« Le Monde » répond à vos questions sur sa ligne éditoriale, la vie de sa rédaction, son actionnariat

Ce tchat est maintenant terminé. Merci pour vos toujours très nombreuses questions, et désolé de ne pas pouvoir répondre à l’ensemble des participants. Le prochain épisode de ce « rendez-vous avec Le Monde » aura lieu le mardi 4 juin. D’ici là, portez-vous bien !

Bonjour Ecolo pas bobo,

Ce jugement vous appartient. Je ne pense pas que nous ayons une ligne éditoriale antinucléaire. La rédaction est elle-même partagée sur le sujet et certains lecteurs s’étonnent régulièrement de la cohabitation dans nos colonnes d’analyses plutôt « pro » et d’autres plutôt « anti »... un peu à l’image de la société française, finalement.

De mémoire, l’un de nos derniers éditoriaux sur le sujet affirmait que le nucléaire n’était certes pas la panacée en matière de sécurité et d’environnement, mais qu’il semblait incontournable dans notre mix énergétique à court et moyen terme. Pas vraiment « anti », comme position...

Bonjour Marie B.,

La rédaction du Monde est mobilisée pour vous informer 366 jours par an (pour cette année) et 24 heures sur 24. Ce qui implique que nous journalistes travaillent aussi le week-end, la nuit et les jours fériés. Notre temps de travail est donc annualisé, et nous respectons évidemment le droit du travail.

Bien sûr, cela n’est pas idéal pour la vie privée, mais nous bénéficions par ailleurs de semaines de congés supplémentaires pour compenser ces contraintes. Et nous avons mis en place il y a six ans un bureau à Los Angeles qui assure l’actualisation du Monde.fr tous les jours de 23h à 7h du matin, heure française. Cela afin d’éviter notamment le travail de nuit, qui est usant pour les salariés et coûteux pour l’entreprise.

Bonjour Erikitt,

Non, il n’existe pas de liens organiques entre nos deux médias. Mais il se trouve que nos lignes éditoriales sont relativement proches et que de nombreux lecteurs du Monde sont également auditeurs de France Inter (et France Culture), l’inverse étant également vrai. D’où sans doute des similitudes dans les sujets abordés dans nos médias respectifs.

Bonjour Peter,

Nous avons pensé à vous ! Nous proposons chaque semaine à nos lecteurs et lectrices le Fil Good, une newsletter 100 % positive.

Et sur l’application du Monde, je vous conseille de cliquer sur l’onglet Découvrir, qui vous donnera accès à une autre vision de l’actualité, moins anxiogène que que celle nous connaissons depuis quelque temps.

Bonjour Wh4t3v3r (vous ne me facilitez pas le travail),

Oui, bien sûr. Les parts détenues par le Fonds d’indépendance de la presse sont incessibles sauf décision unanime du conseil d’administration du Fonds, ce compris le représentant du Pôle d’indépendance du groupe Le Monde. Je vous rappelle que le Pôle d’indépendance, actionnaire minoritaire du groupe créé en 2010 à l’occasion du rachat de ce dernier, rassemble les actionnaires historiques : journalistes et salariés, lecteurs et familles des fondateurs des titres. Le Pôle sera donc toujours en mesure de s’opposer à une cession qu’il ne souhaiterait pas.

Bonjour Aetius,

Tout simplement parce que nous avons considéré que cette façade était en quelque sorte la « signature » de l’immeuble et qu’elle se suffisait à elle-même.

Par ailleurs, la rédaction du Monde n’est que l’une (même si elle est de loin la plus importante par son effectif) des six rédactions du groupe se trouvant dans cet immeuble. Il nous aurait donc fallu inscrire l’ensemble des titres, ce qui aurait fait un peu patchwork, ou bien mentionner « Groupe Le Monde », ce qui ne dit pas grand chose au grand public.

Bonjour Jimmy Changa,

Ce qui est sympa dans ce tchat, c’est qu’on s’y sent toujours soutenu et qu’on en repart gonflé à bloc par la confiance que nous manifestent les internautes. Allez, sans rancune.

Bonjour Makaevitch,

Nous publions chaque année les comptes du groupe Le Monde (vous trouverez ci-dessous l’article consacré à ceux de 2022), qui dégage un résultat d’exploitation positif depuis plusieurs années. Pour 2023, ce résultat sera du même ordre que celui de l’exercice précédent.

Si l’on isole Le Monde du reste du groupe, le journal est proche de l’équilibre, les charges étant couvertes à 68 % par la diffusion payée (abonnements et vente) et à 23 % par la publicité.

Bonjour Julien Legros,

L’entêtement finit presque toujours par payer ! La levée de l’anonymat fait bien partie des pistes que nous étudions actuellement pour améliorer la qualité de notre espace de contributions.

Bonjour Nicolas,

Xavier Niel ne s’en va pas tout-à-fait, même si ses parts du groupe Le Monde (sauf une) sont désormais détenues par un fonds d’investissement. Il continue de siéger au conseil de surveillance de la Société édititrice du Monde et continuera à coup sûr à jouer son rôle d’actionnaire dans les années qui viennent. La différence, c’est qu’il ne pourra plus vendre ses parts si l’envie lui en prenait.

Quant au financement de nos investissements et de nos projets éditoriaux, nous avons toujours considéré que nous avions tout intérêt, en tant que média et que collectivité, à les financer par nos propres moyens, c’est-à-dire en assurant la rentabilité du journal et en utilisant les bénéfices dégagés par celui-ci.

Si nous avons eu recours par le passé aux apports de nos actionnaires dans des périodes difficiles, c’est que nous n’avions pas d’autre choix. Mais quand on revendique une indépendance éditoriale absolue, ce qui est notre cas, il est toujours préférable de ne pas être dépendant économiquement de ses actionnaires.

Bonjour Margaux,

Je vous répondrais simplement : en faisant notre métier le plus honnêtement possible. Les journalistes peuvent avoir un avis mais ils n’ont pas à prendre parti.

Des étudiants me demandent souvent si un média peut être neutre. Ma réponse est non, la neutralité n’existe pas, elle n’est pas humaine, car nous sommes tous le fruit d’un milieu, d’une éducation, et nous sommes tous habités par des biais cognitifs. Mais la recherche de la plus grande objectivité possible est bien un principe de base du journalisme tel que nous le concevons.

Bonjour Valerie,

Oui, c’est bien la rédaction - et uniquement elle - qui choisit les contenus éditoriaux que nous mettons en avant par des alertes. Depuis quatre ans, les membres de la direction de la rédaction sont à tour de rôle chargés de cette tâche, que nous appelons « l’exposition ». Ce qui a rajouté un nouvel élément à notre jargon, et l’on entend demander régulièrement « Qui est d’exposition ce week-end ? »

Pour faire court, deux critères président au choix de faire une alerte : l’importance de l’information et la qualité de l’article. Comme vous avez dû le remarquer il nous arrive d’alerter sur des articles relativement éloignés de l’actualité mais dont nous considérons qu’ils méritent d’être mis en avant auprès de nos lecteurs et lectrices.

Bonjour Professeur Gaston,

En cultivant des sources, ce qui est l’essence même du métier de journaliste politique. Nos journalistes ont de nombreux contacts dans le monde politique, contacts qui gravitent autour des cercles de pouvoir voire y participent. Ce sont par ces contacts que nous obtenons ces informations.

Concernant les textos, si nous avons accès à l’un d’entre eux, c’est forcément qu’un auteur ou un destinataire l’a partagé avec un proche... ou un journaliste de sa connaissance. Car, si c’est à cela que vous pensiez, nous n’espionnons pas les messageries. Ce serait même tout-à-fait contraire à nos principes.

Bonjour LesMotsOntUnSens et Denis,

Les raisons pour lesquelles nous appelons cet épisode dramatique du conflit israélo-palestinien « guerre Israël-Hamas » n’ont rien d’idéologiques mais sont purement factuelles. Les périodes de paroxysme du conflit israélo-palestinien comme celle que nous connaissons aujourd’hui ont toujours reçu une appellation propre. Or cette période a été indubitablement ouverte le 7 octobre par l’attaque du Hamas qui a été suivie par les représailles d’Israël sur Gaza.

Le fait que les civils soient les principales victimes de ce conflit n’empêche en rien qu’il s’agit bien d’une guerre entre Israël et le Hamas. A ma connaissance, ce sont les uniques belligérants, même si leurs modes opératoires ne sont absolument pas comparables.

Bonjour Ouilito,

Absolument. Nous proposons depuis deux ans à l’ensemble de nos salariés de participer à des ateliers de la Fresque du climat ; des ateliers assurés par certains de nos salariés qui ont reçu la formation nécessaire.

Bonjour The Gioi et Désespoir,

Cela devient un classique de ce tchat (peut-être même une facilité, dans ce cas je m’en excuse) dès qu’un sujet se révèle clivant, mais vos deux messages, arrivés quasiment simultanément ce matin, nous montrent que vous aimeriez l’un et l’autre que Le Monde adopte vos points de vue respectifs, qui se trouvent être à l’opposé l’un de l’autre.

Une nouvelle fois, ce n’est pas comme cela que nous concevons notre métier. Nous ne sommes pas là pour défendre un point de vue, même si nous pouvons exprimer des opinions dans nos éditoriaux et analyses, mais pour fournir à nos lecteurs et lectrices l’information la plus complète possible. A partir de là, nous considérons que chacun est assez grand pour se forger sa propre opinion. Même si ce n’est pas la même pour tout le monde !

Bonjour Sophie14,

Le Festival du Monde, lors duquel nous célébrerons le 80^e anniversaire du journal, se tiendra du 20 au 22 septembre. Les inscriptions seront ouvertes à la fin du mois de juin et, si vous ne voulez pas rater la date d’ouverture, je vous conseille de vous inscrire ici à la newsletter du festival.

Je préviens celles et ceux qui voudront s’inscrire pour les visites du siège du journal : il faudra dégainer rapidement, car ces visites se remplissent chaque année à vitesse grand V !

Bonjour Dalila,

La plupart des journalistes travaillent avec des outils classiques sans avoir recours à des messageries cryptées. Mais, pour certains sujets particulièrement sensibles, notamment ceux sur lesquels travaille notre cellule Enquête, il arrive en effet que les journalistes doivent prendre des précautions particulières. Il est même arrivé qu’une salle sécurisée au sein de la rédaction soit réservée pour les journalistes travaillant pendant plusieurs mois sur un dossier dont seules quelques personnes dans la rédaction avaient connaissance.

Bonjour Drtank,

C’est bien pour cela que nous avons amis en place dès le rachat du groupe Le Monde en 2010 un mécanisme unique au monde assurant l’indépendance éditoriale des rédactions du groupe par rapport notamment à son actionnariat. Vous en trouverez le détail dans l’article ci-dessous. Et je vous prie de croire que si un actionnaire venait un jour à tenter de le contourner, cela se saurait aussitôt !