Un musée en soi est une folie. Imaginez : un lieu ouvert au public le plus large, où sont alignées des centaines d’œuvres dans une telle proximité qu’on pourrait les toucher. Le danger est partout. A commencer par la lumière, qui affadit les couleurs jusqu’à parfois les dissoudre. C’est la raison pour laquelle certaines œuvres sont exposées sur un temps limité et qu’aucune n’est éclairée de la même façon. L’air, aussi, est néfaste, selon son degré de température et son taux d’humidité. Ce n’est que tardivement qu’on s’est soucié de maintenir une atmosphère protectrice et stable pour chaque œuvre, selon les matériaux qui la composent.
Reste que le principal danger pour un musée, c’est le visiteur lui-même, en dehors de sa respiration qui, démultipliée, devient corrosive. Son inattention, ou son inconscience, peut causer de graves dommages. L’histoire des musées est émaillée de ces accidents : vase explosé, toile transpercée, siège effondré, statue brisée… C’est une préoccupation majeure dès la création du Louvre. En 1793, un premier projet de règlement indique que « la garde veillera à ce que personne ne touche de la main à aucun tableau, statue, vase ou autre objet quelconque ». Des dispositifs de mise à distance apparaissent très tôt. Ainsi, une gravure de 1801 montre une visiteuse s’appuyant sur un garde-fou à plus d’un mètre d’un tableau. Sans parler des vitrines qui ne protègent pas que de la poussière.
Les règlements de visite, comme celui du Louvre, ont gardé l’interdiction ancienne d’introduire cannes et parapluies, auxquels sont venus s’ajouter tout un tas d’objets présentant « un risque pour la sécurité des personnes, des biens, des œuvres et/ou des bâtiments ». Cauchemar des agents de surveillance d’aujourd’hui, le sac à dos, qu’il est recommandé de tenir à l’avant pour éviter de frotter une toile ou de renverser une sculpture. Comme il n’est pas autorisé « de boire et manger dans les espaces où sont présentées des œuvres », pas seulement pour le désordre mais pour le risque d’attirer des insectes, terreur des conservateurs.
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