 ac- b tion du Sel qui est dans les femen- b ces. b Qui plus est, si le Sel étoit ôte du corps de l’homme, il tomberoit en poudre en moins d’un clin d’œil. Si le Sel étoit séparé des pierres des badin, ns, tout s’en iroit en une ruine soudaine & infaillible. Dis-en autant du fer, de l'acier, de l’or, de l’argent & de tous les métaux. Aucuns disent qu’il n’y a rien plus ennemi des semences, que le Sel-Mais jesçai bien que furies Bossis des marais falans de Xaintonge, l’on y cueille du Bled autant beau , qu’en lieu où je fus jamais, b Et toutefois b lesdits Bossis font formés des vuidan- b ges defdits marais', lesquelles font aus-, » si salées que l’eau de la mer... De plus les Vignes de Xaintonge plantées au milieu des marais falans, apportent d’un genre de raisin noirs dont on fait du vin qui n’est pas moins 3 stjr la Végétation: ií?r estimer que l’hypocras ; & leídites Vignes font si fertiles . qu ’une seule apporte plus de fruits ^ que fix de celles de Paris. Dans les Rochers des Ifles de Xainton- ge, l’on y cueille de la Crìjie-maniu , autrement appellée Perce-pierre ^ laquelle a une merveilleuse bonté & senteur i cau- Je des vapeurs de la mer. Les salades en font excellentes. On en a voulu cultiver à Paris; mais elle n’approche en ri:n de celle de Xaintonge dont les terres salées portent de toutes espèces de fruits, & qui font plus délicieux que par-tour ail! mrs.... Si je connosois tous les sels je voudrois faire des choses merveilleuses. Des divers sels, pag. 221. Cela donne déja de grandes ouvertures pour entrer dans le secret que je dois donner dans la fuite , pour la multiplication du Bled» On peut compter lur Paiissy. II étoic ennemi de toute supercherie , si l’on en juge par ses écrits. Il poursuit par tout vivement les prétendus faiseurs d’or, & les bat avec de fortes raisons. n'épargne pas les vendeurs d’or potable, en quoi il me paroit bon Physicien. II soutient à merveilles qu’on ne sauroit Potager Cor : c’est son terme ; pour dire Hu'on ne le sauroit rendre potable , de maniéré que le prétendent les Charnus. Ses expressions font plal- 7 §2 CURTOSTTÉS santés: Je lai bien , ait il, que plusieurs Médecins & Apoticaires ont fait bouillir de l’or dans dts ventres de Chapons gras, pour restaurer les malades, Sc di- loient que ì’or diminuoit; ce qu’on n’a garde de me faire croire : tu as beau le bouillir & fricaJJ'.r tu ne le feras pas amoindrir de poids. pag. 92. Mais où il paroît plus original, c’est dans l’Analyse qu’il dit avoir faite de la tête d’un homme; il ne marque point quel homme, ni de quelle condition il ttoir. Cela ne feroit pas inutile à son Analyse. Car enfin, il est des hommes de certaine proíeílìon , dont la tête est remplie de principes bien distêrens des cinq principes des Chymistes. Palissy» dit tout court. « Je pris la tête d’un « homme , & ayant tiré son essence a par calcinations, distillations , subli- « mations & autres examens faits pat «Matras, Cornues, & Bains-marie j « après toutes les séparations, je trou- « vai que véritablement dans la tête « d’un homme, il y avoit un nombre « infini de folies. Je tombai à la ren- - verse, à la vûë de tant d’extravagan- « ces, que j’apperçûs.pag. 226. Au reste , son meilleur ouvrage n’est pas celui qu’il nomme, le moyen de devenir ri- he* Tout consiste presque à ménager SUR LA VÉGÉTATION. 183 mieux qu’on ne sait, les fumiers, &à faire comprendre, qu’il ne faut point les laisser laver par les pluies abondantes ; parce que ce qui s’en écoule, ks déballe & les rend moins propres pour la multiplication de grains. Ce qui eíî exactement vrai ; & à quoi on ne fait pas souvent assez d’attention dans les basses- cours. 4. Le Cosmopolite , si obscur en tant d’endroits, si impénétrable en plusieurs, est par tout intelligible fur le chapitre du Sel. II l’appelle VEsprit uni - verset du Monde. Ce Saturne , dit-iî fils de Codie Sc de If esta , qui font le Ciel & la Terre, & mari d’Opis fa soeur, qui est la vertu confervative de toutes choses, répréfenre le Démcgor- gon. Car les enfans qu’il dévore & qu’il tevomit ensuite, sont-ce pas les Minéraux , les Végétaux Gr les Animaux ? 11 donne l’être à chacun de ces trois gentes , qui dans leur fin se réduisent en lui, pour reprendre ensuite une nou -7 Velle figure : afin que par cette perpétuelle vicissitude, Tordre établi pour la fuite des générations dès la création dur Inonde , puisse à jamais s’entretenir Sc / fe conserver. Traité du Sel £r de f Esprit du Monde. Liv. ij . chap. iv. p. 99- H y »■ là une belle Physique $ mais elle ne fera 184 Curiosités pas entendue de ceux qui n’ont jamais considéré cette perpétuelle circulation , par laquell^ la nature répare incessamment par les Sels tout ce qui périt, Mais dauber, qui fuit, aidera à faire comprendre cette admirable œconomie de la Nature. s. dauber célébré à tout moment les vertus du Nitre. Selon c^t habile Chymiste, le Nitre est le seul princ.pe de la Végétation des Plantes , de la Génération des Animaux, & de i’Augmen-- ration des Métaux. Sal-nitrum ejì unie d yegetatio ^ generatio, dr augmentatio omnium vegetabihum, animalium fir mhura- lium . De Mercuv. Phiìosoph. K- 68. 11 sait tout son possible pour montrer que le Nitre est le Mercure des Philosophes. Que croyez-vous, dit-il, que les Philosophes ont voulu signifier par leur Mercure , tout à la fois mâle & femelle ; fixe & volatile; leger & pesant ; sec & humide; doux & corrosif? Sous cette Enigme, ils nous peignant le Nitre : Cui r 1 , excepta Nitro* koe Phiìofophorum. emgma congruit ? C’est le Nitre qu’ils nous represencent sous la figure d’uh être plus noir qu'un Corbeau, plus blanc qu’un Cygne, plus nuisible qu’un Serpent , plus innocent qu’un Agneau, plus leger que le vent, plus pesant que sur la 'Végétation. ìSy l’or. C’est un pere qui dévore íes en- fans; c’est l'Azoth d.s Philoiophes: Tout cela ne convientqu’au Nirre. 11 est le Dissolvant univer'el. II m est arrivé une fois, que pour fondre de l’or dans un creuset, j’y jettois de fois à autre des fleurs de Sel, pour hâur la fu- fion. Ce qui me réiiílìt fort bien. Quand je crus mon or en état d être coulant, je tirai le creuset du feu ; & croiant verser de l’or fondu , il ne tomba que du plomb. Mais le puis-je diu f II lortit immédiatement après une poudre r',ugey poudre teinte de l’ame de l’or, qui s’é- toit trouvé dépouillé de toute fa digni- té. O le grand secret ! J’ai tâché plusieurs fois d’y revenir • mais toû'ours en vain. Si j’avois réuíst, jeferois à prés nt i’heu- f eux possesseur de la Pierre Philosophais. "Dieu ne le veut pas. Je n’aî jamais pu rencontrer le juste degré du feu , ni ia proportion deá matières. Le Savant f^aracelse Favoit bien dit: quel affaire du grand Oeuvre consiste dans le Nitre. Chymia deprehendit rem in nitro late cc; Tout le sublime de la Chymie pour la “fédec\ne> & pour la Métallique , dé- Psnd du sel & du feu. ln igné & sale Magifleriian confijìit . C’est ce sel , qui ^onte des abysmes de la terre dans la r %ion de Pair ; d’où il descend impré- 1 86 Curiosités' gné des influences astrales , & détrempé dans l’eau des pluies, des nèges& de la rosée, pour donner la fertilité à la terre. C’est ce que le grand Hermès a voulu signifier dans la Table d’Eme- raude, quand il a dit » que ce qui est » en haut, est ce qui est en bas. Idem est superais , quod efl mferïus. C’est un petit oiseau íàns ailes, qui vole jour & nuit fans se laíser jamais , qui se promène entre tous les Elémens, & qui porte l’esprit de vie dans le monde élémentaire. Par une circulation perpétuelle , & qui n’est jamais interrompue . il va de bas en haut, & revient de haut en bas. II donne la naissance aux Minéraux > aux Végétaux j & aux Animaux. II ne périt jamais; il ne change que de figure. S il entre dans les Animaux fous l’apparênce des alimens, il en fort fous le voile des excrémens: de là il retourne- en terre pour s’élever en partie dans l’air, par la voie des vapeurs & des exhalaisons : le voilà derechef dans les Ele- mens. II rentre dans la racine des Plantes , & le voilà de nouveau dans les alimens. Ainsi fa circulation est des Elémens dans les alimens , & des alimens dans les excremens , pour rentrer dans les Elemens : Elementa in ex- crementa J dr kœc in alimenta redeunt, in~ SUR IX VÉGÉTATION. I§7 desnenti rénovations , ac transmutations . Glauber de Mçrcurio Philosophorum. II faut avouer qu’il y a de belles choses dans les Livres des Chymistes. Cet- te circulation du Nitre est le véritable Mécanisme de la nature. Nous voyons jur la fin de l’Automne tomber les feiiil- *es des Vignes : elles rie tombent que Pour reporter â la terre, par la pourri- tu re , les sels qu’elîes en avoient reçus P^r la végétation. Le Nitre mis en liberté par la distolution de ses feuilles , ^eparoîtrafur la scène : & ce sera lorsque ^ chaleur du Soleil monté à l’Equino- Xe , secondant la chaleur des feux soû- jerrains, poussera les sucs de la terre dans •j* racine des Vignes, pour former à ■^cchus une couronne de pampres nouveaux. Ainsi la face de la nature ne change,qu’afin de devenir la même. Ses ^périssemens n’arrivent que pour se ré- P ar er. Ses pertes font fa richesse. Rien perd: rien ne s’anéantit. Ce qui ^sparoit, se retrouve ensuite. Ce qui c hange reprend sa place. La nature est tû ujours la même. Et franchement qui ^ connoît point cette circulation perpétuelle, en quoi consiste toute l’barmo- ^^e du monde éîementaire, est certaine- p^ft indigne d’ayoir place parmi les i88 Curiosités' L’Académie Curiosorum natura d’Alle' magne, dit qu’on croît parmi les Sça- vans . que c’est Glauber qui a inventé ce menjiruesecret, cette liqueur balsamique, pour la multiplication du Bled Sc des Vignes : cujus inventor Giauberus cre- ditur. Annus I. Obier va t. cij.pag.213 Si Glauber n ? est pas l’inventeur du secret, du moins jll’avoit. II dit dans son Mercure des Philosophes : Si les Vignerons mettoient, à la racine de leur Vigne, ust peu de cette liqueur, ils auroient des raisins précoces , iis auroient un vin qu’ils vendroient bien cher. II ajoute, íì un Laboureur humectoit son gram durant quelque tems dans ce menjîru'ê universel, il auroit de bonne-heure une grosse récolte : Si agricolœsemer, hoc men- Jìruo hum. dation in agrum spargunt, citiùs maturescit . - gravis pingmoribus. pag. yO« Tout ce qu’il nous a révélé de ce secret, c’est que le Nitre fait tous ces miracles- là. Les Chymistes ne lont pas communicatifs. Enfin , après avoir dit que cette même liqueur est capable de guérir toutes fès maladies du Genre humain, il finit par déclarer que le Sel bien employé est le íeul & unique principe de la conservation, de l’augmentation , & de la perfection des Végétaux, des Animaux, & des Minéraux . Sal enim débits sur la Végétation. 189 *nore adhibitum unicum eJJeFe^etab.Anìm. «c Miner, conservcuorem, auclorem,&per- fzftorem. pag. 71. 6. Messieurs de la Société Royale ^'Angleterre, fi zélés pour la perfeéìáon Ôe l’Agriculture, & du Jardinage, ont ssirt recherché les moyens de faire bien exactement le Salpêtre ; qu’ils recon- ^oissent pareillement pour le grand promoteur de la végétation des Plantes. M. Pïenshaw , après avoir prouvé que no- tr e Salpêtre est la même chose que le ^itre des Anciens , il dit: Le Salpêtre est un corps, qui se fait par la coagulation d’esprits volatiles, dont l’air est to 'ut rempli ; & qui s’attache, comme Une fleur de froment aux murailles faites de plâtre , de brique, ou de mortier. ^ rosée, & la pluie en portent beau- c oup dans la terre : & il semble que les ^ées ne soient étendues devant la face stu Soleil, qu’asin d'imbiber une partie stô son influence; ou bien afin qu’il s’en- § e udre dans leur sein un sel - pour augmenter la fertilité de la terre. Et certai- jmnaent elles ne s’en reviennent pas fans Enédiction : car enfin j’ai extrait pi ’s st une fois du Salpêtre de la pluie, & de ar o(ée. Mais la rosée en donne áavan- ta ge. Les eaux dormantes, les eaux des Puits profonds contiennent toutes un ipo Curiosités peu de Salpêtre. Mais ce qu’il y a de certain, c’est que fi la superficie de la terri rdétoit imprégnée de ce sel, elle nepourroií produire aucunes Plantes. Car ie sel, comme dit Milord Bacon , est le premier principe de la vie , & le N'itre efi la vie. des Végétaux. Hist. de la Société R» d’Anglet. pag. 324. Et ce qui montre que la nège contient esteéïivement beaucoup de Nitre j c’est ce que dit le Docteur I. Béale. $ est rapporté dans les Actes de la Sociere Royale d’Angleterre , que ce Docteur confultoit souvent son Jardinier : qu'entre autres choses il lui demandoit, lequel des deux , ou le Soleil par fa chaleur, ou le froid de l’hiver , contribué davantage à rendre la terre fertile ; Si que tous les Jardiniers lui ont répons j du , que le froid, &c fur tout la nège, avancent le tems de la récolte, & produisent une fertilité plus riche , & plus générale. AEl. Philos, hebruarìi i6yO> 'Tom.v.pag. i py. Le Docteur Stubbes , dit qu’il a remarqué que. les Plantes, qui viennent dans un terroir nitreux, font en graine un mois avant les autres Plantes de même espèce, qui croissent ailleurs. Philojoph. Junii 1668. Tom. 4. pag 4 146. n. 13. C’est pourquoi notre mul- e ■e it v Z.X it. n* zi II :té ; us n- k' ha- aue SL ;e, ro' >Iu$ . 7 °'| re- ! ent : hnS nê- au> sur la Végétation. r§r tiplication avance beaucoup le rems de ta moiilon. 7. Etienne de Clave , nomme le Ní- tr e , bel végétal séminaire, Sel balsamique , par la vertu qu’il a de donner la fécondité aux Plantes. Durant l’Hiver, dit il , la chaleur souterraine se redouble , par la multiplication des vapeurs, des exhalaisons, qui s’éìèvent continuellement des plus profondes entrailles de la terre. Ces fumées, ne pouvant trouver une iííuë libre par les pores de la superficie de la terre, parce qu’ils font resserrés,& bouchés par le froid, elles s échauffent, fermentent, & circulent Autour des racines des Plantes, & leur donnent nourriture très-ample, en augmentant le Sel balsamique , qui s’intro- duit, & se mélange alors dans les racines. Mais au Printems la chaleur du So- j e il désobstrué les pores de la surface de j a terre, & alors les Plantes reçoivent de taurs racines ce Nitre qui les nourrit, fomente, & entretient. Car sans ce y l tre,aucune végétation nese fait en lasur- y ace de la terre * ni même dans sesprofon- y entrailles Traités Philosoph. Liv. ij. c ta v. pag. 2yo. 8. Les Sa vans de l’Académie Curioso- ru,n natur£ en Allemagne, attribuent Nitre les végétations monstrueuses, v I§2 C'U RIOStTÉS 6 c les admirables superfétations , qu’ils n’oublierit jamais de remarquer. En parlant d’une Plante de Buglose, qui s’é- toit formée d’une grosseur énorme , ils en rejettenrla cause íurle Nitre, dont la terre étoit là fortement imprégnée, par la quantité des ncges, qui étoient tombées cette année-là. Les nèges , disent- ils, qui tombèrent en abondance , a- voient, par leur substance nitreuse, donné à quelques Plantés, une si grande fécondité , qu’elles en devinrent des monstres. Ce qui ie peut confirmer pal" le secret de'la multiplication , dont on croît que Glauber estl’invenreur , & que ,D. Joan. Ferdinandus Iier.to.dius notre Collègue, vient de publier dans fa Cro' cologia, par lequel on communique au£ grains une multiplication prodigieuse , en les mettant seulement tremper un peu dans une certaine liqueur, avant que de les semer.... Mifceiïanea Curies J Ann- J. Observât, cij.pag . 213. j SenJiv’ogius tient^quelà, où les rayois ' du Soleil tombent plus abondamment, j il y a plus de Nitre, & par conséquent J une plus grande récolte de Bled. II n’efl ! saut pas douter, dit Aiolphus Balduinuit parce qu’un champ est fertile, à pro' portion de ce qu’on réchauffe par les su" miers, qui font tous remplis de Nitre* Cetf 'ils irrite - la m- nt- a- m- ìde , des j paf! ost jue >tre . Irú' ìu* ; se > j un ! -art rios\ on 3 n t, iest { i’en 1101 >vo' > fa' it re> Z’cÛ SVR LA VÉGÉTATION. IAZ C’est par là qu’Albert le Grand avoir trouvé le secret d’avoir de toutes sortes de fleurs , & de fruits fur (es arbres est Hy ver. Observât . Curiojor. Natur. 1674. Pag. iyb’. 9. Bacon a des premiers recommandé le Nitre, comme un acteur très-propre à mettre les plantes en belle humeur , & à les rendre très - fécondes. On tacontc-, dit-il, que le Nitre mêlé avec de l’eau en confidence de miel, est admirable pour hâter la Vigne. Si on en humecte un peu les bourgeons , après Iu'elle a été coupée, en moins de huit Jours elle poufle des feuilles. La raison , d on nous dit vrai, s’offrë d’elle mê- ; c’est que la partie subtile du ^ltre qui est l’ame des végétaux, étant e ntrée dans le bourgeon , ele le pé- ^tre & le fait ouvrir. Causa verijìmilis in spiritu nitri, quod vegetabilium ani - ìììa eft _> subingrejjo gzmmam J partes que. tont; ìguas casque dum pénétrât, aperien- îe - Syìy. Gent. v. n. 444. C’est dans cette même vue que ce jfrmd Physicien dit, que si on met de ^%ue marine au pied des Choux, ôc e , route autre plante , il se fait une * Estante végétation , parce que le 5èl d 1 S ’y trouve est une aide merveilleuse ° Ur produire & réveiller la fécondité 4 P, «me. ïp4 Curiosités dans les plantes. Virtus ad falem refe - renia ^ magno fertilitatis adjumento. Syl. Cent. v. n. 457. Dans un autre endroit il conseille de mettre au pied des arbres du Sel, de la lie de Vin, quelque bêtes mortes; & il assure qu’ils en porteront plus de fruits, & qui seront d’une beauté & d’une grosseur à faire un très sensible plaisir. Silv. Cent. v. n. 477. II n’achève pas quand il s’agit du Nitre par rapport aux plantes. Nous tenons des Anciens, dit il, que si on arrose d’eau salée un chou, il croît à vue d’œil, & qu’il en sera d’un goût plus agréable. Cette eau salée se doit faire Avec un peu de Nitre, parce que ce Sel est plus doux & moins brûlant que le Sel marin : Aquâ cui nitrum admixtum , [pi- ritu prœsaie, minus adurente. Sylv. Cent. v. n. 460. 10. Le Chevalier Digby, dans son Discours fur la Végétation des Plantes t Femporte fur tous ceux qui ont traité de cette Physique. Lorfqu’il explique Je mécanisme que suit la Nature dans la Végétation des Plantes, il n’oublie pas la part qu’a leNitrédans cette assa 1 ' re. II reconnoît que la petite portion de ce Sel qui s’attache à chaque grain de Lied dans la préparation qu’on en fo lî >. SUR LA VÉGÌTATION. île pourroit pas suffire pour la nourriture d’une plante auffi grosse, que l’est une touffe de Bled de cent tuyaux, mais il tegarde ces petits corpuscules nitreux , aidez de ceux que la terre contient, comme un aimant qui attire le Nitre répandu dans l’air. Voici comme il s’ex- Plique : Le Sel - nitre efl un aimant en foi, q u i attire incessamment un semblable sel de l’air qui le rend fécond & vivifiant; & c’est de-là que le Cosmopolite prenoit occasion de dire , qu’il y a dans l’air » une invisible & secrette * substance de vie. Ce Sel doux * 8c balsamique contribue à la vie des * animaux & des hommes , comme à 55 celle des plantes. Ce Sel est la vérifie nourriture des poulmons & des e lprits..,.. Dans ce Sel habitent les Ve rtus séminales de toutes choses car Ce lel n’est qu’un très-pur & très-simple e *trait préparé de tous les corps, fur ^1 le Soleil darde fortement ses rayons le sublimant à un tel point de haU- ei3r > qu’il acquiert le dernier dégré de jj* ret é... Cet aimant terrestre , ce j, ez ard, dis-je, rampant, attire en bas & Ucc e pour ainsi dire ce dragon volant, *’° j Ur l’incorporer & ne faire ensemble A 1 Un tout, conformément à ce grand aphorisme de la table d’Eméraude. I ij !r§6 Cueiositís » Le supérieur Se l’in r érieur ne font | » qu’une même essence. Le Soleil est « Ion pere 3 la lune est sa mere, la » terre est sa nourrice , Sc l’air la porte » & la distribue de tous côtés. Comme donc cet esprit universel ejî homogène à toutesphoU s j Se qu’il est en ses effets l’esprit de vie ^ non-seulement aux Plantes , mais encore aux Animaux j ne se- rpit il pas juste, 8 e très-important de le préparer duement, afin qu’il ne fut pas j moins utile à réparer les maladies du ' corps humain, qu’à rétablir les plantes dans leur premiere & verdoyante vigueur. C’est de là qu’Albert le Grand fut surnommé Mage * parce que dans les plus grands froids de l’Hyver , paf le moyen de cet esprit ou de ce sel (céleste Sc balsamique, il étoit assez ingénieux pour faire germer toutes fortes de plantes , Sc de les faire porter deS fruits en une parfaite maturité. Si l'on suivoit les mêmes réglés de ce grand Maître , pour rendre ce sel svmpaté- tique & convenable au corps humain , il ejî indubitable qu il feroit cheq nous M même effet qu il fait dans les plantes• p\ 60 j 6l. L’idée du Nitre dp t’air, qui fp ratjat fans cesse autour des grains de Bled, semés Sc imprégnés du même sel dans la préparation, qu’on en a fà sur ra Végétation. t$j te, est la Physique de la Nature même» Cette réunion du supérieur & de Yinfé- rieur n'est point une imagination , elle est réelle & effective» C’est de ce mariage du Ciel & de la Terre que naissent toutes les productions qui se font dans la famille des Végétaux & dans la famille des animaux. Ce sel exalté & mis en mouvement par les naiffanres chaleurs du Printems , fè mêle dans le suc des Plantes & dans le sang des Animaux, & sollicite les unes & les autres à la multiplication de leurs espèces. De-là viennent cette joie, & ce tajeuniffement charmant que le Printems fait briller fur toute la face de *a Nature, Et ce même Nitre bien Préparé, comme dit Digby , pour l’u- fage de í’homme, répareroit de tems en tet ns le dépérissement que causent les années , & lui procureroit ce précieux ra jeunissement que l’Ecriture-Sainte re- c °nnoît dans l’Aigle : Renovabitur ut ^salnjuventustua. Psalm. cij. v. y. Vic- * 0r in Bythner dit, que l’Aigle rajeunit f ° Us les dix ans , que ses vieilles plumes °mbent toutes, & qu’il lui en revient e nouvelles, en forte qu’on prendroit vieille Aigle pour un jeune Aiglon. y ra - Prophet. pag. y20. Jl » M. Denis après avoir expliqués X iij ïpS CUBïÒSITÉS comme l’eau leu le ne suffit pas pour îa nourriture de certaines plantes , il le prouve par l’expérience. Les terres, dit- ^ il, qu’on ensemence toutes les années , | dépérissenr toujours, & s’amaigrissent j peu-à-peuj & quoiqu’elles soient humectées & arrosées de pluie comme ; à l’ordinaire, elles manquent pourtant de ces sucs qui font nécessaires à la nourritures des plantes. Après cinq ou six années” de récolte, on est obligé de les laisser reposer pendant une année. II faut les couvrir de fumier , & y répandre de la Marne ou de la Glaize pardessus pour les engraisser 6c les rétablir dans leur premiere fécondité. Donc outre l’eau qui se trouve dans la terre, il y a un certain sel Nitreux ^ qui est ré- : pandu dans tous ses pores, & qui étant j dissous par les parties pénétrantes de ; l’eau, peut être enlevé avec elles, pour aller porter la nourriture à toutes les plantes. Ce sentiment n’est point une pure supposition, puisque les Chymistes trou- yent effectivement de ce sel, non-seu- lement dans les plantes, mais auflì dans le sein de la.terre, & on voit par expérience , que les terres n’ont de la fécondité, qu’à proportion qu’elles abondent en ce sel. Le fumier , par exemple» li’est bon pour. engraisser une terre asi 5 SUR L A VÉGÉTATION. ï$9 tle ; que parce que les urines, Sc les ex- crémens des animaux contiennent beaucoup de Nitre. C’cít un secret surprenant pour la multiplication des grains - de les laisser tremper quelque- tems dans une certaine lessive de sei-Nitre, avant « que de les semer. II est donc » certain que c£ sel fait la principale * nourriture des plantes. L’eau qui le «dissout en le pénétrant, lui sert » comme de véhicule pour le faire « monter jusqu’au sommet des bran- 50 ches. Conférence sur les Sciences, pag. 166 . 12 . Personne n’a plus de droit que M. Boy le , de parler fur le. Nitre. Par Analyse qu’il en a faite dans son Laboratoire , il a découvert mieux, qu’on ft ’a jamais fait, la Nature, & l’essence de ce sel. II l’a étudié avec un attachement & un travail infatigable. Franchement c’est lui qu’il faut écouter, puis- *ì u ’il parle d’après ses propres expériences. II commence par dire, que le "-Nitre ne peut être suivi bien exacte- j ment par {'Analyse, parce qu’il s’enve- *°p e 56us des figures, différentes fans îl °mbre > qu’il régné par tout dans les lr °is familles des minéraux, des plan- ms 8c des animaux, qu’il n’y a point ' e corps fans ce sel, qu’il entre dans la aòo Cu RlÒSITÉî' composition de tous les Mixtes ; &qu’e'S un mot il n’y a point dans la Nature, ds sel plus catholique • c’est-à-dire, plus universellement répandu dans le monde é- lementaire. Nullum J nient ejse qui fit JVitro magis cathulicus. Tentamèn Physi- co-Chymic. circa partes Nitri. Sect. I. Ce savant Physicien notis assure, qu’il a trouvé dans la substance de ce Sel, deux sortes de sels. i. Un fiel volatile J qui est un acide. 2. Un sel fixe J qui est un Alkali • Scct, xxvi). Mais ce qu’ií y a de plus curieux dans cette longue Analyse, faite par distillations, solutions, coagulations, mixtions , séparations ; c’est que M. Boyle a perdu souvent de vûe le Nitre , qui comme un Prothée chargeoit subitement de figure, à ne le pas recon- noître, dans le teins même qu’il le te- noit fous le joug des opérations Chymi- ques. Une autre merveille ; c’est que ce Sel tant de fois égaré , masqué, métamorphosé, après une si longue, & si pénible manipulation , s’est retrouvé dans la même ' quantité que M. Boyle l’avoit employé la premier? fois. Voilà le prodige : après savoir décomposé, en séparant ses parties, il 1 a restitué en son entier, poids pour poids. La Chymie n’étoit jamais allée si loin. Les Artistes se vantent de décomposer les Mixtes, SUR L A VÉGÉTATION. 201 dc de les réduire en toutes leurs parties. On leur sourient qu’il en échappe beaucoup à leur diligence ; 8c on le prouve invinciblement par l’impuissance où ils font de les rétablir en leur entier, en réunissant les cinq principes qu’ils en ont tirés. C’est à quoi il n’ont jamais pu parvenir ; 8c c’est ce que M. Boyle a fait. II a décomposé le Nitre, 8c après cn avoir ìong-tems promené les différentes parties, il les a réunies, 8c a restitué ce sel précieux dans tout son premier volume. C'est après cela que ce Philosophe déclare , que le Nitre ejì un £ íre privilégié dans la Nature ; que c’est ì>n corps des plus simples, peu compose d’une légere contexture, 8c que ce ^u’il a fait à l’égard de ce sel, ne tire point à conséquence pour les corps plus mixtes , 8c d’une tissure plus entrelassée. ■ste vin tout simple qu’il est , dit-il, ne fp peut réintégrer, en réunissant ses parmes quand on les a séparées. Combien donc setoit il plus difficile de rétablir les c °rps qui font composés de parties or- Raniques , comme sont les animaux J façon en est telle, que toute l’indus- rrie des hommes doit renoncer pour ja- j^ais à songer de révivifier un animal dont la mort a dérangé la simécrie. Ec ne sauroit trop s "étonner, comment ï v 202 Curiosités une telle frénésie soit montée à la tête de Paracelíe, qui d’ailleurs avoir tant d’esprit. Toute la subtilité de la Mécanique ne saurai t élever l’Art, jusqu’à le mettre de niveau avec la Nature. M- Boyle ajoûte : il n’est donc pas surprenant que nous regardions comme un conte de vieille, ce que les Physiologistes disent du Phœnix , qu’iì tenait de lès cendres. Mais il y a un prodige qui pour n’approcher pas de la prétendue résurrection du Phœnix, ne laisse pas de mériter notre attention. C’est le P. Kir- ker, Jésuite , qui le rapporte. Lib. iij. de Art. Magnet. Part. V . cap. 3. pag. y00. II dit qu’auprès du Pélore, qui est un Promontoire de Sicile, & qu’on nomme aujourd'hui Capo di saro ^ les coquillages de poisson qu’on a réduites en poudre au bord du lac, renaissent & le reproduisent, si on arrose d’eau salée Cette poussière. M. Boyle est fort porté à ne pas contrarier la relation ; mais il voudrait qu’on se contentât de dire simplement, qu’il s’en forme de nouveaux coquillages. Seíl. 32, 33 > 3 -f & Z j- Ce savant Angíois touche cela fort délicatement & avec beaucoup de politesse. II faut en effet respecter les grands hommes , même jusques dans de certaines petites méprises qu’on ne doit re? s u k la Végétation. 2Sd lever qu’avec peine, Sc sur-tout à l’é- gard de ceux qui ont autant travaillé, que ce célébré Jésuite , à illustrer shis- toire de la Nature, qui est, dit le P. Thomastin de l’Oratoire , une des plus telles parties de la Philosophie. Méthod. d’étud. la Philosoph. Lib. ij. cap. xxij. pag. jqo. Lorsqu’on ne hait pas la personne, & qu’on ne cherche que la vérité, la dispute n’a point de chaleur. 13. Libavius attribue la fertilité de l’Egypte, au Nitre que le Nil, en se détordant , porte sut les terres qu’il innon- âe. Strabon dit qu’au de là de Momem- phis , .il y a deux minières de Nitre qui sont si abondantes, qu’elles donnent k nom à ce pays-là : Ultrà Momenphin Junt Nitraricz duce, quce Nitrum plurimùm firunt J undè Nitriotica prœfeftura efl. Oeograph. Lib. 17. pag. yqy. II est cer- ta in qu’il y a beaucoup de Nitre dans soutes les terres de l’Egypte, Sc de * a il en venoit même à Paris une grande Zuantité, il n’y a pas trop long tems. E’Ufage en esî présentement destendir ^France. Quand le Nil se déborde,. porte son sel nitreux, par son innon- íyston, sur toutes lés terres auxquelles; " communique une fertilité extraordinai- Te< Rien ne fait mieux voir les richesses », ^Ue la Nature répand dans ce pays-là I Y]; 204 Curiosités que l’énorme Tribut qu’il payoit à Pto- lémée Aulétès , pere de la fameuse Cléopâtre. Strabon dit d’après Cicéron, que ce Tribut montoit à la íomme de douze mille cinq cens talens. Cet Aulétès étoit un joueur de flûte, qui n’a- voit de vivacité que pour les plaisirs, & qui étoit d’une indolence affreuse pour les affaires du gouvernement. Ce qui fait dire à Strabon : u Si un Roi -> si paresseux & si indigne administra- » teur du Royaume , avoit de si grands » revenus, combien 1*Egypte doit-elle -> mieux valoir maintenant, fous le gou- » vernement des Romains si appliqués » à la culture de leurs terres ! Geograph* Lib. 17. pag y39. Cette fertilité se remarque aisément par le grand nombre des Villes & des Villages de PE- gypte. Sous le Roi Amasis il y avoit vingt mille Villes ; & quelque peuple que fut alors ce Royaume, il le fut incomparablement davantage fous les Pto- lémés, dit le Chevalier Marsham: Et Jub Ptolomcos tandem maximum ccepit jEgyptus incrementum. Chronic. Tsgypt- fxcul. xv. pag. 397. Aussi Joseph dit » que de son tems il y avoit dans 1 Egypte sept millions cinq cens mille hommes, fans compter ce qu’il y en avoit dans la Ville d’Alexandrie. Bellum Judaiç . Lib* 2. cap. 16. sur la Végétation. 2ô£ Ce qui augmente l’admiration , c’est . que l’Egypte, où elle est la plus habitée , n’a guére plus de cent cinquante lieues de long, & cinquante de large. Sénèque assure, que la fécondité des femmes d’Egypte , vient de ce qu’elies boivent de l’eau du Nil. II y a, dit- il, plusieurs choses dont on ne peut rendre raison: par exemple, pourquoi l’eau du Nil rend les femmes íì fécondes , qu une femme stérile n’a qu’à boire de l’eau de ce fleuve pour devenir bientôt mers: Quorumdam causa, non potefl' reddi, quart aqua Nilotica facondiores fœminas faciatadeò.ut quarumdam vif' £era longâ fierilitatt praclusa ad concepturrt relaxavcrit. Nat. Qutest. Lib. iij, cap. 2y. pag. 121. Pline dit que le Nil donne également dans 1 Egypte la fertilité à la terre, dt la fécondité aux femmes. Fœtifer po - tu Mlus. Hist. Nat. lib. viij. cap. z, Ët un peu après il ajoûte, que quelque- 'fois on voit en Egyte une femme mets de sept ensans d’une feule couche. Et in Aigypto Jeptenos uno uterosimul gigni Q-utor ejl Trogus. Wendelinus est d’opinion que les femmes des Hébreux, durant leur séjour en Egypte, tirèrent des eaux du Nil qu elles buvoient, cette extraordi- 20o8 Curiosités comme un enfant des Dieux j comme un présent de Jupiter, £r comme prenant st source dans le Ciel mime. Us prenoient pour un titre de fa divinité le nombre de qui se trouve très-exactement dans les Lettres grecques du nom de ce fleuve , nombre qui convient fort juste à l’an- née Solaire composée de zpy jours que le Soleil employé à parcourir les XII Signes du Zodiaque. 11 n’en íalloit pas tant pour être mis au rang des Dieux chez les Egyptiens. N E I A O S En effet, tout le bonheur de l’Egypte dépendoít du débordement de ce fleuve; aussi Ls Egyptiens étoient ils fort attentifs à l’obferver. Pline dit, que quand le Nil n’augmentoit que de douze ou treize coudées, la famine étoit dans 1 Egypte , parcs que les terres un peu élevées ne pou voient pas être couvertes de son eau ôc imprégnées de son - SO ~ S - 10 - 3 ° - 70 - 200 Z65 Str r la Végétation. 209 sel nitreux. Quatorze coudées répan- doient i’eau & la joye presque par tout : Quinze coudées donnoient une assurance certaine d’une abondante moisson : Mais seize coudées se célebroient par des joies & des fêtes publiques. ln xïL cubitis f amerrisentit .- in xiii.enamnum esu- tit: xiv. cubita hiiantatem aíferunt: xp.Je- curitatem. xvi. delicias. Hist.nar.lib.j.c. beaucoup de fruit, auíïï stérile quS » celle qui est semée de sel, à cause de la » malice de ses habitans. C’est pour la même raison qu’Abimélech , ayant fíris la ville de Sichem & tué tous les habitant , » il détruisit tellement cette ville, » qu’il sema du sel au lieu où elle avoit » été. Juges j chap. 9. v. 4/, Attila fit la même chose à Padoue, & l’Empe- J reur Barberousse à Milan. RÉPONSE. M. de la Chambre dans son excellent Discours, fur les causes du Débordement du Nil, répond à cette objection , beaucoup mieux que je ne pourrois faite. Quant à ïobjedlion, dit-il, que l’on fait de la jlérilité on pourroit répondre que tout forte de sel n’efí pas propre poúr engraisser la terre, qu’il n’.y a que le Nitre qui ait cette vertu, comme flou fres dire dre par; £bni rie : I_,e de t ìnci en dan C’ e que qu’ que foi phí cet qui qu' ten fcie abc pat Plu qu« en îan j SUR t A VÍGÉTATÏ O N. 2IZ flous avons montré ,’ & que tous les autres la brûlent & la ddìéchent. Mais à dire le vrai, tous les sels la peuvent tendre fertile , por.rvû qu’ils ayent les préparations nécessaires à cela; cars’ils ne sont bien mêlés ayec la terre, & s’ils Ke sont dissous, ils ne produisent rien. ï^e Nitre même qni est le plus fécond de tous, est inutile aux plantes, s’il n’est incorporé avec la terre, & s’il n’est en état de pouvoir couler & monter dans leurs feuilles & dans leurs branches, (-'est pourquoi le terrain de l’Egypte, ^Ue le Nil ne peut inonder tout nitreux ' «Ju’il est , demeure stérile ; d’autant hue le N itre, dont il est plein, n’est Point dissous. Et fans doute le Pro- , Phête entendoit parler de la terre de I c ette nature, quand il l’oppcse à celle hui est fertile ; car il est vraisemblable huen écrivant cela, il se souvenoit du j^rroir de l'Egypte, des déserts de l’Ara- ^ie 8c des environs du lac Asphaltite qui sondent en sel, mais qui font stériles, Parce que ce sel n’est point dissous par ^ eaux douces : & c’est à quoi seau des Plaies sert par-tout ailleurs , aussi bien hue celle dont on arrose les terres ; car etl fondant le sel qu’eiles ont, elle le rend Ca pable de monter. 11 en faut dire au~ îa nt du s e l commun, car quoiqu’il soit &I4 Curiosités plus pesant que l’autre , il ne laisse.paï ïe ti d’avoir quelques parties volatiles qui s<5 es peuvent servir à la production des plan- fiér tès : & de fait on n’a point trouvé de l’av meilleur moyen au Royaume de Va* ■ être lence, pour rendre les Oliviers dé plus | tìm, de rapport, que de jetter de l’eau de la 1 loì e mer fur les racines ; ce qui se pratique châ aussi au Pérou pour les Maïs & pouf dor les Palmiers : & l’on remarque que les òn terres les plus fertiles , font celles qui i Cau font proches de la mer. C’est pourquoi | silo: les Grecs ont donné à Neptune l’épìtbè- ; pot te deFytalmios, Nourricier des plantes • fée] Enfin on ne doutera plus de cette véri- fi rt té, fi l’on fçait combien les terres font Cou, fertiles dans les marais íàlans de la Xain- . *rt, tonge ; car les vuidanges que l’on tire k des canaux où fe fait le sel, qui font Pot aussi salées que l’eau de la mer , portent ^ha du Bled en plus grande quantité, & des *int fruits de toutes sortes aussi beaux & §n< aussi savoureux que quelqu’autre lieu quS ^uì ce soit. ^ar Pour répondre donc à l’objection pro- *te posée , il faut dire hardiment, que ceu* qui ont sait semer du sel fur les terres, pour les rendre stériles, fe font abusés» & ont ignoré la Nature & les proprié - tés du Sel ; & même il est vraisest^ blable que ceux qui en ont semé ító d a? qui inde r a- lus : la í juô )Uk les qui I joi I lè- ' tes. ; iri- , jnt ; in- j ire í ant 1 ent ies SUR LA VÉGÉTATION. 21/ ^ terrain des villes, qu’ils avoient rayées, ne Font pas fait, pour le rendre jjérile ; puisqu’en Fétat , où les ruines ‘ ^voient mis, il n’étoit pas propre à e , tr e cultivé. Mais c’étoit plutôt un châ- bment mistérieux , par lequel ils vouaient faire connoître, que les villes qu’ils c hâtioient, avoient manqué de sagesse , ^ontleSel est le hiéroglyphe. Après tout ^ pourroit dire , qu’encore que le Sel c *uíe la fertilité de la terre, il faut néan- **>oins qu’il y soit en une quantité proportionnée ; & que s’il y en a trop,il défiché , 8c brûle la terre, & la peut ain- tendre stérile. M. de la Chambre Diseurs fur le Débordera, du Nil. h Pan. *tt. 12 .pag' z 2. Sur tout ce que nous venons de rap- Potter de si docte, & de si constant, c ^acun peut se regler, pour procurer riche fertilité a ses terres , à ses vi- & 8nes, à ses jardins ; & même pour promue n les í etJ ì J Oiir la Héi ! <3 Oie r H Oier stop 8 tont Un j dit ??ai lard l Ile & :r- Sur r a Végétation. 217 *Re, que pour cette raison , Pythagore 2 appeilé cette plante Anthropomorphos * c’est-à dire, ayant forme & figure d’hoin- *He. Francise. Imperat. dit que son Pere en avoit une, où l’on voyoit rrès distinctement tous les membres placés dans 'tne exacte proportion. Dífcorf. Nat. xii/. Pag- 76. J’en ai vu une , où cette ressemblance avec le corps d’un homme , émit éprenante; il y avoit une e/pèce de tête, avec de longs filets de racines qui larmoient une chevelure assez plaisante: °n y voyoit un corps avec les deux bras, * e s cuisses & les jambes qui se terminoient etl pointe. La vertu de cette plante est d’endor- jssir , d’appesantir, d’engourdir, d’ôter ? / sensibilité : c’est pour cela, dit A. , ^iès, qu’on en donne une prise à ceux 5 qui on sait l’amputatìon de quelque Membre, ou que l’on a condamné à la gestion. Camp. Elyf. Quœft. xliij. n. 5. & a g. 30 6. Ce breuvage ôte si efficacement le sentiment, que si l’on en prend r °P , c’est un poison mortel. Si la dose n’est pas trop forte, on 0t nbe en délire , & un homme devient â? Génétique épouventable. A. Réiès 11 qu’il a connu quatre paysans qui w a nt trouvé une Mandragore dans leur r uin, en prirent les feuilles, croyant L Partie. " K. 2l8 Curiosités que c’étoit une bête, & les mirent avec leur viande dans leur marmite- Quelques heures après leur dîné, il leur prit une étrange aliénation d’elprit ; í’un ne pouvoir se tenir sur ses jambes, le second couroit les chemins tout nud, le troisième monta fur le toît de la maison ne voulant pas descendre, & soutenant que les voleurs étoient en bas j le quatrième se déchira toute la peau avec les ongles, Le mal ne dura qu’usl jour. Le lendemain ils étoient guéris* n • 2. pag. z Op. Si on en prend peu, on en est plus gai, plus résolu, plus entreprenant. Osl est comme dans une espèce d’yvrelfè* Les Jannisiaires parmi les Turcs eU usent avant que d’aller au combat. Grande question parmi les Botanif' tes ; lavoir si la Mandragore est un remède contre la stérilité. Quelques-ufl 5 croient que parmi les Israélites on étoif dans cette opinion, à cause de ce q ul j est rapporté dans le chap. xxx. v. 14- ^ la Genèse, où Rachel qui étoit stéri'í ìç, paroît dans un furieux empressé ment d’avoir de quelques Mandragot^ que Ruben avoir trouvées à la camp 3 ' E ne, & qu’il avoir apportées à fa me sí !'o tei foi la foi Pa ì flei Pai rel Hie drj le , Cer loi, prc tes ìàa J E Jfi a i est Ce c J er v ^.ia. L’Ecriture ne dit point que R 3 ' eheì eût desléin de se délivrer par-là fes 'ses ] ÌUs Óis ta g ec Û' rit , un úr >u- , 3S J ■ ;aU j ust 1 ris» lus On i lie. en stst re' un 5 cois qu» íri"! ifse'i )seS> ipa' ìV Etf' à* SUR la VÉGÉTATION. 2 k- ^opprobre de sa stérilité. II y a apparence que les pommes de Mandragore font belles & d’une odeur agréable dans k Judée. L’Epouse des Cantiques invite ion Bien-aimé à sortir dans les Champs, farce que les Pommes de Grenades font en fleur & que les Mandragores ont déja répandu leur odeur . chap. vij. V. IZ. Au r este. A. Réiès prouve en plusieurs maniérés, quçncore que le suc de la Mandragore , pris en quantité, rende stéri- * e j 6c ôte même la vie, il est pourtant Certain qu’étant employé bien-à propos, ‘°in de causer la stérilité, il est très- pfopre à l’usage pour lequel on croit ^Ue Rachel demandoit des Mandragore* avec tant de passion, à sa sœur ■Ua. Les Sorciers & les Enchanteurs, Cousent quelquefois de cette plante, qui e st très-dangereuse en de mauvaises ^ains. Dodonée dit que la Mandragore nst nommée par les Grecs Kirkaja ^ par- que la fameuse Magicienne Circê s’en e rvoit, pour composer des philtres & > es breuvages amoureux, qui forçoient > s hommes à l’aimer. Creditur enim hu- r adix ad amatoria facere. Dodon. fbst- stirp. Pempt. iij. Lib. iv. cap. xxix. fag.q.jq. Uais les Charlatans emploient à un. ’ - K n A20 Cu EIOSITÉS usage bien différent la racine de Mandragore. lis en sont ce qu’on appelle une Main de gloire. Plus cette racine approche de la figure humaine, plus l’esti- Hient ils. Ils l’enferment dans une boë' te , &c la vendent fort cher à des avares sots & crédules, auxquels ils font accroire , qu’en faisant quelques cérémonies , l’argetft qu’on mettra auprès, ss trouvera doublé tous les matins. C’est ainsi qu’on dupe ceux que des passions injustes & furieuses aveuglent & rendent ridicules. De- là est venue une autre forte de su-, percherie. Ceux qui font commerce dê ces fariboles, au lieu de Mandragores qui íont rares en France, ils vendent des racines de Bryone ou Coiilevrée, qu’ils taillent en forme de Mandragore- Ils lardent ces racines avec des grains d’Avoine , puis ils les mettent quinz® ou vingt jours en terre. L Avoine qu< germe, s’y incorpore & les couvre de petits poils qui achevent la reslemblan- ce.’ Maihiole raconte , comme d'origP val, tout ce que font ces imposteurs» pour donner une représentation humai- fie aux racines de Bryone. Etant à Borne , il tomba entre ses mains un malade qui faifoit métier de tailler ces ra- ping s gn forme d’homme & qui M Vei tOi; ìrn; fur exj hun *es r un o r «M l u <*ep ot Jîet Jîier «tvi . 2 cin e din itia ÎU’o; d; a ns toffì, % te r 1- le , P' ! i- ë- es c- 3- fe ! j ! ns i int . fade :es ;nt e > re< ïns i7,e lj* de in- rst ' a^; L o' 0 ra' 14 StrR IA VécîÉT A TIOÎÏ. 22î- Vendoit fort cher. Le malade lui révéla tout le fait, & lui avoua qu’il n’est pas Paginable combien il tiroir d’argent» ssir- tout des femmes stériles, de qui il e xigeoit ce qu’il vouloir pour ces prétendues Madragores. Radices ilLœ quot humanam formam refefum quas impoflç - & nebulones quidam vénales circumfe- rií nt j infœcundas mulieres decepturi > fac~ Junt. Mathiol. Lib. iv. cap. 71. Les *ommes de Mandragore, quelques belles pelles soient, ont une vertu soporifique ® laquelle il n’est pas possible de résister. jfvinus Lemnius dit qu’il fut obligé d ôter celles qu’il gardoit dans son cabi- où il ne pouvoir rester un mo-; ^nt, qu’il ne fut auffi-tôt saisi d’une ît-vie insurmontable de dormir. Explì-, c At. fj er b, Riblic. cap. 2. . 2. La nature qui peint dans les ra- j’. n es des plantes des figures si extraor- inaires, ne fait pas des choses moins Arables dans les fleurs. C’est ainsi *d, ! W ^ on ne voit jamais qu’avec admiration, la Grenadille les instrumens de la ‘bon de Notre Seigneur. Ce qui fait L e oette fleur que les Indiens nomment o ar acot j a été appellée par les Chré- e !l s > la Fleur de la Paffíon. p^La Grenadille est une plante qui ram-; c omme le Lierre , dont la fçuillq K ii] ■2 22 CunrosïTési est semblable à celle de la folle -ví- gne, dit le P. du Tertre, Dominicain» dans son Histoire Naturelle des Antilles. ' Sa fleur est composée d’une petite ' coupe » comme celle d’un calice, contenant environ un demi verre. Du haut de cette coupe, environ à l’épaisseus d’un quart d’écu de la bordure , sortent cinq ou six petites feuilles blanches las- : ges d’un pouce, lesquelles se terminent en pointe ; & immédiatement au-defluS de ces feuilles , tout autour de la cou- > pe, il y a une couronne de petite® pointes de la même substance de la fleur * longues comme des fers d’éguilleteSí blanches , toutes rayées, & comin® fouettées de couleur de pourpre. A u M' lieu de la fleur, s’éleve une petite Colo' ne aufli bien faite, & même mieux qU? si elle avoit été tournée au tour. Sn f cette colonne , il y a une petite ma*' sue qu’on appelle le marteau de ^ fleur. Sur le haut de ce marteau, il y* troix clous parfaitement bien faits. P ’ fond de cette coupe autour de la peti fá colonne, se levent cinq pointes bla* 1 ches qui portes cinq petites languette dorées , semblables à celles qui naiff esl au milieu de nos Lis; c’est ce que 1 0 1 compare aux cinq plaies sacrées de n°' ìre cet P o CL cet P. cri de lan bet jan «c des Na dai de trè; 5ni Sin UN( Un ïv terf U’ei de ay c íol e 0c cri t sur là Végétation. 22F ìke Sauveur. Comme l’on trouve dans c ette fleur la Couronne d’e'pines, les fouets, la Colonne, l’Eponge , les Cloûs, les cinq Plaies, on a nommé ^ette fleur, la Fleur de la Paffion. Le o. Ferrari en a fait une fort belle des- Cr iption , où il a fait entrer beaucoup de piété, & tous les ornemens de fa bril- ànte Eloquence. II traite ce sujet avec beaucoup de délicatesse, sans oublier limais que son livre a pour titre F lore , êc qu’il faut être fleuri quand on parle des fleurs. Flora Lib. ij. cap. xj. pag. * 96 . Z. Il n’y a point de plante où la sature íafle plus de petits jeux, que |jans l’Orchis ou le Satyrium. Les fleurs de chaque espèces , dont le nombre est tr ^s-grand, représentent toutes quelque ^•cnal. L’une est un Oiseau , l’autre un Singe ; tantôt c’est un Frelon , tantôt d n e Guêpe, une Abeille, une Mouche, Papillon , un Moucheron, une Uf îaife, une Araignée, une Saute- te 5 r elle, ou quelque autre insecte. Rien e st plus divertissant que l’inspection e ces fleurs. Cornélius Gemma en ì v °it de vingt - six espèces. Cornélius °°elius & Laurembergius en avoient ^core de particulières qu’ils ont dé- K iiij Z 24 CURIOSITÉ S Mais l’espèce la plus curieusesis celle qu’on appelle Anthropomorphos j \ Anthropophora J parce qu’elle représente j un homme ou une femme fort exacte- j mefit. Voici comme en parle le P. Kir- ! ter. II y a certainement des plantes rares , & d’une grande beauté : on peut ; bien mettre de ce nombre les plantes dont les fleurs ont une forme humaine* ; La Nature y a pris tel plaisir , qu’il n’y ì a point de partie dans le corps humain, 1 qu’elle n’ait tâché d’exprimer, même | avec la différence du sexe. Rarafané at - ; que elegantes Plant arum fpecies, quaruM j in nonnullis quœ non mcongruè Amhropo - j morpìiót iicuntur ita lufit Natura ^ utvi# \ fit in corpore humano membrum J quod non quantumpotuit, exprimere fuit conata„ imà integram in floribus humant corporissruc - tìiram _,fub utriufquefexu architeElatafuit» Mund. subterr. tom. ij. lib. 12. sect. 1. c. Sur quoi le P. Ferrari dit sort agréablement : Qui est-ce qui ne se sera pas un plaisir des plus sensibles, de cultives les fleurs, puisqu’il semble qu’en recon- noissance de ce qu’on sait pour leur cul- j ture, elles travaillent avec les plus belles couleurs, à faire le portrait de leurs Biefl- faicteurs.? Cette fleur paroît au commencement de l’Automne ; mais la fleus qui repréíente les femmes, vient dès 1 ? ÌÏU rai lor a c for t-Uì Li les iv est H( Sc O l toi Hia am vu est ch ( tes •Pai cì. *> 0 ] slO] haí stui SUR't À VÉGÉTATION. 22p mois de Mai. Wlaio menfe J dit le P. Ferrari J Jloret jìlvojìs in montibus JEquìco - lorum à trìfìdo ìntegumento virefcento a c per ora.spurpu.ranu suspenfis muliebris forma minutilis ludibriis ^ congerie in acu- f um fajiigium decrejcente spicatis. Flora Lit». 2. cap. z. pag. 15'7« Entre les six espèces d ’Orchis que les 8avans de l’Académie Curioforum satura ^ ont fait graver, les deux premières font celles qui représentent les hommes & les Femmes, & qu ils nomment, Okchis Antropopho- íosMas, & Okchis Anthko- f ophoros Fímina. Ann. i6yi. Observât. 41. pag. 73. La Nature dans *ous fes miracles peint la grandeur & la majesté du Créateur de l’Univers, & Mutant qu’elle peut, elle met dans fes °Uvrages, des copies de l’homme qui une ressemblance originale, & un c bef-d’œuvre de son Auteur. 4. Tout le merveilleux des différends espèces d’Orchis, n’est rien en com- P a raifon du Boramets de Tartarie. Voi- Cl comme en parle Scaliger. « La plus « *?°b!e & la plus considérable orde «® es Tartares , est celle , dit-il, qui fe œ ®Omme Zavolha. Dans ce terroir, les « a ÇUans du Pays fement une graine œ ressemble à la graine de Melon, « 226 Curiosités -, excepté qu’elle n’est pas si longue. H -> en vient une plante qu’on appelle £0- -> ramets , c’est - à - dire Agneau , parcs -> que le fruit en a toute la figure. Cet- -> te plante croît presque jusqu’à la hau-i » teur de trois pieds. Le fruit a les pieds, -, les ongles , les oreilles, toute la tête, ! -> aux cornes près, ainsi _que les a un » Agneau ; cependant à la place où doi- » vent être les cornes, il y a deux touffes b de poils qui les représentent assez-bien. b II est couvert d’une espèce de cuis » mince & délicat, dont les far tares íe ->font des bonnets. La Pulpe, qui est x la chair du fruit, est austì agréable à b manger , que la chair des Hommarts. b Si on perce ce fruit, il en fort une li- b queur rouge comme le sang qui coule b d’une plaie. Tant qu’il y a des. her- -> bes autour de cette plante, elle s’en b nourrit, comme fait un Mouton dans s un gras pâturage. Lorsque les herbes -- voisines sont consumées , le Boramets b se sèche & périt ; & ce qui augmente » l’admiration , c'est que les Loups sont b fort friands de cet Agneau végétal, & B qu’ils cherchent avidemment à le dévo- -> rer, tandis que les autres bêtes carnacie- b res le regardent avec une extrême in- -> dolence. Scaliger IL ad Cardan. Exer* cìu 181. pag. y97. Franchement, il s’est err r í a Végét at ion. 227 faut peu que je ne regarde cette histoire comme une pure table. Du moins Scaliger ne croit pas la moitié de tout cela. Cependant Licetus pesant le tout dans la balance d’une exacte & judicieuse Critique, n’y trouve rien d’incroyàble. Èst-ce , dit-il, une chose si étonnante --- de voir une espèce de laine sur la « peau des fruits ? n’en voit-on par fur « la peau des Pêches f Et je pourois -- ajouter qu’on en volt beaucoup plus fur la Callebafl'e de Guinée , que j’ai dédite dans le premier volume des Curio- H'és de la Nature & de P Art , p. 103. Quant à ce que cet Agneau naît d’u- œ ÎJe plante; ne dit-on pas que les « Macreuses naissent du bois pourri des œ Vl eux Navires.Je ne me gendar- œ Gérois pas fur ce qu’on ajoute , que « Ce t Agneau est attaché à la racine de « ia plante , par une espèce de vaisseau œ ^mbiìical , puisque le fétus qui est « ^ véritable animal, est attaché par le°c 3?°mbril, comme par une racine à « a tnere, dans le sein de laquelle il se « Nourrit, selon Aristote , comme les « Plantes & les fruits se nourrissent par « e urs racines. On ne doit point être « í^ r oté par ce qu'on raconte du Bora- « ^rs, qu’jl s e nourrit des plantes « K vj 228 Curiosités -> qu’il mange autour de lui, & encore » par la tige qui lui tient lieu de Vais- »seau umbilical, car enfin il y a bien »de l’apparence que, quand le fétus est -> parvenu à une certaine grandeur , en -> suçant il prend par la bouche quel» -> que aliment, quoiqu’il prenne de l’a- » croissement, de la substance qu’il ti- »re de sa mere par le cordon du nom- -> bril..... Ainsi, conclud Licetus , je ne » voudrois pas que de plein faut on s’al- -> lit inscrire en faux contre ce que les » Physiologistes racontent du Bora- » mets, fur le témoignage de Voya- » geurs de condition & d’une probité » reconnue. Je n’ai rien à ajouter » cette Critique ,, sinon qu’elle peut souffrir plusieurs difficultés : & fur quoi n’en peut on peint former, quand on veut soutenir ses doutes & défendre ses soupçons f 5. Voici une autre merveille de la Nature, qui demande une nouvelle attention. C’est la Plante difiillatoire * décrite par les Savans d’Allemagne. A£l> Eruditorum 1682. Observ. iqy.pLg.z6z- Voici comme en parle Hermannus Ni- colaus Grimm * qui a vu la plante, h es Ouvrages du Seigneur font grands dit le Sage. On ne peut les considères fans être enchanté. La plante distilla- SUR I.A VÉGÉTATION. 22$ toìre, n’est-elle pas un de ces prodiges de la Nature, qu’on ne sauroit voir sans être frappé d’un étonnement qui enlève l’efprit ? Et ce qui me touche vivement , dit Hermannus Nicolaus * c’est le Nectar délicieux qu’elle m’a plusieurs fois fourni si abondamment, pour me rafraîchir dans une soif & une lassitude ^câblantes. Elle est gravée dans le Journal -de Lipsic que nous venons de ci- ter^ Voici ce que notre Voyageur ajou-ì îe: II y a au bout de chaque feuille ìwe petite bourse, ou si l’on veut, un petit vaisseau gros & long comme le Petit doigt. II s’ouvre & se ferme par, petit couvercle qui est attaché au- dessus. Ces petites bourses font remplies d’une eau fraiche, douce, claire, cor-; diale & fort agréable. Le plaisir que ^ette liqueur charmante m'a fait quand ' ) étois pressé d’une soif brûlante , faic ^oe je m’en souviens toujours avec plai-: fir. On en trouve assez fur une plante Pour désaltérer & rafraîchir un homme yìen échauffé. La plante iiflillatoire at- llr e par fa racine l’humeur de la terre, 5^nd le Soleil par fa chaleur l’a raré-; jpe , & fait monter par la tige & par „ es branches dans les feuilles où elle se ■djtre: de-là elle tombe dans les petits ^cipients qui sont à lextrémité de? .2zo Curiosités feuilles. Cetre délicieuse séve refl e dans ces petits vaisseaux, jufqu’à ce qu’on l’en tire ; & il faut remarques qu’ils demeurent fermés exaélement, tant que la liqueur n’est pas bien cuite & bien digérée, & qu’ils s’ouvrent d’eux- mêmes, dès que le suc est bon à boire* II est admirable pour éteindre prompte- mnetles fièvres ardentes. Appliqué extérieurement, il emporte les dartres, les éréfipelles & les inflammations. Cette plante ne croît pas loin de Colombo qui est la Métropole de l’Iste de Ceylan. On la trouve dans des forêts, dont le fond est un peu humide & beaucoup ombragé. 6. Il y a des arbres à qui il faut du feu pour les nourrir, & pour entretenir leur verdure & tout leur embonpoint. J’ai vû, dit Methodius fur le coupeau de la montagne de Geschidage ( c’est l’Olimpe des Anciens ), allez près de la Ville de Burse dans la Natolie , habitée par les Caloyers, un grand arbre fort élevé , & étendant ses racines au milieu du feu qui fort des soupiraux de la terre. Au reste cet arbre est íi beau , st verd, si chargé de branches & de feuilles , qu’il semble qu’il prend sa vigueur de quelque vive & fraîche fontaine. Is n’en puis pas rendre la raison, car enfiq . SUR LaVÉGÉTATION. 2Zt on sai: que le feu consume, & dévore toutes choses; & cet arbre néanmoins répand superbement ses rameaux de tous côtés, en dépit des fiâmes, au milieu desquelles il est planté. Method. in Ex - posi. diB. Apofl. de ResurreEl. 7. Parmi les végétations rares, cel- les qui font miraculeuses, doivent fans doute tenir leur place. En voici une de ce genre. II n’y avoir point de famille dans la Tribu de Lévi, qui n’afpirât à l’honneur du Sacerdoce, & qui ne le disputât à Aaron. L’Ecriture rapporte ^-dessus la révolte & la punition de Coré , de Dathan & d’Abiron. Enfin Dieu prenant pitié des Enfans d’Ifraël, de ces hommes difficiles à conduire; & P°ur arrêter leurs murmures qui atti-i toient fur eux des châtimens épouventa- ~les, il voulut bien leur faire comprendre par un signe visible, que c’etoit lui— ^dme qui avoir fait tomber le Sacerdoce fur la personne d’Aaron. Ce qui ^ fit de la forte. Moyl'e par Tordre de Dieu , commanda que les Tribus don- ^croient douze Verges fur chacune descelles on écriroit le nom du Prince de chaque Tribu. Aaron donna aussi la henne , qui étoit pour la Tribu de Lé- v i. Dieu avoit déclaré que la Verge de c elui d’entr’eux qu il avoit appelle au. LZ2 C U R I Ó S I T ié s Sacerdoce , fleuriroit. Moyse les mît « toutes dans le Tabernacle. 11 trouva « le jour suivant, lorsqu’il revint, que » la Verge d’Aaron , qui étoit pour «la famille de Lévi, avoit fleuri; & » qu’ayant poussé des boutons, il en for- «tit des fleurs, d’où après que les fleuil- « les s’étoient ouvertes, il s’étoit formé « des Amandes. Nomb. Chap. xvij. v . 8. II ne s’est jamais fait dans la Nature une végétation si prompte ; & le miracle est ici incontestable. En une nuit pousser des feuilles, des fleurs Sc des amandes : il n’y a que FAuteur de la Nature qui puisse développer si promptement les germes enfermées dans les plantes. 8. Voici une végétation qui est pareillement des plus rares : auifi Sévere Sulpice nous la donne-t’il pour un miracle. II dit qu’un Abbé, pour éprouver la patience d’un homme qui fe présentoir pour être Moine, planta dans la terre une branche de Styrax qu’il avoit , alors par hazard à la main ; & qu’il ordonna à son Novice de Farroser tous les jours très-exactement. 11 falloir aller chercher l-’eau à deux mille de là , car il y avoit cette distance du Monastère ait Nil où le nouveau Religieux devois prendre l’eau ; ii fit fa commiífion aved Sîtr la Végétation. 2zz beaucoup de fidélité , allant à pied, & apportant sur ses épaules l’eau du Nil pour arroser abondamment le bâton de son Abbé. Durant deux ans le bâton ne Paroissoit pas profiter du foin qu’on en prenoit ; mais à la troisième année * ìe bâton poussa des feuilles très-belles , êc donna ensuite des fleurs. L’Historien a joute quil a vû dans le Monastère, des éjectons de ce même arbre qu’on cul- Avoir avec plaisir, comme un monu-; ^ent de ce qu’il avoir plû à Dieu dé faire, pour récompenser l’obéissance de son Serviteur. Dialog. i. de I/irtutib. S* Martini. Il y a des Physiciens parmi les Pro-í l estans qui nient le fait. Tel est IVendeli-* qui plaisante d’assez mauvaise gra-í ç e sur ce que le Cardinal Bellarmin rap-j Porte la chose d après Sévére Sulpice, c omme un miracle constant. Mirants* Mil. cap. xxiv. pag. 197. M. Rai ne conteste par le fait, mais A est porté à croire que ce n’est pas un Miracle. II íe fonde fur ce qu’a dit Virgile, qu’une branche d Olivier toute sé- c be, prend racine quand on la met en terre, & qu’on prend soin de l’arroser. Truditur èjicco fadix Okagimlignoi 234 Curiosités D’ailleurs l’expérience justifie le sentiment des Anciens. En effet, FortuniuS Lìcetus assure qu’il a vû dans le Jardi» de son Oncle, une grosse branche d’O- livier toute sèche depuis plus de dix ans séparée du tronc & hors de terre , qui prit ensuite racine. On la ficha danS terre pour servir d’appui à une autre piéce de bois , à laquelle elle étoit attachée avec des clous ; la même année elle poussa des feuilles & des branches qui après s’être ornées de fleurs, se chargèrent d’Olives. Et ce nouvel Olivier fit la même chose durant plusieurs années» Je conclus de-là, ajoute M. Rai, que ce bâton sec, que ce Moine arrosa par ordre de son Supérieur qui vouloir éprouver son obéissance, si par hazard ce sût un bâton d’Olivier, il a pû pousser & devenir un arbre sans miracle. Sifortè Oleagìna fuit J potuit fine mìraculo radiées agere & germinare. Hist. Plantar. Lib» i. cap. 18. pag. 3p. Ce n’étoit point une branche d’Olivier; mais de Styrax, arbre odoriférant, d'oà découle le Sto- rax qui est une gomme résineuse, dont l’odeur charmante fortifie le cerveau, & réjouit le cœur. Le Styrax est un arbre commun dans la Styrie : c’est de-là que nous vient le Storax par la voie d’Alep. §. Bacon dit d’après quelques Ar» sur la Végétation, zz5 tiens, que si on met un plat plein d’eau à quatre ou cinq pouces d’un Concombre qui commence à germer, en vingt-quatre heures la plante naissante Aura atteint le vaisseau où est l’eau. Si cela est, ajoute ce Savant, il faut confesser que les plantes font d’une nature plus excellente qu’on ne s’imagine, & que je ne pourois dire ici, puifqu’elles fe portent d’elles-mêmes vers le lieu d'oà elles peuvent tirer leur subsistance. Ce qu’on dit de la Vigne est aussi admirable : c’est une ancienne Tradition parmi les Naturalistes , que la Vigne pousse les sarmants du côté où l’ofi 3 planté l’échalas, pour la soutenir. Sylv* Sylv. Cent. V. N. 462. 10. M. Rai, sur la foi de Pline, rap-; porte qu’il y avoit dans la Germanie des arbres si gros, que d’un tronc creusé , les Germains en faisoient une nacelle qui portoit quelquefois jusqu’à trente hommes. Plìn. Hifi. Nat. xvj. cap . 40. Dans le. Congo, il y a des arbres qui étant creusés font un Canot où deux cens personnes se peuvent placer à leur aise. L’arbre qui croît dans le Malabar & qu’on y appelle Atti-Méer-Alou a pour l’ordinaire cinquante pieds de circonférence au tronc. On en avoit un de Zz6 CtrHîôsrTás cette espèce dans la Cochinchine ï quï s vécu deux mille ans, à ce qu’on dit. Une nouvelle Relation de la Chine*’ porte que dans la Province de Suchu, il y a un arbre qui couvre d une feule de íes branches deux cens brebis ; & que dans la Province de Chékiang il y en a un que quatre-vingt hommes peuvent à peine embrasser. M. Rai ajoute à tout cela, que dans la Province d’Oxíord, il y a un Chêne dont l’ombre peut couvrir trois cens quatre Cavaliers, & quatre mille trois cens soixante quatorze Fantassins. Hiji- Plant. Londini. in fol. 1686- ii. C’est une belle chose qu’un arbre qui porte des Huîtres. On n’en voit point de pareils à Paris ; mais le P. du Tertre Dominicain, nous assure qu’il a vû à la Guadeloupe, des Huîtres qui croissoient fur des branches d’arbres. Voici ses termes. Les Huîtres ne font pas plus grandes que les petites Huîtres d’Angleterre c’est à-dire , larges comme un Feu blanc. Elles font attachées aux branches des Parétuviers qui trempent dans la mer. Sans doute que la íèmence des Huîtres qui'est répandue dans la mer , lorfqu’elles frayent, s’attache à ces branches , de forte qù’elles s’y forment, & y grossissent par succès- I sue la Végétation. 257 flon de tems ; & par leur pesanteur font baisser les branches dans la mer ou elles font rafraîchies deux fois le jour par le flux & reflux. Htft. Nat. des Antilles. Iraité iv. chap. 2. §. pag. 237. 12. Vers le milieu du siécle passé , & flans le tems que l’Allemagne étoit désolée par une guerre cpuì duroit depuis ts ente ans, comme chacun défefperoit fle voir jamais la paix qu’on fouhairoit fl paflìonément, on diíoit alors, cornue un proverbe populaire, nous aurons A* paix quand les Rojes viendront fur les Saules. Les Savans de l'Académie, Cu- r ioforum Nat une assurent qu’un Saule Produisit en 1648 un nombre .considérable des plus belles roses du monde ; & qu’ensin cette maniéré de Prophétie Par cet évenement fut accomplie tout-à- seit à la lettre, car la paix fe fit cette rrieme année. Obferv. cxvij. pag. ijp. ■ 4 tin. 167 y. 13. Ceux qui aiment le merveilleux; trouveront ici leur compte, C’est un ar bre qui pouvoit fe piquer de poli- ^ e sse , de discernement, & peut être us, puifqu’il sa- *ua fort honnêtement un Philosophe, f* faut expliquer cette Enigme , & dire e sait. C’est Philostrate, que j’appelle etl garantie. II rapporte cpe dans une ue quelque chose de pi Curiosités conférence qu’eut Apollonius avec Thespéfion , Chef des Gymnosophi- fies , dans PEthiopie & où chacun de son côté vantoit fort sa Philosophie» Thespéfion ayant pris la parole, dit: 'Apollonius, vous ne faites pas grand cas de nous : on vous a fait de nous de mauvais portraits ; mais cet arbre vous fera connoître, que notre doétrine n’est pas tant à mépriser. 11 y avoir là un Orme tout proche du lieu où ils étoient assis ; lequel dès que le Gymnosophiste le lui eût commandé, se courba & se mit à saluer Apollonius, en lui donnant*le titre de Sage, d.’une voix à la vérité dls- tincle & formée ^ mais foible & déliée j comme ferait celle d'une femme. Vie d’A- pollon. Liv. vj. Chap. y. pag. 403. U y a là deux partis à prendre. Les esprits forts contesteront la vérité de l’Histoirej & d’autres qui croient tous les contes des Anciens, diront qu’il y a de la sorcellerie dans cette affaire-là. 14. II y a des plantes qui ne sont rien en considération de ceux qui le s cultivent, & dont la Végétation est tout-à-íaít bizarre. Jean Baptiste Triuro' fetti rapporte qu’il avoit mis dans une bouteille de verre de la graine d ’HippO' lapatum ^ pour la conserver contre Phu- aaidité de l’air, & i’ardeur du Soleil, # cin. -45 Cei reil gui foi Ries que tar jam affa Mu f em i’arl «té qui les Noi d 6en ^es **iat; Véi & u e 4 *ìj. ’CC ii- de ie, it: nd de | iras- lie nit • le Us- •e j A- II its re ; les le- les est J m- | me 1 pO' Vi' 66 SUR LA VÉGÉTATION. 2s$ tju’elle y avoir germé & fait des racines fans qu’il y eut ni terre , ni eam Erudit. Aprilis. 1686. pag. 217. Cette végétation se fit sans grand appareil. ip. Voici une bizarerie des plus singulières. C’est un arbre qui ne veut point être planté de la main des hommes. II mourroit & la race en manderait plutôt, que de se laisser planter par un Jardinier. II ne se multipliera Jamais, si les hommes se mêlent de les affaires : C’est l’arbre qui porte la Muscade. IIy a, dit Tavernier, ceci de Remarquable de la Noix Muscade, que * arbre ne se plante point. Ce qui m’a ^é confirmé par plusieurs personnes 3ui ont demeuré plusieurs années dans Isles de Banda. On m’a assuré que la *^oix étant meure , il vient de certains Ciseaux des Isles de vers le Midi, qui * es avalent toutes entieres & les ren- ^Nt de même fans les avoir digérées. Ces Noix étant alors couvertes d’une Matière visqueuse & gluante, venant à l °mber à terre, elles prennent racine, ^egétent & produisent un arbre qui réussirait pas , si on le plantoir ^°mme on plante les autres. Tavernier y Part. de ses Voyages j Liv. ij. chap. * l j’ pag. 2?$. II ne faut pour cet arbre, Î24O Curiosités ni Jardinier, ni préceptes de Jardinage* La Nature a ses irrégularités que le* Savans nomment des Anomalies &q ul font au-dessus de nos raisonnement Aristote dit très-sagement , qu’il y 3 une foiblesse d’esprit d’en demander k raison : Nam rationes qiucrere earuin rt~ rum quœ patent finjiti infirmitas qûœâ&& intelleclus efl. Phisic. Lib. viij. 1 ( 5 . Scaliger, contre Cardan, pla 1 ' santé sur l’arbre appellé Mitrojldiras. On dit que cet arbre croît dans l’Iíle de Java , où il est fort rare. On ajoute qu’an lieu de mouëlle , c'est un fil de fer qui part de la racine , & qui monte jusqu’aU coupeau de l’arbre ; mais le plus beau, c’est que quiconque porte fur foi un morceau de cette mouëlle ferrugineuse, ïl devient impénétrable à quelque épeS ou fer que ce loir. Cela, dit Scaliger,' approche autant du mensonge, que nouS avons dessein de nous en éloigner. L?nr enim efì prope mendacium quàm nos à y o* luntario mendacio alienu Exercit. iSl* Distinct. 27. pag. yoo, 17. Nous estimons que quand une plante se pétrifie, elle se dégrade en se rangeant parmi les foílìlles : & qu’elle passe dans une famille moins noble que celle des végétaux ; mais tout au con- traire ? lorsqu’une plante devient animal; sur la Végétation. 24s mal j elle s’ennoblit & monte dans un plus haut degré, en acquérant la vie sensitive. Voici un arbre de ce second genre. Proche l’Iíle de Gimbuîon, il y en a une autre où se trouve un arbre dont les feuilles en tombant se changent en animaux ; elles ne font pas si-tôt à terre, qu’elles commencent à aller comme une poule fur de petites jambes. Ant. Pigafetta dit qu’il a gardé une de ces feuilles huit jours dans une écuelle ; qu’elie se mettoit à marcher dès qu’il la touchoit, 6c qu’elle ne vivoit que d’air. Scaliger parle de ces mêmes feuilles, 6c dit, comme s’iì l’avoit vû, qu’elles marchent , & s’en vont fans façon, quand on les'veut prendre. Exercitat. h2. pag. 42 s. Bauhin dit qu’elles font assez semblables aux feuilles de Meurier, & qû’ei- les ont de chaque côté deux pieds courts Sc aigus. Si cela est , ajoute ce Savant botaniste , il est à croire que ces feuilles en se courrompant aquierent une vie Plus noble, savoir la vie sensitive, que les Physiciens n’ont jamais séparée du Mouvement progressif. II ne les saut done plus compter dans la famille des végétaux. G’est un grand prodige , qu’une Quille d’Arbre se change , en animal L Partie. E '2^2 Curiosités & qu’elle rastemble en elle le sentiment, & le mouvement progreffif. Bauhin Hist. Plantar. Tom. i. lìb. 4. tap. j8. pag. S03. 18. L’Aveugle à qui notre Seigneur redonna la vue , dit d’abord : Je vois les hommes marcher commeJi côtoient des arbres. Marc. ch. 8. v. 24. C’est ici tout le contraire, Un homme de bien dit qu’il a vù les arbres marcher comme si c’étoient des hommes. Anastase de Nice , dans l’opinion où il est, que par la force des vers magiques & des enchan- temens, on peut attirer dans son champ les arbres de son voisin , raconte qu’un Hérétique de Zizique, de la secte des Pneumatomaches, par la vertu de son art, avoit fait venir auprès de fa maison un gpnd Olivier de son voisin , afin de procurer à ses Disciples de l’ombrage SC de la fraîcheur contre les ardeurs du Soleil. Anaflaf. Nie. Qucejl. in Sac. Script. Ce fut apparemment par la méme manœuvre que le Verger d’Qliviersde Vectidius changea de place. Car enfin i’Antiquité a cru que les Magicien* peuvent changer, sinon toute la Géographie , du moins la Topographie d’uní ‘Région ; mettre la montagne dans 1 * vallée,& déranger tellement le Parc, le Château, les Avenues, les fontaine* nt» ihin ; 8 . ìeuf î les ; ar- tout dit ne fi Ni- ir la hati- amp u’uo : des son nson in de rSo- ' eript• riême :rs de enfin ciefiS ogra' d’une ns fi Parc f I caineí i sur la .Végétation-. 24,5 à les Ruisseaux, qu-un homme ne se reconnoîtroit pas au milieu de fa terre. C’est ainss que Pétrone fait. parler sir, sorcière Enothée. J’ai un empire íur tout ce que vous* voyez dans ì’Univers, & rien ne se® peut soustraire à mon pouvoir suprê- * me. Quand je veux, je sais périr en un® instant tous les épis de Bled des plus * fertiles Campagnes. Lorsqu’il me * plaît, je mets l’abondance par tout, & * je tire des rochers arides des sources « d’eau qui font des fleuves plus gros « que le Nil. La mer écumante de cesse- « re , s’appaise à ma parole; les Zéphirs « s’arrêtent &,tombent à mes pieds. Je® force les rivières de retourner vers « leur source. J’apprivoise sur le champ* lés lions & les tigres de 1 Hircanie. * Quoi ! ce n’est encore là que des ba- « ga telles? Par mes vers magiques je « fais descendre la Lune de son Orbe, & « l’abbaisse sur la terre. « Quidquid in orbe vides^parec mllù : Floride Tellus Cumvolo jspìjsalis.arefcit languidafuccìs; Cum volo j f un dà opesscopulique a t que hor~ rida. Saxa Niliades jaculantur Aquas ; Mihi Pontus inertes * ij 244 Curiosités Summitit jluiïus • Zephyrique tctcentìa ponant Ante meossua sabra pedes ^ mihisumina parent J ' Hyrcanxque Tygres ; &ju(Jìsare Leones. Q_uid ! Leviora Loquor ? Luna descendit imago Carminibus deduSla méis .... Ovide attribue àMédée le pouvoir de tarir les fontaines, de faire couler les fleurs des Vignes & des arbres fruitiers, & de cbanger les Bleds en des herbes qui ne portent point d’épis, Carmine lofa Ceres serileih vanescit in herbam : - Deficiunt Us Carmine sontis Aqm. Jlicibus glandes cantataque v'mbus U va DeciditjC’ nullopoma movente cadunt . II n’y a pas moyen de croire tout ce que ces Poëtes disent : II y a bien du faux là dedans. Si les Sorciers av#ient tout ce pouvoir-là, il n'y auroit pas de sûreté sur la terre. 19. Les .Naturalistes, aussi bien que Jes Poëtes,. en disent souvent trop lut les vertus des plantes. Ils disent qu’une plante de Roma- pin ou de Giroflée qui eíl à iá fenêi SÍ7R liA 'VÉGÉTATÏOïT. 2 q./ tre d’une Chambre , se fanne & pérît, quand le maître de la maison meurt, à moins que quelque domestique rie la change de place* Hannemann. pag. 8p. La plante que connoissoit l’Empereur Marc-Aurèle , par le sue de laquelle en touchant quelqu’un , il s’en faisoít aimer invinciblement, est une histoire qui pourroit bien être apocrife. Lau - remberg. Horticult. lìb- 2 . c. p. 8i ce Philosophe s’en servoit à l’égard de l’Impé- ratrice Faustine sa femme, il est certain que le suc étoit éventé & avoit perdu sa force, ou bien que le secret n’estpas bon, car enfin ce Prince si sage étoit peut-être Phomme du monde qu’elle aimoit le moins. i, ’Ecorce du milieu du Sureau, si on la détache de bas en haut, fait vomir fur le champ ; si on l’ôte de haut en bas, elle oblige de chercher promptement les commodités. Van-Helmont dit la même chose de 1 ’Asarum. Si le premier conte n’est pas plus vrai que le fécond, ils font tous deux faux; n’en déplaise à un homme d’ailleurs très-savant; c’est Chrijîianus Frommannus . 20 . Une plante des plus admirables, est celle qui amollit tellement les os, que lorsqu’on en a mangé , on ne sau- soit plus íe soutenir sur ses jambes. Un L iij £4 & fur le soir elle jette un éclat & des » rayons comme du feu. Elle ne fe » laisse pas arracher volontiers ; elle recule quand on la veut prendre. On ne » la peut arrêter qu’en jettant dessus de » l'urine de femme, ou du sang de ses ->mois. Un homme qui la toucheroit » fans avoir en fa main une partie de pa- » reilíe plante, il mourrait fur le champ. » Voici comme on la prend fans dan- » ger. On ôte presque toute la terre -» qui est autour de sa racine ; puis on » attache un chien à cette racine. Ce » chien voulant íuivre son maître , » marche & arrache la plante. II en » coure la vie à ce pauvre animal qui » meurt bien-tôt après. Cela fait, il n’y a point de risque à la prendre. Cette » plante appliquée sur un homme pof- --> fédé du démon , il en est aussi-tôt dé- » livré. Josephs liu. 7. de la Guerre des » Juifs s cap. 2p. Que dire là dessus ? Joseph est un Auteur respectable & d’un jugement ex- guis. Ces paroles de Sénèque fur une SUR'LA VÉGÉTATION. 249 matière moins sérieuse & moins importante , sont-elles de saison? Nonpojsum hoc loco dicere iliud Cœciliamm. O tristes ineptias ! ridiçulœsunt. Epist, nz. Au reste les Théologiens Catholiques estiment que les choses naturelles n’ònt aucun pouvoir fur les démons. Ainsi tout'ce que Piine , Porphire, Apulée, Dioscoride & une multitude d’Ecri vains d’Alleinagne publient des vertus de la Rue , de s Aristoloche, de la Pivoine, du Millepertuis , du Tournesol , du Bouillon noir, sont des superstitions dont les Chrétiens, qui ont la crainte du Seigneur , doivent soigneusement se donner de garde. Le pouvoir de chasser les démons est réservé à la sainte Eglise. D . Thomas ìn 4. d . 7. art. ult. II saut s’en tenir là , voilà nos bornes. Chapitre VIII. VArbre de Diane , Végétation métallique , artificielle. L A matière de la Végétation est inépuisable. Plus on avance plus on trouve de merveilles qui surprennent, & dont on nçsauroit rendre raison. Nous L v 2 jó Curiosités avons crû que les trois familles du Monde élémentaire étoient séparées par des bornes sacrées que la Nature ne vio- loit jamais. Cependant ces familles entreprennent quelquefois l’une fur l’autreî les Bois, & les parties d’Animaux qui se pétrifient, sortent de leurs familles, & entrent dans celle des fossiles. Et que dirons-nous de ce qu’a observé P. Bo- rellus; en plusieurs endroits de l’Euro- pe. ? II assure qu’il a vû par lui-même des cornes de Moutons & de Bœufs, qui, ayant été fichées en terre, ont pris racine & font devenues des plantes.Cormne etiam Vervecìna Sr Bubula vidi > qm radiées in terra egerunt ; ut Cornu pîantabile Linschotii. Cent. 4. Observât, y2. Cela ne fe comprend pas. II faut toute l’au- torité de Ëorelli pour croire une chose pareille. Aussi M. Rédi dit-il franchement que fa foi ne s’étend point jufqu’a donner créance à de semblables récits; & tourne en plaisanterie ce que l'on dit, que les Cornes prennent racine, & qu’elîés croissent auprès de Goa. II s’en prend aux femmes du pays, qu’ií accuse d’avoir des mœurs dépravées ; Sc fur cela il plaisante aux dépens des Portugais. Experiment. Nat . Fr. lieds, p., i6y. f - Les Métaux mêmes fe forment en Plante, comme si toute la Nature vou-, SUR U A VÉGÉTATION. 4yr loit se mêler de la végétation. Mathieu Paris dans son Histoire de France, parle d’une riche minière d’or qui se trouva en 1602, dans le Lyonnois, proche du village de S. Martin-la-Plaine, dans la vigne d’un paysan. II raconte comment l’on présenta à Henri le Grand un morceau d’or de cette minière, & qui s’étoit . formé comme une branche d’arbre. Tom. 2. lìv. v. 1. part. M. 209. L’art se mêle auffi de faire des végétations métalliques. Pour peu qu’on ait lû les Ouvrages des Chymistes, on ne sauroit ignorer ce que c’est que Y Arbre de Diane, ou l ’Arbre Philosophique. C’est sans doute une curieuse opération de la Chymie ; & il n’est pas nécessaire d’a- voir un goût sublime pour regarder comme une chose qui n’est pas indifférente , la végétation artificielle de Tangent , dans laquelle on volt un arbre se former & croître peu-à-peu, & s’élever du fond d’une fiole pleine. M. l’Abbé de Furetiere dit qu’on a vû à Paris végéter les métaux, Tor, l’ar- gent, le fer & le cuivre, préparés avec l’eau forte , dans laquelle on a vû s’éle- Ver une efpéce d’arbre qui croît à vue d’ oeil, & se divise en plusieurs branches dans toute la hauteur de l’eau , tant Hu’il y a de matière. On appelle cette LfL C UKIOS I TÍ S eau , Eau de Caillou dont le secret á été donné par Rhodès Canasses, .Chy- miste Grec, dont parle le Journal des Savants de 1677. Ce phénomène est trop agréable, pour qu’on n’aìt pas la curiosité-de savoir comment se sait cette charmante expérience. Cette opération, dit M. Lemery,, est . un mélange d’argent, de Mercure & d’esprit de Nitre, qui se sont crista- lisés ensemble en forme d’un petit arbre. Prenez un once d’argent, faites-le dissoudre dans deux ou trois onces d’esprit de Nitre ; mettez évaporer votre dissolution au feu de sable jusqu’à consomption d’environ la moitié de l’humi- dité. Versez ce qui restera dans un matras où vous aurez mis vingt onces d’eau commune bien claire : ajoutez-y deux onces de vif argent. Posez votre matras sur un petit rondeau de paille, & le laissez en repos quarante jours?; vous verrez pendant ce tems-là, qu’il se formera une maniéré d'arbre , avec des branches & de petites boules au bout qui représentent les fruits. Ensuite M* Lémery trouve dans cette opération, une belle analogie avec ce qui se passe dans la terre pour la génération, & l’a? L4rbre cLe Diane § u r la Végétation- 2 $$ croisement des plantes. Cours de Chymie. I. Part. chap. ij. pag. 120. II est vrai que Ja longueur de cette opération fait languir un curieux, & qu’il seroit agréable de savoir diligentes cette végétation artificielle. Enfin , on y a pourvu. M. Homberg à qui la grande capacité qu’il a dans la Chymie » à donné tant de distinction parmi les Savants , a trouvé une maniéré de faire ì’arbre de Diane en moins d’un quart d'heure. Voici comme on en parle dans les Mémoires de T Académie Pvoyale des Sciences. La végétation artifielle de l’argent, vulgairement appellée Arbre de Diane, ou Arbre Philosophique, est une des plus curieuses opérations de la Chymie ; mais elle est si longue & si ennuyeuse, qu’il y a peu de personnes qui ayent assez de patience pour la voir achever. M. Homberg, non-seulement enseigne ici la méthode de faire en très-peu de tems cette opération , fur les mêmes principes qu’on la fait ordinairement.... & il explique la formation de cet arbre Philosophique , autrement que n’ont sait ceux qui en ont écrit jus- qu’ici ; car la plupart ont dit qu’en cette opération l’art imite ce que la Nature sait, lorsqu’elle produit l’ar- . £2^4 Curiosités gent dans les mines ; & quelques-uns ont prétendu que cette végétation artificielle étoít semblable à la végétation des plantes : mais M. Homberg fait ici Voir qu’il y a une différence considérable entre ces végétations artificielles, & les naturelles; & que même les artificielles font fort différentes entre elles, parce qu’elles ne fe font pas toutes fur les mêmes principes , ni par la même mécanique. Voici donc la maniéré de faire l’arbre de Diane, plus promptement qu’on ne le fait d’ordinaire, quoi- qu’elle soit fondée fur les mêmes principes, & toute semblable; si ce n’est que la végétation est un peu plus ferme, que toutes celles qu’on a Dites jufqu’ici; &c qu’au lieu que l’operation ordinaire ne íe fait qu’en six semaines , celle-ci s’achève en moins d’un quart d’heure. Prenez quatre gros d’argent fin en limaille: íaites-en un amalgame à froid avec deux gros de Mercure : dissolvez cette amalgame en quatre onces d’eau forte : versez cette dissolution en trois demi-feptiers d’eau commune, battez-les un peu ensemble pour les mêler , & gardez-les dans une fiole bien bouchée. Quand vous voudrez vous en servir, prenez-en une once, ou environ, & mettez dans la même fiole la grosseur SUR LA VÉGÉTATION. d’un petit pois d’amalgame ordinaire d’or ou d’argent qui soit maniable comme du beure, & laissez la fiole en repos deux ou trois minutes de tems : auffi-tôt après vous verrez sortir de petits filaments perpendiculaires de la petite boule d’amalgame , qui /augmenteront à vue d’œil, jetteront des branches à côté, & se formeront en arbrisseaux , tels qu’est celui qui est représenté dans la figure. La petite boule d’amalgame se durcira , deviendra d’un blanc terne. Mais le petit arbrisseau aura une véritable couleur d’argent luisant. Toute cette végétation s’achevera dans un quart d’heure. Mémoires de ÍAcad . xxx- Novembr . 1692. pag • iq-5- Voyez la figure. Cette voie est plus prompt , mais la précédente a un grand avantage fur celle-ci. L’arbre ordinaire de Diane s’éleve dans la fiole, jusqu’à quatre pouces de hauteur, ce qui n’arrive pas dans celle de M. Homberg, comme il le déclare lui même. II explique à merveilles la formation de cet arbre artificiel. Il dit qu’il n’est pas formé par l’amalga- tue qu’on met au fond de l’eau ; mais par le Mercure , & par l’argent dissous, 8 c Gageant dans la liqueur. Comme ce-dissolvant est extrêmement aftoibli par la hf 6 Curiosités grande quantité d’eau, dont on l’a chas-' gé j il n’est pas capable de retenir ce qu’il a dissous, íorfqu’il se présente quelque occasion de le précipiter ou de le séparer. Alors le Mercure dissous Venant à rencontrer au fond de cette eau, un amalgame de Mercure non-dissous, il s’y attache, dè la même maniéré que le Mercure. L’argent dissous est aussi emporté du même côté, étant accompagné d’aiguiiles nitreuíes de l'eau-forte. Tous ces petits corps Rattachent les uns aux autres de tout sens, & forment les branchages , qui paraissent dans la fiole. On peut voir par-là que dans cette opération , il n’y a point de véritable végétation; mais que ce n’est qu’une cris- talisation simple, pag. xqó Gr 147. Ceux , à qui la belle Physique est de quelque goût, trouveront là de quoi se satisfaire, & s’occuper agréablement. L’explication de M. Homberg 'fait autant de plaisir, que son expérience fur l’arbre de Diane. L’esprit n’a point de peine à se rendre à une Physique qui a non-seulement toute la vrai-semblance possible ; mais même tout l’air de la vérité. Le P. Kirker avoit à Rome dans son cabinet un pareil arbre métallique, dont fl y a une belle, & vive description dans SUR £A VÉGÉTATION. lgf „ son Musœum Colleg. Rom. S. J. pag. -j-6. Chapitre ÍX. La Plante Anatifére, Végétation Marine. A Près avoir parlé du Boramct^ J ce Zoopìûte ; ou Plante-animal fameux , dont tant d’Auteurs ont écrit, les Bernickes d’Ecosse fe plaindraient de nous, si nous n’en disions rien. Ces Berniches font des Oiseaux, que nous appelions Macrmjes -> qui ressemblent à des Canards, & qui passent pour poiír son ; à cause qu’elles ont le sang froid. Les Savants ont fait quelques recherches, pour découvrir l’origine de ces Oiseaux. Ce que l’on en sait de certain, c’est qu’ils font fort communs en Ecosie, & même dans le Nord jusques dans le Groënland. Ceux qui en ont parlé les premiers, ont dit que les Macreuses s’engendroient du bois pourri des vieux vaisseaux. D’autres ont crû qu’elles venoient de feuilles d’arbres qui tomboient dans la mer, & que l’eau de la mer changeoit en oiseaux. Cette opinion, qui a eu 2j8 Curiosités beaucoup de partisans, est aujourd’hui abandonnée absolument. Elle est st sort contre toutes les lumières de la bonne Physique, qu’on ne peut pas s’imagi- ner,comment des gens sensés ont donné là-dedans. II y a à la fin du 6. Livre de la Thaumatographia de Jonston, un discours de Michaël Majerus ^ où l’on trouve de bonnes choses fur cet oiseau végétal. Ce qu’il y a d’historique, vaut mieux que ce qu’il contient de Physique. Son opinion est, que ces oiseaux naissent effectivement de bois pourri. Sur cela, il étale son Péripatétisme avec beaucoup de gloire. Je trouve, dit-il, la Cause efficiente de la génération de cet oiseau dans le Soleil, qui concourt à toutes les générations par fa chaleur vivifiante Cela est excellent. La Cause matérielle j c’estlebois pourri. C’est la question. La Cause finale ^ c’est la gloire de Dieu, & Fomentent du monde. Cela est tout Chrétien. Pour la Cause formelle il s’y perd : il la cherche par-tout. II se fatigue, véritablement, à faire compassion ; mais enfin il lui faut un e formesub‘ fiantielle: fans elle, il n’y a rien de fait. Après avoir parcouru toute la terre, il fort du monde élémentaire, & s’éleve dans la Région des étoiles, où par le plus grand bonheur du monde U rene Sur ïa VíGÉTATroy. 259 Contre une forme astrale ^ qu’il marie avec le bois pourri : & d’un si beau mariage , il en fait naître des Macreuses fans nombre. Et M. Childrai, dans ses merveilles d’Angleterre , dit en effet ; qu’il y a une si prodigieuse quantité de ces oiseaux en Ecosse, qu’ils obscurcissent le Soleil en volant. ■ Ce même Auteur ajoute que les Macreuses viennent d’un oeuf couvé comme les autres oiseaux. Cela ne vaut guere mieux que la forme astrale de Majerus. Je crains bien que M. Childrai ne soit pas au fait. II n’a pas réfléchi que les animaux, qui ont le sang froid, comme les poissons & les Macreuses, ne couvent point leurs oeufs. Pourquoi les couveroient - ils ? Ils perdroient bien leur tems. Seroit-ce pour échauffer leurs oeufs ? Mais comment les échauffe- roient-ils ? Car enfin les poissons & les Macreuses font des animaux froids comme marbre. J’avoue que je ne comprens pas pourquoi les Macreuses couveroient leurs oeufs. Je crois que M. Childrai s’est trompé, & qu’il a pris des Cannes Sauvages pour des Macreuses. J’efpere ne rien hazarder en aflurant que les Macreuses jettent leurs œufs comme font les poissons ; & que com- h 6 o Curïosítès me eux , elles les laissent aller à l’avan- ture, au gré de Peau, & que le Soleil les fait éclore. J’ajoute que quand ces œufs dotent dans Peau , ils s’attachent à ce qu’ils rencontrent, & sur-tout au bois pourri, parce qu’il est couvert d'u- ne matière visqueuse qui les retient, & qu’ils s’arrêtent pareillement à l’Algue , & aux plantes marines, fur lesquelles on remarque aussi une substance assez glutineuse. Je crois encore que ces œufs n’ont point de coque , & qu’ils* n’ont qu’une enveloppe pareille à la pellicule qui renferme les œufs des poissons. J’efc pere que ce que je viens de dire fur l’o- rigine des Macreuses, me servira beaucoup pour expliquer le merveilleux de ma Plante Anatfére. Voyez la figure. Ce que j’appelle une Plante Anatifére est nommé par quelques-uns Concha Anatifera , un Coquillage Anatifere- C’est ainsi que Calceolarius pag.25. & WormiuSj pag. 2j6. la nomment. Celle que Calceolarius décrit, & dont il donne la figure, est une tige façonnée en plante qui a un pied de haut, avec plusieurs branches, & qu’il n’est pas possible de nommer Coquillage. Wormius en représente une toute différente ; mais qui n’a point non plus Papparence d’un Co- I quillage. II fort du centre, comme de Patj.zóo La. Plante JÍnattset «K k 1 sur r,A Végétation. 261 U racine d’une plante de Violette , ou d’ Asarum , dix ou douze .maniérés de feuilles. Celle que. j’ai etì fort jcurieufe; fille m’a été envoyée, de Normandie: on la trouva à la prouë d’un vaisseau, qui revenoit d'un voyage de long cours, oz figure est belle ; c’est un assemblage de huit coquilles qui ressemblent assez ■a un bouquet de Tulipes. Ge qui fait que, je l.’appelle quelquefois Banquet de mer. En effet, ç’est effectivement une Végétation marine qui ne mérite pas moins que les Coralloidès, d’avoir place parmi les plantes. La partie qui étoit attachée a u navire, est à peu près de la figure d’une Tulipe, & mince comme One coquille de Moule. Vers le haut, il s’y en est formé sept autres toutes exactement de la même figure. La matière est toute la même que celle dont font formées les coquilles des Moules , excepté que nos coquilles font luisantes-, rougeâtres & blanches, en quelques endroits. L’entrée est au haut; & elle fe ferme par de petites portes, qui fe joignent d’une maniéré qu’on ne fçau- r oit trop admirçr. II ne s’agit plus que fie lavoir comment fe forme cette plante marine, & les petits hôtes qui logent dans ces appartemens si artiste- ffent faits. On m’a .pareillement en- •2f>4 Curiosités Anatifére, où se forment les Macreuses , croît à mesure que le germe s’e- tend , 8c que les parties de l’oiseau s e développent. 6. Jusqu’ici il n’y a pas de difficulté. Ces observations ont leur évidence ; mais ce qui nous reste , est plus embarrassant , car enfin il faut montrer comment les Macreuses & les plantes Ana- tiféres font faites les unes pour les autres. Voici mes conjeélures que j s fortifierai puissamment par les réflexions que j’ai trouvées dans les Auteurs qui ont parlé de l’origine de ces oiseaux. Je crois que ce que M. Childrai dit des œufs que les Macreuses couvent, est une chimere. II a confondu comme je le viens de dire, les Cannes sauvages avec les Macreuses. La différence en est auífi grande que celle qu’il y a entre la chair & le poisson, entre les animaux qui ont le sang chaud, 8c les animaux qui ont le sang froid. Ma pensée est que les Macreuses qui ne font autre chose qu'un poisson sous la figure d’un oiseau, font leurs œufs ou leurs germes comme les poissons font les leurs; & qu’ainsi leurs œufs ou germes errent au gré des eaux de la mer , jusqu a ce qu’ils s attachent à des plan- SUR LA VÉGÉTÂT ION*. 2§5 tes, à des herbes, à du bois, à des pierres, où la chaleur du Soleil les fait ensuite éclore. Ces germes font d’ume substance glaireuse, telle que nous en Voyons dans les œufs des Grenouilles. Ainsi, ils s’arrêtent aisément à, ce qu’ils rencontrent ; soit l’Algue, soit les au-ï tres herbes marines,ou ces petites mousses qu’on trouvent attachées aux pierres, aux rochers & au bois qui flote depuis long-teiïis dans la mer. De ce germe qui contient les premiers rudimens de l’oiseau, se forme le coquillage, & ce petit poisson à qui la Nature donnera des plumes & des ailes pour s’élever quelquefois de la mer dans la Région de l’air. Lorfqu’il tt’aura plus fa coquille, pour se garder de ses ennemis, la Nature Iqi fournira des ailes pour s’enfuir, & pour les éviter. Par tout une Providence infiniment sage & adorable ! Mais il faut appuyer maintenant mes Conjectures, & faire voir que mon sistè- me n’est pas une imagination vaine ÔC creuse. J’applique à l’origine de nos Macreuses , ce que le P. du Tertre a dit de la formation de ces petites Huîtres dont st a vû des branches d’arbres toutes chargées. Sans doute j dit il, que laser L Partie. M 'r§6 Cu biositís mences des Huîtres, qui ejî répandue dans la mer lorsqu’elles frayent, s 1 attache à ces branches ^ de forte qu! elles s y forment £r y grossissent par succession de tems. La formation des Macreuses est toute la même ; ainsi nous dirons fur leur compte, ce que le P. du Tertre a dit des Huîtres. Sans doute que la semence des Macreuses qui est répandue dans la mer, lors- qu’elles frayent, s’attache à ces branches , à ces herbes, à ces plantes , à Ce bois pourri , à ces rochers ; de forte que les Macreuses s’y forment, & y grossissent par succession de tems. Voilà tout ce qui se peut dire de plus raisonnable fur une matière qui a été peu connue, & peut-être négligée, quelque curieuse qu’elle soit. Les Historiens du Nord par leur peu d’exacti- tude & de connoissance dans la Physique , ont induit le monde en erreur, en publiant les premiers ; que ces oiseaux s’engendroient de la pourriture du bois des vaisseaux. I. Nous soutenons donc contre M. Childrai, que ces oiseaux ne viennent point d’œufs couvés , & qu’ils se forment & croissent dans les coquilles. qui font comme les fleurs de notre Plante Anatifére, ou de notre bouquet ds knex. / I sur là Végétation. 267 Chioccus dans le Muf&um Calceolarii „ j taconte que dans une conversation sa- I Vante qu’il eût avec D. Pancratius Ma\- ! ^anghius Barghœas qui voyageoit, le j discours tomba furie sujet de la Coquille j Anatifére, & que ce Curieux lui con- j ta qu’il avoit vu dans le Cabinet du I)uc de Toscane, une branche qui por- j toit plusieurs coquilles presque rondes, | blanchâtres , luisantes . & minces comme des écailles de Moules , & d’où naissent des Oiseaux : Ex quibus Cmchis in mare lapfìs aves prcmarratas excíudi re- ferebat. Sect. I. pag. 26. - Vvormius dit : La coquille Anati- a fére est triangulaire , au dehors un °r peu blanche, luisante, légere, de la* longueur d’un pouce , & un peu moins « large. Elle'se ferme par quatre portes, « dont deux font de moitié plus grandes « que les autres. Lorsqu’elles font ouver- <* tes , on apperçoit dans la coquille le« petit Oiseau encore tout brute, mais « assez aisé à reconnoxtre par se s deux « ailes, fa tête, son bec. Cette Coquille * est toute semblable à celle que Lo- « 1 belius arracha de la quille d’un vieux « Vaisseau qui étoit dans la Tamise de-'« Vant Londre. Les Anglois & les Bre- « tons appellent ces oiseaux Barnaches j « le* Ecossois les nomment Clahis. II y « 268 Curiosités » en a quantité en Ecosse ou l’on les 3 o prend durant l’Hyver. Les François » les appellent Marguerolies & Macreu- -» ses. En tems de Carême , on en porte » beaucoup de Normandie à Paris, où » l'on les vend pour du poiflon. J’ai » même oui dire à un François, digne 3 o de foi, que dans une assemblée des o» Théologiens de So.rbonne, il a été dé- 3 ° cidé , qu’on tireroit les Macreuses de » la classe des oiseaux, pour les mettre 30 dans celle des poissons. Mustum Vvorr » mium. Liv. iij. cap. 7. pag. 2 j 6 . Scaliger parle d’abord comme un homme gâté par l’erreur populaire, mais ce qu’il a dit ensuite comme témoin oc- culaire, revient fort à mon système. » Ce n’est pas, dit- il, fans étonnement -> que nous apprenons qu’un oiseau, qui » ne nous est pas connu, & fait comme s»un Canard, se forme dans la mer Bri- 30 tanique, tenant par le bec au bois pour- 30 ri des vieux vaisseaux, d’où il ne se dé- 30 tache que quand il est formé de tout 3 o point, pour aller à la chasse des pois' » sons dont il se nourrit. Les Gascons 30 appellent ces oiseaux Crabans , & 3» les Bretons les nomment Bernaches• s» Nom qui est passé en proverbe , cas 3° enfin quand on veut un peu picoter un 3 » homme pesant, paresseux, &c qui les çois reporte > où J’ai igné des : dé- :s de ettre 'Vor- ; un mais 1 oc- :ème. ment i, qui imme •Bri- p ourse dé- : tout pois' fcons , & aches» , caf ter un : qui SUR LA VÉGÉTATION. 2§§ n’est propre à rien, on lui dit qu’il est * unBernache, qu’il n’est ni chair, ni* poisson. II saut finir cette matière par * un Histoire singulière. J’ai vu la * merveille que je vais raconter. On ap- * porta à François I. ce très-bon, & * très - grand Roi, un Coquillage qui « n’étoit pas grand, où il y avoir un pe- * tit oiseau tout formé. II tenoit à la co- quille par les extrémités des ailes, du bec & des pieds. Les hommes doctes, « dont ce Monarque étoit un pere ten- « dre, & un bienfaicteur libéral > étoient « d’avis, que le poisson qui étoit dans « cette coquille, avoir été changé en,« oiseau. Mutation in aviculam Oftreum ipsum exijlimarunt . Exercit. liv. x. pag. 2iy. Tous ces Savans raisonnoient comme gens peu instruits de la vérité du fait. Ces oiseaux tiennent par le bec à leur coquille, & non pas au bois pourri, comme l’a crû Scaliger. On a pû en voir qui avoient déja tout le corps hors du nid , pour ainsi parler, & qui y étoient encore attachés par le bec : ce qui a donné lieu à l’erreur populaire , que les Macreuses font engendrées de bois pou- ri ; & qu’on les trouve attachées par le bec aux vieux navires. Cependant ce que Scaliger rapporte, suffit pour nous a.'jú CusiosiHí mener à la vérité, & pour éviter les méprises , où les Anciens font tombés» Ayant dont mis à part les fables & les erreurs des Physiologistes, je dis que les Savans du tems de François I. er- roient grossièrement, en s’imaginant que dans cette coquille, il y avoir d’a- bord un poisson fait comme une Moules ou une Huître qui dans la fuite da tems prenant des pieds, des ailes, des plumes, une tête & un bec, se méta- morphosoit en oiseau. Ces métamorphoses ne font de mise que dans le pays des fables & des chimères. Majerus réfuté cette erreur invinciblement, en re- jettant celle des Historiens du Nord, qui ont crû que les Macreuses venoient de feuilles ou de fruits qui tomboient dans la mer. II montre que les.trois familles du monde élémentaire font séparées par des bornes inviolables , que » la Nature n’outrepasse jamais. Com- » ment, dit-il, ce qui est un pur végé- » tal, peut-il devenir organisé, pour íe u former en animal volatile comme un » Canard. 1 Est-ce qu’on ne connoît pas » l’arbre par son fruit bon" ou mauvais , » & qui convient à son espèce ! Et paon reilîement n’est ce pas au fruit à nous ® faire connoître fa famille, & de qui » il descend 1 Certainement les arbres sur la VégétaI’ioH’. 27# fie portent point de poissons ; la mer <* n’engendre point des arbres, les lié-* Vres sont dans les bois ; les jeux, les « ris & les grâces dans tous les discours « polis. Le régné des Végétaux n’a « point de commerce avec le régné des animaux. Ce sont deux familles toutes « différentes. Les sujets de l’une n'en- « jambent jamais dans l’autre : chacun * demeure dans fa Tribu ; d’où il ne lui * est pas permis de sortir. Fegetabile * igitur gerius non mifcetur ..... Quolibet manet in sua Tribu j quam non egreditur. Joston Thaumotograph. Class. iv. ap- pend. pag. 274. II. II ne me reste qu’à justifies ce que je me suis imaginé du commencement , du progrès & de la formation parfaite de ces oiseaux , par le témoignage de ceux qui en ont eù quelque connoifl'ance. Majerus est véritablement celui qui'a mieux suivi cette génération , & qui a plus démêlé de choses fur ce sujet. A prendre, dit-il-, la chose dès son « origine,, on remarque en Ecosse & en® Irlande-, & du côté du Nord, sur oc sout dans les endroits de la mer où il « y a beaucoup d’Algue & d’herbes * Marines, que les extrémités de ces « plantes sont chargées d’une infinité* M iiij ' írfz . Curiosités » de ces petites coquilles ; ce qui mon" » tre que cette génération ne vient point » du bois pourri. C’est une opinion que 30 je ne puis pas adopter. L expérience 33 réclamé contre. II ne faut pas non 30 plus se figurer que ces oiseaux tirent 3o leur origine de quelques arbres. Sur 33 quoi fonder une telle imagination ? 33 Les arbres n’engendrent point d’oi- seaux, mais des fruits selon leur es- a> pèce. Ces Coquilles ne font pas d’a- » bord plus grosses que l'extrémité du á> petit doigt. On en trouve auífi beau- 33 coup contre les rochers ; mais une 33 grande partie est attachée aux filets 3o des herbes que l’on voit autour de « ces bouts de mâts, & de ces autres » bois qui pourrissent dans la mer. Si » on ouvre ces petites Coquilles , on y 30 trouve de petits ambrions d’oiseaux, 3° tels qu’on les remarque dans les œufs •30 couvés. On y observe facilement le » bec, les yeux, les pieds, les aîl es, les 3o plumes naissantes, & tous les autres 33 linéaments d'un ambrion d’oiseau. A 3o mesure que ce petit hôte grandit, h 33 Coquille ou sa petite loge s’étend de 33 même. Ce qu’il y a de commun avec 3o les Limaçons, les Tortues, tous les oo poissons testacés ; les poissons à Co- » quilles, & tous les animaux qui por- non" I joint j 1 que ; ìence non irent Sus ion ? (Toi- r es- i d’a- :é du >eau- une filets r de 1 utres 1 r, Si ! on y :aux, œufs nt le s, les .utres j. A t, Is id de avec is les Co- p or: sur tA Végétation. 2y)' tent leur maison avec eux. Prout fœtus « crefcit j itá&couchafeu tegumenta eorum* quemadmodum in aliis omnibus O frets C onchis j Cochleis Tejìudimbus & his Ji- milibus domiportis contingit. C’est l’eau de la mer, toujours si* féconde, & la chaleur du Soleil , * qui leur fournissent la chaleur & l’ali- ment. Si quelqu’un considère la* diversité & l’immence abondance des* poissons & des animaux qui naissent* dans la mer, on conviendra fans dou- * te, que l’eau est d’une merveilleuse « fécondité. Elle produit les plus grands * des animaux , comme font les Ba- « leines. Pline dit qu’on en prend de six « cens pieds de long, & de trois cens* pieds de large. II y a dans la mer cent » íbixante-feize fortes de poissons, fans « parler de diverses espèces, qui lont « dans les rivières. Qu’il nous soit per- « mis de jetter un moment les yeux fur * cette ravissante variété de Coquilla- * ges qui font les délices des grands « hommes. J’en vis en 1611. à Roter-* dam chez l’illustre Petrus Carpenterius, « peut-être mille espèces différentes, &* toutes étoient autant d’objets charmans * pour la vue , & de sublimes sujets* de contemplation pour l’efprit. Cet* homme excellent en avoir rempli une « M v &7 4 Curiosités » grande chambre ; c’étoit le plus rich* » & le plus curieux trésor de la Nature »que j’aye jamais vû. Autant de Ccr » quillages, autant de merveilles & d e *> prodiges, quoique ce ne soit pour l a i» Nature que de petits jeux; mais dan* « ces gentillesses mêmes elle fait reluire » la grandeur & la fécondité du génie » suprême qui l’anime &. la conduit. Has » ejj'e luxuriantis Natures injîgnia , qui- » bus ingeniifui ubertatem attejlari velit * -> non eft dubium. *> La chaleur du Soleil fait fur ces x germes de Macreuses , l’office de la x Poule, quand elle couve íes œufs. Sa x chaleur est la cause efficiente des gé- x itérations, en assemblant les choses x Homogènes , & en séparant les Hé- x térogènes. Les principes de fécondité x fans la chaleur, demeurent enveloppés x dans la matière. Nous voyons à l’arri- x vée de l’Hyver une infinité d’infectes x qui périssent ; & leur postérité est ca- x chée dans leurs germes qui restent, xsans quoi la race en seroit éteinte, x Ces familles sont durant l'Hyver tou- x tes comme endormies. On croirait x que tout cela est mort ; mais le retour x du Printems par l’approche du Soleil x vivifie la Nature qui est depuis plu- -» sieurs mois dans l’engourdissement rich^ atur® Co- & de >ur L a dan* -luire génie . H as , qui - JÛlt j r ces de la s. Sa s gé- hofes Hé- ndité ippés ’arri- écteS lì casent , ;inte. tou- ûroìt :tour oleil plument SUR LA VÉGÉTATION. 275 & dans l’inaction. Les rayons du So- « Jeil, en échauffant la terre & les eaux, « ouvrent les sépulchres où giflent une « infinité d’animaux cachés dans les « ombres de la mort, ou pour pariera fans figure, la chaleur du Soleil ouvre « les germes où font enchaînés par le « froid tant de petits êtres vivans qui ne « font qu’attendre le tems de leur déli- « Vrance. Le Soleil n’aura pas si-tôt « touché au point Equinoxial du Prin- « tems, que vous verrez reparoître fur œ la scène du monde élémentaire, ces « mouches, ces moucherons, ces papil-« Ions, cès grenouilles, dont vous® croyez les familles éteintes. Les Oeufs « de Poissons s’ouvrent pareillement tions propres & naturelles ; & par les signes de vie qu’il donne, il fait con- »noître le trésor qui étoit enfermé dans » ce Mixte. C’est ainsi que les Curieux » imitent la chaleur naturelle de la Pou- » le, en faiíant éclore des œufs par la : ® chaleur artificielle des fourneaux ; & '» qu’ils forcent un germe enveloppé dans » un cahos de matière confuse , à se dé- » mêler, à se débarrasser, à rompre ses » liens ; dans lesquels il demeureroit éter- » nettement, si une chaleur étrangé- » re n’allumoit ce feu caché, & ne solli- » citoit ce captif, qu’on ne sauroit pro- -> prement appeller ni vis, ni mort, de -» sortir de ion obscure prison. Telle est » la peinture de ce poussin que vous « voyez naissant ; & telle est la desti- » née de toutes les plantes qui doivent » naître de graines dans lePrintems. Les » graines font les œufs des plantes, ren- » ferment un germe précieux, un ató- » me de vie, une étincelle de feu célé- - ste ; mais tout cela périroit avec elles, » si du dehors il ne venoit une chaleur » favorable, pour ouvrir les enveloppes, 30 & pour en faire éclore les plantes dont =» elles font enceintes, patet ên sttr la Végétation. 277- Qvorum exclujìone * tam per artificìalem calorem furnorum quàm natur&lem gai - linarum. Par un pareil mécanisme les ger- <- mes de nos oiseaux se développent dans» les coquilles de notre Bouquet de « mer, ou de notre plante Anatifére ; œ & donnent de nouveaux enfans à la « famille des Oiseaux aquatiques. Ce « n’est point la Macreuse qui couve ces --- f ermes. Le Soleil fait i’office de la « ouïe, à 1 égard des œufs des plan- tes & des animaux qui ont le sang <- froid. C'est lui qui allume l’étincelleœ de vie que ces œufs renferment; &« fans fa chaleur vivifiante, il n’en naî- « •troit jamais aucun être vivant. Sol mag- » num mundi lumen * calorìs pater efi » eumqùe mittit in terrena. omnia quœ vi- » -yificat illujîrat. , C’est assez suivre Majerus. Je ne me •suis pas assujetti si fort à íe traduire, qu il n’y ait un peu de commentaire dans ma Traduction ; mais j’estîmeque jen’airien gâté. Je le quitte ici, parce qu'il n’est plus dans la bonne Physique : au reste je crois avoir suffisamment expliqué ma curieuse planteAnatifére,& l’origine des Macreuses , que je puis assurer n'avoir pas été jufqu’à présent bien démêlée. J’efpere que l'on sera content de mes recherches. L78 Curiosités f Chapitre X. 'Le Phénix Végétal : ou les Merveilles àe la Palingènéfie , ou bien la Résurrection des Plantes par leurs Cendres. V Entablement c’est avec plaisir que j’entreprends de traiter cette matière. Elle est si belle & si curieuse , qu’il faudroit être d’une indolence infinie , pour ne se point intéresser dans une Physique toute merveilleuse. La Nature, & sart ne sauroient aller plus loin: Et nous verrons bientôt des expériences, qui épuisent toute la force de la Nature , & toute la subtilité de l’Art ; & tous deux de concert ne sauroient rien présenter à l’œil mortel de plus digne d’admiration. II s’agit ici de la Palingénésie : c’est- à-dire , qu’il est question de ressusciter une plante sèche, morte, brûlée & réduite en cendres. Faire revivre les morts, rien n’est plus grand ; cependant les Philosophes Chymistes prétendent que par leur art, on peut faire revenir un corps qu’on a détruit par le feu, lUR t A VéGÈT ATtO W.' 27$ & lui faire reprendre fa premiere forme. M. Obus Borrik dit que du vif argent qu il avoit tourmenté durant un an a nier par plusieurs feux, jufqu’à le réduire en eau, Turbith , cendre, reprit fa premiere forme par l’attraéìion du sel de Tartre. « 11 assure encore que le Plomb étant réverbéré en Minium ^ fondu en verre , réduit en céruse , brûlé en lytar- ge, reprend pareillement fa premiere forme en un moment quand on lui applique avec adresse un sel Iéxìvial. Nous avons vû, en parlant des sels,- I. part. ch. 6. p. 200 . que M. Boyle a reconnu que le Nitre se restitue & se revivifie de maniéré, qu’après savoir fait passer par une longue suite d’opérations, il s’est à la fin retrouvé en son entier,’ poids pour poids. II faut avouer qu’il y : a dans les sels un je ne fiai quoi, qu’on ne connoît point encore. On en a de grandes idées ; mais elles ne répondent point encore à l’excellence de la chose. On a bien dit que les sels dans les Mixtes lioient les principes & donnoient un état de consistence aux corps élémentaires ; & que fans les sels, les minéraux les plus durs se décomposer oient & s’en iroient en pouffiere. Tout bien pensé que cela paraît, ce n’est pas asse* s8o Curiosités dire. Risquerois-je quelque chose à avan* eer qu’il me semble que l’effence & la forme substancielle de chaque corps élémentaire est dans son sel ; & que la différence des sels fait la différence spécifique de chaque Mixte ? Ce qui me persuade que la chose est ainsi ; c’est que quand un corps est détruit, décomposé, réduit en cendres, on retrouve dans les sels qu’on extrait dé ses cendres, l’idée, l’image, les rudimens & îe fantôme de ce mëme corps. Tous les traits, tous les linéamens, tout cela se retrouve dans ces sels. Si on y pouvoir rejoindre les autres principes, ce ne se- roit plus l’idée de la chose, ce seroit la chose même restituée en son entier. Ce seroit une résurrection bien circonstan- ciée. C’est à quoi la Nature , ni l’Art, ni tous les deux ensemble ne peuvent jamais atteindre. Mais du moins fans avoir recours aux noirceurs de l’Art de la Pythonisse d’Endor, si nous ne faisons pas paroître Samuel; du moins par une magie très- innocente, nous ferons revenir le fantôme des plantes pourries, & réduites en poussière. Peut-être irons-nous encore plus loin , & qui nous empêcheroit de faire s.;r les animaux, ce que l’on a dé- qa fait avec un succès si revissant, íur les avan* :e & :orps ue la : fpé- li me c’est :om- ouve cen- is Sc s les la se ivoir e se- >it la Ce lan- irt j :ja- aux lisse >îrre ■ès- itô— en ore de ié~ les ) I S V R L A V È G é T A TI O N. 281 plantes ? Quoi ! Faire apparaître le fantôme du. chien qu’Uìisse pleura si amèrement, du petit chat, fur la mort du- quel Tertio. 1 fille de Paul-Emile, se dé- loloit, cela se pourroit-il ? Ne promettons encore rien. Avançons seulement. Ce n’est pas une des moindres curiosités de f Art, de faire paroître les images de plantes dans une fiole, où l'on en conserve les cendres. C’est trop peu dire : c’est tout à la fois la plus sérieuse & la plus piquante curiosité j qu’il y ait dans la Nature. Ressusciter une plante du milieu de íes cendres, toutes 'les fois qu’on le voudra ; & lui. donner une maniéré de perpétuité; y a- t’il rien qui soit comparable à un pareil, -phénomène ? Une Rose qui étoit si tendre & si délicate, Sc dont la frêle beauté a duré si peu, deviendra immortelle par cet art. C’est un secret digne de l’attention des hommes les plus im- portans. Article Premier.. La Palingénéjìe des Plantes ... Quelques prétendus esprits forts soutiennent roujours que la chose ne se peut pas faire ; mais après les expéries- i I 282 Curiosités’ ces de tant d’habiles Chymistes, il n’y a pas, ce me semble, lieu de faire aujourd’hui l’incrédule là-dessus, à moins que de s’ériger en Misantrope, & de douter de lá probité de tout le genre humain. . I. M. Coxas a fait en Angleterre des estais très-curieux fur ce sujet. Ayant tiré beaucoup de sel de sougere, il en fit dissoudre une partie après savoir cristallisé , le reste de la lessive devint rouge comme du sang pur. Cette couleur marquoit qu’il y restoit beaucoup de parties sulfureuses. II filtra cette solution , où il mit les Cristaux qu’il avoir tirés, & versa le tout dans.un grand vaisseau ou bouteille de verre , après que la liqueur eût resté cinq ou six semaines , une grande partie du sel tomba au fond , & devint assez brun, au lieu que celui d’enhaut étoit aise2 blanc. Et ce fut alors que fur la surface de ce sel, on vit s’élever de petites fougères en grand nombre. Quand la sougere fut brûlée, elle étoit entre sèche & verte. Ainsi le sel étoit comme tartareux & essmtieL Etant desséché par un grand feu, il diminua beaucoup de poids, & devint plus blanc: c’est qu’il y avoir auparavant de l’huiíe & de l’acide. dri A, sel si- tr< tri P c m di q Ci r c g n f r t 1 1 1 ■ j r il n ’i re a u- moins & de genre ‘e des lyant en fit cris- ouge j uleur p de soiu- voit rand près íè- om- ? ce ;res oit oir es- !U- c : iie SUS LA VÉGÉTATlOíf. 2g| Ayant mêlé parties égales de ces cendres qui viennent du Nord, & que les Anglois appellent Pot’ aches avec du sel armoniac, un sel volatile s’éleva aussi-tôt , & quelque tems après il vit paroî- tre une forêt de Pins, de Sapins & d’au- tres sortes d’arbres qu’il ne connoissoit point. Nous n’avons dans le monde rien qui nous soit une image plus fidelle de la résurrection des morts, & je ne crois pas que la Nature & l’Art, puissent jamais offrir à nos yeux un spectacle plus divin. Tous les Savans n’ont ià-dessus qu’un même langage ; & chacun est h cet égard dans Tâtonnement & dans l’admiration. Voici comme un des plus curieux Physiciens d’Angleterre a r en gardé cet objet. II. M. Digby a été un des grands admirateurs des miracles de la Palingéné- ste. Nous pouvons, dit-il, ressuscitera une plante morte, la rendre immor-a telle ; & en la faisant revivre du mi- « lieu de ses cendres, lui donner une es- dans le fond, mais auffi-tôt qu’il l’ex- » p oioit fur une douce & médiocre » chaleur, à cet instant même, il appa- -> roissoit peu-à-peu l’image d’une plante » qui sortoit de son tombeau ou de sa » cendre: & dans chaque vaisseau, les » plantes & les fleurs se voyoient res- » suscitées en leur entier y selon la na- »ture de la cendre, dans laquelle leur - image étoit invisiblement ensevelie. » Chaque plante, ou fleur croissoit de » toutes parts en une juste & convena- -°>ble grandeur, & dimension; fur la- » quelle étoient dépeintes ombrátique- » ment leurs propres couleurs, figures, ^grandeurs, & autres accidens pareils. Mais avec telle exaélitude, & naïve- » té , que le sens auroit pu ici tromper » la raison pour croire que c'étoient des » plantes, & des fleurs substantielles, & » véritables. Or dès qu’il venoit à reti— -> rer le vaisseau de la chaleur, & qu’il » l’exposoit à l’air, il arrivoit que la marier froi tes àd leui pâi qu’ roi rec qu: sea me à 1 rai rie la ma tra tes sir let pa se re te di dt re ui V< fquefc alante étoit >e, & qu’en i n’y sinon oyoit l’ex- iocre ppa- lante de íà , les résinais^ elle. c de ;na- la- (ue- •es, fils. Ve- per des & ti- j’il | ra- SUR LA VÉGÉTATION. 2Zy ders, 8 c le vaisseau venant à sis ré- « froidir, l'on voyolt sensiblement que « rez plantes ou sieurs commençoient «c a diminuer peu-à-peuj tellement que « leur teint éclatant & vif, venant à « pâlir, leur figure alors n’étoit plus « qu’un ombre de la mort, qui disipa- «r toissoit soudain , & s’ensevclisioit de- «• rechef sous sies cendres. Tout cela,« quand il vouloit approcher les vais- « seaux du feu, sie réïteroit avec les mê- « mes circonstances. Athanafe Kirker «c à Rome m’a souvent assuré pour cer- « tain qu’il avoit fait cette même expé- « rience, & me communiqua le secret de« la faires quoique cependant jen’ayeja-® mais pû y parvenir, après beaucoup de « travail. Digby de la Végétation des plan- * tes. Part. ij. pag. 64. Ce savant Anglois qui n’a pû réussir dans la résurreétion des plantes par « leurs cendres, doit bien s’en consoler par le plaisir qu’il a eu de voir de quoi sont capables les sels, & comment ils renferment la forme substantielle du mixte décomposé. « J’ai fait sort bien, „ dit M. Digby j la seconde opération „ dont le P. Kirker m’a donné pa- „ reillement l’instruction. Je prenois „ une suffisante quantité d’Orties : sça- „ Voir lès racines, les tiges, les seuil-,, LrZ6 Curiosités i,les, en un mot toutes les plantes en- ,,tieres , & je les calcinois à la maniéré „ ordinaire. Je íuivois exactement tou- „ tes les circonstances que Quercetan „ rapporte. De cette cendre d’Orties je „ faiíòis une lessive avec de Peau pure, ,, que je filtrois pour en-ôter la tête mor- „te; & j’expol'oìs cetre lessive à Pair „froid en tems de gelée...... II est „très-certain qu’après que cette eau étoit 3 , glacée,il apparoiffoit dans la glace une „ quantité de figures d’Orties. Je „ prenois grand plaisir à contempler ce ,, jeu de la Nature; & je fis vénir le ,, Docteur Mayerne, afin qu’il fût spectateur de cette transfiguration , dont „il n’étoit pas moins étonné & ravi „ que moi. Or quelle peut être la cau- „ se de ce phénomène ? II est constant „ que la plus grande partie essentielle „ du mixte décomposé demeure dans „ son sel fixe, qui ne se peut défaire „ de Pimpression qu’il a reçue de la Na- „ ture , demeurant toujours essencifié ,, des mêmes qualités , vertus que la „ plante, d’où il est extrait, pag. 6j. Après cela il rapporte une autre expérience très-curieuse, qu’il a vue à Paris chez M. Davisson. 11 me souvient j ajoute M. Dighy , dune autre belle ex - pémnce * que le DoSieur Davisson me Jtt voi, txt, pèci OU C Voit Pi* quo ees titu U, la Ta & ûar Voi du' qu’ fie m que r Vai Hy Wí 44 - fiie ste s en- iniere : tou- cetan ies je Dure, mor- l’air 1 est étoit : une . Je ;r ce ir le pec- dont ravi cau- síant ielle dans Faire Na- :ifié : la ex- Pa- nt j ex- sur la Végétation. 287 Voir dans son Laboratoire à Paris. Il avoìt extrait í’huile & l’esprit dune certaine espèce deRéJìne gommeuse.il arriva dans cet• te opération, que tout le col du vaisseau, par °ù cette huile '& cet esprit montoient,Je trouvait entretisfu tout-au-tour de figures de Pin, quieft Iarbre £oùse tire la Résine,sur %uoi il travaillait. Lesfigures & les idées de ee§ Pins étoient dessinées avec tant d’exactitude,qu un Appellès nauroit pu les imiter « Il m’arriva la même chose en distillant de la gomme de Cerisier. Digby. pag. 73. Tant il est vrai que les idées, les ombres 8 c les fantômes des corps se conservent dans les sels qu’on en tire, III. M. de Monconis, dans son Voyage de Rome, raconte qu’il apprit du célébré P. Kirker , cette opération qu’on peut faire facilement, 8c qu’on fie sauroit trop estimer. Enferme\ dam Un vaisseau scellé hermétiquement, C esprit que vous tirereç de lherbe Capillaire 5 &jette%-y dedans tout le sel que vous au- reç tiré de la calcination de ces fèces, Cr vous verrez, croître l'herbe dans ce Vaisseau au Printems , & se dessécher en Ilyver, &* puis renaître successivement Jusqu à Vinfinh Monçonjs Tom.ij. pag. 344. Cela est d’une curiosité capable de mettre en mouvement les personnages de la plus pesante indolence : mais tout 288 Curiosités cela est-il bien vrai? M. de Monconís ne met-il rien du sien sur le compte dtf P. Kirlcer ? IV. D. J. Daniel Major nous rend compte d’une nouvelle espèce de Palin- génésie, qui a bien son mérite» „ Je „ saisois , dit ce Savant, des mélanges „ de sels de plantes, pour voir les com- „ bats de l’Acide & de P Alcali, & „ pour chercher ce qui pouvoit résulter ,, de ces diverses mixtions : j’avois mis „ du sel de Lavende dans deux fioles „ de verre remplies d’eau. Je fus fur- „ pris que vers le soir, je vis une quan- „ tiré de petites plantes, comme en mi- „ gnatures qui s’élevoient hors deseau, „ & qui s’arrangeoient fur le bord des „ deux fioles, & y composoient une „ petite forêt de Lavendes. Le lende- „ main matin le spectacle sut incompa- „rablement plus charmant. Là , fans „ doute ces petites végétations attiroient „ magnétiquement à elles les sels de „ l’air. II s’y en réunit tant, que la petite ,, forêt se précipita,par son propre poids, „ au fond des fioles. Je fis tout douce - „ ment chauffer une seconde sois mes „ fioles. Le même phénomène s’offrit ,ì à mes yeux. Cette petite forêt dura ,, sept, ou huit jours. Elle attîroit moins „ avidemment les sels de l’air. Charmé ! m d; bi & q' iu E P; les W ii nie gé íël Ec ■cin Jéi mii de ma ; tot iconís pte dii s rend Palin- „ Je anges com" i, & fuites is mis fioles 5 fur- quan- n mi" l’eau, d des : une ende- mpa- fans oient s de )etite oids, >uce" mes offrit dura loins armé que SU P. L A VÉGétATION. 289 que j’étois de cette résurrection de " mes Lavendes brûlées & renaissantes“ de'leurs cendres, je me souvins de la “ bienheureuse résurrection de nos corps; " &c dans le doux & pieux enthousiasme, " qui m’inípiroit, je fis les quatre vers “ íuivans. fí En redit ex gemino nemorosa Laveniula. vitro j Qua priùs in teiram versa.'* salemque fuit: Pulverulenta olim fìc corpora noflra redi~ bunt : Etsalia arcance quii Deitatis habenu Nous sommes redevables de ces belles observations aux Saváns. Cumforum Naturtz : Observât, ix. ami. 1677 . pag« 11. V- Le P. Ferrari Jésuite donne la maniéré de parvenir à cette curieuse Palin- génésie des plantes, par le moyen des íéìs tirés de leurs cendres. II l’a prise des Ecrits de Petrus Joannes Fuser Médecin de Montpellier. Comme ce savant Jésuite n’en a pas fait l’épreuve, il vaut mieuk s’en rapporter à ceux qui parlent de ce qu’ils ont exécuté eux-mêmes ; *nais il finit le procédé par ct s paroles ■toutes brillantes. 1 Y'oilà y dit-il, un J. Partie. N s§o Curiosités „ nouveau & un admirable spectacle ï ,, qui se prçsente aux yeux. L’Esprit y „ aura sa bonne part. Dès qu’on exposé 9 , au Soleil la fiole pleine de quintes- „ cence de Roses, ausiì-tôton découvre „ dans les bornes étroites de ce petit vase „un monde de miracles. La plante qui „gissoit endormie & ensevelie dans ses „ cendres, se réveille, se léve & se dér „ veloppe. En demi-heure de tems, ,, ce Phénix végétal renaît de ses cen- „ dres. Cette Rose en poulfiere sort de a , son tombeau pour prendre une vie ,, nouvelle. Elle est l’image de cette ré- ,, surrection , par laquelle les mortels „ gissants dans les ombres de la mort, ,, passeront à unç bienheureuse immor- „ lité. Florens Phœnix intra hom dimi - (Uumfuis è cineribus renafcitur ^ è terrez tu - mulo vernam redux ad vitam Rofa morta- libus ad immortalitatemfurreBuris prolu - dit. Flor. Lib. iv. cap. 4. pag. qyy. VI. Hannemann est bien pénétré du mérite qui est dans les sels des plantes. En peu de paroles il passe en revue presque toute la Physique de ces sels- P’abord il cit que la graine efi le pre' nue r principe de la germination J Çr U der nier complément de la plante. Semen pri- mum progerminationis principium & ul' titiuim planta? çomplementum. II ajoute? acle ï >rit Y cpose ntes- >uvre c vase e qui ns ses e dér :ems, cen- ; >rt de 2 vie :e ré~ ortels nort, imor- dimi *■ rez tU - n or t a' orolu-* ;ré du pian- revue 5 sels- : pur ! !e deu n pri' & us joûteí sur la Végétation. 291 ì*ar le secours de Vulcain, & par sa- Œ flatomie dbymique des semences des * plantes, on en tire des esprits, des * sels fixes & des sels volatiles, des * huiles, &c. qu’on reconnoît contenir “ , les premieres idées des plantes. Ces Œ plantes font concentrées dans les Œ graines. La graine est une plante œ pliée & enveloppée. Tout ce que la « plante renferme est réuni dans la grai- œ fie, 8c par un grand miracle tout ce que œ la graine contient, est réduit fous un“ plus petit volume, dans un atome a de sel de la même espèce de plante. « Sales ex Plantis eliciti habent analogiam c um feminibus ;sunt primordialia Planta~ r um & rerumsemina forma rejjufcitatrix „ «te. C’est pourquoi Paracelse avoit le secret de ressusciter les plantes par leurs « tendres. II tirait des plantes une ma- « îiere aqueuse, & une matière oléa-œ gineuse dont il imbiboit leurs cen- « di'es qu’il regardoit comme une ma- « *iere premiere, fur laquelle il répan- « «oit ces sels dissous qu’il appelle la « ‘°rme substancielle & revivifiante de « J* plante. .11 semoit ensuite dans de œ “Onne terre ces cendres ainsi prépa- <* îe es, & il en venoit des plantes de la « ^êrne espèce, comme satteste Lyba- « C’est encore sur ce principe que « N i j 292 Curiosités le P. Kirker témoigne que si on coupe une plante en petites parties, qu’on les réduise en cendres, 6c qu’on les seme dans la terre, il en renaîtra des plantes semblables. Rattrai assure que d’un Raifort coupé en vingt morceaux, ■ & mis en terre, il en vint autant de Raiforts. Le P. Merscnne , Minime, calcinoit entre deux creusets, une plante dont il tiroir le sel z iì le dépuroit J il le lemofi dans de la terre préparée ; & il en naissait une légion de pareils plantes. De tout cela Hannemann tire cette belle conclusion : « Si vous semez le sel d’une » plante dans une terre propre, il en » répullulera auffi-tôt une infinité de » plantes semblables à celle dont on a fe- » mé le sel. Salem Plant.t _,si tente puris' fimœ injeveris J jlatim ille m eam Plantain ex qaa extraElus fuerat ^ repulluiabit. De-là , Hannemann passe à la Palin' génésie, & dit: » Quercetamts .raie conte qu’un certain Médecin de Cra- » covie avoir les premiers principes à e x différentes plantes, dans diverses fi o' » les de verre, ou par le secours d'nN » peu de chaleur, & fans beaucoup d e » peine, il failbit voir les fantômes à e x ces plantes; qui s’élevoient fans po'J'; » voir se. donner de la ccmsistence : & { ii>eqsin ;Ia chaleur, ne déíailitsit .paa.fi'í P - - n s< s a v. li 7! P‘ P o cl V 9 Cl ti p d di m la le cl et te le L G le coupé un les seme liantes n Rai' Se mis liforts. ait en- ont il íemoit n nais' ;s. T) s : belle ! d’une il en lité de n a se- z purìf' lantait bu. Palin- ... ra- e Cra' ipes es fin" ■s d’uf oup à e nés à e de lS pou e : ca f paa.í'l suk ia Végétation. 29 z tôt, que tout le fantôme rentroit dans « son tombeau* Le très célébré Chry- œ sostome Magnan , Minime, décrit œ agréablement dans son Democritus re- « vivìfcens * une Roíe ressuscitée du mi- œ lieu de ses cendres. Hannemann. nov. -- Method. cognof. fiinpl. V egeí. §• 3O. œ Pag. 59. - II ne faut pas chercher dans cette apparition un corps solide : ce n’est qu'un s ombre, & si un téméraire vouloir toucher cette Rose ressuscitée, il lui arri- Veroit comme à cet Ixion, sacrilège, qui croyant embrasser Junon, ne rencontra qu'un nuage frêle, délicat, fugitif & sans consistance. VIL Paracelse donne une méthode pour faire naître une plante par le moyen de fès sels. Voici l’opérátion. ot Prenez T dit-ilde la cendre de bois brûlé ; « mettez-la dans une Cucurbite avec de œ la Résine , de la Séve, & de l’Hui- œ le de ce même arbre ; de chaque -- chose poids égal. Faisant ainsi , vous -- employez les trois principes, dont « toutes choses font formées; savoir, oc le Flegme, la Graisse, & la Cendre, œ L e Flegme , c’est le Mercure. La « Graisse est le Souffre. La Cendre est « le Sel. Parce que tout ce qui fume, & de forte que toutes les fois que bon lui fembloit j il faifoit paroître une plante dans une fiole vuide. Chaque vaisseau contenoit fa plante j aufondparoijfoit un peu de terre comme cendre. II étoit scellé du sceau diHermès. Quand il vouloit Vexposer en vue il chauffait doucement le bas du vaisseau : la chaleur pénétrant ^ faifoit sortir du sein de la matière une tige > des branches ^ puis des feuilles &* des fleurs selon la nature de la plante dont il avoit enfermé famé. Le tout paroijfoit auffl l’ex- tirés .ustre i doic astre, igner pour antes d’hui ae je Na- passé 'alin- ;uvre ;e des de la híne , '.antes es fois r e une vais oijsoit ’-.scel- ouloit ent le ,f ai- tige, fleurs avoit aujfi SUR LA VÉGÉTATION'. 2 f f hng-tems auxyeux des regardans que la chaleur excitante duroit ; laquelle cessant, cette plante peu-à-peu se retiroit en sa madère & à son repos- Le même rapporte que le sieur de Formentieres jon ami trouva par hasard le moyen de représenter les images des Orties, qu après il a mis en art . Plufleurs Je vantent du semblable : ils veulent qu on expose la lessive faite de la cendre Lune plante aux rais de la Lune, Sr Puis à la gelée : fi elle ft glace, Vimage de la plante y paraît. Je fçai, PAR Expérience, que fi on tire Veau , Vhuile &* le fiel dé une Plante, & qu après on les rejoigne , mette en terre qu il en renaîtra la même plante , beaucoup plus belle qu’elle nétoit auparavant j &* que fi elle étoit grosse de semences, il en sortira plufieurs ; mais de toutes ces opérations , cílie du Polonais mt semble la plus excellente j ayant opinion quelle e(t plus aisée qu on ne pense , & qu il n y faut qu un peu de loisir plus que je n en ai maintenant. Aussi Dieu me faisant Ict grâce d’en avoir quelque peu davantage , fl essayer ai cette 'gentillejj'e car les bras croisés, l’on ne trouve les secrets de la Nature. En leur recherche fa bonté divine est honorée, & non offensée :fes merveilles pa - roijsnt, & sa gloire en est annoncée . Qui de la Brosse ; de la Nature des N v 2 p8 C urtosïté s P ian tes. Liv. i. Chap. 6. pag. 44 & 45V lì paroxt bien par la maniéré sage 6 c judicieuse dont ce grand Homme si savant dans les choses naturelles , parle de la Palingénésie , qu’il n’auroit pas approuvé l’air décisif & le ton de Maître , que prennent fur cette matière certains Physiciens superficiels qui ne connoissent guére dans les plantes d’au- tres vertus que les potagères. Leurs téméraires déclamations contre la vérité de la Palingénésie, où ils n’enten- dent rien , ne méritent pas une plus sérieuse réfutation: mais je puis assurer les Curieux, que cet Hyver dernier » ayant fait bouillir des Châtaignes, & exposé à l’air durant la nuit, l’eau où elles avoient été cuites, afin qu’elle glaçât par le froid, feus le lendemain matin , le plaisir d’y voir des feuilles de Châtaignier grandes comme les naturelles , & dessinées fur la superficie de la glace, d’une maniéré exacte , & toute ravissante. L’air qui vint à s’adou- cir au lever du Soleil, ne me laissa jouir que peu de tems de la vue d’un si charmant spectacle. Cette expérience est à la portée de tour le monde. 11 ne saut point être Chymiste, pour la faire : & par ce simple essai, on verra si ce que tant dssiabiìes gens on dit, que les strîì là Végétation - . 299 sels contiennent les idées a la figure ^ & le fantôme des plantes dont ils font extraits* n’est qu’une pure chimere. X. Le célébré Pere Kirker propose d’abord cette question ; savoir, si la Pa- lingénésie, ou la résurrection des plantes par leurs cendres, est possible. Quoi- qu’il en eût déja fans doute connoiffan- ce , il ne décide rien positivement. II se contente de dire: Nous en parlerons, Dieu aidant, ailleurs j & nous dirons comment il faudroit s’y prendre pour réussir. Ce que je puis publier présentement ; c’est que le Comte de Martiniz , Seigneur d’un mérite très-respectable , & sur-tout à cause de la singulière affection dont il honore les beaux arts, & les gens de Lettres, m’a fait présent d’un secret pareil. II ne m’est. pas permis de le rendre public , parce qu’il m’a été communique , à condition de garder là-deí- sus un profond silence. En 1694, le P,Kirker n’avoit garde de manquer de parole à son ami ; mais certainement il a eu depuis son consentement, pour publier ce secret si curieux. En effet ce ne sut qu’en 1660, que M. Digby fit son Discours fur la' Végétation des Plantes j c’étoit | peut-être peu auparavant que le Pere Kirker lui donna ce secret à Rome , d’où ce l’a apporté. N vj lavant Anglois dit qu’il 300 C U K I 0 S I T É S Enfin nous apprenons que le P, Kir- Icer s’est déclaré fur la Paìingénésie; qu’il la croit possible , & qu’il en a fait ì’expérience qui lui a succédé à merveilles : tellement qu’il a gardé dix ans dans son cabinet à Rome, une fiole à long col,.comme un matras, & bouchée hermétiquement, qui contenoitles cendres d’une plante; qu’il ressuscitoit devant ceux que ses curiosités attiroient chez lui. En 165*7, îl fit voir à Christine, Reine de Suéde, cette charmante Palin- génésie ; & cette savante Princesse prit long-tems plaisir à contempler ce prodige. Le P. Kirker oublia fur fa fenêtre cette fiole précieuse qu’une petite gelée qui survint la nuit , mit en pièces.' 'Kcrk, Art. Magnet. Lib. 3. c . 4, Qiujî. 1. Expert. 3.p.463. Le P. Schott, Jésuite, nous alïhre qUe dans le tems qu’il étoit à Rome.... il eut la fatisfaélion de voir cette Rose qu’on faisoit sortir de ses cendres, toutes les fois qu’on le vouloit, avec un peu de chaleur, & qu’un grand Prince sollicitant le P. Kirker de lui en faire une pareille, il aima mieux céder la sienne, que d’entreprendre derechef une semblable opération. Voyez la figure. Quand au secret, on le nomme le Secret Impérial j à cause que l’Empereur Kir- ìésie ; a sait mer- x ans oie à bou- »it les :itoit oient fline, alin- : prit pro- lêtre jelée éces. ' mjì. íïùre íôse :ou~ pea olli- une me, Se- ■eur SU K LA VÉGÉTATION..' ZQT i Ferdinand III, qui l’avoit acheté d’un J Chimiste , le donna au P. Kirker, qui en a pubiié le procédé dans son Mundus- subterraneusdhv. 12 .JeB. q., ckap. y. Ex~ 1 perimmt . 1. Voici ce que c’est. Le secret de la Palingénésie J ou de la Résurrebiion des Plantes. 1. Prenez quatre livres de graines de 3 a Plante que vous d estiez de faire re- 1 naître de ses cendres. Cette graine doit être bien meure. Pilez-la dans un mortier. Mettez le tout dans un vaisseau de verre ; qui soit bien propre & de la hauteur de la Plante, dont vous avez pris la graine. Bouchez exactement le vaisseau, & le gardez en un lieu tempéré. 2. Choisissez un soir où le Ciel soit bien pur & bien serain; & exposez votre graine pilée à la rosée de la nuit dans un large plat, asin que la graine s'im- pregne fortement de la vertu vivifiante';, qui est dans la rosée. z. Avec un grand linge bien net, attaché à quatre pieux dans un Pré, ramassez huit pintes de cette même rosée , & la versez dans un vaisseau de verre qui soit propre, 4. Remettez vos graines imbibées de la rosée dans leur vaisseau , avant que le f 502 Curiosités Soleil se léve , parce qu’il feróit évaporer la rosée. Posez ce vaisseau, comme auparavant en lieu temperé. y. Quand vous aurez ramassé assez de rosée, il ia faut filtrer & puis la distiller , afin qu’il n’y relie rien d’impur. jLes fèces qui restent, seront calcinées pour en tirer un sel qui fait plaisir à voir. 6. Versez la rosée distillée & imbue de ce sel sur les graines : & puis rebouchez le vaisseau avec du verre pilé & du borax. Le vaisseau en cet état est mis pour un mois dans du fumier neuf de cheval. 7. Retirez le vaisseau, vous verrez au fond la graine , qui fera devenue comme de la gelée; l’Efprit fera - comme une petite peau de diverses couleurs, qui surnage au-dessus de toute la matière. Entre la peau & la substance limoneuse du fond , on remarque une espèce de rosée verdâtre, qui représente une Moisson. 8. Exposez durant l’Eté ce vaisseau bien bouché de jour au Soleil, & de nuit à la Lune. Lorsque le tems est brouillé & pluvieux , il le faut garder en un lieu sec & chaud, jufqu’au retour du beau rems. II arrive quelquefois que cet ouvrage SUR LA VÉGÉTATION. ZSZ se perfectionne en deux mois; & il y faut quelquefois un an. Les marques du succès, c’est quand on voit que la substance limoneuse s’enfle & s’éléve ; que l’Eíprit ou la petite peau diminue tous les jours ; Sc que toute la matière s’é- paissit. Lorsqu’on voit dans le vaifleau par la réflexion du Soleil , naître dés exhalaisons subtiles ; Sc se former de lé- gérs nuages , véritablement ce font là les premiers rudimens de la Plante renaissante. §. Enfin de toute cette matière , il s’en doit former une poussière bleue. De cette poussière , lorsqu’elle est excitée par la chaleur, il s’en éleve un tronc, des feuilles, des fleurs, & en un mot on apperçoit l’apparition d’une plante , qui fort du milieu de ses cendres. Dès que la chaleur cesse, tout le spectacle s’evanouir, toute la matière se dérange, & se précipite dans le fond du vaifleau, pour y former un nouveau cahos. Le retour d’une nouvelle chaleur ressuscite toujours ce Phénix végétal caché dans ses cendres : & comme la présence de la chaleur lui donne la vie, son absence lui cause la mort. Le P. Kirker tâche de rendre raison de ce Phénomène ravissant. II dit que la vertu séminale de chaque Mixte est 304 Curiosités concentrée dans ses sels ; & que dès que îa chaleur les met en mouvement ^ ils s’élevent aussi-tôt, & circulent comme un tourbillon dans le vaisseau de verre. Ces sels dans cette suspension, qui les met en liberté de s’arranger, se placent: ils se mettent dans la même situation & forment la même figure que la Nature leur auroit donné, si de ces graines déposées dans la terre, il en étoitvenu des Plantes. Ils retournent à leur premiere destination. Ils s’allignent comme ils se seroient allignés dans la Plante. Conservant un penchant â devenir ce qu’ils auroient été, ils suivent la premiere impression qu’ils ont reçûë. Chaque corpuscule de sel rentre dans la primitive détermination qu’il tient de la Nature. Ceux qui dévoient être au pié de la Plante J s’y portent & s’y arrangent. II en est de même de ceux qui auroient composé le haut de la tige , les branches , les feuilles & les fleurs ; tous prennent leur place régulièrement. XI. M. Genrg. Phi ip. Harjìojflerus ^ de Nuremberg, publie pareillement la maniéré de faire cette admirable régénération. Délie. Mathemat. Tom. ij.part. 9. Qiiœfl. 26. Elle ne convient pas avec celle que M. Dobrzenski a publié, dans ses ouvrages de Philosophie : mais elle P 1 B d k n P n t n ( 1 t 1 1 < * sur la Végétation. 305* 2 assez de rapport avec l’opération du P. Kàrker , qui est véritablement longue &c pénible. XII. Le P. Schott remarque que le R. P. Bakhazard Conrad a fait fessai de la maniéré qu’enseigne M. Bobrzens- ki, de Négrepontj mais que ç’a été fans nul succès. Le P. Schott croît que c’est, parce que cette méthode n'est ni exaéìe, ni assez étendue : Ci rtè D . de Nigropon- te non omnes circumfiantias enarrat ^ quas nos Gr Harjlofjïerus habemus. Technic . Quriof. Tom . ii- Lïb. u r. cap. 16. pag » 88y. Ensuitte ce Jésuite si curieux, & si doéìe, communique la méthode , qu'il préféré à toutes les autres : c’est celle même du P. Kirlcer, que je viens de donner fous le titre d s secret de la Pa- lingénéjîe * &c. XIII. M. Dobrzenski de Négre- pont, dit que dans ses voyages d'Italie, & d’Allemagne , il a vû un habile Chy- miste 3 qui íaifoit voir dans des fioles de verre , une réproduétion réelle , & de fait de plusieurs fleurs ; que ces fleurs s’élevoient flu fond d’une matière oléagineuse, contenue dans ces fioles , qui croient bouchées hermétiquement 3 qu’il ne falloir qu’un peu les échauffer , pour voir aufïï-tôt ressusciter ces Plantes avec leurs feuilles ôc leurs fleurs ; & qu’au 5© 6 Curiosités moment que la chaleur ceísolt , touí s’en retournoit dans un cahos, où l’on ne pouvoir rien distinguer. Pkdosoph . de Fontib. paru uj. propofìt. i- M.**de Négrepont dans ses expérien- ces , laiste les autres Physiciens fort loin derrière lui. II les passe infiniment. II rend la Palingénésie des Plantes tout à- sait aisée. II y a une chose à craindre ; c’est qu’il ne soit pas assez entré dans le détail, & qu’il ne nous ait donné que. le sommaire d’une opération, qui est trop importante , pour n’être pas longue. Mais il fait encore plus que tout. cela ; car jusqu’ici nous n’avons vû que des apparitions d’ombres de Plantes ; mais lui il ressuscite effectivement une Plante morte & toute sèche. Voici comme il s’y prend. Secret miraculeuxi 1. Prenez une Plante morte , & que îa racine y soit. Mettez seulement cette racine dans une certaine Eau Minérale ; en trois ou quatre heures de rems la Plante reverdira , & fera comme si elle poussoir en pleine terre. Cela ne doit pas être compté pour peu de chose. 2. Si vous mettez dans une fiole de l’eau distillée d’une Plante , ou d’une sur £ A Végétation. 507 Eleur avec trois onces de sel tiré de Ja même plante ou fleur, & que vous acheviez de remplir la fiole de 1 ’Eau Minérale : en deux ou trois jourg~vous Verrez croître au milieu de cette Eau une plante semblable à celle dont on a tiré seau & le sel. Cette plante dispa- roît quand on remue rudement la fiole; mais elle reparoît comme auparavant dès que le vaisseau est en repos. La Nature ôc l’Art, fous la main & fous les yeux du plus habile Artiste, ne sauroient rien faire de plus beau. Je m’apperçois bien que le Lecteur n’est pas content, & qu’il voudroit présentement savoir ce que c’est que cette Eau minérale. II n’a pas tort. Sans cette Eau, le récit des deux expériences ne fait qu’irriter la sois. Je puis bien assurer que quand l’Eau de la Fontaine de Jouvence seroit réelle & effective, elle ne seroit pas plus précieuse & plus esti- m ible que ÏÈau minérale. II faut laisses dans le Roman de Huon de Bourdeaux ^ la Fontaine de Jouvence qui n’est qu’une chimere pour passer à la façon de notre Eau minérale J qui est une affaire sérieuse. Eau Minérale merveilleuse. Prenez neuf livres de mine de Bis- i ] Zo8 Curiosités muth, avant qu’elle ait passé par le feu. Mettez cette mine dans une Retorte convenable où il y ait un grand Récipient. Distillez durant douze heures avec des dégrés de feu proportionnés à cette matière. II montera une Eau toute blanche & douce. Rectifiez-la deux ou trois fois ; elle se purifiera Ôc s’adouciera davantage. Cette opération que nous tenons du Seigneur Dobrzenski , n’est ni longue, ni pénible. Philosoph. Ame- nior de Fontib. Part.ûj. Propofît. I. Mais outre les deux expériences que nons venons de voir, ce savant emploie cette Eau minérale pour une troisième, qui vaut bien pour le moins les deux premieres. Nous voilà en pays de la plus- sublime curiosité. Le reste de 1 Europe & les trois autres parties du Monde ne peuvent rien nous offrir de plus curieux (8c de plus piquant. Belle Expérience. Prenez une livre de l’Eau minérale, mettez-là dans un vaisseau de verre assez grand pour qu’il en puisse rester un tiers de vuide. Bouchez le vaisseau, & le tenez dans un lieu calme & tempéré, vous verrez,dans la pleine Lune cette Eau se gonfler , s’enfler & paroître SUR LA VÉGÉTATION. ZGA sous un plus grand volume. Dans ía nouvelle Lune cette Eau baisse, & occupe moins de place qu’à l’ordinaire. Ce qui ne manque point ffi’arriver toutes les fois que la Lune se renouvelle , ou devient pleine. Le poids de seau est cependant toujours le même, soit qu’elle paroisse sous un plus grand ou fous un plus petit volume. Voici un flux & un reflux qui ne laisse pas que d’être embarrassant & difficile à expliquer. La tête en tourneroità Aristote, & il s’y perdrait comme dans l’Euripe, s’il est vrai qu’ii s’y soit précipité , parce qu’il n’en pouvoir pas comprendre les fréquents flux & reflux; mais c’est un conte très-mal concerté. Laërce dit que selon Eumolus ^ Aristote mourût à .70 ans, après avoir pris du poison. XIV. Planis-Campy doit tenir ici fa place. II a trop figuré parmi les plus célébrés Chymistes, pour n’être pas appelle en témoignage fur une curiosité qui occupoit tous les beaux esprits de son teins. II a parfaitement connu sexcel- íence des sels qu’il regardoit comme la forme substantielle des corps. Cela se reconnoîtra dans les deux expériences ■suivantes que je tire de fa petite Chirurz gie Ciymique Méditele* . .. CoKIOSITÉS 3X0 I. Expérience . Le sel tiré des plantes peut servir de graine , dit Planis-Campy , s’il est extrait en cette façon. Brûlez l’herbe qu’il vous plaira, tirez-en le sel par voie Physique. De ce sel renaîtra une plante semblable à celle qu’on a brûlée; car enfin, dit Géber , ce sel retient toujours la nature & la propriété du Mixte dont on l’a tiré. 2. Expérience. Voici, dit Planis-Campy, une expérience très-secrette & admirable. Tirez le sel Nitre de la terre grasse qui se trouve le long des ruisseaux situés, au bas des montagnes où il y a des minières d’or ou d’argent. Mêlez ce Nitre bien purifié avec du Saturne : calcinez-les tous deux en vaisseau clos hermétiquement; ensuite mettez le tout dans une Cornue, où vous ajusterez un petit vaisseau fait en ovale , lutant bien les jointures. II y faut mettre plusieurs feuilles d’or bien affiné. Donnez le feu fous votre Cornue, & peu-à-peu s’éleveront des esprits, qui se viendront attacher à l’or. Augmente* ri r de ì ex- qu’il Phy- ilanre ; car jours dont ; ex- . Ti- ui se a bas ;d’or c du yais- •net- vous ava- faut Hné. ’ * qui nteZ sur la Végétation, 3 i r Votre feu, jufqu’à ce qu’il ne monte plus d’esprits. Otez, alors votre récipient, & le scellé du sceau d ? Hermès. Faites feu de lampe dessous, jusqu à ce qu’il apparoisse dans le vaisseau, tout ce qui se peut remarquer dans le monde durant la saison du Printems; savoir, toutes sortes d’arbres avec leurs fleurs, semai! des prairies , les petits ruisseaux qui coulent à l’entour avec dix mille fontaines. Les unes qui sortent des rochers , les autres des bocages touffus. On y remarque aussi les campagnes ondoyantes des Bleds, avec í’apparence de quelques animaux qui bondiík-nt parmi les prairies ; mais ce qui est plus digne d’admiration , c’est qu’alentour du Globe , on volt quantité d’Etoiles, les unes fixes, les autres errantes : chose admirable certainement, laquelle je ne croirois pas, si mon œil n’en avoir été ie témoin irréprochable. Arriéré d ici, Soufleurs ! Ne vous y abusez pas, st Vous ne le voulez ; car il n’y a rien pour Vous. Chap. xxij.pag • 303. Voilà exactement tout s'Univers en petit. La Sphere d’Archimède, que les Anciens ont tant Vantée, n’est pas à mettre de niveau avec cet abrégé de ce vaste Univers. II semble qu’il n’y a plus rien à ajouter à ces merveilles de la Palingénéfie zi2 Curiosités des plantes; car enfin que pourroir-oti aesirer, après ce que nous venons ds voir ? L’imagination se perd ici, & ne sauroit aller au-delà : cependant on passe encore plus loin. On ne s’est pas contenté de faire apparoître des plantes ressuscitées du milieu de leurs cendre : on a essayé de faire la même chose fur les animaux , & on en est venu à bout. Il y a maintenant la Palingénésie des animaux. Je ne fçai si Gaffarel n’avoit pas en vue de l’étendre fur les hommes mêmes , & de faire apparoître dans des fioles les Ombres des Trépassés. On en jugera paf les choses qu’il nous dit fur la résurrection des plantes. Article II. La Palingénésie des Animaux. I. Gaffarel a bien eu raison de mettre la Palingénésie parmi ses Curiosités inouïes. De toutes celles dont il traite, il n’y en a pas une qui ne lui soit beaucoup inférieure. C’est élever la Palingé- nqsie.au dernier degré du merveilleux, que de fe former l’idëe de la pratiques sur les cendres mêmes des animaux, 8c peut- être des hommes. Que ce seroit u u .enchantement bien doux, de pouvois .s oit-oti )N8 de & ne i passe ; cônes ref- e: on ss ani- Ii y a maux. ;n vue ks , & les les ra par urrec- x. nettre •iojìtés :raite, beau- ìingé- lleux j tiquer ix, & oit un juvoif jouis sur jla Végétation, ziz jouir du plaisir de voir sombre & le fantôme du parent ou ami défunt ! Si Arté-, mise avoit fu le secret de la Palingénésie, elle n’auroit pas avalé les cendres de son Epoux Maufole. Elle les auroit conservées dans une Urne de cristal où l’Om- bre, les Manès du défunt lui auroit apparu , quand elle l’auroit souhaité. C’est à quelque chose de semblable que vise GaíFarel, lorsque parlant de la Palingénésie , il sait venir sur la scène les Ombres des Trépassés. IWaut l’écouter.' M. du Chêne * dit Gaffarel, un des meilleurs Chymiftes de notre fiecle * rapporte qu il a vu un très-habile PolonoisMédecin de Cracov'ie qui conservait, dans des foles la cendre de presque toutes les plantes de façon que lor/que quelqu’un par cu- riofité vouloit voir par exemple une Rose dans ces fioles* il prenois celle dans laquelle la cendre du Rofier étoit gardée &* la mettant fur une chandelle allumée* dès qu’elle avoit un peu senti la chaleur* ôn voyoit remuer la cendre qui s’élevoit comme un petit nuage obscur, qui après quelque mouvement * venoit enfin à repré- Jenter une Rose fi belle * fraîche & fi parfaite * qu on Veut jugée être palpable & odorante comme celle qui vient du Rofier . Ce savant homme dit qu il avoitsouvent tâché de f aire le même ç & n’ayantsapar in- L Partie. ' Q 314 Curiosités dujîrie * le hasard lui sît voir àpeu-prls U même prodige • Comme il s’amusoit avec M» de Luines de Formentieres Conseiller ait Parlement ^ à voir la curiosité de plusieurs expériences ^ ayant tiré le sel de certaines orties brûlées & mis la lessive au serain d Hiver j le matin il la trouva gelée mais avec cette merveille ^ que les espèces des os' ties _> leurforme & leur figure etoientfi nai- vement & fi parfaitement représentées fut la glace ^ que les vivantes ne Vétoient pas mieux. M. du Chêne étant comme ravi j appellaM. de Luynes pour être témoin d’uti speâlaclesi curieux , C à la vue de ce pro 0 dige ^ il conclut en ces termes. Ce Secret nous apprend, qu’encore qufl le corps meure ; Les formes font pourtant aux cendres leur demeure. A présent j ajoute GafFarel, ce secret 1CeJipl11s.fi rare ^ car M. de Claves, un des excellens Chymifies de notre tems ^ lésait voir tous les jours. D'ici on peut tirer cettf conséquence j que les Ombres des Trépassés qu’on volt souvent paroítre aux CimetiertS font naturelles étant la forme des corps en' terrés en ces lieux j où leurfigure extérieu' re j non pas Came ni des fantômes bâtis par les Démonsjii des Génies jcomme quels. qut pat où bre qut ten qiu for cor libi Ph paj Ph pé fai íìb me aff Ve co; Ge ga en am t)c Go thi dog mu qu: près U vec M‘ lier att ufieurs naines feraitt mais des os' fi nai ' ées fut mt pas : ravi j in d’ufl ce pro * re que endreS e secret un deS lésait er cette ■épajsés letiereS orps efl' ■térieu' is bâtit xe queh sur £ a Végétation. 315* quts-uns ont cru. II eft certain que ces apparitions peuvent être fréquentes aux lieux où il s"eft donne des batailles Gr ces Ombres ne font que les figures des corps morts que la chaleur „ ou un petit vent doux excitent & élèvent dans Vair ... C’eft une belle queftion ^ continue GafFarel ; savoir ft ces formes admirables sorties des cendres des corps peuventservir d’un argument infaillible de la résurrection ignorée de plusieurs Philosophes. Gaffarel, Curiosités inouies. pag. 100. II. Quand j’ai dit ci-devant, que les Physiciens en feroient tant par leurs expériences, qu’ils parviendroient jusquà faire une naive image de ''incompréhensible miracle de la résurrection, je ne me trompois pas tant. C’est déja une affaire presque faite. On a passé des Végétaux aux Animaux, & on a pris compassion de cette famille à laquelle le Genre humain n’á pas de petites obligations. C’est ce qu’un grand Docteur en I héologie a mandé au P. Schott son ami. Voici le nom & les qualités du t)o cteur : Prmobilis ^ & R eveirend . D. God efridus Aloysius Kinnerm ài Lowen- thurn j Jurisutriufque jfacrojanctœ Théologie Doétorj faut or j & amicus integerri- tnus. C’est comme en paris; k; P. Schott, qui a fait imprimer à la fin. de fa Phy - g 1 6 Curiosités fi.ca Curìosa, un,mémoire, dressé par ce Docteur. Après que ce Curieux s’efi plaint de n’avoir jamais pû, fur les secrets qu’il a vû imprimés, parvenir à la Palingénésie des plantes, il rapporte ce que dit Martinus Kergéras , L ib. de Fermentât, p. po. II est certain, dit cet Auteur, que dans la substance des sels, se trouve la forme spécifique d u corps d’où ils font tirés : le corps étant détruit, on peut conserver cette même forme extérieur 6c la voir sous la figure d’une ombre ou d’une nuée subtile, composée de vapeurs & d’exhalaiíòns; à peu ppès comme on croît que font les corps des Trépassés dans leurs apparitions aux Cimetières. II ajoûte : On m’a assuré que cette réprodudlion s’efi faite * non-seu - lement dans les plantes j, mais aufiï dans les animaux. On parle nommément d’utt petit Moineau qui apparoijfoìt de la forte dans une fiole où Von gardoit fies cendres < II y en a qui ont témoigné dans leurs écrits, que de Claves Chymiste François a fait voir à plusieurs personnes la même chose. Nonfolum in vegetalibus fe prs.fi' tifffed etiam in Pajferculofie vidijfe pro certo quidam mihi narravit. Etfunt qui publico fcriptq confirmarunt * quòd hec ip' fum Çlaveus (jaillis ^ quasi publicè pluribûs I semons raperit* Physic. Curios. Append* par ce s s’efl les se- enir à jporte _i&. de lit cet s sels» corps ìt dé- je sor- figure , COM- ; à peu corps ìs aux assuré ' n-seu - r dans !t d’utl a forte m dr es • leurs ançoís même prafti' e „ pro int qui k oc ip - íuribûs NûlUCtlU Rtwuscifc suklaVègétation. 517 Part. j. cap. 1 . pag. iz6§. Tom.ij. Voilà donc un. petit Moineau ressuscité, comme un Phénix du milieu de ses cendres» Voyez la figure. III. M. Digby a fait encore davantage. D’animaux morts > pilés , broyés , il en a tiré de vivants de la même espèce.- C’est ce qui lui fait dire avec beaucoup de complaisance pour cette ópé-' ration dont il se sait tout-à-sait bost gré, que ce qtson a sait à l’égard de la reproduction des plantes, fie peut pas etre mis en parallèle avec ce qu’il a éprouvé à l’égard des Animaux. Je ne Vois pas, dit-il, que la rénovation , ou représentation naturelle de ces idées & figures, puisse imiter la véritable renaissance dont j’ai moi-même fait l’ex- Perience fur des Poissons ou Ecrevisses. Voici comment. Qu’on lave les Ecrevisses pour en ôter la terrestréïté, qu’on les cuise durant deux heures dans une suffisante quantité d’eau de pluye. Gariez cette décoction. Mettez les Ecrevisses dans un alembic de terre, & les iistillez jusqu’à ce qu’il ne monte plus r ien. Conservez cette liqueur. Calcinez Ce qui reste au fond de î’alembic, & le réduisez en cendre par le réverbératoire, iesquelles cendres voys tirerez le sel -Vec votre premiere décoction. Filtrez P iij , zi§ CuRtonrís ce sel, & lui ôtez toute son humidité superflue. Sur ce sel qui vous restera fixe , versez la liqueur que vous avez tirée par distillation , & mettez cela dans un lieu humide comme dans du fumier, afin qu’il pourrisss, & dans peu de jours vous verrez dans cette liqueur de petites Ecrevisses se mouvoir, & qui ne seront pas plus grosses que des grains de millet. 11 les faut nourrir avec du fan g de Bœufs, jusqu’à ce qu’elles soient devenues grosses comme une Noisette. 11 leS faut mettre ensuite dans un auge de bois rempli d’eau de riviere avec du sang de Bœuf, & renouveller l’eau tous leS trois jours. De cette maniéré vous aurez des Ecrevifles de la grandeur que vous voudrez. Pag. 74, 77, 76. Cela est plus utile que la Palingénésie deS plantes dans les fioles. II y a là du solide. II y a plus qu à voir, il y a à man* ger, & fur-tout des Ecrevisses qùi font d’un usage excellent pour purifie!' le sang. IV. II ne saut pas finir la matière de la Palingénésie , fans avoir entende M. Boyle. C’est l’oracle de la Physique expérimentale. Ce savant homme, e n parlant des expériences qui font contif 1 ' gentes J c’est-à-dire, qui ne réussisses! 1 pas toujours , il rapporte ce quo^ :ésu- fixe, e par i lieu afín vous Ecre- eront : mil- ig de deve- 11 les e bois ng de ìs leS i8 au- r que Cela ie des lu íb' i man* s qui urines ere de ntendi 1 yíìquS ae, ef contifl' ffiítent qu’ot* sur là Végétation. 319 d dit tant de fois, que le sel contient Pi- dée des plantes dont on Pa extrait ; 8c qu’en mettant du íel d’abfynthe dans de l’eau de fontaine , qu’on expoíe ensuite à Pair en Hyver , afin de la faire geler , on volt immanquablement l’idée & Pimage 'dune plante d’absynthe, sur la superficie de la glace ; puis il ajoûte : Pour moi je déclare que cela ne m’a jamais réussi. On voyoit bien quelques figures extraordinaires fur cette glace, comme fur toutes celles qui font d’une eau, ou Peau a mis des sels particuliers; mais Pabfynthe n'y paroilïoit pas plus qu’une autre plante, 8c je crains bien que ceux qui croient avoir fait heureusement ces sortent d’expériences , n’ayent apporté pour la contemplation de ce spectacle, leur imagination avec leurs yeux. Et fane magnopere vereor ne qui se ejusmodi plantarumfimulachra in glacie vidiJJe prqfitentur ^ imaginationem non minus quàm oculos ad hocspeêtaculum adhïbuerint. Tentamin. Phisioìogic. pag. 43- Voilà tout le mistere de la Palingé- nésie renversé , ou du moins rendu fort douteux ; mais voici ce qui le rétablit à merveilles. Un y a pas long-tems j dit M. Boy le dans la même page, que je pris de fort ^on Vîrà-de-gris qui contient beaucoup de .0 iiij 320 Curiosités parties salines du marc de raisin dont on fi sert pour corroder le cuivre afin de faire le Verd-de-gris. J'en fis une solution d‘un fort beau verd• Je fis congeler cette solution avec dusel & de la nége J nous vîmes avec admiration fur cette glace de petites figures qui repréjentoìent excellemment des dignes* Enim verò nos ìpfi cum non ita pridzm op - timx xrugìnis ( quceJalinas uvarumparti- culas in cuprum ab ipfis corrosum coagula- tas copiosè continet ) folutionem pulcherrì- mì virescentemsale & nive congelajsemus* figuras inglacie minujculas vitiumspeciem eximiè referentes non fine aliqua admirations conspeximus. Cette seule expérience suffit, pour fonder tout ce qu’on a rapporté de la Palingénésie des plantes, & des animaux par leurs sels. C’est à ceux qiii veulent, en philosophant, adorer la grandeur de Dieu , à raisonner sur cette exaétitude, cette émulation, ce penchant que la matière se conserve , pour s’arran- ger, autant qu’elle peut, selon la figure que lui avoit d’abord imprimée l’Auteuj de la Nature. SUR LA VÉGÉTÂT ì Ó N. Z2- Chapitre XI. Nouvelle maniéré de multiplier facilement les Plantes & les Arbres » Combien cette méthode va perfectionner le Jardinage . J Usqu’à présent toute l’induílrie des hommes , pour la multiplication des plantes, s’eít terminée à les faire venir de graine, de racine , de bouture f de marcote, de greffe. On n’est pas allé plus loin ; & toutes ces voies font longues , pénibles, & quelquefois peu certaines , fur-tout à l’égard de beaucoup d’arbres qu’on ne fauroitprovignerqu’ a- vec des peines infinies. La marcote qui paroît la maniéré la plus sûre & la plus propre à donner promptement du fruit, ne réussit pas fur toutes fortes d’arbres. M. de la Quintinie s’en plaint vivement : Plut à Dieu dit-il, que telle facilité de faire racines en marcotant fut commune £r naturelle à toutes sortes à* arbres j aujji-bien quelle l’ef aux branches de Vignes j de Figuiers J de Coignafjìers j de Groifdkrs ^ de Mirthe ^ &c. Les avan t âges que nous en tirerions, feraient d’un I22 Curiosités rapport f & d'une commodité infinie. Ré- flex. sar l’Agricult. chap. ij. pag. 494. Donc, de l'aveudu plus savant,&du plus expérimenté Jardinier qui fut jamais, la voie de la marcote, pour multiplier les plantes, a des inconvéniens fâcheux , & qu’on ne saurait surmonter, à l’égard de certains arbres. On peut donc souhaiter quelque meilleure méthode. II y a des arbres, fur-tout les arbres exotiques, dont il n’estpas possibled’a- voir de la race, par toutes les voies, dont on se sert dans Je Jardinage. II semble que ces arbres font lâchés d’ê- tre en terre étrangère; & qu’ils y soient íî mal, qu’ils ne peuvent se résoudre à y laisser de postérité. En voici un e temple que je tire de la République des Lettres. En 1660, dit l’Auteur, M- Ankelman ^ Marchand de Hambourg ^ acheta en Hollande un Arbre Canelle j apporté des Indes Occidentales : il n’é- toit alors haut que de trois pieds, & gros d’environ deux doigts. II est présentement haut de seize pieds avec la caisse, & plus gros que le plus gros bras. II pousse des fleurs tous les ans vers la fin du mois d’Août. Pour ce qui est du fruit, il n’en a point d autre que son écorce qui se détache aussi tous les ans. . Cet arbre est fi précieux à for» SUR LA VÉGÉTATION. Z2Z maître, qu’il en a refusé deux mille écus que M. l’Eleòseur de Brandebourg lui en fit offrir. M. Ankelman ef- péroit de le faire provigner J £en avoir de la race J pour ainsi dire * auquel cas il s’en fut défait ; mais il n a pîijamais en venir à bout de quelque expédient qu il fe soit servi. Républìq, des Lett. 1684. No- Vernb. Artic. iij. pag. zyp. Depuis on a averti le Public que ce n’étoit pas un Ar- bre Caneïle * mais VArbre Perfea ^ décrit en 1661. dans le Jardin de Médecine d’Amsterdam. II paroít par là description que l’on en a fait, qu’il a été impossible. de le provigner. II n’y a pas moins de difficulté à multiplier les plantes & les arbres par la voie des graines, & des noyaux. II s’y trouve des longueurs & des retardemens qui désolent, & avec d’autant plus de sensibilité-, qu’on est impatient de voir des fruits de son travail. La vie est courte, on ne veut point attendre : on veut jouir, & les délais désespèrent. Dans le Jardinage, on a souvent de pareilles mortifications à essuyer. Je voudrois bien savoir * dit M. de la Quintinie , pourquoi il arrive quelquefois , que certains arbres nouveaux plantés, font long tems en terre, par exemple, des trois & quatre mois ; & même des trois & quatre O vj z 24 Curiosités années, sans aucune apparence d'aSlion • Tout de même que certains noyaux, & certaines graines, qui font pareillement en terre des années entieres fans germer . Réflex. fur l’Agricult. chap. vj. pag. y 12. Voilà donc l’écueil des Curieux. On ne parvient qu’avec peine , & à force de tems, à multiplier les plantes & les arbres par les graines , par les noyaux , par les marcotes, par les greffes. A f égard des boutures, le tems est encore long , & l’évenement assez incertain. Le Jardinier solitaire , qui trouve que la méthode de multiplier les arbres par boutures, est facile à l’égard des Figuiers, demeure d’accord qu’orï ne peut lever ces boutures , que dans quelques années : & il y demande outre cela beaucoup de façon & d’exactitude. II faut dit-il, faire une rigole d’un pied de profondeur , & d’environ un bon pied de large: remplir cette rigole de bon fumier gras, pourri, & y planter les boutures , en la maniéré qu’on plante la Vigne : c’est - à - dire, un peu courbées ; £r avoirJoin d 1 arroser quand il efl nécessaire : elles prendront racines J & feront en état d’être levées dans quelques années. Ch. xi. pag. 25)4. Voilà donc beaucoup de tems & de façon, à f égard des Figuiers j qui font des arbres qui font le SUR LA VÉGÉTATION. Z2Z plus aisément des racines. Que sera-ce des autres qu’on ne provigne que difficilement , même par la voie des marcotes f M. de la Quintinie avoit bien compris toutes ces peines & ces longueurs désolantes, quandilserécrioit: Plut â Dieu que telle facilité de faire racines en marco- tant fut commune £r naturelle à toutes sortes £arbres , aujjì bien quelle l’ejl aux branches de Vignes & de Figuiers J Quelque facilité qu’il y ait, il saut encore plusieurs années avant que de les lever. On nous aura donc quelque obligation , fi nous communiquons aux Curieux le secret de faire prendre promptement racine à toutes sortes de branches d’ar- bres avec une facilité extrême & un succès immanquable. II en est de même des graines & des noyaux. On a découvert le moyen de les faire germer en peu de jours, & de les mettre en état de réuílîr, & de faire plaisir. Nous tenons de M. Lignon, Botaniste du Roi pour les plantes étrangères , le secret de déterminer en peu de tems les branches à faire des racines, 8c à devenir en moins de deux ans des arbres à fleur,' & à fruit. Quelques-uns s’étoient avisés comme lui de mettre des branches dans des fioles pleines d’eau , pour voir ce qui en résulterait, & fi elle pou- z 26 Curiosités roient se nourrir de la feule eau. 11 est arrivé qu’elles y ont fait quelquefois des racines, & ces phénomènes curieux ont donné occasion aux Physiciens d'éxaminer si seau feule pouvoir être un suffisant aliment pour les plantes. On s’eít borné là; mais M. Liguon a fait davantage. II n’en est pas demeuré aux contemplations philosophiques, il a voulu tourner ses expériences du côté du Jardinage, & rendre utiles au public les amufemens d’efprit des Philosophes. C est ce qu’il a fait en disposant ces petits arbres naissants à passer de la nourriture de seau de la fiole, à l’a- liment que la Nature leur prépare dans la terre. II y a réussi à miracle. Pour ce qui regarde la germination des graines ôc des noyaux par le moyen de Peau , je fuis redevable aux épreuves que M. Gia- reschius en a laites. Elies m’ont inspiré la pensée d’approprier ses expériences de Physique , à la culture & à l’embellif- fement des Jardins. Commençons par la méthode que nous tenons de M. Li~ gnon, si connu par ses voyages de là Guadeloupe, d’oti il a apporté un très- grand nombre de plantes terrestres, & marines, qui ont bien justifié l’idée, qu’on s’étoit formée de son discernement &c de fa connoissance en matière de sue la Végétation. 327 plantes exotiques.Nous ne saurions mieux faire, que d’insérer ici une Lettre où il rend compte du procédé qu il a tenu pour mettre en régie, cette nouvelle maniéré de provigner les arbres & les arbrisseaux. LETTRE DE MONSIEUR LIGNON, Botaniste du Roi pour les Plantes étrangères. A M. DELA MALEMAILON, Gouverneur pour le Roi de Lille de la Guadeloupe & autres. Sur une nouvelle maniéré de provigner aise'-, ment les Arbres £r les Arbrisseaux . Monsieur, Il y a long-tems que je cherche une occasion favorable pour vous aíiurer de mes respects, & de Fenvíe que j’ai de mériter l'honneur de vos bonnes grâces , tant pour mon frété qui est établi à la Guadeloupe, que pour nioi-même , qui me trouve à la veille d’y faire un nouveau voyage, afin d’y rechercher avec plus de foin & de diligence que jamais, les Fiantes curieuse que la Nature produit Z28 CffRIOSÍ Tés si libéralement là, & aux Isles voisines. J’ai lin nouvel engagement qui m’oblige à ce voyage ; & cet engagement est d’honneur & d’in- clination: en effet que ne ferai-je point pouí la satisfaction de Monsieur le premier Médecin du Roi? Vous savez combien Monsieur Fagon désiré ardemment que le Jardín-Royal des Plantes se conserve le lustre & la célébrité qu’il lui a donnée depuis quinze ans , Si qui ont attiré à cette riche Ecole de Botanique, non-leulement l’admiration de toute la France, mais même de tous les Savans du monde qui viennent à Paris. On n’y avoít jamais vû tant de Plantes si rares & cultivées- avec tant de foin & de succès. Mais que ne' dois-je pas faire pour le service de S a M a- jíste’, qui me vient de gratifier d’un Brevet de Botaniste du Roi, pour les Plantes Etrangères ? Ce Brevet est accompagné d’un don très-con- siiérable. Vous devinerez bien, M o n s i eu r» que tout cela est l’eslet de la confiance qu’a ls Roi pour Monsieur Fagon, & de la protection dont cet illustre Mécénas des Botanistes, a bien la bonté de me vouloir honorer. En attendant , M o n s i e u r , le plaisir de vous assurer dans le nouveau monde, de rattachement sincere que j’aurai toute ma vie, pour tout ce qui peut vous intéresser ; permettez-moi d’avoir l’honneur de vous faire part d’une découverte qui ne fera pas indifférente aux Curieux & aux honnêtes gens qui font leurs délices des innocens plaisirs du Jardinage, 8C , qui me vint assez heureusement en pensée pendant jpa derniere traversée de l’Améri- j que en Europe. On me flate que je fuis allé dans mes réflexions plus loin que nos Physiciens modernes» Car si quelques-uns ont entrevît la maniéré sur la Vêgétàtiòn. Z2 A Nouvelle que je pratique pour faire prendre racine en peu de tems, & facilement à toutes sortes de branches d’arbres, on m’as- fure qu’aucun d’eux n’a en la pensée d’eti appliquer le secret à Futilité & à la perfection du Jardinage. Ravi ferois-je, si cette découverte pouvoic me tenir lieu de quelque mérite auprès de vous. Je croìrois avoir beaucoup fait, si j’étois parvenu à imaginer une chose qui pût vous procurer quelque agréable amusement. Voici, Ptí o n S i e u , ce que c'est. Ce sut en 16y 8, que j’etis l’honneur d’être envoyé parle Roi, aux Indes Occidentales, pour en apporter en France les Fiantes les plus rares. Comme je repassoìs - avec une ample récolte, toujours occupé Je la conservation des belles Fiantes que j’apportois pour le Jardin-Royal, je reeherchois comment on pourroit le perpétuer en Europe, & déterminer ces Etrangères à s'accommoder de notre Climat , & à nous laisser une postérité en France. Une Navigation de dix-liuit cens lieues donne le tems de réfléchir Sí de philosopher. Dans ce grand loisir, je m Imagina! que l’on pourroit multiplier en Europe ces Plantes curieuses, fans l’embârras des couches de fumier &des cloches de verre, & dont le succès pour les Plantes exotiques, est bien au-dessous de ce qu’on désiré faire. Les Mar- cotes manquent souvent. Les Boutures & les graines fur couche & fous cloche ne réussissent guéres, quelque application qu’on y apporte. Enfin il y a six ans que je voulus faire des essais de ce qui m’occupoit Feíprit depuis plusieurs années. Le sujet que je choisis, pour ma premiere épreuve, fut le petit Grenadier Nain à fruit qu’on apporta en 16^5. de la côte du Brésil à la Guadeloupe, & que Curiosités J’ai depuis apporté en France. 11 faut votiS a vouer , Monçiidr, que plusieurs affaires domestiques m’empecherént de suivre mes expériences autant qu’íl le falloit, pour en conclure quelque chose de certain. Ce ne fut que le in Mars de Tannée 1703, que je commençai mes expériences, avec la résolution d’y donner tout le tems nécessaire pour re- connoîtrè si mes conjectures poúrroient me mener à quelque chose de bon. Je pris donc le bout d’une branche du petit Grenadier des Indes : Elle étoit grosse comme une plume à écrire ; je la mis dans une fiole de verre avec de 1 eau de riviere, & l’exposi'.i au Soleil de midi fur une fenêtre, qui est au haut de la maison. Je changeois cette eau trois ou quatre fois la semaine. 11 ne me parut pas dans les premiers jours, qii'il fut rien survenu de nouveau à ma petite branche. Quand le Soleil commenqa à faire sentir plus de chaleur, je changeai l’eau tous les jours, parce qu’ii me sembloit que plus je renouvellois l’eau , la petite branche avoit un air plus sain & plus gaillard. II est vrai que quelques froids qui survinrent , retardèrent la végétation , que j’attendois avec beaucoup d’empreífement. Et j’ai conclu de-la, qu’il ne faut pas se presser de Elire cette expérience, que le teins n'ait pris une apparence de douceur durable ; afin de ne se pas tourmenter inutilement ; mais ma joie fut complette environ six semaines après. J’apperqûs vers le bas de la branche qui trempait dans l’eau , une pointe blanche, longue d'environ deux lignes, & de la grosseur d’une épingle. C’étoit une petite racine tres- tendre. Je voulus donner une nourriture plus succulente á cette petite Plante naissante. En effet SUR L A VÉGÉTATION. ZZî Je pris un peu de terre franche, que je broyai dans mes doigts, & que je répandis dans l’eau. Le lendemain je remarquai que la racine avoit augmenté de moitié. Je versai l’eau doucement pour ne pas détacher le limon qui s’étoit mis autour de la jeune racine ; & je lui donnai une eau nouvelle ; en ajoutant encore un peu de terre , comme réduite en poudre impalpable. Je laissois tomber cette terre autour de mon petit arbre, afin qu’il s’en revêtît par le pied. Véritablement j'observois, quand l’eau s’étoit clarifiée, que cette terre enveloppoit la petite racine & le pied de mon petit arbre. Je fus charmé de voir ma petite branche ainsi métamorphosée en un arbrisseau. Trois jours après, je découvris une seconde racine au dessous de la premiere. Alors je m’aífurai d’avcir trouvé la maniéré de faire prendre racine aux boutures des Plantes exotiques, fans le secours des cloches & des couches. J’eus foin de nourrir cette seconde racine» comme j’avois fait la premiere, & je fis fi bien qu’en dix ou douze jours, mes nouvelles racines végétèrent considérablement. Le haut méme de la branche ne se tenoit pas dans l’inaction. II devint hérissé de quantité de petites pointes rougeâtres qui étoient autant de boutons prêts a donner des feuilles. Voilà donc un arbrisseau dans toutes les formes. II étoit question de le sevrer ce cette nourriture trop foible, pour lui en donner une plus solide ; car enfin je comprends bien que toutes fortes d’arbres ne trouvent dans l’eau une nourriture suffisante, & qu’il faut sur tout áux arbres fruitiers, outre le nitre leger qui se peut trouver dans l’eau, les sels & les sucs nourriciers de la terre, pour les mettre en état IZ2 Curiosités de fleurir & de fructifier. En un mot, il fal-*, ioit transplanter mon arbrisseau , & le transporter de l’élement des Poissons, dans l’éle- rnent des Plantes qui est la terre. C’étoit-là où j-e redouípis quelque écueil Mortifiant. II y íalloit venir. Je rerpplîs de bonne terre un petit pot; je tirai moíi arbrisseau de la fiole : ses racines étoient enveloppées par le limon qui s’étoit formé -à l’en- tour : en cet état je le mis doucement dans cette terre en couvrant peu-â-peu les racines. Je ne manquai pas de bien humecter la terre ; & pour ne pas dépayser si fort tout d’ímcoup notre jeune arbrisseau , je remplis d’eau un plat, dans lequel je mis le bas du petit pot, afin que les racines trouvassent à se nourrir de la même matière qui leur avoit donné la- naissance. Il est inutile de faire observer, que dans ler premiers jours de cette transplantation , je me' gardai bien d’exposerParbrilfeau aúx fraîcheurs de la nuit, & à l’ardeur trop vive du Soleil durant le jour. ■ Mais il me parut que mon arbrisseau re- connoissant que la terre étoit mieux son sait que Peau, il «’aimoit pas à sentir au-dessous de fa racine Peau , dans laquelle le bas da pot trempoit. II pouíloit à la vérité de petites branches, mais d’un verd pâle; 8c ce.vermeil qui accompagne d’ordinaire les pousses nouvelles, n’y paroissoit/pas. Je devinai la causé du mal; j’ótai le pot hors 'de Peau, & js commençai à traiter mon petit Grenadier comme une plante adulte, & qui étoit sortie d’une délicate enfance. Tout alla à merveilles : Durant tout l’Eté il a été paré de feuilles d’un verd & d’un vermeil à faire plaisir. L’Hiver, j ai fait pour lui ce que l’on fait SUE LA VÉGÉTATION. ZZZ pour les Orangers, pour les Grenadiers & pour tant d’autres arbres qui ne s’accommo- cfent point de cet air plein de frimats & de glaces, dont cette saison désole la Nature. II perdit sés feuilles à la fin de P Automne, íl en poussa de nouvelles au commencement du Printems. 11 en étoit couvert comme une petite forêt, quand j’en fis présent au mois de Mai 1704. à M, P Abbé de Vallemont. II a eu le plaisir de le voir donner une belle fleur du plus vif incarnat du monde dès cette année-là. Voilà l'histoire de cette nouvelle maniéré de multiplier les Plantes étrangères. Vous pouvez bien compter, M. que je ne me tins pas les bras croisés Vannée suivante. Comme l’Eté fut fort chaud, je fis mes expériences fur plusieurs Plantes de différentes espèces. Je ne me fuis pas renfermé dans lés Plantes utiles à la vie, je me fuis hazardé fur celles qui font de pure curiosité. La fameuse Sensitive qui donne tant de peine à élever, se multiplie fort heureusement par le moyen de mes fioles. J’ai fait prendre racine à plusieurs branches, & la vérité du fait est, que pas une de ces branches n.’a manqué. Un de mes amis a gardé tout l’Eté, une de ces branches qui étoit devenue une fort jolie Plante. Plusieurs personnes de considération savent que durant cet Eté j’ai multiplié avec plaisir plusieurs autres sortes de Plantes'étrangères. II y a des Curieux qui conservent actuellement la Grmcidilla. , ou la fleur de Passion, venue pareillement de branches qui ont pris racine dans Peau. Je ne puis oublier de remarquer qu’un de mes petits Grenadiers, trois mois aprés íà naiílànce, par la végétation hydraulique , a poussé quatre fleurs toutes charriantes. On voit par-là jusqu’où l’art peut- 554 Curiosités. aller, & combien il fera aisé à l’avenir de multiplier les arbres curieux. Cependant je n ai pas négligé la méthode ordinaire. J’ai voulu voir comme elle me réustìroit fur mes mêmes plantes. J’ai mis en terre plusieurs branches de différents arbres : & la vérité est que tous mes soins ont été inutiles. Aucune de ces branches n’a pris racine, quelque précaution que j’aie apporté pour leur en faire pouffer. On n’a pas épargné les cloches, ni les bonnes couches de fumier, & tout cela très-inutilement : nulle n’a donné aucun signe de vie. II est vrai qu’on trouve un succès presque immanquable à procéder par la voie des Marcotes, mais quel embarras n’y a-t-il point? II n’est pas aisé de courber & de coucher des branches dans la terre : & quand cela est fait, il faut le foin des arrofemens, il fausse précautionner contre les ardeurs du Soleil, & les fraîcheurs de la nuit. II faut des années entieres, avant que de lever ces Marcotes, & par ma méthode nos arbres fleurissent quelquefois au bout de trois mois. Certainement, pour peu que l’on y réfléchisse , on demeurera d’accord que de quelque maniéré qu’on s’y prenne pour multiplier des Plantes, la végétation par la feule eau est incontestablement la plus curieuse , la plus aisée & la plus sûre. J’ai observé dans mes voyages, que les Sauvages de la Dominique , quand ils transportent dans leurs Pirogues, des Plantes d’unelfleà l’autre , ils ne manquent jamais, avant que de les planter, de les mettre dans l’eau durant trois ou quatre jours, pour r’ouvrir les pores que la sécheresse durant le transport, pourroit avoir rétrécis & fermés. C’est ainsi qu’ils les préparent à reprendre les sucs nourriciers de la terre# Les habitans dc la Guadeloupe font encore la SUR LA VÉGÉTATION 1 . ZZ^ tnème manoeuvre. Aussi faut-il avouer que par ces petits soins ils sont parvenus à avoir chez eux des arbres de toutes les parties du monde. C’est ce que j'ai vû dans le tems que jetois fur les lieux. II y a plusieurs petites particularités, dont je ïie fais point mention ici, au sujet de notre nouvelle végétation II saut vous laiííèr, Monsieur» le plaisir d’imaginer-de vous-méme, plusieurs petits procédés, qu’on est ravi de ne devoir qu’à fa feule imagination. Comme vous avez le génie vif & heureux , & que vous aimez passionnément la culture des fleurs & des arbres , vous irez beaucoup plus loin que je n'ai fait. C’est assez que j’aie rompu la glace. Je m’esti- merois très-heureux, si cette curiosité pouvoit vous faire plaisir, & être de quelque utilité au public. Je fuis avec tout le respect & rattache* ment possible, MONSIEUR, A Paris çe r. Avril 1708. Votre très-humfle & trèr- obéissant serviteur. J. LI GNON. Zz6 Curiositìs Observation - . P liseurs avantages de cette nouvelle ma- nìere de provigner les Plantes & les Arbres • ï. La Nature a toujours affecté l’obí- curité & le secret dans ses productions, & il semble qu’elle a voulu que la voye qu’elle tient pour la formation des Minéraux , des plantes & des Animaux, fut tellement inconnue aux hommes ; qu’ils doivent se contenter de ce qu’elle produit, sans jamais songer aux ressources, qu’ils pourroient attendre de l’arr. C’est pourquoi les Philosophes n’onc point hésité d’appeller les lieux destinés à la propagation des trois familles du monde élémentaire, l’impénétrable sanctuaire de la Nature. Abditi naturte re- cessus : naturte lactarium. Mais par notre nouvelle maniéré de provigner les plantes, or a le pla'sir de voir dans une fiole pleine d’eau , la Nature agir à découvert. Le désir qu’elle a de ne pas demeurer stérile, & fans action, lui fait trahir son secret... II est certain que la curiosité trouvé bien son compte dans cette végétation par la seule eau. On considéré là à loisir la sagesse infinie sur ra Végétation - . 337 infinie du Maître Souverain, qui a formé des Loix & des régies que la Nature ne viole jamais. D’abord c’est une petite racine qui paroît, les feuilles ne viennent qu’après ; il faut de la nourriture pour entretenir ces feuilles naissantes : auílî la nature commence-t-elle par former les organes , qui doivent leur communiquer le suc nourricier. Franchement la vue de ce petit spectacle, renfermé dans une fiole , transporte bientôt i’esprit vers la suprême Intelligence, qui pose pour baze de toute cette admirable œconomie , une matière brute , & incapable de se mettre d’elle-mê- me en mouvement. S. Antoine , qui prenoitdans les spectacles de la Nature, le sujet de ses méditations , avoit-il une spiritualité mal entendue ! Certes il ne pouvoit puiser dans une plus riche íour- ce les motifs de louer & de bénir le Créateur. II. Par cette nouvelle maniéré, on donnera à un arbre d’une bonne espèce une postérité nombreuse en peu de tems j en prenant feulement quelques bouts de branches qu’on mettra dans Une fiole, & qu’on placera dans un lieu bien exposé au soleil. Car enfin avec l’humidité , il faut indispensablement la chaleur du Soleil. C’est pourquoi lés I. Partie * P z;8 Curiosités philosophes appellent cet astre le grand ■Archée * le vrai feu de la Nature dont Vabstnce dans L’Hivérfatt que le tel bal - samique £r volatile, qui est l’aliment deS plantes, est tellemement fixé par le froid, qu’il ne peut se fermenter & se mettre en mouvement. De-là vient le triste engourdissement où l’on volt toute la Nature dans cette affreuse saison. La chaleur anime les corps , 6 c le froid les tue, ou suspend toutes les fonctions de la vie. Sol varìat circuitusuo qu& terra rias cuntur * dit Platon / Lib. xxïij. CratyU pag. 318. II donne la vie à tout ce qui naît de la terre. C’est lui , dit Levinus Lemnius, qui fait germer les semences & meurir les moissons. Solis operâ pr dont il y a des ouvrages fi curieux daù s sub ia Végétation. 335 ) les Recueils Curiosorum natura , recommande cette eau nouvelle avec beaucoup d’instance. Sed aqua renovandasepe ejî. S’il avoit songé combien ces expériences peuvent être utiles au Jardinage, il auroit tout fait: car enfin de )a part on petit dire qu’il a beaucoup perfectionné cette nouvelle culture des Plantes. II s’en promet des miracles ; mais il faut que ce soit lui qui parle. Le fille des Chimistes est d’un brillant inimitable. Il faut avouer dit il., que le R.P. J. Fabri philosophe d’une maniers solide. 11 soutient qu’avec l’eau , & la chaleur du Soleil, on peut nourrir , faire végéter & fleurir toutes sortes de plantes dans des fioles'de verre , y faire pousser les plantes étrangères, leur faire porter des fleurs & des fruits quatre fois par an , pourvu qu’on les conserve contre les insultes du froid , & même ressusciter des plantes mortes. II y en a qui doutent de cela , mais moi, je n’en doute nullement. L’année derniere, je fis une belle épreuve, d’après Borellus , & qui me donna beaucoup de satisfaction. Je n’avois jamais crû que des plantes eussent pû se nourrir avec de Peau seule , & je ne le croirois pas encore, si je n’a- vois expérimenté durant six mois, qu’en mèttant dans des fioles de verre pleines P i; 340 Curiosités d’eau, des petits rejetions de Basilic, ils y ont fait des racines , poussé des feuilles, & donné des fleurs. Outre la chaleur du Soleil , il faut avoir un grand foin de renouveller souvent l’eau : Séi aqm renovanda stepe est. Ce qui me fait croire que l’eau & les irradiations du Soleil suffisent pour la nourriture des Plantes. Quare credendum est abaere j & aquâ nutrimentum capere. Le docte Liba- vius , fait mention d’une plante dont la graine a germé fous l’eau dans une fiole de verre. Frey parle d’une Tulipe venue d’un Oignon mis pareillement dans seau. Mais il faut voir ce que dit un Auteur Prançois ( Planis Campy ) dans fa petite Chirurgie , chap. 22. Si je vis l’an qui vient, ajoute Baìduinus, mon cabinet deviendra un Jardin. Je prépare un grand nombre de fioles de verre , où j’aurai toute Tannée , des Violettes, des Roses , 'des Narcisses, des Tulipes, des Giroflées, & toutes sortes d’autres fleurs que je veux rendre immortelles. Comme le íel est le baume de Feau , fans lequel elle neíé conservèrent point, & ne pourroit nourrir les plantes, je préparerai ce sel & cette eau, d’une maniéré qui donnera l’immortali- té à mes fleurs. L’oeil mortel n’a jamais vû ce que je ferai, & il n’y a point sur la Végétation. 341 d’homme vivant qui le puisse faire, à moins qu’il n’aitlû ma Flore immortelle : Kisi Flora nostka inspecta semper VIVA. Miscellan • Cu ì'iosor. nat . 1674. de virtutíb . Aari. cap. xìj. pag. 160. Cela enchante. Véritable- mant il y a du bon là- dedans ; mais je ne Voudrois pas répondre du tout II est plus assuré de compter avec M. Ghiarefchìus ,parce qu’il n’avance que ce qu’il a dé ja exécuté. II a tourné ses expériences tout-à lait du côté de la germination des graines. Et cette manœuvre-' là ne laisse pas d’avoir son mérite. II est bon que chacun ait son objet particulier: c’est par-là qu’on perfectionne la Physique. Monsieur Ghiarefchìus , en philosophant sur les graines, a découvert une nouvelle maniéré de les faire lever, qui fera d’une grande utilité pour les graines exotiques. On fè passera fort bien de Tattirail, & de l’embarras des couches &c des cloches. On ira même plus vîte par la germination dans les fioles, comme on le peut voir par ses expériences. Je n’ignorois pas, dit M. Ghiarefchìus, qu’il y a des plantes , qui n’ont nul commerce avec la terre ; mais je savois auífi que ces plantes, qui font la Cuscute, le Gui-de-Chêne, le Lierre, &c. le nourrissent sur des Arbres, qui tirent P iij 342 Curiosités de la terre leur aliment. Mais de plus, je íçai à présent qu’on peut élever des plantes de graine^, fans qu’elles empruntent rien de la terre, ni par elles- mêmes , ni par la médiation d’aucuns arbres. J’en fuis assuré par mes expériences. J’ai commencé par les plantes imparfaites , comme font les Champignons. Je mis au fond d’un vaifleau l’o- zier qui couvroit une bouteille de verre , je mis dessus quelqes petits morceaux de Champignons fans aucune terre : j’arrofois le tout d’un peu d’eau tiède. En douze jours , il fe forma de petits Champignons fur cet ozier. Leur tige étoit grosse comme une plume à écrire. Ils continuèrent de végéter tres-bien. On ne peut être plus content que je l’étois. A cette épreuve, qui ne m’avoit pas mal réussi-, j’en fis succéder d’autres, qui ne font pas moins curieuses. Je mis, dans le même vase & fur le même , ozier des Fèves, des Poix, du Froment , du Ség'e, du Bled farazin , de la , f raine de Concombre, de Melon , de | ènoiiil, &c. En peu de tems tout cela ; germa avec beaucoup de facilité. II y eìi J eût quelques-unes plus diligentes que les autres à faire leur devoir. Mais enfin aucune ne résista aux douces sollicita- sur la Végétation. 345 tions de l’humidité jointe à la chaleur du Soleil. A la vérité le fénoiiil, le Bled sarazin, le Millet ne passèrent pas la hauteur de deux pouces. Tout le reste monta deux ou trois fois plus haut : là Te borna l’espace de leur vie. Ces tendres plantes se flétrirent, & puis moururent. II n’y eût que les Poix chiches, que je retirai de-là, & que je transplantai dans un pot plein de terre, oû ils fleurirent, & montèrent en graine avec tout le succès possible. Entr’autres choies,j’observai que deux Fèves, dont chacune pesoit dix grains, avant que d’être mises en lieu de germination, pesoient soixante-douze grains - chacune, après qu’elles eurent germé & poussé. Cet accroissement ne peut êrre attribué qu’à seau commune, puis- qu’elles n’avoient aucune communication avec la terre. L’expérience que Van-Helmont a faite fur une branche de Saule, & celle de M. Boy le fur un Melon des Indes, que ces deux Sçavans avoient fait végéter par les seuls arrose- tnents dans une terre qu’iìs avoient pesée , & dont ils trouvèrent ensuite le tnême poids, ne démontrent pas si bien que seau feule peut suffire pour saccrois- sement des plantes. Car enfin dans leurs expériences, on peut toujours soupçon- 1 344 > Curiosités ner que quelques petits écoulements de corpuscules terrestres & salins y ont eû < part.. ( Plus mes essais , ajoûte M. Ghiares- < chìus , réuístssoient, & plus mon imagi- ì nation s’échaussoit , & me suggéroit i des maniérés plus ingénieuses , pour épier jusqu’où la Nature peut aller, par la seule voie de l’eau , dans la végétation des plantes. Je m’avisai de mettre au fond de mon vaisseau , de la sciure de bois bien sec, parce que cette poudre de bois est plus propre à conserver long-tems l’humidité , & à permettre aux racines naissantes de s’y facilement insinuer. Dailleurs pour les arrosements je ne me servis plus d’eau commune: j’employai une eau , où j’avois dissous différens sels. je m’apperçus bien - tôt que tous mes petits foins n’étoient pas inutiles. Je remarquai une force dans mes jeunes plantes , qui étoient parées d’un verd vif & vigoureux ,quejen’a- vois point vue dans mes essais précédents. Trois Fèves surtout avoient crû d’un pied & demi de haut '.elles portoient des feuilles & des branches toutes belles, & donnèrent des fleurs un mois durant : & si les nuits froides n’étoient point survenues, je me promenois de manger des fèves nouvelles au mois de sur la Végétation - , zqy Hovembre. ABa Erudit. 1688. pag. <3.83. Tout ce détail n’ennuie point. Les Curiosités de Physique font amusantes , quand même on en demeureroit là. Mais certainement voilà la Nature dé- celée. Elle nous a' laissé croire durant plusieurs centaines d’années , que les plantes ne pouvoient naître Se fe nourrir que dans la terre ; Se nous fçavons aujourd’hui parfaitement, qu’à la place de cette , mere universelle des Végétaux , on peut substituer Peau comme une excellente nourrice , à laquelle on peut sûrement confier la naissance S c la nourriture des plantes , surtout jusqu’à un certain âge. II faut en estet consentir, pour le bon ordre, que la terre revendique ses ensans , quand ils font hors de l’enfance, asin de les tirer d u seul usage de l’eau 8c du sel, comme d un régime trop austere , 8c de leur communiquer le délicieux Sc solide aliment de ses sucs nourriciers. Mais après tout, voilà un secret infaillible pour faire germer promptement les graines , .les noyaux , Sc les fruits des Pays étrangers, Sc qu’oti a tant de peine à déterminer à la germination par la voie des couches de fumier , Sc des cloches de verre. Outre futilité qui en va revenir au jardinage , rien ssest plus agréable que ces petites- P v 34^ Curiosités expériences. II n’en coure pas cinq fols? pour s’y divertir un Eté tout entier. Il n’est pas besoin d’avoir étudié des cahiers de Philosophie, pour suivre ces charmes innocens de la plus belle Physique. Là, tous les hommes font de niveau. Ces petits jeux de la Nature font à la portée de tout le monde : chacun y peut prendre part, & faire, des fenêtres de fa chambre , un jardin fans terre. III. Un troisième avantage de cette méthode , c’est qu’on pourroit faire en France des transplantations de ces plantes étrangères, que nous n’avons encore regardées, que comme i’ornement des Cabinets des Curieux , ou l'objet du commerce des Droguistes. Quelle utilité n’en reviendroit-il point à la Nation, s’il nous arrivoit de faire réussir chez nous ces plantes dont nous achetons íì cher les écorces , les bois, les gommes , les feuilles , les racines, & qu’il- faut aller chercher au milieu de tant de hazards dans l’Orient &. dans l’Occi- dent ! Quel profit n’est il point revenu aux Portugais d’avoir transplanté chez eux les Orangers de la Chine ! Par le moyen de leurs Oranges ils tirent des sommes immenses d’or & d’argent, de France , d'Angleterre T de Hollande, &c, II faut conmher là-dessus la sayan- sur la Végétation. 347 te histoire de la Société Royale de Londre. Par ces Transplantations J dit i’Historier.,o« poúrroitse procurer des avantages prodigieux .Les Orangers de la Chine, qu’on cultive depuis peu en Portugal, attirent de la feule Ville de Londre un grand revenu aux Portugais. La Vigne du Rhin qu’on a transplantée dans les Canaries, a produit un jus beaucoup plus délicieux , & a fait qae les rochers & les sablons de ces Iíles brûlées par le Soleil , font devenus un des Cantons de la terre le plus riche qui soit au monde. On peut auííï alléguer un exemple de ce qui est en état de réussir à merveilles. La Virginie , ajoute l’Historien , a déja produit assez de foie pour les habits de notre Roi : & il pourra arriver dans la fuite qu’elle fournira des draps à la plus grande partie de l’Europe, & un trésor assuré à nos Rois. En essèt, si les Vers à foie y réussissent, comme on n’en doute point , le profit en fera inconcevable. On le peut conjecturer par le nombre des caravanes & des grandes villes de la Perse ^ qui font entretenues par la feule manufaéfure de la foie, & par les prodigieux revenus que ce commerce amene dans les Doiiannes du Sophi. Part iij * Se£l. xxvìij.pag . 477. Voilà les Réflexions de P vj 348 Curiosités M. Thomas Sprat, auteur de cette histoire. Heureuses îes Nations qui ont de tels Philosophes , dont les études ont toujours pour objet , non point des idées creuses, des tourbillons imaginaires , des atomes vagues , des Elémens fantastiques ; mais Futilité de FEtat, l’abondance & la félicité des peuples^ Je ne sçautois m’empêcher de dire qu’il y a dans ce seul raisonnement de M. Thomas Sprat plus de bonne philosophie , que dans toutes les contemplations oiseuses de Descartes & de Gassendi. Ceux qui ont un peu à cœur le bien public sont charmés , quand ils voient des savants, & des savants de condition Rappliquer à procurer les commodités de la vie, & Fabondance dans leur pays. C’est ce qui a fait qu’on a reçu avec tant d’éloges en Angleterre , le Livre intitule : Sylva & Pomona composé par M. Evelin de la Société Royale de Londre. La premiere partie de son livre tend à enseigner la maniéré de cultiver & de conserver les Bois , les Forêts f afin que Fon ait toujours en Angleterre beaucoup de bois à bâtir, & de bois à brûler. Ce qui est, dit F Auteur,, d’une conséquence infinie pour FEtat, où le bois. pour faire des. Navires & des. | StJR LA VÉGÉTATION. 44^ Maisons ne doit jamais manquer. Sa Pomone excite les Angloís à planter des Pommiers pour avoirdu Cidre. Parcs moyen , dit M. Evelin , nous aurons chez nous une liqueur plys conforme à notre tempérament , & même plus douce & plus agréable que plusieurs vins qu'on transporte en Angleterre, & quson. ne sauroit boire sans sucre. Pour faire ce Cidre charmant, il saut moins de peine, moins de tems, moins de frais, moins de personnes, que pour la culture des Vignes. Et à l’exemple du Roi ( Charles II. ) qui, dès les premiers jours de Ion rétablissement, fit planter en beaucoup d'endroits un grand nombre de Pepinieres & de Pommiers plusieurs personnes considérables ont fait la même chose, & jouissent déja du plaisir, de boire cette salutaire liqueur, qui les dédommage délicieusement de leurs- frais & de leurs travaux. Ainsi nous allons voir dans peu nos campagnrs devenues des Champs Elifîens. E'Angleterre fera les Ijles fortunées , les-Jardins des Hefperides. Quand je regarde ces porm- mes jaunes, & meures dans nos Pommiers , il me semble que je vois les Pommes d’or qu’Alcinoiis cultivoit dans: fille de Corfou. Ces Pommes d'or font une fable ; mais le savoureux Cidre que 350 Curiosités nous commençons de boire en Angleterre , est le suc précieux des fruits réels & charmans de ces arbres inestimables , que nous avons íçù transplanter de Normandie en Angleterre- Et tùm re vtr.i merebtmur vêtus n ■ menFortunatarunun.su - larum_, sir hortorum H.fperidum. AB. Phi- losoph. Novemb. 166p. Tom. v. pag. 337. Si nous sommes froids Sc indolens fur nos intérêts , il y là de quoi nous réchauffer & nous donner de l’émular tion. Rien ne fera plus facile que de transporter les Arbres curieux ou utiles d’un pays à l’autre , d’Asie même en Europe. II ne faut que des bouts de plantes, qu’il est ailé de conserver dans de la mousse, ou dans des herbes humectées, même d'un peu d'eau de mer, adoucie avec de l’eau commune. Ces bouts de branches pouffent des racines à merveilles par la végétation dans la feule eau. J’en dis autant des graines, des noyaux, & des 'ruits. L’eau est un merveilleux dissolvant, & très-puissant pour ouvrir le sein des germes , qui renferme les plantes. IV. On n’acheveroit pas , si on vouloir décrire toutes les utilités , & tous les agrémens de cette nouvelle maniéré de multiplier les plantes. Les Arbres SUR LA VÉGÉTATION. 35T portent plutôt des fleurs & des fruits comme nous l’avons vû dans le petit Grenadier des Indes, qui, trois mois après fa formation , se trouva orné d’une belle fleur. Si on a vu des greffes donner des fleurs & des fruits dès la premiere année . cela eíì rare, & ne fait que les affoi- blir. Mais quand même les greffes fruéti- fieroient fi- tôt, ne faut-ií pas élever des arbres propres à les porter. Ce font des longueurs dont ón est quitte par notre nouvelle méthode, qui n’a rien d’embar- raflant, & où tout est facile & agréable. II ne me reste plus qu’un mot à dire r c’est que s'il étoit possible d’avoir & de conserver de Peau de pluie pour remplir les fioles, le succès en feroit plus beau , parce que Peau de pluie est imprégnée du Nitre de Pair. C est une eau pure & féconde , que les plantes boivent avec plaisir. Vitruve, qui étoit aussi íçavanr dans la Physique, que dans les Mathématiques , préféré Peau de pluie à toutes les autres, i. parce qu’eíie fort des nuées enceintes des vertus séminales que les vapeurs &c les exhalaisons ont élevées de la terre & de la mer ; & ?. parce qu’avant que de tomber fur la terre, elle est filtrée au travers de Pair dont elle imbibe le Nitre , qui la rend féconde» 3s2 Curiosités Ex imbribusaqua falubriores habet vìrtuttt .. per aeris exercitationem percollata pervenit ai terram. DeArchiteff. Lib. vii)- cap. 2. Au reste je n’hésiterois pas à mettre un peu de Nitre dans seau de la fiole : & quand je ferois des expériences fur des branches, des graines, ou des noyaux de conséquence, j’y jetterois un peu de Sucre : c’est un sel balsamique, qui peut utilement adoucir ce qu’il y a peut- être ; de trop vif dans le Nitre. En un mot J nous avons vu que M. Ghiarefchius mêloit quelques sels dans l’eau , pour avancer la végétation , Sc que M. Dig- by mettoit avec le Nitre une matière propre à le rendre plus amiable. II est maintenant aisé d’enchérir sur tout ce que nous avons dit, Sc de perfectionner ce que nous ne donnons, que comme une légere ébauche. Qui connoîtra l’enchaînement des choses supérieures avec les inférieures; celui là pénétrera dans tous les plus grands mystères de la Nature, dit un savant Arabe. Qui fciverit catenam connec- tentem fuperiora inferionhus hic myflmc- rum maximum penetrabit. Algaziel- SUR LA VÉGÉTATION. ZpZ Chapitre XII. Cette maniéré de multiplier les Plantes , par le moyen de Veau , ejl sondée fur la Physique desplus anciens Philosophes , êr qui a été renouvelles par les Savans du derniQV siécle. O Uoique l’Ecriture-Sainte ne nous soit pas donnée pour nous faire des Philosophes, & que nous y devions plutôt chercher la science du salut, que la connoissance des choses naturelles, il est pourtant du devoir de ne point s'é- loigner de ses paroles & de son sens, quand nous expliquons les phénomènes de la Nature. II est dit dans la Genèse, que Dieu a créé le monde en. six jours : je m’en tiens la. La foi parle, il faut que la raison se taise. II est rapporté que la Lumière sut faite le premier jour. Rien ne peut me détacher de cette Parole adorable. Point de raisonnemens. C’est pourquoi je rejette fans façon une opinion , qui pose que la Lumière ne fut point faite ctabord , parce que la lumière nies qu’unesuite du Soleil „ com- 35*4 C ifs rosrxÉs me Le Soleil rieft qiìunefuite de la division de la matière J £r que la division de là matière nef elle mime qu unesuite du mouvement local. II y a de Fesprit là-dedans» mais je ne m’en accommode pas pour cela* II faudroít auparavant concilier ce raisonnement avec l'histoire de la naissance du monde. Or jq ne vois pas que cette conciliation soit saiíable. Poprquoy ! C’est que bien loin que la lumière soit une suite du Soleil, il est dit formellement dans la Genèse , que la Lumière fut faite le premier jour & que le So- Lil ne fut fait qu’au quatrième. Si les Manichéens qui combattoient st chaudement la Genèse , avoient eu connoissance de la distinòtion des Etres substantiels Lr des Etres modaux , ilsl’au- roient bien fait valoir contre saint Augustin. Mais heureusement pour ce saint Docteur, le Cartésianisme étoit encore errant avec ses trois Elemens , & ses tourbillons dans les espaces imaginaires. Ces Hérétiques n’auroient pas manqué d’accuf'er Moyse de renverser l’ordre des choses, en mettant la création d’un Etre modal^omme la Lumiere> trois jours avant la création du Soleil. dont elle n est qu u - neJuite. II est vrai que saint Augustin Lur auroit répondu, comme il a lait en d autres rencontres, qu’ il nous fera t ou- SUR LA VÉGÉTATION, jours glorieux de croire ce que Dieu a à; & qu’il ne nous fera jamais honteux de ne pas comprendre tout ce qu’ii a fait ; & que quoique notre raison ne fût pas assez éclairée pour répondre aux difficultés qu’on nous objecte, notre foi Froit toujours assez ferme, pour s’en Bloquer. Hœc £r fi ratio refutare non pof- J?t ; fides tamen irridere deberet. Cont. Faust. Lib. xxxiij. cap. 6. A s’en rapporter au Texte de la Genèse, il semble que toutes choses ont été tirées & formées de l’eau. Voici les Paroles saintes, v. i. Au commencement Dieu créa te Ciel & la Terre. 2. La Terre ètoit informe & toute nue ., les ténèbres cou- Vr oient la face àe l’abyme j íir C esprit de Dieu étoit portéfur les eaux. H. Or Dieu dit j que la lumière soit faite J & la lumière fut faite.... 6. Dieu dit auff ^ que le firmament soit fait an milieu des eaux... ô* î" H sépare les eaux T avec les eaux. ...p. Dieu dit encore * que les eaux qui J'ontfous Ciel fie rassemblent en un seul lieu j que t élément aride paroisse & cela fefit ainsi ... 20 . Dieu dit encore ^ que les eaux produisent des animaux vivans qui nagent dans seau , 6r des oiseaux qui vo’ent fur la terre. Genèf chap. i. II fe présente d’abord à l’efprit, que l’eau est le sein d'oà Dieu a tiré toutes ch lement qu’il y avoir parmi les Egyp- L Partie. Q z 62 Curiosités tiens, un Sacerdoce établi pour honorer l’eau; & que toutes los cérémonies tendoient à faire comprendre que toutes choses tiennent de l’eau ce qu’eiles font. Qi^iSacerdotia gérant moribus/Egy- ptiorum ojieniunt orruus res à tiquons po~ tefiate. con/ìjtere . Pnefat. líb. o. Les Egyptiens avoient fans doute appris du Peuple Juif, captif si long-tems parmi eux, que tous les corps du monde élémentaire avoient été tirés de l’eau. Cette opinion a été renouvelles dans ces derniers te ms , & démontrée pat des expériences qui auroient bien rassuré les Anciens. Nous avons des Chy- mistes qui se vantent de pouvoir par art tirer de l’eau des minéraux, des végétaux & des*animaux, & de donner de nouvelles peuplades à ces trois familles de la Nature. Rien n’est plus capable de prouver que toutes ces choies ont été originairement tirées de l’eau dans la création , que de faire voir par des expériences confiantes, que l’induíìrie des hommes peut parvenir à les en tirer encore aujourd’hui. t II eit de notoriété publique , que Pa- racelie a adopté le sentiment de t haies , & qu’il se l’eít rendu très-familier, com- j me on le voir dans ses ouvrages. Robert Fíud le fait valoir lans Ceífe. sur la Végétation. En exphquaut le verset 9, du premier chapitre de la Genèse, il dit que les Eaux quijont fous le Ciel , sont l’élemefit Catholique', c’est-à-dire universel, dont les autres élémens font tirés. If cite là- dessus un axiome des anciens Philosophes : VEau efl la mere des Elemens : puis- qu’elle estTElément Universel qui renferme tous les autres : Aqua efl mater ele- rnmtoriim * cum reverâ jìt unum Cathor licum elementum , in quo omniài Philo- soph. Moysaic. sect. 1. lib.iv. c. y. p. 34. Van-Helmont a passé du raisonnement à l’expérience, pour s’assurer que sEau est le principe matériel dés plantes. C’est ce poìns particulier qu) nous intéresse ici. Son expérience est belle ôc curieuse. Expérience de Uan-ìielmont. II prit 200 livres dè terre , qui avoit été bien desséchée dans un four. II la mit dans un grand vase-de terre; & planta api milieu un Saule qui pesoìt cinq livres. Pour qu’ii n’entrât aucun corps étranger dans ce / vase., il le couvrit de fer blanc tout percé de petits ^ous., afin de pouvost arroser cette ter- ts. Au bout de c ; nq ap$-, il arracha l’ar- Ere qui pèsoit eent foixante-neuF livre*- 3^4 Curiosités &. trois onces, fam compter la dépouillé des feuilLs qui'étjdíênt tombées durant les quatre Automnes. Ayant derechef fait lecher la terre, il trouva que son pyids n’étoit diminué que de deux onces. Voilà donc cent soixante quatre livres de bois, de racines , d’écorce, qui se sont formées d’eau feule. J’ai conclu de-ià , dit Van-Helmont que tous les Végétaux tirent tout ce qu’iís font du seul élément de ì’eau. Omma úerà végéta' lilia immédiate & materialiter exsolo aqu 4 elemento prodire hdc mechanicâ dedici ... « librœ ergo 164. lignicorticùm & radicum exsolâ aqiíasurrexerunt. Complex. atq. JVÍist. Element. fìgment. $. ZO. pag. 68. Ce n’est pas ìà tout. Van-Heimpnt prétend , qúsoútre leS plantés, on peut tirer des Marchaíìtes, des pierres, des métaux , & même des animaux, du ! seul éîéàht de l’eau. II s’eíl expliqué hautement dans l’endroit.que j’ai cité: & ailleurs il revient avec tant dé complaisance a'ce.systême, qu’il est aisé de juger, que lá Philosophie de Thalés, est la Philosophie favorite de Van-Helmont. Sic totus lapis ex aquâ K. z 1. Pïsces ù“ òmnïs pingùedo ex solâ aqui jïínt § ; 2. II n’héfíte/point là-deslus, il allure franchement que toutes les Pétrifications E c’est-à-dire , les bois, les os. sur la Végétation. 3 6f qui deviennent pierres, dans certaines faux, ne font pas autre chose,' qû’une tau fixée-,- épaissie, transmuée, coagule , corpori-fiée. II ne tient pas à lui qu’il ne prouve fa Physique par le Texte de sEcriture-Sainte. Voici comme il explique les deux premiers versets de la Genèse. La terre, dit-il, est.appellée kc>ute nue , & toute vuide^ parce qu’elie n’avoit alors ni minéraux, ni plantes, ni animaux. U Esprit de Dieu était por- t é sur ces eaux. Ce' n’étoit pas, ajoute Van -Helmont, pour s’y repoíer, ni Pour avoir le plaisir de nager fur cette v aste étendue d’eaux, mais c’étoit afin âs leur communiquer une fécondité ptopre à produire les trois familles des minéraux , des végétaux , & des animaux dont il íalloit peupler la -terre. Alors l’Efprít de Dieu, ce Spiritus Do* ini qui repícvit orbem'terrarum pfodui- fit toute cette riche diversité de Créatu- rg s qui remplissent ce vuide de la terre, Hue sEcriture marque- si formellement. Lithiajì j cap. 1 . ss. f. Paliissy distingue deux sortes d’eaux , tQ utes deux cependant unies intimement Ensemble, & qu’il regarde comme le simd, d’où font sortis tous les êtres ma- dans un e les Dialogues. Tu me diras ce que tu Q iij ^tiels. Voici comme il parle I z§6 Cu riosités voudras; mais si est-ce que, quand vi auras bien examiné toutes choses par les j effets du feu, tu trouveras mon dire véri- ] table, & me confesseras que le commencement & origine de toutes choses, est i l’eau ; l'Eau Générative : non pas l’eaU I commune, ma s seau qui cause la germination de tous les arbres Sc de toutes les plantes. Ce nest pas l’eau commune , quoique íans elle nul arbre , ^mile plante, ni les Hommes, ni les animaux ne puissent vivre ; mais c’est quS parmi seau commune, il y en a une autre que j’appelle Germinative pour les plantes , Congélative pour les minéraux > Générative pour les animaux, fans laquelle nulle chose ne pouroit dire: J esuis> C’est elle qui fait germer tous les grains Sc toutes les graines, qui soutient & entretient les arbres & les plantes jusqu’à la fin : & même quand leur fin Sc des- truésion est survenue par le feu, cette eau germinative se trouve dans les cendres. Des Métaux &" Alchym. pag . 172* &- 173 - De Rochas a fait plus qu’aucun Philosophe , pour la démonstration du système de Thaïes de Milet. II a tiré paf art, du seul élément de l’eau, des minéraux, des plantes, & des animaux, & tout cela plein de vie Sc d’action. Il sur la Végétation. 567 tfy a qu’à Fécouter. S’il dit vrai, ja- Lnais Philosophe isa mieux mérité qu’on l’honnorât d’une audience favorable. Ayant reconnu dit-il de si grandes « Merveilles par les opérations naturel- « les de l’eau, je voulus lavoir ce qui « s’en pouvoir faire par art, en imitante la Nature. » C’est pourquoi je pris cfe l’eau que je fa vois bien n’être composée ni mixtionnée d’autre chose que de cet ìlsprit de vie que Dieu a mis dans 1 eau à la création du monde. Avec une chaleur artificielle & proportionnée, je la préparai & disposai par Us graduations de coagulation, congélation & fixation, tant qu’elle fut convertie en terre, laquelle terre produisit des Animaux j des Plantes Gr des Minéraux . Je ne dis pas quels animaux, végétaux 8e minéraux ; c ar cela se réserve pour une autre occasion ; mais les Animaux se mouvoient d-’eux-mêmesj mangeoient, & ont produit leur semblable ; Le par leur résolution ou vraie anatomie que j’en ai faite, j ai trouvai qu’iis font composés de beaucoup de souffre, peu de mercure, de moins de sel. Les Végétaux germerent & produisirent léurssemblables. Les Miné- r aux commençoient à croître * Le s’aug- Mentoient, en convertissant une partie de la terre qui en a la disposition, en Q iiij 3. 72.104. II rapportequ'ayant eu de Flandre un oignon de Tulipe , iî le mit dans l’eau; & qu’en sept jours il poussa, & fit son chemin comme il au- roit lait en pleine terre. J’ai mis pareillement , dit-iì, dans de l’eau des racines de Poirée, de Bourache, de Raf, 57 S Curiosités fort dont j’avois coupé des feuilles. Erí moins de six semaines, elles poussèrent- des feuilles très-belles qui durerent jus- qu’au mois de Novembre. Sylv. Cent. y. n. 408. II est donc évident par ces exemples , que l’eau est le principal aliment des plantes, & que tout ce que ía terre fait, est ses racines contre la violence du froid & du ebaud. Ces Yvro- gnes si gras, dit-il, savent à merveilles par expérience, que l’ufage du liquida est tout-à-sait nourrissant. Expérimenta potatoribusprfffimo- Sylv. Cent. v. n. 411. Quoique les Pétrifications des plantes soient une destruction des plantes mêmes qui sortent de la famille des végétaux , pour entrer cn celle des minéraux , elles trouvent pourtant ici naturellement leur place ; & d’autant plus que toutes les pétrifications ont l’eau pour principe matériel. Certainement à considérer que ce font ordinairement des parties de plantes, comme les bois, les écorces, les racines ; ,ou desv parties d’animaux, comme les os fur quoi s’opérent le plus souvent les miracles de la pétrification , on peut dire que îa Nature dans ces petits jeux, où elle façonne si-bien seau en tant de maniéré > dégrade ces végétaux & ces animaux en les ^abaissant au rang des s tjr la Végétation. 377 íoíTìîles ; rr.ais quoiqu’il en soit, cornue les bois & tes os pétrifiés ne í'onc qu’une eau coagulée & fixée , ces raretés des cabinets des Curieux font autant de démonstrations du système de ceux qui tiennent que du seul élément de l’eau, on en peut tirer des minéraux. J’ai là-deslus la plus rare pétrification qui íoit peut-être au monde. Elle me fut envoyée du Ponteaudemer , dans le tems que l’on commençok à creuser un fossé pour former ce charmant Canal, qui conduit la mer jufqu’au pied des murailles de la ville. Cette pétrification étoit originairement un long bâton de Hêtre qui se trouva dans les fascines 1 , dont on avoir autrefois comblé ce fossé. C étoit là que l’eau Fa pénétré de ses sels, & que la Nature Fa métamorphosé de bois en pierre. Tous les caractères *du bois de Hêtre & de fa première nature, ont été respectés dans cette métamorphose. On y remarque aisément Fé- corce, les nœuds, les petites ondes qui paraissent ordinairement fur ce bois. Tout cela y est avec la derniere évidence : mais cé qui donne un relief merveilleux à cette belle pétrification , c’eíl qu’elle est rechaussée d’une veine métallique dorée qui s’y est formée, & qui s’y distingue tout-à-fait bien. Cette 37^ Curiosités veine d’or sait ià un bel ester. Elle semble n’y être placée , que pour faire honneur à i’opinion de ces Philosophes qui prétendent que l'eau est la matière universelle dont les métaux, les plantes & les animaux font composés. Nous avons vû que les plantes le nourrissent d'eau feule.: si nous avions bien cherché, nous aurions trouvé peut-être, qu’outre les poissons, il y a des animaux fur la terre qui ne mourroient pas, tandis qu’ils aurojent de l’eau. Bayle dans fa République des Lettres, dit : Je me souviens £avoir lu dans une hijìoire de Ca- nada, composée par un Moine ^ que les Sauvages de ce pays-là J pendant la famine où ils font souvent exposés ^ Je soutiennent j je nesçai combien de Jémaines par le seul usage de l’eau & du tabac. Février i68y. Tom.I. pag. 187. De quelque estime qu’on soit prévenu en faveur d’Aristote, il n’est pas possible d’employer fa Philosophie, pour expliquer le mécanisme de la Nature dans h végétation des plantes. C’é- toit véritablement un grand homme, un génie pénétrant & supérieur. S’il n’avoit point voulu trop innover, & mêler du sien dans la Philosophie, il suroît répandu de merveilleuses lumie- sur la Végétation. 379 tes fur les Ecrits des Philosophes qui l’avoient précédé. Si ce personnage aus- fi ambitieux que son Elève, ne s’étoit point mis en tête de primer en Philosophie , & de s’y faire une espèce de Monarque , en supprimant toute l’an- cienne doctrine pour établir le régne de ses nouveaux dogmes, il auroit rendu des services infinis , fur-tout à la Physique où il a tant gâté de choses pour avoir voulu marcher par de nouveaux chemins.. Le vol du jeune Alexandre, qui comme un aigle , parcourait & subjuguait toute s A fie, lui donna l’en- vie de faire dans les sciences le dégât que ce jeune Prince faisoit dans les Provinces de l’Orient, & de renverser toute fancienne Philosophie, pour en substituer une toute nouvelle. Hobbes dit que le Précepteur se gâta par Pexemple du Disciple, & q ts Aristote piqué & furieux de ne pouvoir dominer sur les affaires , comme Alexandre, il se retrancha à sonder une nouvelle domination sur les mots : Cepit opinior . Ar 'is- totelem libido quœdam pro authorkate fui J cum rerurri non pojset ^ verborum tamen cenjum paragenii. cap. 2. Logic, pag. 1 ( 5 . En.effet, comment, pour rendre intelligibles les mystères de la Nature, Zko Curiosités pourions-nous nous servir de termes affreux, & q son-ne p mr prononcer fans révolter le bons sens ? Dirai je dond avec Ls Péripatéticiens , que la plante fe nourrit-, parce qu’elle a une faculté nourrit i.rc* une faculté attraBrice* une fa- c u 1 té rctentrice coBrice excrétrice , ex- pultrice ? Ce galimatias des Ecoles Arií- toteliciennes & beaucoup d’autres termes aussi barbares, auroient peu contribué à me faire entendre. Har.nemann, un Savant de T Académie Curiosorum Natura a dit tout franchement : J’ai renoncé à la Philosophie d’Aristote, & à tout le Pé- ripatétisme, comme très-insuffifant pour donner une solide connoiísance des plantes. Ex Phihsophiâ Ariftotelicâ folìda eognitio philosophica Plantarum hauriri non potes J cum ea omnia involvat terminis logicis j & form. er qualit. fomniis. Me- thod. cognofç. lìmplic. Vegetab. pag. 116. II nous force bien d’en faire de même, pour ne pas envelopper les merveilles de la Nature dans des termes de pure Logique, & fous des qualités qui ne forment dans l'efprit.que des idées confuses. Les plus zélés partisans d’Aristote font contraints d’avouer que ces principes , en fait de Physique, ne font pas propres à éclaircir les plus simples phé- SUR LA VÉGÉTATION. 381 siomènes de la Nature. M. Deícartes ne Jpouvoit mieux faire que dé' les abandonner. Avant qu’il prît ce parti-là, plusieurs Philosophes avoient reconnu î’infuffifánce de la Philosophie de ce Prince du Péripatécisme. Chacun s%- percevoit bien qu’en suivant aveuglément ses traces, on ne tireroit jamais la Physique des horribles ténèbres dont elle étoit toute enveloppée. On ne res- íentoit que trop la nécessité d’avoir Une meilleure Philosophie. II y en avoir qui se plaignoient avec trop d aigreur de l’aveugle servitude oh l’on vivoit depuis deux mille ans fous le joug dam Philosophe payen, & pour qui les saints Peres avoient marqué beaucoup d’aversion. Quelques-uns tentèrent de faire mieux, & firent pis. D’autres plus sensés furent plus heureux dans leurs efforts ; mais fans éclat. La Philosophie de celui qu’ils attaquaient, étoit trop accréditée pour recevoir quelque atteinte de ces premiers coups. C'étoit s’en prendre à tout ce qu’ii y avoit de Philosophes dans toutes les Ecoles du monde entier, que de se déclarer contre les Ecrits d Aristote. On n’enseignoit par .toute la terre depuis deux mille ans, que fa feule Philosophie. La poss. filon étoit pour lui. Une vieille erreur ap- Z82 Curiosités puyée de la chicane, ne trouve que trop ^ de fins de non-recevoir. Trop heureux j íes nouveaux Philosophes, si les Aristo- téliciens-en étoient demeurés à rejettes ( les lumières qu’on leur présentoir Ils j ( passoient à des actions qui ne justifient que trop, qu’une erreur opiniâtre & , invétérée use sort cruellement de son , crédit. 5 D’un autre côté les adversaires d’A- ristote remuoient ciel & terre , pour décrier fa Philosophie. II y a eu des déclamations là-deíîus qui feroient rire» quand on les voudroit lire avec le dernier sérieux. II ne saut que voir comment Robert Flud se gendarme contre ce grand homme, pour comp-endre de quel égarement , & de quels excès sont capables les hommes & ceux mêmes qu! font profession de Philosophie, quand la machine de Fimagination est un peu dérangée par la prévention. Enfin Ro- bert Flud ne se contente pas de harceler Aristote à tout moment, de lui courir fus à la première fantaisie qui ! lui prend. II s’é'ourdit si sort, qu’cu- bliant que ce Ph osophe est un payen, il lui fait une guerre de Religion , fur ce qu’ii n’a point expliqué la t!dation du monde par le texte ce la .Genèse ; Sc de ce quìl n’a peint phisoso- j sur la Végétation. z8z Phé sur les Météores dans les term e de Job j & des Auteurs des Livres feints. A l’entendre parler , on croiroit 'binai entait iet- : de an- ien- oiit &> ’iri‘ ac' dtf e jeu 1 ail», nit* ,* êm { itif» ii y éà i las 5 s’il* ho í! . xéf ■r* d^ w SUR LA VÉGÉTATION. 387 l’on íe donnoit la liberté de rechercher la vérité dans les choses, plutôt que dans les écrits d’un homme comme les autres ; & même d’un payen, lequel est tombé dans tant d’erreurs capables de Hous distraire de plusieurs articles de la foi. Ses íectateurs cherchent en Vain si ce même Aristote a eu con- tioissance de la Création, qui est un des grands & principaux articles de notre créance ; vû qu’Aristote voudroit nous en priver, soutenant que le monde est éternel, contre les passages formels de l’Ecriture Sainte, & spécialement lors- qu’il veut prouver que rien ne se sait de sien , & qu’il a fallu qu’il y ait toujours eu une matière préexistente, pour établir son opinion sur l’éternité.01 heureux, & plus qu’heureux Esprits qui ^Vez recherché hardiment la vérité phy- ficale, fans vous asservir aux opinions d’un Philosophe payen ! O ! heureux Martyr saint Justin, qui avez fait un Livre exprès contre Aristote, où vous prouvez qu’il faut raisonner hardiment, dc avec toute liberté, en ce qui ne regarde pas la foi ! O ! heureux. Et Vous , docte Espagnole , Madame Catherine Olivia , qui n’avez point sait difficulté d écrire íurla Philosophie contre Aristote, &c. Des Principes 6r Ele- R ij z88 Curiosités jnens contr. l’opin . com. chap. iv.'pag. 28 /' Cette tirade est belle & bien sensée, mal* elle ya un peu loin. M.. Descartes parut heureusement dans le tems que tous les bons Esprits soupiroient, pour avoir une meilleure Philosophie que celle d’Aristote, dont il n’est pas possible de s’accommoder > lorsqu’on veut philosopher sensément sur les choses naturelles. Les Ecrits & M. Descartes ont été reçus dans le mon^ de comme on a coutume d’y recevoir même les plus excellentes choses, quand elles font nouvelles. Elle eut de puis" fans approbateurs, & des contradicteurs célèbres. II a ouvert la porte à la liberté philosophique, II a inventé de bonne 5 choses, il en a ramassé d? belles. II y * beaucoup à profiter dans íès ouvrage 5 » Ses lentimens cependant ne sont pin 5 aujourd’hui adoptés en entier par se 5 plus zélés partisans. II a des opinion 5 certainement fausses ; & en ce cas, il n ff mérite pas plus d’ê'tre ménagé qu’Aris" rote. II ne faut user de la liberté nattf" relie qu’ont tous les hommes de philo" íòpher, que pour parvenir à la vérit?' Je ne me fers point de ses trois éîs" mens p'our expliquer les Phénomènes é e ]a Nature ; mais il y a long - tem 5 que j’ai choifi la Philosophie Corpufi ÏUR Í.Á VÉGÉTA ?IÒ K. ZZLl ^stre, parce qu’elle est la plus ancienne 5 u i ait paru dans le monde ; comme je la ì montré ailleurs en parlant de Mos* c hús. Je dois à la lecture des ouvrages âe Milord Robert Boyle , l’affection j ai prise pour cette Philosophie. ~ es admirables Traité de Physique Justifient puissamment le choix que j’en ai fait, & la préférence que je lui aï ^nnée dans tout ce que f ai publié fur science naturelle; car enfin ce savane ^ laborieux Philosophe , en faisant re- Jl’vre dans ses Ecrits, Tancienne Pliilo— lo phie de Mojchus , est le premier qui a Ouvert avec la clef des Pores, & la clef Oes Corpuscules, le sanctuaire de la Na- * Ur e. C’est avec ces deux clefs qu’il a Pénétré avec tant de succès dans le sein, dans les causes & dans les propriétés o g s Mixtes, où tous les siécles passés Noient été si aveugles. II est certain stUe, par la doctrine des Pores £r du mou.- vernent des Corpuscules , on est en état .0 répandre de la lumière fur les maires les plus obscures de la Physique. II ne faut pas fe tìater de pouvoir *°ut démontrer. La Nature a fes mirais comme la Grâce. Dieu est adorais 6 par tout; & il est incompréhensible Q ans fes voies, quand il ne les manifeí- ^Pas. II y a de l’orgueil à attribuer au R iij 35>o Curiosités démon, ou à regarder comme fabuleux, ce qu’on ne comprend pas dans les pro- î diges de la Nature : mais enfin la Philo' * fophie des Pores & des Corpuscules» est astûrément la plus propre pour dé- s velopper les causes cachées de quantité 1 d’effets surprenans où les Principes des * Péripatéticiens ne sauroient être d’au- ' cun secours. Cette Philosophie est non-seulement plus ancienne que tous les Philosophes de la Grèce, où elle a été apportée pa s JWoschus , avant le fiége de Troye; mais même Empedocle l’a adoptée. C’est ainsi que Platon dans son Dialogue in- titulé ; Menon , ou de la Vertu „ le fait dire à Socrate. Selon Empédocle, n’y a- t-il pas des écoulemens de Corpuscule 5 qui se détachent des corps f.... N’^ a-t’il pas pareillement des Pores J qui font de petites ouvertures, par où, & dans lesquelles ces Corpuscules s’insi- nuent, &pastent;&deces Corpuscules» il y en a de proportionnés à ces Pores» & d’autres qui font plus grands, ou pluS petits ? Nonne defluxus quidamssecundùu 1 Em'pedoclem ^ à rébus manare dicuntur? • • * Sîc pori i id est > méat us in quos dr per quo 5 etiam defluxus hujusmodi manant ?. Ex defluxibus autem quosdamporìs quitus' dam congruere^ quosdam minores j aut j ores esse ? pag. 17. X, 0' 0 ‘ s ) í- té es í x- ìt ;s if is st i- ; f í c i t SUR LA VitîÉTATION. Z§I Pline admet auísi la Philosophie des Pores & des Corpuscules * qu’íl attribue 9 Platon, & dont il se sert pour expliquer les diverses sensations que les Corps impriment í ur les organes des sens. Ï1 y a, dit-il, selon Platon , un nombre infini de petits corps iubtils de différ tries figures, légers, rudes, branchus, ronds , & qui conviennent entr’eux, plus ou moins j selon leur volume & leur figure. C’est ce qui sait que les choses amères, ou douces, ne le font pas également à l’égard de tout le monde. Eft ratio subtilitatis immense à Platone des- fendens : corpusculis ; rerum levibus * sca- bris j angulojïs „ rotandìs ; tnagis aut minus ad aliorum naturam accedentìbus ìdeo non eadem omnibus amara , aut dul- *ia ejse. Hist. Nat. L. xxij. c. 2 au Griffon* M D C C. LIII. Avec Approbation G- Privilège du Roi^ C i- ' CURIOSITÉS DE LA N ATUR E ET DE L’A R T, $UR LA VÈGÉTAT10 N. •fo'ùrjlr’fo’fo'to’&tà SE CONDE PARTIE . la Pratique De l’agriculture ET DU JARDINAGE. Chapitre Premier, Ntavelles découvertes pour la multL plication du Bled & des autres grains. L y a des questions qu’ost agite fans cesse dans le monde , & fur lesquelles on ne , fait pas encore quel parti pren- re * On demande to\is les jours s’il y a Partie. A 2 Curiosités des Sorciers; c’est-à-dire, des gens qui j ont communication avec le Diable, & f qui font des choses merveilleuses par son secours. Les Savans qui ont traité de la Démonomanie , ont rapporté tant de choses fabuleuses fur le Chapitre de la Sorcellerie , qu’ils ont fait douter de J tout le reste. Ces Sorciers , qui montent fur un balai, & qui s’en vont par la cheminée au Sabat, où ils voyent, & adorent le Diable, sont des récits dont bien des personnes fort censées ne Raccommodent pas. Les ignorans d’un autre côté attribuent à Sorcellerie, tous leS j effets , dont ils ne peuvent découvrir les causes. Et entre les uns & les autres, f il y a les esprits forts, qui nient absolument qu’il y ait des Sorciers en com< tnerce avec le Diable La Pierre Philosophie, ou le secret de faire de l'or par art est encore trè$- souvent la matière des conversations. Quoiqu’il y ait bien de l’apparence ,qus personne n’a jamais eu ce secret , ô£ qu’on ne le trouvera jamais ; il y a cependant toujours dans le monde beau- coup de Soujleurs , qui sont persuadés » que cette benoifte Pierre n’est point une ; chimere. Cependant aujourd'hui , o * 1 1 est un peu revenu des magnifiques prouesses dç çes prétendus faiseurs dso r ’ SUR LA ViGÉTATrOK. Z 11 y a des Savans qui les apellent une Race crédule & menteuse : animal credu- lum j 6 r mendax. Ils font quelquefois a plaindre ; car enfin eux-mêmes, après, s’être étourdis de leurs idées flateufes , il arrive, selon le Proverbe Latin, que dans le tems qu’ils comptent d’avoir des trésors immenses, il ne leur reste que des Charbons : Carbones pro thefauro in- venimus. Ph&dr . Lib . 5 . Fab. 7 . Cela revient assez à ce qu'a dit un Moderne : qu’un chercheur de Pierre Philosopha- le , est un Animal, qui professe un Art fans règle , qui commence par mentir * qui continue par fe tourmenter, & qui finit par mendier. Ars Jìne arte * cujus prin-> *ipium mentiri, médium laborare ^ £r finis 'ftendicare. Franchement ceux qui s’imaginent qu’il y a un art certain pour faire de For, doivent avoir bien mauvaise opinio» des dépositaires d’un si précieux secret: ^ar il est des tems & des circonstances J °u il me semble que ces heureux confi- dens de la Nature devroient mettre la Main à l’œuvre, pour répandre fur leur Patrie, quelque chose de ces montagnes d or, qu’ils se vantent de pouvoir produire , quand il leur plaît. Je dis la même chose du secret de la Multiplication du Bled, J^estime que c’est A ij H. Curiosités «ne de ces découvertes, qu’on ne peut cacher fans crime , surtout dans de certaines conjonctures. Car enfin combien périt-il de’personnes dans Jes nécessités publiques , & dans la grande disette de Bled ! Pour soutenir qu’un homme peut garder pardevers lui un secret, qui met- troit l’abondance par tout, il saut auparavant prouver qu’il lui est permis de laisser mourir de faim un million de personnes à la nécessités desquelles il pour- roit remédier aisément, & sans qu’il lui en coûtât rien. Si non pavifii , occidifli , dit S. Bernard. Je ne crois donc pas qu’il soit permis A un Chrétien de faire mistere d’un secret , que les seuls sentimens de l’huma- jiité obligent de rendre public.Ceux d’en- tre les Payens, dont la raison est un peu épurée auroient horreur d’une réticence fi préjudiciable à la société des hommes* 11 est aisé de juger ce qu’en auroít pensé Cicéron par les choses qu’il a dites suk un sujet, qui revient assez à celui dons íl s’agit ici. Cas important admirablement décidé par Cicéron . | Dans le Livre des Offices , qu'o? peut regarder comme un Livre qui co^ r SttR t À VÉGÉTÁTÎON. y tient la plus pure Morale de la Nature, Cicéron propose un cas, fur lequel deux Philosophes Stoïciens font partagés, & qu’il décide ensuite lui-même. Voici le •cas. Dans une grande famine de l’Ifle de Rhode, un Marchand y aborde avec un Vaisseau chargé de bled, qu'il a amené d’Alexandrie. II íçait que beaucoup d’au- tres en ont chargé au même lieu, & qu’ils doiventarriver à Rhode bien-tôt après lui. Le doît-il dire ? ou peut-il n en point par~ ler,afin de mieux vendreson bled ? Sur cette question, deux Philosophes Stoïciens font de dissérens avis. Diogène croie que le Marchand s’en doit tenir à ce qui est prescrit par le Droit Civil, & qui con- fiste à déclarer, s’il y a quelque vice dans fa marchandise, & a la débiter sans fraude ; mais qu’au surplus, comme il est question de vendre, il lui est permis de profiter de la conjonéture, pour vendre son filed le plus qu’il pourra. J’ai amené ma Marchandise , avec beaucoup de peine, dc de hazard, dira le Marchand , je la Mets en vente , je ne la vends pas plus que d’autres , & peut-être moins qu’on ne la vendroit dans un tems ^ le bled seroit plus commun. A qui fais-je tort ? Quoi ! dit Antipater, ne devez-vous A iij 6 Curiosités pas faire le bien commun , & servir la société humaine ! N'est-ce pas pour cela que vous êtes né ? Les principes de la Nature, que vous avez en vous , que vous devez suivre , & à quoi vous devez obéir, ne vous disent-ils pas que Comme votre utilité eft celle de tout le | monde . celle de tout le monde est aujfi la | votre ? Comment pouvez-vous donc celer ; aux Rhodiens le bien qui leur doit arri- j ver?.Un homme a une maison,' j dont il veut se défaire , parce qu’elle s j beaucoup de défauts, mais qui ne font j connus que de lui. Elle est empestée, i & on la croit faine : II y vient des Ser- f pens dans toutes les chambres : Elle est bâtie de mauvais matériaux, & prête à tomber ; & personne ne fçait rien de tout cela , que le maître de la maison. > II la vend, fans en avertir celui qui l’a- ; chette . & la vend bien plus qu’il n’efpe- roit. N’est-ce pas un méchante action ? Sans doute , continue Antipater. Car n'est-ce pas ce qui s'appelle: Nepas re~ drejser un homme qui t'égare ; ce- que les Athéniens ont jugé digne des exécrations publiques ! C’est même quelque chose de beaucoup pire ; puisque c’est laisser tomber un acheteur dans un précipice, qu’il ne volt point, & qu’on lui cache de mauvaise foi : & que d'induire SUR LA VÉGÉTATION. 7 Quelqu’un en erreur, de dessein formé c ’est un crime sans comparaison plus grand, que de ne pas montrer le chemina un homme qui s’égare. Mais voici Diogène qui parle pour le Vendeur : Celui, dit-il, qui vous a vendu cette saison , vous a t il forcé de Tacheter ? Vous en a-t’il même sollicité? II s’en e st défait, parce qu’elle ne lui plaifoic pas ; & vous ne l’avez achetée, que parée qu’elle vous plaifoit. On volt tous les jours des gens , qui voulant vendre une saison à la campagne , font crier pudiquement : Maison des champs , bonne ^ bien bâtie , à vendre : Sc quoique la saison ne soit ni bonne ni bien bâtie, sts ne font pas pour cela traités de trompeurs. Combien moins donc en doit-on ^aiter celui, qui n’a dit ni bien ni mal ste fa maison s Lorsque ce qu’on vend e st exposé aux yeux de TAcheteur , & S u ’il peut y regarder tant qu’il voudra , °h est la fraude du Vendeur ? On est te- ntI de ce qu’on a dit ; mais non pas de Ce qu’on n’a point dit. A-t’on jamais ouï parler, qu’un Vendeur doive décou- Vr ir les défauts de fa marchandise P Et y ^uroit-il rien de plus ridicule, que de íaire crier publiquement : Maison em- ísstóe à vendre ? 11 faut enfin , conclud Cicéron, prononcer maintenant fur ces Aiiij 8 Curiosités questions : car c’est pour les résoudre , que nous les avons proposées, & non pas pour les laisser indécises. Je dis donc que le Marchand de bled ne doit point celer à ceux de Rhode ce qu’ilsait des autres Vaisseaux qui suivent le sien: ni ce Ven- ì deur, les défauts de fa maison à celui qui í Tachette. Je sai bien que de ne pas dire ce que Ton sait, ce n’est pas toujoiirs le celer ; mais c’est le celer , lorsque ceft une chost, ceux aVíZ Çlù nn traite , auroient intérêt de sç avoir, £r que ceft pour lejien propre qu on le leur cache• Or qui ne voir ! ce que c’est que de céler les choses dans de pareilles circonstances, & quelle forte dé gens en font capables f Ce ne font .pas aflûrément de gens ouverts , des gens droits & fans artifice , des gens bien nés, équitables ; en un mot des gens de bien : Ce sont des gens doubles * cachés j déguisés ^ trompeurs ^ malins , arti- ficieux. Lib.III. Offic. cap. 12. Gr IZ- J Quelle probité ! Quelle morale ! Quel Casuiste ! Quelle lumineuse doctrine parmi les ténèbres du Paganisme! Je voudrois que cela pût confondre ces A- vares & ces Usuriers > qui voudroient qu’il n’y eût de bled au monde, que celui qu’ils cachent dans leurs greniers; & qui trouvant plus de douceur à être les meurtriers , que les peres des p aU “ S UR L A VÉGÉTATION. p vres, font dans une perpétuelle préparation de cœur, de cimenter le bâtiment de leur fortune du sang des malheureux. Cicéron range ces sortes de gens parmi les scélérats, qu’on ne sçauroit trop mépriser. Mais saint Chrysoíiom© sait plus : après les avoir retranchés du> Nombre des homrties, il les place parmi les bêtes farouches & cruelles, & veut même qu’on les haïsse, comme des démons. Qu y a-til dè plus misérable * dit ce Saint, qu un riche qui defire la famine pour mieux vendre son bled? Ce n’est pas uit homme y d 1 est une bête farouche, ceftun dé- mon.Vidisti quomodo autem nonstnithomi- nesese homines , fedferas dœmones. Quiet enim hoc divitefuerit misterabilius , qui optât quotidie estefamem , ut ei fit aurum ! Ho- mil. 39. in 1. Epifl. adCorinth. Tout cela s’accorde parfaitement bien avec ces- paroles de l’Ecriture ; Celui qui cache store hled fiera maudit des peuples ; Qui abstcun~ dit frumenta ^ maledicetur in populis Pro-' Ver b. cap. H.v. 26. Si quelqu’un cachoit le secret de la multiplication du Bled , il mériteroit toutes les exécrations, dont l'Ecriture», les Peres de l’Eglile , & les Païens mètres chargent ceux qui cachent leur BlecL ìln bon cœur doit souhaiter que l’abondance soit par tout ; & s’il le peut » S io Curiosités saut qu’il la procure en tous lieux. Qu’il est doux de faire du bienmême à ses ennemis ! Je donnerai toutes les découvertes; que j'ai faites fur cette Multiplication íi importante. De tous les procédés que je propose, iln’y en a pas un qui ne soit bon. II y en a que j’estime , & que je présére'rois aux autres. Je le fais assez sentir, quand je les raporte, par le soin que je prends de les faire valoir, & de les justifier fur les doutes qu’on pour- roit avoir. Je n’en ai voulu négliger aucun , parce que les personnes un peu entendues fur ces matières, les compareront les uns aux autres, & choisiront le procédé qui conviendra le mieux à leurs terres , & aux commodités du Pays ; & peut être que de plusieurs, assez passablement bons , on en fera un très- excellent. Ces différentes maniérés de , multiplier le Bled, font de ces choses , qui fe peuvenr fans cesse perfectionner déplus en plus. J, MULTIPLICATION,: On prend un boisseau de Bled j on îe met dans un grand vaisseau de cuivre : on verse dejius cinq seaux d’eau. II faut s tr r t À Végétation. u faire bouillir cela fur le feu, jufqu’à ce Iue le Bled soir crevé, & que l’eau foie imprégnée du sel essentiel du grain. On passe cette eau par un linge& on donne aux Volailles le bled, pour ne rien perdre. Mettez dans une grande chaudière trois livres de Salpêtre , ou de Nitre, qui est la même chose ; & verfez-y votre eau emblavée, pour me servir de ce mot : ajoutez à cela quatre seaux d’é- goûts de fumier d’une basse-cour. Faites bouillir le tout. Le Salpêtre fe fondra. Cela fait , prenez une grande Cuve de bois , mettez-y la quantité de Froment , de Ségle, d’Orge ^ &c. que vous Voulez semer ; alors versez votre liqueur qui doit être tiède, & passer de quatre doigts au-dessus du grain, parce qu’il fe gonflera bien-tôt. Couvrez bien le tout, ®fin que la chaleur s’y conserve plus *ong-tems , & mette les sels en mouvement. Laissez-là votre bled vingt-quatre heures, afin qu’il fe charge de ces sels de fécondité, de ce baume de vie, & de ce puissant mestruë , ou dissolvant, tpd ne manquera pas d’ouvrir, de dilater & de développer les germes fans nom- ore, contenus dans chaque grain. Car et ifin c’est dans ce développement des germes infinis, que chaque grain de bled Avj 12 Curiosités contient , que consiste le grand méca>* nisme de la multiplication. Tirez le bled ,saites-le sécher un peut à sombre, & puis semez-le avec ménage; parce qu’il en saut un tiers moins qu’à l’ordinaire, pour charger les terres. ' II faut y ajouter de la paille hachée , I afin de pouvoir semer, sans se tromper, à pleine main. Ceux qui sont voisins de la mer n’auroient qu’à y ajouter un tiers de fable de mer. Par-là on porteroic j la multiplication beaucoup -plus loin, à j cause du nouveau sel qui est joint au 1 sable. i L’eau qui resté sert au même usage. Elle est bonne, jusqu’à ce qu’elle soit toute employée. Après tout, quand la fève monte, une pinte de cette eau au j pied de chaque jeune arbre, est un régal, qui lui fait faire merveilles : & cela ne gâteroit pas les vieux. Une Vigne s’en réjouiroit beaucoup , & rendroit ce bien-fait au centuple dans le tems des . Vendanges. Les gens un peu adroits iront loin ; âprès cette ouverture. II y en a qui n’ont pas encore achevé de lire ceci, & qui se promettent déja bien d’avoir des Choux pommés d’une grosseur monstrueuse. A moins que d’avoir l’esprit bouché » on devine bien tout ce que je pourrois Touffe Ji' JÌ/c. multiplie StTR LA VêGÊTATîOtf. dire là-dessus. Irai-je faire ici un détai! de toutes les herbes potagères , qu’on rendra par ce secret , plus sortes, plus belles, plus délicieuses, & plus salubres? Les Fleuristes ne «'endormiront pas. Ce font gens d’esprit, & qui devinent à demi mot. II ne tiendra qu’à eux de faire des prodiges. II y a encore plus,que touc cela. La vertu du Nitre n est pas bornée dans la famille des Végétaux. En voilà assez ; je dirai le reste ailleurs : Lc les personnes , qui ont des Ménageries, me comprennent déja à merveilles. Pour voir avec plaisir jufqu’où va le succès de la multiplication du bled , quand on s’y prend bien : j’ai fait graver une touffe de tiges & d épis , qui ont pris naissance d’un seul grain. II. MULTIPLICATION. Tout le secret de la Multiplication' consiste dans l’usage des Sels. Le Sel , dit Palissy ,efi la principalejubfian.ee J Sc Vertu du fumier. Moyen de devenir riche , Pag. io. Un champ, ajoûte-t-il, pour- foit être semé tous les ans, si on lui res- tituoit par les fumiers , ce qu’on lui enlève dans la récolte. Et il n’y a point de doute , qu’on ne puisse tirer d’un champ tout ce que l’on voudrapourvu $3 Curiosités que l’art veuille aider la Nature. De forte que st l’on troupe le moyen de communiquer à ce champ une abondante matière propre à la Germination & à la Végétation , on aura à proportion une ample moisson. Cela ne se peut faire sans quelque peine, fans des foins. C’est à ceux , qui font capables de cette occupation champêtre, que je donne la Multiplication suivante. Ce trésor inestimable n’est que pour les vertueux & les personnes laborieuses. Comme la Multiplication dépend des Sels , if s’agit d’en amasser beaucoup , & qui coûtent peu , afin d’y trouver un plus grand émolument. Voici le procédé. i. II faut avoir d’abord trois Ponçons , qui soient défoncés par un bout. On y met tout ce qu’on peut presque rencontrer en son chemin ; savoir des os de toutes fortes d’Animaux, plumes peaux, rognures de cuirs , vieux gants » souliers , cornes , sabots de pieds de cheval , & d’autres bêtes ; en un mot toutes les choses qui abondent en Sels. On casse les os, on met en pièces le reste. On distribue ces choies dans les trois Ponçons. On met dans le premier tout ce qui íe peut infuser promptement , c’est-à-dire, les choses les plus S tr R L À V É <3 É T À TI o íf; ïf molles. Dans le second, on mer les matières qui font moins molles. Et dans le troisième, on met les substances qui font dures. Puis on Ips remplit tous trois d’eau de pluie, si l’on en peut avoir. L’eau de riviereest bonne,celle de mare, d’étang y &c, vont après. On laisse infuser quatre jours ce qui est dans le premier Ponçon. Six jours, ce qui est dans le second. Huit jours , ce qui est dans le troisième. Après ce tems-Iâ on sépare l’eau dé ces matières, que l’on jette. On conserve l’eau soigneusement. L’ambre-gris est une plus íupportable odeur , que ces substances infusées. Mais l’odeur n’en ç st pas plus désagréable, que celle de la Civette Occidentale , sur laquelle nos sssymistes travaillent quelquefois. Après tout je parle à des gens, qui veulent s’eir- tichir; & fur ce pied-là , je les crois du sentiment de l’Empereur Vespasien. qui j| e se faisoit pas une affaire de toucher í argent, qu’il tiroit de l’impôt qu’il avoir tftis fur les Latrines. Lucri bonus odor ex quoeumque fiat. n n’y a pas moyjn de faire autre- II y z sie petits dégoûts , qu’ii taut nécessairement essuyer dansl’Agri- Cl 4ture & dans le Jardinage. On nc i6 C Û R í O S I T é s lauroit réparer les sels que la terre perd dans les végétations , fans qu’il en coûte. M. de la Quintinie , après trente années d’expériences , dit fort bien : Conf- tamment il y a dans les entrailles de la terre , un íèl qui fait fa fertilité ; & ce sel est un trésor unique & véritable de cette terre. II faut réparer ce qu’elle perd de ce sel , en produisant des Plantes. Car ce n’est proprement que son sel qui diminue ; il faut donc amender cette terre, & la rendre au même état qu’elle ëtoit. Ce qu’elle a produit par la voie de la végétation, peut tervir à amander cette terre, en y retournant par la voie de la corruption. Ainsi toutes fortes d’étoffes j & de linge , la chair la peau ^ les os , les ongles des chevaux ^ les boues ^ les urines j les excrements le bois des arbres . leur fruit, leur mare , leùr s feuilles , les cendres j la paille , toutes fortes de grains ^ &c. tout cela rentrant dans les terres, y sert d’amélioration. C’est par-là, dit-il ailleurs , que la terre devient, en termes de Philosophie , imprégnée du sel nitre qui e ft le sel de fécondité. Traité d’Agriculf. II. Part. ch. 22. p. 217. Qu’on ne s’éton- ne donc plus de ce que nous obligeons les gens à ramasser des choses absurdes. M. de la Quintinie les recommande pareillement pour avancer la végétation. / SUR IA VátìéTATI ON. Vf 2. D’un autre côté il saut cueillir tou- *es les Plantes avec leurs fleurs , leurs graines , qui se trouvent le long des "ois, dans la Campagne , fur les Colites, dans les Vallées, dans les Jardins. Joutes les Plantes enfin , qui contiennent beaucoup de Sels. On les brûle, °n en fait des cendres : de ces cendres , on en tire les Sels par l’évaporation de {humidité. Les écorces de Chêne , où d y a beaucoup de Sel, font très bonnes, conme auffi le Romarin , la Lavande ^ L Sauge , la Bétoine, la Menthe, ìe Milíe-pertuis , les Soleils , &c. Dans J évaporation , les Sels s’amassent par l a Cristallisation ; 6c il est p.iíe de íes recueillir. 11 faut les faire sécher pòur les conserver. Z. %'fâut autant de livres de Salpêtre, ou Nitre, que vous avez d’arpents de terre à semer. Vous mettrez, pour un Arpent, une Uvre de Salpêtre dissoudre dans douze pintes d'eau de basse-cour. Quand le Salpêtre fera bien fondu , on y jettera un peu de ces Sels des Plantes, à proportion de ce que l’on en a. Alors cette liqueurs’appelle la matière umveselle, parce que le Nitre est véritablement l’Ef- prit universel du Monde Elémentaire: comme nous I’avons démontré dans le chap, § de la i. part. r 8 CïïKiomis Voilà tout l’essentiel du secret de 1* Multiplication. Ainsi nous appelleron s Eau préparée, celle qui s’efl faite dan s les Ponçons ; & nous nommerons , Matière universelle , l’eau où il y a le Nitre, 6c les Sels extraits des plantes. USAGE. Vous préparerez votre Bled, ou autre grain pour deux Arpens à la fois, ou ce que vous pourrez faire semer en un jour ou deux. Pour un Arpent, vous prenez douze pintes de I ’Eau préparée , où l’on mêle auffi-tôt la matière universelle , dans laquelle il y doit avoir une livre de Nitre fondu. II faut que le Vaisseau ou^vous mettez ces liqueurs, soit assez g.^nd, pour contenir le Bled, dont vous voulez emblaver votre terre. Alors vous répandez votre Bled fur ces liqueurs. II le faut laisse tomber doucement, afin que vous puissiez oter avec une Ecumoire, le Bled qui nage fur l’eau, parce qu’il n’est pas bon pour semer. Semina ^ qut, ìn aquâ subsidunt Jirmiorasunt J ad se - rendumfideliora ; qmfluitant, languidiora propagationi inapta , dit M. Rai, Hifl. Plant. Lib. I. cap. 18. p. 34. II faut que l’eau surnage de quatre doigts au-dessus sur t a Végétation- âu Grain ; & s’il n’y en a voir pas assez , st faut ajourer de i’eau commune, de la Meilleur que l’on air; celle de basse-cour conviendroit mieux. On laisse tremper le Bled durant douze heures , en le remuant de deux heures en deux heures. Si le grain après cela, n'enfle pas, il le faut laisser, jusqu’à ce qu’il commence à grossir considérablement. Alors on Se retire : î>n le met dans un sac, pour le laisser égoûter. II faut qu’il reste quelques heures, afin qu’il fermente, & qu’il s’échauf- fe. On ne doit pas perdre l’eau , qui tombe : elle est bonne jusqu’à la derniere goutte, pour toutes sortes de grains & de graines. On sems ce Bled encore un peu humide: il en faut un tiers moins par arpent; on peut même à coup sûr n’en mettre que la moitié, & y mêler de la paille hachée bien menu , pour grossir le volume , afin que le Laboureur puisse semer a l’ordinaire , à pleine main , comme on ? a deja dit. OBSERVA T10 N. 1. II faut choisir un grain bien nourri &pesant. 2. Les terres grasses - & pesantes 20 Curiosités:. doivent être labourées de bonne heuts avant que les pluies viennent, qui rendent encore la terre plus pesante. On ensemence ces terres , dès qu’elles sont labourées , afin que le grain par l’aimaní des sels, dont il est imprégné, attire l’eí- prit universel répándu dans l’air. II faut prévenir les grandes pluies, si l’on peut, afin que quand elles arrivent, le mariage du ciel & de la terre soit déja consommé pour la germination , & la végéta- tation de notre Bled, déposé dans le sein de la mere universelle de toutes les générations végétales. Tous les grains veulent être semés en tems sec, dit M. Rai : Semina omnìafiçça, tempe fiat e fievenda fiait tertio j quarto vedie àpluvix largicre , trois ou quatre jours après les grandes pluies; Rai, Hifi. Plant. Lib. I. cap. 18. pag- 54 - M. de la Quîntinie fait la même remarque , & on ne sçauroit y faire trop d’attention , parce que c’est sur cela qu’on se doit régler , pour connoître quel procédé on doit choisirafin d’amé- liorer ses terres. II ne faut pas par tout la même matière. Et ceux qui ne font point ces distinctions là , courent risque de ne point réussir, & de se plaindre mal-à - propos des secrets qu’on leur communique. II y a, dit çe fameux lap; Sur l'a Végétation; -zt Minier, deux défauts généraux dans les te rres. Le premier est d’avoir trop d’hu- *siidité , laquelle est accompagnée d’or- dinaire de froid, 6c d’une trop grande Pesanteur. Le second est d’avoir trop de sécheresse , qui ne va point sans une ex ceífive légèreté , & une grande disposition à être brûlante. II faut opposer deux remedes différents à ces deux incon-; ^énìentstout opposés. Nous voyons pa-j ^illement que des fumiers , que nous pouvons employer, les uns font gras ì de rafraîchissants ; par exemple, ceux de Bœufs , 6c de Vaches. Les autres lont chauds, & legers ; tels font ceux de Mouton , 6c de Pigeon. Comme *5 r emede doit être opposé au mal , il íaut les fumiers chauds 6c légers dans les terres humides, froides, 6c pesantes, afin de les rendre plus mobiles, 6c plus legeres. II faut employer les fumiers de Hœufs , 6c de Vaches dans les terres maigres, sèches, 6c légeres, afin de les r endre plus grasses*, plus matérielles : à par ce moyen empêcher que les hâles du Printems, 6c les grandes chaleurs de l’Eté ne les altèrent trop aisément. Pag. 2i8. Voilà sans doute le rafinement le plus exquis en matière d’Agriculture dc de Jardinage. C’est par de semblables observations , qu’on les portera à leuç perfection. 22 Curiosités Les terres maigres, & lég'eres ne doi" vent pas être fì-tôt ensemencées; à moin* qu’ elles ne fussent dans des fonds aquatiques , & marécageux. Alors il faut leS traiter comme les groíïes terres. Au reste, c’est un mal d’enterrer les grains trop avant. Ils font accablés paf la pesanteur de la terre , & ont moins de part aux vapeurs, & exhalaisons ni- treufes qui nagent dans l’athmosphère ide l’air. M. Rai dit: Gardez-vous bien d’enfevelir vos grains trop avant dans la 'terre, qui les écraferoit, ils feroient là enterrés , fans aucune espérance de résurrection. Summopere cavendum nesemi~ na alte demergantur , aut nimiâ terrâ cbruantur adeoque Jim ulla rejurreólionis Jpe sepdiantur • Hijl. Plant . Lib. 1 , cap• j8. pag. 34. 3. Si la terre est sujette à des mauvaises herbes , il la faut nécessairement labourer deux ou trois fois , pour ôtes toutes les racines de ces herbes. L’année suivante , il ne faudra labourer qu’une fois, mais profondément, & les raies proches l’une de l’autre. 4. II n’est point nécessaire de fumes la terre; mais en cas qu’on ait du fumier, il est bon de remployer; la récolte n’en fera que plus forte. Si l’on ne veut pas pratiquer cette ma-! SUR LA VÉGÉTATION? 23 siiere dans toute son étendue, on peut se dispenser de l’infusion , qui se fait dans les trois Ponçons, & prendre de l’eau de basse cour- Si on n’a pas de cette eau, il est aisé d’en faire avec du fumier des écuries ; & ce qu’on tire des Colombiers , & des lieux où l’on tient la volaille ; & puis simplement mettre le nitre fondre dedans. Le succès n’en est pas si beau. III. MULTIPLICATION .. Il y a des Laboureurs qui amassent dans une fosse , quantité de fiente de cheval, où ils jettent souvent de Peau. Quand cette matière a pouri pendant quelques semaines , ils en tirent l’eau imprégnée des sels du fumier. Ils font un peu bouillir cette substance dans un grand vaisseau de cuivre. Ils y mettent un peu de nitre : & quand la matière est hors de dessus le feu, & qu’elle n’est que tiede, on y fait tremper le bled que l’on veut semer. On le laisse macérer dans cette liqueur durant trois jours, afin qu’il s’enfle , & que les germes s’ouvrent, se dilatent, & se développent. Après cela ils le retirent de l’eau, nfin de le faire un peu sécher. Ensuite Çm le seme» 2 4 CïïEIOSXTÉS Comme il en faut semer un tiers moins par arpent, qu’à l’ordinaire on hache de la paille fort menu, & on ,en met un tiers parmi le bled préparé. Cette maniéré réuffit assez‘bien: & il y a des Laboureurs, qui se sont procurés par cette petite manœuvre , de très-abon- dames récoltes. I IV MULTIPLICATION. II y a en Angleterre des Laboureurs ; 'dont le procédé n’est pas de préparer le í Bled. Tous leurs foins font du côté de la terre. Voici comment ils s’y prennent. lAu commencement de Juin, ils ramassent de toutes parts les herbes vertes » qu’ils rencontrent fur les montagnes , cans les vallées, le long des bois , &c. Us les font sécher au Soleil , & puis ils lés brûlent. Ils en mêlent les cendres avec du fable de la mer, & répandent cela fur leurs terres, peu de jours avant que de les ensemencer. 11 est certain que cet usage est très-bon. Le sel des cendres des plantes , & le sel marin du fa' ble communiquent à la terre une fécondité merveilleuse. V. MULTIPLICATION. I Çambdenus , dans la description de 1* Province SUR LA VÉGÉTATION. Province de Cotn-owaille , en Angle- l erre, rapporte que les Laboureurs de ce pays - là í'e fervent d’Algue - marine, 8c de limon, pour fertiliser leurs champs , Naturellement très - infertiles. Ils assument que par ce moyen ils receiiillent des Bleds, au delà de tout ce qu’on peut ^imaginer. Vl. MULTIPLICATION. M. de Childrey , dans son histoire Naturelle d’Angleterre, remarque, que les habitans du pays de Cornovaille, ®nt reconnu que rien ne contribue tant a la fécondité de leurs terres, que le fable de la mer, & que plus ce fable Est pris avant dans la mer, & plus la révolté est riche. Ces quatre maniérés de Multiplier les grains, í'çavoir la iij. la iv. la v. à la vj. font tirées de l’Observa- tJ on cxij. des Journaux , Curiosorum &aturœ d’Allemagne, i6yi. pag. i8y. *86.187. Dans la même Observation , il est parlé d’un épi d’orge d’une grosseur monstrueuse. II étoit composé de quîn- Ze gros épis, & de neuf petits ; mais tous extrêmement remplis de grains. Ce Nierveilleux épi s’étoit formé dans la 8i- stfie ; & on le porta par curiosité à U. Partie. B 26 Curiosités Vienne, afin de le présenter àl’Empe' reur. Quelques Physiciens étoient qV vis que cette touffe s’étoit produite d e plusieurs grains d’orge , qui s’étoient trouvés par hazard répandus au même endroit. C’est ainsi que le célébré Pers Ferrari Jésuite , dit , que si on mêloit plusieurs graines de même espèce, mai 5 de différentes couleurs, & qu’on les mrï dans une cane ou branche de Sureau» pour les déposer dans la terre, les ger' mes íe mêleroient , & se confondroient ensemble, 8c qu’il en naîtroit une Plan' te qui porteroit des fleurs belles, & va' riées comme l’arc-en-ciel. Cet Iris, dit' il, seroit formé, non pas par les larme 5 d une nuée , qui se résoud en pluie 1 mais par les ris , 8c les petits jeux & Flore, qui se divertit: Ut semina invice & mixta ; & confusa Eìorœ quoidam lux*' ; riantis monjìrum & Iridem non ex lichtf j mis résolut & à la suivre de près, quand elle e divertit à produire ces épis si gail- B ij 's 8 Curiosités lards : elle a beau se cacher, on Jade' couvriroit , si on yapportoit du soin» & de la vigilance. Et quand on auroi® -une fois reconnu ce qui la peut metts® de si belle humeur, il ne faudroit qu® la remettre dans la même disposition» & sur les mêmes voies ; alors tous no s travaux Eroient amplement récompensés ; nous aurions certainement tout® s les fois que nous voudrions , ces pr°' ductions si réjouissantes, & des récolté qui porteroient par tout le plaisir & 1’*' bondance. Vil MULTIPLICATION- II ne faut rien négliger de tout ce q u ‘ nous vient des grands Hommes ; sc tout de ceux qui se sont appliqués à cid'j river les arts utiles à la vie. Ainsi , quo J '| que M. Rai n’ait parlé que de la mani e '| re de semer les graines des Jardins* ce^qu’il a dit, mérite d’avoir ici fa pl J, j ce'; quand même notre dessein ne toit pas de donner de nouvelles lufldy res, aussi-hien pour le Jardinage, h , pour l’Agriculture. . Quelques-uns, dit-il , avant que ^ de semer leurs graines , les mettent tr®^ per dans de seau, où sis ont sait dre du nitre, ou bien dans du vin ., p® 11 £' )ir : re ue n> io* ;n- tes r o- [te« l’r V- qui ft- uoi' ins t* .r#! / ie u foi 1 ' x-' lí'ì sur la. Végétation. 29 ^1 hâter la germination. Ce que je ne tr ouve pas nécefiaire dans les graines Nouvelles : mais je ne désapprouve pas ce fait H. Corvìnus , pour les graines- ex otiques, ou qui font surannées. Le P. Ferrari , dit qu’à l’egard des e mences qni font dures, lentes & pa- Osseuses à germer, Corvìnus , avant que' ? e les semer ; les fait tremper douze Usures dans de l’eau où il y a un peu de ^tfe. 11 les y laisse quelquefois macé- * er davantage, selon la dureté apparente ? es semences, & il les arrose ensuite de a même eau , afin que le nitre, mêlé ^Ec les exhalaisons chaudes de la terre, ^cite les germes à s’ouvrir & à se déve- °Pper, pour faire une prompte & heu- re use germination : Ut nitrum ex igné» terr &haiitu concretumseminalem contuma- r? 171 ad uberem germìnationem proriret. er rari FL O RA ^ Jìve Florum cuîtura . «/. cap. 1 . Lex ìlo «U. iloris serendi. pag, : p Ce seroit un procédé facile & court j s m t0ut ^ ans l es P a ys de vignobles , s’il ^uifoj t p a j re j n f u f er l e Bled dans du ^ n pour réussir dans le riche ouvrage a ~ la multiplication. Cela se pratique Q ez souvent sur la graine de Melon. la met tremper dans^de bon vin; ^ !es curieux prétendenS^ue c’est un B ii] Z2 Curiosités secret certain, pour donner aux Melon* un goût exquis. 11 est du moins constant que le vin ne gâteroir pas le Bled. On avoit dit , il y a long-tems, que Venus s’accommodoit assez bien de la liqueur de Baccus , mais il me par oît surprenant que Cérès se fasse auíiì un plaisir de tares de ce jus précieux. VllL MULTIPLICATION> Prenez fumier de Vache , de Cheval, de Brebis, de Pigeons, de chacun une quantité égale. Mettes le tout ensemble dans un vaisseau ds cuivre , ou de bois : il n’importe. Vet' fez de l’eau bouillante dessus. LaiííeZ ìe tout tremper durant huit jours, ai* bout desquels vous verserez cette par inclination dans un autre vaisseau » où vous mettrez dissoudre une livre d® nitre par arpent. Après que le nitre se sî fondu ^ on y mettra tremper le froment > ou autre semence l’espace de vingt-qu^ tre heures. II faut ensuite tirer le bled-# le semer un peu humide , si c’est teifS de sécheresse. Mais si la terre ej humide, il *?§ùt faire un peu sécher 1® s r n s e it z le r- :2 iU i u i, le r a : > SC p 11 ls sur la Végétation, zr kled fur des draps dans un grenier, avant SJUe de le semer.,II ne saut que les deux tle ts de ce qu'o n a coutume de semer far arpent. II suffit d’avoir labouré une *°is la terre fans la fumer. Quelque maille & stérile que soit le champ, on doit c °napter sur une riche moisson , qui de- v ancera de quelques semaines le tems ° r dinaire de la récolte OBJECTION. On ne peut pas croire que le peu de ,y s , qui s’attachent à chaque grain de k‘ e d, puisse suffire à l’aliment de tant de tu yaux & d’épis, qu’on espere de voir, far ce secret, sur une seule tige. R E' P O N S E , Ces sels, dont se charge chaque grain bled , ne sont pas précisément pour ^°urrir toute cette nombreuse famille. ^eurp rem i ere a ction, c’est de couper, Geiser les enveloppes des germes diffé- - qui font contenus dans chaque , afin qu’ils se dilatent, & qu’ils e développent. ^ Ej seconde action de ces sels, c’est _ e servir à chaque grain de bled , com- e dun airîïànt -pour ' attirer le nitre'de B iiij Z2 C u R IOSI T É s la terre, que les feux íoûterains ont ré - duit & poussé en vapeurs & en exhalaison® dans la basse &. moyenne région de i’air > pour la nourriture des Végétaux & des Animaux. Ce n’est point ici une contemplation en l’air, une cbimere, une idée creuse. Nous íçavons, sondés fur de belles expériences, que le nitre exposé ^ l’air, en attire comme un aimant, & I e mitre & shumidité. ■i. EXPERIENCE - Sur le-magnétisme du Nitre. Si l'on sait calciner certaine matière pierreuse , qui se trouve dans les vieux tuyaux de plomb des fontaines, & qu’on en tire le sel ; ce sel mis après dans un vaisseau à l’air , attirera continuelle - ment de l’eau , laquelle étant filtrée & évaporée, donne un parfaitement beau salpêtre. Ce sel ne se dissout pas à l’hu- mide; il reste dans le vaisseau, quand on verse par inclination í’eau qu il a attiré , ou bien il demeure fur le 'filtre* Monconys , Voyage ,.Tom. i. pag. Voilà ce que fait le nitre attaché au grat st de bled ; iî lui attire fans cesse l’humidite -> & les vapeurs nitreuses , qui nagent' d b l’air, & dont les plantes se, nouî*' rilient. sur l a Végétation. 35 2. EXPERIENCE. Les Sçavans d’Allemagne confirment'.' ce magnétisme par une autre expérience Ssù nous met en état de ne point dou- îer que le nitre n’attire le nitre. Si vous. exposez à l’air, durant la nuitenEtéj, des cailloux calcinés ; cette matière, où il y a du nitre, attirera à elle l’humeur saline de l’air: car enfin l’Atmûsphere.- d’air, qui enveloppe le globe de la terre,... e ft toute remplie de corpuscules ni- tr eux, qui s’élevent de la terre, & de Itri ^er: Continet enim athmosphœra aérh ex— halationes varias, quâ terra * quâ mari a Jcendmtes intrà quas nìtrofa prévalent.- Cbservat. 18. Curiosorum natur&j 1675V ^ 1676. pag , 2.8. Or ce nitre est un sel véritablement" de fécondité. Rien n’est plus précieux ,. êc peut-être plus respeKable dans> la ^2ture que ce nitre ,.qui n’est prefqtie c °nnu que de quelques Philosophes. II ^ incontestablement le baume de vie *>- S Ul entretient toute l’harmonie de lá» ^ture dans les trois familles des Mir>- néraux' ,des Végétaux &.des Animaux-; ^ sons lequel tous les mixtes se décom-- poseroient., .se. résoudroient dansa leur Píincipes, éclormeroient.de.leur ruines Bi v 34 Curiosités & de leurs débris le premier cahos. C’eíl ce sel précieux , qui tient tous les corps du monde élémentaire dans un état de confidence. Nos Savans de France font en cela d’accord avec tous les Savans de l’Eu- rope. M. Homberg a fait une expérience , qui montre la part qu’a le nitre dans la végétation des plantes. II a semé du Fenouil dans une caisse qu’il arro- foit avec de l’eau, dans laquelle il a- j voit fait dissoudre du Salpêtre , & il sema en même-tems du. Cresson dans une autre caisse arrolée d’eau commune. Le Fénouil semé en pareille quantité , a produit deux onces & demie de plantes plus que le Cresson. Sur quoi d ajoute : De-là on pourra juger, que fi les sels ne font pas absolument nécessai' res pour la germination des plantes, cependant ils aident à l’accroissement & à la force des plantes , puisqu’il s’en eft trouvé une plus grande quantité dans 1* «■erre arrosée de nitre. Mémoires de l’A " cadémie Royale des Sciences ,i6§p. pag' 6 p. S. EXPÉRIENCE. 1 En faisant fondre du nitre dans l’eau , il se répand & se mêle pari* 11 ' '/est >rps de cela Eu- ien- litre se- rro- l a- c il lans mu- tan- ! de ai il ie 6 ssai- ce- &i i est ìs 1* , SUR LaYÉGÉXATION. 55* ^eau qui en est toute pénétrée. II n’est r ien de plus facile que de retirer ce nitre stu tous les pores de seau, dans lesquels st s’est insinué. II n’y a qu’à faire un feu évaporer /humidité sur le feu, jus— 3 u ’à ce qu’il paroisse une petite pellicule sur seau. Alors on laifle refroidir le *°ut. Le nitre se ramasse en beaux cris- ta ux, longs , blancs, clairs , transpa- íe nts. Tant il est vrai, que le nitre se perche, 8c se ramaíïe. C’est ainsi que * e nitre, qui nage dans l’air , se réunit au ^trejdont on a imprégné le bled, avant lue de le semer. Pal'iisy exprime cela à surveilles , selon sa maniéré. L’huile, stit-il, étant jettée dans seau, se ramasse ^ íe sépare de seau. Veux-tu meilleurs preuves, que du sel commun, de la uoup ero fe, & de tous les sels, lesquels ^ 5 nt dissous dans de seau, se savent si ° ! en séparer par la cristallisation, & sai- se Un corps à part ? Des Métaux , & Al~ c bmìe, pag. 160 . II me semble que cela E démontré , 8c qu’il n’y doit plus a- ^°ir de difficulté fur une chose si évi- unte 8c si constante. | IX. multiplication. . ^e\ p .-Prenez dix boisseaux de bon Bled:^ ir iíii i lte s-le calciner , jusqu’à ce que vous" | » Bv i Curiosités í ayez réduit en une cendre grisâtre* 1^' íaut tirer le sel de ces cendres ; ce qui se fait par une lessive à l’ordinaire. Au lieu d’eau, fi l’on avoit de la rosée de Mai ou de Septembre , sopération en vau- droit incomparablement mieux. Solve * & Coagula . II saut dissoudre les sels des- cendres dans de I’eau de pluie, fi l’on n’a pas de rosée , & quand l’eau s’eíî chargé des sels, dontles cendres étoient remplies, il la faut filtrer puis coaguler. On coagule en faisant évapores l’humidité : ensuite on trouve les sels/ qu’il faut garder -précieusement. Cela-' fait ; Prenez de toute sorte de fumiers f ceux de Cheval, de Poule, de Pigeon » de Mouton priment les autres. On les met dans un grand vaisseau de cuivre, où l’on verse une ou deux pintes d’eau- de vie , de la rosée le plus qu’il est possible, avec quelques pintes de vin blanc r ' on y en met à proportion de la mul- ' tiplication qu’on veut faire. S’il n’y * pas assez de liqueur, il y faut ajouter de- î’eau de pluie. Après quoi il faut laisses cela vingt-quatre heures fur- un très-pe- íit. feu > & remuer très souvent. On fil" tre la liqueur , que l’on conserve potff Jtusage. suivant». sur rX Végétation. ZI- U S AG E. On prend de cette liqueur , autant qu’il en faut pour tremper le Bled qu’onu doit semer par arpent. On met dans cette liqueur une once de sel de froment., Lc une livre de nitre. Quand les sels, sont bien dissous, on étend son Bled sur un drap ^ & durant neuf jours on l’arrose soir & matin de la liqueur en question. Le dixième jour on seme son Bled } un tiers moins dru qu’à l’ordinaire. Le succès paye la peine & dédommage Amplement des frais. II ne faut pas être surpris de voir ,' qu’on emploie le vin dans ce procédé- ci. Le vin est un grand agent pour la Végétation. 11 contient Beaucoup de. sel* Il est certain que les plantes aiment A boire du vin, & que cette fève les met en belle humeur. Cononherius dit , que , si on abreuve les racines d’un Platane ou Plane d’un peu de vin , quelque* moribond qu'il. paroisse , il sé révei- I e ' aussi.tôt & pousse avec diligence, des branches d’une étendue extraordinaire , pag. j o. II est vrai que Pline- l’avoit remarqué, il y a plus de quirmç ÇCïìs ans,. Nous n’ignorons pas s dit-il ^ Curiosités que les arbres font fort friands de vin. Docuìmus etiam arbores vina potare . Hift. JVat.Lib. 12. cap. i. X. MULTIPLICATION. Virgile nous apprend ce que les Laboureurs "faifoient de ion tems , pour avoir d’abondantes récoltes. J’ai vu, dit-il, plusieurs Laboureurs, qui met- toient tremper leurs grains dans de la lie d’huile , ob il y avoit du nitre, afin que les épis fussent plus grands & plus féconds. Géorgie. Lib. i. Semina vìíi equidem multos medicarese- rentes, Et nìtro prius ^ nïgrâ perfundere amurcâ j Grandior ut fœtus Jlliquis fallacibus ejfet. Columella qui vivoit peu après Virgile , l’explique comme je viens de faire, & entend vrai - semblablement par amurca j non du mare d’Olives , mais de la lie d’huile, puifqu’on ne fçauroit mettre tremper , macérer , amollir du bled dans du mare d’Olives. Les anciens Laboureurs , dit Columella , & même du tems de Virgile, ne semoient le bled qu’après savoir mis tremper & macérer SUR LA VÉGÉTATIOÌi'. dans de la lie d’huile , ou dans du nitre : Priscis autem rufiicìs , nec minus Virgilio prius amurcâ * vel nitro macerari eam ^ ita Jeri placuit. de Ruftic. Lib. 2. c. IO. pag. 58. Pline applique aux Peves ce que Virgile a dit en général des Semences. Virgile , dit-il , ordonne qu’on trempe uans de la lie d’huile , ou dans du nitre , les Fèves pour les semer, & promet delà une abondante végétation. Qctelques- Uns estiment que la multiplication est plus riche, si trois jours avant que de les déposer en terre, on les met macérer dans de l’urine & de l’eau.Dé- mocriîe recommandoit qu’on mît tous les grains tremper dans le suc d’une plante qu’on appelle Aqoon, qui croît sur les toits des maisons, & qu’on nomme en latin Sedum, ou Digitellum. C’est apparemment la Joubarbe. Vigilius nitro, & zmurcâ perfundi jubet fabam :Jic eam grandefcere promittit. Quidam verò ,(i trì- duo ante fatum urinâ * & aquâ maceretur, P r *cipuè adolescere putant ... Democritus Jucco herba qunt appellatur Aboon in tegulis n nfcens, tabulisve-, lûtinè Sedum aut Di~ gùel'um J medicataferi jubet omniafemina. Hifi. Nat. Lib. 18. cap. 17. II faudroit avoir beaucoup de ce suc de Joubarbe J pour faire ce que veut Démocrite. Ce 4 O G U K I O S I T I S secret est excellent pour empêcher qu® les vers, les infectes ne rongent le ble^ durant les Hyvers trop doux. Comm e ils le font presque toujours en Italie r cette pratique y peut être d’un très - bon usage. Toutes ces- observations nous montrent quelle attention prodigieuse, les plus grands hommes ont euë, pour rendre les récoltes plus belles., & plus riches. On ne íçauroit trop recommander Pu- - sage du nitre, pour la multiplication des Bleds. Voici comme parle un Docte de , réputation , que tout Paris a connu, & où il n’a pas été moins célébré, que par toute PEurope savante. C’est M. Denis, Médecin duRoy: II dit , que c’est un secret surprenant pour la multiplication des grains , de les laisser tremper quelque tems dans une certaine lessive remplie de sel - nitre avant que de les semer. Et f ai vu J&uvent par expérience que tous les grains de bled, que nous avions ainjì préparés pouJJ'oient chacun plus de deux cens tiges à la ronde & avoient autant d’épis , qui étoient remplis d’une - confusion admirable de grains de même efpècet Conferenc. sur les Scienc. pag. 166. à U R LA VÉGÉTA Tr O N. XL MU L TIP L1CA T10 N.. II saut faire tremper le bled, ou tout autre grain, dans de l’huile de Baleine, durant vingt- quatre heures. Après bavoir tiré de là , on le saupoudre de chaux Vive, oh l’on a mis un peu de nitre pulvérisé. Cela sait , on le laisse sécher» Etant sec, on le íeme fort clair. II est aisé de reconnoître présentement , que tout le secret de la multiplication du bled roule sur le sel-nitre, & qu’il est le principal acteur sur la scène des terres ensemencées. II n’y a là - dessus qu’un avis., & qu’une voix parmi tous les Philosophes. Bari, dans fa Phy sique , dit : en certains grains, comme aux grains de Chen- ïïevis, il arrive quelquefois das multi- tlplications surprenantes : & si les Peres de la Doctrine Chrétienne font croyables, un seul grain d’Orge est capable: d’une fécondité monstrueuse. Digby qui M afourni s exemple dugrain d’Orge Aont les Peres de la . Doélrine Chrétienne gar~ dent les prodigieuses multiplications , veut^ «vec U Cosmopolite , que le Limon sa- bn, soit de tous les limons le plus fer-- tde / sir que fi les pluies font plus fécondes que les eaux ordinaires ^ cejl parcs- HL Curiosités quelles dégraissent Vair * & Vair ejî rempli d’une infinité de sel douçâtre* Des Plantes, pag. 11 y. & 11 6. Saint-Romain’, dans fa Science Naturelle , dit : Les Laboureurs fument leurs champs , & brûlent leurs guérets, pour avoir un bled mieux nourri, & une plus grande abondance de grain. Mais s’ils Jçavoient tremper leurs grains dans un dissolvant acide, ou en arroser leurs terres , il n’y en a point de jì Jìériles _> qui ne devinssent fertiles : & Vabondance du bled qui en viendrait ^ réjouirait le Laboureur Part. iv. chap. 4. p. 207. Cet Auteur sc mocque, quand il parle d’arroser les terres de la matière de la multiplication. Le secret consiste dans la préparation du bled. Saint- Romain auroit eu fort à faire, s’il lui avoir fallu arroser de son dissolvant acide , toutes les terres de la Beauce. II est fâcheux que M. Digby ne nous ait révélé qu’à demi, le secret de la multiplication du bled. C’étoit un Sçavant., qui en avoit fait lui-même Fexpérience : ion seul procédé nous auroit tenu lieu de tous les autres. Voici comme il parle dans son Traité de la Végétation des Plantes, pag. pz. y4. &c. Je trouve, dit-il, qu’il seroit ici sort à propos de vous dire, pourquoi les anciens Poètes SUR LA VÉGÉTATION.' 45 Sous ont écrit de longues histoires de leur Déesse qui avoit pris naissance du sel, & comment ils ont caché sous les voiles du sel, le plus secret de leur Science naturelle : de même qu’ils ont toujours voulu cacher fous le masque des fables, leur plus profonde sagesse .... Par le moyen du sel - nitre , que j’ai tait dissoudre dans de seau, & mêlé avec quelqu’autre substance terrestre convenable , qui peut en quelque façon ren- ' dre ce sel amiable, & familier avec le froment, dans lequel je voulois insinuer ledit sel-nitre; j’ai fait ensorte qu’un champ très-infertile 6c très-maigre f produisît une admirable & très-riche moisson , & surpassât encore par son abondance, celui qui de soi étoit très-fé- cond & trés-fertile. De plus j'ai vu qu’un grain de Chen- Hevis, étant arrosé & humecté de cette même liqueur,-a produit dans le tems requis une si grande abondance de chalumeaux , ôc de tiges , qu’on eût pu dire à cause de l’épaisseur, & de la dureté de ses branches, quec’étoit une petite forêt âgée de dix ans pour le moins. Enfin Digby finit par dire : Les Peres de la DoBrine Chrétienne de Paris ,, conservent encore che% eux une touffe d’orge, qui contient deux cens quarante-nmf tuyaux , %'4 CuRiosrT é s cu branches , qui prennent leur origine d’uK seul j dr mime grain : aux épis defquels itt comptent plus de dix-huit mille grains . Ce qui ejl d la vérité tout extraordinaire : aussi conservent-ils cela comme une chose très -- curieuse J £r de remarque • Quelques-uns, pour la Multiplication du bled, se servent du sel, qu’ils tirent de la fameuse plante nommée He- liotropium ^ Tourne -sol, ou Soleil ; parée que l’admirable fleur de cette plante, tourne, & suit le Soleil. Planis - Campy , dans son Hercule Chymique , parle des .vertus de cette plante avec des raviísemens. II est tout extasié fur le chapitre de fa Clytie. C’est ainsi qu’il nomme le Tourne - Sol. II en dit une particularité très - singulière , & qui regarde auffi la Végétation des plantes. II raconte que la fleur de l’Eiiotro- pe est si chargée de rosée, durant même la plus grande ardeur du Soleil , qu'en une demie-heure, on peut d’une feule fleur, en la secouant doucement à diverses reprises, tirer deux onces de ro- fée. Que ne dit-il point des vertus de cette Rosée ? II seroit difficile de se l’i— maginer. II faut qu'fl parle lui-même. N’en rie\ pas, dit-il, experimentez--le , & vous verrez que les cancers, loups, No- U me tangere , toutes sortes d’ulcérés; sur la Végétation. 4^ morsures venimeuses , arquebusades , playes ; chaleur de foie , Pulmonie , douleur d'estomac, palpitation de cœur , migraine , toute douleur de tête , gouttes , peste , ladrerie , vérolle, &c. lui cedent. E le manifeste le poison, en rompant le vaisseau où elle est : vaut aux ensorcellemens, délivre une femme en travail d’ensant , est singulière contre l’épilepsie, & ses espèces ; chasse les démons des corps. Bref elle a tant de vertus , que si elle n’étoit si commune, il n’y a ni or, ni perles, ni pierres précieuses qui l’égallassent. Car elle est de telle vertu , qu ’ Arnaud de Villeneuve * a bien osé dire, que quiconque en pren- droit tous les jou r s un peu avant que démanger, à peine mourroit-il. -aujjì:renouvelle-1’elle j sir rejlaure entiere - Jnent un chacun fruit chacune herbe * les Arbrespareillement. Qui poteft capere ca 1 piat. Planis - Campy, après avoir donné la maniéré de tirer de cette Rosée une substance solide , ajoûte : Or à cettesubs-• tance „ joigne^ à neuf parts une part de Jòuphre d’or , & il n’acheve que par un &c. Car j dit-il.j il neflpas raisonnable de découvrir , sir divulguer le tout apertement. Cela méne tout droit au grand œuvre , ^ la Pierre Philosophale. Voilà une bon- 4 6 Curiosités ne chose, mais en voulant aller trop loin, Planis - Caiiipy se jette dans les visions & fans plus garder de mesure, il assure que cette matière introduit en l’homme une nouvelle jeunejse par consommation de la vielliejse , &c. II m’est tombé entre les mains un Livre , où il y a d’assez bonnes choses. II a pour titre : le Paradis teri eflre. II est de la façon d’un Conventuel d’Avignon , nommé le P. Gabriel de Castagne. Cet homme n’estgueres moins gâté, que Planis - Campy , furie chapitre de l’Eliotro- pe. II faifoit en 1612. la Médecine à Paris, ouïes Charlatans abordent de toutes parts : & comme eux , il parloit des Médecins avec beaucoup de vivacité, & peu de cérémonie. II se trouve certainement de beaux secrets dans son Livre. Mais ce qui nous regarde particulièrement , ; c’est l’estime qu’il fait de l’Elio- rrope, qu’il appelle Tourne - Soleil. Après avoir parlé de fa Empathie avec le Soleil, il p retend qu’il n’y a point de maladie , pour incurable qu’on la tienne, qui ne cede aux vertus de cette Plante admirable. Voici l’usage qu’il en fait. Prenez > dit-il , un Tourne-Soleil tout entier bien meur, & le mettez par petites pièces avec ses feuilles jaunes, & fa graine SUR LA VÉGÉTATION. 47 ^ans une bouteille, & par-dessus vous y mettrez de bonne eau-de-vie, qui surnage de quatre doigts. Bouchez bien la bouteille, & la tenez dix jours au Soleil , & la nuit en lieu sec. Puis sepa* r ez l’eau-de-vie, & la gardez bien. Pressez bien tout le mare, & joignez ce qui en sortira avec de l’eau-de-vie. On calcine ensuite le mare entre deux pots bien luttés. On tire le sel des cendres, & on le met -dissoudre dans la liqueur. Vous avez alors un grand trésor. Donnez-en une cuillerée dans demi-verre de vin blanc à jeun, cela guérit le Nolì me tangue, les Chancres, la Pierre, la Gravel- le. Ce remede est souverain contre la Pa- r alisie, l’Hidropisie, & la Fièvre quarte , &c - 37 > 3 8 > 39 , 4 °' XII. MULTIPLICATION ; C’est de Porta, que j’ai pris cet admirable secret, pour parvenir à une ex- tr aordinaire multiplication , dans la- Ruelle il promet de riches moissons, & d ample vendanges. II estime même ce procédé est incomparable pour . s plantes légumineuses. Voici comme J 1 en parle. Cette affaire J dit - il, efl d\i- utilité immense. D’un boisseau de bled, "En viendra plus de cent boisseaux. II faut HZ Cc EIÒSÏTÉS pourtant observer que le succès ne serolt pas íì grand , si le ciel, la terre, & les saisons étoient dans un dérangement, tel, que toute la Nature en eût à souffrir. Cependant la récolte fera toujours ■ belle , quoique plus petite, que je n’ai dit. Mais si le tems est favorable, ust boisseau rendra au moins cent cinquante boisseaux. Cela ne doit pas passes pour un paradoxe, si on se souvient, que le Gouverneur jdu Bqacium , Ré- ; gion d’Afrique, envoya à Néron une | tousse de bled de trois cens quarante Tuyaux , qui étoient tous venus d'un I seul grain.Nos Laboureurs n’en- tendent rien dans leur profession. Ils ne se conduisent, que comme ils ont v& aller leurs dévanciers. Ils ne se proposent jamais d’ailer plus loin. C’est la raison» pourquoi on ne fait pas en ce pays - cl des récoltes bien considérables. Voici tomment il faudroit s’y prendre, pouf tirer de nos terres des moissons dignes de nos travaux, & qui répondent à noS vœux. 11 faut conduire l’Epouse à VEpoux : 0$ ne la doit pas choisir d’enhaut nicdenbasi mais du milieiu Celles qu on prend ailleurs > n’ont pas aj]ï? L de force. On la sépare par I e moyen du bain :Et 'dayant parfumée d’es' sence ^ sir nourrie de graisses de vieilles CW vre s ' v C ci 7 íi d n n f a V, n /< 0) 8 cl U 8 s’ S a è g‘ d v g d seroïï 8c les lent, fous' ijousS ' e n’ai , un juan- lasses ient» Ré' une J rante d’un ! n’en' is ne A lt vU osent ison > rs- d Voici pouf igné 5 í iro* .•O ibas y turs > iar I e ■d'ef' Chi' VseS' sur la Végétation. 49 v res ou l'ajjòcie à Vulcain ^ & à Baccus. O/r lui chauffe un lit bien doux pour la cou~ c her ■ car c est par la chaleur vivifiante a Us commencent à s’unir avec affection j ^ qu ils s’attachent j&fe liejit par de tendres embraffemens. La semence ainsi animée produira une postérité puissante £r Nombreuse, lisant que la Lune y préside par ■& féconde lumière; car ce qui est fertile c °mmunique la fertilité. U ne resie qiià a- v stìr qu d faut à Baccus une femme qui n ait pas perdu les cheveux j parce qu une famrne dont la tête efi ainsi dépouillée deson Ornement est méprisée par son mari. Elle 8 auroit pas non plus de quoisegarentir de faoses nuisibles. C’estasses seulement quel- ^ n ait point de cheveux frisés. Etant ainsi moins parée elle plaira davantage à son e poux. Voilà une énigme dans toutes les /ormes. Je ne fai d’où vient que Porta qui. Sa pplique par-tout à fe faire entendre, affecte d’être ici obscur. Cette longue allégorie du mari & de la femme, est là ^°ut-à-fait mal placée. Je pardonnerois ^ Cbymiste qui promet d’enfeigner le Vand œuvre, de parler ce langage inin- el %ible, parce que comme il n’a rien ^ bon & de solide à donner, il se sau- Ve suprès des sots, & des gens d’un S r 3nd loisir, à la faveur de ''obscurité & Un galimatias impénétrable. Tout ce bf. Partie. C 50 Curiosités que j’entrevois là-dedans, c’est qu’il faut i b a , choisir de bon grain , celui qui sort d’é- éto pis bien barbus ; qu’il faut le mettre foi tremper dans une liqueur grasse, où il ain y ait du vin , & qu’on ait mise chausses Occ sur le feu; & qu’il faut aussi préparer la Voi terre avec soin , & semer en pleine Lu- çhc ne. Je n’en sai pas davantage. Quelqu’un Je j plus versé que je ne suis dans le stile énig- der matique des Chymistes, nous donnera la clef de cette allégorie. le i i°g J. OBSERVATION. d es Si par hazard quelqu’un de ces secrets ne réuíîìssoit pas en quelque lieu, il ne faudroit pas pour cela condamner le procédé. Je fuis persuadé que le meilleur secret ne peut convenir à toutes sortes de terres, comme je l’ai observe après M. de la Quintinie. II faut faire l’expérience d’abord en petit, avant que de se hazarder à faire beaucoup de dépense. M. Boyle est admirable sur ce point. Ií a fait un Traité exprès touchant les expériences qui ont réussi une fois ou deux, & auxquelles on ne sauroit revenir. Peu de chose change le régime dê la Nature, & fait manques une expérience. Quand on ne réussi 1 pas; bien loin de se gendarmer, ôc d’a- <}ue ^ue «íii ] the Co u Hìei v oi c ’eí t Ur; *e$. déc ^Ol Lr par torr 'il saut I rt démettre , où il lauffet irer la ie Lu- Iqu’un énj^- iera la s. ■ es se' ; lieu, îmnet meil' toutes ) serve : faire ìt q« e ie dé' ùr ce tou- réu$ )n ne ige I e nquet réuíîî c c d’ar SUR IA VÉGÉTATION, fl Wdonner l’entreprise, comme si elle étoit téméraire ; il faut examiner avec se>in en quoi l’on n’a pas été éxact. C’est a *nsi qu’a raisonné M. Boyle en plusieurs Q ccasions, où lui & ses amis ne trouaient pas ce qu’ils efpéroient, 11 dit des Çhoses íur ce sujet, très-estimables ; mais I e ne m’arrête ici qu’à celles qui regardent les secrets de la végétation. Je me souviens, dit M. Boyle, que célébré Bacon & plusieurs Physio- . *°gistes assurent qu’il est aisé d’avoir des Roses tardives, & qui ne viennent ^Ue vers la fin de l’Automne. Ils disent ì u e pour cet effet il ne saut que couper ^ Printems les bouts des petites branles , où les boutons des Roses commencent à paroître. Cependant beau-, c °up de personnes ont essayé inutile- ^ent de faire cette épreuve. Après saisir trouvé fautive , on a conclu que Cç st une des chimères, dont les Natalistes entretiennent les gens crédu- , e s* Pou r aller à la vérité tout droit, je e dare, dit M. Boyle , que j’ai appris de Jardinier, que ce secret manque Uï la plupart des Rosiers , & qu’il n’y - ! 1 I' J e ceux qui ont beaucoup de force, y- de vigueur, fur lesquels on peut avoir t cette méthode des Roses en Au- 0r fìne. II faut même examiner de quel- C ij 52 Curiosités le espèce de Roses il s’agit; car enfin il est certain que les Rosiers de Damas oU i Muscats , donnent ordinairement des Roses dans FAutomne. Ainsi il ne faut pas faussement attribuer à Fart, ce qui vient de la Nature. Unde fieri potefî ^ ut , quod naturcepropriumeflfalsòartiatribua' tur . Tentamina qucc nonfuccedunt. p. 42. En esset M. de la Quintinie dit : Quam les fleurs commencent à paraître fur les Ro' flcrs muscats blancs J s’il y a des jets qui n en n ayent point * il faut les tailler à tífl pied & demi du bas : & à chaque œil d pouffera un jet qui donnera aitjji beaucoup de fleurs vers l’Automne. Pag. 116 de 1 ® culture des Fleurs. 2. Voici une autre observation de M' Boy le sur les expériences fautives. 11 st trouve des gens qui croyent qu’il ne sauf pas beaucoup compter fur ce qu’avan' cent plusieurs Auteurs; qu’il naît d’uf même arbre des fruits de différentes est péces. Ils contestent la chose , parce l’é vénement n’á pas répondu à ce qu’ils at y : tendoient. Pour moi, ajoûte M. Boysts je crois la chose trèspossible, & j’ai ^ vingt-trois fortes de greffes fur un me Pommier, & qui produisoient, cha' : cune selon son espèce , vingt-trois fojf tes de Pommes différentes. Cela réuíi |[ nxêmg à Regard d’arbres de différs de nu d’ ; Pe tie est Ve Pe lu ee< rie re mé het tri, Pei r a? Ça de d’a dir riv ‘at r et) ifin il as oU t des a faut :e qui st .ut -ibua' )uatiá ?s Ro' ■ts qui r à uA œil il lucoUp ; de 1® de M- 11 le ie íau [ avan' t d’un ces ef' ce qu? íilsat'. ìoyle»! j’ai v«- n :jC ha'! is fof réussi ffét^ sur la Végétation, yj Renre. II n’y a pas long-tems, dit M. joyle, que j’ai eu le plaisir de cueillir des Prunes & des Abricots íur un mê- *P e tronc, de qui nous espérions encore d autres sortes de fruits à noyau. Cependant en matière de fruits hétérogènes , c’est-à-dire, de diverse nature, il E' certain qu’il est difficile de les faire v ^nir sur une même tige; ensorte qu’on P e «t fort bien ranger parmi les évene- ^ens rares ,. douteux & contingens , c . es charmantes expériences, où des Cu- rie Ux ont vû des fruits de différent gen- se nourrir heureusement du suc d’un arbre. Verùm ut fruElus admodum eter °geneì unius Jlipitissucco féliciter nu- tri &ntur res ejì tantce dijficultatis J ut ex- P er imentis contingentìbus mérita annume- ra ndum fit. p. 42 & 43. j. 3* Autre expérience douteuse. On ne ^ ai point pourquoi de plusieurs greffes .Cerisier j il y en a qui donnent du ^, Ul t dès la même année; & pourquoi au tres ne fleurissent, & ne fructifient l'année d’après. Les Jardiniers or- •p nair es n’en connoissent point la raison. 0u t ce quils savent, c’est que cela ar- ® quelquefois, & n’arrive pas toujours, j, a is d es Curieux très-entendus dans r^ rt g r£ ffet, ont reconnu que très-ra- e nt la greffe manque de donner du C iij j4 Curiosités fruit, dès la premiere année ; pourvû qu’on la prenne fur un arbre fort & vigoureux j & que cette greffe ait des boU' tons à fruit. Autrement, elle ne pousse" ra que des feuilles, & n’aura des fruits que la seconde année. Cette observa' tion est très-belle, & touche de trop près à futilité du Jardinage, pour ne 1 * pas mettre ici. Pag. 48. Tant il est vra> qu’en fait d’expérience, il y faut aller ave c attention , & beaucoup d’exactitude. II. OBSERVATION. Quelques grandes que soient les ressources , que la Nature cache dans fo§ sein pour la nourriture des Plantes,elk* s’épuilent. Si quelqu'un dit Palisty ,fi' me un champ par plusieurs années, iaoS le fumer, les semences tireront le sel $ la terre pour leur accroissement : & ^ terre par ce moyen fe trouvera dénu$ de sel, & ne pourra plus produire. Psf quoi il faudra fumer ou la laisser repos' quelques années, afin qu’elle reprenne JalJìtude j par le moyen des pluies. . jD es divers Sels. pag. 2ZZ. C’est pour cela que de tout tems on eu recours à la ftercorathn j c’est-à-dif 21 à la préparation du fumier, pour redoj 1 ' ner à un champ fa fécondité épuisé î Te tat de irn ses Po fer Re Ver, Hi art H c fes est éta les Pai rat set Ue< Prc lïie fun Po &ii ourvû! Sc vi' s bou- ouste-' fruits (serva- : trop r ne 1* st vra> :r av£ c de. N. ;s res" n s soS s, elM s y »/*' 5, tan» - sel : & P ìénu# re. ?ak ■epoK :nne es.. as on 5 ; à-dire- redofl' put 0 SUR LA V É GÉTATIOÎT. y y foute pénible qu’est cette voie, pour ré- tablir les terres, on l’a pourtant considérée comme une chose de la derniere Importance. L’Italie mit Sturcutius un de le s anciens Rois au nombre des Dieux, Pour avoir le premier inventé Fart de fertiliser les terres par le fumier. Italia Kegi fuo Stercutio Faunifilio * ob hoc in~ v £ n tum_, immonalitatemtribuitj dit Pline, "l/?. iVat. Lìb, xvì). cap. 9. Les Grecs qui veulent que tous les ?tts viennent d’eux , disent qu’Augias, J>°i d’Elide, si fameux par le fumier de ^ étables remplies de milliers de boeufs, ^inventeur de la stercorâtion ; & que "ercule qui enleva tout le fumier de ces tables, apprit à l’Italie le secret de íu- d'er le z terres. , C’est ce que font encore aujourd’hui es Laboureurs & les Jardiniers. Us PaíTent la plus grande partie de l’année à passer les fumiers des animaux. En ef-' et d est certain que le sel de leurs uri- e ? > & des autres excrémens, aide mer-. j ei steuf ernent à la végétation des plantes. s c herchent par tout ce sel si actif, & fí j/dpre à mettre en mouvement les ger- s ^ des semences. Us ont recours aux Utïl ees, à la colombine , à la fuie, à la Poutre que l'on trouve dans les che- ' ltls a afin de remplacer la substances m- C iiij ~S 6 Curiosités transe quei’eau a détrempée, noyée dé' truite ou épuisée par une Végétation continuelle. On a encore cherché d’autres moyen* pour rendre les récoltes plus riches. L® fils du Milord Bréréton , dit M. de Monconys , apprit à l’Académie d’An' gleterre , qu’un Gentilhomme de te connoissance coupoit en certains tem s ses Bleds verds : ce qui faiíoit que cha' que racine ou grains produisoit jufqu’3 cent épis. M. Oldembourg croit qu’H íaisoit encore rouler quelque fardeau pa s , dessus, comme un rouleau de bois, pouf les fouler. On ajoute que le Bled étan f semé dans son épi, il multiplie infini' ment plus que s'11 étoit nud. On dí c encore qu’un nommé M. Paquer con' noît aux épis, lorfqu’ils font en fleur» ceux qui ne font pas su jets A être brute 5 d’une certaine brodée qui les grille ; # il les remarque & les réserve pour les te' mer. Le remede contre ce mal est d’ate; battre cette rosée quand elle est tombes fur les Bleds, en passant dessus, une cof'j de tendue. On raconte que dans la Prof vince de Chechir en Angleterre, a^, d’empêcher ce grillement du Bled , laisse celui qu’on veut semer -vingt-qu 3 ' tre heures dans de la fa u mu r , avec quelle on mêle auffi du Bole ; puis on ss ée dé' station ioyenS £S. Ls M. de d’An' de ft s tennS :e cha' iusquft t qu’il :au pa s , pou.í i étanl infini' )n di s ■ con' fleur, brûlé Ile 3 » les ft' t d'aft omb Voyage. Tom. ij . Pag. 62. Cela nous apprend que les Cornpa- Rnies, compoíées de tout ce qu’il y a âe plots savant,, & de plus grand dans le ^onde , se font une étude singulière de Percher le secret de fertiliser la terre, ^ de multiplier les grains. III. O BSE RVATIO N. . Je ne me fuis appliqué à ramasser ici toutes ces différentes maniérés de multiplier le Bled , qu’afin d’être utile à tout e monde ; car il y a de ces maniérés, st u on ne pourroit pratiquer qu’avec beaucoup de peine , & de dépense , dans Jfts Provinces, où les autres seront d’un ' a cîle usage. Sur ce grand nombre de pro - Ce dés, non-seulement on a la liberté de c hoifir ce qui convient le mieux au pays, ftais bailleurs fur ceux-là , on se peut °rmer de nouvelles ouvertures qui réus- ^ont peut-être encore mieux. II y a Pftfìeurs matières dans la Nature, qui a °ondent en sels ; & toutes ces marie- r p s sont admirables pour la multiplica- des grains, & pour la végétation,! ** Cs ' plantes.- II est parlé dans la Répits G v- pS Curiosités blique des Lettres, d’un chou monstrueux que tout le monde alloit voir pas curiosité. La tige en étoit grosse comme la cuisse, & cette tige foûtenoit sept ou huit pommes de chou d’une grosseur énorme. On se doutoit bien que fendrait,-où il étoit, lui avoir fourni de copieux alimens, mais on ne soupçonnoit pas ce qui pouvoit savoir rendu si gaillard, & d’un volume si extraordinaire. Le tems vint qu’il fallut l’arracher. On chercha vers le pied la source de son embonpoint ; on trouva tout joignant la racine, un savate, qui s’é- toit rencontré là par hazard, & qui avoir amplement alimenté cette plante potagère. II faut si peu de chose pour aider la Nature, qu’on doit être surpris de ce qu’on ne voit pas plus souvent des produétions singulières & merveilleuses. Les Laboureurs, les Jardiniers, lç s Vignerons suivent une certaine routi^ ne qu’ils tiennent de leurs peres, & qu’il n’tst pas aisé de leur faire changé en des usages plus utiles , & souvent moins pénibles. Quand on est parvenu à un certain âge, on ne veut rien appren' dre fur fa profession. On croirait que ce leroit retourner à l’école. Combien de fois les vieux Médecins, dans le siécle passé, se révoltèrent-ils contre la circiít S 17 R LA VÉGÉTATION. dation du sang qu’on venoit de décou- Vr ir ? Ces bonnes gens ne croyoient pas qu’il y eût rien dans la Nature à apprendre pour eux. Combien de combats où ìon a répandu beaucoup d’encre mêlée de bile, se sont-ils donnés, pour empêcher l’usage de l’Antimoine, qu’on in- tr oduisoit dans la Médecine avec tant de raison & de sagesse ? Le Savant qui écou ■? devient plus savant : Audiens japiens * •fapientior erit. Proverb. cap. i. v. y. Chapitre II. Cette Multiplication du Bled qui ejl fondée fur la raison & fur s expérience , se fait avec succès dans les Jardins, fur les Vignes , & fur les Arbres fruitiers , <£r mime dans fa famille des Animaux. Combien °n augmente par ce moyen le revenu des biens de la Campagne. C E que nous avons dit au sujet des germes , donnent une grande ou- ^erture pour entendre tout le mistere de ^ multiplication du Bled ; car enfin s’il E constant que le germe contienne C vj ÓO CURIÔSITÉS réellement la plante gui en doit naître» tous les grains & toutes les plantes gui en naîtront dans la succession des siécles , c’est un acheminement à comprendre, quepòur multiplier le Bled, il ne s’a- gït gue d’ouvrir le trésor enfermé danS le sein de chague grain , & de développer en un an ce gui ne se développe- roit gu’en trois ou quatre ans. En effet c’est-làtout lebutdenosrecherches.IIs’a- git, de trouver un agent, gui soit propre à ouvrir à développer une partie de ce gui est renfermé dans le sein d’un grain de froment. Nous disons donc que ce gue nous nommons multiplication , n’est pas une formation de germes nouveaux; ce n’est qu’une dilatation du sein de la graine. Dans ce sein si petit en apparence, mais si fécond & si vaste aux yeux de l’esprit, il y a une infinité de germes, de petits embryons de plantes gui y font contenus,& que la succession de plusieurs milliers de siécles ne peuvent pas tout-à-fait développer, & encore moins épuiser. II y a dans un gr^in de bled un fond , & un trésor de fécondité inépuisable. C’est un ab/" me qui n’a ni fond, ni rive. L’ima- gination s’y perd ; mais qu’impor- te. C’est gue cette étendue de fécondité gui ne reconnoît point de bor^ s u r- l a Végétation. St fies, n’est pas de fa compétence. L’esprit qui seul a fait cette découverte par t>ne enquête exacte, & par une induction certaine, doit seul connoître de e ette merveille. II y a assez de Bled renfermé dans un seul grain pour remplir, tous les Grenierçs des Pharaons, Rois d’Egypte. o. Augustin avoit bien compris cette' surprenante Physique , quand il saisoic tant valoir ce que la Nature cache à nos yeux dans chaque grain dé Bled. 11 y a, dit ce Saint Doóteur, des choses quêtons foulons fous nos pieds, qui surprennent & qui ravissent , quand^on les considéré attentivement. Onnepeurs’erv occuper qu’on ne s’extasie. La force & la fécondité inépuisable des semences, est une de ces choses où ì’imagination se déroute, & ne sait où elle en est. Quàm tftulta ujìtata calcantur J quce considérât a' fiupentur fient ipfa vis ftminum ? Épist. ii j, a d Volusian. A voir ce que la Nature sait dans lès ar bres, on auroit lieu de croire, qu’uti arbre tout entier, fa racine, son tronc , a vec ses branches, & peut-être ses feuilles , n’est qu’un assemblage , & un composé d’une infinité de petits embryons, ' d’où naîtroient, si l’art vouloit aider 1*. vature, une infinité d’arbres de la me- 62 Curiosités me espèce. C’est en effet ce que feroit la Nature , si sart se mettoit de la partie. Quand je dis qu'un tronc d’arbre , & ses feuilles mêmes ne font véritablement qu’un amas de petits embryons d'arbres, je parle sérieusement. Tout l’arbren’est qu’un composé de graines & de germes r d’où il n’est pas impossible de faire naître d autres arbres. Le Curieux Joannes-Bavtifta Trium- fettij entre les belles expériences qu’il a faites, il en rapporte une qui nous met au fait que j’avance. II a planté detrès- petits morceaux d’une plante de Tithy- male qu’il avoit mis en piéce. De chaque petit morceau, il en est venu autant de Tithymales de différentes espèces, savoir , le Characias, le Myrjìnites , le CypariJJìas . Voilà une propagation d’une maniéré assez nouvelle : & ce qu’il y a encore de curieux, c’est la variété des espèces , quoique le tout vînt du débris de la même plante. Inter alìa tentamìna euriofa notavit è minimìs frujtulis Titky - mali variarum Jpecierum enatas plantas j Tithymalìum Myrftnitem J Chariacam , £r Cyparijjìmm. Act.Eruditorum. Apri- lis, 1686. pag.218. Tant il est vrai que tout est graine , & semence dans les plantes. II ne s’agit que d’ouvrir & de développer tous ces SUR LA VÉGÉTATION. 6z ■germes concentrés dans toute la subílan- c e de chaque végétal. Cette vérité va encore paroître aveò âe nouvelles lumières dans les expérien- c es, où les développemens que l’on va faire fur un Saule. 11 ne faut qu’un peu ^'attention. Que l’on étête un Saule, il renaîtra au haut, & le long du tronc une centaine de rejetions & de branches nouvelles ; dont il n’y avoit aucune trace ^ux endroits d’où elles poussent : &. íî on coupoit ces rejetions, il en pousse- r oit d’autres par ailleurs. Ces cent rejetions après un certain tems, fichés en terre, produiront cha- e un cent autres Saules. Ces dix mille Saules qu’on étêtera à tour tour, nous assurent pareillement de Cent Saules chacun. En voilà un mil- hon ; pui s cent millions, ensuite une dizaine de humiliions; les trimillions viendront : Le à moins d etre Mathématicien , on se perd ici dans ce calcul, & on e ft forcé de lâcher pied. Si on joint à tous ces Saules ceux que le Saule trisayeul à continué de produire de son côté, depuis ce tems-là, & qu’on veuille pouffer l a P r0 gression Géométrique plus; foin ; cette postérité de Saules montera. $ haut, que la tête tournera au Math d- I <5* CURIOSITÉ’S maticìen même. Tellë's sont les riches- les j tels sont les trésors de la Nature. La multiplication est donc le deve- J loppement de ces germes concentrés, > - pliés, enveloppés dans le grain. Dans le germe d’un grain de froment, outre le principale tuyau qui doit sortir cette année , il y en a d’autres enfermés, que j’appelle latéraux ou jumeaux, qui sortiraient aussi, s’ils étoient développés par quelque agent rempli de la vertu germinative. Jedisencore plus: le tuyau principal qui renferme une grande & réelle postérité, peut-être ouvert par le même principe de germination, & produire dès cette année, ce qu'il réíervoit pour les années suivantes. Ainsi toute notre multiplication ne tend qu’à obtenir par une voie Philosophique, la récolte que l’on n’auroit par l’Agricultu- re ordinaire, qu’en trois ou quatre années. Outre ce germe qui fe vient de manifester par un tuyau bien verd, & de belle espérance, il y en a dans ce grain de Bled, urre infinité d’autres qui ne font qu’attendre qu’on rompe leurs liens, & qu’on les mette en liberté, pour fe produire aussi. La liqueur dont nous nous servons pour macérer .le grain, & pour ls gonfler, ne sert qu’à hâter Sc avancer une germination que le Labou- e an- )ro- SUR LA VÉGéTATrOtf. 6s r£ ur peu intelligent abandonne pour les innées suivantes. C’est une eípéce de superfétation J de far-confection par laquelle un grain de Bled conçoit, & por- te divers létus, qui, dans l’ordre commun de la Nature, ne dévoient naître ^ue successivement, Kc dans des années différentes. La Nature fait quelquefois d’elle-mê- ces développemens précipités, & ces superfétations , qui lont des monstres dans la famille des Végétaux. Exemples. Les Sa vans d’Allemagne parlent d’un Litron merveilleux qui en contenoit deux autres dont l’un étoit très-parfait, Eieur & plein de pépins. Le second n’é- t0lt qu’un embryon de Citron. Ëpke- tnarid. Curioj. Nat.1673. Observât. LiV. Pttg.^6. Dans le même endroit, il e st fait mention d’une triple Rose, ou si 1 on veut, d’une Rose d’où il en sor- t0J t deux autres, distinctes & élevées- au-dessus. Observât, lv. Sans doute ces 'developpemens prématurés ont été causés par quelque abondante humeur sa- line de la terre; & deux de ces Rôles S u i ne dévoient paroítre qu’en 1673- s £ font produites dès 1672. Nous ex.- 66 Curiosités pliquons de la même maniéré une autre Rose , du cœur de laquelle il en sor- toit une toute blanche , belle & accompagnée de feuilles & de boutons. Dans rObservation cxlj. paroît un autre Citron qui en rensermoit un autre d’une beauté singulière. Le P. Ferari , Jésuite si savane dans la belle Physique, nous apprend que ces fruits monstrueux & ces superfétations ne lont point du tout rares dans la Toscane; sur-tout du côté de ía mer, & dans les environs de Pìetra-san- tas parce que, dit-il, les vapeurs salines & tièdes de la mer voisine mettent dans cette contrée toute la Nature en belle humeur. Les terres y font fertiles. Là régné un éternel Printems. Les arbres toujours fleuris, crèvent des aîi- mens excessifs que le terroir leur présente, & de quelque côté qu’on se tourne, on voit par-tout des fruits jumeaux, des superfétations inconnues ailleurs, & cent végétations monstrueuses: Provenire lì- monem prœgnantem ìn /Etruria ..... ao propter maris proximi egelidi habitum mare fertilì. Arbuscula ut flore ajjtduo ver agere perpetuum Hesperid. lib. ;. c. ip. p. 265. Au reste cet habile Physicien remarque qu’il n’y a point d’arbres oh la Nature fasse plus de singeries, que fur sur ia Végétation. 6j k Citronnier. On trouve là des Citrons qui ont des doigts. II y en a ou l’on Voit une main fort bien figurée. D’au- tres ont deux mains jointes. C’est à cette occasion , qu’ìl dit fort agréablement, que la Nature toute gaillarde se divertit là à faire que des arbres accouchent de figures humaines : Et arboreo partu panes audet humanas ludere. Hefperid. Lib. z. cap. 6. L’Obfervation cxv. nous peint trois plantes de Sègle extraordinairement chargées d’épis. On n’oublie pas de remarquer qu’elles avoient végété en* un endroit succulent qui avoir fourni tout ce que leur appétit pouvoit désirer ; pag. I 5'3. Tout cela s’est fait par hazard. L’industrie des hommes n’a point de part là-dedans. C’est donc aux Laboureurs à aider, par leur travail & par leur capacité, à ces développemens, auxquels la Nature don* ne d’elle-même. On ne le sauroit trop dire. 11 y a dans un seul grain de Bled fiien développé, dequoi nourrir les cinq mille hommes, que notre Seigneur rassasia de cinq pains d’orge fur la Montagne, s. Jean cap. 6. S. Augustin, auffi grand Philosophe, que Théologien, dit íur ce miracle, qu’il est étonnant que les hommes en soient fi fort frappés 68 CURIOSITÉS, d’admiration , pendant qu’on n’eft point touché de ces oeuvres incomparablement plus merveilleuses , que Dieu fait tout les jours, comme font celles de fa Providence , par lesquelles il gouverne le monde, & préside à toute lá Nature. On n’en est point surpris, par- ce qu’on voit ces merveilles tous les jours*. ajfiduate viluerunt. C’est ainsi que personne ne fait attention à ce trésor inépuisable , que Dieu a renfermé dans chaque grain de Bled. Ita ut benè nemo dignetus attendere opéra Dei mira & jìupendú in quolibetfeminìsgrano. On s’étonne que cinq mille hommes ayent été nourris de cinq pains ; c’est qu’on ne songe pas que la vertu qui a multiplié ces cinq pains entre les mains du Sauveur, est la même par laquelle tous les ans quelques grains semés rendent de st abondantes moissons. Ces cinq pains étoient comme des semences, non pas à la vérité déposées dans la terre, mais entre les mains de celui qui a fait la terre , & qui Fa rendue enceinte de tous les sels, d’oìi les grains tirent, tous les ans, le développement de leur fécondité : Panes autem illi quinque J qiiafijemina erant non qui- dem lerrce manducata fed abeo j qui ter- ram fecit J multiplicata . Tract. 2q., in Joann. SUR LA VÉGÉTATION. dp Une si bonne Physique trouvera des ! Patrons par-tout. M. Dodart, de P A- c adémie Royal des Sciences , & si con- ^u à la Cour par la piété & par sòn : Audition, raisonnant sur la multiplication du Bled par art, l’explique par le développement des germes. J’ai crû long- tems, dit-il, qu’un grain de froment ne pouvoir pousser qu’un tuyau ; mais ) ai eû entre mes mains deux troches de froment , dont Pune sembloit con- ! tenir plus de cent tuyaux , & l’autre > plus de soixante. Celui qui m’avoit mis c es troches entre les mains , vôuloit prouver par là , qu’une liqueur, dans la- stuclle il assuroit avoir mis tremper les deux grains de Bled, d’où il diíoit que ; Ce s deux troches étoient issues , aug- ' mentoit à l’infini la fécondité naturelle du froment. Je laisse à part ìe fait de la Préparation, qni peut-être vrai, au moins en partie ; puisque M. l’Abbé Gallois en a vu quelques épreuves, quoique moins fortes, n’allant qu’à huit ou dix tuyaux fur un pied.... Si c’est une vraie multiplication du germe d’un seul grain e. n plusieurs tuyaux ; & si la préparation en est la cause, il y a beaucoup d’ap- Parence que cette bumectation d’une graine humide par une liqueur, ouvre conduits du germe , contenu dans 70 Curiosités ía graine ; de sorte que tombant dans une terre bien cultivée & succulente . il y rencontre toute la fève néceísaire'pour mettre au jour tout ce qu’il y a de ressources naturelles. Mémoires de l’Aca-, démie Royale des Sciences. 1700. pag- IJ7- M. Dodart parle ensuite d’une autre sorte de froment, dont la fécondité est étonnante. J’ai vu, dit il, chez M. le Président de Tambonneau deux pieds de ce froment, que G. B. appelle TritV , cum spicâ multipiici. L’un de ces pieds avoir trente-deux tuyaux. II y avoir j dix épis íur chaque tuyau. Chaque épi avoit trente grains, & l’épi du milieu du tuyau en avoit rrente-six. Si l'on multiplie tout cela, on trouvera trois cent- vingt épis, & neuf mille sept cent quatre-vingt douze grains de Bled, venus d’un seul grain. pag. 1 yp. La multiplieaeion appliquée aux Vignes j aux Arbres fruitiers ^ aux FL urs auX Légumes J même aux Animaux. Par les raisons & par les expériences» que j’ai rapportées, on augurera aisément que cette mulrfplkation peut également j se faire sur les Vignes & sur les Arbres j fruitiers. Cela suit nécellairement A | SUR LA VÉGÉTA TIO N. *Jt évidemment des principes que j’ai cotés. Les personnes accoutumées à raisonner par principes, & conséquemment, sauront déja prévenu là-dcfius. Iln’est ^oncplus question , que de savoir, coma ^ent il s’y faut prendre. I. Pour planter des Vignes, ou des Arbres, on fait un trou à ^ordinaire, le Plus étendu est le meilleur. On met au fond deux pouces de bonne terre, on y place la Vigne ou l’arbre ; puis à la * a dne on met de la matière de la II. Multiplication. Si on y en met beau- c °up , la plante végété, meurit plutôt, ^ fructifie plus abondamment. Ensuite . °n jette de la terre deíîus, & de dix ans J 1 ne faut y toucher. Point se laboure, Point de fumier. II y a du fruit dès la se- c °nde année. Si les Vignes ou les arbres font en Plsce, l’on en découvre le pied à un pou- j* près des racines, & l’on y verse pareil- er nent de la liqueur de la II. Multipli- ^don. Cela fait, on remet la terre sur es racines, fans parler d’y travailler de Pfos de dix ans. II faut avoir foin d’arra- c for les méchantes herbes qui pourroient goitre au pied, & se nourrir de ce qui 11 ust point destiné pour elles. Les arbres qu’on alimente de la sor- îfo se renouvellent, deviennent forts, 72 Curiosités & pleins de fève Sc de vigueur. Ils parieur un^ abondance de fruits, qui étonne , & qu’on ne comprend pas. Ces fruits font de meilleur goût, & beaucoup plu 5 gros, & plus beaux qu’à l’ordinaire. Et ce qui est très- considérable , c’est que les mauvais tems leur font moins d’ou- trage. Après avoir parlé aux Laboureurs» ii faut ici animer le courage des Lignerons , & les assurer , que s’ils traitent ainsi leurs Vignes , ils auront des vendanges plus belles, qu’ils n’ofent le désirer. Les Fleurìftes triompheront aussi. U 5 n’ont jamais vû Flore si favorable à leurs vœux. Tout conspire à leur donner des fleurs , plus doubles, plus grandes , plus vives, plus variées , que tout ce que les plus fucculens parterres lent ont jamais présenté. Soit que les fleurs viennent de graines, d’oignons, de racines , de marcotes, de boutures, &c.-notre Matière universelle bien & dûè‘men £ ménagée sur toutes ces choses, doit fai^ espérer de voir des monstres, & des productions inconnues , & toutes admirables dans FEmpire de Flore. On aura davantage de fleurs : elles feront plu 5 grosses, & d’une odeur plus fine, & plu 5 agréable. Quels Oeillets ! Quelles Anémone 5 - 1 5 por y éton- fruits 3 plus reiEt t que d’oU' eurs t ïgnt' litent ven- défi' ì. lis ale 3 don' ;rafl' tout leur leusS raci' no' neft faite ptP' iira' aut 3 plus plus r L. vne ïiesi SUR LA VÉGÍTATION. 7j> Mones, quellesTulipes n’aura-t-on pas ? Il y aura par tout du sublime & du Merveilleux. Les Jardiniers qui cultivent les plants potagères , seront par là leur fortune. II me semble que je vois déja dans «os marchés , des choux, des laitues, des chicorées, des melons, &c. d’un v olume, d’un goût, d’un parfum aux- Huels tous les siécles passés n’ont rien vû de comparable. On aura des poix, des fèves trois semaines plutôt. Les fraises « e ^endormiront pas : elles paroîtront déformais fur la scene des bonnes tables dans un tems où autrefois elles n’ache- Noient qu’à défleurir. Quittons présentement les campagnes etl femencées , les Jardins fruitiers , & Potagers où tout pouífe & végété d’une Maniéré heureuse & nouvelle; & entro,ns ? an s les ménageries. II saut que l’agréa- abondance régné par tout. La famille des animaux n’est pas moins digne d fi s miracles de la multiplication, que la Mstiìle des végétaux. Les animaux ne feront que croître 8c e Mbelli r , si on mouille leur son, ou íî P 11 trempe leur grain avec la liqueur de j? Multiplication. 11 y faut fans doute ^ la propreté : cette liqueur doit être Pms claire Sc plus nette que pour le L- Pank. D >74 Curiosités grain où le limon même est d’un utile usage. Je voudrois donc que l’on composât une liqueur exprès pour les.ani- i maux , bien filtrée , bien préparée , dont le nitre seroit la baze, & dans laquelle l’on ne meuroit que des sels de plantes en fleur & en graine. II faut laisser un peu imaginer le r este à ceux qui aiment l’innocent ménage de la campagne. J’en ai assez dit, pour que des personne 8 : qui y sont mieux entendues que je ne fuis, aillent plus loin que je ne le 8 méne. Je sai par expérience que d’un cheval , dans l’avoine duquel on a mis u» peu de cette liqueur, on en tire des set' vices qui ne font pas imaginables, h n’est rien qu’il ne franchisse, & poin 1 de mauvais pas, d’où il ne se tire. Si b 5 Palleíreniers pratiquoient ce secret, ^ ne perdroit pas tant de chevaux à l’e s ' mée; & d’autant plus, qu’ils résiste^ par - là parfaitement bien aux maladif contagieuses, qui se mettent de tems d 1 rems íur les bêtes. Les Laboureurs, les Rouliers ^ lont souvent ruinés par la perte de le^ chevaux, de leurs bœufs & de autres bestiaux, ne seroient plus expob aux mêmes désolations. Les vaches indemnisent par une utile com- ; ani- * dont juelle antes er un iment . J’en onrie 8 ; je ne ie le 5 che' iis uí Si 1« 5 t, o» à W íisten' iladi«* :ms í(1 -s ^ e len p . ie e? SUS LA VÉGÉTATION. 7j fraordinaire abondance de lait, des frai que coûte la liqueur. Les poules payent e n œufs. Tout multiplie. Les troupeaux, les volailles ne font pas reconnoissables. Tout E vif, alerte & gaillard dans la basse- c °ur : & comme de tous les ménages, felui qui regarde les bestiaux, est le plus lucratif, & qu’ill’a toujours emporté lur J? culture des Bleds & des vins, on ne jauroit trop estimer un secret qui favorise ‘ a multiplication des animaux. Les Patriarches les plus riches, n’étoient ni Laboureurs, ni Vignerons : ils étoient ^asteurs de troupeaux. Aussi le commer- de bestiaux a-t’il été de tout tems le Plus enrichissant, & les pays de pâturais font les plus opulens. L OBSERVATION. P* Sans qu’il y ait aucune éxagération, peut assurer que le revenu d’un bien ? L campagne, par cette multiplica- augmentera considérablement. Je u Ppofe qu’on n’exécutera que fort imparfaitement nos diverses maniérés de pjultiplier le Bled ; & que la récolte ne e Pondra pas à ce que certaines gens ont Publié de secret ; savoir que la multipli- ai ion va ordinairement à deux cens D ij 7 6 Curiosités cinquante épis fur une tige. Je n’est mets que vingt. II y en aura davantage fur un grand nombre de tiges. Par la cul' ture ordinaire il y avoit peut-être qua' tre épis par la tige. Hé bien, je wS renferme là. Une terre qui donnoit eN Bled mille francs par an, donnera cint naturellement contrariants , par la ^auyaise disposition de leur cœur & de l eur esprit , & qui ne se piquant pas deaucoup de probité , ne manqueront P a s de continuer leurs mauvaiíes déclamations , & de publier, que le secret d amender les grains , & la terre, n’est st u ’une chimère. Comme j’ai laissé tom- leurs invectives, je n’ai point dessein d® les révéler ici. Cela s’est détruit de oi-même. C’est une chose faite: mais affection que j’ai pour le bien public , °blig e à avertir les períonnes capables de raison, qu’il n’est rien de plus confit > qu’il y a un art de procurer au ter- r ° lr le pl US innrat, une heureuse sertili- JJ lllj 4 So Curiosités té, & que par ce travail on tire de I 3 * terre tout ce qu on en veut tirer. Par le secours des fumiers , on échauffe le terrain le plus froid, & par les arrofemens on rend fertiles les fonds les plus arides» les plus brûlants, & les plus stériles. J e ne comprends pas , comment on peut avoir le front de contester une choie st évidemment certaine, 8c confirmée pat Pexpérience. Polybe observe, que fous Maífinissa, la Numidie devint abondante en toutes fortes de fruitr, qui auparavant étoient tout-à fait inconnus dans le pays. Avant ce Prince, qui rendit les Numides polis, laborieux, & qui leur apprit à cultiver la terre , comme dit Strabon : Mafiinijja Numìdas civiles, & Agncu.lt oses reddidit. Geograph. Lib. xvi)‘ pag. 561. cette Nation farouche ne con- noissoit que les Dattes, & les Palmiers» qui portent ce fruit. Ainsi , quoiqu’en 'puissent dire nos Contradicteurs, il est certain que par le travail, & l’applica- tion, on vient à bout de furmont-r I 3 ! stérilité du plus mauvais terroir, & de vaincre l’inclémence du Ciel le plu 5 dur, & le moins favorable. II est heureux de naître dans des régions naturel' lement fertiles, où pour un grain de bled on en recueille cinq cents, & qui donnent d’excellens Melons pesants çen c ST7R LA VÉGÉTATION. Si trois livres ; des Laitues de sept livres & demie, des Raves de plus de deux Ruines de longueur , & qu’à peine un homme peut embrasser : comme il en ?ro!t dans le Pérou. Garcilajfo de la Véga, **ift. des Incas. Liv . ix. c. 29. U n’en c °ûte pas tant de peine, & les fruits v ont souvent au-delà de tout ce qu’on Pourroit esperer. Mais il saut pour cela terre telle , qu’Otoniel en saisoit demander une à Caleb : Vous m’aveç donné une terre toute feche , ajoutes -y- en autre ^ où i ly ait des eaux en abondan- Ce •' Terrain arentem• dedijli mihi , da & * rri guam aquis. Judic. cap . 1. rc iy. En e ffet quelque brûlant que soit un cli— ^ a t, on y sera des prodiges en fait de *égétation , par le secours des arroserons amples & fréquens. C’est pourquoi Philoítrate , dans ses Tableaux, re présente Neptune le Dieu des Eaux, équipé en Laboureur, qui conduit une c Wruë tirée par un joug de bœufs, pour kire comprendre la nécessité qu’a la ter- re d’être bien arrosée, sans quoi on ne P^ut rien.espérer du labourage : Philojl. ^ a bl. intitulé les Ifles. Sur quoi Vigené- r ? e ajoûte, qviilfaut que dans VAgriculture Neptune intervienne, comme Vauteur de t ou- * fertilité fir végétation . Ge que je remarque.exprès, afin d’encourager ceux qui D v 82 Curiosités ont des fonds de terre peu propres paf eux-mêmes, à répondre à l’attente dt* Laboureur. On peut fe promettre tout d’un travail continuel. La terre, pouf peu qu’on lui donne d’amendement j paye avec usure la peine qu’on prend a la cultiver. Quel contentement d’avoif forcé la Nature , par l’aide de i’Art, 3 nous donner dans des terroirs arides, toutes les douceurs , & tous les fruits ^ qu’on ne tire d’ordinaire que des terres grasses & fécondes ! Ainsi ne nous las' sons jamais de remuer , d’amender I 3 terre, d’y semer 8c d’y planter. Par là, dit un Savant , on fe file de longs jour* tout de soie, 8c d’or. Marc Paoío a f' sure , que les Astrologues du Grand Cam, lui faifoient accroire, qu’il n’y 3 rien qui fasse vivre plus long-tems & plus agréablement, que de planter uns grande quantité d’arbres. Si cela n’est p^ tout à-fait vrai, du moins est-il ces' tain que la satisfaction qu’on en retire ’ peut beaucoup contribuer à nous fai^ une vie douce, & innocente. Marcs D- 01, io • L»-1 f» C. 22. C ) d f; q c 8 r d P t< » tr C sïïr la Végétation. 83 C H A P I T R III. CV qu 1 ìl faut observer , pour faire un Jardin agréable <& utile. U Ne terre est véritablement bonne, quand elle fait d’elle-même Jes productions fortes Sc nombreuses ; * a ns qu’eile paroisse jamais épuisée. Lors- ^u'on voit dans un fond des plantes Cr °ître à vûë d’œil, se tenir toujours vitreuses , Sc ne céder qu’à' l’extrême ^ J gneur des gelées , on ne doit point ^uter que le terroir n'en loir très - pro- à la Végétation. C’est dans ces sor- ' tç s de fonds , que se produisent ces Visons riantes, dont parle Virgile, & peint si naïvement, en les nom-* lut as fgetes. Georg. 1. C’est là ^ Ue Cérès , Baccus & Pomone nous r ? n nent de riches & délicieuses récoltes. 2. '^herafrumentis J queniam sapée J altéra Bacc/xo. ^ais aussi il y a des terres teilemen* ^uvaises j que , quelque soin qu’on ap- D vj, 84 Curiosités porte à les cultiver , elles ne répondent jamais ni aux travaux, ni aux espérances d’un Laboureur, ou d’un Jardinier vigilant, & soigneux. Elles font com- me ces montagnes de Gelboé, dont parie FEcriture, & qui furent frappées d’ust anathème éternel, & livrées à une stÇ' j rilité invincible: Montagnes de Gelloe» | que la rosée j & la pluie ne tombent j am^ sur toi- Qu il ri y ait point sur tes coteau# de champs dont on offre les prémices. 2. LiV' des Rois, chap. i. v. 21. II est certain, qu’ií y a des fonds tellement arides , défectueux , & stérile 3 par eux-mêmes, quel’Art tenteroit inutilement d’en corriger la malignité. Ce feroit mal placer son travail, que de s’oc- cuper à la culture d’une terre ingrate > opiniâtre, & incorrigible. Si l'on avoir à choisir, ilfaudroit fan 5 doute ne dopner fes foins, & ne confis son Bled, sçs Vignes, ses Arbres , & fes Plantes, qu’à des terres excellentes- mais comme elles font rares, il íe fa^ £ souvent contenter des médiocres , dotf £ une bonne culture ne laisse pas detir£ f d’amples ressources. II y a cependant de tristes & matf" vaifes situations, dont on est forcé s’accopnmoder, & dont une grande d e ' pense vient à bout de vaincre lest 11 ' SUR LA VÉGÉTATION. 8 s commodités , & le mauvais naturel. ÍVl'ais combien y a-t-il peu de ces heureux mortels, que le Grand Jupiter a mis en état de faire de pareilles entreprises ? Le Potager d u Roy à Versailles, est la plus telle chose, qu’il y ait au monde dans c e genre-là. La grandeur &la magnificence de ce Monarque , singulier en Coûtes choses, y éclatent d’une maniéré, qui saisit les moins sensibles, quand ils Apprennent comment s’est formé ce Jardin merveilleux. Le lieu, où est aujourd’hui ce Potager, étoit un grand Étang, un Marais, & l’égout des Montagnes voisines, & par conséquent l’endroit le moins propre qui fut jamais pour l’usage auquel °n le destinoir. Le 1 tems & la dépense °nt sait violence à la Nature , & ont formé,un des plus grands miracles de P-Art. 11 a fallu remplir l’Etang, élever ce Marais, donner uh autre cours aux eaux qui viennent des montagnes & kur assigner un nouveau rendez - vous. "Pout cela s’est exécuté à merveilles. Et -styoique ce grand terrain ait près de Vi ngt-cinq arpens de superficie, on l’a pourtant élevé par tout de douze pieds de labié, qu on y a transporté : ensuite fur ce sable on a posé les terres , qu’on prenoit à la montagne de Sataury. Ces 86 Curiosités travaux étonnants on rendu ce terrain d’une superficie plane : & sans aucune pente. Mais combien a-t-il fallu encore apporter de terres nouvelles & de fumier, pour élever chaque quarté, afin que les eaux s’écoulassent plus facilement dans le grand Aqueduc , de peur que tout ce Jardin ne redevînt un Etang , ou du moins une marre bourbeuse &c inaccessible. La dépense de ce grand Ouvrage, qui a fait tant de bruit, est amplement récompensée par le succès , qui a fait beaucoup d’honneur à M. de la Quinti- nie. Ce fameux Potager est distribué en trente-deux Jardins , tous fermés de murailles, & au milieu desquels est un grand Jardin d’environ quatre - vingt toises en quarté. M. de la Quintinie en donne un plan fort exactement gravé, dans le premier volume de son InftruElion pour les Jardins fruitiers , & Potagers* Je n’ai rapporté tout cela , qu’afin de faire voir ce qu’il en coûte, lors qu’on n’a pas à portée un bon fond , pour faire son Jardin , & qu’on est forcé d’adopter une mauvaise terre , au défaut d’une bonne qu’on ne trouve pas dans son voisinage. 1. Quand on peut choisir une place, pour y former un Jardin, il faut que le fonde'n soit bon. Et pour qu’ii soit tel. SUR LA VÊGÍTATïCrîf. 87 ri doit avoir les qualités suivantes» 1. La terre ne doit point avoir de mauvais goût, autrement les fruits & les légumes en tiendroient infailliblement. Les Vins , qui prennent le goût du terroir , font une preuve convaincante de cette vérité» 2. La terre doit avoir au moins trois pieds de profondeur. Les Arbres, pour ïéiiíGr, auííi-bien que les légumes à longue racine , comme font les Artichaux , lesBeteraves, les Scorfonnéres, les Ca- rotes , les Panais , demandent absolument trois pieds de bonne terre. Les Salades, les Choux, les Verdures fe contentent d’un fond de deux pieds. z. Il faut que la terre soit meuble,», c’est-à-dire, facile à labourer, & fans. pierres. 4. 11 faut quelle ne soit ni trop humide , ni trop sèche. La terre trop humide est froide, trop sorte, pesante Sc peu propre à la production des Végétaux. La terre trop sèche, est fans humeur , trop légers , & demande de grands & fréquens arrofemens qui coûtent exceífivement» II. II faut qu’un Jardin soit dans: tine exposition favorable, c'est-à-dire», stu’il ait le Soleil le matin, à midi, ôe foir. Cet Astre, par sa chaleur vm~ c 88 Curiosités fiante, fait monter la fève dans les plantes , & sollicite les grains & les arbres 3 faire ce devoir qui réjouit, & orne toute la nature , & d’où nous tirons nos plus délicieuses richesses. 1. L’exposition , qui est au Midi, est la meilleure, & celle qui hâte plus puissamment les plantes. Elle donne dugoût aux légumes , & aux fruits. 2 . L’exposition qui est au Levant n’est guere moins estimée que celle qui est au Midi. v Z. L’exposition qui est au Couchant passe pour médiocre chez les jardiniers. 4. Enfin l’exposition qui est auNord, d’où toussent des vents si funestes auX plantes, & aux arbres, est absolument réprouvée. III. II n’est pas inutile de marquer., que toutes les murailles d’un Jardin doivent êtte d’environ neuf pieds de haut. Sans le secours des murailles, on ne sautoir avoir d Espaliers, ni de beaux fruits & il faut renoncer aux légumes hâtifs. & aux fleurs printanieres. Et ce font là pourtant les grands agremens d’un Jardin. Comme il faut que rien n’y manque , & qu’on y trouve du hâtif, du tardif, & une abondance même pour les plus dures faisons, les murailles font né- SUR LA VÉGÉTATION? 89 Affaires ; soit afin de temperer par un P'-u d’ombre le grand chaud , qui dans * e sort de l’Eté brûleroitles Plantes tendres & délicates , soit pour les mettre durant ies premieres nuits froides, à l’a- hn des impitoyables vents du Nord, qui hwt ]a désolation de toutes sortes de pi ■mantes, IV. II faut qu’un Jardin ait de Peau pour les arrosemens, asin de le garentir de la sécheresse, qui est la grande ennemie des plantes. Sans la facilité d’avoir de l’eau, on ne peut rien espérer des légumes, qui demandent d’être abondamment humectés, fur-tout durant le Prin- tenns, & l’Eté, qui font ordinairement sujets à de grandes chaleurs, & à des hâles dévorans. On doit compter que les arrosemens font indispensables pendant sept ou huit mois de l’année. Les pluies ordinaires de l’Eté ne suffisent pas pour un Jardin Potager, ni même pour un Jardin à Fleurs. Les- habiles Jardiniers ne fo contentent pas non plus des eaux du Ciel pour les arbres nouvellement plantés , & particulièrement dans les grands, hâles. L’ardeur du Soleil, qui pénétre alors jusqu’aux racines, feroit périr ces Nouveaux arbres , si on ne remédioit Pas, p ar l e s arrosemeps, à cette funeste po C tr s r 6 s r T Ê s aridité, qui fait languir & moarìr tou í dans les Jardins. Le Prophète Roy cotr' prenoit bien que beau est l’ame de 1* Végétation, lorsque représentant l’arí' dité & la sécheresse, où il se trouvoit quelquefois par la privation des secours sensibles de la grâce , fans laquelle oN languit dans l’exercice de la piété , il I comparoir son ame à une terre sans eau» I Anima mea Jicut terra fine aquâ> Psal> ' •342. Qu’est-ce en effet qu’une terré j fans eau ! V. Un Jardin doit être d’un abord facile , pour y transporter commodément l’engrais, qu’il faut tirer des fumiers , qui se font dans les basses-cours. Tout ce que j’ai dit jusqu’ici en général d’un bon Jardin , se doit appliquer en particulier, aux trois sortes de Jardins dont je vais parler dans la fuite. Ces trois sortes de jardins, font ; 1. Le Jardin Potager. 2. Le Jardin Fruitier. 3. Le Jardin à Fleurs. Or il faut, pour tous ces Jardins dissé- rens, les mêmes avantages que je viens de décrire. Ils doivent tous également avoir 1. Un bon fond de terre. 2. Une exposition favorable. 3. Une clôture de murailles de neuf pieds. ir tou f l ■ corn' de 1*‘ i’arí- juvoit, cours : le on : é , íi s eau* Psal. terré bord | iodé" s su- ours. ;éné- j iquer ■; Jar- :e. iffé' iens aent teuf SUR IA VÉGÉTATION. §1 4* Une eau toute proche pour les ar~ r osenaens. S- Un abord commode , afin d'y porter aisément les fumiers. Sans tout cela, on ne peut pas se promettre de réussir dans le Jardinage ; & * on n’y pourroit suppléer que par des dépenses exorbitantes, qui ne conviennent pas à beaucoup de personnes j car Pour parler seulement du fond, où l’on propose de faire un Jardin, s’il se trouve que ce fond soit mauvais, ou tju’il n’y ait pas de terre suffisamment, Scelle fâcheuse extrémité n’est-ce pas d être obligé d’òrer le tuf, l’argile de ce terroir, afin d’y transporter de bonne terre ? C’est sur cela que M. de la Quin- tinie se récrie fort judicieusement: Malheur à celui quise voit réduit à faire la défense d'un tel transport ! il arrive à peu de gens de faire une Jì lourde faute . Les Anciens n’ont point connu cet expédient: du moins les Auteurs qui °nt traité du Jardinage, ne disent pas Un mot du transport des. terres, pour r ornplacer celle d’un mauvais fond. Aussi n’appartient-il qu’à des Princes, d'avoir recours à ce remède, íur tout pour les grands Jardins. J’ai connu un Particulier qui, pour avoir donné indiscrètement dans cette nouveauté in- §2 Curiosités troduite depuis peu de tems dans le Jal ; dinage, a tellement dérangé ses affaires» qu’il en a fait tout le reste de fa vie unS pénitence des plus humiliantes. En lai 1 de terres portées, il en faut laisser l'en- treprife aux Maîtres du monde. Us soiss en possession de commander aux hom' ! mes de bouleverser les Provinces en- tìeres , de mettre en mouvement toute la terre ; & c’est à eux uniquement quil sied bien , de corriger & de forcer même la Nature. VI. Il est, ce me semble, assez inutile de recommander aux personnes, qui se proposent d’avoir un Jardin , que l’on ne doit pas négliger de lui donner une belle figure. On ne manque point de choisir celle d’un quarté long, quand on a un terrain propre. VIL On est heureux, lorsqu’on le trouve de niveau, ou sans une grande pente. Cependant si la pente est considérable, & qu’on n y puisse pas remédier fans faire beaucoup de dépense» un Jardinier bien aviíé ne laisse pas de s’en lervir très-utiîement. II ne manq. '>•• ra pas de partager cette grande pente é.» différents espaces, pour en faire autant de terrasses, ce qui produit un effet qui peut avoir de grands agrémens. 11 est vrai que cet expédient oblige à faire une d, dì ni P' Y n r» d t: f c 1 le Jar ; \ (Faires/I r ie uns ïn íait| r Je n- s sont hom- 1 t s entoure ■ qu’il r me- ! mu- , quí :l’on ■ une t de d ost n le I inde míi- mé- ise, ; de ant nul est ine sur la Végétation, p j dépense, dont il n’y a pas moyen de se dispenser. Car enfin il faut par de petits ^urs soutenir ces terrasses, pour les em- Pecher de s’ébouler. Encore faut-il y a- Jouter quelques dégrés, pour aller d’u- terrafie à l’autre ; mais en récompensé ces petits murs peuvent servir à faire de beaux Espaliers, sur-tout si l’exposi- tl on en est bonne. De plus ces terrasses font comme autant de Jardins séparés, dans lesquels on tracera des allées d’une largeur proportionnée à leur longueur. VIII. II est de la beauté sc deTu- j-dité d’un Jardin, que le terrain en soit íî |den distribué, qu’il n’y ait pas un pied de terre qui soit inutile. On le partagera, a Mant qu’il est possible, en quartés égaux Par des allées nécessaires, & bien places , non-seuiement pour la promenade , mais encore pour avoir le plaisir de voir sc de considérer ce que ces quar-, r 0s contiennent. Il faut nécessairement des allées dans voisinage des murailles, afin de visi- ter sc cultiver les Espaliers, & pour en c Oeilsir les fruits plus commodément. Ces allées doivent être d’une largeur r aisonnabîe, & elles le seront, si on les Proportionne à letendue du Jardin, pelles qui font le long des Espaliers doivent être éloignées de la muraille de j 94 Cv R I O SI TÉS. trois ou quatre pieds, afin que l’on puis" se avoir cet eípace pour le labour qu*' saut donner aux arbres qui y font pla* cés. IX. Les labours font d’une nécessite indispensable dans les Jardins auíïî-bier» que dans les Champs. Labourer la terre» c’est la remuer à fa superficie jusqu a une certaine profondeur; ensorte quel a terre de dessous prenne la place de celle de dessus, i. Comme la terre des Jardins n’eft pas ordinairement pierreuse, ni si sorte» ces labours fe font à la bêche & à l a houe. Dans un cas contraire, on a re' cours à la Fourche, &c. Ces labours fe font précisément poU s rendre ces terres mobiles Sc légeres , afin que Phumidité de la rosée & des pluies » Sc la chaleur du Soleil les pénétrent plu* aisément. Par sce moyen on donne l a fertilité aux terres, qui en ont peu, ot* bien on l’entretient dans celles qui en ont suffisamment. 2 . On doit labourer les terres cbau" des & sèches en Eté, un peu devant J* pluie, ou incontinent après ; supposé qu’il y ait apparence qu’il en doive encore tomber; alors on ne fçauroit trop les l a " bourer, ni trop avant. Quand aux terres froides, pesantes & sur tA Végétation. 9^ Numides , il ne les faut labourer que <îans les grandes chaleurs, afin qu’étant rendues mobiles & légeres, la chaleur du Soleil y entre plus facilement pour Chauffer la racine des arbres. Les labours ^rvent merveilleusement à détruire les Mauvaises herbes qui volent & épuisent ks sels destinés à la nourriture des arbres & de leurs fruits. Ces méchantes herbes drant mises au fond de la terre, elles y P°urriífent & lui fervent d’un nouvel en grais. 3. Lorsque les arbres fleurissent , dc que les Vignes poussent on ne les doit jamais labourer, parce que les exhalaisons, qui s’élevent d’une terre nou- Ve ilement remuée , gâtent les fleurs, dt les tendres productions de la Vigne. q.. C’est une réglé générale, qu’aux terres sèches 8c légeres, on doit donner Un grand labour à l’entrée de l’hiver, &c Un pareil dès les premiers jours du Prin- îenrs, afin que les pluies & seau de la fonte des neiges entrent avec facilité dans c es sortes de terres, qui ont besoin d’ê- tr e beaucoup humectées. Pour les terres sortes & froides , on ne leur fait qu un petit labour au mois d’Octobre , pour faire périr les mêlantes herbes ; & on leur en donne un Curiosités grand vers le commencement de Mai* quand les fruits font noués. Chapitre IV. La maniéré cs amender la terres \ Q Uelque excellente que soit une têt' j re, elle s’use, parce ses sels s’épuí' lent par les fréquentes & fortes produC' dons des plantes qu’on y cultive. 11 saul donc réparer cette dissipation , & resti' tuer à cette terre ce qu’eile a perdu efl produisant, si l’on veut entretenir sa se' condité, & la rétablir au même état qu’el' le étoit, quand on a commencé à la fait? travailler à la végétation des graines, dés plantes Sc des arbres, dont on lui a confié ia nourriture. A parler proprement, ce n’est poink la substance de la terre qui s’use ; cas enfin quelques amples productions qu’el' lésasse, on ne voir point qu’elledéperiífo ni qu’elle devienne à rien. Ce n’est qu® son sel qui diminue. Ce sel précieux» qui l’anime & qui est le principe de fertilité , se trouve épuisé par la nourri' ture continuelle que cette diligente m£' rea donnée à ses enfans. C’est donc ce i sels qu’il s’agit de lui redonner , afind® j sur la Végétation. 97 ta rendre aussi fertile qu’elle étoit, & c est-là ce que nous appelions amender, °u améliorer une terre. Cette amélioration se fait par le moyen âes fumiers. Les anciens ont parfaitement connu la nécessité de fumer la terre. Virgile dans ses Géorgiques en ^commande fans cesse la pratique : & d est étonnant, qu’il se soit trouvé des gens qui condamnent l’uíage des fumiers pour l’amendement des terres, se Rodant fur ce qu’Hésiode n’en dit rien , tfuand il parle de la maniéré de cultiver terre. II est vrai que cet ancien étoit Persuadé , que le fumier corrompoit 'air , & empestoit les plantes ; & tpson devoit songer plutôt à la salubri- ^ » qu’à la fertilité de la terre. Les j'ocles suivans n’ont point eu d’égard à ta délicatesse d’Hésiode , & ils se sont ^ntierement appliqués à communiquer a la terre toute la fécondité dont elle Peut être capable. On a fait même de a pratique de fumer les terres, un art, on a nommé fkercoration ; & c’est mê- par le foin que prenoit un Labou- î e " r de pratiquer cett eflercoration, qu’on ïpgeoit du mérite d’un habile pere de tamille. Ce terme de flercoratìon est tellement c °nsacré chez les Anciens, pour signi- Jí. Partie. E o8 Curiosités x / fier l’art de fumer les terres, que l’ott disoit en proverbe parmi les Grecs & les Romains, que les yeux du Maître font un merveilleux engrais pour un Champ & pour un Jardin : Optima ster coratio vestigia Domini. C’est Plutarque qui nous a conservé ces paroles si sen-í fées. .11 n’y a plus aujourd’hui deux partis là dessus. Tout le monde convient qu’il faut dans ^Agriculture & dans le Jardi- nage fe servir de fumiers, afin de donner la fertilité à un fond-qui n’en a pas J ou pour la rétablir par de nouveaux sels dans une terre qui en est épuisée par deî végétations fortes & continuelles. Les Ancie»s ont donné à Saturne I e nom de Stercutius, parce qu’il a le premier inventé l’art de fertiliser la terre par le moyen de la fiercoration. L’abo'n- dance qu il produisit parmi les hommes, en faisant fumer les Champs, 3 fait dire de Ion régné, que c’étoit l eS beaux & les heureux jours du monde» & le siécle d or. JViacrob. Saturnal.l I. cap. 7. ' Ces fumiers se tirent des écuries, de s j étables, des colombiers & de *ous le s : lieux ou l’on nourrit des bestiaux & de J | volailles. | Les excrémens des animaux ne co fl' sur la Végétation. 99 tribuent pas les seuls à la composition des fumiers ; toutes les parties de leurs Cor ps, quand elles font pourries, & mê- ^e leurs ongles, leur sang, leurs os, engraissent parfaitement bien les terres. On fe sert encore utilement des feuilles Hui tombent des arbres, qu’on ra- ^asse dans l’Automne. Quand elles E-nt pourries dans quelque égout, ou ^duites en cendres, elles font un engrais d’autant meilleur qu’elles font originaires de la famille des Végétaux, spus ces fortes de fumiers font merveilleux pour engraisser, & pour échauffer ia terre. C’est par leur secours qu’on s 3it dans les Jardins durant l’Hyver , P r efç|ue tout ce qu’y fait durant 1 Eté le grand Astre qui anime & vivifie toutes choses. En parlant des fumiers , nous ferions omission considérable , fi nous ne Osions pas mention de la Poudrette ^ Hu on appelle ainsi, sfin d’éviter les ter- grossiers de matière fécale ou d’ex- Çrement humain , qui peuvent blesser les ll nagi Rat i ons délicates. Quoique M. de a Quintinie en bannisse l’ufage dans îa -Culture des Orangers, il est pourtant ^crtain que quand cette Civette Occi- ~fntale ...pour me servir du stile honnête des Çhymistes, est employée bien à pro- E ij ïoo Curiosités pos par un homme enrendu, après IV voir sobrement mêlée avec d’autres fu- miers , elle peut puissamment contribuer à échauffer la terre, & l’exciter â produire des végétations extraordinaires \ & merveilleuses : & f ai remarqué qus les Jardiniers qui réussissent le mieux à élever les plantes étrangères, se trouvent bien de se servir de la Poudrette : ; & pourquoi dédaigner de l'emplovek t pour quelques fleurs , dans lesquelles ( on ne cherche point le plaisir de l’odo- 1 rat, & que la Nature n’a parées de fí vives couleurs, que pour être le charme des yeux ? Les habiles Fleuristes qui font ordinairement mystérieux, ne íe vantent pas de tout ce qu’ils font là< ' dessus. Mais il y a des régies d’oè il ne faut pas s’écarter, si on veut tirer un grand profit de l’usage du fumier, & sans les" quelles, au lieu d’abonnir & de fertill" j fer une terre, on risque à la brûler , & > à faire périr tous les arbres & toutes 1# plantes. I. 11 fau't observer qu’il y a des fumier 5 plus chauds les uns que les autres ; & qu’il y en a pareillement de plus gras & de plus humides qui ne conviennent p aS à toutes sortes de fonds. II. Si la terre qu’on veut amendé SUR £A VÉGÉTATION. IOf sèche , sabloneuse, on y doit employer les fumiers les -plus gras, comte 6 font ceux de Vaches , de Chevaux, ^ Mulets. Ceux de Cochon font peu estimés à cause de leur puanteur. _Si la terre au contraire est forte, hu- teide & pesante, il lui faut donner des limiers chauds & légers, comme font ® ototin de Mouton, ce qu’on tire des V°lombiers , & des lieux où l’on nour- la volaille. Le Marc de vin est un u teier précieux. Les boues qu’on ravise dans les rues, font admirables, 0r squ’elles font bien employées. A -fil. La quantité du fumier ne doit etre ni trop petite, ni excessive. L’excès ' dangereux : comme de n’en pas met- e assez , est un secours, qui pour h’ê- j e pas suffisant, devient presque inuti- ^ j fur-to'ut dans les terres maigres. L’u- j ê e en doit donc être modéré ; & tout ^ tecret, c’est de fe renfermer dans cet-’ . jnediocrité, qui doit amender, Sc ^na u ff er j a terrej & non p as penflâmer *? tendre brûlante. â ' Jn ne peut guére pécher par l’excès >1 ans les endroits des Jardins Potagers , on demande des légumes gros , Sc ^| e n nourris. Après tout, un habile Jar- ^nter doit connoîtrele tempérament de 'erre, qu'il veut amender, afin d’y E iij • 102 CURIOSITÉS donner de l’engrais , à proportion du besoin qu’elle en a, & de ce qu’il lui demande. IV. Le tems propre pour fumer IeS terres, c’est depuis le commencement de Novembre , jusques vers le milieu de HIars. La fin de l’Automne, 6e tout ( l’Hyver sont uniquement destinés à faire les utiles amendemens, parce-quele 5 fumiers ayant besoin d’être consommés » afin que le sel qui y est contenu , pénétré la surface de la terre ; il est besoin > pour cette consommation parfaite, de J pluies abondantes de l’Automne , & d« j’Hyver, qui achevent heureusement d* pourrir le fumier, & de répandre la subi' tance saline dans les endroits, d’où le s plantes tirent leur nourriture. V. II faut bien fe garder de mettre Ik fumier trop avant dans la terre; d’aU' tant que les humidités, qui dissolvefl 1 les sels, les emportent avec elles trop bas, & dans des endroits, où les racine 5 Jie pénètrent point. Alors le fumier e# absolument inutile.. Le fumier doit dost c fe répandre à la superficie de la terre : faire autrement, ce feroit tomber dan 5 l’abfurdité, d’une blanchisseuse, qui met' | troit ses cendres au fond du cuvier, ^ lieu de les répandre au dessus du lin^ e : -qu’elle veut décrasser. C’est ainsi q uí | i bc- de- r IeS j itde j u de ! tout sai- e k S més> >ér\é' foin i de s 5c de nt d- subi- iù le* tre le d’aU- lvefl 1 trop cine 5 ii e$ don c erre! dan s , met' :r, a» ling e i c^ \ sur la Végétation. 105 S . ex plique fort sensément M. de la Quin- tinie. Enfin on parvient à la perfection de 1 Art de fumer , si on employé ie fumier , de telle sorte qu’on rende la terre Mobile, asm de lui faire recevoir le bé» fiéfice de la rosée , & de la pluie. Cette observation est de la derniere importan- Ce » & on ne la doit jamais perdre d* vûe. VI. M. de la Quintinie ne veut Point de fumier pour les Arbres, si on oherche à avoir des fruits de bon goût. A «Z fumier dit-il, pour les Arbres. Je n en veux point du tout. Sa raison est que P°ur peu qu’une terre soit bonne, elle Eiì assez, pour nourrir des Arbres dont on espère du fruit, qui soit agréable au £°ut. On a en effet observé qu’un Vi- |>Oeron, qui fume bien ses Vignes, ne ait pas d’excellent vin. II est vrai qu’il er > a une plus grande quantité : mais la ^ctïion est de savoir, si on lui doit sa- ^ ri fier la qualité , le mérite du bon goût . u vin. J’ai souvent oui dire dans les jj a ys de Vignobles '.Vive le vin d’un mau- J* ls ménager parce qu’en négligeant de e .ttre de l’engrais à ses Vignes, il en re- P 1 * Peu de vin ; mais ce peu est exquis, délicieux. II est certain qu’il vaut irréparablement mieux avoir moins de E iiij 104 Curiosités fruits qui soient savoureux , que d’esl avoir beaucoup d’insipìdes. Mais en refusant les fumiers aux af- bres, on n’a pas dessein de les priver de tout íecours. On leur accorde volontiers îes terres de gazon, & plus particulièrement les terres qui se trouvent au-dessous du gazon. Ce sont des terres neuves q ul n’ont jamais été travaillées , & qui on 1 encore toute la fertilité qu’elles tiennent de la Nature. De terres semblables, c>n n’en fauroit trop mettre a u pied des arbres ; Sole Jardinier n’est pas long terns à s’appercevoir qu’elles n’y ont point été transportées inutilement. VII. Quand on a répandu le fumi £r également fur la superficie de la terre, il le saut enterrer de maniéré qu’il ne p a ' roisse plus au dehors; & cela se sait p ar i un bon labour d’environ neusà dix ponces de profondeur, & non pas pl uS avant, de peur de le mettre hors de I 3 portée des racines des plantes qu’o° | •veut élever. VIII. Pour échauffer & améliores j les champs où l’on veut semer du Bleds outre toutes les sortes de fumiers , & même les exc-émens de l’homme qu’o * 1 y employé fort utilement, on se fe st encore de la Marne, qui est une tert e fossile, grasse, & très-propre à rendt® ’en | ar- ■de : iers » ■rébus qui : ou 1 ient on a r- err>s :été nie f rre> papas iou- nluS e l® M ale? ledf . » u o® serf ;ers e ndí® ! SUR LA VÉGÉTATION. IOJ J es terres merveilleusement fécondes. Cette Marne se tire de Carrières qu’on perce dans la terre, & qui sontlouvent tr és-prosondes. Lorsqu’on a tiré la Marne de la Car- rie re, on la répand sur la terre » & puis îsuand les pluies abondantes en ont fait dissolution , ô^qu’eile est comme pul- ^eriíée par le beau tems, on la mêle avec terre par le nx yen du labour. . Comme la Marne est fort brûlante , ^ íe faut bien garder de communiquer Cet amendement avec excès. Et après *° U C quelque mesure qsson puiste pren- CJr ®i il arrive toujours que la premiere ®finée elle détruit une partie du Bled par ° n extrême chaleur ; & ce n’eíl propre- ^ent que dans les années suivantes » on goûte le plaisir de receuillir de “elles à abondantes moissons , d’une ^rre marnée. PalìJJy ne parle qu’avec en- ■ ^"vusiafme du profit qu’on peut tirer d’un la g c emploi de la Marne : & c’eít -presse à ce seul usage de la Marne , qu’il consister le secret, qu il promet , Pour augmenter considérablement le ré- Venu des biens de la Campagne, & pour s enr icbir promptement.j , Corsqu’un champ est bien marné , , c est du moins pour quinze ans. Et iq6 Curiosités Terre préparée pour les Arbres j &■ pouf iej Plantes Exotiques. Ce scroit en vain qu’on nous apporte- roit des Graines, des Plantes, & de§ Arbres de Climats si différens & íì ré- culés du nôtre, si on ne leur donnoir pas ici une terre à peu près pareille a celle d’oùces Végétaux rares font originaires. De-là vient, que l’on a tant de peine à élever en France la plupart des plantes qui nous viennent des Indes > soit d’Orient, soir d’Occident. II faut une application terrible , pour les apprivoiser avec nous. Toujours fieres des avantages de leur Patrie , elles ne cessent presque jamais de nous montrer un air triste, farouche & dédaigneux, quelque bon traitement que nous leur puissions faire l’aliment que notre terre leu f présente, est à la vérité bien moins délicat & piquant que celui qu’elles trou- voient dans la terre des Indes; auísi n e le prennent-elles que par force & ave.Ç dégoût ; & quelques-unes de ces pln n ' tes, accoutumées aux_alimens délicieux d’Orient ou d’Occident, prennent souvent le parti de fe laisser mourir d’inan*- tion, plutôt que d’ouvrir la bouche uL leurs racines aux sucs nourriciers de n°* terres Septentrionales. SUR LA VÉGÉTATION'. tOJ Quelques Curieux, en matière de •Jardinage , ònt cherché à traiter cìes plantes selon leur goût ^ & se sont étuvés à préparer une nourriture convenable à l’humeur & au tempérament de ces dlustres étrangères : & ils osent bien se flater de n’avoir pas perdu leur peine êc leur tems. Voici la terre qu’ils ont c ompofée, pour nourrir les arbres & les plantes exotiques. J. Pour les Plantes . On prend, par exemple, cent livres âe terreau; c’est le vieucfumier qui a travaillé , & qui est devenu une terre très-mobile. Ils y ajoûtent cinquante livres de feuilles d’Arbres bien pourries , vingt livres de Poudrette ; c’est la Civette Occidentale des Chymistes. On laisse putréfier ces choses ensemble. Après quoi on y mêle quarante livres de tt'arc d’OIives, & trente livres de chaux. 9 n laiste bien fermenter toute cette macéré durant deux mois. Cela fait, on e 0 met un tiers avec la meilleure terre de l’Ecriture Sainte, croyent que les hommes avoient eu la permission , avant le Déluge, de se nourrir à la chair des ; animaux ; & au moins, de ceux dont ils faifoîent des sacrifices au Dieu éternel ; & il y a bien de l’apparence quAbd qui étoit Pasteur de Brebis , ne les nourristbit pas pour en avoir feulement la laine. Ce qu’il y a de certain, c’est que Die u plaça nos premiers Parens, dit M. Vof- Jîus ; dans un jardin, afin de le cultiver* & d’en tirer leur nourriture; & non pas aup:ès d’une boucherie, pour égorger des animaux ; ce qui ne rend pas pen recommandable , ajoûte ce Savant, 1 ® culture des Jardins, à laquelle nous sommes destinés par l'ordre de Dieu. LeSei' \ gneur mît l homme dans un jardin deU' ! cieux , afin qu’il le cultivât fjr qu d le gardât* 11 lui sît aujji ce commandement , & lui dit j manges de tous les fruits du Paradis , mais ne mange% point du fruit de U Af‘ bre de la science du bien fr du mal Geneí* chap. 2. v. 1 y, 16 & 17. Voilà l'augu- sur la Végétation - . i-ii % or; gìne de l’Agriculture & du Jardin âge. Mais comme , depuis le péché d’A- Oatn, la terre a été maudite, & que nous 11 en tirons dequoi nous nourrir , qu avec haucoup de travail ^ fir quelle produit de- Puis ce tems-là des épines £? des ronces .• ^aledicta terra in opéré túo.... fpinas & tr ihulos germinabit tibi. Genes. c. 3 • v. 17 ^18. Les hommes ont été contraints s’appliquer à tra vailler la terre : ut ope- r «retur terrante pour en extirper les mau- v aises plantes qui étoient inconnues âans l’état d’innocence , & pour la for- c er à nous produire celles dont nous ti- r °ns notre fubsiflance. C’est à quoi tout le genre humain s’est occupé depuis les premiers jours du monde ; & nous allons donner dans la fuite ce que f expérience tous les siécles a fait découvrir de réales , pour réussir dans la culture des Pentes. II s’agit ici de celles que l’on n omme potagères , parce que les Cuisiniers en font entrer la plupart dans les Potages. Article Premier. Catalogue des Plantes qui se cultivent dans le Jardin potager. Entre les plantes qui font partie de lia Curiosités nós alimens, il y en a plu/ìeurs dont ls culture appartient aux Laboureurs, & que l’on ne renferme point dans les Jar> dins. Telles font, par exemple, ies 1 plantes , qu’on nomme Alimentaires ; comment le Froment, le Seigle, l’Orge, l’Avoine, le Ris, le Millet, le Bled de Turquie, Sec. Tout ce que nous avons dit fur la Multiplication du Bled, se doit \ appliquer à toutes ces sortes de grains qui se sement & se recueillent dans les Champs , & qui font f objet de l’Agri- culture. Je ne fuis. point entré dans le détail du labourage ; fur quoi il faudrait plutôt consulter les gens de la. campagne, que de íé mêler de leur en- faire des leçons. Us savent là-deííbs tout ce qu il leur importe de savoir. II y a plus de trois mille ans que les hommes font suffisamment informés de toutes les particularités qui appartiennent à fart de labourer la terre. Les Grecs-en ateri—-. buent l’inyention bCérès, ou à Tripto- lème j mais Moïse qui vivoit avant Cérès Sc Triptolème y avoir prescrit, j long-tems avant eux, des loix touchant ! F Agriculture. Dans le ckap. xxij. v.io* du Deuterônome il défend de labourer avec un bœuf un âne attelés ensemble • C’est donc visiblement donner dans des inutilités j que de décrire tout l’attirail dn lab sur là Végétation. ourage. Auflì me suis-je borné dans ks secrets de la muitiplication d u Bled , est le principal point de vûë de l’A- picukure , à ne donner que ce que îes * hysiciens ont découvert par le raisonnement & par l’expérience, de capable âe produire cette multiplication si importante , que les illustres Savants de la société Royale d’A ngleterre, se sont *ant de sois proposés de perfectionner. Quant à la culture des Jardins, il est £ e rtain que les Anciens n’y ont pas été tort intestigens ; & que ce n’est que dans ces derniers rems, qu’on a commencé de bien entendre fart d’embellir de faire amplement fructifier les Jardins; &; l'on peut áite que de tous les arts qui se so;u perfectionnés dans notre siécle, le Jardinage b est pas celui où l’on a fait moins de pro Ê r ùs. U me semble que c est ici le lieu "L donner un Catalogue des plantes po- ta géres par ordre alphabétique , afin de v °ir tout d’un coup de quoi il est question dans la culture du Jardin potager. la vérité Je nombre en est fart grand ; biais je me renferme à ne donner que le bom des légumes qui se trouvent actuellement au Potager du Roi à Versailles. Des Plantes légumineuses du Potager du Roi * à Vnfailles . ° A Bsinte. Ail. Anis. Artichaux ) vert . s ' - violets. Asperges. Basilic. Baume. Beteraves. Bonne-Dame. Bourache. Blanche-Ursine. Buclose. Câpres V ordinaires, ) Capucines. Cardons d’Espagne. Carotes. Celeri. Cerfeuil musqué, ordinaire. Champignons. Chéruis. S U R.XA VÉ-G E T A T I Q N. Chicorée blanche í Chicorée sauvage. Chicons. frizée, commune. Í Pommés. Fleurs. Pancaliers. de Milan. Frisés. Verts. Blonds. Violets. à la grosse Côte. Ciboule. Citrouille. Cives d’Angleterre. Concombres. Coriandre. Corne de Cerf. Cresson Alenois. Echalotes. Epinars. Estragon. Fenouil. Fèves. Fraizes. Guimauves. Haricots. Il6 C U R I O S I TÉS Laitues f à la Coquille. ■ de la Passion, la Crêpe blonde, la Crêpe verte, la petite Rouge, la Courte. j la Royale, la Bellegarde. la Gennes. la Perpigniâne. d’Aubervilliers. la Capucine. PImpériale. - la Romaine. Lavande. Marjolaine. Mâches. Mauves. Mélisse. Mêlons. Navets. Oignons $ bIancs » ù i rouges. C grande, Oseille < petite, L ronde. Panais. Passe-Pierre. sur la Végétation. 117 r commun, Persil ) frisé, ( de Macédoine. Pimprenelle. Poirée. Pois de toutes les fortes. Porreaux. Potirons. p . C vert, Pourpier ^ré. Raves. Réponses. Rocamboles. Romarain. Rue. r commune, Salsifix. ) d’Espagne, & que Foû / nomme Scorsonnéres. Tim. Tripe-Madame. Violettes. m ^’est à ceux qui se proposent de faire se ; qu: ont déja un Jardin Potager, a ìe ^ e gler s ur J e nombre de Plantes qu’ils ^firent de cultiver. II faudroit avoir 1 vaste terrain, si l’on vouloir s’at- ac her à tous les légumes que je viens de ^Mmer. II sied bien à un grand Roi étaler s a magnificence dans ses Palais, ïiS Curiosités &c dans ses Jardins ; mais il ne convies pas à un Particulier de se mesurer ave c les Maîtres du monde. On compte jm' qu’à quatorze sortes de Laitues dansj e Potager du Roi. Un riche honne te homme ne se peut il pas contenter avoir de six ou sept espèces ? Seroit' ce pour lui une modération si mortifiante) de n’en pas avoir de toutes les quatorze sortes ? Faudroit- il, à cette occasion » appellera son secours la raison & laR^ 1 * gionpour lui faire supporter patiemment le chagrin de ne voir pas dans ses Partes' res toutes les Laitues particulières? Frafl' chement quand on ne fait pas se bornes) on ne mérite pas d’être beureux;'& mêw? on ne le peut jamais être. La Cupidité» qui n'a ni régie , ni mesure , ne dit f-' mais c’esi aííez. Je lis toujours , avec UN nouveaù plaisir, l'sgrésble inscription» où un Solitaire enchanté de ses p e ' lits Jardins , représente très-naïvetneNt la douceur de son état: Celui-Là^ l’inícription , efl affeç riche qui ne tn^ que point de pain. Sa situation est dig 1 ; 2 d’envie , s’il ne s’abbaisse. point à ferV} s les Grands. Soins piquans de la vie cl" vile, je vous dis un adieu éternel. Sau' bas solitaire, content de se postede íoi-même , cultive tranquillement ^ petits Jardins. S’il est pauvre, s’il est rJ sur la Végétation. 119 ; s’il a le cœur bienplacé, c’est-à-toi, facteur, d’en juger. Satis dives qui non mdiget pane : satis potens ^ qui non cogitât favire, Sabbas Cas. Solitanusse ìpjo con- te ntu hos securus ìncolìt hortulos : Pauper dives : f cordatus es cogite . Joan. •^cob. Hofmann. Lexic. Univers, ad Vír bum , H o R t u s. Ce Catalogue de plantes potagères je viens de donner, est un amas j 0 t ifus, qui compose plutôt une espèce de forêt qu’un jardin. Répandons quelles lumières fur ce cahos de Plantes, W faut débrouiller, & tâchons de les ^duire fous des titres particuliers, qui ^ous fervent, comme d’une introduc- méthodique , dans la culture du ardin Potager. C’est ce que je vais air e, ce me semble, très-heureusement, ^ les rangeant à peu près dans l’ordre ° u les a mises M. de la Quintinie. Cet 0r dre est de rassembler dans la même ^sse, toutes les plantes cjui deman- a 2 tit d’être cultivées de la meme manie- re i car enfin il faut observer que l’on ne tra ite pas d’une même façon routes les Plantes potagères. Les unes se trans- PLntent, les autres restent toujours au !ïlern s lieu 0Í1 l’on les a semées. Quel- ^es-unes viennent de graine, quelques aut fes se multiplient de Bouture, de Re» 120 C URtOSITÊS jettons , de Marcotes..... Je puis ài' r.e qu’en distribuant ainsi les Plantes,)® pose par avance, & tout d’un coup, ^ fondemens du Jardinage ; j’établis premiers principes de ce bel Art; & j’ouvre une vaste Carrière, où il ne plus difficile d’entrer &. de courir ave c succès. I. Je mets dans le premier rang l eS plantes qui se sèment pour demeurer e" place, & qu’on ne transplante poin 1. Telles font, Les Raves. Les Béteraves. Les Carotes. Les Panais. Les Chéruis. Les Navets. Les Mâches. Les Réponses. Les Scoríonnëres. Les Salsifix. L’Ail. Le Cerfeuil. Le Persil. La Corne de Cerf. La Chicorée sauvage. Le Cresson Alenois. Les Epinars. Les Pois. Les Fèves. L’OH sur la Végétation. X 2 t L’Oignon. La Ciboule. Les Echalotes. Les Laitues à couper. La Pimprenelie. La Portée à couper. Le Pourpier. LOíeílle. ï I. Voici les Plantes que l’on sème, de les transplanter ensuite Les Cardes de Portée. Le Céleri. Les Chicorées blanches. Les Laitues à pommer. Les Choux. Les Melons Les Concombres. Les Citrouilles. Les Potirons. Les Porreaux. ï 11. II y a des Plantes qu’il est insistèrent de laisser en place , après les av oir semées , ou de les transplanter, l^rce quelles réussissent bien de toutes es âeux façons. Les Asperges. Le Basilic, Le Fenouil. L’Anis. La Bourache.. „ La Buplose. ■fa. Partie. ® 122 Curiosités Les Cardons. Les Câpres - Capucines. La Ciboule. La Sarriéte. Le Thim. Le Cerfeuil musqué. IV La quatrième classe des Plantes dst Jardin Potager, font celles qui se multu plient sans être semées, parce qu’elles font de grosses touffes qu’on sépare, & don- on sait des plantesen les transplantant L’Alleluia. Les Civettes d’Angletere. Les Violettes. Les Artichaux. Le Baume. L’Oseille ronde. La Tripe-Madame, L’Estragon. La Mélisse. Les 'Fraisiers. Les Framboisiers. La Lavande. La Sailge. Le Thim. La Marjolaine. Le Laurier. La Vigne. Le Figuier. V. Les Plantes suivantes se trans' pìaî tenî ; & alors on poupe une pai' tie I sur la Végétation. 123 leurs feuilles & de leurs racines. Les Artichaux. Les Porrées, Le Porreau. Le Céleri. . v 3. A l’égard de ces Plantes-ci, il «ut d’en rafrîchir un peu les racines . atls rien couper aux feuilles. Les Chicorées. La Sariéte. L’Oíeille. Les Laitues. L’AIIeluia. Les Violettes. Le Basilic. La Bonne-Dame. La Bourache. La Buglofe. Les Capres-Capucines. Les Choux. L’Estragon. La Passe-Pierre. Les Fraisiers. La Marjolaine. Les Melons. Les Concombres. Les Citrouilles. Les Potirons. v I L La septième casse est des pîan- es qu’on nomme vivaces,parcequelles Fhiver, quelles produisent plu- F ij 124 C U R X O S I T í S sieurs fois dans la même année, & qu’o 11 les peut laisser subsister pour Tannée l ul ' vante. L’Oseille. La Patience. L’Alléluia. ' Le Fénoiiil. La Pimprenelle. Le Cerfeuil. Le Persil. Le Persil de Macédoine. La Chicorée sauvage. Le Baume. L’Estragon. La Passe-Pierre. VIII. Voici quelqu’autres plante*! qui ne produisent qu’une fois Tan , & subsistent durant plusieurs années. Les Asperges. Les Artichaut. IX. II y a des plantes qui périsse^ ' après vous avoir donné leurs prod uí lions. î -, Les Laitues de toutes les espè^ La Chicorée ordinaire. Les Pois. Les Fèves. Les Cardons. Les Melons. Les Concombres. Les Citrouilles. sur la Végétation. 125 Les Oignons. Les Porreaux. Le Céleri. La Bonne-Dame. Les Beteraves. Les Carotes, & généralement tou- les les plantes qui n’entrent dans nos ufa- & es , que par leurs racines. X. Plantes qui ne íe multiplient point ^ graines , soit parceque quelques unes ^en ont pas, soit parce qu’il est plus Pfompt de les provigner par rejetions, binasses, boutures, marcotes. Ail se multiplie par des espèces de c 3ieu x qui í'e forment au pied, en ma- ftler e d’Oignon. Ces caïeux se nomment ^61 gousses d'Ail. On les met en terre en , ou en Avril. L’AUeluia se multiplie par des trai- , ou rejetions qui sortent du pied , ^jUrne il en sort aux Fraisiers, & aux Violiers. Les Artichaux ne se multiplient gué- TfiS - que par des œilletons qu’òn trouve a utour du pied de la plante. On sépare ? es oeilletons, & on les transplante vers e Commencement du mois d’Avril. Au on pourroit absolument multiplier Artichaux avec la graine qui se trou- e au fond des pommes d’Artichaux, Tandon les laisse fleurir & sécher, Fiij 12Ô C U E r O S I T is Le Baume ne se multiplie qu’avec traînasses, ou par boutures. Les Cives d’Angleterre se muh*' , plient par des petits rejettons qu’on trotf” ve aurour de leur touffe, & que l’cn r 2 ' plante. Les Echalotes se multiplient de gou^ ses , qui viennent autour du pied. L’Eílragon ne se multiplie que & traînasses , ou de boutures. Les Fraisiers, soit blancs, soit roi*" ges, aussi-bien que les Captons, ne »? multiplient que par des traînasses, ff 31 font des maniérés de filets rampans íf la terre, Sc qui prennent aisément raci" ne à l’endroit des noeuds qu'on y voi r ' Les Framboisiers , tant les blancs» que les rouges , ne se multiplient Q^ s par des rejettons d’un an Sc qu’on n 2 ' plante au Printems. Les Groseillers, ou blancs, ou roU' j ges, se multiplient par des rejettons viennent du pied , ou bien de bou^' i res , qu’on transplante au Printems. J L’Hisope ne se multiplie que P aí , des rejettons. La Lavande se multiplie de grain 2 > 1 Sc de vieux pieds replantés. Le Laurier se multiplie de grain 2 ’ Sc aussi par marcotes. , La Mélisse ne se multiplie que ^ SUS- L A” V ÉGÉÎ ATÍON. 127 Marnasses & de boutures. L’Oseille ronde ne íe multiplie que par rejetions , ou par traînasses. La Rue, quoiqu’elle fasse de la graine, ^ íe multiplie que par la voie dès bourres , & des marcotes. • La Rocambole se multiplie par goui- le s, & de graines. Le Romarin se multiplie de graines, ^■débranchés un peu enracinées. La Sauge se multiplie aisément par Jes rejetions qu’on tire du pied ,& qui boivent être un peu enracinés. . Le Thim, qui se peut multiplier par e nioyen de sa graine, se provigne plus Promptement par la voie des rejetions Enracinés, qu.on sépare du pied. , La Tripe-Madame se multiplie de re J e ttons , qui reprennent fort sacile- ^ent. On en sait aussi venir de graine. Les Violiers, soit doubles, soit sim- Ples, íe multiplient ordinairement de récitons , quoique ces plantes, fassent des Saines. Xi. Plantes qui se multiplient de ê r aines. L’Abfinthe. L’Ache. L’Anis. Les Asperges. Le Basilic. F iiij 128 Curiosités Les Beteraves. Le Bled de Turquie. La Bourache. La Buglose. Les Capres-Capucines. Les Cardes de Porrée. Les Cardons d’Efpagne. Les Carotes. Le Céleri. Le Cerfeuil. Les Cheruis. > La Chicorée blanche. La Chicorée sauvage. Les Choux. Les Ciboules. Les Citrouilles. La Corne de Cerf. Les Concombres. Le Cresson Alenois. Les Epinards. Le Fenouil. Les Fèves. Les Guimauves. Les Laitues. La Lavande. Le Laurier commun. La Marjolaine. Les Mâches. Les Mauves. Les Melons. Les Navets. sur xa Végétation. 129 L’Oignon. L’Oseille, grande. Sc l’OseilIe pe- rite. Les Panais. La Passe-Pierre. Le Persil commun. Le Persil de Macédoine. La Pimprenelle. La Poirée. Les Pois, Les Porreaux. Les Potirons. Le Pourpier, soit vert, soir doré. Les Raves. Les Réponses. La Rue. La Rhubarbe. La Rocambole. Le Romarin. La Roquette. Les Scorsonnéres. Les Salsifix. La Sariete. Le Thim. La Tripe-Madame. OB SE KVA T10 JV. , n Faut remarquer qu’il y a plusieurs ? e ces Plantes , dont nous venons de * oir . les, différentes Classes, que l’on l ” u lûplie par Marcotes, par Rejetions» Fv 130 Curiosités & par Boutures. II faut enseigner com - ' ment cela se fait. i. Multiplier les Plantes par Marcotté On choisit dans une Plante, oudan s un Arbre , une branche forte, vigoR' reuse, & la plus propre à être marco' tée. On fait, vers le bas de cette branche» une entaille, & dans cette entaille, oR fait entrer un peu de terre fine. Ce lR' fait, on couche cette branche trois, 011 quatre pouces dans la terre, où l’on l’a r ' rête par un petit crochet de bois. Lorsque cette branche est enracinée r on la sépare de la Plante dont elle fa 1 ' soit partie : on la transplante ailleus 5 avec un plantoir de bois ; & alors ell e commence à être une nouvelle Plante- II ferait bon, quand on la leve , de lai^" fer aux nouvelles racines le plus de terre qu’il est possible : parce que la Marcote transplantée , reprend plus prompte .ment. Lorsque les branches dont on veR r faire des Marcores, ne peuvent fe cour" ber ni être abaissées-dans la terre , faR 5 risquer de les rompre, on fe sert d’ aíi cornet de fer blanc où l’on fait entrj* 3a Marcote , & qu’on remplit ensuite o* honne. terre,. On attache ce cornet su k la Végétation, rzr Quelques branches, ou à quelque autre S,We, afin de le tenir suspendu en Fair. ^ d sait alors de grands hâles , il faut Jurant quelques jours défendre les Mar- ^tes ,soit nouvellement faites, soit nouvellement transplantées, des ardeurs impitoyables du Soleil. 2 . Multiplier les Plantes par Rejetions ■ Un Rejetton , c’est une branche qui *°rt du pied d’une plante , & qu’on en çPare pour faire une nouvelle plante. " il se rencontre quelques petites racines- au bas du Rejetton, on le nomme Ré- n tt0 , n enraciné ; & alors on est presque as- Ur ó qu’il reprendra. S’il n’y a point de r aci nes , on Rappelle Rejetton non enra-- ; & dans ce cas, on ne peut pas se 1 t *ater d’un succès immanquable, parcs ces sortes de Rejettons ne prennent P as quelquefois racine. II y a pourtant: cies plantes.dont les Rejettons ne mandent presque jamais, comme íont ceux! ats groseillers, des Framboisiers, &c. 3' Multiplier les Plantes-, par Boutures.- ,Une Bouture , c’est une branche r tjtion prend dans une plante , dans u m ^hre ou dans un arbrisseau, & qu’òm Fvjj IZ2 CURIOSITÉS fiche , sans autre cérémonie, en terre- On' doit choisir les branches, qui o ot le plus d’apparence de vivacité. 11 important de les planter encore toutes fraîches. L’Osier ne manque quasi jamai 5 à reprendre de Bouture. Quelques C J' rieux, bien entendus en fait de Végéta' ri on , laissent tremper durant quelq° eS jours leurs Boutures dans de l’eau ; $£ j’estime que cette pratique est excelle 0 ' te , pour les déterminer à faire plus vit e des racines. Le succès seroit infaillible , si l’o° mettoit ces boutures dans des phioles pleines d’eau,& bien exposées au Soleil.E 11 changeant seau tous les jours dans l eS grandes chaleurs , on seroit assuré de leur voir bientôt jetter de petites racines j & que la transplantation qu’o n en seroit ensuite , auroit tout fesser qu’o° peut désirer. C’est ce que j’ai expliq° e amplement dans mes Principes fur la Végétation. I. Partie * chap. xi p. 321. , II s'agit maintenant de la culture de ! toutes ces Plantes Potagères ; & j tout de désigner le tems de l’année où 1 ^ les faut semer & transplanter, pour || tirer de belles & avantageuses prod° c ' | tions. i Si je parlois de chaque légume e° ? particulier , comme a fait Mi\aldus > sur la Végétation-, dans son excellent Livre de tìortcrum cu- r d , cela demanderoit beaucoup détendue , & obligeroit à des redites continuelles , & ennuieufes. II faut laisser c es insipides détails à ceux qui veulent faire un gros Livre , à la vûë duquel on ne manque jamais de se récrier: Rudis, l ndigejïaque môles . Mais afin de ne laisser rien à souhaiter de tout ce qui est nécessaire pour la c u!ture du Jardin Potager , je rassemble tous les foins , & tous les détails, °u un Jardinier diligent doit entrer, f°us le titre de chaque mois de Tannée. Tout d’une vûë on découvre tout ce S u il est à propos de faire dans chaque saison. Et quand il s’agit d’une Plante, qui demande une culture plus délicate, ^ plus suivie, j’en donne toute la pra- tique de suite, & détaillée, jusqu’aux nioindres particularités. C’est , pour exemple, ce que je ferai à T égard des Melons, qui demandent une plus grar- de attention. Et pour exécuter mieux ■ Çela, quand la matière est rropample, 1 en fais un article exprès & íéparé. 11 en |j fera de même pour les Orang rs, pour j Vigne, & pour la taise des Arbres j| Truitjers. C’esi ce que je fuis obligé de j: faire, asin de ne pas interrompre, par des | discours d’une longue étendue, la fuite i?3 4 C u r ï o s r t é s des XII. Mois de l’année du Jardinier* Article II. & Année du Jardin Potager : ce qu A f faut faire j £r ce que ton en doit re< cueillir dans chaque Mois . Janvier. O N laboure le Jardin, fila gelée n’y met pas d’obstacle. On fait des couches de fumier , pour y semer des Concombres hâtifs , des Mêlons, des Raves, des- Laitues , du Cerfeuil, du Cresson. Comme l’Eíìragon, le Baume, & les Cives ne fe multiplient point de graine , on en plante des rejettons , traînasses , ou boutures fur la couche, de la même maniéré, qu’on les met en pleine terre. II faut remarquer que tout ce qui le féme dans ce tems-ci, doit être mis fous des cloches de verre , ou fous des chaíîis & fur des couches de fumier. L Comment on fait les couches de fumier- r. On ne fait des couches qu’avec' du grand fumier de Chevalou de Mu-'- sur ra Végétation. 135' Lt. Ce fumier doit être neuf: c’est-à- dire , qu’il doit être employé dans le tems, qu’il fort de dessous les Chevaux.- 2. On donre quatre pieds de largeur One couche. Quant à la longueur, elle E arbitraire. z. II faut que cette couche soit placée à un bon abri, & dans ur.e belle exposition q. La hauteur du fumier doit être d’en- Virondeux ou trois pieds. On ne sautoir Manquer de la tenir haute, pance qu’elle Naisse toujours insensiblement. s. On met sur ce fumier un demi-pied de terreau, qui est un fumier si vieux , qu’il est absolument changé en une terre noire , meuble , légere , íans avoir aucune apparence de ce qu’il a été dans font origine. C’est dans ce terreau, qu’on dépose les graines des plantes qu’on veut rendre hâtives-. Quand la couche est ainsi dispoíee, on la laisse se ralentir durant sept ou huit- jours,'après lesquels fa plus grande chaleur est passée. Ce qui doit être ainsi * parçeque la chaleur en est d’abord si violente, qu’elle brûleroitles graines.qu’on y; fémeroir.- Lorsque la chaleur est modérée, &. Ve le terreau est bien dressé.,, on y sème.- iz6 Cuktositís ses graines, ou à plein champ , ou p a ? rayons. I J. Semer par Rayons. On trace, fur le terreau de la couche, de petites rigoles droites & profondes de deux pouces, dans lesquelles on férne fort dru la graine, qu’on couvre enfui' te avec un peu de terreau , en le répandant doucement dessus. On entend de reste ce que c’est que semer à plein champ. On metauffi-tôt après, fur ces graines» des cloches de verre, pour conserver la chaleur de la couche, & pour mettre les semences à l’abri du froid, qui les em- pêcheroít de germer , & de végéter. Si on s’apperçoit que la couche se refroidisse, il la faut rechausser de tems en tems, en mettant à l’entour un fumier tout neuf. Ces couches & ces cloches ne font point nécessaires dans les climats chauds* Toury vient à plaisir, fans ces secours» que la froidure mortelle aux Plantes » nous a fait inventer, afin de corriger leS incommodités où elles font exposées dans les climats Septentrionaux. Mai s avec les couches & les cloches, il n’est point de plante si délicate, & si ennemie du froid, qu'on ne détermine à vivre dans nos Jardins. sur la Végétation, i37 Quelquefois, pour soutenir la chaleur , & Faction de ces couches de fumier , on couvre les cloches de grand fumier sec, ou bien de paillassons: & Par là on met les Plantes en état de subsister malgré les plus grandes gelées Lorsqu’on veut faire la dépense d’a- Voir des Châssis de verre, qui font cornue de petites Serres vitrées , portatives, pour mettre fur les couches, on peut élever , & conserver ici par leur moyen , durant le plus fort hiver, tout ce que l’Orient & KOccident ont de plus tendre & de plus précieux en fait de Plantes. Je n’en donnerai pas de meilleure preuve , que ce que chacun peut voir de miraculeux, fous les châssis de verre , qui font au Jardin Royal des plantes. Dans les gelées âpres & pénétrantes, On donne à ces Chaíïïs de verre des couvertures de grand fumier , ou bien de paillassons ; après avoir enfoncé dans le terreau les pots, où font les plantes, que l'on veut dés ndre contre le froid. La commodité de ces Châssis, c’est que l’on y conserve des plantes, & des Arbrisseaux , que les cloches de verre ne peuvent pas contenir. Lorfqu’il ne gele point , on découdre les Châssis le matin, ôc on les re- iz8 C u r r o s í t És couvre le soir. Dans les chaleurs, ofi ouvre toutes les fenêtres des Châssis. IIL Couches , pour avoir des Champignon Les couches, fur quoi viennent le! Champignons, lê font de la même ma' niere que l’on fait celles pour semer à l’exception que les couches, pour k s Champignons, doivent être enfoncées d’un demi-pied dans la terre , Sc qu’on ne les couvre que de lepaisseur de trois doigts de terre. On les arrose de tems en tems ; & quoi qu’on faíìë, elles ne donnent des Cham' pignons qu’au bout de trois, ou quatre mois. Pendant tout le mois de Janvier, on- continue de semer sur couche, & sous cloche des Laitues à replanter. II n’est pas nécessaire de couvrir de terre la graine de Laitue, ni la graine de Pourpier. 11 suffit qu’elle touche à la terre. On sème encore sous cloche, & fus couche, les Laitues, nommées la Crêpe blonde , la Royale , la Courte & la Coquille. On sème aussi de la même maniéré la Poirée à replanter, la Bourache, la- Buglose, lu Bonne-Dame. SUK LA VÉGÉTATION. Ijp IV. La Culture des Melons . On ne commença à connoîtrel’excel- * e nce du Melon, que du tems de Pline. Ce fut aux environs de Naples, qu’on e n fit l’heureuse-découverte. L’agréable odeur, & le bon goût qu’on lui trouva, fit qu’on se mit à le cultiver avec soin ; âc il se fit en peu de tems une réputation qui ne reconnoît point aujourd’huide bornes. Les Grands de Rome Sc d’Italie, e n étoient fort friands. L’Empereur Clo - dius Albìnus , le plus vorace animal, qui jamais été dans la Nature, saimoit passionnément. Juìe Capitolin nous apprend que ce gourmand, en un seul déjeuné, mangea un cent de pêches, dix Melons , v irtgt liures de raisin , cent Becafìgues , er trente-trois douzaines d’Huîtres. J. Capitolin, vit. Clod. Albin. c. ii. Apparemment que les dix Melons que cet Albinus dévora, n’étoient pas fìgros que ceux qui oroissent au Pérou dans la vallée d’Yca , 6c dont la plupart pèsent cent livres. Quoiquilen soit, ce fruit a assez de part .parmi les délices des bonnes tables, pour mériter que nous donnions la bonne maniéré de le cultiver. i. Les melons se sèment sous cloche.,, ï4ô Curiosités & sur une couche bien exposée, tout^ neuve, & qui a encore presque toute & chaleur. Dans les Provinces, où l'on a du marc de raisin, on ne seroit pas déli- cat en fait de Melons, si l’on n’en mê- loit point dans le terreau , qui fait I e dessus de la couche. C’est le moyen d’a- voir des Melons d’une bonté singuliers 2 . Pour avoir des Melons de bonus heure , on en léme la graine à la pleins Lune de Janvier : c’est à-dire , vers l a fin de ce mois, ou au commencement de Février. 11 est inutile de dire qu’il faut s’être pourvû de graine qui vienne ds bons Melons. Z. Une pratique qu’il ne faut point négliger, c’est de mettre tremper durant vingt-quatre heures , la graine dans de bon vin , adouci par un peu de sucre, avant que d’en confier le dépôt à la terre. On en use ainsi, pour imprégner la graine d’une essence vineuse , & sucrée, qui doit passer dans le fruit, pour lui donner ce goût doux, sucrin ,& vineux, sans quoi un Melon n’est pas censé excellent. II y a encore un autre avantage à donner ce bain délicieux à la graine de Melon : c’est que le vin & le sucre sont de merveilleux agents, pour hâter la végétation des plantes, ôc fur-tout dans les SUR LA VÉGÉTATION. 14Í ^elonnieres. Car enfin de tous les sels» fiui fe tirent des Végétaux, il est certain que les sels du vin , & du sucre, sont ceux qui ont plus d’analogie , & de convenance avec les Melons , 6c qui leur peuvent mieux donner ce goût fin, & exquis, en quoi consiste leur bonté. Le sucre, soit celui des Anciens, auquel Us n’avoient pas l’art de donner de la confidence, & de la dureté ; soit celui d’aujourd’hui, qu’on tire des Cannes , ou Roseaux, & que les Arabes nous ont les premiers appris à cuire, & à durcir cn confidence de pierre , contient un baume vivifique , qu’on ne sautoir trop estimer. 11 surpasse en bonté le miel tant Vanté des Anciens, 8c il n’en doit gue- r e à la Manne, que Dieu íaisoit pleuvoir dans les Déserts pour la nourriture des Juifs , & de leurs troupeaux. M. Bochart assure que cette Manne étoit Ce que nous nommons maintenant du sucre. Bochart. Hieroç. Part. 1 . Lib. 2 . e. q6. En effet Elien rapporte, qu’aux environs du Gange, il tombe du Ciel, Lu Printems , & en Automne, fur les Liantes , & fur les herbes des Prés, & des Marais, un sucre liquide, qui rend le lait des bestiaux , tous-à-fait délicieux , & dans lequel il n’est pas besoin de mettre du miel, comme sont les Grecs. 142 Curiosités P a flores lacfluavìfjìmum exprimant J nec (l md mifcere opus habent quomodo Grutcifr' ciunt. Hifl. Animal. Lib. J y. c. 7. Ce qui soit dit, sans vouloir élever le su- cre à la dignité de la Manne des Déserts* qui étoit miraculeuse en tant de maniérés. 1°. Elle tomboit tous les jours de satinée, & non pas seulement dans le Printems, & dans l’Automne. 2 0 . Elle ne tomboit point le jour du Sabat, en tomboit le double le jour précédent» 4^. Elle ne tomboit pas seulement fus les herbes , mais encore fur les pierres & fur les rochers. 4 e . En fi grande abondance, que tout ce grand peuple, avec ses troupeaux, en étoient suffisamment nourris, yLa Manne des Déserts n’é- toit pas seulement médecin a le, comm? étoit celle des environs du Gange, & celle de la Calabre, & de l’Italie ; mais elle avoit encore une vertu alimentaire & nutritive 6 °. Elle ne se gardoit point pour le lendemain : autrement elle se trouvoit pleine de vers , & toute corrompue* 7 0 . Elle avoit la figure des grains de Coriandre , & celle dont parle Elien étoit liquide. 8°.,La Manne avoit un goût diffèrent selon les divers appétits des Juifs» Exod. Chap. XVL 4. Pour semer les Melons , on fait avec le plantoir dans la couche un trou sur r ,a Végétation. d’environ trois doigts de profondeur ; 0r > y dépose trois graines, qu’on couvre de terre ; & auísi-tôc on met une cloche kar dessus. Quand les graines font levées, ^ arrache les deux moindres plantes nais- ^lìfpc nnnr rnnffrvpr . fairp vivr/» r»lnc àntes pour conserver, & faire vivre plus passement la troisième. J". Lorsque les Melons ont quelques Quilles, on rompt tout doucement les deux Oreilles , ou Amandes, qui ne °tit autre chose , que les deux lobes de la § r aine, qui font sorties de la, terre, & M ne font pas des feuilles. En retranchant ces Oreilles, la fève, quelles tirent, passe à la tige , qui n’en peut îr °p avoir. Pareillement, quand cetteti- § e se fait un peu longue, on arrête le Contant, en pinçant l’extrémité, qu’on branche. On rompt auífi quelques jours 'ÌPtès, les quatre premieres feuilles , afin ? e forcer la jeune plante à pousser deux /as qu’òn ne manque pas d’arrêter auffi an s la fuite. 6. Lorsque les jeunes plantes ont ^atre ou six feuilles, on doit les re- PLnter. Pour avoir des Melons de bon- ' -"«.^1. í VUi aV Uti UC3 lfLCLULlò UC UUl I- / heure, il faut les replanter fur couche ^íous cloche. A Langeais, d’où vien- ?cvt tant de bons Mêlons à Paris, on ^replante en pleine terre , & ilsy réuf® ' u ient fort bien , mais ;cette terre est* 144 Curiosités amendée avec de bon terreau. On les replante autour de Paris & cette forte. On leve de dessus la couchí la jeune plante avec la plus grosse mott fi qu’il est possible. On fait dans la couche, où l'on la veut replanter., un trou convenable , pour l’y placer aisément; Puis on remplit ce trou du terreau, q ul fait le dessus de la couche. On les replante à deux pieds loin l’un del’autr e * 7. 11 íaut autant qu’il fe peut, íai re cette transplantation par un beau ternS* en évitant cependant la grande chalet du jour, parce qu’elìe fatigueroit le jeune plant On peut commencer cet ouvrage deux heures avant le Soleil couchant. 8. II est de la derniere importance à e remettre aussi-tôt les cloches fur ces M e ' Ions transplantés ; & même afin que ^ Soleil ne les affaiblisse pas, il saut mérite des paillassons fur les cloches. Ce§ paillassons doivent être en forme de tofc» & portés fur des efpeces d’échalas soutenus par de petites fourches de bois ' car enfin il ne faut pas les étouffer, e" voulant les défendre du froid. Pour ct qui est de la nuit il n’y auroit p aS de mal que les paillassons portasse^ Rir les cloches mêmes , parce que da nS ce tems-là il y a des nuits terrible- sur la. Végétation. 145- îfient froides & mortelles pour ces plantes tendres & délicates. 9- C’est l’ufage autour de Paris, de Miller les cloches fur les plantes jufqu’à c e que le fruit soit beaucoup plus gros tfo’uç œuf de Poule. On a foin dans les keaux jours de leur donner un peud’air, e n soulevant un peu la cloche avec de petites fourchettes de bois; mais tant qu’il y a à craindre des nuits piquantes, far le soir on ôte les fourchettes . afin Hue toute la choche porte fur la couche. 10. Quand le tems est chaud & sec; P faut arroser les Melons tous les trois fours, fur les sept à huit heures du ma- pn d’une eau un peu échauffée au Soleil. H. Lorsque les Melons ont bien repris , & qu’ils ont pouffé plusieurs feuil- on les pince; c’est-à-dire, qu’on c °upe le montant, afin d’obliger la fé- v e à pouffer des bras, qu’on arrête à leur tour, lorfqu’ils ont chacun C1 nq ou six feuilles. On continue de les piller au mois d’Avril. II faut fans cesse l £ s soigner. . 12. Quand les plantes ont des fleurs, " faut les réchauffer, en mettant du fu- *foer tout neuf autour de la couche, ^’est par-là qu’on s’assure de ces fleurs, stu’qn Içs empêche de couler, & qu’oa ■íf* Partie, G 146 Curiosités les dispose à nouer. On connoît que k fruit est noué, s’il est d’un beau vert» s’il grossit à vue d'oeil, tandis que 1* fleur se satine sc dépérit. 13. Lorsque le fruit paroît ainsi vi- goureux, il saut arrêter les trainalïes en les coupant un demi pouce au-dessus du fruit, ou pour plus d’exactitude & de sûreté, au nœud qui est le plus proche de celui où est le fruit. C’est alors qu’il faut même faire main basse fur les fausses fleurs, fur les feuilles trop nourries & gourmandes, fur les jets, fur les bras où il n’y a point de fruit, & fur tout ce qui pourroit févrer nos tendres fruits du suc nourricier que nous leur devons conserver en entier. II n’y a presque point de semaines où les bons Jardiniers ne reviennent à faire ces fortes d’amputations. 14. Quand les Melons deviennent gros, & que les nuits commencent à être dhaudes, on ôte absolument les cloches» & alors il les faut arroser tous les trois jours fur les cinq heures du soir, jus" qu’à ce qu’ils ayent 'presque atteint leuf grosseur parfaite ; après quoi il ne faut plus du tout leur donner à boire, quel" que soif qu’ils paroissent avoir. II y a deS Curieux qui prétendent qu’en arrosant la plante, L.u| ssi d unner de garde d'en 1e ertj e 1* vi' s efl s du : de )che iu’il aus- 3 ur- r les toiss :uits ronS sque rdsi >rteS nent être hesl :r oií jus- leuf saut ueP i deS fans ïefl sur la Végétation. 14,7 fouiller le pied de peur qu’il ne s’y engendre quelque pourriture. ip. 11 y a des Jardiniers aux environs de Paris , qui laissent trois, ou quatre Celons fur une plante ; mais j’en con- nois de fort expérimentés, qui témoignent qu’ils feroient contents, íi chaque plante leur en donnoit deux bons. Pour ?oi je ferois d’avis qu’on y en laissât jamais plas de trois, comme on fait au Potager du Roi. 1 6. Lorsque le Melon commence à *nûrir, il faut ôter les feuilles qui font dessus afin qu’il profite de la chaleur du Soleil, observant toujours pourtant qu’il de le faut pas trop hâter de mûrir en Aucune maniéré. On peut dans ce tems- *L a mettre un petit tuileau, ou une ardoise dessous, tant pour le garentir de tr °p grande humidité de la terre, qui Pourroit le gâter, qu’afin de l’empêcher de contracter le mauvais goût de la couche. . 17 .Pour achever fa parfaite maturité, y e ft bon de le tourner de côté & d’autre durant trois ou quatre jours, avant que de le cueillir. Enfin c’est une affaire des plus obs- Cur es, que de s’affurer, si un Melon est scellent. Nos Maraîchers de Paris qui Conduisent de grandes Melonnieres, G ij SI 148 Curiosités conviennent tous, qu’il n’y a point d? marques, fur quoi on puisse certaine^ ment compter dans le choix d’un bon Melon. On nous dit feulement en général , qu’il doit être pesant , ferme à la main , bien brodé. Mais après tout !l n’y a pas en tout cela des augures certains. Le plus fur pour ceux qui le s achettent , c’est de les prendre à 1® fonde , à la coupe. Et alors quand on trouve qu’un Melon a l’écorce mince, qu’il sent un, peu le goudron, qu’il est sec & vermeil, & qu’il est bien meut, & bien sucrin, on doit le juger digne de paroître sur la table d’un honnête homme. Franchement les bons Melons font austi rares que les bons amis: ce qui a donné ,lieu au petit Quatrain fui* yant. Les Amis de íheure présente R.eJJemblent au Melon : II en faut au moins sonder trente Pour en trouver un bon . On rafraîchit les Melons, comme I e vin , dans de l’eau bien fraîche , & oB espere qu’ils seront bonsquand ils st précipitent au fond de l’eau. îVcr, C tout périt Par j tieuíi fectií les, í sidér! donn L; deux des 6c pa c ela j ttion dext< Pari, tir. ; r ant v ìn f, Un de f a de C £out W dA SUR LA VÉGÉTATION. 149 Pratique d’une Personne de Condition, pour avoir de bons Melons. Comme je ne veux rien négliger de l °ut ce que jai pu découvrir pár les expériences de nos fameux Jardiniers ï&c. Par les mémoires que des Personnes cumulés m’ont communiqué, pour per- ^ftionner la culture des plantes uíuel- *es, je mettrai ici, ce qu’un homme considérable par beaucoup d’endroits, m’a donné pour la culture des Melons. La graine de Melons trempée durant deux jours dans du vin muscat, produit des Melons d’un goût vineux , íúcrin , êc parfumé. On fait chez moi plus que Ce la, ajoute cet homme de condition : ^on Jardinier a la patience d’ouvrir avec dextérité un certain nombre de graines P3r le petit bout, d’où le germe doit lords. En cet état il les met macérer du- ^nt vingt-quatre heures dans de bon sucré & ambré, après quoi il les fait j 11 peu sécher au Soleil, & lesséme dans j e la terre bien amendée avec du fumier d e Chèvre. II en vient des Melons d’un admirable, & beaucoup plus gros ^’ils ne font d’ordinaire. j II a observé que la graine du milieu d Melon j sait des Melons gros & 'vnds. ' ckiij ijo Curiosités La graine, qui est prise dans le côt e du Melon, qui a touché le plus long' teins à la terre, produit des Melons plu s doux & plus vineux. La graine du côté de la queue donne des M elons longs & mal faits. Enfin la graine , prise au bout on «toit la fleur , forme des Melons bief* conditionnés, agréablement figurés, & brodés. Quant au tems où il faut exécutes tout ce que j’ai dit fur la culture des Ions, cela est marqué dans les ouvragé de chaque mois. C’est-là qu’on trouver* fans peine le véritable tems de toutes le s pratiques que je viens de prescrire. Elle* font ìà dans leur place naturelle, & j e ne les pouvois mettre ici, fans trop gros' lir cet article, qui nous auroit trop f alt perdre de vuë la fuite des travaux mois de Janvier, où j’ai dé ja renferm e plusieurs instructions fort longues. Au reste , le Melon raffraîchit & ht*” mecte beaucoup. II tempere les ardeu^ du sang, il réjouit le cœur. II est rétique, c’est - à - dire, qú’il provoq^ 6 surine. Mais I’excès en est très - dang^ reux, parce que fa froideur & son hU' midité le rendent de difficile digestion ' & quand il reste trop long-tems d® 0 ^, i’estomach, il se corrompt, dit Voà 0 ' SURLAVÉGÉTATION. Jsf ftee, & cause des fièvres malignes. In Vs ntriculo autemfi diutiàs hœreat , corruin- fitur , £r malignisfebribus occasiommpret-, be t. Pemptad. V. Lib. 2 . cap. 2. pag. 63 $* Récolte, On peut avoir dans ce même mois , P a r le moyen des couches, de belle Of'eil- E 5 du Persil, de la Bourache , de la Bu- Stafe, de petites Laitues à couper , avec e ursfournitures; du Baume, de l’Estra- §°n> du Cresson Àlenois, du Cerfeuil íe ndre. On peut avoir quelques Champignons,' J, 1 on a eu foin de couvrir avec de grandi *umier les couches faites dès l’année pré-, c édente. Si le froid n’a pas été trop piquant; p 1 ? a ura des Raves, du Porreau, de la -moule , de la Pimprenelle, même des Asperges rougeâtres & vertes, qui fonts ^Heures, dit M. de la Quintinie, que Sjdlys qui viennent fans art en Avril & a >- Il ne faut point disputer des goûts; ais beaucoup de gens, qui ne l’ont pas , a uvais, ne feroient pas de celui de M. e ta Quintinie. F È v R 1 e R. On fait presque les mêmes choses ; Giiij v rj2 Curiosités que dans le mois de Janvier. On sème l’Oignon, le Porreau, les Cy boules, l’Oscille, les Pois hâtifs, les Fe- ves de Marais, la Chicorée Sauvage, même la Pimprenelle. On suppose que la terre n'est pas gelée , ni couverte de néges. On replante, pour les faire pomme? fous cloche, les Laitues à coquille, se" mées dès l’Automne,à la saveur de quel' que bon abri. Surtout on replante les Laitues » crêpe-blonde, qu’on a semées en Janvier. Vers la fin du mois, on sème du Pourpier sous cloche. Le Pourpier doré est trop délicat, pou? être semé avant le mois de Mars. On replante des Concombres, & des Melons fous couche , en cas qu’iîs soien? assez sorts. On sème les premiers Choux pommés» & on replante ceux qu’on avoit semés dès le mois d’Août. On fait des couches pour les Raves» & les petites salades, Sc pour tout ce qu’il faut replanter en pleine terre» On réchauffe les Asperges. On entretient les récbaussemens à ei Fraisiers qui font fur couche, afin devoir des Fraises de bonne heure. SUR LA VÉGÉTATION. Iff On fait des labours, si la saison est douce, <5c le permet. Récolte. On n’a, dans ce mois-ci, que ce que l’on a conservé dans la ferre , & ce que l’on a pû obtenir de la terre par le secours des couches , & des réchauffe- Wens; c’est-à-dire, les petites Salades, ^Oseille, les Raves, les Asperges. Mars. Vers le ij de Mars, on fait des couches, pour replanter des Melons. II n’y a plus à différer. On sème presque toutes sortes de ■Laitues , & surtout celles qu’on veut ^planter vers le commencement de Mai. Les Choux pommés pour l’arriere saison.. Les Choux fleurs, les Chicons. On léme des Raves en pleine terre :• & pareillement la Bonne- Dame. Les Citrouilles fur couche, pour les re planter au commencement de Mai. On ne replante encore rien en pleine ter re, si cen’est des Laitues Romaines. Parce que la terre n’est pas-encore assez Chauffée. G v J 54 Curiosités Oh sait des planches & des quarrés de Fraisiers. On sème pour la troisième sois des Pois, & particulièrement les gros Pois quarrés. Un peu de Chicorée, afin de la faire blanchir pour la Saint Jean. Le Céleri, afin d’en avoir en Septembre. Le Pourpier doré fur couche, & fous cloche. On replante les Choux pommés. Si les Choux du Milan. On sème la graine d’Afperges. On plante les quarrés d’Asperges. On en met deux , ou trois pieds ensemble. On les plante à un pied Sc demi les uns des autres. On en met trois rangs fur une planche de quatre .pieds de large. On fait encore quelques couches pour les Raves, qui finiront , Iorfqu’on recommencera d’en avoir de semées en pleine terre. On replante le Porreau, l’Oignonr l’Ail, les Echalotes, les Rocamboles, les Choux blancs, les Pancaliers, ìes- Capres-Capucines.- On donne le labour a toutes fortes ds Jardins» On commence à découvrir les Arti- chaux ; supposé qu’il n’y ait plus de for? îe gelée à craindre» SUR LA VÉGÉTATION Xjs On sème en pleine terrel’OseilIe, la Ciboule, le Persil, le Cerfeuil, la Chi- c °rée sauvage , les Carottes. Récolté. , Les Couches nous donnent en abondance dans ce mois-ci des Raves, de pertes Salades , de l’Oseiîle, des Laitues pommées fous cloche. On a des Asperges rechaussées. A v R i L. Nous voici dans le tems des plus grands travaux du Jardinage. Tout se présente à la fois, & il est difficile de se trouver par tout : mais il est des embaras plus inquiétans, & dont on tire moins ressources. Il n’est plus permis de remettre leslaH kours pour les légumes. On plante, ou l’on sème Laitues Por^ tée, Choux pommés, Bourache, Buglo- ^ e j Estragon, Baume, Violette, Arti-r c haux, Corne de Cerf. On découvre les vieux ArtichauXy c’est-à-dire, que l’on ôte les fumiers quí< les désendoient contre les rigueurs de‘ l’Hiver. Après cela on les laboure. O m |es œill étonné, & on en plante des œilletons, G vj j 5*6. G îí r i O' s i t Ê s. Oeilletonner les Artichaux , c’eft décharger áf éclaircir ceux qui sont forts , Sc qui. ont besoin d’être soulagés*' Ces œilletons qu’on en détache, do' 1 ' vent être plantés avec soin ; Sc quoiqu’il ne paroisse aucune racine à leur talon, ib ne laissent pas de reprendre, pourv u qu’ils soient un peu gros Sc blancs. U s donnent leurs premieres pommes en A ut tomne. On pince les Pois, semés en Octo- bre, parce qu’ils sont présentement fleu- ris. Les Pincer, c’est les tailler au-dessu 5 ' des premieres fleurs. Les bras qui nais' sent à soccasion de cette taille, se coupent auflì : Sc cette opération se sait, au- dessus des deux premieres fleurs.. On taille ks Melons,. & les Concombres. On réchauffe les vieilles couches, pour y semer de nouveaux Concombres, afin d’avoir vers le commencement de l’Automne des Cornichons 3 confire , & des Concombres pour. b Cuisine. On nétoye ks allées des Jardins : oti sarcle, c’est-à-dire, on arrache les méchantes herbes, qui se montrent parmi les bonnes plantes. On serfouit les Fraisiers , les Pois t les Laitues replantées , pour rendre b terre meuble, afin. de.recevoir les.pr# sur r, À Végétation, tçj' bières pluies, qui tomberont Les pluies âe ce mois font précieuses : & fi ce n’est Pas en bonne rime , c’est au moins avec “eaucoup de sens, que les gens de' la c ampagné disent : La Rosée de Mai, & la pluie d’Avril'* dopassent en valeur le Char du Roy David ; On sème la Chicorée blanche en plei- terre, où elle doit blanchir, si elle est *emée sort claire. Les Cardons d’Espagne, & l’Oseille, 1 °n en a besoin. On donne un peu d’air. aux Melons, 'Jui font f 0US cloche. b On replante avec le plantoir ^aves , qu'on veut laisser monter ZTaine. On fait des bordures de Thim , ~ a uge, de JVIarjola-ine-, d’Hisope, « lavande, de Rue, d’Absinte, de Romarin, de Violette double, de Violette simple , de Sarriéte, de Fraisiers, de On replante les Laitues duPrintems, les en dc de P^ur pommer. On transplante les jeunes Fraisiers,. ° es Bois dans les-Jardins. On léme des Fèves ,, Se des H&rií. j$B Curiosités On choisit les plus belles Laitues» pour les mettre en planches, afin qu’elles y montent-en graine. Si les Roux-vents, qui font secs, mettent en campagne , comme c’est l’ordinaire dans ce mois-ci, il faut faire d’amples arrosemens dans tout le Pota^ ger , afin de remédier à la mortelle sé- ehereíïè que produisent ces vents dé- votants. Nous ne scavons pas ce que la Lune fait de bien ou de mal aux plantes ; & je me range volontiers du parti de çeux qui ne veulent pas qu’on ait égard, en fait de Jardinage, â l’état où est la Lune. II importe en effet très-peu, d’obferver, si elle est nouvelle, ou pleine, ou en dé- cours, quand on veut sçmer, ou planter. Cependant ceux-là mêmes, qui font les plus déchaînés contre ces observations, ne laissent pas de nous dire dans leurs Livres, que la Lune Roujse est sujette à i être venteuse, froide, & sèche, que c’est la plus dangereuse ennemie de la Végé- ; ration. On pince les montans des Fraisiers, J ce qui se sait en retranchant les premie- \ res sieurs, pour ne laisser que les premières , qui en deviennent plus belles A plus sortes. SET B. £ A VÉGÉTATION. Récolte. On commence à jouir avec abondan- te des fruits de son travaiL On a des Ra- y es, de Epinars , de belles Salades a Vec des fournitures fort amples. Dès le c ommencement du mois, on a des Laides Crêpes - blondes pommées, qui ont ^é élevées fur couches: des Asperges; ^nues fans artifice. Des Fraises par le secours des coures , & des châssis de verre.- M A V. ^ Comme c’est dans ce tems-cî, que là> Aature est riante & enjouée, qu’elie ou- ses trésors , & étale toute fa magni- ® Ce nce, un Jardinier doit fe précaution- î ' e t contre les méchantes herbes , qui, P ar leur trop diligente Végétation, épui- le nt la terre, volent la nourriture des lé- kurnes, & les étoufferoient infailliblement, fi on n’arrêtoit pas ce désordre , t en sarclant, labourant & nétoyant sans r elâche le Jardin Potager, fl est tems de planter les Choux-fleurs, Choux de Milan , les Capres-capu- cin es, les Choux d’Hiver. C’est mainte»r ^ntenant la vraie saison.- í6ò Curiosités On achevé d’œilletonner Jes Ar £J> chaux. » On plante de la Poirée pour Cardes* On ne la plantera pas mal, íl on la nid i parmi les Artichaux. Les Melons commencent à nouer. On sème les Laitues de Gènes: en replante- On en replante d’autreS aufiì. . On sème encore de la Chicorée, pod en avoir à la fin de Juillet. 1 On lie les Laitues, qui semblent êttS paresseuses à pommer. On replante en pleine terre des Me" Ions, des Concombres', des Citrouilles' comme ces derniers aiment à boire co' pieusement, on sait autourdlelies de ps" tires fosses , pour retenir l’eaude la pluie, & celle des arrosemens. On sème un peu de gros Pois. Ou rame les autres, qui doivent être dé j 3 forts. On les serfouit en même-tems. On replante du Pourpier, pour eU i avoir de la graine. On continue de tailler les Melons f afin de leur retrancher les bras, ou bran' . ches inutiles, qui leur nuisent. II faut auffi racourcirles brasqu’on y laisse.. On commence vers la fin du mois replanter du Céleri. Durant tout ce mois»' au. défaut, des pluies abondantes , oss sur ea Végétation. i 6 t doit suppléer par d’amples arrofemens» •*' ne faut point s’épargner là-dessus, ^ans l’eau jointe à la chaleur, point de 'Végétation. L’eau dissout les íèls de la ^ r re; & dans cette dissolution, les raines les íailìssent, pour la nourriture des plantes. Régies générales pour les Arrofemens:, Quand les Plantes, qui font en Hiver, dans la ferre ont besoin d’être humectées, °n arrole la terre doucement, deux heu- r es après le Soleil levé. II ne faut jamais fouiller la plante. On ne fait pas de mal de se contenter de mettre le bas du pot dans l’eau à la hauteur de trois doigts. En Eté on arrose le soir , & jamais, disent quelques-uns, le matin, jde peur ^ue i’exceíîìve chaleur échauffant trop l’eau, ne tourmente les plantes. Nos Marchers de Paris arrosent pourtant leurs légumes durant tout le jour j, & ils ne s en trouvent pas mal. M. de la Quintinie défend de se fer- v ir jamais d’eau échauffée, & tiède, pour les arrofemens. H prétend avoir reconnu par ['expérience, qu’une telle eau est funeste à toutes fortes de plantes. Cependant quelques Curie.ux. s’en fervent fans; %on. i<§2 Curiosités On doit replanter jusqu’à la fin de Mai des Chicons , des Crêpe-vertes» avec les autres Laitues, qu’on nomme» Auberviiliers , afin d’en avoir au moí s de Juin. Récolte. On a maintenant une moisson de toU ; tes sortes de verdures. Tout se livre à souhait dans les jardins; Salades, Raves» Asperges, Concombres. Les Poix, & les Fraises commencent à se mettre de la partie, & à nous gratifier des foins que que nous en avons pris. Sur la fin du mois abondance de fraises» J U I N- Amples arrosemens, fans quoi rien ne réuílìra ; & fur tout, pour les Concombres, & les Melons. On receìiille la graine de Cerfeuil, & toutes les autres graines qui se trouvent m ûres. On sème de la Chicorée , & de la Laitue. On replante des Cardes de Portée, le Porreau. On sème des Pois, pour en avoir en Septembre. On rame les Haricots» i àe r tes, une» mois f OU' *e à 'es, SITrIA VÉGÉTAÎIOK ï t> II faut faire une guerre implacable aux ^chantes herbes. , On doit dans ce tems-ci donner un la- si our universel dans tous les Jardins. Les ter res fortes & humides se labourent en * e *îis secs. Les terres légeres demandent Eêtre travaillées après, ou durant même a pluie, & très-peu devant. On fait la tonture des Louis. de jue aine 3 - k Récolte . , On a dans ce tems-ci une forêt d’her- “ es potagères. Abondance d’Artichaux, de Cardes,' ’ e Poirée, de Pois, de Fèves, d’herbes ; scavoir Thim, Sauge, Sarriéte, pisope j Lavande. On a les Pourpiers , ies Laitues Romaines, les Haricots. On commence à tâter d’un peu de Lhoux pommés, & de quelques Melons. Juillet. j Fréquens arrosemens î car enfin les | Sondes chaleurs, fans ce secours, font *out périr5 mais en arrosant fortement, I ° n obtient des produótions qui enchantent. C’est le tems de recueillir toutes les Ê r aines, qui font en maturité. I§4 C O H I O S 1 T É S On sème la Laitue Royale, pouf' avoir à la fin de l’Automne. Quelques Ciboules & de la Poif‘ pour l’Automne. Des Raves pour le commenceme^l d’Août. II faut les semer en lieu humH de, & bien frais, ou les puissammeflM arroser. ! > On replante les Choux blonds po^ 1 la fin de l’Automne & pour le commet cernent de l’Hiver. On sème encore des Haricots po^ f l’Automne ; 'des Pois , afin d’en avoi f en vert durant toutl’Eté ; des Chicorées» pour en avoir en Automne, & en Hiver J des Pois quarrés, qui en donneront & mois d’Octobre, R écolier Ch Û Pois, Fèves, Haricots, Choux potrw més, Melons, Concombres, Salades de route espèce ; & tout cela avec abondais ce. On a auífi des Chicorées blanches» & on ne manque pas de Raves. cli; A O U S T. Grands Arrosemens. On replante des Fraisiers en place» après les avoir enlevés en motte. SUR t'A VÉGÉTATION'. ì 6y On receiiille les graines de Laitues, P Raves, de Cerfeuil, de Porreau, de Ciboules , d’Oignons, d’Echalotes, de ^°camboles. On sème des Raves en pleine terre, P°ur l’Automne. On commence à semer les Epinars,' P°ur Septembre ; des Mâches, pour les pladesd’Hiver, & des Laitues à coquil- , e ) afin d’en avoir de pommées à la fin ^ l’Automne, & durant l’Hiver. On sème quelques Oignons, pour en ^oir au mois de Juillet Tannée suivante» ^cs Mâches pour le Carême, de l’Oíeil- c j du Cerfeuil, des Ciboules. On replante les Choux d’Hiver, les Chicorées, des Laitues Royales, des Per- P'gnanes, qui font d‘un grand usage pour Automne, & pour FHiver. On lie la Chicorée afin qu’elle blanchisse. On couvre de terreau les Oseilles, afin pelles fe fortifient. II faut auparavant ^ avoir coupées à la superficie de la . On coupe les vieux montans des Ar-* tlc haux. ,, On tire de la terre les Oignons j ■^'1, les Echalottes. On coupe les feuilles des Beteraves, p* Carotes, Panais, pour en faire gros- " Ir les racines. i 66 Curiosités On recueille les Pois, qu’on alai$ sécher. On plante les Choux blancs d’Hiv e f' On en íéme pour être replantés au & olí de Février suivant. Récolte . On a pour lors toutes les verdures mois précédens, beaucoup de Racine 5 * Oignon, Ail, Echalotte. Abondance de Melons, Sc de Co 11 ' combres. Lej Citrouilles d’Août. Choux Pommés , Chicorées bla 1 *' ches, Raves. Septembre. Si le Jardinier est diligent, iln’y* pas un endroit du Jardin, dont la tes sC ne soit chargée de Plantes Potagère 5 > soit semées, soit replantées. On replante des Chicorées , & d e> Choux d’Hiver, de vieille Oseille. On sème les Epinars pour leCarêtf^' On lie avec de la paille neuve, qt^' ques Gardons d’Espagne , & qnelq u f pieds d’Artichaux, afin d’en avoir ^ blanchis à la fin du mois. On lie pareillement le Céleri , & I e -- sur la Végétation. 167 phoux-fleurs , si la pomme commence 5 paroitre On terne des Mâches , & des Réponds pour le Carême, & des Epiriars, asm ^6n avoir après Pâques. - On replante de la Chicorée , & des situes à pommes, pour le Carême. ( On couvre de terreau les Oseilles cou-; Pée$. On fait des couches de Champignons Récolte. . On receíiille à présent beaucoup de Chicorées, des Choux pommés. , Quelques Choux-fleurs, quelques Car- pns d’Efpagne, quelques Cardes d’Ar- lc «aux, quelques pieds de Céleri ; encore ^elqu es ' Melons, beaucoup de Citroiiil- es , & d’Ardchaux. Octobre. O’est preíque encore les mêmes ouvra- que le mois précédent. , n terne des Epinars, pour les Ro- r c°. ns ' & du Cerfeuil pour la dernie- °is de l’année. On coupe le vieux, qu’il fafle des jets nouveaux. On défait les couches , & l’on en a níporte le terreau fur les planches, où i68 Curiosités l’on veut semer des graines. On plante les jeunes Fraisiers enbo^ dure ou en planche. On fait des bordures de Rouis. On plante beaucoup des Laitues d’H 1 ' ver , 6c sagement sur de vieilles coû' ches, ou l’on peut réchauffer , ou ^ moins le long de quelque muraille à ^ bon abri. On donne un labour aux terres forte?' afin de faire périr les méchantes herbe?’ & fur tout pour donner aux Jardins ^ air de propreté dans cette saison, qui e* destinée aux innocens plaisirs de la C^' pagne, ofc chacun va jouir tranquille ment du doux repos, que les affaires permettent pas de trouver dans la Vil^' Récolte. Les Jardins offrent de tous côtés délicieuse abondance. Chicorée, Cél^ 1 ’ Cardons, Cardes d'Artichaux , Car^ 5 dePoirée, Champignons, Concombre?’ Sc peut être même encore quelques ^ Ions, si les premières gelées n’en ont P a fait dégât. Epinars, Pois tardifs, Racines, Aj ’ Oignon , Echalotte , Oseille , Poir e£ ' Cerfeuil, Persil, Ciboule. C'est lete^’ pù la Nature étale ses libéralités avec p (0 fusion. sur ia Végétation. 16 $ Novjsìmbke. . ^’est maintenant á un Jardinier labo- rie ux à faire renaître le Printems par le J^oyen.des couches & des cloches. C’est- f? ìe grand art en matière de Végétation ce tems-ci : c’est par là qu’on brave 1 Hyver, & qu’on force la nature à ne P as demeurer oisive. On semera donc fur couche les peti < *. < 3 , a lades, comme laitues à couper, cref- loi >,&c.. On plante des laitues íous cloches ; ° u fous châssis, afin de les faire pom- tti°r, r . Oq/ replante aussi fous .cloche des 3e baume, d’estragon , de mé- , On plante de la Chicorée sauvage, u Persil de Macédoine ; mais íur-tout c °i!che & cloche. On coupe les montans des Afper- j? es > parce que ia graine en est à pré- s On lt e ] es Chicorées, si elle font a t ^fortes. On réchauffe les Asperges, FOfeille, , , Ohicorée sauvage , le Persil de Ma- c ed°i ne> j’ a j âit ci-devant, que ré- Ctlau ffer une plante, c’est lui ôter Ic Partie. II 170 Curiosités vieux fumier, & lui en donner de noU' veau qui est tout chaud. On sème des Rayes pour en avoir mois de Janvier ; mais couche Sc cloche. On peut semer des Pois à quelqO bon abri, pour en avoir de bonne heure; mais il faut veiller à les défendre contre les insultes de la gelée, fans qu°‘ peine perdue. La Sere devient à présent d’un usag e nécessaire. C’est-là qu’il faut transposer avant la gelée, les Carotes, les P a ' nais, les Bèteraves, les Cardons d’Esp 3 ' gne, les Choux-fleurs, le Céleri, ^ tout ce qu’on veut conserver pour ver. On les plante fort près-à-prçs da- nS la Serre. Les labours d’Hyver se sont indifp-* r sablement dans ce mois ci. Dans les terres sèches, on butte ^ peu les Artichaux. Récolte. On a encore présentement EpinO 5 ' Chicorée , Céleri , Laitues , salad^j des herbes potagères, des racines, ^ Citrouilles, toutes fortes de Choux, quelques Artichaux. SUR LA VÉG É TATîON. 17k Décembre. On seme encore des pois, comme je *ai dit dans le mois précédent; mais on a tout à craindre pour eux, si on ne fait P a s les garder des rigueurs mortelles de la gelée. On amasse des feuilles d’arbres. On I e * fait pourrir, & on en fait un fumier bien précieux pour le Jardinage. On porte les fumiers pourris.dans tous * es endroits que l’on veut fumer. On feme des Laitues fur couche & 1q us cloche. Sans leur secours, la terre 112 peut rien produire à présent dans no- t [ e climat ; mais avec couches & clones, on goûte les fruits des fécondes fonceurs du Printems. Quand il fait un ° e au Soleil, on doit lever les cloches. II 112 faut pas manquer d’entretenir les coures par de bons réchauffemens. , O n peut en Décembre, faire plusieurs j 2s travaux qu’on fait ordinairement en anvier. La diligence est d'un grand mé- rite > autant en fait de Jardinage qu’en t0uc autre chose. Récolte- Oa peut déja avoir quelques afper- H ‘j 172 Curiosités ges, quand elles ont été bien réchauf' fées ; pareillement de belle & bonn e Oseille, desEpinars & des Choux d'Hy' ver, tant les verds que les blonds qui fo 111 les plus délicats. Article III. Secrets qui concernent le Jardin Pot(tg ef ‘ Je n’ignore pas combien font faut*' ves les cbofes qu’on débite dans le mo n " de fous le nom de Secrets. Franchem- 11 * la bonne foi est bien rare, & la fups s/ cherie-est toujours d’un très- fréquent ge. II ne faut pas s’en prendre à nct sí siécle; le vice est de tous les tems. hommes ont toujours été faits , N§ tâc '1 r*' sur tA Végétation. rov :V C nt î 73 Communiqués par des personnes de probité. *• Pour hâter la germination des Graines . > Mettez une Fève tremper durant huit jpvxrs dans du marc ou de l’huile d’O- ~ Ve > elle germera presque fur le champ , vous Tenfoncez dans la mie d’un pain c haud. Cela est admirable , dit Cardan , mais utile : hxc mira , parum tamen utilia . ,^is il ajoûte fort bien que ce petit ma* , entre- les mains de gens d’esprit , r^ut conduire à quelque chose de plus j Portant. De Varietat . lih . xuj. cap • 66. e n e puis m’empêcher de faire observer l Ue Cardan renferme ce secret dans un ^."apitre qui porte pour titre : les Dé- iCe t» II a bien raison, s’il entend, comme l’p ne n peut pas douter, les délices de iri rU ' On est en effet charmé de ces ^ n °cens artifices, que l’industrie des ç^rnes employé pour découvrir tout SN peut aider la Nature. 2 ‘ Pour faire pommer les Choux plus promptement. d e . s Curieux qui habitent le long Wvagçs de la mer, lorfqu’ils trans- A iij í 7 i'" Curiosités plantent les Choux, mettent de l’Alguc » avec une pincée de Nitre fous la racine- Après cela on les v'oit végéter & pom - mer avec beaucoup de diligence. Le Chou qui devint si prodigieufe' ment gros, & l’admiration de tout I e pays j fut trouvé avoir tout près de j* racine un vieux soulier dont il avoit t*' ré tout l’embonpoint qu’on lui voyotf* La peau d’un animal est un ragoût poU s ane plante, & même tout ce qui vies 11 des animaux, contribue beaucoup à I 3 végétation. Qui voudroit traiter de la même m a ' niere des Laitues & des Chicorées, $ répandre un peu de Nitre , ou quelq ueS cendres des plantes brûlées proche leu^ racines, on auroit des Laitues pommes d’une extraordinaire grosseur. Les Ch 1 ' Corées ne s’en accommoderoient p a * moins bien : elles n’en seroient que plus agréables au goût. 3. Pour faire lever des Laitues en moitt s de deux heures. On écrit d’Angleterre, dit M. BayK’ que M. Edmond Wilde ayant prié à d ner quelques personnes, sema en 1 £ __ présence , avant que de se .mettre à ^ ble, de la graine de Laitues dans u SUR LA VÉGÉTATION’. 177 terre qu’il avoir préparée durant deux 3ns, & l’on trouva après le dîner qu’en tnoins de deux heures:, la Laitues avoir pouíse d’environ la hauteur d’un- pouce, en comptant la racine. ïl est prêt à parier dix contre unique la chose lui réussira toujours ainsi, pourvu qu’on lui donne deux ans pour préparer de nou~ v elle terre.,-Ilajoûte que cette expérience est .la clef de toute l’Agriculture. II promet de lâ publier, dès qu il âura fait ! kne autre chose encore plus considérable , qu’il y veut-joindre.' B'ayîe J Repu- tiiq. des Lettres. Tom■ L Mars J Pag. 319. Au secret de M. Wilde que nous n’a- v °ns pas, j’en substitue un autre qui vaut pas moins. Je parle avec une confiance entiere, quand j'ai pour ga- ra nt feu M. Gui de la Brosse, onde rna- - t£ rnel de Fiîlustre M. Fagon , Médecin du Roi. Ce secret est tiré du Livre que "h de la Brosse a composé de la Nature Venu à Plantes. II les avoit toute la v ie étudiées avec une ardeur inconce- Va ble. Jamais personne n’a eu tant à ^ur de perfectionner la Botanique, & naontrer qu’un Médecin qui ne confît par les plantes, est très-indigned’en | P 0r ter le nom. Aussi efì-ce à son zéfe ln fatigable., que Ton doit rétablisse- 175 Curiosités ment du Jardin Royai des Plantes, ç[ ue M. Fagon a mis en l’état où M. de J 3 Brosse se propofoit de le mettre s’il e uC vécu assez pour cela. Voici comme ce savant homme a procédé pour faire lev et la Laitues, & avoir de la Salade en deu 2 heures. . J’ai, dit-il, pris de la cendre de tcom' se & du fumier bien terreauté que- j al arrosés de jus de fumier par plusieU rS fois, & autant de .fois desséché au Sor leil, tant que cette composition soit de- venue une terre grasse & bien meub* e .. si c’est en Hyver, vous mettre 2 votre terre dans une grande terrine^vous la remuerez & la travaillerez, l'arross^ peu-à-peu avec jus de fumier, jusqu* ce qu’elle soit humectée comme eft un e terre que l'on veut semer! Vous la mettrez fur un réchâux , pour lui donne? une chaleur égale à celle du mois de Juillet. Quand elle fera ainsi échauffée» semez-y vos graines de Pourpier o a de Laitue, après les avoir un- peu humectées avec jus de fumier bien pour? 1 * durant vingt-quatre heures. A me& re que vous verrez votre terre se sécheO vous l’arroferez avec de seau de pluie, ^ qui ne soit pas froide. En moins de d eu* heures, ces-semences, auront produit» j chacun selon son espèce, de quoi f aire SUR I. Á VÉGÉTATION', ly-j Uns très-bonne Salade. Guide la Brojse „ Médecin du Roy : De la Nature £r Ker- tu des Plantes J Liure L Chap. xuij.pag. 128 „ 129 £r 130. Je ne dois pas oublier ici que je fuis redevable du bel exemplaire que j’ai de ce Livre, à l’amitié de Monsieur Vaillant, autant connu par son extrême Politesse, que par la vaste connoissance qu’il a des plantes ; fur quoi il pourroit le disputer avec les plus renommés Botanistes. Aussi dans le moment que j’é- Çris ceci, viens-je d’apprendre avec une joye toute singulière, que M. Lagon, qui est un grand connoisseur en fait de mérite, a fait nommer par le Roi, M. Vaillant, pour remplir la place de Pro- ^sseur Royal en Botanique, qu’occu- Poit ci-devant le frere de feu M. Da- quin. Ce choix où la feule confidéra- tssin de la capacité a eu part, foûtien- dra assurément la réputation que M. le Premier Médecin s’est faite dans le monde, de ne mettre en place que de bons lu jets, & de ne commettre pour la dé-- ^onstration des plantes, que des personnes capables d’un emploi si important au uîen public. J’ajoûte à cet article des Laitues , une Pratique de M. Laurent, Notaire de ta on, par laquelle on peut avoir, en H. v 178 CuElOSrTÉs deux fois vingt-quatre heures, une fort bonne salade. Faites, dit-il, tremper votre grains dans l’eau-de-vie; & mêlez dans votrS terreau un peu de fumier de pigeons avec un peu de chaux bien éteinte & ré- duite en" poussière. Vous aurez des Lai- tues en deux fois vingt-quatre h-ures, & ces Laitues seront grandes , & propres à manger. II y a un inconvénient j c’est qu elles ne durent que huit jours fur votre couche. C’est pourquoi il le s faut manger dans ce tems-là. Cet avi s qu’il donne a cela de commode, q ue ces Laitues se sentent sur la même cou' che où l’on éleve des Melons. C’est mettre tout à profit. 7 Au reste M. de la Quintinie ne condamne pas le bain que nous recommandons de donner à la graine de Laitue» avant que de la semer. Voici comme il pratiquoit, & comme il s’en est expjj' qué lui-même. On fait tremper, dit- 1 !’ dans l’eau , un sachet de graines de La 1 ' tuës, environ vingt-quatre heures, ap r f 5 quoi on la fort, & on la pend au c° !l1 d’une cheminée, ou au moins de q ue / que endroit, où la gelée ne puisse pas P,, nétrer. Cette graine ainsi mouillée goûte & s’échauste de maniéré, q ue V vient à germer j & pour lors après av° SUR t A VÉGÉT ATION'. Î79 fait sar la couche des rayons enfonces d’environ deux pouces, & larges d’au- tant , par le moyen d’un gros bâton qu’on appuyé ferme fur le terreau, on férue cette graine germée fur ces rayons, 6c l’on l’y feme si épaisse . qu’elle couvre tout le fond du rayon..... Enfin on la couvre d’un peu de terreau qu’on jette à-la main fort légèrement.. ;... î*ar dessus cela on met des cloches pour empêcher que la chaleur de la couche ne s’évapore. Cette petite Laitue au bout de quinze jours, est assez grande pour être coupée au couteau sc mangée en salade. InJlruS. pour les Jard. Vh Part* Chap. z. pag. 297. Torti. II. Voilà ce me í semble, tout ce qu’on peut souhaiter de plus agréable, de plus utile & de plus 1 c ertifié fur cette matière qui n’est pas as* 1 sûrement indifférente, q. Pour avoir des Fraises plutôt que de coutume. Il saut arroser les Fraisiers durant l’Hy- Ver presque tous les trois jours, avec de l’eau où l’on ait mis macérer du fumier nouveau de Cheval. On amande « terre, dit Bacon, avec du fumier: T °ut le monde fait cela; mais il feroit qu’on ri’igno:ât pas combien l’eau 180 Curiosités échauffée & engraissée par de bon fumier, a d’efficacité pour avancer la végétation des plantes & la maturité des fruits. Bacon J Sylva J Sylvar. Cent- V. n. 4O3. On suppose ici que les Fraisiers son* fous des cloches, ou plutôt fous de* chaífis de verre. 5- Pour avoir des Concombres de bonne heure . Inexpérience a fait connoirre , que 1* ’on coupe proche de terre, la tige de§ Concombres, quelques jours après I 3 germination de la graine , en jettant dessus un peu de bon terreau, la plante demeure concentrée , & fans paroitte jufqu’au Printems , & a ( ors elle donnera fan suivant, des fleurs & des fruit* plutôt qu’à l’ordinaire. M. Bacon eíH' me que les plantes qui ne paflent point l’Hyver, ne meurent à la fin de TAU' tomne , que parce qu’elles fe font épul" fées dans la production des feuilles, de* fleurs & des fruits. Empêchez cet épuisement en coupant leur tige, elles f- conserveront pour Tannée suivante ; bis n entendu , qu’on les défendra contre l a gélee. Ce que j’ai dit fur quelques plantes SUR LA VÉGÉTATION. iSl légumineuses, se peut appliquer presque à toutes les autres. C’eíì le même mécanisme , qui les rend plus hâtives & Mieux nourries : & íil’on pratiquoit avec Un peu d’intelligence, les secrets que j’ai donnés pour faciliter la végétation des plantes, je ne doute point qu’on ne fît naître des prodiges dans les Jardins. On Verroit dans nos terres, à peu-près , les merveilles que Ciarcilasso de la Véga raconte des terres du Pérou 11 assure qu’iî n’est pas rare d’y voir un grain de Bled en rendre cinq cens ; des Melons qui pèsent cent trois livres ; des Laitues de sept livres & demie, & des Raves de plus de deux aunes de longueur , & qu’à peine un homme peut embrafïer. Hifi. des laças. Liv. IX. c. 29 . On m’objectera que notre terre n’a pas la fertilité de la terre du Pérou. Soit ; mais j’ajoûte que le travail vient à bout des choses les plus difficiles , & qu’on n’auroit pas osé espérer. Polybe dit que sous Maffinissa, la Numi- die devint abondante en toutes fortes de fruits, quoiqu’on la crût auparavant absolument infertile. t $2 Curiosités Chapitre VIL Le Jardin fruitier. R ien n’est plus agréable , que de fe promener de Jardin en Jardin, fus tout quand l’aspect en est beau & intéressant. Ce sont de nouveaux spectacles qui se présentent ; car enfin il ne saut pas s’imaginer que les Jardins ne soient faits que pour en tirer des choses alimentaires. Les plaisirs de la vue, les délices de l’esprit & les doux amusemens de h vie entrent fans doute pour quelque chose dans le projet que les honnêtes gens se forment de se faire des Jardins# C’est cette même raison qui a fait que Fon ne s’est pas contenté d’en avoir aux Maisons de campagne; ceux qui habitent dans les Villes, afin de partager en cela la félicité des gens de campagne , ont voulu avoir des Jardins qui fassent dans leur voisinage# C’est ainsi que César & Antoine eurent des Jardins proche du Tibre, comme Dion ls rapporte. Lib. 47. ìn rébus OB:Qvia.m . On n’en est pas demeuré là j bien-tct après on fit des Jardins dans Jgs faux- sur la Végétation. i8z bourgs , & insensiblement on en eut dans les villes mêmes. Pline dit qu’E- Picure fut le premier qui s’émancipa à faire un Jardin dans Athène , & qu’a- v ant lui personne n’avoit songé à transférer les Champs dans la Ville. Jarnqui- de m hortorum nomìne in ipja Urbe deli~ ci a s J agros villafque pojjident. Primus hoc inftituit Athenis Epìcurus otii magister , l fque ai eum , morts non suerat in oppidis habitarì rura. Hiftor. nat. Lib. XIX. cap. H. Platon enseignoit dans l’Academie, Aristote philosophoit dans le Lycée , Zenon disputoit dans le Portique ; mais Epicure , ce Philosophe douillet qui n’é- toit touché que des seuls plaisirs aisés & tranquilles, faisoit les leçons de fa Philosophie commode & familière, dans ce Jardin , qu’il laissa par son Testament, pour être F Ecole publique, où sos succeflèurs profefl'eroient fa Philosophie. C’est dans ce fameux Jardin qu’Epi- cure assembloit ses Disciple, & qui! leur enseignoit que le souverain bonheur de l’homme consiste dans la volupté. Ce Philosophe ne pouvoit pas choisir vne scène plus convenable à fa voluptueuse doéìrine. ' C’est sans doute de cette Philosophie commode &c oisive qu’o n nomme Philo- Curiosités sopke , un homme qui vivant unique ment pour lui, ne prend aucun emploi , & dédaigne de se mêler des affaires pH' bliques. Quoique par ce nom de Philo' fophe , on veuille répandre fur un hom' me un air de ridiculisé ; cependant faut' il reconnoître avec Cicéron, que ces pet' formages oisifs font pour l’ordinaîre bonnes gens, des hommes faciles, commodes , & dont il y a peu de chose 8 craindre. Ces fainéans , dit-il qui aiment la vie tranquille défoccupée J ceJont i e tous les hommes ^ ceux qui font les moins incommodes le moins à charge ,■ Gr dont on efl le moins en danger de souffrir : Sed & facilior & tutior, & minus aliis gravis, a ut molesta vita est Otioforum. Lib. /• Offic. cap. 21. Quoiqu’il en soit. Revenons à Pline qui observe que fa' mour qu’on a pour les Jardins, a porté leS- hommes à ne rien négliger, afin de les avoir le plus à portée qu’il est possible. Les Jardins dit-il ,Jont montés jusqu’auiï fenêtres de nos Bourgeois âe Rome. Rien n efl p lus ordinaire que devoir aux fini' tres de leurs maisons de petits Jardins qut font comme de légeres images où ils veulent envisager tous les jours les charmes delà Campagne. Jma in fenestris fuis plebs urbana in imagine hortorum quotidiana oculis rura prsbebant. ibid. SUR ïA VÉGÉTATION. iSp Casaubon porte encore plus loin cette prédilection que l’on a naturellement pour les Jardins. Ce qu il y a* dit-il J de gens plus polis dans le monde.font tellement épris des charmes que les Jafdins & les Forets offrent à nos yeux , qiton fait tout ce qu’on peut pour avoir des Jardins aux Mai- sons de la Ville ; &" quand il ny a pas moyen de s en f aire deplein-pied,on s’en f ait fur les toits -^.plutôt que de s’enpaffer entie- rement : Adeò enim bonis, nemoribufque capiebantur elegantiores, ut etiamin ur- bárcis ted-ïbus, fi alio- ldcó nequirent, irt tectis in íaltem haberent. Cafaub. ad Sue- ton. August. cap. 72 . Puiíque nous sommes sortis du Jardin Potager ; entrons maintenant dans le.Jar- ; din Fruitier , & vòyons tout ce que l’on i y doit, faire & ; dë'fous "côtés & dans chaque mois de l’année, afin dé le rendre agréable & utile. >'A R T I C L E I. ' ■ 'La, maniéré de planter les Arbres Fruitiers. Les Arbres fruitiers ne demandent pas moins de travail & de foins, que les plantes potagères. Virgile dans son second livre des Géorgiques, où il se prc- pôle de donner des préceptes pour éle- r86 C u r t o s j t ú.$ ver les arbres qui portent des fruits» n’hésite point à .dire qu’il faut une appb' cation & des travaux extrêmes, pour le§ déterminer à nous fournir ce. que nqe s en attendons. II faut» dit-il, uavailh’ 1- soigneusement à chaque arbre , ks at' ranger tous danss un exact allignement» & n’epargner rien. pour les forcer à nous produire de bons fruits ; il faut beaucoup (fart pour en obtenir quelque: cho“ se d’excellent. .. .jf. ^ Scilìcet omnibus tfi. labor- im^sntkndi^^ omnes * ' ri ■ ' Cogendce in fulcum ac multâ mexoçde.do' manda . - ■^C’eíl de cet-art-ípr lequel tant d’ex- cçllens hommes . ont écrit, donc nous allons ici donner les réglés qu’une. longue étude a fait découvrir , & auÇquelk 5 tant de constantes expériences ont acquis une certitude qui-est au-ddsus de toute contestation. I. Le Jardin' fruitier peut fórc bien être dans l’enceintedu Jardin potager» quand on a asièz d’étendue, pour 1 £S mêler & les confondre l’un aveç l’autre» C’est ainsi que le Potager du Roi à Versailles, est à la fois un Jardin ■Prtiitief- Sans cela les murailles du Jardin' pota- SUK LA VÉGÉTATION. J87 ger resteroient nues & inutiles, ee qui ne feroit pas un bel effet à la vûe. Outre cela, il est important de profiter des Murailles, afin d’y faire des Espaliers qui font d’un grand ornement & d’une milité merveilleuse dans un Potager. II. Si on distingue les arbres par leurs fruits, il n’y en a que de deux fortes. 1. Les uns font les Fruits à noyau , comme font les Cerises, les Prunesles Lèches, les Abricots. 2. Les autres font les Fruits à Pépin * tels que font les Pommes & les Poires. III. On donne à ces deux sortes d’Arbres des figures différentes lorsqu’on les plante. Ces figures fe réduisent à quatre. 1. On plante ce s arbres d haute tige &c en plein vent , & alors il faut les choisir bien droits & de la grosseur dc sept à huit pouces, afin d’avoir la satisfaction de leur voir porter des fruits plutôt. 2. On plante ces arbres en Espaliers contre les murailles, où l’on les étend a la maniéré d’un éventail. Si on a fait la dépense d’avoir des treillages , on y attache les branches ; dc c’est ce qu’on nomme, palisser les arbres. ;88 Cukiosí'tés z. On plante les arbres en haye d’ap' pui , c’est ce qu’on appelle planter en con' tre-Fspalier. Alors ce plant se sait sur I e bord du quarté qui est le long de Paisse voisine d’un Espalier. On palisse ces arbres, & on les attache à un treillage íai £ exprès avec des échalas. M. de la Quinrinie dit que l’usag e des contre-Espaliers est aujourd’hui extrêmement aboli, & qu’on trouve mieux son compte à mettre les arbres en buisson. En effet, on, ne voit plus de contre-Espaliers dans les Jardins bien ordonnés. 4. On plante les arbres en buisson : ce font des arbres qu’on tient bas, & qui font pour cela nommés Arbres nains. On en ouvre les branches, & on les étend fur les côtes, en forte que la tête de l’arbre fasse la figure d’une coupe. IV. Je suppose que les arbres dont on veut former son Jardin fruitier , sont bien conditionnés ; c’est-à-dire, qu’ils font déja forts, afin de jouir plutôt du fruit de son travail, de son application ♦ &£ de la dépense qu’il convient de faire en pareil occasion. On les choisira bien vigoureux ; ce qui fe connoît aisément en observant, 1. l’écorce qui doit être vive & nette ; & 2. les racines qui doivent être bonnes & bien pla-r S U R LA VÉGÉTATION. 189 cées, comme sont celles qui ne sont pas No p haut, & qui semblent propres à se glisser entre deux terres ; car enfin celles lui sont trop hautes, Sc au collet de l’arbre, sont inutiles, & s’altérent facilement dans les grandes chaleurs de l’Eté. Je suppose encore que ces arbres sont de bonnes espèces, & qu’on les a achetés chez des personnes de bonne foi, qui ont donné les sortes de fruits qu’on leur a demandées; car s’il falloit commencer une pépinière faite exprès, afin de n’être point trompé dans les espèces, c e seroit prendre un long circuit; il vaut mieux se jetter tout d’un coup dans une dépense un peu sorte , que d’attendre l’âge que doivent avoir les arbres , pour ktre replantés dans un Jardin fruitier. Le Nombre de nos années ssest pas assez grand pour en consumer une partie dans Nrse ennuyeuse attente. V. Quand la terre est préparée par les labours , òn plante les 'arbres ; ce qui le fait d’ordinaire dans l’Automne, lorsque les feuilles sont tombées ,&au commencement du mois de Mars. 1. On ne plante en Automne que dans les terres sèches & légeres ; au confire dans les terres grasses, humides, froides & pesantes, on ne doit jamais ipo Cpbiositéj planter qa’au mois de Mars, parcs que les racines durant tout i’Hyver péri' roient par la longue fraîcheur 8c humídi' té du terroir. 2 . Si ce font des arbres en buisson» on en coupe la tige environ à huit pou- .ces au-deíîus de la greffe. On coupe auss les arbres en espalier, & les arbres dç haute tige. en plein vent. On laisse 2 leur tête trois ou quatre branches ^ qu'on coupe environ à la hauteur d’un pied. Quand aux racines en plein vent, on en rafraîchit un peu les bouts, & on efl coupe la chevelure. A f égard des arbre 3 en buisson & des arbres en espalier, ofl coupe les racines à la moitié de leur Ion' gueur. VI. Pour ce qui est de l’arrangement > Virgile veut, & après lui tous nos habi' les Jardiniers recommandent qu’on plan' te les arbres dans un parfait alignement) 8c pour cela on fe sert d’un cordeau. B 1 omnes cogendx in fulcum. II n’y a poin t d’alignement à observer pour les Esp a ' liers; la muraille doit tenir lieu de cot' deau. Ce n’est pas assez de mettre les arbre* en ligne droite, il faut encore les place r dans une distance égale. Les arbres en plein vent doivent être mis à deux toises & demie de dis" SUR RA VÉGÉTATION. ipi ^tice I’un de l’autre. Si .l’on plante un buisson entre deux, la distance doit être trois toises. Les arbres en buisson doivent être Plantés à deux toises l’un de l’autre, Sc met entre deux un Pommier greffé lu r paradis. Comme il Faut labourer dessus les arbres en buisson, ou doit faire sorte que leur tige ait sept ou huit Pouces depuis la greffe , afin d’avoir de ' espace pour travailler à ce labour. Les arbres en espalier se plantent ordinairement à deux toises de distance "un de l’autre ; & on met entre deux des ar bres à demi tige. II y a des gens qui Prétendent que les arbres qui portent des fruits a noyau, doivent être un peu plus ^ipacés que les arbres qui produisent des fruits .à pépin. VIL Dans l’endroit où l’on veut planer un arbre, ìl y faut Lire un trou de Jois pieds en quarté, & de trois pieds ^profondeur. Quand on y a mis l’arbrej on*en doit tendre les racines, ôc ■ lesr couvrir de ter re très- exactement. U -ne fout pas frême dédaigner d ? y mettte la main, afin ct'u’il ne reste aucun vuide entre les raci- ? e s Sc la terre ; ce qui feroit un grand pré- fodice à l’arbre. Si àst un espalier, il fout coucher r§2 Curiosités l’arbre du côté de la muraille, & tourner les plus longues, & meilleures racines du côté de l’allée pour qu’eH eS trouvent plus de nourriture. On doit aussi faire en forte que la coupe de 1 arbre qui doit toujours être & pied de biche, regarde exactement ^ mur. L’arbre ne doit pas être mis bien avan c en terre; & il suffit qu’il y íoit de ^ profondeur d’un pied , afin de mieu^ profiter de la rosée, de la pluie & d^ arrosemens. II est important que la greffe soit toujours au-dessus de la terre a environ troi s pouces. VIII. Après cela on répand du fumier fut toute la surface du trou, de^ hauteur d’environ quatre pouces. Ce fumier empêche que le'.fuc nourricier de ^ terre ne sbit dévoré par- sextrême chaleur de l’Eté ; outre que les sels de cí fumier venant à se dissoudre, quand 1 £Í "pluies surviennent, forment une hume^ excellente qui est très-propre à avancé merveiileufemènt la végétation de cei arbres nouvellement plantés. Si son n ^ . *voit pas de fumier suffisamment, il f^ droit à son défaut mettre de la soug^ 5 au pied des arbres. On ne laboure point les arbres premier tous' raci- ’çlles co& e ë® at t- ■vaflt le tr lieu^ -, de S totj' croi S i fuie la ; fuie !a :ha- Q $ n* ne^ ncd c* n’*' faU' rift IS 1» re sur la Végétation. ip_j premiere année qu’ils ont été plantés. S’il arrive que le Printems soit extrêmement sec, il est nécessaire d’arrofer de tems à autre ces nouveaux plants par dessus le fumier. Article II. Comment on transplante un arbre . Quand on a un bon arbre, que l’on v °udroit ôter du lieu oà il est, afin de le lettre ailleurs, on y réussit certainement, pratiquant la méthode suivante, dont le public est redevable au Religieux des R R. P P- Chartreux de Pa- ïiS , si célébré par fa longue expérience ^ fait de Jardinage , auíu-bien que par Livre intitulé : le Jardinier foliaire. Voici comment il s’y prend. ï. II a foin de préparer le trou , où il j ei »t transplanter son arbre. Ce trou est *j e six pieds en quarré, & de trois pieds e profondeur. Si à le place du trou, il , j, a Voit auparavant un Poirier, & que j3 r bre qu’il est question de transplanter » .° 11 aussi un Poirier, il en change la ^ rre j & il y en fait apporter de neuve. ^ qu’il ne fait pas, lorsque l’arbre est espèce différente : parce qu’il sup- Rt V Ip4 Cusiositís pose que la terre est neuve à l’égard du nouvel arbre qu’il a dessein d’y mettre. 2. II apporte un tel soin pour arracher l’arbre, qu’il fait en sorte que les racines n’en soient endommagées en aucuns façon. z. 11 le transporte dans le trou, rempli à moitié de terre convenable. II le place de maniéré que la greffe soit de trois pouces au-dessus de la superficie de la terre. Après quoi il étend toutes les racines dans la circonférence dutrou, en forte que l’arbre se retrouve placé tout comme il étoit auparavant. Ensuite il met avec la main dessous & dessus chaque racine de la terre , en la pressant doucement. Enfin il se sert de la bêche, pour achever de remplir le trou. Cela sait, il faut mettredu fumier dessus la terre de la largeur du quarré, envi - ron un demi pied d’épais ; & finit cette transplantation en jettant trois ou qua - tre seaux d’eau dessus le fumier; suppo - sé que le tems ne soit pas disposé à la ge - lée ; auquel cas il faut bien se garder d’st' roser, mais il faut différer l’arrosemeflj jusqu’à ce que le tems soit favorable. I réitéré cet arrose m en t au Printems, d’exciter -la fève à monter & à vivifié l’arbre transplanté. Si la terre du trou est iégere, il y rue» un peu de fumier. surlaVégétation. rk>5 4. XI sait cette transplantation pensant les mois de Novembre , Décembre* Janvier & Février; & prend pour cela ^ne belle journée: car enfin la pluyeíe- r oit qu’on ne pourroit pas si bien manier k terre. y. II taille cet afbre tout comme s’il fc’avoit pas été transplanté, & de la me- ^e maniéré qu’il l’auroit taillé , s*il n’a- Voit pas changé de place. Observant Pourtant de le tailler un peu court, par- Ce qu’étant nouvellement transplanté, il a peu de íéve la premiere année. C’est ce l'ai oblige de ménager les forces de cet ar bre, & de ne lui pas laisser beaucoup fruits, jusqu à la 1ecor.de année, qu’il Abandonne à son naturel. Sans cette Précaution , il pourroit arriver que l'ar- bte périroit. 6. Tout cela se pratique également Pour les arbres à haute tige , pour les ar bresen buisson, & pour ceux qui íont espalier. L’avantage de cette nouvel- e utéthode, est qu’on n’est point obligé Q e lever les arbres en motte; ce qui est 'tn véritable embarras. 6. L’arbre fleurit & fructifie dès la Premiere année ; mais comme j’ai déja j 1 , il lui faut laisser peu de fruits, & e . succès en est tel, que ce bon Religieux m’a témoigné que de cent ar- I ij i§6 Curiosités bres, il en garantiroit quatre-vingt dix- neuf. J’ajouterai ici, à ce qu’il m’a fait Thonneur de me dire, mon propre témoignage. Je me trouvai au mois de Février 1707. aux Chartreux , dans letems que ce vénérable Frere tranfplantoit selon fa nouvelle méthode , un Poirier fort gros & assez vieux. II suivit de point en point tout ce que je viens de dire. J’avois peine à croire qu’un arbre si fort, & transplanté sans motte, pût bien reprend/e. Cela me donna la curiosité de m’informer de ce qu’il en arriveroit. Je fus fort surpris de voir au mois d’Avril ce Poirier fleuri & faire son devoir, auffi-bien qu’aucun autre arbre du Jardin. Les fleurs se changèrent ensuite en fruits ; mais ion sage Gouverneur lui en ôta la plus grande partie, & les Poires qu’il y laissa vinrent parfaitement bien à maturité. Je puis attester que je viens de faire le is cs Avril 1708 , une nouvelle visite à ce Poirier transplanté ; j’ai trouvé qu’il se porte à merveilles ; & qu’il est orné d’u- ne prodigieuse quantité de fleurs q uI promettent une heureuse & abondante récolte. Je finis cet article en disant d’aprè* son Livre du Jardinier Joiitaire , qu’o n SU* tA VÉGÉTATION. îpj transplante ainsi avec le même succès, les Ormes & même les Ceps de Raisin , de Verjus de dix ou douze ans; & que toute la différence qu’il y a remarquée, c’est que ces Ceps ne donnent point de fruits la premiere année. J’avouë que je fuis enchanté de cette nouvelle méthode, par le moyen de laquelle on peut faire en une année un jardin aussi avancé & aussi parfait que s’il étoit planté depuis douze ans. L’Auteur de cette heureuse découverte, mérite d’être célébré par de vifs éloges ; mais ce pieux Solitaire en me permettant de publier pour l’avantage du public , fa méthode de transplanter les arbres , m’a sévèrement défendu de rien dire de lui. J’honore trop singulièrement fa vertu, & nommément fa délicate modestie , pour me hazarder à la blesser en Huoi que ce soit. Article III. De la taille des Arbres fruitiers. î Nous voici à ce qu’il y a de plus ím- | P° r tant, & tout à la fois de plus embar- r , a fiant dans la culture des arbres fruits* C’est de la taille de ces arbres que ^Pend l’ornement Sc futilité du Jardin. I iij %p8 CURïÒSITás Le Curé d’Hénonville, dans son fàvafis traité de la maniéré de cultiver les arbrei fruitiers * dit, quil n’y a presque point dt préceptes à donner fur cette matière ^ & qu £ pour bien pratiquer la taille des arbres ^ faut agir plus de l’esprit que de la main- Elle eji j ajoûte-t’il, très difficile à expli' quer , parce quelle ne confijîe point en m#' ximes certaines & générales^mais elle chat 1 ' ge selon les circonflances particulières i l chaque arbre. Ainjì elle dépend absolûmes de la prudence du Jardinier qui doit juges lui-même quellts branches il faut laijjef > qui font celles qu’il convient de couper ; c’ef pourquoi il eji plus aisé de Vapprendre ptf Cexpérience que par le discours . Cela paroît bien dans le Livre de M* de la Quintinie,qui employé près de deu* cens pages in-quarto , de petit caractère pour expliquer seulement la taille des as' bres : & quelque effort qu’il ait fait po^f rendre ce point bien intelligible, on trouve encore après une si longu. l £C ' ture, la tête remplie d’idées astez coi 1 ' fuses. C’est pourtant fur ce vaste Océ^ qu’il s’agit maintenant de s’embarquer- On taille les arbres pour deux pri p/ cipales raisons. La. premiere, afin qu’ils fructifié mieux. ■ La seconde, pour leur donner avant •irbrei \nt de Sr qu? es j il mairt' ixpU' n mO? chair res d& umeflt juges re ptf le M- ; deu* ictesfii les as' : po on >. les' cos 1 ' Dcé** mer- p ri! 1 ' We"° ;r 00 sur la Végétatio u. ipp telle figure, & qui saíse plaisir aux yeux. Pour réussir heureusement dans cette opération, il saut observer , ï°. le tems, & 2 °. la maniéré de faire cette taille. L Le tems de tailler les Arbres fruitiers. Tous les Jardiniers conviennent que le véritable tems de la taille est dans la fin de Février, & au commencement de M.irs, fans craindre que la gelée qui lurvient ordinairement dans ce tems- là, puisse nuire à l’arbre nouvellement taillé. M. de la Quintinie qui se récrie fort contre ceux qui ont égard à la disposition de la Lune, dit qu’on peut commencer à tailler d’abord que les feuilles tles arbres font tombées ; c’est-à-dire, v ers la S. Martin, & qu’on peut ensuite continuer tout l’Hyver. Cependant il apporte après cela quelque dif- tln ction qu’il ne saut pas mépriser. II dit 51U il y a de trois fortes d’arbres avec e fquels il faut se comporter différemment. t- Les uns font trop foibles, & dans ^ et état de langueur, on ne peut ôter j\ e trop bonne heure les branches nuisi- es ou inutiles. A ces arbres con- I iiij 200 Cu'RîÔSÌTÉÍ vient fort bien la taille de Novembre* Décembre & Janvier, & elle est même meilleure que celle de Février & de Mars. On les doit tailler fort court. 2 . Les arbres trop forts, trop robustes , trop vigoureux, se taillent plus tard, & l’on en peut sans péril, & me- me fort utilement, remettre la taille juf- qu’au mois d’Avril. Pour arrêter cette vigueur excessive, il faut y remédier en recourant à la cause , c’est-à-dire, en leur retranchant quel- ques-unes de leurs bonnes racines. P af cette circoncision on diminue l’abon< dance immodérée de la fève. z. Les arbres d’une louable conflits tion doivent être taillés dans le tems ordinaire, qui est depuis la fin de Févri ef jusqu’à Mars. II. La maniéré de tailler les Arbres fruitiers. Tout l’art de la taille des arbres, 'ros le fur la connoissance qu’un Jardins doit avoir des bonnes & des mauvais 5 branches. II faut conserver les premieres ^ l’on se contente de racourcir, & abj° lument retrancher les autres, à mo^ qu’elles ne soient nécessaires pour reJst- SUR LA V é*G ÉTATION. 201 pìir quelque vuide qui défigureroit la tête de l’arbre. Pommiers et Poiriers-. 1. Toute branche qui sort du tronc ou de quelque branche, Sc qui n’avoit point été taillée Tannée précédente, doit être réprouvée. C’est ce que Ton nomme de faux bois. 2 . Toute branche nouvelle qui devient plus grosse ou plus longue que celle qui est immédiatement au-dessus, est encore de faux bois, auquel il ne faut faire aucune grâce. z. Toute branche où les yeux font plats, mal nourris, à peine formés 8c fort éloignés les uns des autres, est une mauvaise brapche sur quoi il saut exercer une justice sévere & implacable, à moins qu’elíe ne soit nécessaire pour la beauté de Tarbre. On appelle Oeil , en stilede Jardinage „ une maniéré de petit nœud pointu, dans lequel font renfermées durant l’Hy- \er les feuilles & le jet qui doivent sortir au Printems. Une bonne branche doit avoir des gros yeux bien nourris & fort près les ^ns des autres. I v 202 Curiosités 4. Nous rangeons avec les mauvaises branches , ces longs jets gros comme !e doigt, droits comme des cierges, & qui prennent leur naissance fur les grosses branches qu’on voit sortir immédiatement du haut de la tige. L’écorce de ces jets est très-unie & très-nette , & leurs yeux íont plats Sc éloignés les uns des autres. On appelle ces jets si gaillards , branches gourmandes , parce qu’el- les attirent à elles une trop grande portion de la fève. II faut délivrer l’arbrc d’une branche si inutile , & qui vole l a nourriture des autres. Si on avoir besoin de cette branche pour remplir un vuide> on fe contenteroit de lui faire une taifi e de dix à douze pouces. j. II ne faut pas ménager davantag e certaines petites branches déliées qui íon f en confusion, & que pour cela on nomme branches chifonnes parce qu’elles V e peuvent donner ni bois ni fruit. Un Jardinier qui fait un peu son métk s > les retranche toute fans miséricorde. 6. 11 y a des branches à bois , ee so I,£ celles qui forment la figure & la rondes de la tête de l’arbre, & qu’on taille aV íC beaucoup d’attention, selon la vig u , el1 / du sujet, qui les porte depuis quatre j**' qu’à douze pouces de long. sur t"À Végétation, aoy 7 . Les branches à Fruit qui font le cher objet de nos foins, font plus me- , nues que les branches à bois. On racour- cit celles qui font trop longues & qui font trop foibles pour porter tous leurs fruits. On laisse entieres celles qui font d’une juste longueur, & on fe contente de couper seulement l’extrémité de la branche, afin que les boutons à fruits profitent davantage. 8 . On force quand on veut, les branches à bois de faire des branches à fruit. Cela fe fait ainsi : on retranche en talus , ou à l’épaijfeur d’un écu v cette branche à bois; il arrive presque toujours que la fé- Ve étant déroutée, elle donne uneou deux branches à fruit. Couper une branche en talus ^ c’est la ^ême chose qu’en pied de biche ; & de Maniéré que la coupe fasse un long ovale, 3u bout de la branche coupée. Couper une branche à l’épaijfeur i’uiv e ' c « ^ c’est n’y laisser de bois qu’autant ^u'un écu est épais. Cette opération, cotnrne la précédente, fe pratique fur les sosies branches qui entrent en dedans d’un arbre, & qu’on retranche, afin d’empêcher qu’elles n’y fassent de la ’jonfusion. Ces deux fortes de tailles ont heureusement inventées par feu M» 5e la Quin tinte* II a fallu autant d’cx- I H 204 Curiosités périences qu’en avoir ce grand homme! pour découvrir Futilité de cette maniéré de traiter les arbres , qu’on force par-là immanquablement à fructifier & à prendre telle figure que l’on veut. Rien n’a jamais été mieux imaginé. §. A legard des arbres foibles, st faut retrancher toutes les branches qui ne donnent aucune démonstration de boutons à fruit, parce que ces sortes d’ar- bres ne donnent du fruit que fur les grosses branches. Les branches à fruit se connoissenî par les boutons qui font aisés à distinguer , parce qu’ils font doubles. Les branches à bois n’ont point de boutons : elles ont seulement de ce$ yeux ou petits nœuds pointus, dont j’a* parlé. io. Les arbres vigoureux doivent ordinairement être taillés fort court, c'est- à-dire , à deux ou trois yeux près de ; l’endroit d’où la branche est sortie , les laissant cependant bien chargés de ; branches, tant à fruit qu’à bois, & surtout de celles qui-composent la figure de l’arbre, & qu’on’doit toujours hï$ eí longues d’un pied & demi. Pour ce qui est des arbres foibles, ? faut leur laisler peu de branches, fo lC qu’elles soient à bois ou à fruit. sur la Végétation. 205 taille celles qui restent, de la longueur de cinq à six pouces feulement. Tailler long , consiste à donner une taille de dix ou douze pouces fur une branches à bois venue de la taille à e l’année précédente. Tailler court, c’est tailler à deux ou trois yeux fur une branche à bois, qui forme la figure régulière d’un arbre. 11. M. de la Quintinie dit: tout le succès de la taille dépend de savoir ôter entierement les branches inutiles , soit parce qu’elles font usées, soit parce qu’elles n’ont aucune bonne qualité : & à l’é- gard de celles que l’on conserve, il im- Porte extrêmement de leur régler une longueur proportionnée à leur force, & a la force de tout l’arbre ; de maniéré tpe chacune puisse ensuite aisément produire à son extrémité, autant de bonnes branches, qu'on en a besoin , soit pour ls fruit, soit pour achever de composer a ux arbres la beauté qu’il y faut ensuite entretenir. Voilà ce qu’on appelle la taille ordinaire de arbres. 12. Je dis , ajoûte M. de la Quinti- *Ue, en parlant de la taille des branches, stu'il f aut tenir courtes celles qui font fortes, cela veut dire celles qui font grosses : & qu’il faut tenir longues celles qui font foibles ; cela veut dire celles Spù font menues. 2 o S Curiosités 13. Pour faire porter du fruit à ut» jeune arbre vigoureux, & qui ne pousse qu’en bois, il le faut tailler long , dit le Jardinier solitaire, c’est-à-dire, à dix oU douze pouces : & cette taille fe doit faire au mois de Mars. II faut laisser fus cet arbre les branches de faux bois, & celles qui font inutiles, afin de les re- trancher Tannée suivante. Ces branches de faux bois absorberont la fève, & disposeront Tarbre à n’avoir qu’une févs modérée qui lui donnera des branches à fruit. 14. Pour bien railler les arbres, dh le Curé d’Hénonville, il faut tous les ans rafraîchir toutes leurs branches plus ou moins, selon leur force, & recouper le bois du mois d’Août, qui est le jet de la derniere fève ; st ce n’est qu’il soit nécessaire de le conserver, saute d’uî» meilleur, ou qu’il fe trouve fort & bief» nourri. II est encore nécessaire d’accourcir les branches foibles & menues , & celleS mêmes qui font diípofées à porter dt» fruit Tannée suivante, afin qu’elles fe fortifient,. & que leurs boutons foien* mieux nourris. Le Jardinier doit prendre garde de ne pas trop dégarni les arbre en les taillant, d’autant qu’il est aussi danger à un IOU ífë dir ls ix ou doit :r sus s, A s re- jcheí c dis" séve bes à , d-'c s les plus COU' ;st le qu’il d’un bien r les elles r do s se dent » de les >g^ ‘sur la Végétation. 207 *eux de leur ôter trop de bois, comme âe les laisser trop confus. Les Arbres en buisson se doivent tail- 1 er comme ceux en espalier: pour les uns les autres, on doit se conduire de la ^ême maniéré. ^Es Pêchers, les Abricotiers , les Pruniers. Les Arbres à noyau, comme font les Pêchers, les Abricotiers, & les Pruniers ^mandent aussi le secours de la raille. II faut tailler les branches à quatre ou J c inq yeux ; & surtout il faut se régler ~ e }on la vigueur de l’Arbre. On y doit faisser toutes les branches à fruit : mais ^ n'y faut laisser de fruit, quand il est fioiié, qu’autant que les branches en peu- Ve nt nourrir. On taille les Pruniers dès le mois de j évrier: mais on taille les Pêchers Sc ‘ es Abricotiers environ le iy de Mars. On taille une seconde fois les Pêchers îkt espalier. Cette opération se fait depuis L mi-Mai, jusqu'à la mi-Juin. , On ne retaille alors que les branches a fruit; supposé que cela soit nécessaire: êc alors on décharge ces branches de ce fju il y p eut a y 0 ir de trop de fruit. En Mai ôcen Juin , on pince les Pê- 208 Curiosités chers, les Abricotiers, les Pruniers, 1^ I p ( Figuiers. Ce pincement est une esp^f de taille qui fie fait avec les ongles r s e trois ou quatre yeux. Cette opéra» 0 , 3 né arrête les branches qui veulent devers qi gourmandes. le: En Mai & en Juin, on ébourgeofl^ cl les Pêchers & les Abricotiers ; & °1 ni fait la même choie en Avril & en M 3 ' m aux Poiriers. n< Cet ^bourgeonnement se fait, coi 11 ' f r me la taille , avec la serpette , pat ^ ri moyen de laquelle on ôte toutes les bra p ' r ches inutiles , & qui font de la confusion d autrement elles voleroient la fève, <î ul est destinée pour les branches à bois $ à fruit. En un mot, voici tout le précis dê^f qu’il faut faire pour la taille des fruits 3 q noyau. On ne sauroit donne des id^ ti trop claires, fur une matière si inférs § santé. li I. La premiere taille qu’on fait Pêchers vigoureux fur la fin de l’Hivfi^ f doit être retardée jufqu’à ce qu’on S voye prêts à fleurir. Alors on confl^ 1 , * mieux les boutons, qui doivent certa 3 ' j é nement donner des fleurs: & par coi 1 ' I c féquent on est plus en état de savoir cí ! c que l’on doit ménager, ôter, & coi 1 ,' ! t server dans les branches à tailler, f 0,t ! ( •s, w les > ratio" -vei^ & oI ! n 0 co» 1 ' aar ! { bra^ ifiofl: SUR LA VÉGÉTATION. 20 $ pour le bois, soit pour le fruit. I L Outre cette premiere taille, qui fe sait à la fin de l’Hiver, íl est souvent nécessaire d’en faire une seconde , & Quelquefois une troisième, surtout pour les fruits à noyau , comme font les Pêchers & les Abricotiers. Ces deux dernieres tailles se font vers le milieu du tnois de Mai, lorsque les fruits font ou noués, ou coulés. Par-ià on conserve aux fruits naissans une plus abondante nourriture, ou bien on délivre l’Arbre de nouvelles branches inutiles 6c incommodes qui le défigurent. La Vigne. dd'cf lits " idée- :árefc it aiss ivefí n Jf , n0 errai" con" )irc c J cor í 0 I IIest certain que de tous les Arbres, Que les préceptes du Jardinage assujet- rissent à l’opération de la taille , la Vigne i’éxige d’une nécessité plus indispensable. i. Pour ce qui est du tems, qu’il la faut tailler, il n’y- a autre chose à dire, Que ce qui a été dit pour le tems de la taille des Arbres fruitiers. En esse t on doit obsc rver à la culture 6c à la taille de la Vigne toutes les mêmes régies Que nous avons marquées pour la culture 8c pour l a taille des Arbres du Jardin fruitier. 210 C v s rosi tés Ainsi la taille des Ceps de Vigne ^ fait régulièrement au mois de Mars. 2 . Quant à la maniéré, il faut tail^ íur les plus grosses branches les mie 11 * placées , à quatre bons yeux, à le corn?' ter depuis l’endroit où la branche a p fl> naiflance. . On leur laisse plus de longueur quafl^ on veut faire monter promptement Vigne, ou lorfqu’il s'agit de garnir qu^' que lieu éloigné. II faut avoir foin de couper à U* grand pouce loin de l’œil, qui doit l s trouver le dernier dans la branche tai^ lée. La branche, qui est plus basse la grosse qu’on vient de tailler, doit êt se coupée, à deux yeux. De cette branche, qui est donc ^ dessous de la grosse, on en fait, en ^ coupant à deux yeux, un Courjon ; c'efc à-dire, une branche qui en donnera deU* bonnes, qu’on taillera l'année suivante' afin de retrancher entierement dans fuite la grosse branche qui avoit taillée à quatre yeux. On ébourgeonne la Vigne, & on ^ lie en Mai, Juin, & Juillet, afin que \ e raisin profite 8c meurisse parfaitement gnei‘ taillé mie^ coríif' : a pli' quafl^ t un« ■ que^ à u* íoir & : rail' : qitf têtes n c ^ en 1 J c’eû' deu* mtf' ns lf t ét on & ue le nerf’ ÍUR LA VÉGÉTATION. ZlXj Les Figuiers. Il y a moins de façon à la taille des Figuiers. Comme ce fruit ne vient que fur les grofíes branches , ce sont celles qu’il faut tailler en les pinçant, ou en coupant les jets trop longs. Cette opération fe fait pour les forcer à produire des branches à fruits, & afin de faire grossir les Figues. II faut observer que les Figuiers en caifle réussissent mieux, parce qu’on les transporte en Hiver dans la ferre, où tl^sont à l’abri de la gelée qui les tuë. Quand ils font devenus trop gros ^ on Jes met en pleine terre; & on tâche de ■ es y garentir des rigueurs de l’Hiver. On les multiplie par la voie des mar-j c otes. OBSERVATIONS. ï. Le Jardinier doit prendre garde ^ans la taille à ne pas trop dégarnir le P’ed ni le corps des Arbres. C’est pourvoi il doit toujours les tailler plutôt trop | 0n g, & racourcir beaucoup les hautes branches, & celles qui font au haut de * a muraille,parce qu’elles attirent à elles soute la fève, & font dégarnir le bas de J Arbre. 212 Curiosités 2. On ne taille point les Arbres à pif' 11 vent. On les abandonne à leur gen> e ’ quand on a eu foin de leur former bonne 8 c belle tête dans les trois ou q ja tre premieres années. En effet il n’est P jS aisé, & il est même dangereux de se p° r ter sur les branches élevées de ces sor t£ d’Arbres. Les réglés les plus séveres d Jardinage ne demandent pas qu’on exp° fa fa vie pour des opérations assez i^' tiîes. , { -5. A l’égard des jeunes arbres, ^ qu’ils aient pouffé une feule branche ^ deux , ou davantage ; bien , ou mal p^' cées, il faut que le bon sens fasse reco 1 ]' noître au Jardinier, s’il faut couper cel* e qui est feule, pour qu’il en revienne p^s íieurs. C’est à lui à juger celles qu’il dp* 1 ôter, celles qu’il faut laisser. Certains ment il augurera bien par lui-même, s ! a un peu de génie, le parti qu’il doit cho 1 ' sir; pourvu que fur tout il fe souviens dans cette occasion que son principal jet est de faire en forte que l’Arbre pui*' avoir une belle tête, & devenir d'u^ agréable figure. 4. Après tout il faut être sincere,, ^ avouer de bonne foi, que quelques & f ies qu’on puisse donner pour la tad* es Arbres, un Curieux ne devient P a5 par là assez habile, pour ne point faire r l ^ute jesta l e J a sue j Rue - k p r ton c Préc sc ■onn etre v ent l Ure l oui h ^el c es i Par] Qej ; Pstn rie r l pi»' îC o«>' ce 1^ ; plu; í dpi s ain^ . ; choi ienP e U Ob' -uiil- d’u^ :s will« t 0 ìreà ( sur la Végétation. 2.13 i * a ute dans cette pratique, qui est fans consolation , la plus difficicile qu’ffy ait dans e Jardinage. Donc à tous les principes 1 Ue j’ai donnés, il est important qu'il joi- jfre pendant deux ou trois ans l’uíage & a pratique ; & qu’il examine dans une fe- c °nde année ce qui est arrivé de la taille P r écédente; & que fur cet examen il rai- ^flne pour corriger les défauts où il peut Ctre tombé. Car enfin on fe trompe fou- 1 ^t, & d’autant plus souvent, que la Na- Ur e, qui a ses caprices, ne répond pas ° u jours à ce que l’on en attend. Elle fait ^elquefois tout le contraire ; & c’est fur ^irrégularités, qu’on ne découvre que ^ la pratique, qu’il faut apprendre à fe ^gler à l’avenir. C'est pour,cela qu’en fait ^Jardinage, on ne peut donner que des i jj'ncipes généraux, & qu’il n’y a point ; e réglés pour les cas singuliers. C’est *ns f étude & dans l’obfervation con- j,^tielle de la Nature, qu’on découvre 1 j° n génie, qui ne souffre pas volontiers ^Contrainte où nous voulons l’affujettir; | ^ °us voudrions qu’elle nous donnât une °pne branche, pour remplir un vuide, r 1 défigure un Arbre ; elle s’échape, Tendis que nous l’attendoqs d’un côté, . e fe déclare par un autre, où nous au- >s intérêt qu’elle ne montrât aucun de vie. III. Palijser les Arbres. Ce n’est pas le tout que de bien tail- ler les Arbres, il faut encore lavoir le* Palisser d’une belle maniéré. 1. La plus simple 8c même la plus naturelle façon de palisser, c’est d’attacheí les branches contre la muraille, avec le clou & avec des petits morceaux de cuir» ou des lisières de drap, supposé que le clou puisse tenir dans la muraille. Par ce moyen, les Arbres font bien étendus» font couchés proprement, 8c forment su* la muraille une espèce de tapisserie deves- dure sort agréable. 2 . Quelques-uns qui prennent le chemin le plus court, & qui oblige à moins de dépense, sont seller dans les muraille 5 des os de pied de mouton: Mais franchement ces os , qui ne se trouven 1 jamais bien couverts de feuilles , fon f un assez désagréable spectacle dans uk> Jardin. z. II feroit à souhaiter que ceux q^ ont des Jardins, fussent tous en otat de donner dans les treillages fait d’échala 5 de bois de chêne ; & qu’on attache à 1® muraille par des crochets de fer ; qu'oN Ì r selle à trois pieds de distance l’un d e 'autre. On leur donne deux pouces de SUR LA VÉGÉTATION. 21^ ^ìllie pour poser les échalas, qu’on lie ' ^suite avec du fil de fer. Après cela on es peint en huile, afin qu’ils durent da- ail- v *ntage. • les . La distance des échalas doit être d’en- ^fon huit pouces pour la largeur, fur na- t ' e nf de hauteur. hef Ce treillage coûte beaucoup ; mais il c le parfaitement beau , & dure long- air, te *s. e le . La principale attention , en dressant r ce , es branches des Arbres, c’est de les éten- us> en forme d éventail. & qu’il n’y ait fus Loint de place dégarnie. C’est pour cela itt", Rentre deux Arbres de tige , on en ^Etun à demi tige; pour que toute la he- tí ' Ur ailIe soit ornée de verdure. )inS Voilà ce que j’ai crû devoir dire sur 11 eS Cett e partie du Jardinage, qui est in- aN- j^testablement la plus difficile à traiter, ent e /pere qu’avec ces réglés, un Jardinier bn f jj u * a un peu de tête, peut fort bien se ust Garder à prendre la scie, & la serpette, j'Qur tailler les Arbres íruitierrs. C’est à qu» a appliquer aux cas particuliers les ■ ie |\ rin cipes généraux de la taille, que je staS de donner. II est impossible de les à la ,? c ùre tous. Je ne me flate pas d’avoir ’oP ^ tout ce qu’on doit pratiquer dans ,de °utes les circonstances différentes qui \òfi- 0t U point de bornes. Et coramen* pour* 216 Curiosités rois-je le faire, si M. de la Quintiníe» après trente années d’expérience , & d’application continuelle à la culture des Jardins, se trouve obligé de dire ingénu' ment : Je ne compte pas de n’avoir rien oublié: Je n’ai garde d’avoir cette pré- somption, sachant qu’il en est de la taille des Arbres , comme de la Médecine» & de la matière des procès. Hypocrate & Catien avec tant d’Aphoriímes pour fuite : le Code & le Digeste avec tant de Réglemens & d’Ordonnances pour fau- tre n’ont pu pourvoir à tout, ni pat conséquent tout décider, puisqu’il survient tous le jours des faits nouveaux- La Quiminie, Liv. IV. Ch. §. pag. z-j. Article IV. La maniéré de greffer les Arbres fruitiers' J’ai dit dans le Chap. IV. pag roZ* de 1a premiere Partie, que dans le Jardinage on n’a rien inventé de plus ingénieux que f usage de la greffe, ni rien qui foie plus agréable & plus utile* Car on a trouvé par-là le moyen de faire changer de nature un Arbre sauvageon» & de multiplier prodigieusement leî bons fruits. Sans f Arc de la greffe, nou s serions pauvres pn matière de fruits, & nouS tinte » r, » fe dss yénii' r rie° : pré- i tail' cine» ate& ir Tant de Tau- i pa s 1 sureaux* 31* ìtkï s ‘ 103* Jas- ngé- rien utile* faire eon» : leí nous ì.» nouî sur la Végétation. 217 sious serions obligés de nous contenter de ceux que notre climat & la simple nature nous donnent, bons ou mauvais. C’est donc à la feule adresse de greffer st u e nous devons tant de sortes d’excel- * e ns fruits qui ont été certainement inconnus à nos Ancêtres. Tout le secret de cet art admirable c onsiste à planter une partie de quelque ^bre que Ton estime, sur quelque endroit d un autre arbre dont Tespéce déplaît, f-’est changer la tête d’un arbre , c est le Métamorphoser en une autre espèce ; c’est dl faire adopter une filiation de fruits qui font point de fa famille, & qu’d est 0r cé de faire subsister à ses dépens, & de Nourrir de fa propre substance. Si cette °pération se fait sur des branches, c’est Un ìr à un corps des bras étrangers & Postiches, par le secours defquels Tart j?°us présente une richesse de délicieux ru sts dont nous ne sommes pas préciíé- d^tit redevables à Tinstitution de la natu- re * Je parle ici un langage poétique; aufli ? e fais-je que traduire ce qu Ovide, si a bil e à peindre, dans ses vers, les Phé- o^nànes de la nature , a dit fur Tart de poster. L/i. 1 . de Remed, A?nor. "enerit. infitio. Fac ramum ramus adop- \ Ut ' ^etque peregrinìs arbor opéra, comis. if. Partie. K 21 8 CURIOSITÉS Greffer, c’est donc couper la tête ou les bras à un arbre, afin de lui donner une nouvelle tête ou de nouveau* bras. 11 me semble qu’on pourroit réduite sous trois classes toutes les maniérés de greffer; ceux qui en admettent davantage» multiplient les êtres fans nécessité; cas enfin une circonstance de plus, ou de moins , n’est point un fondement suffi' sant pour établir une espèce nouvel^ dans les greffes. Ç à la pousse. 1. La greffe en ëcujfon J à œil dor- t £ mant. 2. La greffe en fente ou en poupée. z. La greffe en couronne. 1. Le tems de greffer. 1. La greffe en Ecuffon à la pouff ^ fait au mois de Juin. Celle à œil dormant se pratique en J ul let, Août & Septembre. 2 . La greffe en fente ou en pée, se fait en Février & Mars, auf> 1 bien que la Greffe à emporte-p ieCÍ \ & en Avril pour toutes sortes de P oííl miers. Z- La greffe en couronne se ^ SUR L A VÉGÉTATION. 219 vers le commencement du mois de Mai. La greffe en flûte est presque la même chose que la greffe en écusson. S’il y a quelque différence , c’est que la greffe en flûte est plus vétilleuse & moins certaine. La greffe â emporte-piéce est à peu-près Ja même manœuvre que la greffe en fente vu en poupée. Le Jardinier solitaire a négligé la greffe enflûte J & la greffe à emporte-piéce^ ‘ans doute, parce qu’il les estime inutiles, êc que les greffes en écusson, en fente & vn couronne suffisent pour faire un beau Cardin fruitier, qui est ici notre point de .Vue. ÍJ. Les différentes maniérés de greffer. I. La greffe en écusson J soit à la pouf- * e » soit à œil dormant, se sait toujours la même maniéré. r. II saut commencer par prendre fj Ur le Poirier, Pommier ou Prunier, *~°nt on veut greffer, des premiers jets l’année, dont les yeux soient bien i°rmés & bien nourris. Ces jets se peu- Ver tt conserver trois ou quatre jours, Pourvû que le gros bout soit dans de * 8 au. M. de la Quintinie dit qu’un œil 120 CUKlOSITES impie , fur un jet de Poirier de Pona- mier ou Prunier, sert auffi bien que le* yeux doubles ou triples. Le Jardinier solitaire veut que les jets qu’on prend fur le Pêcher, ayent des yeux qui soient doubles, autrement, dit-il, on ne peut pas les employer à greffer. Après cela, on choisit le sujet qu’on veut greffer , & sur une branche, si l'st- bre est gros ou fur le corps même de 1® tige; si elle est menue, on fait dans un endroit bien uni, deux incisions qui sont la figure d’un grand T. L’incision d’en- haut est horizontale ^ & elle doit être son' gue d’environ un demi-pouce. La seconde est perpendiculaire c’est-à-dire , de haut en bas ; on la doit faire de la longueur d’un bon pouce. ;. Les deux incisions faites, on détache l’écorce peu à peu, avec le coin du manche du greffoir qui est un petit couteau , dont la lame est longue d’envii -0 . 8 deux pouces, & dont le manche doi £ être menu, applati, arrondi par l’extre- mité, & plus long d’un pouce que lame. C’est entre ces deux incisions, $ fous l’écorce de la branche ou de ^ qu’il laut faire entrer l'écuP tige, Ion. . 4. Cet écusson se leve de dessus * c jet, ou rameau pris à l’arbre, dont o» surlaVégétation. 221 Veut greffer. On le leve de la sorte. On choisit sur ce rameau un endroit où il paroît un bon œil. C’est cet œil qu’il s’agit de détacher du rameau. On se sert pour cela du greffoir, avec lequel on fait dans l’écorce qui environne l’œil, deux incisions semblables à la figure V. après quoi,avec le manche du_gref- foir, on détache l’écorce dans l’enceinte de laquelle se trouve l’œil, qu’on leve après cela fort aisément. Voilà l'é- cusson ainsi nommé, parce qu’il a la figure de l’écuffon dont on se sert dans le ■Blazon pour placer les armes de Noblesse. Il n’importe pas, quand on enleve l’é- c °rce avec l’œil, si on emporte en même te ms un peu de bois. J. On introduit cet écusson, en Commençant par la pointe, entre l’écorce le bois du sauvageon, jusqu’à ce que m haut de l’écusson réponde exactement à l’incision horizontale du sujet qu’oïi greffe. , 6. L’écusson posé, on le lie avec de * a filasse. j 7* Si cette greffe se sait au mois de , elle s’appelle en écuffon à la pouffe ; ^ alors on coupe fur le champ le fau- Va geon à quatre doigts au-deffus de l’é- - Cu ffon. 222 Curiosités 8. Mais quand cette greffe se fait en Juillet, Août & Septembre, on la nom' me en écujjòn à œil dormant ; & dans cc cas-là on ne racourcit le sauvageon qu’au mois d’Avril suivant, lorsque l'e- cuffon a poussé. C’est ce long délai qu’on apporte pour couper le sauvageon, qul a fait nommer cette greffe en écus on à œil dormant . 9. C’est sur la grandeur de l’incisìon* que l’on sait au sauvageon qu’il se sauk régler pour la grandeur de l’écuflon qu’on leve sur le jet ou rameau. 1 o. La greffe en écusson est pour toutes sortes de fruits, tant à pépin qu ^ noyau : excepté que les Pêcíiers doivent être greffés en écusson à œil dormant* c’est à-dire, en Juillet, Août & Sep' tembre. u. La gr-ffe en fente est merveilles sement célébrée par Virgile dans le Livre de ses Géorgiques ; mais il n’a P* s oublié la greffe en écusson, par laques il commence fa description: La sas o 11 * dit il, d’enter en greffe , & celle d’ent^ en écusson Jont bien différentes, car ^ même endroit de Carbre d’où les bourg ? 01 sortent du tronc * £r par où ils romp eJl Vécorce déliée on fait une petite y 11 __ dans le bourgeon où Von renferme un b° llls geon étranger qu on a coupé d’un a$ C,£ < C >> Ji ë,a,<£ o 5<£ Sa ë I' sur la Végétation. 223 1 arbre j & on le met en état de Vincorporer - avec l’écorce J hume blée deséve. On coupe S les troncs qui n ont point de nœuds ^ on les 1 fend avec des coins bien profondément par le - milieu. Ensuite les greffes ^ qu on y. f ait in- ti troduire pouffent à merveilles ^ £r lés ar- li bres ne tardent pas àjetter de grandes bran- d ches qui montent jusqu au ciel. Ains on est enchanté de leur voir porter des Jortes de 1 feuilles qu on ne leur avoit jamais vu &* í des fruits qui ne font point de leur efpéce. rt Miraturque novosfrondes & non sua poma. Cette description est belle, mais elle i' n’est pas assez détaillée. Voici ce qu’il L y faut ajoûter. p" 1. On peut greffer en fente, non 7 seu- lement fur de grofles tiges qu’on a étron- u' Sonnées, mais on le peut faire auffi fur If plusieurs branches d’arbres , soit nains, soit de tige ; même lur des pieds de deux ou trois pouces de tour, parce que les î j Uns Lc les autres peuvent fort bien souf- ss srìr la fente, & serrer suffisamment la ^ greffe. lli 2. Cette greffe ou ce rameau qu’on nl employé , doit être de deux ou trois ltS Pouces de long, ou fans trop faire d’at- r îention à la longueur , il fe doit trou- {í Ver fur cette grestè au moins trois bons yeux. K iiij 224 Curiosités . z. On taille en forme de coin , avec la serpette, cette greffe parle gros bout» Cette espèce de petit coin doit être de la longueur d’un pouce & demi. II saut laisser aux deux côtés, qui borde cette figure de coin, de l’écorce qui soit bien adhérente au bois. Le côté qui est -destiné pour se trouver en dehors, doit être plus large & plus épais que l’autre qui sera en dedans. II faut placer si juste dans la fente ce petit coin, que l’écorce de la greffe soit exaéfement à fleur de Técorce du sauvageon , & que ces deux écorces se répondent si bien l’une à l’autre, que la fève venant du pied, trouve une grande facilité à se saisir de la greffe, en s’insi- nuant entre son bois & son écorce. Un Jardinier bien sensé ne manquera pas de faire ensorte qu’il n’y ait point de jour entre la greffe & les deux côtés de la sente, & que cette greffe tienne si bien qu’elle ne puifle pas être ébranlée facilement par les vents & par les pluies. j\ L’arbrc greffé doit être aussi-tôt lié d’un brin d’ozier, & puis recouvert bien proprement, fans ébranler la greffe, avec une terre grasse ou argileuse » dans laquelle on a mêlé de la mousse, ou du foin fort délié. Cela fe fait pour SUR LA VáGÉTÀÏÍ O ]>í. empêcher que l’arbre & la greffe ne s’alterent parles pluies, par la sécheresse, ou par les autres injures de l’air. C’est ce qu’on appelle emmailloter les greffes en fente ; & comme cela a quelque ressemblance aux poupées des ensans, on a donné â cette forte de greffe, le nom de greffe en poupée. 6. Lorsqu’on ne met qu’une greffe sur un sauvageon (on n’y en met pas d’ordinaire davantage ) en coupant le pied du sauvageon à cinq ou six pouces de terre, on doit observer de !e tailler en pied de biche ou en talus jusqu’à moitié de la tige, & couper le reste tout plat, afin d’y pouvoir poser mieux la greffe. La raison de cette coupe en talus, c’est que l’arbre taillé sc recouvre plus aisément. C’est à quoi il faut avoir toujours égard en de pareilles occasions. 7. L ne faut pas un grand effort pour fendre les sauvageons ; un scul gros couteau suffit pour cela , mais quand il s’a- git de fendre une grosie souche , on est obligé de donner quelque coup de maillet scr le couteau pour faire une fente suffisante. On tient la sente ouverte par le moyen d’un coin de fer, qu’on y lais* le jusqu’à ce que la greffe soit bien placée. 8. Comme un arbre d’ une seule ti- K v 226 Cusiosités ge est plus naturel & plus beau, il ne faut ìnettre qu’une greffe fur les sauvageons qu’on ente dans les Pépinières. 9. Le Jardinier solitaire estime que pour greffer les vieux troncs, les greffes doivent être prises d’un bois de deux fèves , & que le coin de ces greffes doit être fait de maniéré que tout le vieux bois soit dans la fente, & que l’entaille qui pose fur le plat du tronc se trouve être du bois de la derniere sève. C’est „ dit-il , sur le- sentiment d’un Auteur que ces sortes de greffes ont plus de stmpathie avec le vieuX bois des gros troncs , mais cela J ajoute-t’il* neréuffroit point fur un sauvageon suivant ïexpérience que f en ai . 10. Le même Auteur dit, qu’avant que d’introduire la greffe dans la fente du sauvageon ou du tronc, on doit la laisses trempep environ deux heures dans l’eau t & qu’eìle en reprendra mieux. 11. La longue expérience qu’il a de Fart de greffer, lui a fait découvrir une réglé de la Nature qui est certainement admirable, & d’une extrême importance', pour que les arbres greffés prennent une belle tête. II dit que la greffe posée sur le sauvageon, reprend, quoi' qu’on fasse, la situation qu elle avoir sus Farbre duquel elle a été prise. Si I e jet ou rameau étoit droit & perpen- SUR LA VÉGÉTATION. HOT} diculaire, il poussera droit & perpendiculairement à l’horison, sur le sauvageon où il a été mis. Si au contraire ce jet étoit situé horisontalement sur son arbre, il se remettra de la même maniéré sur le sauvageon, & poussera tout dé côté , sans presque s’éíever en haut. Matière d’explication pour les Philosophes. III. ha greffe en couronne se sait entre le bois & l'écorce, fur des tiges qui ont du moins trois ou quatre pouces de diamètre. On s’y comporte ainsi. 1. On prend des rameaux d’un bon demi-pouce de grosseur, ayant dans leur longueur quatre ou cinq bons yeux, & on les taille en pied de biche par le plus gros bout; en forte que l’entaille ait près d’un pouce de longueur. Voilà la greffe. Allons à la tige qui la doit porter. 2. On choisit au haut de la tige qu’on Veut enter , un endroit uni & fans Nœuds. On y fait entre le bois & l’écor- ce une incision avec la pointe d’un couteau ; ensuite vous achevez d’ouvrir cette incision avec un petit coin de bois lait exprès, moyennant quelques petits coups de maillet donnés à propos fur le coin, fans que l’écorce en soit endommagée. Z. L’incision & l’ouverture sufiisan- K vj • 2*4 Curiosités tes étant faites, on y introduit la greffe qu’on assure en la liant avec de l’ozier. Après quoi on emmaillote le haut de la tige avec de la terre grasse, comme nous l’avons dit de la greffe en fente. 4. Comme on peut arranger plusieurs greffes de trois pouces & demi de distance l’une de l’autre autoar de la tige, & que cela forme une efpéce de couronne, on a nommé cette maniéré d’enter, greffe en couronne . On convient aujourd’hui que la greffe en couronne est plus aisée & préférable à celle en fente, & qu'elle est plus immanquable. Ce qu’il y a de certain » c’est que la greffe en couronne ne fatigue point les^vieux troncs , les grosses branches, ni les Sauvageons» Au contraire la greffe en fente, où il faut une incision violente pour mettre la greffe, donne une terrible fecousse’à un arbre. IV. La greffe à emporte-piêce , fe pratique ainsi. 1. II faut faire avec un ciseau ou une petite couge, dont se servent les Menuisiers, une entaille dans l’écorce & dans le bois d’une tige étronçonnée. Cette entaille doit être d’une largeur & d’une profondeur proportionnée à la grosseur des greffes qu’on veut employer j afin qu’elles y SUR LÀ VéGÍTÀTION. 22 A soient enchâssées bien juste. 2. On taille la Greffe à peu près comme pour la fente. z. Quand le rameau est entré avec un peu de peine dans l’entaille, on lie avec de bon osier la tête greffée, & qu’on emmaillote ensuite. 4. 11 faut faire plusieurs entailles lorfqu’on désire mettre plusieurs Greffes fur un sujet. 5, Une Observation générale pour tous les Rameaux , c’est qu’ils doivent être d’autant plus gros que les Arbres <)u’on ente, font eux-mêmes plus gros êc plus vieux. Au reste cette forte de Greffe est assez bonne pour les gros Arbres , qu’on ne peut fendre fans les altérer beaucoup. V. La Greffe en flûte est la plus difficile de toutes. Én deux mots, c’est choisir un Rameau, dont on enleve l’écor- c e en forme d’un chalumeau, & qu’on transporte fur un Sauvageon de la mê- me grosseur ; après savoir lui-même dépouillé de fa propre écorce, pour adopter une écorce étrangère, avec tous les yeux qui s’y rencontrent. C’est une affaire bien sérieuse, que de dépouiller cir- Çulaìrement un Rameau de fa propre écorce, pour en revêtir un sauvageon, iju’on a auparavant dépouillé lui-même. Lzc> Curiosités ! Les Longueurs & les difficultés qu’il v s Pai à enter de la forte, font qu’on ne fe sert de guere de cette maniéré de greffer. Comme il ne leroit pas aisé de dépouiller ain- fen si les Arbres de leur écorce , à moins u 0 ; qu’ils ne soient en pleine fève ;c’est pour- & quoi cette sorte de Greffe ne se fait bien ) avec succès qu’au mois de Mai. écu La Greffe en flûte est pour les Ma- . < ronniers j Châtaigniers, Figuiers, &c. nie: OBSERVATIO N S. ^ non 1. Toutes sortes de Cerises hâtives tra< & tardives-, Guignes, Griotes, Biga- d’a reaux, peuvent être fort bien entés fur sali des Merisiers. noi 2. Les Azeroles íe greffent, soit est de Ecusson, soit en fente fur l’Epine blan- au i che,& quelquefois fur de petits sauva- avc geons de Poiriers. d’h z. La Vigne ne fe greffe qu’en fente Me fur de vieux Ceps d’une autre Vigne. des 4 On greffe les Poires fur des Coi- P 0 ; gnaffiers , & fur des Poiriers sauva- Hot geons. noi y. Les Pommiers se greffent sur des dar Pommiers de Paradis, & fur des Pom- ses miers sauvagons. I êtr< 6. Les Cerisiers de pied font de boni cor sujets pour y greffer les bonnes Cerises» ûoi SUR LA VÉGÉTATION. 2ZI Pareillement des Merisiers, on en fait de bons Cerisiers. 7. Les Pêchers & les Pavies se greffent en écusson sur le Prunier de Damas noir ou de S. Julien, fur l’Abricotier, & íur l’Amandier. 8. Les Pruniers se peuvent greffer en écusson & en fente sur d’autres Pruniers. 9. On peut enter en écusson des Pruniers fur d’autres Pruniers J mais la fente réussit mieux. 10. La curiosité, dit le Curé d’He- « nonville, a fait inventer des greffes ex- « traordinaires , & mêler des espèces » d’arbres tout-à-fait différentes, pour faire produire à la Nature des fruits « Nouveaux. & monstrueux : Comme « de faire passer une branche de Vigne « 2u travers de la tige d’un Noyer, pour -- avoir des grapes de raisin pleines « d’huile • d’enter la Calville fur des « Meuriers noirs , & des Pêchers fur « des Coignaffiers afin d’avoir des « Pommes noires , & des Pêches fans œ noyau; mais l’expérience a fait con- « Nosire que la Nature est très chaste œ dans fes alliances , très - fidelíe dans -- ses productions , & qu’elle ne peut «, être débauchée ni corrompue par au- « nun artifice. C’est une vaine imagina- -- don, que de croire que la greffe puisse « 2Z2 Curiosités » quitter son espèce, pour prendre celle » du pied j sur lequel elle est entée. Tout » au plus , elle en tire fa nourriture. Cependant Virgile, qui a si bien écrit de l’Agricukure, dit dans le 11. Livre de ses Géorgiques, que de son tems on greffoit des rameaux fur des Arbres avec lesquels ils n’avoient nulle convenance j ou jimpathie deséve, pour parler le lan- » gage du Curé d’Hénon ville : le Noyer, » dit le Prince des Poètes Latins , se » greffe fur l’Arboisier : Les Plantes sté- » riles ont porté d’excellentes Pommes. » On a vû des Châtaigniers entés fur des » Hêtres, & des Frênes ont blanchi des » fleurs blanches du Poirier. On a' mê- * me vû des Cochons manger du Gland » qui tomboit des Ormes. Géorgìq. LiV> Inseritur ver o ex f cetu Nuch Arbutus hor - rida. Et Jìeriles Platani Malos gejsere valentes' Caftanece sagas Ornufque incanuit alto Flore Piri : Glandemque sues fregere fìb Ulmis. II est vrai que M. de la Quintinie » nomme cela : Outrer la belle inven- » ri on de greffer , & se tourmenter à » vouloir faire des monstres de fruits sur. la Végétation, izz par des entreprises aussi bifarres qu’i- « nutiles.C'ëíl ainsi que des « Anciens se sont mis à greffer de Ja Vi- « gne fur des Noyers, ou fur des Oli- -r viers dans l’esperance d’y avoir des « grapes d’huile.Mais , sauf le « respect dû à i’autorité des Anciens, « je dirai ingénuëment que toutes leurs a tentatives ont été la plupart fautives. « U nous doit suffire que chaque bonne - espèce de fruits peut heureusement lui, la séve des Poiriers à groffe » queue est de celles qui ne font point *>d’une humeur facile, qui n’admettent » pas volontiers les greffes de toutes sor- tes de Poiriers. On greffe quelque- » fois, ajoûte-t’il, des Poiriers fur des -> Pommiers , soit Sauvageon , soit Pa- » radis, & fur de l’Epine blanche, Si -> fur des Néfliers ; mais commune- ->ment, ou ils ne durent point , ou ils --> ne font que languir. II y a fans doute » une maniéré á’antipathie à l’égard de - leurs fèves ; si bien qu’elles ne se peu- k vent mêler ensemble, & ne souffrent --> aucun commerce de greffes. V. Part• ch. 259. Donc la feve du tronc conserve opiniâtrément & invinciblement des vestiges de fa premiere modification , lorsqu’elle paffe du tronc -dans la greffe. C’est pour cela que le » Bon-Chrétien d’Eté , musqué, & le S » Poires de Portail, ont plus de peine, 30 que cent autres espèces de Poiriers, » à prendre íur les Coignaífiers. Pag. 2 / 8 * Mais pourtant malgré cette prétendue su b la Végétation. 237 antipathie, ils y prennent; cela est certain, & il n’est pas moins constant que les Pommiers fe greffent avec succès fur les Poiriers. & fur les Coignassiers. Donc, il ne faut pas tant fe révolter contre Virgile, fur ces alliances d’arbres st diíférens d’eípéce, dont il parle dans les Géorgiques. Donc on peut fe hasarder à greffer par curiosité, comme faìfoient les Anciens , & eífayer par arc de joindre fur un même arbre diverses espèces, & d’avoir des fruits monstrueux de inconnus à la nature. On fe peut porter d’autant plus volontiers à ces char- ttians & innocens coups d’essai, que Virgile , dans ce même second Livre des Céorgiques où il les rapporte comme a yant réussi de son tems, proteste que dans ce qu’il doit dire , il n’amufera pas l'on Lecteur par des Poésies fabuleuses, ai par de longs circuits inutiles: Non hic te carmine fiBo j ■Atqueper ambages £r longa exorfa tenebo. Article V. í-es meilleurs sortes de fruits qu un Curieux doit mettre dans fin Jardinfruider. Comme il ne s’agit pas ici de donner iz8 Curiosités des régies pour les grands & vastes Jardins dont les Maîtres se piquent d’avoir de toutes les fortes de fruit, je ne marquerai que ceux qui font incontestablement reconnus pour bons, & qu’il convient de placer dans un Jardin de médiocre grandeur. Un fruit n’est pas estimé, s’il n'a que de la beauté, fans avoir la bonté. II est vrai qu’il faut que les yeux le trouvent agréable. Un fruit qui n’a pas une belle figure, & l’agrément du coloris, de quelque bon goût qu’il soit d’ailleurs » ne peut point passer pour un fruit parfait. La vue & le goût y doivent trouver leur satisfaction ; fans quoi un fruit ne peut être rangé parmi ceux de la meilr leure forte. I. Les Poires. Une Poire est censée excellente, lors- qu’avec la beauté, elle a une chair beu- rée, tendre, délicate, avec une eau douce , sucrée ; sur tout s’il y a un peu d® parfum. Telles sont: La Bergamote. La Verte-longue. Le Beuré. Leschasserie. sur la Végétation. L’Ambrète. Le Rouflelet. La Virgouleuse. La Marquise. Le Petit-oin. L’Espine-d’hyver. Le Saint Germain. La Salviati. Le Lanfac. La Colmart. La Crasane. Le Petit- Muscat.' La Jargonelle. La Cuisse-Madame. Le Bon-Chrétien d’hyver, qui félon M. de la Quintinie, prime en exces» lence toutes les autres espèces de Poires. Le Bon-Chrétien d’Eté, musqué. Le Martin-sec. La Portail. Le Mèffire-Jean; L’Orange-verte. Çla grosse. La Blanquette, J la petite. (,1a longue-queuë. La Robine. La Cassoiète. La Sucrée verte. La Double fleur. Le Franc-réal. L’Angobert. La Donville. L’Ainadote. Le Bésidéri. La Louise-bonne Le Saint Lézin. Les huit dernieres fortes font destinées à cuire, pour faire des compotes* Le sucre corrige ce qu’il y peut avoir d’âcreté dans quelques-unes. OBSERVATIO N. Ceux qui n’ont qu’un petit Jardin» peuvent fort bien, fur un pied d’arbre» mettre deux fortes de fruits excellens & de saison différente, comme pour exetn- pie, Un Bon-Chrétien avec un Beuré. Un Lefchaíferie avec une Ambrète» . &c. ' La même chose fe peut pratiquer pour les Pommes, tes Pêches, les Prunes, &c. II. Les Pommes. rouge N d’Eté. blanche ) d’AutomP e * La Calville suk la Végéta t r on. 241 blanche. franche. rouge. La Reinette Les Cousinotes. Le Rambour-franc. Le Francatu. Le Pigeonnet. j La Violette. L’Api. Le Cour-pendu. L’Orgeran. Le Fenoiiillet. La Paise-Pomme. Pour avoir plus certainement de bondes Pommes, il faut fe résoudre à avoir des Pommiers de tige dans un Verger. Us y deviennent grands, & y donnent du fruit en abondance. Les Pommiers de Raccommodent point de la discipline austere des Jardins fruitiers; & surtout les Reinettes, les Calvilles , les Ram- tours, les Francatu. III. Les Péchés. L’avant-Pèche. La Pêche de Troie. I î. Partie . 2*2 Curiosités La Madeleine blanche. rouge. La Rossanç. La Mignone. La Chévreuse. La Bourdine. La Pêche d’Italie. La Violette, La Períique. L’Admirable. La Pourprée. La Royale tardive. La Nivete. I hâtive, i tardive. Vice. p tardive. La Jaune, Brugon violet. Çblanc. Le PavieXCadillac. (.Rambouillet. rouge. L’Alberge, IV. Les Prunes La Jaune hâtive. SUE LA VÉGÉTATION. 24.Z Le Perdrigon, La Diaprée. La Mirabelle. Le Damas de Tours , le musqué, le blanc, à la perle , d’Italie. La Rochecourbon. La Prune de Monsieur. L’Impératrice. La Prune d’Abricot. La Sainte Catherine. J - L’Impériale. La Royale. V. L s s F 1 g v e s. blanc. violet. La Longue. La Ronde. VI. Les Raisins Ç blanc. Le Muscat, V° 0 ”f' C long. Le Cloutât. Le Chasselas. Le Raisin Précoce. Le Raisin de Corinthe í^^uB-e* Lij Hi Curiosités Le Verjus. V II. Les Cerises. La Tardive i à longue queue, à courte queue. La Griote. Le Bigarreau. La Cerise précoce. YIII. Autres Arbres st Arbrisseaux. Abricotiers. 'Amandiers. Framboisiers. Groseliers. Epines-blanchesí Azeroliers. Article VI. L’usage des quatre murailles d’un Jardin fruitier ^ selon leurs quatre expositions Jqíuppose que le Jardin, dont on ve ut garnir les Espaliers , ait cent toises de pourtour; & que par conséquent la raille , qui est exposée à l'Orient, & celle qui est au Midi , ont ensewb^ SÛR LA VáGÉTATrON. 24s cinquante toises de bonne exposition. 11 y a vingt-cinq toises à la muraille ; qui est exposée au Soleil couchant, & cette exposition est la médiocre. II reste vingt-cinq toises à la muraille; qui est exposée au Nord ; cette exposition , quoique mauvaise, a ses utilités ; pourvu qu’elle ait deux heures de Soleil par jour. Dans un pareil Jardin , qui a cent toises en murailles , on peut élever à merveilles quatre-vingt bons Arbres en Espalier : Sçayoir. 4. fortes de Raisin. 2. Figuiers , blancs & ronds. 4. Cerisiers. 4. Abricotiers , I. hâtif, 3. ordinaires. 6 . Pruniers ; Sçavoir . 2. Perdri- gons violets. 1. Perdrigon blanc. 1. Sainte Catherine. 1. Prunier d’Abricot. 1. Rochecourbon. 2. Pavies, 1. blanc, ï. rouge. 2. Brugnons , violets, hâtifs. 14. Pêchers , Sçavoir; L’Avant- Pêche. La Pêche de Troie. L’Alberge rouge., L'A! berge jaune. La Madeleine blanche. L iij 2^6 Curiosités L a Madeleine rouge. La Mignons. La Chevreuse. La Violete hâtive. La Violette tardive. La Persique. L’Admirable. La Pourprée. La Royale tardive. 30. Poiriers , Sçavoir : 1. Bon Chrétien d’Eté. 2. Bon-Chrétien d’Hiver. 4 - Bergamotes. 2. Beurés gris. 2. Virgouleuses. 1. Petit-oin. 1. Sucré vert. 1. Epine. I. Louise-bonne. J. Ambrete. 1. L’Echasserie. 2. Mardn-sec. 1. Verte-longue. 1. Robine. 1. Oranges vertes. 1. Cuisse-Madame. 1. Meffire-Jean. 1. Franc-réal. 1. Bézidéri. 1. Amadote. I. Portail. sur la Végétation. 247 1. Petit Muscat. 1. Rouííelet. 12. Pommiers : Sçavoir, 2. Calvilles. 4. Reinettes. 1. Coufinote. 1. Violette. 1. Api. i.Rambour, i.Francatu. a.Cour-pendu. J’ai déja observé que íes Pommiers i qui aiment à devenir grands, 8e à se fair^ des têtes spacieuses, ne réussissent pas bien dans le Jardin fruitier où ils se trouveíit gênés , parce qu’on les y tient court -, 8e que quand on deíire avoir beaucoup de Pommes , il faut avoir recours aux vergers, où ces arbres superbes , vivant fans contrainte , fructifient à souhait. Les Cerisiers aiment encore merveilleusement le bel 8c grand air des Vergers. Voilà les quatre-vingt arbres qu’oiï peut avoir dans un Jardin fruitier, qui aura cent toises de murailles. Je ne compte point que dans ce même Jardin , on y aura encore une grande quantité d’arbres qu’on choisira selon son goût, ôt qui sera planté , ou e.n L ïiij 248 Curiosités buisson le long des quarrés, dans les quar- rés mêmes, ou en contrespalier. Ce sera là que l’on aura Fagrément de multiplier les sortes d’arbres, dont on n’a pas assez aux espaliers. Que de places se présentent dans 1 etenduë de ce Jardin, pour y mettre des Raisins, des Groseilliers , des Framboisiers, des Amandiers » des Azeroles > des Epines blanches, &c. Au reste il est de la bonne œconomie de multiplier fur tout les arbres dont les fruits durent tout l’Hyver & uns partie duPrintems. Tels font les arbres suivants* Les Poires qui durent durant l’Hyver* L’Ambrète. La Bergamote* Le Bon-Chrétien. La Colmart. L’Epine. La Saint-Germain. Le Martin sec. Le Saint Lésin. La Petit-oin. Le Portail. La Virgouleuse. Pommes d’Hyver* L’Api. SUR LA VÉGÉTATION. 2^A Les Calvilles. Les Reinetes. Les Rambour. Voyons maintenant à quelle exposition , & contre quelle muraille du Jardin , il est plus à propos de placer ces divers arbres, pour qu’ils réussissent au gré d’un Jardinier curieux. J, La muraille qui regarde le Soleil Levant. II y faut pour la bien garnir, vingt arbres : íçavoir, dix arbres à demi tige, & dix arbres nains qui se plantent entre les arbres à demie tige, afin que toute la muraille se trouve remplie & couverte de verdure. Cette exposition est admirable pour les Pêchers parmi lesquels on met quelque Abricotier. 2. La muraille qui regarde le Soleil du Midi. Dans le coin que forment ces deux premieres murailles d’Orient & de Midi, on peut planter les Figuiers. Ils ne sau- roient mieux réussir que là. On, met ie long de la muraille des L v 2 j'Ó CURIOSÎTÉS Ceps de Raisins muscats & des Chasselas dont la tige aura cinq pieds de haut, afin de planter entre les Ceps, des Pêchers nains de neuf en neuf pieds. On palisse en éventail les Vignes, comme les Poiriers & les autres arbres qu’on élevs en espalier. 3. La muraille qui regarde le Soleil Couchant. On plante à cette exposition des Poiriers, des Pêchers, des Abricotiers & des Pruniers. Les Poiriers à demi tige doivent être à douze pieds de distance l’un de l’autre : & on met des arbres Nains entre-deux. 4. La muraille qui regarde le Nord. II ne faut mettre ici que quelques Poiriers, quelques Pruniers & du Verjus. Les Poiriers à demi tige íeront à neuf pieds de distance, & on mettra un arbre nain entre deux. Dans cette exposition, on ne laisse pas tant d’espace entre les arbres, parce qu’ils n’y jettent pas tant de bois que dan? les trois expositions précédentes. sur ia Végétation, iyi OBSERVATIONS. 1. 11 y a des arbres fruitiers qui réussissent mieux en buisson, comme le Poirier de Beuré, & le Poirier de Virgou- leufe. 2 , Tous les fruits de médiocre grosseur font merveilles en tige: comme le Petit-oin, le Sucré vert J l’ Epine ^ la Louise-bonne. z. Les Bon-Chrétiens les Bergamote j le Petit-Muscat 0 ne viennent bien qu’en espaliers. 4. Les Rouff'elets ^ les Robines J les Zefchajferies réussissent de toutes les façons. y. Les Pêchers „ les Muscats ne veulent que des terres sèches. 6. Les Cerises les Prunes demandent une terre quiToit un peu humide. . 7. Les Pêchers greffes fur Pruniers les Poiriers fur Coignajfìers aiment mieux les fonds gras que les fonds secs. 8. Les Pêchers fur Amandiers J & les Poiriers fur Francs viennent fort bien dans les fonds sabloneux. 9. Les Muscats j St les Figuiers ne font bien leur devoir qu’à l’abri du froid. xo. Tous les fruits rouges, & la plupart des fruits à pépin, fe plaisent au grand air. L vj 2/2 C tf R r O S I T á s 11. Les terroirs secs font propres à faire des fruits de bon goût; mais ils font alors petits , à moins qu’ils ne soient cultivés avec beaucoup de foin. 12. Les terroirs humides font de gros fruit j mais ils n’en produisent pas de fort délicats. Article VIL La culture des Orangers . Les Orangers méritent bien qu’-on fe' fasse un plaisir de les cultiver. Ils font' durant l’Eté l’honneur de nos Jardins; Sc pendantl’Hiver ils ont un grand agrément dans la ferre, ou ils nous offrent une charmante verdure, très-capable de nous consoler du ravage & de l’extrême désolation dont la rigueur du froid afflige alors tous les arbres fruitiers de noire climat Septentrional. Ce qui nous doit encourager à leur culture contre les vains épouventailsy. dont quelques Jardiniers Orangistes- nous veulent faire peur, c’est qu’ií ess certain qu il n’y a guere d’arbres qui reprennent avec tant de facilité, qui s'a- commodent fi aisément de toute sorte de 1 Noàiture, qui vivent plus long-teins*- qui soient sujets a moins d’inâr mités J sur t'A Végétation, ayj; qui ayent si peu d’ennemis particuliers r êc qui nous gratifient plus richement de- fleurs si exquises & de fruits auíïl précieux que íont les Orangers. I. Les Orangers & les Citronniers qui viennent naturellement dans les pays chauds, ne vivent dans notre Région Septentrionale que par artifice. Ils sont parmi nous des étrangers, à l’humeur defquels nous devons nous accommoder. Notre premiere attention , c’est de leur donner une terre à peu-près semblable à celle où ils viennent naturelle- ment.- Terre pour eneaijser tes Orangers - Moitié de la meilleure terre naturelle,, comme est celle de Chenneviere, de Pré,, de grand chemin. l/autre moitié est composée dè parties égales de crotin de Mouton, réduit en poudre , de feuilles d’arbres bien; pourries, de terreau de vieilles couches' & de poudrette. De tout cela, on fait un mélange, oti eti remplit les caisses , & on y plante le® ©rangers & les Citronniers qui ne manqueront certainement pas de répondre è Nvs foins & à notre attente» Jai donné d-devant une maniéré dç 25*4 Curiosités composer une terre pour les arbres exo^ tiques à laquelle on peut avoir recours, si on veut encore plus rafiner, pour la composition de celle qu’on destine aux Orangers. II. Avec beaucoup de foin , on pour- roit ici, auffi-bien que dans les climats chauds, multiplier les Orangers, par marcote & même par bouture, surtout dans des fioles d’eau, comme nous Pavons enseigné dans la I. Partie, Chapitre XI. pag. Z2i. Cependant en ce pays-ci on n’éleve d’ordinaire les Orangers que de pépin qu’on tire des Oranges bien meures. , On seme ce pépin au mois de Mars, dans des caisses remplies de terreau, composé de crotin de mouton , & de terreau de vieille couche : & ces graines se mettent trois doigts avant dans la terre. Au bout de deux ans, on replante les petits arbres qui font nés de ces pépins ; & cinq ou six ans après ou les greffe. II y a deux maniérés de greffer ces sauvageons. La premiere est en Ecusson à œil dormant en Juillet, Août, & Septembre. Nous avons vu ci-devant dans l’Article IV, comment se sait cette greffe. sur la Végétation. ayy La seconde maniéré de greffer les O- rangers, c’est en approche , dans le mois de Mai. Ce qui íè fait ains. Le sauvageon étant assez gros pour cette opération , on le coupe en tête j on y fait une entaille, ou même quelquefois une fente, dont on approche la branche de l’Oran- ger dont on veut avoir de l’espéce ' y on coupe un peu de sécorce &dubois des deux côtés de cette branche, ensuite on la fait entrer bien proprement dans l’en- taille ou fente du sauvageon ; on couvre l’endroit greffé avec de la cire ou de la terre glaise que Ton enveloppe d'un petit linge : enfin on lie le tout ensemble assez ferme pour pouvoir résister à l’efsort des vents. Au mois d’Août, voyant la greffe bien reprise, on sépare avec une petite scie le rameau greffé de sOranger qui en ' avoir été approché du sauvageon. On éleve de la même façon les Citronniers fur lesquels on greffe les Orangers, & mutuellement les Orangers fur les Citronniers quoique cependant il soit plus naturel & plus f ur de ne greffer les Orangers que fur des sauvageons d O- rangers. Afin de ne se pas tromper, & de les reconnoître certainement, il faut observer que les Citronniers ont l’écorce jau- 256 Curiosités narre, & que les Orangers l’ont grill' tre, outre que leurs feuilles ont d’ordi- îiaire une espèce de petit cœur auprès de la queue, ce qu’on ne volt point danS les Citronniers. III. Quand un Oranger a épuisé le sel de la terre, où il est, ou quand il devient infirme, on le rencailîe, soit pour le mettre plus au large, étant devenu plus grand, soit pour lui donner une plus succulente nourriture, en substituant une terre nouvelle à celle qui est usée. On a soin, en le levant, de conserver une partie de la mote qui enveloppe les racines. IV. On les doit arroser deux sois la semaine dans les mois de Mai, Juin & Juillet. II ne faut pas que ces arrose- mens soient excessifs. II est bon toutefois qu’on voie de fois à autre l’eau sortir du fond de la caisse, mais pas souvent. On leur doit donner un arroíèment â peu près semblable quand on les transporte dans la ferre. On ne leur en donne plus dans le reste de PHy ver. On leur en fait un médiocre au commencement & fila fin d’Avril. Lorsqu’on les a tirés de la ferre, & qu’on les met en place, il faut commencer par un très-copieux arrosemenir sur la Végétation. 2 . 5 7 Dans le mois d’Août, on fait des arro- semens médiocres tous les huit jours. V. On conserve durant l’Hyver les Orangers dans la ferre pour les tenir à I’abri du froid qui leur est si funeste. De fort habiles Jardiniers ne peuvent souffrir qu’on réchauffe la serre par l’usage du feu, dont le propre étant de dessécher, il semble que cela ne convient gueres aux plantes. II suffit que la serre ait une bonne exposition , qu’elîe íoit fermée de portes bien épaisses, & de fenêtres qui joignent bien avec de bons chaffis doubles & bien calfeutrés. II faut fur tout de bonnes murailles. VI. Pour que la tête d’un Oranger soit belle, elle doit être d’une figure ronde, large, étendue, à peu près de la figure d’un Champignon. Cette tête doit être pleine, fans confusion. On ne parvient pas tout d’un coup à donner cette forme régulière à la tête d’un Oranger; ce n’est qu’avec lejems & de l’attention, en le pinçant, ou taillant à propos , pour le déterminer à pousser & à remplir les endroits vuidcs & défectueux. C’est ordinairement fur la fin de Juin que fe fait la grande pouffe des Qran- ayS C p b r d s r f ê s gérs ; & c’est alors qu’il les faut pinces & ébourgeonner, & les arroser plus que de coûtumé. VII. On fort de la ferre les Orangers vers le quinze de Mai; & on les y remet vers le quinze d’Octobre. Dans les Jardins où ils font d’un si grand ornement, on les place dans le voisinage d’un mur ou d’un bois qui puissent les défendre des vents du Midi, & du Couchant, qui soufflent dans ces îems-là, & qui fati- gueroient terriblement les Orangers; mais comment accommoder cela avec la nécessité indispensable de tes garentir du vent du Nord, qui leur est si fatal ? C’est à la sagesse du Jardinier que je laisse à décider de ce point, & à préférer là-dessus le parti qu’il trouvera le plus raisonnable. Comme il est de la beauté du Jardin d’y bien arranger les Orangers, il est pareillement de la beauté de la ferre de les y placer d’une maniéré qui fasse une belle & élégante figure. MB sur la Végétation. 2yp Abticu VIII. Secrets qui concernent le Jardin fruitier. L La maniéré de bien planter les Arbres. On a observé que, lorsque la pluye ne pénétre point jusqu’aux racines des arbres, & qu’on n 5 y fuplée pas par les arrosements, ou par quelque courant d’eau qu’on y amène, on voit bien-tôt ces arbres dépérir. On observera donc que seau puisse atteindre aux bouts des racines. Ainsi il ne faut pas planter les arbres trop avant. II ne faut pas pareillement que les racines (oient p fis bas que la bonne terre. On les plantera de telle sorte que seau & la chaleur du Soleil puissent doucement solliciter les racines à faire leur devoir. On ne pourroit les mettre trop à fleur de terre, fi l’on ne craignoit pas les Étés trop chauds & trop secs qui dévorent toute Fhumeur de la terre, 8c qui brûlent 8c dessèchent mortellement les racines. A£l. Pkilo/oph. F ebru. 166p. Tom. q- pas?. 50p. J11. & 5187 2 Co Curiosités II. Pour qu un Arhrestérile porte beaucouf de fruit. II saut ouvrir la terre au pied de Far-' bre, couper les extrémités des grandes racines, retrancher les trop longues & trop éloignées, & toutes les petites qui font trop près de la tige. On jette dans ce trou de bonne terre neuve, fur les racines qu’on recouvre fort exactement. Cela fait, l’arbre donnera bien-tôt des signes de fa vigueur. AB. Philosopha Apri' lis 16 6§. Tom. $. pag . yo. III. Pour rendre les fruits d’un Arbre plus délicieux. La meilleure maniéré, c’est de percer le tronc de l’arbre proche de la racine , & de remplir ce trou de la fève du même arbre j dans laquelle on aura mis infuser quelque matière douce & odori- férente. AB. Philofoph. Febru. i 66 $- pag. 52. IV . Pour donner aux fruits me vertu médécinale. II saut, dit le P. Kirker, faire choi* d’un arbre qui soit jeune, & qui zlt s vr la Végétation. 26r beaucoup de force. II est bon qu’il soit exposé à un air pur, Sc où le vent se fasse quelquefois sentir dans le te ms même que vous les greffez. Si c’est un Meurier fur quoi vous mettiez des greffes ^ de Pommier, de Poirier ou de Prunier, & que vous vouliez que les fruits ayent une vertu purgative ; il faut percer le tronc avec un Tariere, Sc remplir le trou d’Ellebore noir mis en poudre, ou de Scamonée, ou bien de Coloquinte. Comme ces choses font violentes, on peut à la place mettre du Séné, de la Rhubarbe, du Suc d’Aloës, ou quelque autre suc Catharctique. On enferme fort exactement ces choses dans l’ouver- ture qu’on a faite au tronc, & on bouche bien le trou, afin que les esprits de ces drogués ne s’exhalent pas. II ne faut pas que le trou soit de maniéré qu’il puisse empêcher la communication de la racine avec le haut de l’arbre. Par cette opération on aura des fruits qui feront purgatifs. Par la même voye, en se servant du suc de Pavot, de Morelle, de Mandragore , de Scramonium , de Jusquiame, on aura des fruits qui auront une vertu Narcotique & Soporative. Si l’on employé la Canelle , le Musc, le Sucre, le Girofle; les arbres porte? 262 C U RIOSITÉS ront des fruits qui seront les délices du goût & de f odorat. Kirxefj de l’Jrt. Magnet. Lib. III. Part. s. cap. 1 . Can. 2 . pag . 492 . V. Pour avoir des grapes du Raisin meus dès le Printems. Si on ente une Vigne fur un dentier , le Raisin qui viendra fera formé & meur dans le tems même des Cerises; mais la question est de bien enter la Vigne fur íe Cerisier. On le fait ainsi. On perce avec un Tariere un trou dans le tronc d’un Cerisier. On íait enter dans ce trou la branche de Vigne. On l’y laifle croître, jufqu’à ce qu’elle bouche le trou de Tariere, & qu’elle soit intimement unie au Cerisier. Alors on retranche le Sarment de son Sep, & dans la fuite il ne tirera plus de nourriture que du Cerisier. La fève du Cerisier accélérera la formation, & la maturité du Raisin qu’on pourra manger deux mois plutôt q ua l’ordinaire. Porta , Mag. IVat. Lib. ítt" cap. 8. pag. 120. VI. Pour faire que les arbres Jiériles por - tent du fruit. II y a des arbres charmans à voir, & sur la Végétation. 2 63 qui ne rapportent pourtant aucun fruit. Cela vient à coup sûr de la trop grande abondance de la séve. II faut percer avec un tariere ces arbres stériles, dans le tronc jufqu’à la moiielle. Une partie de la séve en montant se déroute & s’évacuë par h cette ouverture ; ce qui rend l’arbre fructifiant. Cent. v . n. ^28. C’est une saignée salutaire. VIL Pour faire lever promptement les Grains ^ les Pépins ^ les Noyaux des Fruits. Prenez des Pépins de Pommes, de Poires , d’Oranges; des Noyaux de Pêches, d’Abricots, de Prunes, & les faites entrer dans un Oignon qu’on appelle Squilla Marina * ou même, si vous Voulez dans un gros Oignon ordinaire. Mettez le tout en bonne terre ; il est très- certain qu’ils germeront plutôt, étant excités par l’humeur & par la chaleur de l’Oignon. C’est comme une maniéré de greffer. La greffe tire fa nourriture du tronc fur lequel on l’a placé. On pour- loit pousser cette expérience plus loin ; dc il y a apparence que si on enfermoit de la graine d’Oignon, dans un Oignon ftiême, la graine leveroit plutôt, & fe- *oit un Oignon plus nourri & plus gros. 263 Curiosités On comprend aisément que des semences mises de Ja forte, doivent trouves plus de nourriture, que dans de la terre toute crue. Cent. v. n. 3.4.5". Vîll. Pour donner aux Fruits telle figure, que l’on voudra. II faut faire un moule de plâtre qui ait au dedans la figure que l’on veut donner à une Pomme , ou Poire, ou Pêche j & que ce moule soit de deux ou trois pièces ; comme on les fait d’ordinaire pour jetter des figures en cire; on I e met durcir un peu au feu ; & puis on y fait entrer le fruit encore petit. On li e bien le Moule de peur qu’il ne s’ouvre» & on le tient ainsi fermé , jusqu’à ce qu e le fruit en ait rempli toute la capacité* Rien n’est plus plaisant que de voir après cela une Pomme qui représente fort régulièrement un visage , ou une tete d’animal. Sur tout on trouve que cé p e ' rit jeu réussit parfaitement bien à l’ég ar “ des Courges. IX. Pour rendre les fruits plus délicieux & précoces. On dit que pour accélérer la maturité des fruits, & pour les rendre plus agtéa- ^ sur la Végétation. 265 blés aú goût, il íuffit de percer le tronc de Tarbre, & d’inférer dans le trou une cheville d’un bois , dont Tarbre excelle en chaleur. Tels font le Terebinthe, le Lentisque , le Guayac , le Genièvre, Lee. Un Meurier en devient plus fécond , & les Meures font d’une excellence merveilleuse, outre que leur pré- maturité extraordinaire fait beaucoup de plaisir. X• Pour faire croître très-promptement le Celeri & le Perfil de Macédoine. Quoique la graine de Celeri ne soir pas des plus opiniâtres à germer, il ne laisse pas quelquefois de s’écouler un «aois avant qu’elle paroisse. Pour dili- genter fa germination, il faut ainsi procéder. On prend de la graine de Tannée, on la met tremper un jour ou deux dans du vinaigre en lieu un peu chaud. Quand on Ta tirée de là, on la laisse sécher. On .la feme dans de bonne terre, avec laquelle on a mêlé des cendres faires de tuyaux & de gousses de Fèves. II faut T arroser avec de l’eau un peu chaude, & couvrir ensuite la terre avec de bons paillassons, pour que la chaleur ne s’exhale pas si-tôt. En peu de jours on volt avec admiration, la terre s’ou- 11. Partie. M 2,66 Curiosité* vrir par tout. Continuez d’arroser ^ & vous verrez bientôt les tiges se montrer & s’alonger. II y a du savoir faire» pour y bien réussir. Porta dit, que pour p’avoir pas été assez exaél, il n’a pu jouir du plaisir du succès, que ses amis plus diligens & plus heureux ont goûté tout entier, Mag. Nat. Lib . líi» eap- 8. XI. Différons Secrets très-curieux• 1. Pour avoir des fruits qui purgent , on tire de terre un petit arbre, comme un Pommier. On coupe la plus grosse racine ; on cherche la moelle qui s'e- tend dans la tige; on en tire le plus que l’on peut ; on met à la place de la Rhubarbe. On remet en terre l’arbre ; les fruits qu’il portera, auront une vertu catharctique. Si l’on veut, on fend 1® tige pour en tirer la moelle, & puis on réunit les deux côtés qu’on envelopP e dans de la fiente de vache, avec des feuilles de Vigne pardessus » & on lie I e tout avec de l’Ozier. 2 . Pour qu’une même Vigne porte des raisins de différente espèce, on prend deux branches qu’on entaille un peu p ar le milieu ; on joint les deux branches à l’endroit de l’entaille; on les l je SUR LA VÉGéTATI ON. 267 fortement avec des étoupes, & on les laisse jusques à ce que les deux Sar- mens se soient unis inséparablement ensemble. Ce nouveau cep donnera du raisin de plusieurs espèces. Si on greffoir fur un Sarment de cette Vigne une troisième espèce de raisin., le spectacle en seroit plus beau & plus rare. z. On fait la même chose avec un tuyau de fer de demi-pied de long. On sait passer au travers quatre ou cinq Surmens, dont on enleve l’écorce par l’en- droit ob ils doivent se réunir tous en un corps. On les lie ensemble, on remplit les vuides du tuyau avec de bonne argile, & même on l’en couvre entiere- ment jusques à ce que tous ces Sarmens ne fassent qu’un cep. II donnera autant de sortes de raisins qu’il y a de Sarmens difìerens. 4. On souhaiteroit qu’un pareil co» net de fer, dont l’ouverture seroit très- petite, fût rempli de diverses graines. On croit que, quand elles germeroienc, les plumes différentes, qui font fort tendres, venant à fe rencontrer & à se presser à la petite ouverture du Cornet, il ne s’en formeroit qu’une plante monstrueuse ; c’est - à - dire, qui rensermeroit en soi plusieurs espèces toutes différen- s68 Curiosités y. Un Pêcher greffé quatre sois sur uft Amandier doux, porte des Pêches dont l’amende est douce, 6. La graine de Melon trempée durant quelques heures dans du vin, produit des Melons vineux. Chez nous on a la patience d’ouvrir avec dextérité chaque graine par le petit bout, par où le germe doit sortir. En cet état on la fait macérer dans du íuc fondu & ambré» Après quoi on la fait sécher au Soleil» On la seme dans de la terre bien fumée de fiente de Chèvre, il en vient des Melons d’un goût admirable & plus gros qu’à l’ordinaire. 7. La graine du milieu du Melon fait des Melons gros & ronds. La graine prise du côté que le Melon touchoit à 1 * terre, produit des Melons plus doux & plus vineux. La graine du côté de l a queue, donne des Melons longs & mal conditionnés. Enfin la graine du bout* où étpit la fleur, porte des Melons afl" eZ proportionnés & bien figurés. 8. Si l’on veut faire meurir des F 1 ' gués un mois avant la saison, voici cS que l’on sait chez nous. On choisit des branches où il y a beaucoup de fruits, ^ bien sains & des plus avancés de l’ ar “ bre; on pique légèrement avec un ca- pif ces branches l à un demj-pied pl$ SUR tA VêG ÁTÍ O Ní bas que le fruir. On attache au bas de l’endroit piqué un cornet de parchemin , haut d’envifon quatre doigts que l’on remplit de fiente de Pigeon, détrempée avec de l’huile d’olive. On couvre tout cela avec un linge qu’on attache avec de l’Ozier. On met fur chaque Figue une goûte de la même huile; ce qu’on continue de faire tous les quatre ou cinq jours. On aura par-là des Figues délicieuses , un peu plutôt qu’à l’ordinaire. Chapitre VIIL Ouvrages de chaque mois dans le Jardin a Fleurs . Janvier. O N couvre les plantes qui craignent le froid. II faut fur-tout préserver des gelées les Anémones plantées dans des pots, & toutes les jeunes plantes. F É V R I E R. On feme à la fin de ce mois fur cou-; M iij orjo Curiosités che & sous cloche des fleurs annuelles qu’on doit replanter au commencement de Mai. On seme Balsamine, Melanzè- ne, Datura, Canne d’Inde, Pomme d’E- tiopie, Pomme dorée, Amaranthe ou Passevelours. Tout est perdu, st la gelée les atteint. Mars. On seme sur couche la graine de Giroflée , les Oeillets d’Inde, les Roses d’Inde , les Belles de nuit, Oeillets» Basilic , Marjolaine, Phaseol incarnat d’Inde, Merveille du Pérou, Cresson d’Inde, Souci-double , Poivre d’Inde» Mirthe. Avril. On arrose soigneusement les Renoncules & les Anémones. II faut préservé du mauvais tems & du soleil trop chaud, les belles Tulipes panachées, les Oreilles d’ours, les Anémones & les Renoncules. On doit avoir des couvertures toutes prêtes dès le commencement ds ce mois. Mai. On plante les Anémones simples- Q% SUR LA VÍGÍTATIOK. ÌT}Í marcote les Giroflées jaunes, on en plante auíîì de boutures; on multiplie par les mêmes voies les Giroflées musquées doubles. Pour avoir des Oeillets doubles, on seme les bonnes graines, les huit premiers jours de la Lune de Mai. On les replante en Septembre avant l’équinoxe. On plante des Marguerites, des O- reilles d’ours,& des Narcisses blancs doubles. On seme du Souci double, le Thlaspi de Candie, la Scabieuse veloutée, les Pensées, les Cranus » A la fin du mois on déplante les Tulipes desséchées. Juin- On retranche des boutons , & même des montans , qui font en trop grand nombre aux Oeillets, & on appuyé ceux qui restent avec de petites baguettes. On recueille les graines meures. On déplante les Anémones & les Renoncules. Juillet. On commence à marcoter les Oeillets. On ente en approche les Mirthes , Jasmins t Orangers, Rosiers , &c. ' ' M iiij yjz Curiosité? A O U S T. On met en terre les Hyacinthes, les Anémones, les Renoncules, les Jonr quilles, les Impériales, Lee. On marcote encore les Oeillets. Un Oeillet, pour qu’il soit beau, doit être grand, bien garni, bien rangé, de belle couleur, bien panaché &c fort velouté. Septembre. On seme des Pavots, des pieds d’A- louëtte, qui fleuriront en Juin & en Juillet. On seme pareillement les graines d'O- reilles d’ours , de Renoncules, d’Iris > de Martagons. Octobre. On met en terre les Oignons de Tu- lippes,& les autres Oignons qui n’y so nt pas encore. Tant qu’il ne gèle pas , ofl tient durant le jour les fenêtres des ferres ouvertes. Novembre. Pn plante les- belles Tulipes panas sur ï/À Végétation. 273 chées, & on couvre ou enferme dans les serres tout ce que le froid a coutume de faire périr. On peut semer sur couche & sous cloche quelques graines, comme font celles que nous avons marquées en Septembre. D É C E M B R Fi La nature est dans un triste engourdissement , & je crois que dans ce mois-ci, comme dans le suivant, toute l’attention des curieux Fleuristes doit être de conserver leurs Plantes contre les meurtriers assauts de la gelée. A R T I G L E I. Secrets concernans la culture des Fleurs. J. Comme on peut faire des Prodiges dans la Culture des Fleurs. Nous allons maintenant moistonner dans la Flore du P. Ferrari, Jésuite. La moisson sera belle & bonne. Andréas Capranica dans un discours prononcé à Rome , dit : û on applique aux Plantes M v 274 Curiosités les secours qu’on peut tirer de la Chy- mie , l’art forcera la nature à se surpasses elle-même. Elle fera ce qu’elíe n’a jamais fait. Tout dépend de Pingénieux usage du Mercure, du Sel & du Souffre des Philosophes. Quels miracles de Fleurs n’aura r’on point, si on fait mêler dans les sucs de la terre le sang chaud des Animaux ? On ne fait ce que vaut ce sang, pourvu que ce ne soit pas du sang de bouc, parce qu’il excède en sécheresse; & comme tel, il est moins propre à la végétation. Si dans ce sang on mêle des cendres & des sels de plantes , ou du Nitre si fécond par lui-même, on aura des fleurs d’une grosseur Sc d’une étendue ravissantes. Un fumier bien choisi, bien mis en œuvre, est d’une efficacité surprenante, pour avancer les fleurs , & pour leur donner un émail charmant. Ce fera mettre la derniere main à ce grand œuvre , si l’on fait bien macérer toutes ces choses dans de Peau de vie, & en tirer par la distillation» la quintessence. On verra des choses, qu’on ne comprendra pas. On croira que ce font des songes. II faut íe donner de gardeque ces matières brûlantes ne touchent aux racines des plantes ; il faut de bonne terre au-dessus, fur quoi on puisse, fans nui-. sur la Végétation. 275 rs aux racines, répandre ce puissant baume de vie, avec prudence & une dus proportion. Dans la Toscane, un Jardinier, homme de mérite, a trouvé le secret de conserver dix ans dans une grosse tasse de verre remplie de terre, une branche de Pommier, chargée de trois ou quatre pommes, fans qu’il y parût aucun dépérissement. Ne peut-on pas user du même secret, pour la conservation des fleurs f Rien ne réjouit davantage les plantes, que de les arroser avec de seau échauffée au Soleil, & dans laquelle on a mis de la columbine, & des cendres de plantes de même espèce. Ferrari ^flora* Liv.iv. cap. 3. pag.^i. II. Changer & déterminer le tems où les jleurs naîtront. II n’est pas impossible d’avancer ou de retarder le tems des fleurs, comme on voudra. On peut par l’art anticiper fur la saiíon ordinaire : & les roses, pour exemple, qui ne viennent ordinairement qu’à la fin du printems, paroítront beaucoup plutôt. 1. On plante dès la fin d’Octobre, un rosier dans un vase rempli de bon- 276 CtTRlOStféí ïie terre mêlée avee un fumier sucriï- lent & tendre. On shumeéte tous leS jours deux fois avec un peu d’eaU chaude. Dans les tems rudes & froids» il faut le rentrer dans la mail on, hors de laquelle il ne doit jamais coucher. VerS le Printems, lorfqu’un vent doux viendra avec la chaleur du Soleil, solliciter les plantes à fe parer de feuilles, il faudra arroser le Rosier avec de seau un peu plus chaude. Vous verrez avec quelle diligence la rose fe montrera pour faire honneur aux premiers jours du prin- tems. II p a un inconvénient, dit le P. Ferrari ; c’est cju’un accouchement si prématuré , fait que íopvent ia mere meurt prcíqu’en même tems que l’enfant. Ce procédé ne laide pas d’être fort vanté par les Anciens qui ont écrit fur le Jardinage. Pliiié Hifl. Nat. I. xxj. c. 4. 2. Le plaisir coure moins en écuf- íonnant fur un Amandier un œil, un bouton pris fur une branche de rosier? on est assuré d’avc ir de très-belles roses souvent dans le tems même que la terre est encore couverte de nège & de fri-i mats. z. Si à la maniéré des anciens Romains , vous voulez avoir la fleur , q ul porte la pourpre de la souveraineté sur sun la Végétation. 277 tòutes les fleurs, dès le premier jour de Janvier , auquel les Consuls se revê- toientde la pourpre Consulaire, il saut, dit Démocrite, que durant les grandes chaleurs de Tété, vous arrosiez deux fois par jour le Rosier que vous destinez à vous donner ce plaisir. II fleurira dans le fond de l’Hyver; mais je crois que quand les grands froids viennent, il faut le retirer dans une ferre. 4. Les fleurs qui ne viennent que dans le Printems & dans l’Eté , paroî- trontdès l’Hyver, si on les sollicite doucement par des alimens gras, chauds & subtils. Le marc de Raisin , dont on a retranché toutes les petites peaux, le marc d’olives, le fumier de cheval, les eaux des bafles-cours contribuent infiniment à hâter les plantes. Ainsi, si dès le commencement d’Oétobre, vous coupez les branches trop avancées des Giroflées, & que vous les ensevelissiez avec des matières grasses, & salines au pied de la plante, vous aurez quatre mois plutôt des Giroflées fleuries. p. Tout le secret pour avoir des fleurs précoces, dit Cardan, de qui le P. Ferrari l’a pris, consiste en quatre choses. 1. II faut échauffer & animer le bourgeon , pour qu’ii ne se développe pas trop tard. 2. II faut un heu chaud. t " j % Curiosités 3 °. II saut une nourriture succulente. 4 0 ' JJ faut que cette nourriture convienne à la plante, sur quoi vous faites vos épreuves. Je ne me lasse jamais, ajoute Cardan , de recommander ces quatre choses qui lontbien sondées en raison. DeVarìe- tat. Lib. xij. c. 66.p. 663. 6 . C’est une pratique assurée, que fi on renferme des graines dans des oignons , la chaleur de l’oignon excite & accéléré merveilleusement la germination. On le sert de cette voie avec beaucoup de succès, pour les graines & les noyaux qu’on a ordinairement peine à faire germer. 7. Pour avoir des roses en Hy ver, il faut arracher les Rosiers quand ils commencent à pousser, & on les transplante dans une terre un peu moins grasse* Cela les dérange étrangement. Alors léur premier foin est de se nourrir, 6 c d’étendre leurs racines ; & ce n’est qu’a- près cela qu’ils se déterminent à donner dans l’Hyver suivant les Roses qui dévoient briller dès le Printems. 8 * Le P. Ferrari rapporte d’après Porta , Mag. Nat. Lib. ìij. cap. 1 o- que fi use main bien adroite fait écuflonner un œil de Rosier fur un Pommier, cet arbre portera en même tems à la fin de Septembre les fleurs duPrintems, & les fruits dç l’Automne. sur la Végétation. 279 9. Le secret n’est pas rare, mais il a pourtant son mérite. Pour avoir de la Giroflée, des Oeillets, des Roses fort tard, il n’y a qu’à rompre doucement avec ses doigts les boutons naiísans, ou les calices qui contiennent la fleur : il faut beaucoup arroser durant les chaleurs de l’Été. Par ce petit artifice, on retarde dans la tige , l’humeur destinée pour la formation parfaite de la fleur j mais elle s’échauíFe & reprend son mouvement, afin de produire d’autres fleurs. On fait cette supercherie aux petits oiseaux. Quand on déchire leur nid pendant qu’ils couvent leurs œufs, ils sont un nouveau nid, & pondent de nouveaux œufs, pour remplacer ceux qu’on leur a ôté ; & par ce moyen on leur fait avoir des petits un mois plus tard. 10 . Si on met les oignons de lis fort avant en terre, ils en fleurissent plus tard. Ainsi afin d’en avoir plus long- tems, on met quelques-uns de ces Oignons trois pouces en terre, d’autres à cinq pouces, quelques-uns à sept. On conserve une fleur long-tems, st avant qu’elle soit ouverte, on l’enserme exactement entre deux pots neufs de terre, qui ne soient point vernisés. Si deux mois après , vous tirez de là votre fleur, comme pour saluer la lumière, L§0 Cl'B IOSITÉJ. faire honneur au Soleil, elle s’ouvre avec uns diligence étonnante. La même chose se peut faire à l’égard des autres Heurs. Les Oeillets , les Anémones fe gardent long-tems de cette maniéré J pourvû qu’entre les deux plats de terre, on mette quelques plantes d’Avoine en herbe, arrachées avec leurs racines. On peut couvrir de filasse le calice d’un Oeil* íet, mettre de la poix pardessus , & puis le cacher dans une canne ou dans une boète de bois de chêne auíïï enduite de poix, de peur que l’humidité, ni Tais n’y entrent ; & en cet état déposer le tout dans une terre qui ne soit pas trop trempée d’eau. En voilà assez pour se former l’idée de faire encore mieux que tout cela. III. Pour donner de nouvelles couleurs aux Fleurs. II y a particulièrement trois couleurs qui font rares dans les fleurs , & que le s Curieux y voudroient pouvoir introduise. Le noir, fi propre par fa couleur lugubre à peindre le dégât que la mort cause dans les familles. Le verd si agréable aux yeux, & si propre à nourrir & à fortifier la vue. Le bleu qui transmet su? ia terre la couleur du Ciel sur la Végétation. 281 ï. Orì peut sairè prendre aux fleurs ces trois sortes de couleurs, fans beaucoup de peine. Pour le noir, on prendra les petits fruits qui croissent fur les Aunes. II faut attendre qu’ils y soient bien desséchés. On les met en poudre impalpable. Pour le verd , on fe sert du suc de rue ; & pour le bleu, on employé les Bluets qui croissent dans les Bleds. On les fait íecher, & on les réduit pareillement en poudre bien fine. Voici l’u- sage. On prend la couleur dont on veut imprégner une plante, & on la mêle avec du fumier de mouton, une petite pointe de vinaigre, & un peu de sel. II faut qu’il y ait dans la composition, un tiers de la couleur. On dépose cette matière qui doit être épaisse comme de la pâte, sur la racine d’une plante dont les fleurs font blanches. On l’arrose d’eau un peu teinte de la même couleur; & du reste on la traite à l’ordinaire. On a le plaisir de voir des Oeillets qui étoient blancs, devenus noirs comme des Etiopiens. On fait la même chose pour le verd & pour le bleu. Pour mieux réuflir, on prépare la terre. II la faut choisir légere & bien graste, la sécher au Soleil, la réduire en poudre ? & la passer par le tamis. Oa 282 Curiosités en remplit un vase, & l’on met au milieu une Giroflée blanche ; car la seule couleur blanche est docile & susceptible de nos impressions. II ne faut point que la pluie ni la rosée de la nuit tombent sur cette plante. Durant le jour on la doit exposer au Soleil. Si on veut que cette fleur blanche se revête de la pourpre des Rois, on se sert du bois de Brésil pour faire la pâte, & pour teindre l’eau des arrosemens. Par cet artifice, on auroit des lis charmans. En arrosant la plante des trois ou quatre couleurs, par trois ou quatre difFérens endroits , on auroit des lis de diverses couleurs , qui seroient beaux à l’admiration. Un Curieux met macérer les oignons de Tulipes dans des liqueurs préparées dont ils prennent la teinture. Quelques- uns découpent un peu ces oignons, & insinuent des couleurs sèches dans les petites hachures. IV > Pour donner de nouvelles odeurs aux Fleurs. La beauté n’est qu’un vain ornement»- quand elle n’est pas accompagnée de l’o- deur d’une bonne réputation. Cela est vrai en quelque maniéré dans les fleurs» A quoi íert ce vif émail des couleurs t sur la Végétation.' 283 qui réjouit les yeux, si ía fleur répand une athmosphere d’odeur insupportable? Ce seroit donc faire un miracle, & rendre un bon office à une fleur, que de lui ôter sa mauvaise odeur, pour lui en communiquer une bonne. Les Pivoénes , les Tulipes , font toutes charmantes aux yeux, mais elles offensent terriblement l’odorat. II faut que l’art leur donne ce que la nature leur a refusé. 1. G’est presque toute la même manœuvre, tant pour imprimer des couleurs étrangères aux fleurs que pour les parfumer d’une odeur qui ne leur est pas naturelle. On peut commencer â remédier à la mauvaise odeur d’une plante dès avant fa naissance ; c’est-à-dire, lors- qu’on seme la graine, si elle vient de graine. On détrempe du fumier de mouton dans du vinaigre, où l’on met un peu de musc, de civette ou d’ambre en poudre. On met les graines, ou même les oignons durant quelques jours macérer dans cette liqueur. On fait par expérience que les fleurs qui en viendront , répandront une haleine très- douce & très-agréable. Si on veut jouer à coup sûr, c’est d’arroser les plantes naissantes de la même liqueur, où Ton a mis tremper les semences. Xd; Ferrari ajoute, qu’un de % 284 Curiosités amis j bel esprit & grand Philosophe» entreprit d’ôter au souci d’Afrique son odeur si choquante , & qu’il y réussit avec un peu de soin. II mit tremper durant deux jours ses graines dans de l’eau de rose, où il avoit sait infuser un peu de.musc. II les Iaisia un peu sécher, & puis les sema. Ses fleurs n’étoient pas entierement dépouillées de leur mauvaise odeur; mais on ne laifloit pas de ressentir au travers de cette haleine primitive, certains petits esprits étrangers, suaves & dateurs, qui faisoient supporter avec quelque plaisir le défaut naturel. De ces plantes déja un peu amendées, il en sema la graine avec la même préparation que nous venons de marquer ; il en vint des fleurs qui pouvoient le disputer sur le fait & la bonne odeur, aux Jaí-: mins & aux Violettes. De cette maniéré,' d’une fleur, auparavant le plaisir d’un sens, & le fléau d’un autre, il en fit un miracle qui charmoic tout à la fois 1* vue & l’odorat. 2 . A l’égard des plantes qui viennent de racine, de bouture, de marcote, l’o- pération se sait au pied, comme nous savons dit fur l’article des couleurs. C’est la même chose. Pour ce qui est des arbres, on en perce le tronc avec un tariere ; & avant sur la Végétation. 285 que la séve monte, on y met en confí- stence de miel, la matière dont on veut que les fruits prennent l’odeur & le goût. II me semble qu’une personne un peu ingénieuse peut commenter sur tout ce que j’ai dit, & aller infiniment au-delà, J’ai donné les principes ; mille idées peuvent naître, se développer, de sortir aisément de la fécondité de ces principes. Je ferai ravi qu’on me passe par des inventions plus ingénieuses & plus hardies. Ces mêmes principes appliqués fur les plantes légumineuses, & transportés dans les jardins potagers, feront des légumes saines & délicieuses. On leur donnera telles vertus que l’on voudra, On les rendra purgatives & médicinales , si le goût se tourne de ce côté-là. On sera des prodiges, mais des prodiges, qui ne seront pas de pure curiosité. La santé & la vie, choses fi précieuses , y trouveront des secours infinis. Nous apprenons de l’Histoire , qu’Atta- le,Roi de Pergame, cultivoit par chagrin , les plantes fameuses par le poison & la mort qu’elles portent avec elles. Et nous, par un bon cœur, nous cultiverons les plantes salutaires & vividantes, & nous tâcherons par des plang 28 6 Curiosités tes médicinales, de secourir I s mala- 1 des, & de flater par des légumes douces & agréables, le bon goûc des honnêtes gens. Après tout, il faut se souvenir que sart ne sait pas tout ce qu’il veut, ni comme il veut : il doit se régler sur le mécanisme de la nature. II faut qu >1 s’assujettisse à ses loix, parce que ce font les loix de l’Auteur même de la Nature» Le P. Ferrari, de qui j’ai emprunté ces trois articles , a fait un discours admirable qui contient une savante dispute de la Nature avec l’Art. Le bel esprit & l’élégance règnent par tout dans cette piéce. II la finit fort judicieusement par ces beaux mot.;: Hic Florei dudli finis : hoc documentum * ìnfelìciter pugnare Af“ tem , cum répugnât Naturce. Flora * lib. iv- c. vj. pag. q68. V. Pour rendre les Giroflées doubles fis de diverses couleurs. M. Rai estime ce secret, parce qu’il vient du P. Laurembergius , qui est un Auteur de très-bonne Toi. II avoir des Giroflées blanches qui au Printems,donnèrent toutes des fleurs simples. II le s transplanta dans l'Automne. II fit la meure chose au Printems suivant, & eIst ” surlaVégétation. 287 pêcha qu’elles ne fleurissent-. Dans l’Été, ces Giroflées firent des fleurs doubles. Comrne elles croient toutes blanches, voici ce qu’il fie pour en avoir de différentes couleurs. II en sema les graines dans une terre fort succulente, qu’il avoir fait sécher au Soleil, & qu’il passa ensuite par un tamis. Soir & matin, il arrosoir ses graines avec de l’eau de diverses couleurs. Sur l’une, il verfoit de l’eau jaune; fur l’autre, de l’eau bleue; ici, c’é- toit de l’eau rouge ; là , de l’eau verte, &c. II continua de les arroser durant tfois semaines. Le soir, il retiroit dans fc triaison les vases, de peur que la roíée de la nuit ne détrempât 6 c n’affoiblît les couleurs, dont il avoir teint l’eau des arrofemens. II réussit selon ses désirs. Les germes des graines s’impregnerent des couleurs qu’il avoir employées, & firent des Giroflées d’un beau coloris. II y en avoit de safrannées, de purpurines, de blanches, de couleur de chair, de panachées, &c. Rai^hijì. plantar. I. I. c. 20 . p. 40. II faut que les couleurs dont on se sert pour colorer seau , soient tirées de la famille des Végétaux. Les couleurs qui viendroient des minéraux, seroient corrosives , & seroient mourir les plantes. 288 Curiosités Ce même secret se peut pratiquer sur toutes sortes de fleurs blanches. Je m i- magine qu’il réuffiroit à merveilles, sur les lis blancs. Vb Pour avoir des Roses sert tard . II n’est pas moins agréable d’avoU* des fleurs tardives, que d’en avoir Je précoces. Les anciens estimoient fort les Roses qui venoient à la fin de l’Automne. La foiblefíe du Soleil nous persuade alors qu’il ne faut plus rien attendre de la nature. Cependant on y réuíîît en plu- íìeures maniérés. Voici les expériences de Bacon. 1. Si au Printems vous coupez les branches qui paroiflent devoir porter des Roses, ii arrivera que les r éjectons en donneront au mois. de Novembre. La raison est, que le suc qui se se- roit porté aux branches principales, va aux surgeons, les avance, & leur sali .donner des Roses que la nature réservoir pour le Printems suivant. Cent• W* HIZ. 2. Si vous attachez les bourgeons des Rosiers, dans le tems qu’ils commencent à se développer, vous verrez aux co- .tés naître de nouveaux rejetions qui fl £L1 " firont sort tard. Le cours du suc nqu r_ Sir R LA VÉGÉTATION. 289 cíér étant suspendu & détourné, il prend une autre route , & té porte vers les yeux & les boutons qui ne dévoient sortir que l’année suivante. Cent. v. n. 41-4. - z. On coupe toutes les branches an-* dermes, & on ne laiíïe que Celles qpx font de Tannée derniere, & qui ne doivent avoir des rôles que Tan suivant, Tout Taliment se porte à ces jeunes branches , & leur fait porter des fleurs dans l’Automne» anticipées fur ’e Printems suivant. Cent. v. n. 41p. 4. II n’y a qu’à découvrir les racines des Rosiers vers Noël , durant quelques; jours; par là on empêche le suc de monter de la racine au haut de la plante : la végétation est retardée & interrompue» Elle recommence dès-lors qu’on a re~ jetté la terre fur les racines ; mais les feuilles & les fleurs viennent plus tard-. Cent. v. n. 41 5 . y. II faut arracher le Rosier pour quelques semaines, avant que les bourgeons paroiflent. Quand on le replante», il se passe quelque-tems avant que le suc ait repris son cours, par les pores de la= racine; ce qui retarde la manifestations des fleurs. 6 . II faut planter un Rosier en un lieai fort ombragé, comme au pied d’ane; baye. De-là, il arrive deux choses-. %,-Lx U. Partie. N. LAD CUIIOSITÉ S plante n’est point échauffée par le Soleil dont la chaleur hâte le mouvement de la fève. 2. La haye attire puissamment à elle les sucs de la terre, & en laisse peu aux plantes ses voisines ; & ces deux causes jointes, retardent considérablement la végétation du Rosier, qui par coníe- quene doit donner des roses beaucoup plus tard. Cent. v. n. 420. II faut ajouter avec Bacon , que tout ce que nous venons de dire du Rosier, se peut appliquer aux autres plantes. VII. i Vertu des cendres pour rendre les Fiantes Sr les fleurs plus gro(ses & plu* lelles. Pour faire croître extraordinairement une plante, il faut í’arrofer quelquefois de lessive faite des cendres des plantes semblables que l’on a brûlées. II est certain que les sels qui fe trouvent dans cette lessive , contribuent merveilleusement à donner abondamment çe qui est nécessaire à la végétation des plantes ; sur-tout celles, avec lesquelles ces sels ont de l’analogie pàr leur configuration. Car enfin il est certain que les sels tires des cendres des Tulipes brûlées, ayant plus de convenances avec l’arrangement des parties qui composent l’oignon , sur la Végétation. 2§i tige, les feuilles & la fleur de la Tulipe, font beaucoup plus propres à la faire croître extraordinairement que tous les sels de plantes d’autre espèce. Ce qui nous fait remarquer en passant que les gens de la Campagne brûlent indifféremment des fougères, des orties, des genièvres, des ronces, pour en j errer les cendres fur leurs terres, & prétendent par-là en augmenter la fertilité. La question est, de savoir si ces sels qui font d’une nature & d’une figure toute différente de ceux des semences dont on a chargé un champ, peuvent contribuer à les faire végéter & multiplier. Article II. Différens Secrets très-curieux pour le Jardinage. I. Comment on peut avoir des Fleurs en tìyver , & des Fruits au Printems. Le tout consiste à sçavoir deux choses : la premiere, si la végétation des plantes dépend tellement de faction du Soleil, qu’elle ne puisle jamais s’en passer. Sur quoi il est aisé de répondre, que toute autre cause, qui est capable d’ê- 02 Curiosité chauffer & d’émouvoir les sucs qui font dans la terre, est aussi capable de produire les mêmes effets. La seconde chose qu’il faudvoit savoir, c’est, qui est cette cause dont on pourroir substituer Faction à l’opération du Soleil. Les Jardiniers se servent ordinairement de fumier, & de chaux, pour échauffer le pied des arbres pendant l’Hy ver, & pour leur faire pouffer des Précoces au Prin- > teins. II y en a qui allument du feu dans des lieux souterrains, pour échauffer l’air & la terre, & pour produire une variété admirable de Fleurs durant les plus sortes rigueurs de 1 Hyver. Denis , Ccrnfer ■ Jus les Scienc. Juillet 1672. pag. i6y. C’est ainsi qu’Albert le Grand saísoít par son habileté dans la Physique des plantes, paroître le Printems dans l’Hy-; ver, & l’Automne au Printems. Mais comme il est difficile d’imiter exactement les différens degrés de chaleur du Soleil, il arrive souvent qu’on les surpasse dans ses opérations, & qu’on donne trop de mouvement aux sucs de la terre ; d’où il arrive qu’iís montent avec trop de précipitation, des racines dans les branches , qu’ils ne s’y arrêtent pas assez long-tems pour s’y figer ; & que les pores des branches, par ou ils passent avec trop de vitesse, s’élargissenc "sur la Végétation. 29F tellement, qu’ils ne font plus capables de retenir aucune nourriture. C’est pourquoi les arbres que les Jardiniers forcent de porter des précoces, ne font pas de longue durée. 11s fe désséchent & meurent aussi-tôt qu’ils ont donné leurs premiers fruits. II. Si l’on greffe deux ou trois fois le Jasmin fur un Oranger, il en naîtra des fleurs plus fortes, & dont l’odeur tiendra qpelque chose de tous les deux.. IIL Si l’on greffe deux ou trois fois Je Jafmssi d’Espagne, fur du Genêt d’Ef- pagne, là fleur du Jasmin deviendra jaune. IV. Pour planter à peu de frais un Bois quifajsepromptement un ombre agréable. II faut pour cela choisir des arbres qui fassent aisément des racines. Tels font les Saules, les Osiers, le Peuplier, l’Aû- ne. II en faut coucher dans la terre des branches tout de leur long. Elles pousseront des rejettons par tous leurs nœuds, qui feront autant d’arbres. Cent. n. y. 42/. FIN. * '*' * * ...- * - ■#'fr #- * * < ■ f ; # ■ ... ... ... WWSLKMMWî»»t Hi- H .. H . < fr ■» * > - « - O'* * *! -ft ■ ft-* TABLE Des Matières contenues dans la seconde Partie. Chapitre I. 'KjOuvelles découver- X V têt po«r la multi - îiplication duBledj & des autres Grains. Page I Cas important, admirablement 4 10 15 25 24 ïbtd- 2s 28 30 Zl ibid . décidé par Cicéron. I. Multiplication. II. Multiplication. III. Multiplication. IV. Multiplication. V. Multiplication. . VI. Multiplication., VII. Multiplication. VIII. Multiplication. Objection. Réponse. 1. Expérience sur le Magnétis- me du Nitre. 32 2. Expérience. 33 3. Expérience. Z4 IX. Multiplication. 3S. DES MATIERES. X. Multiplication. z8 XI. Multiplication. 41 XII. Multiplication. 47 1. Observation. $o 2. Observation. . 74 z. Observation. 77 On. II. Cette multiplication du. Bled qui est fondée fur la raison & sur V expérience > fe fait avec succès dans les Jardins fur les feignes , £r fur les arbres fruitiers j £/ même dans la famille des animaux.Combien on augmente par ce moyen les revenus des biens de la Campagne . 79 La multiplication apliquée aux vignes, aux arbres fruitiers, aux fleurs, aux légumes & même aux animaux. 70 1. Observation. 77 . 2. Observation. 79 Ch. III. Ce qu il faut observer pour faire un Jardin utile Lr agréable. 83 C h. IV. La maniéré d'amender la terre. §6 Terre préparée pour les arbres & pour les plantes exotiques. 106 I. Pour les Arbres. 107 S. Pour les Plantes. 108 TABLE Ch. V. Le Jardin potager. ÌÓ$ Art. I. Catalogue des Plantes qui se cultivent dans le Jardin potager. iii Liste des Plantes légumineuses du Potager du R'0 La muraille qui regarde te Nord. ' inobservations. 2yi Art. VIL Lacuíture des Orangers» DES MATIERES. Terres pour encaisserles Orangers. 255 Art. VIII. Secrets qui concernent le Jardin Fruitier. La maniéré ,de bien planter les Arbres. 2sA Pour qu’un Arbre stérile porte beaucoup d*e fruit. ' 2<5 q P our rendre les fruits d’un Arbre plus délicieux. ibid. Pour donneraux fruits une vertu médecinale. ibid. Pour avoir des grappes de raisin meur dès le Jrrintems. 262 Pour faire que les Arbres stériles portent du fruit. ibid. Pour faire lever promptement les grains, les pépins, les noyaux des fruits. 265 Pour donner aux fruits telle figure que ston voudra. 264. Pour rendre les fruits plus délicieux , & précoces, ibid. Pour faire croître très-promp- temenr le Celeri & íe Persil de Macédoine. 265 Différents secrets très-curieux. 266 ÇjIAP. Vni. Ouvrage de chaque mois v 'dans k Jardin à Fleurs. 2 69 Art » L Secrets concernant O ijj TABLE culture des Fleurs. Comment on peut faire des prodiges dans lâ culture des fleurs. 273 Changer & déterminer le tems où les fleurs naîtront. 277 Pour donna - dé nouvelles couleurs aux fleurs. 280 Pour donner de nouvelles o- deurs aux fleurs. 282 Pour rendre les giroflées doubles & de diverses couleurs. 286 Pour avoir des roses fort tard. 288 Vertu des cendres, pour rendre les Plantes & les Fleurs plus grosses & plus belles. 2 90 Art, ïl. Différens Secrets-très- curieux pour le Jardinage. Comment on peut avoir des fleurs en Hy ver, & des fruits au Printems. 291 Pour planter à peu de frais un bois qui fasse promptement une ombre agréable. 293 Fin de la Table de la seconde Partie» •v