Selon la définition du Larousse, les "grands-messes", au sens figuré, sont "une manifestation spectaculaire visant à souder l’homogénéité d’un groupe". Avec ces meetings, nous y sommes. Depuis ce week-end, la campagne présidentielle est lancée.
Que de monde pour assister à ces prêches républicains. On n’utilisera pas le poncif « L’église était trop petite ». Mais on a vu ces foules ne pas pouvoir toute se masser dans les espaces prévus, dans ces salles, ces palais des sports... 40 000 citoyens au total ! Et combien devant les directs sur internet, réseaux sociaux et retransmissions sur les chaînes infos et parlementaires.
15 000 personnes revendiquées samedi par l’équipe d’Emmanuel Macron. Au moins 8 000 à l’intérieur nous dit le journaliste du Monde et 4 à 8 000, selon les sources, à l’extérieur devant des écrans géants. Soit 12 à 16 000. Benoît Hamon a, lui, été investi au Palais de la Mutualité à Paris devant 2 000 militants socialistes, cérémonie ici plus partisane. Pas un meeting à proprement parler. Mais une salle pleine. Idem pour Marine Le Pen et ses « Assises présidentielles », son lancement de campagne, devant 3 000 personnes. Deux autres salles ont été ouvertes pour accueillir le public. Enfin, l’équipe de Jean-Luc Mélenchon revendique 18 000 personnes présentes dans la banlieue de Lyon. 12 000 dont 4 000 à l’extérieur d’Eurexpo. Et comme il s’agissait d’un meeting dédoublé. Ajoutez 6 000 personnes, réparties dans deux salles à Aubervilliers près de Paris, devant son hologramme.
Hologramme : du grec « holos », « en entier » et « graphein », « écrire ». Ecrire en entier. Hologramme signifie « Tout représenter ». Il ne manquait rien du vrai Jean-Luc Mélenchon pour cette première du genre en France. Quand je vous parlais de grand-messe définie comme une "manifestation spectaculaire". On y est. Opération quasi divine. L’ubiquité, l’omniprésence est pour les luthériens, les protestants une réalité. On pourrait aussi citer Jésus à ses disciples : « Allez voir là bas si j’y suis. Et ils y allèrent, et Jésus était là ». Le virtuel Mélenchon avait seulement deux secondes de décalage sur le vrai. Pour cette grand-messe politique dominicale, de chair et d’os, le corps et le sang, Mélenchon a célébré la France, je le cite, « fille ainée - non pas de l'Eglise mais - de la Sécurité Sociale et de l’école laïque ».
Autre meeting d’un candidat réel au programme encore virtuel. Echo de cathédrale, fidèles en adoration aux t-shirts multicolores façon Journées Mondiales de la Jeunesse, appel à la bienveillance envers son prochain… Macron demande de ne pas siffler. « Difficile d’éviter la métaphore christique » jugeait dans un tweet mon camarade Frédéric Says, que je remplace pour cet office matinal cette semaine. Et son mouvement, « En marche ! », la marche, n’est-ce pas le destin du chrétien ? Mathieu Magnaudeix, mon confrère de Mediapart, a lui entendu samedi à Lyon en écoutant Emmanuel Macron « un ton de télévangéliste assoupi ».
Et que dire aussi de Marine Le Pen qui arrive comme à chaque fois sur scène en ouvrant grand les bras, en croix…
Au meeting de celui qui ne veut pas être « l’homme providentiel » Benoît Hamon a montré un chemin et son « futur désirable ». Christiane Taubira venue le soutenir parle, elle, d’un « avenir lumineux ». LU-MI-NEUX ! La lumière n'est-ce pas le signe de la présence divine. C’était hier dimanche, et partout sur les écrans des chaînes infos, la lumière fût !
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