JU. APOLOGIE JUGEMENT “SOUVERAIN QUI A DONNÉ LA POSSESSION ET TINVESTITURE DE LA PRIN- CIPAUTï! DE NEUCHATEL ET VALLANG1N. A SON ALTESSE SERENISSIME LA DUOESSE DE NEMOURS Contre un Ecrit Intitule'. Mémoire pour Justifier le Droit qua S. A. S. Mr le Prince de Conty fur les Comtés de Neûchâtel & Vallangin , & que Plnveíliture ne luy en peut être refuíee. V DZ / DZ kyrkyrsnry: A P O L O G I E D U Jugement Souverain qui a donné la possessions t Investiture de la Principauté de Neûchdtel ï§ Vallangin d Son oAltesse Serenìssime Madame la Duchesse de Nemours ; Contre un Ecrit Intitulé : Mémoire pour Justifier le Droit qu d S -/í. X jM. le Prince de Contysur les Comtés de Neu~ ehdtel $ Vallangin> q U e t Investiture ne luy en peut être refusée 1 M. le Prince de Contysur les Comtés de Neû~ Ln’íest pas nouveau de voir des personnes qui s’imaginent de íe mettre à couvert des reproches qu’elles méritent, quand elles en chargent ceux qui ont Droit de les leur faire. Cest la métode qu’à tenue l’Auteur du Mémoire qu’on » réfuté. On a lieu de luy objecter, que rien n’eít plus irre- gulier, plus rempli de défauts , d’improcedures & d’infor- malités, que les démarches qu’on a faites & qu’on fait encore de la part de S. A, S. M, le Prince de Conty, au sujet des 03 4 03 des prétentions qu’il dit avoir fur la Souveraineté de Neù« châtel & Vallangin : L’on peut au contraire soutenir avec vérité, que rien n’est plus conforme aux Loix, aux Coutumes Sc aux usages du Païs, que tout ce qui a été fait, Jugé exécuté en faveur de S. A. S. Madame la -Duchesse de Nemours, pour luy déférer cette Souveraineté dont Elle est dans une légitimé possession depuis cinq ans, par les voeux de ses Peuples & par les suffrages des Etats, qui font les seuls Juges naturels Sc competans dans cette matière. Cependant PAuteur ssest staté qu'il en imposeroit au Public , Sc que pour faire prendre le change, il n’avoit quà iuposer d’un air aíîùré, que de la part de M. le Prince de Conty on a satisfait à toutes les formes établies par la îoy de l'Etat ; & qua se récrier en même tems d’une maniéré haute & animée, contre le procédé de Madame, de Nemours, contre la competance du Tribunal des Trois Etats, & contre le Jugement Souverain quTl a rendu, en insinuant que cét Acte solemnel fait de trés-grandes playes à la Justice, aux Loix particulières Sc Politiques de l’Etat , & à lïmcrêt des Peuples. Mais f Auteur n’a pas vu que ce renversement de í’état naturel des choses, est plus propre à choquer les Esprits, quà les persuader ; & qu’en combattant comm’il fait des vérités connues, il n’en a que mieux confirmé la certitude. En m s Ën estes, on nc renonce pas auiîifacilement a ses propres lumières, que cet Auteur a pû se le figurer, & il s est abusé s'il a crû que les Peuples se laissèroient rapidement & sur sa parole, entraîner dans ses préjugés. De la part de 8. À. S. & du Gouvernement de Neû- châtel, on a fi peu craint Pestet que ce Mémoire pouvoit produire, qu’on avoit pris le Party de le laisser tomber de luy même ; N’estimant pas qu’il fût nécessaire de relever les irrégularité? , les invectives, & les mauvais raisonnemens dont on Pà chargé , puis qu’il est superflus de mettre les gens en garde contre des choses dont chacun est assés instruit , qui font généralement contre dites par la voix & par l’experience du Public. Néantmoins comm’on apprend que le Party contraire* qui fait tirer avantage de tout, explique autrement ce silence '& que ce Mémoire pourroit operer quelque prévention chés les Voisins & les Etrangers, s’ils manquoíent decíaircissè- mens : On a bien voulu faire cette Apologie, & la rendre publique en leur faveur ,1 pour aller au devant des mauvaises impressions que les déguifemens du Mémoire feroient capables de leur donner. L’Auteur s’attache à trois choses, pour détruire la force de flnvestiture de M- de Nemours. Il expose en premier lieu, le Titre & le Droit prétendu de M. le Prince de Conty. Il établit en second lieu , les démarches tenues pour faire valoir ce Titre, Et il combat en troisième lieu, la Sentence B de ide cette Investiture. Ces Trois Chefs feront donc la matière Sc le partage de cette Apologie.. PREMIER CHEF- Concernant le Titre de M- le Prince de Conty. L E Testament du i. Octobre 1668. fait par feuM.L’Abbé d’Orleans Duc de Longue ville, est le Titre où M. le Prince de Conty fonde uniquement fa Pi étention. On dit deux choses fur ce Titre : L'une, qull comprend dans fa Disposition la Souveraineté de Neûchâtel ; L'autre,. qu’il doit y avoir son exécution. Pour établir la premiere , on s’est estorcé de prouver que cette Souveraineté est aliénable. Mais fans entrer dans* cette question , on fe contentera de nier que dans le Testament dont il s’agitjla Souveraineté de Neûchâtel ait été> ni qu’elle ait pû être comprise, comm’il sèroit facile de le prouver, si cela étoit l’objet de cette Apologie. Pour établir 1 autre proposition , Tçavoir que ce Testament est exécutoire à Neûchâtel, on a dit. I. Que le Testateur avoit Pâge & la capacité requise par la Coutume du Pais,pour disposer de la Souveraineté. II. Que c’estce que les Etats ont reconnu en 1668. lors qu’il en disposa, même entre vifs, en faveur de M. le Comte de St. Pol son Frere. III. Que ce Testament étant confirmé à Paris par un Arrêt de la grand Chambre,iiest exécutoire à Neûchâtel,comme. le T2 /'©S le font tous les Actes & Jugemens cTun Etat à l’autre. IV. Que c’est ce que les Etats du Païs ont auííì reconnu, en recevant pour Curateurs & Regens, ceux à qui le Roy ou son Parlement avoient déféré la Curatelle de feu M. le Duc de Longueville. Mais tous ces moyens ne prouvent pas Plntention de PAuteur : Ils prouvent píûtôt le contraire , comm’on va le montrer. Premíerement Pavantage qu’il pense tirer de lâ Coutume du Païs, à 1 égard de 1 âge où elle permet de tester, ne sert qu'a faire voir que le Testament de question étoít par luy même sujet à être examiné & Jugé suivant la disposition du Droit & de la Coutume du Païs pour les biens qui y font situez ; Et que s'il se trouvoit contraire à cette diípdsition, il ne pouvoit pas valoir. C’est là en efsèt, ce que le Droit commun dicte, & cé que l’usage , la pratique, & les préjugés qui reíùltent des Sentences souveraines, autorisent constamment, comme on pourroit en raporter des exemples, s’il étoit néceslàire. Ainsi P Arrêt qui a confirmé à Paris le Titre de M. le Prince de Conty, ne peut le rendre exécutoire que fur les biens dont le testateur avoit la disposition libre en France, qui ne font que quelques estets mobiliaires : Mais il ne s’ensuit pas de là, que ce Testament doive valoir à Neûchâtel : Le Parlement de Paris n’a rien dit m pû dire de semblable, n'ay- ant ànt aucune juridiction dans cette Souveràineté ; outre que Madame de Nemours avoit fait d’expresses protestations au contraire , que le Public a vues, & qui ont été acquiefcees par le silence de M. le Prince de Conty. C’estoit donc aux Etats du Païs qu il faloit prefenter ce Testament le jour des sixf semaines, pour l’examiner suivant lesLoix de i’Etat. Cestoit à eux à decider si cele- stamens étoit conforme au Droit & à la Constitution de la Souveraineté, ou s’il y étoit oposé. En un mot, íe jugement de sa validité ou de son invalidité quant aux biens de Neûchâtel, dépendoit uniquement de Mrs. des Trois Etats. Mais comme on prévoyois aisés les grands moyens de nullité qu’on auroit oposé à ce Testament de la part de Madame de Nemours si on Peût produit; On n osa pas 1 exposer aux yeux de la Justice & du Public : On chercha à éluder la cassation qu’il meritoit, par une protestation la plus informe qui fut jamais , & la plus incapable d acquérir ni de conserver aucun Droit. Et nonobstant que par de semblables improcedures,. & par Eabandonnement de faction prétendue par M. le Prince de Conty, fans faire les réquisitions & productions prescrites par la Coutume à peine de nullité de Droit, nonobstant dis-je, qu’on ne pût Lc qu’on ne dût ignorer qu’il demeureroit exclus par là de toute eíperance de retour, on se flata que s’il pouvoit faire confirmer à Paris le Testament dont il s’agit, ce luy seroit un prétexte plausible pour revenir à la charge dans un autre tre íëms où l’on auroit mieux préparé les voy.es j Sc pour faire influer , si l'on pouvoit, cette confirmation fur la Souveraineté de Neûchâtel. On fie proposa en fin, qu’on pourroit endormir les Peuples Sc les Etats du Pais, quand on reviendroit leur dire comm’on fait aujoud’huy, Que ce Titre ainsi confirmé\ met M\ le Prince de Conty en Droit de leur -demandér présentement arec confiance > la Juftice qùils ne ■crurent pas etre en état de luj pouroir rendre en 1694. pendant que son Titre étoit contefté, & que fa qualité riétoit point établie . Mais on s est trompé. Les grands efforts qu’on a faits k Paris, Sc ceux qu’on fait aujourd'huy à Neûchâtel Sc dans la Suiste, ne peuvent pas operer Pestât qu’on en attend.’ Us ne peuvent pas íaire que ce qui s’est paíle, ne le foi t point ; Sc que ce qui n’a pas été fait, lait été. Ils ne peuvent, ni rappelles le jour fatal qui est écoulé ; ni changer la disposition des Loix ;ni ôter au Tribunal des Trois Etats íà competance ; ni renverser les jugemens qu'il a rendus ; ni attribuer à M. le Prince de Conty des formalités & des diligences qu’il n’a point faites ; ni réparer l’exclusion qu’il á encourue par Tes improcedures Sc par l’abandonnement de son action ; ni porter la Jurisdiction du Parlement de Paris a Neûchâtel ; ni enfin faire vivre un Titre qu’on a laiíîe volontairement périr, Sc qui étoit déja nul de foy même. Secondement la donnation de 1668. raportée par l’Auteur du Mémoire, ne sert qu’à prouver toujours plus C fort fortement j, que le Titre de M le Prince de Conty ne poli voit être exécutoire à Neûchâteì, à moins qu’il n en eût obtenu la confirmation de Mr s. des Trois Etats. Car si leur intervention Sc leur consentement a été nécessaire pour rendre exécutoire & valable une donnation faite à l’heri- tier légitimé, Sc qui n’étoit que pour avancer le tems d’une ouverture qui le regardoit déja ; Combien plus étoit il nécessaire que les Etats euílent confirmé Sc approuvé un prétendu fideicommis tel que celuy-cy, avant qu’on pût le mettre à aucune exécution, puis qu’une pareille disposition est inconnue danssusage du Païs, qu’eíle est réprouvée par les Coûtumes de l’Etat, qu’elle est faite au préjudice de sbelitière légitimé, Sc que si elle avoit l’essêt qu’on luy attribue, » elle traníporteroit la Souveraineté en des mains étrangères». Cela même réfuté encore le troisième moyen tiré de FArrêt du Parlement , 5 Sc de ce que les Actes & juge mens s exécutent d’un Païs à Fautre. Cette maxime souffre^ comme on lé void , fes exceptions, Sc ne peut pas être icy appliquée. Elle ne peut même avoir lieu en aucun cas ,, que fous deux conditions ; L’une, moyennant que les Droits de Juridiction, & les Coûtumes du Pais où l’on veut rendre ces Actes Sc jugemens exécutoires, n’y résistent pas: L’autre, moyennant qu’on n’àit pas négligé cette exécution , Sc qu’on la poursuive selon les mêmes Coûtumes. Or . Fune & l’a utre de. ces conditions, manquent à M. le Prince de Conty. Le quatrième Sc dernier exemple que l’Àuteur aporte, est: 03 11 03 'est aufïï contraire à son intention que les autres. Il est: pris de la confirmation que les Etats ont faite des Curatelles décernées en France : Mais cela ne fait que fortifier la preuve de la neceíìité de cette confirmation pour donner effet dans Neûchátel aux Actes qui font passés en France , fans * quoy ils ne pourroient y avoir aucune exécution. M. le Prince de Conty n a point fait valoir ni confirmer fonTître quand la porte luy en étoit ouverte : Aujourd’huy quelle luy est fermée par les Loix de l'Etat, & par un jugement souverain,, dont la force & fautorité font inviolables; Comment demandera-t-il cette confirmation, puis qu on ne peut plus Pécouter fans renverser les Loix fondamentales de l’Etat ? Comment furmontera-t-il ces obstacles invincibles, & celuyde la double nullité de son Titre, pour faire juger fa va^dité ? Comment en fin pourra-t-il sans avoir obtenu ce jugement, passer de plein faut à fexecur tion qu’il prétend ?. L’Auteur du Mémoire trouve donc fa condamnation dans tous les moyens qu’il avance ; & il ne faut que ds tourner contre luy fes propres armes, pour détruire Im prétention qu’il soutient. DEUXIEME CHEF. Concernant la procedure tenue pour f aire -valoir le Titre de CM. le Prince de Conty. 'Auteur du Mémoire pose comme des faits constans;, que le Sr. Chevalier d’Angouleíme chargé de pouvoir 02 12 ©2 ípecial de M. Ie Prince de Conty, se présenta à P Assemblée des Etats ; qu’il requit l’investiture au nom de 8. A. S. qu’il exposa son Droit Sc sa qualité d’heritier testamentaire ; qu’il presenta le Testament, & qu’il satisfit aux autres formalités établies parla loy de cét Etat: Mais que les Etats ne voulurent point entrer dans sexamen du Droit ni du Titre de M. le Prince de Conty ; & c est même la plainte qu’il ne se lasse pas de reïterer dans la fuite de son Mémoire. On ne peut lire cela, sans concevoir que le Procureur de M. le Prince de Conty reconnut ía competance du Tribunal j qu’il y procéda juridiquement;qu’ií y produisit & fit lire son Titre ; qu’il proposa judiciairement Sc en forme fès demandes aux Juges, pour obtenir d’eux la mise en possession Sc l’investiture de la Souveraineté en vertu de ce Titre ; qu’il remit a leur examen Sc à leur jugement la question de sa validité ; qu’il la soutint par tous les moyens qui pouvoient 1 établir ; & que nonobstant cela, on ne voulut avoir aucun égard à fa demande ; qu’on luy refusa de sécouter, Sc qu’il ne put obtenir aucune justice, C’est là Pidée que presente naturellement à PEÍpit, Thistoire que fait s Auteur du Mémoire. Idée prévenante Sc plausible, si elle étoit véritable : Mais comme elle ne l’est point, il importe de renvoyer ceux qui ignorent le fait, à l’Acte des procédures tenues ce jour là: On là rendu public pour leur en donner la connoistànce; Ils n’aurontqu’à le voir, pour y remarquer. I. Qu’il 'W I. Qifíl ify à que M e - de Nemours, qul-aitiàit les de* mandes, & remply les formalités que la Coutume exigeoit neceíïairement. II. Que le Sr. Chevalier d’Angouîême ne reconnut point le Tribunal, mais le récusa íous de vains prétextes qu’on réfutera cy âpres. III. QTil ne produisit ni ne fít point lire de Testament, mais íe contenta de faire voir un papier plié en fa main , qu’il cacha en fuite, fans en laiíser ni original ni copie qui pût en donner la moindre connoiílànce à l’Aísemblée. IV. Qif il ne fít aucune demande ni procedure judiciaire .par devant ce-Tribunal; mais qu’au contraire il fit lire par son Avocat un écrit où il declaroit, qu’il ne pouvoit re- connoitre ce Conseil competant pour recevoir les requifi- rions qu’il étoit prêt de faire. V. Qup fe sentant neantmoins pressé par la force de la Coutume, qui exige indifpenfablement de faire toutes les demandes & productions fur le jour fatal, à peine dune entiere exclusion : il fe contenta de déclarer à l’audience, que pour satisfaire à la Coutume il demandoit la mise ea possession & l’investiture de la Souveraineté, soit aux Trois Etats legitimement assemblés, soit à tel autre Conseil ou Tribunal à qui il apartiendroit de la donner i & qu’il espe~ roit qu’on laisseroit toutes choses en suspens. VI. Et enfin, que prévoyant bien que de pareilles dé- D marches i marches n’arrêteroient pas le cours du Droit, il protesta de nullité de tout ce qui seroit fait contre les intérêts de M. le Prince deConty, & se retira. Apres quoy fa protestation fut mise au néant, par les motifs portés dans la sentence. Ôn laisse à juger à toute personne non prévenue, f* e’est là avoir satisfait aux formalités établies par la loy de FEtat, comme le dit f Auteur du Mémoire ? Et st ce n’est pas au contraire s avoir méprisée, ou pour mieux dire » savoir entierement violée ì Il ne faut donc plus dire que le Procureur de M. le Prince de Conty fe présenta à FAÍfemblée des Etats, puis* qu’il ne la reconnut point, & qu’il l’accufa d’ineompetance;. II ne faut plus dire qu’ìl requit f investiture, puis qu’iE ne la demanda point à ce Tribunal ; qu’il ne butoit qu’à. îàiífer toutes choses en suspens ; que la réquisition qu’il sit: en Pair devant le Peuple, n’est point un Acte juridique, & qu’il ne favoit luy même, quand, ni à qui il fe prefenteroit. L 5 Auteur même avoue en fe contredisant, que diverses, considérations obligèrent le Sr. Chevalier d’Angouíeíme, à réserver de former fa demande dans une Assemblée régulière ; preuve qu’il n’èntendoit pas lavoir deja formée alors.. Il ne faut plus dire qu’il exposa son Droit, & qu’il présenta se Testament, puis qu’il n’a fait nulle exposition judi-. ciaire & qu’il cacha ce Testament fans le faire ni ouvrir ni? lire,, &: fans en donner aucune communication à personne,. Il ne v. . Ií ne faut plus dire qu’il satisfit aux autres formalités établies par la loy , puis qu’il n’en observa aucune, ôcqu’il les viola toutes. 11 ne faut plus dire que les Etats ne voulurent pas entrer dans Fexamen de son Titre , puis que c’est luy qui ne voulut pas le remettre à leur examen ; mais affecta de le soutraire à leur connoistance , & se retira sans faire autre procédure que la Protestation informe dont on a parlé. Enfin on ne peut pas tirer avantage de cette protestation; tant parce qu’il est inouï qu’on puisse entrer en Justice par cette voye, fur tout en matière de Successions, ou la loy prescrit la nécessité indispensable &la forme précise des procédures qu’on y doit tenir ; que parce que cette protestation a été mile au néant par un jugement souverain, fondé sur lesLoix & les Coutumes de l’Etat, qui veulent que dans le jour de l’échéance des six semaines aprés le décès du Prince, ceîuy qui prétend avoir Droit à fa succession , se présenté & demande dans les formes, la mise en possession & l’investitufe, autrement il f ait son Droit nuL €e sont les termes de la Coutume, qui ajoute, que le propre jour de s six semaines> tous prétendans doivent comparoir fans aucune citation > fr faire vérification de leurs Droits : que lors on doit adjuger les biens a celuj qui pronve f montre le mieux 3 le faisant jouissant de lhereditè fr Jàccejfion, fr tn ck voûter tous autresfr les dire non recevables . D’aiileurs HaiUeurs quand la protestation faite pour M. le Prince de Conty auroit été receuë, elle ne pourroit plus rien opérer, puis qu’elle n’a pas été poursuivie dans lan & jour ; la Coutume du Pais étant constante, que de semblables protestations demeurent peries, éteintes & prescrites, quand estes font négligées pendant ce terme. TROISIÈME CHEF- Concernant les moyens proposes contre la Sentence d'Investiture. C Omme la Sentence qui adjuge investiture de la Souveraineté à Madame de Nemours, fait le grand obstacle aux prétentions de M. le Prince de Conty ; Austì on a mis tout en oeuvre pour attaquer cette sentence. On s’est tourné pour cela de tous côtés, & on s 5 en est pris confusément, tantôt à Madame la Ducheíîe de Nemours; tantôt â Messieurs du Conseil d’Etat ; & tantôt à Messieurs des Trois Etats. Mais comme les objections qu on leur fait, se trouvent confondues dans le Mémoire, on a estimé à propos, de les démêler, & de distinguer les faits & leur Apologie. C’est ce qu'on va executer par celle qui regarde le procédé de S. A. S. APOLOGIE Pour Madame la Duchesse de Nemours . Eux qui savent la vérité de ce qui s’est passé à investiture de Madame de Nemours, 6c qui lisent shistoire que c "que PAuteur du Mémoire en donne, tombent dans le dernier étonnement D’une part, ils font témoins que cette Princeslè arriva à Neûchâteí, suivie seulement d’une partie de sa maison. Us ont vû qn’Elle n’a pas pris la moindre part à la convocation de Etats ; qu’Elle Pa laide faire à qui il convenoit ; que lors qu’Elíe a paru devant PAssemblée, Elle y a fait exposer simplement les réquisitions que laCoutume exigeoit; que chacun a eu la même liberté de s’y presenter & d’y exposer son Droit ; qu’en particulier le Sr. Chevalier d’An- goulesme y a été receu, même avec toute la distinction qu’ií pouvoit prétendre à cause de ion caractère; & qu’on luy a donné toute laudience qu’il a voulu ; qú’enfin toutes choses' s’y font passées dans les régies & dans Pordre judiciaire. D’autre part, ils voyent que PAuteur du Mémoire y donne des idées de Madame de Nemours, comme si Elle avoit fait de Neûchâteí un Païs de 1 conquête. Ils voyent qu’il introduit cette Princeíle en usurpatrice, qui Maitreífè du Champ de bataille, s’est emparée de ce Comté par des voyes de fait, d’injustice, &: de violence ; & qui a compté qu’Elle íàuroit le retenir, par les mêmes voyes qu’Elle se l’estoit Ait donner. Quoy de plus outré & en même tems de plus déguisé qu’une exposition de cette nature ? Et que peut on juger de la sincérité de PAuteur ? Pour détruire de telles idées, il n'y a qu’à luy demander, où font les Juges, les corps de l’Etat, les Peuples, &mê- E me ©3 S® me les particuliers, qui ont aperceu quelque chose de cei voyes de fait, d’injustice & de violence qu’il supose, & qui en ont formé queftjue plainte ? Se peut il que des faits qui devroient être si publics, fe trouvent ignorés de tout le monde, & que PAuteur n’en sache articuler aucun de cette nature, ni en marquer les circonstances ì On avoue que si les lustrages unanimes des Etats & des Peuples du Faïs ; leurs -acclamations ; le son des cloches » le bruit du canon ; & les autres marques de joye publique qu’on vit éclater à l’Investiture de M c - de Nemours, font des preuves de violence, de voyes de fait & d’injustice, PAuteur du Mémoire a raison de crier à £ usurpation: Mais si c’eít le contraire, il doit avouer que c'est fans pudeur qu’il fait des accusations si outrageantes. Ce qull avance pour les soutenir, est si foible qu’il ne* mérité pas de réponse. Néantmoins pour édifier les Voisins. 6c les Etrangers, chés qui l’on a ast'ecté de répandre soit mémoire, on veut bien entrer dans se détail de ce qu’il impute à Madame de Nemours. Le premier fait qu’il lui attribue, & fur lequel il insiste beaucoup concerne le Sieur d’Astry cy-devant Gouverneur. Il dit que Madame de Nemours a exclus par violence le Sr. d’AïFry qui étoit le Président né des Trois Etats ► qu’Eíse qu 5 Elle fa privé de ses fonctions avant même quë cfêtre investie , parce que fa droiture & fa probité lui étoient suspectes. II cite là-deílus deux ordres qu’Elle lui envoya: Et il parle enfin d une protestation dudit Sr. d’Assry, qu’il fit ( à ce qu’il dit ) en quittant le Chateau. II est vray que le Gouverneur est le Président ordinaire aux Etats, & qu’il peut les convoquer par l’avis du Conseil d’Etat : Mais ce n’est que pendant que dure fa Com- million, & lors qu’il ne fe prefente point d’empêchemens légitimés, tels que font, par exemple, fabfence, les causes de récusation pour fait de partialité, & autres semblables . 1 Le Sr. d’AfFry étoit dans ces cas. Sa commission, austî bien que le pouvoir du Curateur qui la lui avoit donnée, avoient pris fin par la mort du Prince qui étoit en Curatelle. Le Sr. d’Assry étoit absent du Tribunal, & même son absence étoit volontaire, puis que sachant le jour fatal & le lieu où les Etats dévoient necestaírement s’assem- bler, il ne daigna pas de s y trouver, quoy qu’il fût dans k Ville, & qu’il ne tinst qu a luy de se prefenter. Enfin le Sr. d’Assry étoit partial, puis qu’il s’employoit ouvertement & par tous les moyens qu’il pouvoir, a favoriser la prétention de M. le Prince de Cçnty. II ne faut pas même douter, que ce ne fût là Punique raison pourquoy il ne fe présenta point. II prévit d’un côté, .qu’il .s’expoferoit à la juste récusation qu’il sentait avoir méritée ; & d’autre côté, que son abfenèe concertée pour favoriser son partv, lui four- niroit les prétextes dont il fe sert aujourd’hui. Quoi qu’il en ©íg'ioSfS en soit, il n’étoit ní juste ni possible'de renvoyer le jour 5c s Assemblée, ni d arrêter le cours de la justice à cause de 1 absence volontaire du Sr. d’Assry : Et le Conseil d’Etat n’a fait que ce qui est pratiqué & ce qu'il avoit Droit de faire, quand il a subrogé le Doyen de ce Conseil, qui étoit le Lieutenant naturel du Gouvernement, pour présider dans cette Assemblée. Mais si ces raisons font voir qssil n’y a eu nulle injustice dans l’exclusi.on que le Sr. d’Assry s est donnée lui même ; en voícy qui justifient qu'on ne peut pas attribuer cette exclusion à Madame de Nemours, beaucoup moins lui imputer là-dessus aucune violence. Premierement, Elle n’a point privé le Sr. d’Assry de ses fonctions, ( suposé qu’il eût Droit d’en faire. ) Les ordres qu’Elle luy a envoyés ne portent point cela. On peut en juger par leur contenu, & par les réponses que le Sr. d’Assry y a faites, qu’on verra à la fin de cét écrit. • - Secondement, quand S. A. S. auroit destitué le Sr. d’Assry, - bu Elle en avoit le Droit, ou Elle ne l’avoitpas. Si Elle savoir, il n’a pas raison de se plaindre. Si Elle ne l’avoit pas, pourquoi y a-t-il déféré volontairement ? C’est donc en vain qu’on suppose qu’il y a eu de la violence dans ces ordres, puis qu’on n’a employé aucune force pour les faire executer: Et le Sr. d’Assry devoit du moins attendre quelque aparence de contrainte ( si on eût . voulu ©S ** 8S5T voulu s*'en servir ) avant que de se donner une terreur pani-s que, & que de se plaindre des violences qu’il s’magine qu'on lui a faites. Déplus, il ne faut pas outrer les conséquences de ces ordres, ni tronquer le dernier comm’on fa fait dans le Mémoire. Si le premier porte injonction de sortir de la Comté, il a été rectifié par le second, qui ne porte pas indéfiniment linjonction de sortir aussi tot le présent ardre receu » dans la veûe d’appuyer le premier ordre, comme fAuteug du Mémoire l’insinue : mais il ordonne feulement au à d’Afsry de sortir aussi tot le présent ordre receU, du Château de Neâchâtel. Voila à quoy il est restraint, & l’execution qui a suivy, confirme que le Sr. d*AfFry ne l’a pris luy même que dans ce sens. Mais quand Madame de Nemours en seroit demeurée U son premier ordre, qu’y auroit il là de fì étrange ? Elle regar- doit, comme Elle regarde encore avec raison, le Sr.d’Affry fur le pie d’un ennemi déclaré. Ce n etoit ni fa droiture ni íà probité qui le lui rendoient suspect: c’étoit íà partialité évidente , & íà passion outrée depuis long-tems à traverser ses intérêts, pour ménager ceux de M. le Prince de Conty, & en même-tems les siens propres, puis qu*il avoit déja reçu de ce Prince un nouveau brevet de Gouverneur. Elle ap- prenoit qu’il avoit precedemment supprimé des lettres que le Conseil d’Etat écrivoit aux Cantons Alliés, fur des matières pu Elle en particulier, & i’Etat en général ayoient un trés- ' 1/ grand D2 & grand intérêt. Qujil avoit receu des Lettres de M. îe Prince de Condé, ou il luy recommandoit les intérêts de M. le Prince de Conty. Qiseii conséquence de ces lettres, il en- tretenoit d étroites liaisons & avoit de perpétuelles conférences avec le Sr. Chevallier d’Angoulesinearrivé à Neû- châtel long tems avant Madame de Nemours : Qu’il luy eommunïquoit toutes les délibérations du Conseil. Qssil ne les executoit point quand elles n’étoientpas à son gré; Que ses emportemens avoient sait que plusieurs Conseillers, pour n être pas maltraités, ne vouloient plus assister au Conseil. Que quand il sut que Madame de Nemours étoit cn chemin pour se rendre à Ncuchâtel, il redoubla ses brigues & ses sollicitations pour M. Ie Prince de Conty ; 8c qu’en un mot, il ne gardoit plus de mesures : Faut il être surpris si Elle ne voulut pas se livrer entre les mains d’un, ennemy si passionné ï j Àu fond, les ordres de cette Princesle n’ayant abouty qu’à se faire ceder par le Sr. d’Assry le logement du Château, qu'il n'auroit pu luy refuser avec bienséance ; on ne* doit regarder ces ordres du côté de la Princestè, que comme une preuve de fa modération, & non pas de íà violence; Et la sortie du Château par le Sr. d’Astry, que comme un effet de son devoir, & non pas de fa contrainte. Aprés cela, quil ait déclaré tant qu'il aura voulu lors qu'il en est íbrty, qu'il íe retiroit, fans préjudicier à fer dignités, Droits & prérogatives Cette déclaration, que f Auteur du Mémoire appelle une protestation, est si indiféren- m z 3 s® te en elíe même, qu’elle ne mérité pas qu’on s’y arrête un moment, si ce n’est pour faire observer, que le Sr. d’Astry a reconnu luy même dans la íuitte, Finutilité de se déclaration, en abandonnant comm’il a fait, la fonction de ces prétendues Dignités» Droits & prérogatives» ainfy qu’on le dira encore cy âpres. Le second fait de prétendue violence qu’on imputé à Madame de Nemours, est qu’Elle a encore exclus de F Assemblée le Sr. d’Afsry Fun des quatre Châtelains, & le SJBaron de Grandcour Fun des principaux Vaílàux du Comté, qui étoit en place, fous prétexte que Fun d’eux étoit Oncle, ZL l’autre, beaufrere du Gouverneur. Mais où est la preuve de cette double exclusion qu’on attribue à la Princesse ? QuVt-elle fait, qu’a-t-elle dit, quelles violences a-t-elle exercées pour cela? On défie l’Auteur du mémoire d’en raporter la moindre circonstance : Et par conséquent ií suffit de nier de pareilles fupositions pour les détruire. On a même des preuves convaincantes du contraire de ce qu’il avance. Car à legard du Sr. Châtelain d’AfFry, le Conseil d’Etat qui a fait la convocation des juges sens aucune participation de Madame de Nemours; le Conseil d’Etat, dis-je > avoit si peu songé à exclurre cét officier sous prétexte qu’il étoit Oncle du Gouverneur, qu’il lui fit expédier un mandement exprès de se trouver à l’Aísembléc au jour qu’elle se devoit faire ; Ce mandement est du 2.8. Eevrier 1694. 6c le Manuel du Conseil -d’Etat en est chargé'. 11 eí| ©3 *4 ©3 Il est vray que Fabsence du Sr. Châtelain d’AfFry , qui abandonna le Païs & fa Charge , fut cause qu’on ne put pas lui remettre Tordre du Conseil, & qu’on se vid enfin obligé de lui substituer son Lieutenant, qui devoit naturellement remplir sa place à son défaut. Mais qu’y a-t-il là qui regarde le fait de Madame de Nemours, & peut on lui reprocher des violences à ce sujet ì A l’égard du Sr. Baron de Orandcour , le Conseil d’Etat eut encore moins la pensée de l’exelurre, puis qu’il lui fit expedier & remettre une lettre de convocation du même jour 28. Février, comme aux autres juges du premier rang; Ôc qu’en exécution de cette lettre, s’étant présenté à l’heure de l’assise des Etats, il fut appellé, & prit le premier Siège. FAuteur l’avouë, & convient que ce juge ëtoit déja en place; en quoy il se contredit lui même fans y penser, II est vray qu’il arriva ensuite une récusation contre le Sr. de Grandcour qui fut admise: mais on ne peut pas s en prendre à Madame de Nemours, puis qu’EIle n’y a eu aucune part. C’est ce que l’Acte du procès justifie. On y void que cette récusation fut proposée par le Sieur panneret Chambrier, agissant de la part du Petit & Grand Conseil de la Ville; que les moyens qu’il avança, &lesmotifs que les Juges prirent pour admettre cette récusations ne roulèrent point sur Faffinité qui étoit entre les Srs. de Grandcour & d’Affiy; mais fur d’autresfondemensincon- telìablcs. testabíes, qu’ost peut voir au procès. Enfin, Ma-'lame de Ne- mours avoit si peu en veuë d’exclurre le Sr. de Grandcour, 6c de ïuy préférer le Sr. Bergeon que l’on fit sieger, que si la chose eût dependu d’Elle, constamment ledit Sr. de Grandcour seroit demeuré dans fa place. Une derniere observation qu’il importe de faire for cette matière, est que Timpatience du Sr. Chevalier d’An- goulefme à récuser le Tribunal, ne luy permit pas d’atten- dre que l’exclusion fût jugée pour s’en plaindre. Ce n’est donc pas surquoy on peut fonder sincompetance qui! proposa. 11 n y a rien là qui puisse donner la moindre couleur, ni à sa protestation, ni à sa retraite ; 6c qui puiíïè « Texcuscr de n avoir pas voulu proceder, mais d avoir mieux aimé abandonner son action. Ainíy c’est tres inutilement qu’ort pense aujourd’huy se prévaloir de cette exclusion. La troisième 6c derniere chose qu’on attribue à Madame de Nemours, est quelle a fait des protestations contre la. clause d'inalienablité portée dans la sentence, qui efl néant « moins le seul fondement sur lequel l'imteftiture luy a été ac~ cordée . Mais l’Acte du procès détruit cette objection. On j remarque I. que Tlnvestiture fut uniquement fondée for la loy 6c Coutume observée entre les descendans des Princes de Neûchâtel ; for l’ordre de la succession qui s’en est ensuivi; & fur ce que Madame la Duchelle de Nemours est la Sœur G unique M --- DZ "tmiqûe Sc plus proche heritiere de Monsieur le Duc de Longueville dernier décédé. On y remarque II. que ce ne fut pas fur la demande faite de la part de cette Princesse t 'mais fur celle du Sr. Chevalier d’Angouíême au nom de M. le Prince de Conty, qtfon prononça dans la fuite, que la Souveraineté ne peut être alienée par Testament ni autrement. Ce fut là, l’un des motifs pourquoy on ne put avoir égard à cette demande du Sr. Chevalier d'Angoulefme ; mais on ne Pa pas mis pour fondement dans la sentence ^'investiture. On remarque III. dans. Pacte du procès, qu’if ne s'y trouve pas. un mot d'aucune protestation que Madame de Nemours ait faite contre la sentence : Et il y paroit au contraire, qu’Elle Pa accepté par la tradition & réception du Sceptre que le Président déposa entre fes mains. Aprés tout, fupofé qu’Elle eût témoigné, quelque chose de semblable à ce qu on veut dire ; cela n’ayant été, ni écouté, ni Inscrit, ni admis ; Sc ne pouvant même Pêtre contre une sentence souveraine, on n’en peut prendre aucun avantage à son préjudice. Voila pour ce qui regarde P Apologie de Madame de Nemours. II faut paíïèr maintenant à examiner ce que dit 'Auteur du Mémoire contre Messieurs du Conseil d’EtaL APOLOGIE pour Mefíìeurs du Conseil d 3 Etat. L Auteur s’attache icy à gloser fur la convocation des Etats. Elle fut faite ( dit if) par ordre du Conseil d’Etat au 1 §2 2 7 S(S ïttU nombre de S. Conseillers qui se nommèrent eux mêmes pour juges y puis qu il j en eut /. qui donnerent îlnyejliture a Madame de Nemours fans la participation du Gouyerneur , & fans Autorité légitimé > quoj que depuis la mort de Monfieur £ Abbé d Or le ans, il eût été résolu au Conseil d’Etat de ne rien innoyer pendant la Regence. On pourroit se contenter, pour justifier la conduite deMrs. du Conseil d’Etat, de ce qu’on a déja eu occasion de dire fur cette matière. Cependant on veut bien repastèr fur les faits qu’on a touchés, & y ajouter même de nouveaux éclaircistèmens, qui serviront à mettre dans un plus grand jour ces deux choses. IAine est, FAutorité qui appartient de Droit au Conseil d’Etat ; Et sautre, la régularité de la convocation qu’il a ordonnée. Les observations à faire sur la premiere, font. Que lá Commission de Gouverneur du Sr. d’Astry étoit finie, com- m’on la vu; Qisil avoit le premier innové par une conduite partiale, ainsi qu’on l’a montré. Que depuis íà sortie du Château, il avoit de lui même abandonné la conduite du Gouvernement, sans avoir fait dans toute la fuite, ni seulement témoigné vouloir faire, la moindre fonction pour sadministration des affaires publiques , comm’il a auísi été remarqué. Qu’un pareil abandon, & une si grande partialité, autoriíòient tant plus le Conseil d’Etat à continuer fans lui les fonctions de leurs Charges, pour ne pas se rendre suspects, et pour satisfaire à leur devoir & à leur 0® ** D3 leur serment envers FEtat ; Que le Sr, d’Aíïry, qui ne pou- voit ignorer ces fonctions du Conseil, puis qu’il étoit resté d? ns la Ville, &qu’on s’astembloit au lieu ordinaire, les a approuvées par son silence, & a reconnu par là tacitement la competance de ce Conseil ; Que cette competance est fondée dans le Droit naturel 5c primitif de FEtat, dont Padministration 5c la conservation tombe en dépot entre les mains de ce Conseil pendant les interrègnes. Que c’est pour cela que ce premier Corps de FEtat en porte le nom, 5c non pas celui de Conseil du Prince. Que de même que FEtat ne meurt jamais, Fautorité de ce Corps est toujours permanente, 5c ne s’esteint point. Que la mort, du Prince loin d'oter au Conseils d’Etat le moindre degré ou rayon de son autorité, y en ajoute plutôt de nouveaux, au moyen de ce que le Droit de Souveraineté inhérent dans FEtat, y retourne alors comme à son centre. Que ce Corps n'est pas fans chef quand même iFny a plus de Gouverneur, puis que le Doyen en dévient alors le chef naturel. Et quainst la prefence du Sr. d’Afïry à la délibération faite pour convoquer les Etats, auroit été superflue 5c inutile, puis que quand même son pouvoir n'auroit pas été finy, il n'au- roit pû empêcher qu’on n’eût siuivy, comm’on a fait régulièrement , Fordre établi 5c pratiqué de tous tems en Lit de semblables convocations. Les remarques fur cette régularité, qui est la seconde chose à éclaircir, sont. La ©3 *9 ©§ La premiers, qu’ofi n a jamais vu dans aucun cas, & lors ìrième qu’il y a un Gouverneur en Charge, que la convocation des Etats ait dépendu de fa feule autorité. II faut ne- cessairement que la délibération s’en prenne dans le Conseil d’Etat, & que fordonnance émane de f autorité de ce Conseil, II peut bien arriver que pour quelque cause de suspicion, ou autres, le Prince fait abstenir son Gouverneur de présider à la convocation des Etats, quand le Conseil y procede,& à leur Assemblée, lors quelle fe fait: On a même vu qu en i668.par un simple ordre de Madame de Lon- gueville, le Sr, de Lully Gouverneur (contre lequel on ne pouvoit rien objecter, ) fut obligé de s’abstenir de h Présidence aux Etats, qui fut remise au Sr. d’Assry Capitaine aux Gardes Suisses, comme premier Conseiller d'Etat, fans qu on ait prétendu donner atteinre à la sentence, fo us prétexte que le Gouverneur n’y avoit pas présidé. Mais jamais i| n’arriva ni ne peut arriver, que la convocation soit faite fans le Conseil d’Etat, & autrement que par son lustrage. La seconde remarque est, que la nomination des Juges du premier & du second rang, ou plutôt les lettres & man- demens qu on leur expedie, paslent de même neceílaìre- ment par la délibération du Conseil. La troisième chose à remarquer, est, que le nombre & le choix des Juges est tout réglé par la Coutume & par l’u- sage. Les quatre plus anciens Conseillers d’Etat occupent le premier rang, comme les quatre Châtelains occupent le second. Les uns Sc les autres font les Juges nés Sc ordinai- H res 03 3 ° 03 res dans les Trois Etats; Ils y ont Droit de séance par Ieur$ Charges ; Et à moins qu’il n’y en ait qui se trouvent malades, abíens, parens, intéressés au fait, ou dans d’autres cas qui ne leur permettent pas d y assister, on ssinterrompt point cët ordre. Dans ces cas mêmes, quoy qu’on puisse leur substituer des Vassaux ou d’autres Nobles, il est cependant plus ordinaire de leur subroger ceux qui viennent en rang après eux ; tant il est vray que la nomination des Juges ne dépend pas d un choix libre, où il soit permis de íe faire un Tribunal à son gré, & d’élire ceux qu on croît favorables à ses vues, pour éloigner ceux qui pourroient ne f être pas. C'est là néantmoîns ce que FAuteur du Mémoire a voulu iníìnuer. II a tâché de prévenir ceux qui ne lavent pas lës usages du Païs, en leur disant que de huit Conseillers il y en eut cinq qui se nommèrent eux-mêmes fans autorité légitimé, pour donner l’Investiture à Madame de Nemours. Mais que dévient cette objection, aprés les éclaircissemens qu’on a donnés ? Ce n’est donc pas ailes pour se plaindre de Mrs. du Conseil d’Etat, & pour les accuser d’irregularité, de dire en gros qu’ils íe font nommés eux mêmes.» Il fa- loit montrer en quoi ils ont violé Tordre établi pour la séance des juges. Mais comment auroit on fait voir des choses qui font si contraires à la vérité ï En eíïet, il faut convenir que rien n’a été plus conforme aux régies & à i’usage, ni plus éloigné de toute affectation AZ v DZ ctation & de toute prévention, que le procédé de Mrs. du Conseil d’Etat, puis que d’une part, tous les Conseillers qui ont eu séance aux Etats, ont été pris Sc nommés chacun dans son rang; jusques là même, que l’un d eux ayant été récuse, Sc eníuitte exclus, comm’onTa vu, il fut remplacé par celui qui le íuivoit en ordre, quoy qu’il fût le Conseil & s Affidé du Sr. d’Aíïry: que d’autre part, on avoit nommé les quatre Châtelains, dont l'un étoit aussi Conseiller d’Etat, Sc qu’en la place du Châtelain du Vauxtravers qui se trouva absent, on appella son Lieutenant, comm’on Ta remarqué. Qssy a-t-il à redire à cette conduite ? Quelle irrégularité, qnelle affectation peut on y trouver ? Sera-t-on prévenu déformais, que le Conseil d’Etat a passe íur toutes les régies pour prendre des juges à fa fantaisie ; qu’il a choisi ceux qu’il a crû disposes à donner l’InveíHture à Madame de Nemours,& que pour s’aslurer de i’évenement, il a suppléé au nombre par cinq Membres de son Corps, qui se font nommés eux mêmes fans autorité légitimé : Car n’eít cc pas là encore une fois, ce que l’Auteur du Mémoire a voulu insinuer ? En voila assés fur ce qu’il a dit contre Meilleurs du Conseil d’Etat en particulier. II est tems de venir à ses accusations générales contre Meilleurs des Trois Etats. APOLOGIE Pour Messieurs des Trois Etats . Prés la lettre que M. le Prince de Conty écrivit le 6. Fevrier 1694. su Gouverneur Sc au Couseil d’Etat, où il mar DZ 32 DZ ÎI marque: f ay jugé a propos de vous donner avis, qu ayant de juftes prétentions fur la Souveraineté dé Neuchâtel, f envoyé Mr. le Chevalier dAngoulesme premier Gentil homme de ma Chambra, pour en demander la mise en posession dr Pinvestiture dans les formes ordinaires par devant les Trois Etats , en vertu des Titres qui feront présentés ; On n’estime pas quìi soit nécessaire de s’étendre fur les raisons & les preuves, par oú l’on pourroit établir la competance du Tribunal des Trois Etats; puis qu’eíle est clairement reconnue par cette lettre, et que d’ailieurs on n’a rien proposé contre ce Tribunal, qu’une récusation générale, sans la fonder fur aucun moyen positif de Droit ni de fait, On se contentera donc de tirer de cette lettre, & de la reponse qu on y fît, ces trois observations. Ta premiere est, que M. le Prince de Conty ne changea de sentiment, & ne se détermina à faire proposer Pincompetance prétendue des Trois Etats; à ne pas y proceder; & à ne point y produire son Titre; qu’aprés qu’ileut fans doute receu avis de ceux qui agissoient pour ses intérêts, & qui avoient eu tout le tems nécessaire pour consulter sur ce Titre, qu’il ne pourroit se soutenir par les Loix & par les Coutumes de ce Pais, La seconde observation est, que ce Prince, aprés avoir ajouté dans fa lettre : Je me fer ay un plaisir singulier , de vous donner des témoignages sensibles de ma bienveillance , en i £ r 3 ì3 m vods conservant » dr tout t Etat, dans toutes les Franchises' dr libertés dont vous avés joui , a condamné lui même par là, le procédé qu on tient aujourd’huy de sa part, puis qu’il ne sauroit revenir contre le jugement Souverain de.s Trois Etats, fans ébranler dans leur fondement, les Franchises & les libertés de l'Etat, La troisième observation est:, que M, le Prince de Conty ayant été averty .par la réponse faite à sa lettre ■que le jugement de Messieurs des Trois Etats se r endroit sur le* jour de s fix semaines À compter dés jjeluyj lu décès de Monseigneur le Duc de Longueville, pour la succession de cette Souve * rairnté: cét avertissement ne laisse aucune excuse à M. le. Prince de Conty íur les improcedures de íòn procureur, . Lc en particulier fur la récusation qu’il a faite du Tribunal des Trois Etats; car s’il prétendoit que ce Tribunal ne fut pas competant, pourquoy ne se pourvut il point ? Pour- quoy ne fit il aucune démarche ni diligence pour en faire convoquer un autre ? Ce silence eít donc une confirmation de la reconnoisiance de ce Tribunal portée dans la lettre de M. le Prince de Conty : Êt íòn procureur n’éfoit plus recevable aprés cela, à proposer aucune récusation, Mais si F Auteur du Mémoire a passé légèrement fur la prétendue incompetance de Mrs. des Trois Etats, il les traite si mal fur la forme observée dans leurs jugemens, que la licence qu’il se donne à cét égard n’a point d’exem- I pie ; 34 03 pie: Et on rië croid pasqu’il y ait un Païs au Monde, ou une pareille témérité fût tolerée. ïl fait une peinture de leur Astemblée, comme diane cohuë tumultueuse & confuse, où il n'y a eu, ni ordre, ni liberté, ni régies, & qui ne mérité pas le nom d’Etats. II semble à Fouir parler, que le plus fort y étoit le Maître, et qu’on n’y a vu que précipitations, dénis de Justice, irrégularités, renversemens de Loix, voyes de fait, et jugemens injustes. Mais quand il faut prouver ces accusations, et articuler dés faits pour les soutenir, c’est là où l’Auteur demeure court, et où il ne sait que dire, si ce n’est des supositions, ou de mauvais raisonnemens. C’est ce qu’on va voir en examinant les trois moyens dont il íe sert pour apuyer ce qu’il avance. Le premier est, la plainte à laquelle il revient toujours ; Que Mrs.. des Trois Etats n’ont pas voulu entrer dans l’exa- men du Titre & du Droit de M. le Prince de Conty. Voicy les inductions qu’il en tire, et quel est son raisonnement. Quand les Etats, dit il, ont refusé d’examiner le Titre de M. le Prince de Conty, ce n’a pû être sinon à cause qu’il étoit contesté à Paris, & qu’ils ne pouvoient pas con- noitre de ce diférent ; ou à cause de la prétention d’ina- lienabíité. Au premier cas, ils dévoient donner un tems pour faire juger à Paris la contestation. Au second cas, il étoit sf DZ - . étoit encore de leur justice & de leur devoir, d’ordonner un tems pour défendre à Finalienablité. Et il est certain, ajoute-t-il, qu'iís auroient pris cette voye, qui étoit la seule légitimé & conforme à leur usage, s’il y avoit eu de Fordre & de la liberté dans leur Assemblée : Mais ne Fayans pas fait, et ay an s passé outre à donner Finvestítu- re à Madame de Nemours ; C’est une nullité, une précipitation , et Fon pourroit même dire un déni de Justice. Leur sentence est informe, et une voye de ftit, non de justice : la prise de cette investiture est une véritable usurpation, et un tissu de contraventions aux Loix de FEtat. On ne pense pas qu'on ait jamais vu faire plus de bruit, ni plus mal à propos fur une chose qui n’est qu'imaginaire. Le refus dont F Auteur se plaint, n'éxiste que dans son idée : Car on a déja vu que rien n’est moins vray, que son prétendu déni de Justice ; et que rien au contraire n’est plus conforme aux Loix & à l’usage du Païs, que Pinvestiture donnée à Madame de Nemours, et Fordre judiciaire qu'on y a observé. En estet, que pouvoient faire Mrs. des Trois Etats, qûfc ce qu’ils ont fait dans cette occasion ? lis voyent d un côté, le Procureur de M. le Prince de Conty , qui avant que rien se soit paíïe, débute par une récusation, tant générale contre le Tribunal, que particulière contre quelques Membres, qu’il tient suspects fans les nom- AZ & DZ nommer. Us le voyent qui nétablit ía qualité, que pou? protester de nullité de tout ce que l’Astemblee pourra faire, et pour fe défendre d'y proceder. ils le voyent qui montre par dehors son Titre fermé > fans 1 ouvrir ni le faire lire, et affectant de le tenir pour eux ce qu on appelle une lettre close. Ils le voyent qui n’intente aucune action formelle, et qui ne fait aucune contestation juridique. Ils le voyent enfin qui fe retire avec son Titre en poche, et qui fort fierement de F Assemblée. Sont ce là des procédures &: des instances pour faire examiner ce Titre ? Pouvoít on fexaminer fans le voir, et le voir íàns qu'il le produisit ? Devoit on le contraindre à f exhiber malgré luy ? Enfin, comment peut on luy avoir refusé une chose qu’il n’a pas demandée, et à laquelle il s’est même opofé de toute fa force ? D’autre côté, Mrs. des Trois Etats voyent Madame de Nemours, qui en qualité d’heritiere légitimé, leur demande la mise én poíTeslìon & l’investïture de la Souveraineté, et qui remplit à cét effet toutes les formalités nécessaires. Ils savent que par la Loy &: la Coûtume qu’iís ont ferment d’observer, on ne peut pas refuser la possession & Investiture à l’heritier légitimé qui la demande au jour fatal, quand il n’y a point d’oposition formelle. Ils n'en voyent aucune qui soit faite judiciairement à Madame de Nemours. Pouvoient ils fans prévariquer, ne luy pas accorder fa demande ? ' 11 11 n’est donc pas vray que Mrs. des Trois Etats ayent fait aucun déni de Justice: Ils l’ont rendue exacte , 6c ont dit Droit fur. tout ce qui leur a été proposé. Ils ont statué fur 1a récusation & la protestation du Sr. Chevalier d’Angoulême. Ils ont décidé de leur propre com- petance, comme tous les Tribunaux Souverains ont Droit de le faire, et ont jugé que cette protestation ne- toit pas recevable. Si on avoit d’autres choses à proposer , 6c quelque Titré à faire examiner ; il étoit libre de dire & de produire ce qu’on auroit voulu : Les juges étoient là pour écouter tous ceux qui se presenteroient ; Le jour entier étoit destiné à cela par lá loy : Et si on voulut bien donner au Sr. Chevalier d’Angoulême toute T Audience qu il désira, pendant quil ne faifoit que des improccdures qui ofsenfoient le Tribunal, beaucoup moins la lui auroit on refusée, s’il eût procédé régulièrement 6c dans Tordre. II nest pas vray non plus, que Mrs. des Trois Etats ayent marqué aucune précipitation, puis que lufage de de ce Pais ne leur permettoit pas de prononcer par un simple défaut, 6t que d’ailleurs il n’y avoit lieu à aucun délay, ni fous le pretexte du procès pendant à Paris, ni à raison de la question d’inalienabilité. On a montré cy devant, que le procès pendant à Paris, n avoit & ne pouvoit avoir aucune influence fur ía Souveraineté de Neûchâteí, 6c que c’estoit aux Etats du Pais à K exami- ©3 & DZ examiner & à juger par les Loix & les Constitutions de î’Etat, si le Titre de M. le Prince de Conty étoit valable ou non. Les Etats n’auroient donc pas pu ni voulu se dépouiller dc leur juridiction, pour en revêtir un Tribunal étranger: Et on leur impute une absurdité trop grossière, quand on suppose qu’ils fè font abstenu d’examiner ce Titre, dans la pensée qu’ils ne pouvoient pas en connoitre. On a montré encore, que Finaîienabilité n’a point été le fondement de la sentence d’investiture ; et que cette investiture n’estant contestée par aucune partie formelle, on ne pouvoit pas se dispenser de raccorder. Cela donc ne pouvoit fournir aux juges, aucune raison légitimé d'or- donner un délay. Il auroit salu pour y donner lieu de la part de M. Ie Prince de Conty, qu’on eût 'reconnu le Tribunali qu’on y eût procédé juridiquement par les réquisitions Sc productions necesiàires ; qu’on eût défendu en forme aux demandes faites par Madame de Nemours; et qu il fût arrivé des contestations qui eussent exigé un appointement en preuves, et du tems pour les instruire. Mais n’y ayant rien de semblable, les Etats ne pouvoient pas s’empêcher de rendre justice à qui la leur demandoit, et ils n’étoient pas obligés de favoriser par un délay,. le destein de jetter le trouble dans l’Etat, Sc d’y laiíïer les choses dans la confus sion Sc dans lin certitude : La justice Sc le bien public ne le fouítroient pas, & ce seroit par là que les Juges auroient meri^ ©3 3 # ©S mérité le reproche d’un déni de justice, au lieu que l’ayant rendue bonne & briéve comm’ils ont faillis se sont mis à couvert de ce reproche. Les exemples que TAuteur du Mémoire apporte, de ce qui fut fait en 1552. 1601. & 1672. luy font contraires, bien loin de luy être avantageux. Car en ces temps là on forma des contestations réglées, qui déterminèrent les Juges à remettre le jugement de Tinvestiture à un tems certain qui fat donné aux prétendans pour instruire leurs Droits: Mais icy, rien de semblable, comm’on Ta vû ; De forte que ces exemples ne servent qu a condamner le procédé tenu pour M. le Prince de Conty. 11 n'est pas vray encore, qu’iî. n'y ait eu aucun ordre dans TAssemblée : L’acte du procès, qui raporte toutes les propositions qu’on y fit, & tous les jugemens qu'on y rendit, fait voir que tout s'y paílà dans Tordre ; Et on peut assurer que s’il y arriva quelque chose contre Tordre, ce ne fut que le procédé extraordinaire & plein de mépris, que le Procureur de M. le Prince de Conty fit paroitre contre le Tribunal Auísi TAuteur n’a sû marquer aucune circonstance de son accusation. Enfin il n’est pas vray qu’ií n'y avoit nulle liberté dans TAíTemblée. Tous ceux qui voulurent y proposer quelque chose, eurent une pleine liberté de le faire. On leur donna une paisible audience , et on les écouta avec toute Inattention qu'ils pou voient souhaiter. Du côté des juges, ils ne SS 4 ° 03 ne furent ni pratiqués, ni gênés : Nul ne s’en est plaint \. ni n’en a eu la pensée. Ils ont fait leurs fonctions en juges intégres & libres. La clause d’inalienabilité est même une preuve convaincante de cette liberté ; Et il est surprenant que FAuteur qui n’a sû articuler aucun fait de contrainte ni de violence, ait entrepris fi hardiment d’en imposer au Public, fur des choses qui se font passées dans une solennité si célébré, et dont tant de personnes caractérisées & de tous ordres, ont été témoins du contraire. Le second moyen dont FAuteur se sert, consiste en quelques protestations qu’il allégué; mais qui lui sont inutiles. Celle qu’il dit que le Sr. d’AfFry fit signifier à f Assemblée, est si nulle, si absurde, et si incapable de rien opérer, qu’elle ne mérité aucune considération, comme on le va voir par le récit du fait. Ceux qui eurent à parler devant l’Audience des Etats ayant fini, et personne ri ayant plus rien à dire, les juges entrerent dans la Chambre de consultation. Pendant qu’ils y étoient, on vid un homme étranger & inconnu, qui vint subtilement glisser un papier sur le coin de la Table, & qui s’évada incontinent. Ce papier volant & informe, pastà sous les yeux de quelques personnes, qui le regardèrent comme un jeu fait à plaisir , & qui n etoit ' digne d aucune attention sérieuse. L’auditoire ne sut ce que c etoit que ce papier, à Mrs, des Trois Etats l’igno- rerent rerent entièrement que son porteur. 41 m w S >v En un mot, íl demeura auíil inconnu Voìia ce qu’on appelle une protestation que le Sr. d’Àsi- fîyfo figntfi er * £ Assemblée , & qui fut notifiée au Chancelier & uu Président en pleine Assemblée, par un q^otaire de Fri - bourg qui leur en laijsia copie. O11 prétend que ce papier porte, que le Sr. d’Affiy déclare rAísembëe illégitime, Le qu’il proteste contre tout ce qui a été & sera fait- N’est ce pas là un beau Titre pour dépouiller Mrs. des Trois Etats de leur competance , & pour renverser leurs jugemens? Il faut bien manquer de preuves, pour être réduit à se servir d’une aussi misérable piece que celle là. En effet, chacun sait comment on fait les protestations , et par qui on peut les faire signifier. Ce n’eíl point de cette sorte qu’elíes se font. Ce n est pas par un étranger qu’on ne connoit point, ni par une Autorité privée qu’elles se notifient. Si le Sr. d’Affiy eût voulu tout de bon faire quelque protestation, il en avoit les moyens, et il en favoit la maniéré. II se seroit présenté à l’Aísem- blée, ou en personne, ou par un légitimé Procureur. II auroit exposé de vive voix sa protestation, ou il l’auroie fait lire hautement. On l’auroit examinée. Ceux qui au- roient eu intérêt à y défendre Fauroient fait, et on en auroit jugé. Mais ce n’est pas là ce qu’il vouloit; c’est plû- tòt ce qu’il craignoit. Une démarche d la sourdine, qui ne Texposoit ni à contestations ni à reproches, lui revenoit L mieux; ^ 03 mieux: Et il s’y détermina fans doute, par les mêmes raisons qui fempêcherent de prétendre à la Présidence. Les motifs qu’il eut de n’en pas aller occuper le siégé, le portèrent apparemment à ne pas faire une protestation publique & en forme ; et il craignit également de ne pouvoir soutenir ni lun ni Fautre. Quoy qu’il en soit,!iln’a pas plus avancé par une pìece fourrée comme celle là - que íì elle n’avoit pas été faite : Et on n’en peut rien inférer qu’à son désavantagé. Pour ce qui est des protestations faites par Messieurs les Envoyés de Fribourg & de Solleure, en faveur des personnes de leurs Cantons qui tiennent des Fiefs en ce Païs, ce font des Armes que l’Auteur emprunte inutilement pour combatre la forme & l’Autorité du Tribunal. Car il faut prendre garde que ces protestations nç furent faites que fur là récusation proposée de la part de la Ville contre le Sr. Baron de Grandcour, et dans la feule veuë que son exclusion ne pût faire préjudice aux Vassaux pour qui on protestait, ni être tirée à consequence contr’eux. Leur butétoit donc uniquement de pourvoir à la conservation de leur droit de séance aux Etats pour l’avenir ; Mais il ne fut jamais, d’accufer le Tribunal d’incompetance, ni de s’oppo- fer à ce qu’il donnât Finvestiture à Madame de Nemours, ni enfin d’étendre leur protestation de nullité à ce qui fe- roit décrété fur cette Investiture: De forte que FAuteur du Mémoire íe trompe extrêmement, quand il prétend que c’est aisés pour annuller le jugement qui a donné Finvestiture à 45 DZ ture à Madame de Nemours, qu'iî soit arrivé une pareille oposition sur léxclusion du Sr. Baron de Grandcour. Le troisième & dernier moyen de l'Auteur, contre la forme de ce jugement, est qison y a prononcé sur l'ina- lienabilité qui netoit ni alléguée, ni contestée. Mais comme cette objection présupose que Pinaliena- bilité saisie fondement de la Sentence d'investiture, et que c’est là une erreur qu’on a déja relevée ; que par conséquent cette matière ne touche point cette Sentence, dont on s’est uniquement proposé de faire icy l’Apologie, on ne s'é- cartera pas de ce but, et pour s’y renfermer, on se contentera des éclairciísemens qu’on vient de donner, puis qu on les eroid sustssans pour détruire tous les préjugés que le Mémoire de M. le Prince de Conty seroit capable de produire. On ne sauroit mieux finir cét écrit, qu’en rétorquant, comm’on va faire, la conclusion de la premiere partie de ce Mémoire, à laquelle il répond. S. A. S. Madame la Duchesse de Nemours íe présentant aujourd'hui à ses Peuples de Neûchâtel, avec le Titre incontestable de son Investiture, confirmé par íà possession , Elle ne eroid pas qu’il y ait rien qui puisse les dispenser de la reconnoître toujours pour leur légitimé Souveraine. Elle est même persuadée, quelque confiance que donne àM.le Prince de Conty, son rang, sa naissance & ses autres qualités, que tout ce qu’il y a dans cette Souveraineté de Personnes éclairées, et qui s’interessent pour le bien Publie SS ** DZ Public, loin d’approuver son entreprise, la regarderont comme une des plus grandes playes que l'on puisle taire à la justice & aux Loix particulières de leur Etat ; Et qu'ils feront les premiers à la condamner, parce qu’iîs font tout à la fois, et mieux instruits que personne de leurs Loix politiques que le succès de cette entreprise renverseront absolument, et qu’ils ont en même tems plus d'intérêt que qui que ce soit, d’empêcher quelles ne soient violées, puis qu'elles ont été établies pour la conservation de cét Etat, et pour la fureté de leurs Franchises. Et S. A. 8. prend à bon augure, que son arrivée dans ses Etats pour se maintenir dans f. juste possession , ait donné tant de joye à ses Peuples, et qu’ils comprennent comm’ils le doivent, que son intérêt fe trouve joint avec l’interêt de la Discipline & du bon Gouvernementet que la défense de fa Souveraineté, est attachée à la défense & à la conservation des Loix de ses Peuples, en quoy consiste principalement la fonction & le devoir d’un légitimé Souverain, coriE e o p i e Des ordres des réponses dont il efi parlé autt pages 20 , e dr 21? de cét Ecrit, Premier ordre. On -Altesse etant unpeufatiguée, ma ordonne' de yous mander » Monsieur, de dire À Mr, d’Affry qu Elle luy ordonné de sortir de la Comté. Elle arrimera lu r {s ^ bonne heure à Neuchâtel, oìt f esere dlayoir t honneur de yom assurer plas particulièrement @ue je suis, à Pontarlies ce Samedy 6. Mars 1694. Vôtre trés-humble obéissant Seryiteur, Signé BARON' Et au deíìus A Monseur Monsieur Petitserre, Chancelier \ S Neuchâtel* ¥ Cette Ç^ Ette lettre a été présentée cejour d'kuy Dimancheseptième» d neuf heures dufiin àMr. dAjfry, par Mr. Petits ierre 3 accompagné de Mr s. Meuron Maire de Beyaix , ét Chambrier Receyeur des Reliquats. Au bas de cette lettre> es écrit de la main de Mr. dAssry. Cet ordre n ef pas suffisant. Fait au Château de Neâ~ châtel ce septième Mars ió94. â neuf heures du soir. signé, D: PETITPIERRE- S: tJMeuron, comme témoin. A: chambrier » de méme. Second ordre. \ ■ t_ On Altesse Serenijsime Madame , ordonne au Sieur dAssry de sortir ausì tofl le présent ordre receu> du Château de Neuchâtel. Donné à Motier ce 8. Mars i(P94. Signe', MARIE D ORLEANS 14 í ©S 47 DZ L £ présent ordre a été présenté par M. Sandoz Conseiller d État, Commisaire Général , fur les une a deux heures âpres midy dudit jour F. Mars i(f94. Et a u bas, Mr. dAffry a fait la réponse qui fuit. Eour faire place d Son Altefe Serenisfme CMadame la Duchesse de Nemours, pour laquelle f ay tout le refpecl possible, & éyìter les inconvénients, fe déclare que je me retire du Château, fans préjudicìer à mes dignités, Droits dr prérogatives j Fait au Château de Neùchâtel, ce 8. Mars ic94. DAFFRY 'y* .ij * fc •V**'". »>/ -1* < k. W- ê. ‘.C ^íT?- >¥&* i- î?%V' •’iàv ^ WM<- âê.'àê^/:^ âàê ààèLM^.