L'histoire a retenu la mort tragique du leader socialiste et militant pacifiste, tué dans un café proche des Grands boulevards, mais à peine le nom de son assassin. Le visage de Raoul Villain figure sur le livre du journaliste Dominique Paganelli "Il a tué Jaurès".
Un livre passionnant qui retrace le parcours et le procès de l'assassin de Jaurès, tué le 31 juillet 1914, à la veille du déclenchement de la Première Guerre mondiale par un inconnu nommé Raoul Villain.
Qui était ce jeune homme de 29 ans, qui a agi seul ?
Réponse de Dominique Paganelli : Raoul Villain était un homme isolé, un fervent catholique. C'est un fervant nationaliste, un homme d'extrême droite, qui était membre de l'Association des jeunes pour l'Alsace-Lorraine, un esprit simple, on a dit que c'était une cire molle, un gars très violent intérieurement, qui sans doute a été influencé par l'ambiance du moment et les journaux réactionnaires du moment qui, à quelques jours de la guerre, s'en prenaient à Jaurès de façon excessivement violente au point de justifier un assassinat si celui-ci advenait, et il y a de fortes chances qu'il se soit imprégné Raoul Villain, de cette ambiance générale pour passer à l'acte.
Raoul Villain désigné non-coupable de l'assassinat de Jaurès
À écouter
Le plus étonnant dans cette histoire, et ce que tout le monde a oublié, c'est que Raoul Villain a été acquitté. Vous le découvrirez en effet en lisant ce livre. Jugé 4 ans et demi après les faits, en mars 1919, Raoul Villain est désigné non-coupable de l'assassinat de Jaurès par les 12 jurés qui délibèrent seuls, sans magistrat à leurs côtés. Il n'est pourtant pas fou, et il a revendiqué ce geste.
Dominique Paganelli décrypte ce verdict incroyable : "Il y a une ambiance de victoire, de nationalisme, de germanophobie qui est telle que le jury représente ce goût de victoire et donc en veut à ceux qui auparavant voulaient la paix et auraient pu les priver de cette victoire contre les Allemands. Les avocats de Villain vont jouer sur cette corde. Les avocats de la partie civile de madame Jaurès ne vont pas du tout comprendre la situation. Ils vont décrire un Jaurès formidable, un demi-dieu, mais le jury n'en avait rien à faire. Ce Jaurès-là, ils n'en voulaient pas parce qu'il les aurait privés de la victoire qu'ils vivent aujourd'hui. Ils le disent puisqu'un juré a dévoilé le secret du délibéré dans un journal. On sait qu'il a tué, mais on estime qu'il n'est pas coupable. En un mot, ils justifient son geste. Ils disent 'Vous avez raison, Raoul vilain d'avoir tué Jaurès'."
Après sa libération, Raoul Villain erre de longues années, et sombre peu à peu dans la folie. Ironie de l'histoire, il meurt assassiné en 1936, à Ibiza, par des anarchistes espagnols. Un acte qui, cette fois, n'avait rien de politique, puisqu'ils ignoraient qui il était !
À écouter
L'équipe
- Journaliste


