Move-to-Cloud : MyData pour préserver la compétitivité d’Intelcia
Multitude de clients, diversité des activités, opérations complexes réparties sur plusieurs pays et régions, pilotage en temps réel de la performance, suivi des KPI, … Particularité du secteur de l’outsourcing oblige, disposer d’une data platform robuste, performante, et scalable pour absorber la masse croissante de données, est devenu un must pour les majors de l’externalisation. MyData, projet de transformation et de migration de la data d’Intelcia vers le cloud, vient répondre à ce besoin. En une année, c’est près du tiers des use case gérés dans un environnement local qui sont migrés sur le cloud. Interview avec Salma Laaziri , Global Director of Data & Analytics d’Intelcia. Échanges avec Driss Ahmidouch , Director Data & AI Engineering chez Artefact.
- Faisons un flashback. Il y a 1 an, vous avez décidé de faire un move to cloud, d’une plateforme à une autre. Quel était le rationnel à l’époque ? Pourquoi cette décision ? Qu’est-ce qui a justifié ce choix ? Quel était le mindset ?
- Nous utilisions une plateforme depuis 10 ans et celle-ci a été construite à un moment où Intelcia n’avait pas la taille qu’elle a aujourd’hui. C’est une entreprise qui a connu une forte croissance ces dernières années, notamment à travers des acquisitions d’autres entreprises qui ont été intégrées à notre patrimoine data. Avec cette forte croissance, on s’est retrouvés avec un volume de données que la plateforme historique ne pouvait plus supporter. Ce qui avait un impact sur la performance et l’expérience utilisateur. On expérimentait souvent des discontinuités de services qui ont un impact direct sur les opérations ; ce qui a créé un sentiment d’urgence pour changer de solution.
On avait également des enjeux par rapport à nos projections de croissance future. Intelcia ambitionne de continuer à croître ; et cette croissance devrait se faire à travers des acquisitions (croissance externe). Ce qui implique que le volume de données va croître également. Et donc on avait besoin d’une plateforme qui est scalable, chose qui n’était pas le cas sur une plateforme on premise.
Le 3ème challenge, c’est le manque de transversalité. La façon dont la précédente plateforme a été construite générait un traitement des différents use case en silo. Un use case équivaut à un client ou un domaine métier. Et dès qu’on avait besoin de faire des analyses transverses qui vont croiser plusieurs domaines de données, il était impossible de faire cela. Et cela devenait handicapant pour une entreprise de notre taille.
Donc tous ces facteurs ont contribué à initier la réflexion sur la transformation data. Pour répondre aux enjeux de “scalabilité“ et de performance, le move to cloud nous semble être la bonne stratégie à adopter en termes d’architecture. Et on a profité de ce move to cloud pour mettre en place un certain nombre de bonnes pratiques, notamment sur la gouvernance de données.
C’est aussi une opportunité pour nous de remodéliser les use case, dont certains datent de plus de 10 ans. Sur certains de ces use case, nous n’avons réellement pas eu le temps de prendre le recul nécessaire pour tirer les enseignements et améliorer davantage le pilotage de nos opérations.
Cette migration est aussi importante car c’est un levier de transformation sur les volets fonctionnels et métiers. Nous invitons les utilisateurs à repenser leur manière de piloter les opérations pour une meilleure efficience.
- La décision, au début de l’année 2024, d'aller vers le Cloud est une stratégie forte du Groupe. Quand on parle de patrimoine data d’Intelcia, on parle d’une centaine de use case, de données de tous les clients. C’est un gros challenge. À ce titre, quel a été votre stratégie de séquencement de cette migration afin de mieux la contrôler et mieux la réaliser ?
- Pour vous donner quelques ordres de grandeur, Intelcia c’est 40.000 collaborateurs, répartis sur 88 sites dans 19 pays, dans 4 régions. Ce qui veut dire que la quantité de data à gérer, quotidiennement ou en temps réel, est très importante. De là ont découlé 100 use cases qui sont gouvernés et gérés au niveau central, en plus des use case qui sont construits en mode self BI.
Nous avons donc à peu près 100 use case, 1000 dashboards qui sont sur notre plateforme. C'était donc complexe de savoir par où commencer. Forcément, chaque client est important, chaque région est importante. Il fallait donc qu'on se dote d’une méthodologie qui soit claire et qu'on puisse l’expliquer de façon très explicite aux métiers.
En fait, nous avons adopté une priorisation suivant deux axes :
- Point important à noter, il y a eu un changement de plateforme et un changement d'outils de visualisation. J'imagine qu'il y a dû avoir des réticences de la part des utilisateurs qui avaient leurs ways of doing, etc. Quelle était la stratégie pour gérer ces réticences et accompagner les gens pour cette grosse transformation?
- C'est en effet un gros challenge. Je pense que, comme dans tout projet de transformation, on met l'être humain face à l'inconnu, face au changement. On est face à des habitudes de travail qui sont bien ancrées, des outils qui sont utilisés depuis plusieurs années. Donc c'est normal et tout à fait naturel qu'on ait des réticences au niveau des utilisateurs. Je dirais même que les réticences, on ne les a pas eues uniquement au niveau de nos clients ; on les a eues aussi au sein de la team data.
C’est l’exemple des data engineers qui développent depuis plusieurs années sur un certain stack technologique, qu'on a invités à se former sur de nouvelles technologies. Donc, dépendamment de la séniorité, on a eu quelques réticences. Après, il faut expliquer le changement, il faut accompagner et que les gens y trouvent de l'intérêt. Par exemple, pour les data engineers, il fallait leur montrer en quoi ces formations sur des technologies du cloud vont améliorer leur employabilité.
Pour les clients internes, je pense que c'était important de les associer au choix du stack technologique. Chose qu'on a faite à travers un POC sur plusieurs technos. Et pour les démos, on a invité les utilisateurs métiers qui ont participé à l'exercice de scoring des différentes technologies.
Le changement, dans notre cas, a été opéré sur deux volets principaux. Le premier volet, c'est le Move to Cloud. On va transférer des données qui étaient sur un environnement on premise vers un data warehouse sur le cloud. À la limite, cette partie est quasi transparente pour les utilisateurs métiers et ils voient très vite un intérêt à travers l'apport en termes de performance, en termes de temps de réponse.
La deuxième transformation qu'on a menée, qui était plus challenging, c'était le changement de l'outil de data visualisation. On est passé sur un outil qui est cloud-based. Là, on change vraiment l'outil de travail des business analysts, des personnes qui pilotent les opérations. D’où l’importance d'accompagner les utilisateurs dans cette démarche. Nous avons mis en place un programme en présentiel mais aussi en e-learning, que ce soit sur les couches très métiers, donc de data visualisation, mais aussi sur la modélisation de données pour les utilisateurs plus avancés. Un utilisateur qui aime bien la technologie, qui veut se former sur du SQL, sur du Python, sur du Terraform. Ces formations sont également disponibles en ligne pour un accès à distance.
L’autre point important, c'est la constitution d’une communauté data. Parce que, comme je l'ai dit, Intelcia est sur 88 sites. Vu la taille de l'équipe data, on ne peut pas accompagner tous ces sites-là. Il était donc nécessaire qu'on puisse s'appuyer sur des relais locaux qu'on a très vite identifiés. On a, par exemple, des business analysts au niveau des sites, qui sont des personnes très compétentes sur les technologies data et qui vont rapidement se former. Ce sont ces personnes-là qui sont nos relais au niveau du site et qu'on anime aujourd'hui à travers un certain nombre d'événements, que ce soit des webinaires, mais aussi les data cafés qui sont devenus une tradition pour nous.
Ces data cafés se déroulent chaque mois et réunissent les data champions, soit pour présenter un dashboard par exemple qu'ils ont développé, ou tout simplement pour venir poser leurs questions et profiter du knowledge qui est au sein de la communauté. Et je trouve que c'est un mécanisme qui fonctionne bien quand on est sur des transformations dans des entreprises de cette taille-là. Il est compliqué pour l'équipe centrale d'accompagner l'ensemble des utilisateurs ; donc c'est important de s'appuyer sur des relais locaux.
- La décision du Move to Cloud a été prise fin 2023 et le projet a été lancé en 2024. Nous sommes aujourd’hui une année après. Où est-ce qu'on en est dans la migration ?
- Nous avons effectivement démarré en février 2024, et nous avons passé les deux premiers mois sur la mise en place de la landing zone. Nous avons vraiment investi des moyens importants pour mettre en place des fondations Cloud en ligne avec les bonnes pratiques Je sais que c'est quelque chose que beaucoup d’entreprises ne font pas. Et des retours d'expérience qu'on a eus, le manque d’investissement dans ce premier aspect revient plus tard ralentir le projet.
Nous avons migré à peu près 30% de nos projets métiers sur la nouvelle plateforme et on a démarré en fait par la région France. Notre challenge en 2025, c’est de lancer la migration pour les autres régions Espagne, Portugal et US qui étaient sur des technologies différentes, avec des data warehouse différents. Ces migrations vont réellement marquer la mise en place de la plateforme unifiée. Ce chantier est très attendu parce qu’il va nous permettre de piloter de façon uniforme l'entreprise.
Le deuxième gros challenge qui nous attend cette année, c'est la mise en place de use case IA sur la plateforme cloud. Ceux déjà réalisés sur le sujet de l’IA l’ont été sur la plateforme on premise. Ils seront migrés sur la plateforme cloud, et les prochains use case seront directement développés sur le cloud.
- Après une année d’expérience sur ce projet de transformation, quels conseils donnerais-tu aux entreprises qui sont présentes aujourd’hui à cette rencontre, et qui sont dans un processus de réflexion de move to cloud ?
- Nous avons à peine une année de recul sur le sujet, donc il reste encore beaucoup à découvrir. Mais de cette expérience, on peut retenir quelques éléments.
D’abord, le rôle du “Product Owner” dans ce genre de projet est crucial. Dans les deux premiers projets que nous avons démarrés, l'un des product owner n'avait pas beaucoup de temps à allouer au projet, et l’autre était très engagé. Nous avons constaté une dynamique complètement différente sur les deux projets, que ce soit en termes de qualité du livrable, d'adoption du changement, etc. Notre conclusion, c’est que le product owner est réellement la personne qui pousse le changement auprès des users. Son choix mérite donc toute l’attention.
Le deuxième point c'est qu'il faut voir ce move to cloud, aussi bien pour les entreprises qui démarrent ou qui sont au début de cette migration, comme une opportunité pour mieux faire les choses sur plusieurs volets.
Junior Copywriter at Copywriter
4 moisCongrats! 🎉