Alice Thomine. Emile Vaudremer (1829-1914). La rigueur de l'architecture publique, préface de Jean-Michel Leniaud. Paris, Picard, 2004, 382 p., 23 pi.
L'ouvrage publié est à l'origine la thèse de doctorat soutenue par Alice Thomine en 1999 à ГЕРНЕ. Présentée sous la forme d'une biographie, celle de l'architecte Emile Vaudremer, elle est bien plus que la simple exposition de la vie et de l'œuvre de ce dernier. Ainsi que le souligne Jean-Michel Leniaud dans sa préface, le genre biographique en histoire de l'art permet de construire une dialectique permanente entre un homme — l'artiste en l'occurrence - et son contexte. C'est de ce dialogue permanent entre l'un et l'autre que s'enrichit la réflexion historique ; bien au-delà de la relation de cause à effet, il met en valeur aussi bien ce que l'homme doit à son époque comme ce qu'il lui insuffle de par sa propre singularité. On sait gré à Alice Thomine d'avoir, de prime abord, versé de l'eau au moulin des « modérateurs » dans l'opposition systématique entre académiques — ou classiques — et rationalistes, ou modernes. Le cas de Vaudremer, issu de l'École des beaux-arts, premier grand prix de Rome, et néanmoins cheville ouvrière du service des édifices diocésains comme de la commission des lycées et collèges mise en place par la Troisième République pour diffuser une architecture rationnelle à l'image de sa politique, est particulièrement opérant en la matière.
Issu d'un milieu de fonctionnaires appartenant à la petite bourgeoisie, Vaudremer entre à l'École des beaux-arts dans l'atelier de Blouet, puis de Gilbert. Élève assidu et méthodique, il se range d'emblée dans la tradition rationnelle de l'architecture française, du Perrault de la colonnade du Louvre à celle que théorise Durand au début du XIXe siècle. Tout en suivant l'enseignement de l'école, il fait l'expérience des chantiers. Grand prix de Rome en 1854, il séjourne avec intérêt en Italie mais ne semble pas chercher à prolonger ce temps d'étude. Dès son retour en France, après un court intermède comme auditeur au conseil des bâtiments civils, il entre au service d'architecture de la Ville de Paris tout juste créé. Là, entre 1863 et 1867, il élève les deux édifices auxquels il devra sa réputation : Saint-Pierre-de- Montrouge et la prison de la Santé.
Si ces deux édifices font indéniablement preuve d'un rationalisme constructif, ils constituent aussi, d'un point de vue esthétique, des morceaux de choix. La prison de la Santé, avec ses élévations en meulière renvoie tout autant, nous semble-t-il, à l'idée du château-fort médiéval qu'à des projets sans doute moins « référencés » historiquement mais au fort impact symbolique : l'architecture de la période révolutionnaire, celle d'un Ledoux par exemple.
LivraLwru à'hittoire àe l'architecture я° <V


















