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Revue de cavalerie
Janvier-f�vrier 1921
Faits de cavalerie (1)
RECONNAISSANCE DU LIEUTENANT DE LA ROCHETTE (14 ao�t 1914).
Le 14 ao�t 1914, le 1er r�giment de hussards quittait Lun�ville
� 4 heures, avec mission d'assurer la s�ret� dans la zone de
marche du 16e corps d'arm�e.
Parmi les diff�rents �l�ments d�tach�s par le r�giment, un
peloton du 3e escadron, sous les ordres du lieutenant de La
Rochette, partait en d�couverte avec l'axe de marche g�n�ral :
Marainviller, Thi�baum�nil, village de Manonviller, Domjevin,
V�ho, Leintrey, etc.
Malgr� l'�motion que chacun pouvait ressentir � la pens�e d'un
premier et probablement tr�s prochain contact, la confiance la
plus absolue r�gnait dans tous les coeurs; durant les
quarante-huit heures de leur s�jour � Lun�ville, les cavaliers
du 1er hussards n'avaient-ils pas, en effet, assist� � la
rentr�e de plusieurs �l�ments de d�couverte de la 2e D. C. qui
tous leur avaient tenu les m�mes propos : �� Allez-y carr�ment
quand vous en aurez l'occasion; la cavalerie boche n'existe pas
devant nous. �
Entour� du dispositif de s�ret� habituel, le peloton traverse
les villages de Marainviller et de Thi�baum�nil, d'o� il d�tache
une forte patrouille sur le flanc gauche. Arriv� � Manonviller
vers 5h 30, le lieutenant de La Rochette apprend par les
habitants qu'une troupe ennemie, �valu�e � 20 cavaliers environ,
venait de quitter la localit� il y avait � peine une demi-heure.
La marche se poursuit sur Domjevin et V�ho.

A 1 kilom�tre des lisi�res sud de ce village, la pointe
d'avant-garde re�oit quelques coups de fusil et presque au m�me
instant Un groupe d'une dizaine de cavaliers est aper�u
gravissant les pentes au nord de V�ho et semblant se diriger
vers Emberm�nil ou la for�t de Parroy. A ce moment, une action
engag�e par la 2e D. C. faisait tomber la r�sistance de V�ho; le
lieutenant de La Rochette en conclut qu'il n'avait devant lui,
tr�s probablement, que les quelques cavaliers signal�s �
Manonviller. Mais, au dire des habitants, Leintrey et le bois de
Remabois seraient fortement occup�s. Tandis que ce renseignement
est communiqu� � la patrouille de gauche, qui pr�cis�ment avait
ordre de se porter sur le bois en question et d'en sonder les
lisi�res, l'officier continue sur Leintrey avec la pointe
d'avant-garde, le gros du peloton, sous les ordres du mar�chal
des logis Aymes, suivant � distance et conformant strictement
ses mouvements � ceux de la pointe.
Arriv� � quelques centaines de m�tres des lisi�res sud de
Leintrey, le, lieutenant de La Rochette apprend, par
renseignements de sa patrouille, que le bois de Remabois est
occup�, deux ou trois cavaliers ennemis ont �t� aper�us y
p�n�trant. La situation � ce moment �tait donc la suivante :
deux objectifs � reconna�tre, distants environ de 300 m�tres :
un bois et un village, l'un commandant l'autre.
Le lieutenant de La Rochette se d�cide � effectuer d'abord la
reconnaissance du village. Il se porte sur Leintrey, avec la
pointe d'avant-garde, tandis que le gros du peloton, dissimul�
derri�re un repli de terrain, reste en observation, face aux
lisi�res du bois. Le village est libre, mais � la sortie nord la
pointe est accueillie par une fusillade nourrie provenant des
environs de la voie ferr�e Lun�ville-Avricourt.
Quelques instants apr�s, le lieutenant aper�oit � la jumelle,
entre la voie ferr�e et la route Leintrey-Emberm�nil, de
l'infanterie d�ploy�e, les hommes dissimul�s par groupes de
quatre ou cinq derri�re les gerbes de bl�. L'effectif est �valu�
� une compagnie.
Laissant un poste d'observation � la sortie nord du village, le
lieutenant de La Rochette revient au gros du peloton dans
l'intention d'envoyer un renseignement et d'effectuer ensuite la
reconnaissance du bois; il �tait environ 10 heures.
A peine la r�daction du renseignement �tait-elle commenc�e que
l'alerte est donn�e par une vedette : �� A vous, mon lieutenant,
les voil� ! � Effectivement, de la corne nord-est de Remabois et
� 150 m�tres du peloton, d�bouchait, au galop allong� et en
colonne par un, une patrouille de 12 cavaliers.
L'heure tant d�sir�e de la rencontre a enfin sonn�; les ordres
Sont les suivants : �� Mar�chal des logis Aymes, restez avec
votre escouade en observation face au bois. 1re et 2e escouades
avec moi; pour l'attaque, chargez ! �
L'ennemi, voyant les hussards d�boucher sur son flanc gauche et
lui barrer ainsi l'entr�e du village de Leintrey, fait un
crochet au sud, dans la direction des prairies du ruisseau de
Leintrey. Parti � pleine allure, le peloton saute le chemin
creux de V�ho-Leintrey; quelques chutes se produisent, mais
d�j�, avec les mieux mont�s, le lieutenant de La Rochette a pu
rejoindre la reconnaissance ennemie.
Un combat furieux s'engage, plusieurs cavaliers botte � botte,
le mar�chal des logis Benoit, en particulier, s'accroche �
l'officier commandant le d�tachement. Bient�t les cavaliers
boches, arriv�s les premiers dans les prairies mar�cageuses du
ruisseau, s'embourbent, tombent, ou ne peuvent avancer; l'�lan
est trop violent pour que les suivants puissent se reprendre et
s'orienter vers une nouvelle direction; toute la reconnaissance
se trouve ainsi bloqu�e en quelques secondes. Cet incident
permet aux retardataires du peloton de rejoindre et la m�l�e
commence, Acharn�e; sabres et revolvers font rage.
Au bout de deux ou trois minutes, le combat cesse et le
ralliement s'effectue ; le r�sultat de la rencontre �tait le
suivant :
Du c�t� allemand : 6 tu�s, 4 bless�s gri�vement, dont l'officier
commandant, du grade de lieutenant; 6 chevaux captur�s. Du c�t�
fran�ais aucune perte, quelques contusions insignifiantes.
La reconnaissance du lieutenant de La Rochette avait eu affaire
� une patrouille de chevau-l�gers bavarois d�tach�e par un
escadron qui avait bivouaqu� le 13 au soir dans le bois de
Remabois et s'�tait retir� le 14 au matin vers Remoncourt.
D'apr�s les d�clarations d'un prisonnier, un bataillon �tait
d�ploy� au nord de la voie ferr�e Lun�ville-Avricourt, avec
quelques �l�ments au sud de cette ligne � 800 m�tres de Leintrey.
(1) Rapports officiels, adress�s par les chefs de corps.
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