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1587 en Lorraine

De nombreux auteurs (*) font �tat de la d�fense de Bl�mont contre les re�tres en 1587. Jean-Auguste de Thou, dans son Histoire Universelle, nous donne une relation d�taill�e de cet �pisode du passage en Lorraine des troupes allemandes lors de la derni�re guerre de religion.

(*) Voir
- Les d�fenseurs de Bl�mont - L. GERMAIN DE MAIDY ;
- La grande encyclop�die - Inventaire raisonn� des sciences, des lettres et des arts : cet article comprend une "approximation" puisqu'il indique "La ville fut assi�g�e et prise en 1587 par le duc de Bouillon" alors que les re�tres ne purent s'emparer du ch�teau ;
-
Guide pittoresque du voyageur en France - 1838 ;
- Dictionnaire statistique du D�partement de la Meurthe - 1836 ;
- Le D�partement de la Meurthe - Henri Lepage - 1843 ;
-
Notice de la Lorraine - Dom. Aug. Calmet.


HISTOIRE UNIVERSELLE de JACQUES-AUGUSTE DE THOU
Tome 7 - Livre LXXXVII - 1742

Histoire que Mr. de THOU a suivis dans ce livre :
Relations de Pierre chuppins, m�moires de Claude de la Chastre, Journal militaire de Fab. Dhona


Henri III - 1587

Pr�paratifs des Princes Protestants d'Allemagne en faveur du roi de Navarre

Depuis le retour de Rantzow, Envoy� du Roi de Danemarc � la Cour de France, il s'�toit tenu le 18. de Juillet de l'ann�e pr�c�dente une Assembl�e � Lunebourg, o� se trouv�rent Fr�d�ric Roi de Danemarc en personne, Christian l'Electeur de Saxe, Jean-George, Electeur de Brandebourg, et plusieurs Princes de l'Empire. L�, sur les instances de Jacques de S�gur, qui demandoit qu'en cons�quence de la r�ponse du Roi, pour laquelle il �toit �vident qu'on ne devoit plus esp�rer de voir r�tablir la paix en France, on y fit passer incessamment les secours qu'on avait promis ; Fr�d�ric accorda sur le champ tout ce qu'on vouloit. Pour les autres Princes, dont le Roi retenoit � dessein les d�put�s, ils r�solurent d'attendre leur retour, remettant � prendre leur parti, lorsqu'ils les auroient inform�s de la r�ponse de la Cour de France. Ainsi il n'y eut rien de fini cette ann�e au sujet de cette affaire. Mais lorsqu'apr�s l'arriv�e de leurs d�put�s, ils virent par leur r�ponse qu'il n'y avoit plus de tems � perdre, & que la mani�re haute dont la Cour de France avoit re�u leur d�putation ne leur permettoit plus de dissimuler, ils firent des lev�es dans toute l'Allemagne.

Etat & forces de l'arm�e auxiliaire.

Le rendez-vous de l'arm�e auxiliaire fut marqu� pour le mois de Juillet dans les plaines de l'Alsace. Elle �toit compos�e de huit mille Re�tres, forces de qui �toient partag�s en vingt & un escadrons, & avoient � leur t�te le Colonel Boucq, Nicolas de Bernsdorff, & Fran�ois de Dommartin. Schrogel conduisoit aussi un r�giment de Lansquenets. Les Suisses des Cantons de Zurich, de Berne, de B�le, & des autres Cantons Protestans, formoient avec les Grifons quarante-deux bataillons, qui faisoient vingt mille hommes de pied, command�s par Claude-Antoine de Vienne, Sieur de Clervant. Il en d�tacha quatre mille, sous la conduite de Cugy, pour passer enDauphin�, o� ils p�rirent tous. Jean-Casimir Prince Palatin, � qui les autres Princes d'Allemagne avoient laiss� la conduite de toute cette exp�dition, avoit mis � la t�te des troupes Allemandes Fabien Baron de Dhona, d'une des plus illustres maisons de la Prusse; (1) & parce qu'il y avoit de l'apparence que les Fran�ois & les Allemans ne s'accorderoient pas toujours trop bien ensemble, on lui avoit donn� pour servir � les concilier, Michel de la Huguerie, originaire du pa�s Chartrain. Cet homme, qui avoit appris � ne rougir de rien, avoit autrefois �t� Pr�cepteur � Paris, o� je l'avois vu pendant ma jeunesse. Du reste il �toit vendu � la Ligue ; & s'�toit, dit-on, laiss� corrompre par le Duc de Lorraine, pour trahir les Alli�s.

(1) Mais qui n'avoit, apr�s tout, ni du c�te de la naissance ni du c�t� de l'habilet�, rien de ce qui �toit n�cessaire pour conduire une exp�dition de cette importance ; & parce qu'il dit. MSS. du Roi & de
Ste. Marthe - Duput & Rigault.

Renforc�e par les troupes du Duc de Bouillon

Toutes ces troupes se trouv�rent r�unies le 20. d'Ao�t aux environs de Strasbourg. Ce f�t-l� que le Duc de Bouillon, suivi de Jean-Robert par les Comte de la Marck, son fr�re, vint les joindre � la t�te de deux mille hommes d'Infanterie Fran�oise, & de trois cens chevaux. Le Roi de Navarre l'avoit nomm� G�n�ralissime de l'arm�e des Alli�s, avec ordre cependant de suivre les conseils du Baron de Dhona, & de se conformer en tout � ses intentions, soit par �gard pour son �ge, soit parce qu'il �toit le ma�tre de la meilleure partie des troupes. Le Duc avoit encore � sa suite plusieurs Capitaines exp�riment�s, comme Jean de Chaumont de Guitry, Guillaume Stuart Sieur de Vezines, Fran�ois d'Angennes Sieur de Monlo�et, Philippe de la Fin Sieur de Beauvais la Nocle, les Sieurs de Beaujeu, de la Lobbe, de Chevrolles, & le Baron de Digoines.

Manifeste du Baron de Dhona, en r�ponse d'un Mandement de l'Empereur

L'Empereur Rodolfe, sur les instances du Roi d'Espagne qui favorisoit le parti de la Ligue, & des Princes Lorrains, plut�t qu'� la sollicitation du Roi, avoit address� un Mandement Imp�rial au Baron de Dhona, par lequel il lui �toit ordonn� de licencier ses troupes, vu qu'il les avoit lev�es contre la France, sans son aveu & son autorit� ; & d'abandonner absolument cette exp�dition. Le Baron y r�pondit, tant en son nom qu'au nom des autres G�n�raux Allemans, & des Princes de l'Empire, par un Manifeste qu'il publia, o� il disoit : Que ce n'�toit, ni contre l'Empire, ni contre les loix qui y sont �tablies, ni contre la France, qu'il avoit pris les armes: qu'il n'a voit entrepris au contraire cette exp�dition, que pour la d�fense de cette Couronne, dont certains �trangers vouloient s'emparer, au pr�judice du Roi de Navarre & des autres Princes du sang, � la faveur d'une Bulle du Pape, qui declaroit le Roi de Navarre & le Prince de Cond� d�chus de tous les droits l�gitimes qu'ils avoient au Royaume, comme les plus proches h�ritiers : qu'ils avoient cru ne pas devoir souffrir un pareil attentat de la part du Pape; ni qu'il s'arroge�t ainsi le droit de donner & d'�ter les Royaumes � son gr�, de peur qu'il ne cr�t par-l� se frayer un chemin pour parvenir un jour � troubler aussi la paix, dont la Religion & l'Empire jouissoient alors en Allemagne: que dans cette vue ils avoient, d�s l'ann�e pr�c�dente, d�put� au Roi, pour le supplier instamment, de ne point donner atteinte � la paix qu'il avoit �tablie dans le Royaume par ses �dits, & qu'il avoit solemnellement jur� d'observer ; mais que leurs pri�res avoient �t� inutiles, soit que S.M.T.C. e�t en effet d'autres vues, soit, comme il �toit plus vraisemblable, qu'au lieu d'agir par elle-m�me, elle se laiss�t gouverner par ces perturbateurs du repos public: qu'ils avoient donc entrepris cette exp�dition, pour maintenir dans ce Royaume la paix que leurs soins y avoient d�j� �tablie, & que des hommes turbulens cherchoient � troubler, sous pr�texte de d�fendre la Religion ; pour conserver les h�ritiers l�gitimes de la Couronne dans la possession de leurs droits, & d�livrer la Nation de la tyrannie de quelques factieux avides & violens, qui l'opprimoient : qu'au reste, s'ils avoient n�glig� de prendre les patentes de l'Empereur pour faire ces lev�es, ils avo�oient qu'on avoit quelquefois examin� dans les Di�tes, si elles �toient n�cessaires en ces occasions ; mais qu'il n'�toit pas moins vrai qu'il n'y avoit jamais rien eu de d�cid� l�-dessus & que les loix de l'Empire, sans d�roger aux droits de S.M.I. avoient toujours laiss� sur cela aux Allemans une enti�re libert� : que d'ailleurs il seroit fort injuste, tandis qu'on permettoit aux Espagnols de lever des troupes dans l'Empire, pour ravager impun�ment la ville d'Aix-la-Chapelle, qui en est la capitale, & la basse Westphalie, le Comt� de la Marck, le diocese de Munster, le Duch� de Juliers, & le Comt� de Bentheim, qui font des Provinces situ�es au coeur de l'Allemagne, de vouloir �ter la m�me libert� aux Allemans, pour aller porter la guerre loin de l'Empire. Tout ceci �toit expliqu� plus au long dans le Manifeste. (1)

(1) Qui �toit si bien dress�, qu'on jugea que dans toute cette exp�dition le Baron ne fit rien de plus beau ni de plus fort. MSS. su Roi & de Ste. Marthe, Dupuy & Rigault.

Arrangement que prend le Duc de Lorraine pour sa s�ret�

Au bruit de la marche des Allemans, le Duc de Lorraine, dont les int�rets �toient li�s avec ceux de sa maison qui �toient � la t�te de la Ligue, pr�voyant que cet orage alloit fondre sur lui, & en appr�hendant les fuites, avoit pens� de bonne heure � se pr�cautionner de quelques secours. Ainsi, outre les troupes des Guises, il avoit encore fait lever quatre mille Re�tres, & douze cens Cavaliers Lanciers Italiens, D'ailleurs, par son trait� avec le Prince de Parme, celui-ci s'�toit engag� � lui envoyer douze cens chevaux Franc-Comtois, command�s par Philippe de Croi, Marquis d'Havr�, & six bataillons d'Infanterie Wallone, sous la conduite de Marc de Rie, Marquis de Varambon ; secours �trangers, auxquels il �toit bien tard d'avoir recours.

Force du Roi

D'un autre c�t� le Roi, quelqu'�loignement qu'il e�t pour la guerre, cependant pour ne pas donner � croire qu'il songe�t � m�nager les Protestans, comme les Pr�dicateurs de la Ligue & les �missaires des Guises l'en accusoient continuellement, fut oblig� de se mettre en campagne. Il se rendit donc � Meaux, d'o� il donna un Edit le 23. de Juin, par lequel il ordonnoit aux compagnies de Cavalerie, dont les noms �toient sp�cifi�s, de se rendre � Chaumont en Bassigny pour le 20. de Juillet, & aux autres de se trouver le premier jour d'Ao�t � Gien & � Saint-Florentin sur la Loire. Ce Prince avoit deux arm�es. La premi�re, command�e par le Duc de Guise, devoit �tre compos�e de vingt escadrons de Cavalerie, & de quatre regimens de gens de pied, conduits par les Capitaines de Saint-Paul, Joannes Gascon, Fran�ois de Blanchard Sieur du Cluseau, & C�sar de Balzac Sieur de Gi�. L'autre, dont le Roi s'�toit r�serv� le commandement, devoit agir sur la Loire, pour enfermer le passage aux ennemis.

Entrevue du Roi et du Duc de Guise � Meaux

Ce fut � Meaux que la Reine-m�re, qui avoit �t� la premi�re � conseiller cette guerre, qui la fomentoit encore, & qui souhaitoit qu'elle se termin�t au contentement du Duc de Guise, lui m�nagea une entrevue avec le Roi. L�, leurs entretiens publics ne roul�rent que sur les mesures qu'il faloit prendre pour la conduite de cette guerre. Dans le particulier, le Roi parla aussi des moyens de donner la paix au Royaume, comme l'�crit Claude de la Ch�tre, qui �toit dans les int�r�ts du Duc, & qu'on regardoit comme un des principaux chefs du parti, dans le trait� qu'il publia alors (1) du succ�s de l'exp�dition entreprise contre l'arm�e Allemande ; & il ajoute, que le Duc de Guise r�pondit � ces proposions, qu'il ne pouvoit rien r�soudre lui seul sur cet article, sans avoir consult� auparavant sa famille, ses amis & ses alli�s, ne pouvant & ne voulant point s�parer ses int�r�ts des leurs. Le Roi, � qui la Reine-m�re & les Ministres corrompus qui l'environnoient, avoient fajt esp�rer que cette entrevue leveroit tous les ombrages, & feroit prendre au Duc de Guise des sentimens plus mod�r�s, fut frapp� de cette r�ponse. Elle r�veilla tous ses soup�ons ; & depuis ce tems-l�, il pensa bien moins � repousser les Allemans, qu'� pr�venir le danger dont l'ambition du Duc le mena�oit.
On se s�para donc, le coeur plus aigri que jamais ; & le Duc de Guise, pr�voyant bien que les troupes qui d�voient servir sous lui ne seroient pas pr�tes � marcher � tems, �crivit au Prince de Parme, qui lui envoya sur le champ environ trois cens chevaux, partie Albanois, & partie Italiens. Jean de Montluc Sieur de Balagny, Gouverneur de Cambrai, qui �toit aussi entr� dans la Ligue, lui en envoya encore autant. A la t�te de ces troupes, le Duc qui voyoit que l'arm�e n'�toit pas encore assembl�e, & que le Duc de Lorraine pressoit continuellement de marcher � son secours, s'avan�a vers Toul, & d�-l� arriva � Nancy, le 27. d'Ao�t, o� il re�ut avis par ses espions, que l'Arm�e Allemande se disposoit � passer le mont de Vosge, par le d�fil� de Pfaltzbourg, pour entrer en Lorraine.

(1) Peut-�tre pour rendre le Roi plus odieux. MSS. du Roi & de Ste. Marthe, Duput & Rigault, comme aussi dans l'Edition de Gen�ve de 1626.

Entr�e des Allemans en Lorraine

On avoit d'abord envoy� quelque Infanterie pour garder ce poste, dont la situation �toit fort avantageuse pour la d�fense, & o� il �toit ais� d'arr�ter la Cavalerie, en faisant de distance en distance quelques abattis d'arbres au travers de cette gorge de montagnes. Mais on la rappella ensuite. Ainsi les Allemans n'eurent d'autre peine, que celle de couper des arbres & de se frayer un chemin uni ; & ils y travaill�rent avec tant de diligence, qu'en trois jours ils se trouv�rent au-del� du mont de Vosge, sans avoir eu besoin de tirer l'�p�e, ni avoir rien perdu de leur bagage. Isaac de Vaudrai Sieur de Mouy, les Sieurs de Villeneuve-Cormont, & de Lours, qui commandoient l'Infanterie Fran�oise, les avoient d�j� joints. Le Comte de la Marck conduisoit l'avant-garde; le Baron de Dhona �toit � la t�te des Allemans ; le Sieur de Clervant � la t�te des Suisses ; & le Sieur de Mouy �toit Colonel g�n�ral de l'Infanterie Fran�oise.

Petit �chec qu'ils re�oivent en attaquant de nuit le camp du Duc.

Aussit�t que l'arm�e des Alli�s eut mis le pied en Lorraine, Chr�tien de Savigny Sieur de Rosne, le Sieur de la Routte, & le Baron de Schwartzenbourg, � la t�te de deux Cornettes de Cavalerie l�g�re Allemande, & de deux compagnies d'Arquebusiers � cheval, all�rent au milieu de la nuit donner l'allarme au quartier du Colonel Boucq ; mais soit qu'il e�t mis de bonnes gardes, soit qu'il e�t �t� averti de leur dessein, ils furent repouss�s avec perte. Le Baron de Schvvartzenbourg fut abattu de son cheval, & perdit plus de quarante hommes. Cela n'emp�cha cependant pas que dans le trouble, caus� par l'obscurit�, les Lorrains n'enlevassent aux ennemis un �tendart, que le Duc de Lorraine envoya aussit�t au Roi, lui donnant avis de l'arriv�e des Allemans, & le priant de lui envoyer les secours qu'il avoit promis. Il n'y avoit alors dans le camp du Duc que trois mille chevaux & douze mille hommes de pied, dont il en avoit dispers� quatre mille dans les places des environs de Nancy. Il en garda aupr�s de lui feulement six mille, avec sa cavalerie, fit agrandir Nancy, & fortifia cette ville d'un, foss� & de quelques nouveaux bastions.

Ils prennent Saarbruck & assi�gent Blamont.

Le dernier jour d'Ao�t les Allemans all�rent camper � Saarbruck. Ce poste �toit d�fendu par deux compagnies d'Infanterie, command�es par un Gentilhomme de la Province, qui se rendit sans attendre le canon. L'arm�e fit quelque s�jour dans cet endroit, & se rendit d�-l� en deux journ�es
de marche � Blamont, dont le Gouverneur ne fut pas si l�che que celui de Saarbruck. Car les Allemans s'�tant log�s dans le fauxbourg, quoiqu'ils s'y fussent fortifi�s avec leur artillerie, il fit plusieurs sorties sur eux, & leur tua beaucoup de monde. Le Duc de Lorraine craignoit pour Saint-Nicolas. C'est un bourg des plus c�l�bres de toute l'Europe, & orn� de plusieurs beaux �difices, mais presque tout ouvert, & qui n'est gueres d�fendu que par la Meurthe, qui par ses plis & replis semble lui servir de rempart. Par malheur on pouvoit la passer alors presque par-tout � gu�. Ainsi il y envoya le Duc de Guise avec la fleur de son arm�e. Pour lui ; il resta � Nancy. Sur ces entrefaites, on eut avis que les ennemis marchoient vers Luneville, qui n'est qu'� cinq lieues de Saint-Nicolas. La place d'elle-m�me �toit foible, & avoit seulement �t� fortifi�e � la h�te par le Sieur d'Aussonville, Colonel g�n�ral de l'Infanterie du Duc. Ainsi Claude de la Ch�tre, Mar�chal de camp de l'arm�e Lorraine, eut ordre de s'y rendre, afin de voir si la place pouvoit soutenir une attaque, ou s'il faloit en retirer la garnison. Mais l'ayant trouv�e en �tat de tenir, & le Sieur d'Aussonville dispos� � la bien d�fendre, il revint au camp ; & assura le Duc de Guise, qu'il n'y avoit rien � craindre pour ce poste.

D�lib�ration des Alli�es pour �tablir le si�ge de la guerre.

On avoit long-tems d�lib�r� dans le Conseil des Alli�s, si on feroit la guerre en Lorraine, ou si l'on devoit passer incessamment en France. Le Baron de Dhona �toit de ce dernier sentiment (1) ; & la Huguerie, qui �toit, dit-on, dans les int�r�ts des Princes Lorrains, avoit sc� lui persuader qu'en faveur du voisinage, & de l'alliance qui �toit entre la Lorraine & l'Allemagne, on devoit �pargner cet Etat, & continuer sa route vers la la France, pour se joindre au plut�t au Roi de Navarre, puisque cette arm�e n'avoit �t� lev�e que pour marcher � son secours, Les Fran�ois de leur c�t�, ne manquoient pas de bonnes raisons pour appuyer l'avis contraire. Ils avo�oient que le but de ce grand armement �toit, de secourir le Roi de Navarre & les Protestans : mais ils pr�tendoient aussi, que comme les Guises �toient les seuls auteurs de la guerre qu'on leur d�claroit en France, il n'y avoit point de moyen plus sur pour la terminer � leur avantage, que d'en faire retomber le contre-coup sur le Duc de Lorraine, chef de leur famille, qui apr�s �tre jusqu'alors demeur� neutre dans toutes les guerres pr�c�dentes, venoit enfin d'entrer dans la Ligue dont ils �toient les chefs, & avoit eu la t�m�rit� de prendre parti dans ce diff�rend ; qu'en effet ils �toient certains, que le Roi n'avoit consenti qu'� regret � cette guerre, & qu'il ne souhaitoit rien davantage, que de voir les Guises r�duits eux-m�mes � le prier de la terminer. Or, ajoutoient-ils, on n'en viendra jamais plus s�rement � bout, qu'en faisant de la Lorraine le th��tre de la guerre; puisque les Guises, � la sollicitation du Duc de Lorraine, pour qui la Reine-m�re a toujours tant d'inclination, ne manqueront pas de faire agir cette Princesse, & presseront la fin de la guerre avec autant d'ardeur, que leur envie de brouiller le Royaume leur en a fait souhaiter le commencement. Ils repr�sentoient outre cela, que la Lorraine �toit un pa�s abondant en toutes les choses n�cessaires � la vie, qui n'avoit point encore senti les incommodit�s de la guerre; & que par cons�quent il n'y avoit point d'endroit o� on p�t la faire avec plus de douceur & d'avantage; qu'au contraire, la fronti�re de Champagne & les Provinces de l'int�rieur du Royaume, �taient d�sol�es par le passage continuel des troupes ; ensorte qu'il seroit difficile � une si grande arm�e d'y pouvoir subsister. Ainsi ils concluoient, qu'elle devoit rester en Lorraine, du moins jusqu'� ce qu'on e�t eu d'autres nouvelles du Roi de Navarre, soit par les d�put�s qu'on lui enverrait, soit par ceux qu'on en recevroit; apr�s quoi on pourroit prendre plus s�rement sa r�solution.

(1) C'�tait l'ordre de Casimir ; & la Huguerie &c, MSS. du Roi & de Sainte-Marthe, Dupuy & Rigault

D�g�ts qu'ils font en Lorraine

Ce sentiment pr�valut enfin ; non pas que les Fran�ois fussent, ni les plus qu'ils nombreux, ni les plus accr�dit�s dans l'arm�e des Alli�s ; mais parce que le soldat ha�t ordinairement le danger, comme il aime ordinairement la libert� & la vie commode. Ainsi on ne pensa plus qu'� courir le pa�s & � piller ; & pour se venger du Duc de Lorraine, qui avoit fait ruiner tous les fours & les moulins des environs, afin d'�ter aux Allemans la commodit� de moudre & de cuire du pain, non contens d'enlever tout ce qu'ils rencontraient, ils mirent encore tout � feu & � sang.

Le Duc de Lorraine r�unit ses troupes et un Corps pour s'opposer aux Alli�s

On croyoit que d�-l� les ennemis marcheroient � Nancy, lorsqu'ils tournerent contre Charme & Bayone, ch�teaux situ�s sur la Moselle, o� ils s'arr�t�rent trois jours, � cause des pluyes qui tomb�rent pendant ce tems-l�. Cependant les troupes Lorraines, qui, jusques-l� r�pandues par pelotons dans le pa�s, s'�toient content�es de harceler les Allemans, devenues plus hardies, se r�unirent, & oserent leur opposer un corps d'arm�e. Le Duc de Lorrajne le commandoit en personne, & le Duc de Guise conduisoit l'avant-garde. Le Sieur de la Ch�tre �toit Mar�chal de camp, & en cette qualit� il fut command� pour aller reconno�tre au Pont Saint-Vincent un lieu o� l'arm�e p�t camper avantageusement,
Le Pont Saint-Vincent est un bourg tr�s-peupl�, situ� sur le penchant d'une colline fort haute, au pied de laquelle il s'�tend. Sa partie inf�rieure est environn�e en partie de murs, & en partie de hayes, & arros�e par la Moselle, sur les bords de laquelle on voit les fondemens d'une citadelle, dont les commencemens promettaient beaucoup, & qui est de la d�pendance du Duc de Mercoeur. Toutes les avenues en sont difficiles. sur-tout du c�t� que venoient les Allemans, parce que le chemin se trouve resserr� dans cet endroit entre le Coulon & la Moselle, o� cette petite rivi�re va se jetter � cinq cens pas d�-l�. La droite de ce bourg est domin�e par une colline plant�e de vignes & de hayes, dont le sommet est couvert d'un bois �pais, qui s'�tend jusqu'� Toul. Du reste, ce terrain est fort gras, & les pluyes continuelles avoient rompu tous les chemins; ensorte qu'il fut ais� de s'imaginer que les rivi�res n'�toient gu�ables nulle part.

Retraite hardie du Duc de Guise

Dans cette persuasion, le Duc de Guise marcha vers le Pont Saint Vincent, o� il arriva le 5. de Septembre avec toute l'arm�e Lorraine. II prit avec lui de la Ch�tre, Christophle de Bassompierre, Charles de Balzac Sieur de Dune, & quatre autres Gentilshommes : & s'avan�a pour reconno�tre un endroit, o� l'avant-garde qu'il commandoit p�t camper avantageusement, couverte par la petite rivi�re du Coulon, qu'il ne croyoit pas gu�able alors, afin d'observer de plus pr�s les ennemis. La Cavalerie l�g�re, command�e par Savigny Sieur de Rosne & le Baron de Schwartzenbourg, �toit log�e sur les bords du Coulon, � Poligny & � Accrigne; & le Duc la trouva d�j� sous les armes, parce que l'arm�e ennemie passoit dans le voisinage, & marchoit vers Haro�e, ch�teau apartenant au Sieur de Bassompierre. Cela n'emp�cha cependant pas le Duc, quoiqu'il f�t d�sarm�, de passer le pont qui etoit sur le Coulon, pour aller reconno�tre les Alli�s de plus pr�s. Mais il fut charg� par les Re�tres, qui l'oblig�rent de repasser la rivi�re plus vite qu'il ne l'avoit esp�r�. Les Allemans qui le poursuivoient, pass�rent aussi le pont avec lui, & s'en rendirent ma�tres, aussi-bien que de tout le bagage qu'on y avoit laiss�. Le Duc s'�toit r�fugi� sur le haut de la colline ; mais voyant les ennemis monter apr�s lui, il sentit qu'il s'�toit trop avanc�, pour oser esp�rer de pouvoir se sauver par la fuite, ainsi il rangea sa troupe en bataille, compos�e d'environ trois cens Lanciers arm�s � la l�g�re, & de cent Arquebusiers � cheval.
Les deux troupes n'�toient pas � plus de cinq cens pas de distance l'une de l'autre, s�par�es seulement par un ruisseau, dont les bords �toient escarp�s. Apr�s s'�tre arr�t�es quelque tems � se considerer, le Duc fit charger les deux cornettes de Re�tres qui l'avoient poursuivi, par les Sieurs de Rofne & la Routte, qui les oblig�rent de repasser le pont ; mais l'arm�e Allemande, � la t�te de laquelle �toient trois cens Gendarmes Fran�ois & environ cent Arquebusiers � cheval, venant � paroitre, les Allemans firent ferme ; de nouvelles compagnies de Re�tres accoururent � leur secours, & forc�rent � leur tour les Lorrains de prendre la fuite.
Le Duc de Guise du haut de la colline o� il �toit, contemploit le d�sordre de ses gens, & l'arm�e Allemande marcher droit � lui, sans �tre trop certain du parti qu'il avoit � prendre. Ses amis lui conseilloient de penser de bonne heure � se mettre en suret�. Ils lui repr�sentoient pour l'engager, que son arm�e �toit sans chef; que lui-m�me se trouvoit d�sarm�, mont� sur un cheval assez foible, expos� presque seul � un orage capable de l'accabler; & qu'il �toit � craindre qu'il ne perd�t tout, en s'exposant t�m�rairement : mais le Duc regarda cette retraite comme une v�ritable fuite ; & persuad� que tout le succ�s d'une guerre d�pend de ses commencemens, il prit un parti hardi, & que la n�cessit� seule lui inspira : ce fut de se charger lui-m�me de la conduite de l'arri�re-garde, & de renvoyer � l'arm�e tous les Officiers qui l'avoient suivi, avec ordre de mettre leurs troupes en bataille dans la plaine �troite qui est au pied du Pont Saint Vincent, entre le Coulon & la Moselle, & de se disposer � l'y recevoir dans sa retraite. Il fit ensuite quelque arrangement dans sa troupe; parla Italien aux Italiens, Allemand aux soldats de cette Nation, Fran�ois � ceux qui entendoient cette langue ; & fit si bien par sa pr�sence, que personne n'abandonna ses rangs, & que tous, anim�s du courage m�me de leur Chef, se pr�par�rent � se bien d�fendre au cas qu'ils fussent attaqu�s. Alors le Duc s'�branla, & commen�a sa retraite, toujours poursuivi par l'arm�e ennemie, qui montoit la colline apr�s lui. Mais elle �toit si escarp�e, que les chevaux ne purent arriver jusqu'au haut sans perdre haleine. Il falut donc faire alte lorsqu'on fut au sommet; & cet intervalle donna le tems au Duc de s'�loigner, & de se jetter dans un vallon, qui le deroboit � la vue des ennemis, o� il tourna sur la gauche, & passa le Coulon � un gu�, sans que les Allemans s'en apper�ussent. Il c�toyoit cependant l'arriere-garde des Alli�s, o� �toient les Suisses ; ensorte que les ennemis, voyant les Lorrains marcher de front avec leurs troupes, les prirent pendant quelques instans pour �tre des leurs. Mais ils ne furent par long-tems � revenir de leur erreur. Alors ils voulurent aller les charger ; mais lorsqu'ils furent arriv�s au gu� que le Duc de Guise avoit pass�, quelques Arquebusiers que le Sieur de la Ch�tre avoit post�s dans un moulin voisin, firent un si grand feu sur eux, qu'ils abandonn�rent leur entreprise, pour marcher du c�t� o� on les attaquoit; & les Lorrains de leur c�t� firent une si brave d�fense, & se battirent avec tant d'acharnement, qu'ils donn�rent le tems au Duc d'arriver en lieu de suret�, & le sauverent ainsi aux d�pens m�me de leur vie.
A son arriv�e au Pont Saint-Vincent, le Duc trouva toute l'arm�e en bataille, suivant l'ordre qu'il avoit donn� ; & m�me pour inspirer plus de terreur aux ennemis qui le poursuivoient, le Marquis d'Havre avoit port� sur le penchant de la colline toute la Cavalerie, rang�e en bel ordre. Il y eut ensuite quelques escarmouches au passage du gu�, sans que de tout le jour il se passat rien de plus considerable. Le Colonel Clot pressa inutilement les Alli�s de ne pas perdre une si belle occasion d'en venir aux mains ; de Guitry fit envain de son c�t� tous ses efforts, pour mettre les Allemans dans la n�cessit� de combattre. Le Feld-Mar�chal Rumpf s'y opposa, d�clarant que si de Guitry passoit le ruisseau, il ne le suivroit point, & ne souffriroit point que ses troupes attaquaient l'ennemi de bas en haut. Tous les Officiers Allemans furent de l'avis du Mar�chal, & all�rent prendre leurs logemens dans des villages voisins, o� ils passerent la nuit fort commod�ment. Cependant on d�lib�ra dans le camp du Duc de Lorraine, si on d�fendroit le passage de la rivi�re, o� s'il ne seroit pas plus � propos de reculer, vu la sup�riorit� des forces des Alli�s ; & on jugea que le plus sur �toit, de ne point risquer une action g�n�rale, puisqu'on n'y �toit pas oblig�. Ainsi les Allemans attendirent inutilement le lendemain que les Lorrains parussent en bataille dans la plaine, comme ils avoient fait le jour pr�c�dent.
On fut persuad� que les Lorrains ne prirent ce parti, que sur les avis que leur donna la Huguerie. En effet, s'ils eussent paru en bataille, l'artillerie des Alli�s, qui n'�toit pas encore arriv�e le jour pr�c�dent, & qu'on avoit mise en batterie sur une colline, les auroit tellement foudroy�s, qu'ils n'auroient pu, ni d�fendre le gu�, ni faire retraite, sans s'exposer � �tre taill�s en pi�ces. Mais M. de la Ch�tre pr�tend, que la plus grande faute que fit l'arm�e ennemie, fut de ne pas en venir aux mains d�s le jour pr�c�dent, & de passer inutilement le tems en escarmouches ; qu'elle auroit pu facilement passer le Coulon sur les ponts qui font sur cette rivi�re ; & si elle e�t charg� brusquement les troupes Lorraines dans le trouble o� elles �toient, il lui auroit �t� ais�, au Jugement des Capitaines les plus exp�riment�s, de leur faire un mauvais parti, & m�me de les d�faire enti�rement.
Les Lorrains se content�rent donc ce jour-l� de faire montre de leur Cavalerie, toujours rang�e en bataille sur la colline ; tandis que leur Infanterie �toit port�e dans des vignes, ou derri�re des hayes, & dans des passages embarrass�s, o� il n'�toit pas possible � la Cavalerie ennemie d'aller l'attaquer; & il ne parut pas qu'ils songeaient � d�fendre le passage de la rivi�re. La Ch�tre resta encore quelques jours au Pont Saint Vincent avec six cens Arquebusiers, & quelque Cavalerie, tandis que les Allemans pour se remettre de leurs fatigues, s'�toient r�pandus dans tous les environs, o� ils avoient trouv� des vivres en abondance. Cependant le Duc de Guise remontant la Moselle avec son arm�e, arriva � Challigny ; & dans ce tems-l� m�me il se fit de part & d'autre une entreprise, pour enlever les fourageurs de chaque parti, D�-l� les deux arm�es se remirent en marche ; les Alli�s au travers du Comt� de Vaudemont, & celle du Duc de Lorraine par Toul, c�toyant toujours les Allemans, qu'elle avoit sur la gauche. Enfin, par les intrigues de la Huguerie, cette arm�e, dont l'Infanterie nombreuse qui la composoit, & le bagage qu'elle trainoit apr�s elle, retardoit considerablement la marche, arriva sur les terres de France, & campa d'abord � Saint-Urbain, dans la Principaut� de Joinville, qui apartenoit au Duc de Guise. Voil� ce qui se passa jusqu'au 18. de Septembre.

Le Duc de Lorraine craint pour Joinville

Ce Duc avoit d�tach� quatre cens Arquebufiers, avec ordre de se jetter dans Joinville, & d'y faire ferme, afin de lui donner le tems de marcher en personne au secours de cette place, pour laquelle il avoit craint d'autant plus lieu d'appr�hender, que les Alli�s le regardoient non seulement comme ennemi, mais m�me comme le chef & l'auteur de cette guerre. Cependant il se rendit lui-m�me � Moustier sur Sault, bourg qui n'est �loign� de Joinville que de deux lieu�s, � la t�te de mille Gendarmes, & de douze cens Arquebusiers, apr�s avoir laiss� le Duc de Lorraine � Ligny en Barrois avec le reste de l'arm�e. Mais il survint des pluyes continuelles, qui emp�ch�rent qu'on ne put faire aucune entreprise de part ni d'autre.

Entr�e des Allemans an France

Les Alli�s d�lib�r�rent quelque tems sur la route qu'ils d�voient prendre. Les uns vouloient qu'on march�t vers la source de la Loire, ou qu'on la passat au gu� le plus prochain qu'on pourroit trouver, afin de joindre incessamment l'arm�e du Roi de Navarre. D'autres �toient d'avis de passer en Picardie, � cause des vivres qu'on y trouvoit en abondance, & de la facilit� qu'il y auroit � recevoir de nouveaux secours d'Allemagne. Le Duc de Bouillon de son c�t�, jugeoit plus � propos de s'approcher de Sedan, parce qu'il pr�voyoit que les Lorrains par repr�saille ne manqueroient pas d'assi�ger cette place. Les Allemans eux-m�mes paroissoient �tre assez de cet avis. Cependant il fut enfin r�solu, qu'on marcheroit vers la Loire.
[...]

Le duc de Guise repoussera les Suisses � Vimory (26 octobre 1587), puis les re�tres � Auneau (24 novembre 1587), les emp�chant de se joindre aux forces de Navarre et de Cond�.
 

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