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Champagne day : à Pouillon, la fête des vendanges unit vignerons et Église de Champagne

À deux heures de Paris, au nord de Reims, le massif du Mont Saint-Thierry organise sa fête des vendanges  : entre pressage à l’ancienne et messe, un beau visage de l’Eglise en ces territoires se révèle.
Fête des vendanges
© Régis Grosperrin

Pouillon, village de 520 habitants en Champagne. 

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Fête des vendanges Dézoomer
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Les vignes au soleil levant.

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Les bouchons de champagne sont recyclés !

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La croix de la fête est posée sur l'autel.

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La famille Simon, viticulteurs à Pouillon.

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La famille Bertand, viticulteurs à Trigny.

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Les hangars vidés et décorés pour l'occasion sont bien remplis !

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Les raisins vendangés sont portés au pressoir.

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Fête des vendanges Dézoomer
© Régis Grosperrin

Les P. Edmond et Bertrand sont originaires du diocèse de Ziguinchor au Sénégal.


Un doux soleil d'automne caresse les vignes ce dimanche matin au village de Pouillon en Champagne. Les côteaux sont silencieux. Dans le village, des bénévoles s'activent déjà.

Le 12 octobre 2025 : le second jour de la fête des vendanges se lève. Sur la place, un ancien prépare le pressoir tandis que, dans l'église, les répétitions commencent. Trente ans que cet événement bisannuel qui tourne dans les villages du massif de Saint-Thierry n'était pas revenu à Prouillon !

Monsieur Simon, viticulteur retraité, se souvient : «Il y a trente ans, la fête était le 23-24 septembre. On avait vendangé le lendemain. Cette année, les vendanges étaient fin août et début septembre. On a un mois d'avance. En 30 ans, on voit ça de plus en plus souvent : on voit le changement climatique.»

Des bâtons de Saint Vincent

C'est de chez Adrien, son fils, que la procession démarre en direction de l'église. Des représentants des différents villages sont là, en costume de vignerons ou de vendangeurs, avec les bannières de leurs villages et les bâtons de saint Vincent.

L'insigne se transmet entre vigneron chaque année. Il représente saint Vincent, le patron des vignerons, une grappe à la main, sous l'évocation d'un arceau d'église. Des sarments courent le long du manche ; de son autre main, le saint tient une Bible ou une serpette.

«Il y a un ancrage religieux dans la profession», explique Éloi Bertrand, viticulteur à Trigny. «On n'imaginerait pas cette fête sans la messe.» On y vient en famille. Armelle son épouse explique : «Avant, c'était mon mari qui se costumait ; maintenant, c'est notre fils Benoît. Le pantalon de vendangeur est celui du grand-père d’Éloi.»

Dans cette région où la vigne assure des revenus, les enfants reprennent l'exploitation plus souvent qu'ailleurs. Quand ce n'est pas le cas, ils en restent propriétaires : «C'est du bien familial», commente Éloi. Quand le prêtre à la messe élève la coupe de vin en disant qu'elle est «le fruit de la vigne et du travail des hommes», l'expression prend ici un sens intime: la vigne est le fruit du travail des générations de la famille avant nous.

«La vigne nous enseigne Dieu en image»

Le P. Edmond Sagna l'a remarqué dès son arrivée, au moment des vendanges. «J'ai découvert les vignes avant de découvrir les églises», dit-il en souriant.

Lors de son homélie, il commente : «La vigne nous enseigne Dieu en image. Dans le travail de la vigne, l'homme rejoint Dieu. Les labours, les désherbages, l'entretien, la lutte contre les maladies : tout cela ne laisse pas beaucoup de repos. Cela nous renvoie à Dieu qui n'arrête pas de travailler pour nous soyons des sarments qui portent les bons fruits de l'amour, de la paix, de la joie, de la solidarité et du partage.»

Dans ces territoires, l’Église cultive les valeurs de communauté, d'unité, de solidarité. Les diocèses de Reims et de Châlons-en-Champagne mènent d'ailleurs une réflexion commune sur la pastorale de la vigne. Le premier défi ? L'individualisme et l'idolâtrie de l'argent qui abîment les liens tissés entre personnes, entre villages.

Les viticulteurs champenois sont aussi pris d'inquiétudes liées au réchauffement climatique ou aux accords du Mercosur. Au milieu d'eux et à leur côté, l’Église veut «dire une parole d'espérance : ils ne sont pas seuls. L’Église les accompagne dans la joie comme dans les difficultés», résume le P. Bertand, adjoint du P. Edmond

Les traditions religieuses locales sont comme un cep de vigne : enracinées dans l'expérience humaine d'un métier, d'un terroir, elles y puisent un sens spirituel de la juste place de l'homme dans le monde et avec les autres. Ce cep nourrit des sarments qui irriguent la vie sociale.

Fête des vendanges Dézoomer
© Régis Grosperrin

Au repas, la conversation les précise. D'un viticulteur, on parle «des valeurs qu'il pratique dans son travail», «l'accueil, l'écoute et la bienveillance» ; un autre raconte l'amitié qui se tisse avec ses vendangeurs : «On est comme une famille». 

Eric Millet (sur la photo) corrige en riant une fausse image de la vie chrétienne dans ces villages :«Y a pas que des enterrements ! Faut remercier le bon Dieu quand ça va bien, quand on est heureux !»