Comme un arbre dans la ville
Le plus vieil arbre de Paris. Le Robinier du Square Viviani planté en 1601. Photo : Dinkum.

Comme un arbre dans la ville

Nature et urbanisation sont-elles de véritables questions lorsque Maxime Le Forestier entonne, en 1972, « Comme un arbre dans la ville… » ?

Déjà, le poète aborde ce thème désormais si cher à l’urbain du XXIe siècle : la place de la nature dans son quotidien. ♫Entre béton et bitume, pour pousser je me débats, mais mes branches volent bas, si près des autos qui fument, entre béton et bitume♫

Il faudra cependant attendre quelques années pour que les acteurs-décideurs de la ville se penchent à leur tour sur la question. L’architecte Jacques Ferrier explique cette aspiration de l’habitant des métropoles modernes : « la nature, même mise en pot, induit un rapport au temps, aux saisons, à la croissance. C’est celui de la nature originelle. Dans une ville toujours prise par la vitesse, il est important d’avoir une formulation d’un rapport au temps qui est celui des êtres vivants. »

La nature, même mise en pot, induit un rapport au temps, aux saisons, à la croissance. C’est celui de la nature originelle.

La science apporte d'autres éléments d'explication à ce besoin de nature. Le cortex préfrontal, centre de commandement du cerveau, sursollicité de nos jours par l'usage d'Internet et des réseaux sociaux, se met au repos quand l'être humain se trouve dans un environnement naturel. Et cela favorise la créativité, la connexion émotionnelle et même l'intuition.

Des chercheurs auraient mis en évidence que le simple fait de marcher régulièrement en forêt entraine une diminution du niveau de cortisol dans le sang, ainsi qu'une baisse de la tension artérielle et une activation du système nerveux parasympathique, induisant une réponse de relaxation. Des études cependant contestées par de nombreux médecins, Français notamment. Au moins tout le monde s'accorde-t-il sur le fait qu'aller se promener en forêt est un moment agréable, mais de là à modifier la sécrétion de cortisol il y a un grand pas…        

Les Japonais ont quant à eux une jolie expression pour désigner les balades régénératrices auprès des arbres : Shinrin-yoku, le « bain de forêt ». Le Shirin-yoku qui fait même partie des préconisations pour une bonne hygiène de vie du ministère de l’Agriculture, des Forêts et de la Pêche japonais !

森林浴 Shinrin-yoku

Dernier argument, si cela est nécessaire : le chercheur américain Robert Ulrich a comparé la convalescence de patients ayant une fenêtre avec vue sur des arbres, avec celle d'autres malades ne voyant que des murs. Pour les mêmes opérations chirurgicales, dans les mêmes hôpitaux, les personnes dont l'horizon était verdoyant ont consommé moins d'antidouleurs, ont eu moins de complications postopératoires et sont rentrées chez elles en moyenne un jour plus tôt que les autres. Indéniablement, l'arbre fait du bien à l'humain.

Cette réflexion sur la nature se trouve considérablement renforcée par les questions climatiques. En ville, les arbres permettent en effet de lutter efficacement contre la pollution et les ilots de chaleur. Leur rôle d'absorption du CO2, est bien connu. La notion d'îlot de chaleur l'est moins. Encore que l’expérience des étés caniculaires démontre on ne peut mieux aux urbains combien l’arbre est généreux en fraîcheur quand le thermomètre bat des records. Et pour aider les habitants accablés par la chaleur, les villes s'organisent. A Paris, une cartographie complète des îlots de fraîcheur constitués d'espaces verts recense notamment les 262 zones arborées ("bois") de la capitale.

Histoire de pousser le curseur en termes de densité d’arbres pour renforcer la puissance de leurs effets positifs, ce sont désormais des forêts urbaines qui sont plantées.

Toujours à Paris, après la place de Catalogne et le bois de Charonne, le parvis de l’Hôtel de Ville est désormais une "forêt urbaine de 2 500 m² d’espaces végétalisés, dont environ 1 000 m² en pleine terre et 1 800 m² d’espaces densément arborés". Mais pour trouver la plus grande forêt urbaine du monde avec ses 100 000 arbres replantés sur 4 000 hectares, il faut aller à Tijuca, dans le nord de Rio de Janeiro. Elle a été réalisée en 13 ans, à partir de 1861. Et aujourd’hui elle accueille un parc public, des aires de loisirs, des lacs, des fontaines…

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Forêt de Tijuca, Rio de Janeiro. Photo : Barazzine da Barra.

L’arbre dans la ville n’est pas une utopie ou une chanson flower power. Qu’il soit unique ou en forêts, il est précieux pour le vivant. Il doit être au cœur de nos préoccupations d'acteurs de l'environnement urbain. Le poète a toujours raison.

 

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