Par Lorraine Degléty
LE MINISTÈRE DES COLONIES
L'étude de l'architecture administrative peut paraître ingrate. Il s'agit en effet d'étudier des édifices conçus avant tout pour être fonctionnels et souvent dissimulés derrière d'imposantes grilles en fer forgé et d'anciens hôtels aristocratiques de l'Ancien Régime qui servent de résidences aux ministres. Le ministère des Colonies, aujourd'hui ministère de l'Outre-mer, n'échappe pas à cela. Pourtant, son principal intérêt résulte d'une ambivalence essentielle : la fonctionnalité architecturale ne doit jamais faire oublier la fonction administrative, hautement représentative et symbolique. À travers l'étude du ministère des Colonies, menée jusqu'à la Deuxième Guerre mondiale, nous aimerions mettre en évidence le lien étroit qui existe entre l'institution, son histoire, son importance politique et le ou les bâtiments qui l'abritent. Cette ligne directrice nous semble d'autant plus significative que l'administration des Colonies est, sous sa forme au XIXe siècle, relativement récente en quête de légitimité et de reconnaissance.
Une administration en quête d'identité
Une instabilité institutionnelle
Tout au long du XIXe siècle, l'administration des Colonies se caractérise par une quête d'identité tant architecturale qu'institutionnelle. Sous l'Ancien Régime, elle obéit tout d'abord à une logique géographique : l'on distinguait le secrétaire d'État pour le Ponant de celui pour le Levant. Colbert unifie dans une même administration la marine et les colonies. En 1710, au sein du ministère de la Marine, est créé le bureau des colonies, futur sous-secrétariat d'État. Ce grand ministère servit de modèle à tous les régimes successifs et l'administration des Colonies demeura, à quelques exceptions près, sous la tutelle de celle de la marine jusqu'à la Troisième République. A partir de 1881, le sous-secrétariat changea quatre fois de ministère de tutelle avant d'acquérir son statut définitif de ministère autonome en 18941.
1. L'administration des colonies dépendit successivement du ministère du Commerce entre novembre 1881 et janvier 1882 (lorsque l'administration de l'Agriculture devient autonome), du ministère de la Marine (de janvier 1882 à février 1889), à nouveau du ministère du Commerce (de mars 1889 à décembre 1892) puis finalement, du ministère du Commerce et de l'Industrie (de janvier 1893 jusqu'en mars 1894). Le nouveau ministère de tutelle illustre la nouvelle dimension des colonies, perçues à partir des années 1890 comme un instrument de puissance économique.
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