Les stations balnéaires normandes : de la thérapie au tourisme de masse
il ne me reste plus qu’un petit fils… menacé, lui aussi, de mourir du mal terrible dont les autres sont morts…
Craignant de prononcer le nom de ce terrible mal, elle me l’indiqua, en posant sur sa poitrine sa vieille main gantée de noir…
on trouve en bonne place les bains de mer, ainsi que le confirme la grand-mère :
Quant au choix d’Houlgate, village créé par le tourisme balnéaire quelques décennies plus tôt, il ne doit rien au hasard. Depuis le début du 19ème siècle, sous l’impulsion de Dieppe, la plus ancienne de nos villes de bains, où fut installé en 1822 le premier établissement des bains, la côte Normande, du Tréport au Mont Saint-Michel, a vu la naissance et la croissance, au départ pour des raisons thérapeutiques, de nombreuses stations balnéaires très appréciées par les Parisiens. Certes, il est toujours possible de profiter des bienfaits de l’eau de mer à Paris,Les médecins assurent qu’on peut le sauver… qu’il n’est pas profondément atteint… Ils ont prescrit un régime dont ils attendent beaucoup de bien… Tous les après-midi, Georges devra prendre un bain de mer, ou plutôt, il devra se tremper une seconde dans la mer… Ensuite, il faudra qu’on le frotte énergiquement, sur tout le corps, avec un gant de crin, pour activer la circulation… ensuite, il faudra l’obliger à boire un verre de vieux porto… ensuite, qu’il reste étendu, au moins une heure, dans un lit bien chaud
mais avec les chemins de fer, les plages normandes ne sont qu’à quelques heures de Paris tout en offrant des spécialités comme les bains de mer chauds au varech.
Nous n’avions plus qu’à prendre possession de la villa, une villa spacieuse, élégante, pleine de lumière et de gaieté, qu’une large terrasse, avec ses fauteuils d’osier et ses tentes bigarrées, séparait de la plage. On descendait à la mer par un escalier de pierre, pratiqué dans la digue, et les vagues venaient chanter sur les premières marches, aux heures de la marée montante. Au rez-de-chaussée, la chambre de M. Georges s’ouvrait, par de larges baies, sur un admirable paysage de mer…
Et effectivement, le long de la côte normande, de Houlgate au Tréport en passant par Trouville, les bords de mer se couvrent peu à peu de villas. Pour ceux qui n’ont pas de villa, ou n’en louent pas, on trouve toujours au moins un hôtel de luxe, à Houlgate bien sûr mais aussi par exemple à Cabourg et à Trouville, toutes deux par ailleurs autoproclamées « plus belle plage du monde ». Comme le montrent les affiches et projet d’implantation d’un hôtel à Trouville, ce dernier est toujours bien situé, à proximité de la plage et de la promenade.
Car ce qui fait de la plage et de la promenade des endroits stratégiques pour la société en villégiature, c’est que l’on s’y rencontre et surtout que l’on s’y montre. On y va pour voir et pour être vu, on y prend la pose, on se jauge comme à Saint-Valéry en Caux, où lorgnon et face à main se toisent.
La mode ne touche pas que le costume des promeneurs, elle touche aussi celui, sinon des baigneurs, du moins des baigneuses. En effet, si la vocation thérapeutique du bain n’est pas oubliée, la baignade devient vite une activité de loisir, encadrée par des mœurs parfois assez strictes, parfois moins. Ainsi les roulottes de bain, permettant aux baigneurs, et surtout aux baigneuses, de passer de la plage à l’eau en respectant les règles morales de l’époque,
Mais ce que révèle aussi l’abondance des caricatures sur le thème de la plage, c’est le succès grandissant du tourisme balnéaire, sa démocratisation, qui montre que le loisir a définitivement remplacé la thérapie. Même la famille Fenouillard,
Et même si Claude Debussy peut profiter d’une plage quasi déserte, la représentation caricaturale des plages les montre bondées : l’image que l’on donne ici de la démocratisation passe autant par la foule que par un rapport différent aux critères de l’élégance.
Pour aller plus loin :
La page Gallica consacrée à la Normandie.









