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La chronique des arts et de la curiosité — 1870

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Nr. 10 (6 Mars)
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9e Année/

— N" io ~

6 Mars 1870,

DES

Paraissant tous les Dimanches

ABONNEMENTS :

Paris, un an. 15 fr.

— six mois.

UN NUMÉRO : 2 0 CENT,

8 fr.


/POLIT IQJUE T i

ARTS ET DE LA CURIOSITÉ

Comptes rendus & annonces de ventes publiques de tableaux
dessins, estampes, bronzes, ivoires, médailles, livres rarçs, autographes
émaux, porcelaines, armes, objets de curiosité, &ç., &c,

Nouvelles des galeries publiques, des ateliers, ^ Correspondances étrangères
Bibliographie des livres, articles de revues & estampes
publiées en France & à l’Étranger. — Revue des arts industriels
Expositions de Province & de l’Étranger-

RED AC T10 N : Rue Vivienne, 55 j Paris

Paraissant tous les Dimanches

ABONNEMENTS :

DEPARTEMENTS, un air,. 18 fr.

— six mois- . . . , 10 fr.

Etranger, le port en sus.

ADMINISTRATION \ Rue Viv/nne} 55, Paris

NÉCESSITÉ

DE DONNER LE MUSEE DU LOUVRE

AU MINISTÈRE BES BEAUX-ARTS

Le Louvre a laissé vendre, sans les
acquérir, deux chefs-d’œuvre de l’École
française : la Mort du Poussin, par Gra-
net, et le Satyre soutenant une Bacchante,
de Pradier ! Ces superbes morceaux de
maîtres très-insuffisamment représentés
dans nos collections publiques auraient-
ils donc atteint des prix à ce point
extravagants qu’une administration rai-
sonnable ait dû renoncer à pousser plus
loin les enchères? Assurément non. La
Mort du Poussin n’a été vendue que
33,000 francs, quand les OEufs cassés,
de G cesse, arrivaient au chiffre insensé
de 120,000 francs; et le Satyre soutenant
une Bacchante a été adjugé à 10,300 fr.,
—- somme qui ne représente pas le prix
du marbre brut et les frais du praticien,
— quand une simple tète de Greuze mon-
tait à 89,000 francs !

Comment de si énormes fautes ont-
elles pu être commises? Ab! c’est qu’à la
vente de la galerie de San Donato l’ad-
ministration du Louvre n’a point paru,
de même quelle s’était bien gardée de
se faire représenter à la vente Delessert,
où la France perdit la possession d’une
Vierge de Raphaël, payée moins cher
qu’un tableau de Téniers. L’argent lui
faisant défaut, le Louvre se tint à l’écart
de ces deux ventes célèbres sans pouvoir
profiter des occasions heureuses qui se
sont offertes. Et comment pourrait-il
en être différemment, quand un musée
ne dispose que de la somme notoire-
ment insuffisante de 100,000 francs, qui,
répartie entre ses diverses collections,
ne laisse à chacune d’elles que A,000 fr. !
Espérons que cette nouvelle preuve ve-
nant, après tant d’autres, établir l’im-
possibilité pour la liste civile, rivée à une
dotation fixe, d’augmenter nos collections
nationales, déterminera enfin la couronne
à remettre à l’État des collections que
l’État seul peut développer conformément
aux besoins du pays. Chaque année voit
disparaître quelques-unes de nos gale-
ries particulières, et il est plus que temps
de songer à conserver les richesses que
la France possède encore.

En abolissant les corporations et le
droit d’aînesse, la Révolution a multiplié
les morcellements et les aliénations de
patrimoines, et par suite la France est

menacée de voir ses trésors d’art lui
échapper successivement et passer dans
les pays étrangers, où une aristocratie
puissante constituée sur le majorât, et des
institutions publiques richement dotées
les attirent et les retiennent.

Hâtons-nous donc de faire entrer dans
nos musées nationaux ou municipaux les
chefs-d’œuvre qui nous restent, et n’at-
tendons pas, pour agir, que les acquisi-
tions faites par les divers États ou villes
de l’Europe aient amené une rareté
extrême des objets d’art. N’attendons
pas non plus, pour prendre une déter-
mination sérieuse, que l’Amérique, re-
connaissant à son tour la nécessité de se
former des musées, entre elle-même
dans la lice et vienne donner aux choses
d’art une plus-value énorme.

Le jour où les États-Unis voudront pos-
séder des collections publiques ne peut
être éloigné : car il est impossible d’ad-
mettre qu’un [peuple aussi intelligent ne
comprenne pas bientôt que les beaux-arts
moralisent les hommes en les élevant à la
compréhension du beau, que les beaux-
arts font la richesse des nations en déve-
loppant chez leurs industriels le bon goût.
C’est la découverte de cette vérité, déjà
si vieille, qui a certainement motivé la
création du ministère des Beaux-Arts, et
c’est elle aussi qui, nous aimons à le pen-
ser, décidera l’Empereur à faire un grand
acte de patriotisme, en fortifiant un mi-
nistère naissant par l’abandon d’un droit
d’usufruit qui n’ est pour la couronne qu’ une
lourde charge sans avantage réel, et
pour la nation qu’une entrave préjudi-
ciable aux intérêts du pays,

Émile Galichon.

LE MINISTÈRE DES BEAUX-ARTS,

Depuis l’Exposition universelle de Lon-
dres en 1851 , la sollicitude de tous ceux
qui observent le mouvement de la produc-
tion dans les industries de luxe en France
n’a cessé d’être en éveil. A l’avertissement
précis de M. P. Mérimée, aux douloureuses
appréhensions de M. de Laborde, les faits
sont venus se joindre avec une affirmation
redoutable pour la prospérité et l’avenir de
nos industriels. En effet, vingt ans s’écoulent,
vingt ans d’efforts prodigieux intelligem-
ment dirigés contre nous. L’Angleterre crée
par souscription le South-Kensington, et, en
dépit de ses antipathies administratives, le
livre tout façonné à l’État qui lui alloue un
budget national. En Belgique, des écoles se

fondent partout, et aujourd’hui qu’elle en
est abondamment pourvue, elle essaye impa-
tiemment toutes les méthodes, elle cherche
la vérité de l’enseignement professionnel;
elle s’agite, et telle est sa soif de bien faire
que des villes de 20,000 âmes consacrent
annuellement des sommes de 30,000 francs
à l’entretien de leurs institutions. Vienne
construit des palais, fonde des musées,
publie les plus riches collections photo-
graphiées d’œuvres d’art; l’Autriche répand
en tous lieux l’instruction ; la Prusse ,
toute l’Allemagne, rivalisent d’efforts avec
elle; la Russie fonde à Moscou un éta*
blissement important. Et la France reste
spectatrice de cet admirable élan, oublieuse
et railleuse peut-être des efforts qui sont faits
si énergiquement autour d’elle. Il semble
qu’elle croie à l’impuissance de ces travaux
et qu’elle dédaigne de mesurer l’étendue
d’un péril que l’ardeur de ses concurrents
devrait suffire à lui faire redouter. Ses insti-
tutions artistiques suffisent à sa gloire, et
ceux d’entre nous qui réclament chaque
jour à grands cris de vigoureuses entre-
prises pour la lutte dont ils craignent l’issue,
ont l'amer regret de voir jeter des sommes
folles dans la fondation municipale d’un
musée Carnavalet, quand Paris devrait voir
sortir de ses flancs un puissant arsenal de
munitions et de matériaux pour la guerre
industrielle.

L’initiative individuelle qu’il faudrait se-
conder, livrée à elle-même, secoue d’une
main trop faible encore la coupable inertie
d’un grand peuple, et ses tentatives servent
plus l’inquiète curiosité de nos concurrents
qu’elles n’excitent l’ardeur de nos nationaux.
Ses travaux sont suivis pas à pas par les
étrangers, et les réformes qu’elle proclame
nécessaires dans un congrès, les vœux qu’elle
formule ne sont relevés que par nos impa-
tients rivaux.

Hier encore l’intelligente Belgique appli-
quait une mesure que nous réclamons de-
puis bien longtemps chez nous. Elle orga-
nise un service spécial des écoles du dessin
sous la tutelle du ministère, et nous venons
de voir ce pays si jaloux des libertés muni-
cipales, si hargneux contre toute ingérence
de l’administration de l’État, ne pas s’épou-
vanter d’une création ayant une apparence
centralisatrice, de même que nous avons vu
déjà l’Angleterre sacrifier ses propres senti-
ments pour arriver à faire du Kensington
une institution nationale. Au moment où
l’espoir nous revient, car la formation d’un
ministère des Beaux-Arts est une éclatante
affirmation du rôle important des arts dans
les destinées d’un grand peuple, nous, se-
rions bien douloureusement surpris si la
France, persistant dans sa somnolence ou
son indifférence, allait ne pas se mettre,
par une des puissantes secousses dont son
tempérament a gardé le secret, en tête du

mouvement qu’elle doit diriger et non
subir.

Alors commence la tâcha d’un ministère
des Beaux-Arts, qui n’a sa raison d’être que
dans la nécessité de mettre au service de la
nation toutes les ressources dont une bonne
administration peut disposer, C’est à lui de
préparer up mouvement indispensable pour
la satisfaction de tant d’intérêts. S’il se borne
à l’étroite limite de ses attributions actuelles,
il est hors d’état de supporter une critique
aussi modérée que juste, Mais s’il se met
à la tête de cette salutaire agitation qui fé-
conde tous les efforts en Angleterre et en
Belgique, s’il prend en main la surveillance
de tout ce qui touche au développement de
l’éducation artistique, s’il fonde des musées
industriels, s’il se charge des musées et des
manufactures nationales que la liste civile
devrait lui restituer, et si, dans l’ensemble
des institutions qu’il peut créer, il sait gar-
der une sage mesure entre le principe de
tutelle administrative et l’initiative munici-
pale ou privée, il trouvera le concours de
toute la nation pour le soutenir, et noua
n’aurons plus de raison pour être jaloux de
ce qui se fait à Bruxelles, à Londres, â
Vienne, à Berlin, à Moscou, à Munich ef
partout, . :

A, lOUVRJER PE LaJOLAIS. -

L'ART ET L’INDUSTRIE.

Ce n’est pas la première fois que la Chro-
nique s’occupe de l’art et de l’industrie au
point de vue économique. Déjà on a parlé
ici d’émulation établie entre toutes les na-
tions pour ouvrir des écoles et former des
artistes capables de rivaliser avec les nôtres.
Dans les discussions économiques du Corps
législatif, dans les deux camps du libre
échange et de la protection, on a répété
sans cesse que c’est uniquement à la per-
fection et à la distinction de nos produits
que nous devons nos succès; on dit plus, on
déclare que nous n’avons rien à craindre de
la concurrence étrangère, puisque nos ar-
tistes, transportés hors de notre pays, per-
dent même une partie de leur puissance
créatrice. Cette bonne opinion de notre su-
périorité est-elle confirmée par les faits?
Essayons de nous en assurer, en étudiant le
développement des industries où l’art inter-
vient pour une part, quelque minime qu’elle
soit, et celles où l’art n’intervient pas du tout.

Les documents officiels nous permettront
de suivre ces mouvements dans la France
entière : Tableau des douanes, et dans la ca-
pitale en particulier : Enquête sur l’industrie
parisienne.

Ouvrons donc le relevé du commerce de la
France avec l’étranger, et recherchons dans
l’ensemble de nos exportations quelle est
 
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