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Chroniquer tous les films qui sortent en salle : c'est la mission des Fiches du cinéma, plus ancienne revue consacrée au 7e art et 100 % dédiée à la critique, qui fêtera ses 90 ans en 2024. Une prouesse alors que, chaque semaine, environ une douzaine de films, de toutes nationalités, débarquent sur les écrans français. Avant la pandémie, en 2019, le nombre de 746 films inédits avait été atteint, selon le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC). Ce travail de fourmi constitue donc une mine d'or, qu'il y a urgence à préserver. Après qu'un processus de numérisation des archives de la revue a été enclenché en 2008, l'association, qui pilote Les Fiches du cinéma (et qui porte le même nom que cette dernière), a mis en ligne en mai 2022 sa propre base de données.
Elle réunit toutes les fiches, de 1934 à aujourd'hui, soit un total de près de 42 000. Depuis le 1er juin, l'association a lancé une campagne de financement participatif sur la plateforme Proarti pour optimiser et rendre plus performante cette base : « Elle a besoin d'être développée, ainsi que d'une maintenance suivie. Pour cela, il nous faut récolter des fonds pour mobiliser les compétences de spécialistes », résume François Barge-Prieur, président de l'association. « La revue, qui vise le grand public, compte environ 900 abonnés, contre 400 voici un an. Il faudrait que nous puissions franchir la barre des 1 300. Nous avons renforcé notre communication auprès des particuliers, ainsi qu'auprès des facultés, lycées, collèges, médiathèques, etc. », détaille François Barge-Prieur.
L'économie du titre repose majoritairement sur l'abonnement et, pour la campagne de financement participatif, Les Fiches du cinéma cherche à réunir 15 000 euros : au 11 juillet, 74 % de la somme avait été rassemblée. Cette campagne est soutenue par diverses personnalités, comme les comédiens Macha Méril, Lola Naymark, Alice de Lencquesaing, Swann Arlaud, le cinéaste Cédric Klapisch ou le critique Jean-Michel Frodon. Elle s'achèvera le 30 juillet.

Basculement numérique en 2018
Créée en 1934 par La Centrale catholique du cinéma, Les Fiches, tout en s'inscrivant dès le début dans une démarche critique, avait pour première vocation d'évaluer si les films à l'affiche répondaient aux valeurs de l'Église. Dans les années 1960-1970, elle s'est détachée de l'injonction « morale ». En 2001, elle a été cédée pour être reprise par ses rédacteurs. L'association, à but non lucratif, voit alors le jour. En 2018, la version papier a définitivement été abandonnée. Les Fiches du cinéma est donc actuellement disponible en numérique sous deux formes : l'une, hebdomadaire, cible les particuliers ; l'autre, mensuelle, s'adresse aux professionnels de l'industrie (distributeurs, exploitants, etc.).
Son ADN repose sur un principe fondamental : chaque long-métrage est traité à égalité, une page par film avec une critique, le générique (casting, sociétés de production, etc.), les informations techniques (durée, format, etc.), ainsi qu'un résumé intégral de l'histoire, du début à la fin. Ce contenu complet a tapé dans l'œil de différents acteurs : un nouveau site Web en cours de préparation, sous les bons auspices du CNC et de la Cinémathèque française, mettra en avant les résumés des Fiches, tandis que la plateforme de vidéo à la demande Arte Boutique relaiera bientôt leurs critiques. « Accompagner les plateformes, les festivals et d'autres acteurs dans leur éditorialisation est un des axes de notre stratégie de croissance. Notre atout, c'est que nous voyons absolument tout ce qui sort », souligne François Barge-Prieur.

Les bénévoles, forces vives des Fiches
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Pour bâtir la revue, l'association s'appuie sur trois salariés et les forces vives de 20 à 30 rédacteurs bénévoles. « Ils sont issus de différents milieux : le cinéma, le journalisme, l'édition, l'enseignement… Ils ont le plus souvent entre 35 et 55 ans », commente François Barge-Prieur. Ce dernier, président de l'association depuis 2017, est lui aussi bénévole. Il est entré voici presque 12 ans aux Fiches en intégrant le pool de rédacteurs. « J'ai tout adoré, tout de suite, parce qu'on m'a envoyé tout voir. Et c'est en voyant tout que l'on repère des pépites. Durant les réunions de rédaction, j'ai aussi participé à des moments d'échanges précieux : Les Fiches, c'est une sorte de centre de formation. » La revue a vu défiler plusieurs noms qui ont compté par la suite, dans la critique ou ailleurs, comme Iris Brey, Jean-Christophe Berjon, Jacques Lourcelles, Pierre Murat, ou encore Nicolas Silhol.
Chaque film est vu par un ou plusieurs rédacteurs, mais, face à l'avalanche de longs-métrages distribués chaque semaine, il devient difficile de croiser le maximum de points de vue pour une même œuvre. Néanmoins, la critique rédigée s'efforce de refléter l'avis du comité. Et Les Fiches publie chaque année L'Annuel du cinéma – disponible en version papier –, où certaines critiques sont réévaluées. Le dernier numéro en date, consacré à l'année 2022, est sorti fin avril. François Barge-Prieur insiste : « On ressent mieux un film quand on le comprend bien, et nous offrons au lecteur une analyse, pas seulement une prescription. » Finalement, la philosophie de l'équipe des Fiches du cinéma consiste à se battre pour faire vivre une certaine tradition de la critique et de la mise en perspective de chaque film afin de nourrir le débat. Une notion cruciale chez les cinéphiles.