Le bouddhisme, originaire d’Inde, s’est diffusé au Tibet au 7ᵉ siècle. Le bouddhisme tibétain, à trois étages, suscite des interrogations sur ses textes et ses objectifs…
- Philippe Cornu, ethnologue et tibétologue français
- Isabelle Kalinowski, germaniste, directeur de recherche au CNRS
Bien que né en Inde, le bouddhisme s’est diffusé au Tibet au VIIe siècle, lors de ce que les historiens appellent la "première diffusion", qui s’étend jusqu’au IXe siècle, suivie d’une "deuxième diffusion" à partir du XIe siècle. Le bouddhisme tibétain repose sur une structure à trois niveaux de sagesse, présentés sous forme de "véhicules" successifs. Mais vers où ces "véhicules" mènent-ils ? Quels textes en sont issus ?
La quête de l'éveil au cœur du bouddhisme tibétain
Dans le bouddhisme tibétain, trois grands véhicules sont superposés, chacun apportant une dimension spécifique à la quête de l’éveil. Le premier, "le véhicule du renoncement, avec les aspects monastiques", repose sur le respect du code monastique. Le deuxième, le Mahayana ou "grand véhicule", est "le véhicule de la compassion et de la vacuité", ces deux notions étant inséparables. Enfin, "par-dessus, toutes les méthodes qui font partie du Vajrayana, du grand véhicule du diamant", intègrent les tantras et le Dzogchen, qui conduisent à une approche plus directe de l’éveil. "Les véhicules, c’est un ensemble de textes doctrinaux et de pratiques qui vous mènent d’un point à un autre. C’est-à-dire, ils vous mènent du point où vous êtes confus et harassé par le Saṃsāra vers ce qu’on appelle l’éveil".
À écouter
Variations sur la vie et la mort dans la religion tibétaine
Les Nuits de France Culture
28 min
Weber, sociologue des religions
Isabelle Kalinowski indique que "Weber entreprend son vaste chantier d'études de sociologie des religions, avec une question centrale qui est celle de savoir si on peut retrouver ailleurs qu'en Occident la configuration qui a donné naissance en Occident au capitalisme contemporain". Elle ajoute que Weber met en place une opposition entre "des religions comme le bouddhisme, où l'on reste dans la tension entre une minorité de vertueux religieux et une masse qui n'atteint pas ce degré d'ascèse" et "un courant religieux comme le puritanisme religieux, issu du protestantisme, dans lequel on va faire franchir à l'ascèse les murs des couvents et des monastères pour l'imposer à tous les fidèles et entraîner de ce fait une rationalisation des comportements au-delà des murs des monastères".
Pour en parler
Isabelle Kalinowski, Directrice de recherches au CNRS et directrice du laboratoire Pays germaniques de l’ENS. Germaniste, elle travaille sur l’histoire des sciences humaines et sociales germanophones au début du XXe siècle. Elle est spécialiste de la sociologie religieuse de Max Weber et a traduit plusieurs de ses ouvrages, dont :
- Max Weber, L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme (Flammarion, 2017)
- Max Weber, La domination (La Découverte, 2015)
- Max Weber, Hindouisme et bouddhisme (Flammarion, 2015, première éd. 2003)
- Max Weber, Sociologie de la religion : économie et société (Flammarion, 2013)
- Max Weber, Le judaïsme antique (Flammarion, 2010)
Philippe Cornu est traducteur de tibétain et docteur en anthropologie des religions. Chargé de cours à l’INALCO de Paris (Institut des Langues et Civilisations Orientales) pendant plus de vingt ans, il enseigne depuis 2011 à l’UCLouvain (Belgique) comme professeur d’histoire des religions, de bouddhisme et d’hindouisme. Président de l’Institut d’Études Bouddhiques (IEB) et de l'Institut Khyèntsé Wangpo, engagé dans la pratique du bouddhisme tibétain, il porte ses efforts sur le Dzogchen et les approches de la vie et de la mort (bardos) et cherche à établir un terrain sain de dialogue par la traduction des œuvres bouddhistes philosophiques et mystiques les plus importantes.
Il est l'auteur de :
- Le bouddhisme, une philosophie du bonheur ? : douze questions sur la voie du Bouddha (Seuil, 2013)
- Padmasambhava, Le Livre des morts tibétain, traduit par Philippe Cornu (Buchet Chastel, 2009)
- Dictionnaire encyclopédique du bouddhisme (Seuil, 2006)
- La terre du Bouddha (Seuil, 2004)
- L'astrologie tibétaine (G. Trédaniel, 1999)
- Tibet : le rayonnement de la sagesse (G. Trédaniel, 1998)
- Tibet : culture et histoire d'un peuple (G. Trédaniel, 1999)
- Padmasambhava : la magie de l'éveil (Points, 1997)
- Longchenpa : La Liberté Naturelle de l’esprit, traduit du tibétain et commenté (Paris, 1994)
Pour aller plus loin
Références sonores
- Archive France Culture, L'échappée belle (17/03/95) sur la Montagne Sacrée Kailash
- Lecture par Nicolas Berger d'un extrait de Max Weber, extrait de « Hindouisme et bouddhisme »
- Archive de France Culture de La matinée des autres (02/01/90 )
- Lecture par Anaïs Ysebaert d'un extrait de Livre des Morts tibétain (écrit au 8e-9e siècle par Padmasambhava, trad. fr. Philippe Cornu, Buchet-Castel, 2009)
- Lecture par Anaïs Ysebaert d'un extrait de La Liberté naturelle de l’esprit (écrit par Longchenpa au 14 e siècle après JC, ses dates sont 1309-1364, trad. fr. Philippe Cornu, Seuil, Points sagesses 1994)
- Chanson en fin d'émission : MOINES DE L'UNIVERSITÉ TANTRIQUE DE GYUTO - Guhyasamaja tantra chapitre II
Chroniques
Le pouvoir de la règle 2/4 : Comment savoir ce qui est régulier ?
La régularité repose-t-elle uniquement sur la répétition ? Une règle peut mesurer objectivement, mais aussi imposer une norme. Hume montre que l’expérience façonne nos jugements, mais la répétition seule suffit-elle à établir une règle fiable ? Une norme plus profonde influence-t-elle nos choix ?4 fév.
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3 min
L'équipe
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