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2� Les cr�ations de la noblesse :
Noblesse mosellane
La soci�t� romane eut sa noblesse, peu nombreuse, il est vrai, mais puissante et riche. Issue des Leudes austrasiens, cette classe privil�gi�e avait particip� au gouvernement des pagi, et ses membres portaient les titres de ducs, comtes ou vou�s. La plupart se signal�rent par leurs fondations en faveur des �glises et des monast�res. Ils rendirent au peuple. le service de le d�fendre par les armes, de lui procurer des abris en cas de danger, de lui b�tir m�me des �difices communs, sanctuaires, hospices ou moulins. Il serait injuste de m�conna�tre de telles oeuvres, qui t�moignent un sinc�re bon vouloir et qui se prolong�rent pendant de longs si�cles.
Peu � peu, cependant, cette noblesse, pieuse au point d'entreprendre de fr�quents et longs p�lerinages jusqu'aux lieux-Saints, prit go�t aux aventures et devint turbulente, querelleuse, batailleuse. Ses �quip�es de ch�teaux � ch�teaux seront souvent de brigandages, mais n'est-ce pas parce que les motifs nous en �chappent.? Ce sont, du moins, des prouesses qui nous �tonnent par leur audace.
Deux sortes de noblesses, diff�rentes d'allure et m�me de langue, vont intervenir dans notre histoire : nous les envisagerons l'une apr�s l'autre.
La premi�re fut pr�cis�ment mosellane. Etant plus proche de nos anc�tres, on pourrait la croire plus m�l�e �
leur vie; elle leur fut, au contraire, plus �trang�re. On sait que le duch� de Haute-Moselle, nomm� aussi Mosellane, fut constitu� en 958. Il fut gouvern� par trois princes appartenant � la famille de Bar-Ardennes, connus sous les noms de Fr�d�ric Ier (959-978), Thierry Ier et Fr�d�ric II (978-1033). A leur dynastie se rattachent les comtes de Luxembourg et de Salm, dont nous aurons � parler. Tous v�curent au loin, occup�s � constituer le comt� de Bar. Ils b�tirent la forteresse de Mousson. Les annales du temps sont remplies de leurs intrigues aupr�s des. empereurs allemands, pour accaparer les �v�ch�s de Metz et de Verdun. Leur habilet� cependant ne r�ussit pas � garder la supr�matie sur le pays, puisqu'ils durent c�der la place � G�rard d'Alsace, devenu le duc h�r�ditaire de Lorraine, en 1048 (5).
Il y eut une seconde dynastie de Bar, dite : Bar-Montb�liard-Perrette, dont le point de d�part fut le mariage de Sophie, la derni�re h�riti�re de Fr�d�ric II, avec son cousin-germain, Louis de Montb�liard, souvent appel� aussi Louis de Dabo (6) : Cette famille eut de glorieuses destin�es
dans le Jura. Un de ses fils reprit le nom de Thierry 1er et mourut � Autun, en 1105, apr�s avoir �pous� Ermentrude de Bourgogne, ni�ce du pape Calixte II. Mais plusieurs de ses enfants, en revenant dans nos contr�es, furent tr�s m�l�s � la vie de nos anc�tres. Il est bon de les citer tous, en attendant qu'ils se retrouvent au cours de notre histoire (7) :
1� Thierry II, comte de Montb�liard, +1182; 2� Fr�d�ric Ier, comte de Ferrette et d'Amance, + 1168; 3� Renaud Ier, dit le Borgne, comte de Bar, de Mousson, de Briey, + 1163; 4� Etienne de Bar, �v�que de Metz, + 1163; 5� Louis-le-Crois�, comte de Mousson, + 1102 ; 6� Agn�s, �pouse de Hermann II, comte de Salm, dite aussi Agn�s de Langstein; 7� Norine, �pouse d' Adalbert, comte de Moersberg; 8� Gunthilde, premi�re abbesse de Biblisheim, + 1174.
Le Chaumontois eut aussi ses nobles, mais sur eux plane un oubli presque complet. Les huit g�n�rations de ses comtes descendaient de saint Arnould, �v�que de Metz. Leur nom est � peine connu : Ansigise, P�pin d'H�ristal, Drogon, Arnould Ier, Agnoralde, Hugues Ier, Hugues II et Arnould II. Ce dernier mourait � vingt ans, en 950. Sa grand'm�re, veuve de Hugues Ier, recueillit tous ses biens et en fit la dotation du prieur� de Lay-Saint-Christophe.
D'autres grands ne furent connus que par des g�n�rosit�s pareilles : Odowin, le fondateur du prieur� de Froville (8); Bencelin, fondateur du prieur� de Land�court (1100); Hugues, b�n�dictin de Moyenmoutier, fondateur du prieur� de L�omont (1095) ; Cun�gonde, dame de Viviers de Richecourt, insigne bienfaitrice de l'abb� Antoine de Senones.
Les ch�telains de Deneuvre furent, � leur tour, des hommes dignes d'�tre mentionn�s. Parmi les premiers figure Herbert, qui mourut en 1076. D. Belhomme, le chroniqueur de Moyenmoutier, l'appelle : vir strenuus, homme vaillant et noble., Il montra sa bravoure, en 1073, en repoussant. l'assaut injustifi� qu'infligeait �, sa citadelle G�rard de Vaud�mont, le pillard bien connu. Il prouva �galement sa pi�t� en laissant, en mourant, le quart de son alleu au monast�re de Moyenmoutier, pour y avoir sa s�pulture. De bonnes raisons le font passer pour le fondateur, ou tout au moins le bienfaiteur, d'Herb�viller (Herbert� villare). Son fils Gu�ry. lui succ�da dans sa charge jusqu'en 1112. Celui-ci eut. � subir un nouveau si�ge en 1078, mais fut moins heureux que son p�re. C'�tait Thierry; duc de Lorraine, qui faisait la guerre � H�rimann, �v�que de Metz, et s'effor�ait d'entraver les progr�s de sa puissance � travers le

Clich� du �� Pays Lorrain �
Turquestein - La Roche Des F�es
Chaumontois. Deneuvre fut pris et d�vast�. Les environs furent ravag�s jusqu'� Epinal. Cependant le duc fut forc� de reconna�tre ses torts; il rendit, un an plus rani, la ville prise � l'�v�que et fit promettre � ses sujets de ne plus d�truire, � l'avenir, les moissons, les vignes et les arbres fruitiers, de ne plus incendier les maisons et de ne plus maltraiter les personnes inoffensives. Il aurait d� donner l'exemple le premier et s'abstenir de tous ces d�sordres de la guerre. La ch�tellenie restaur�e ne tarda pas � passer sous la domination effective de Senones. Elle prosp�rait et se montrait fid�le aux �v�ques de Metz, quand de nouvelles querelles arm�rent le duc de Lorraine, Simon Ier, contre le pr�lat (1118).
Deneuvre fut alors assailli une deuxi�me fois par les Lorrains et d�fait malgr� les efforts du comte Albert, son ch�telain. Les vainqueurs gard�rent cinq ans leur conqu�te, jusqu'� l'arriv�e d'Etienne de Bar, l'�v�que intr�pide qui, avant de s'installer dans son immense dioc�se, dut en reprendre toutes les places, l'une apr�s l'autre, et par la force des armes. Ainsi reconquis, en 1122, apr�s Homhourg, Mirebeaux, Apremont, Faulquemont, Epinal, le ch�teau de Deneuvre fut rattach� au Temporel de l'�v�ch� de Metz et re�ut, comme ch�telain, un seigneur que nous retrouverons : Vidric; mari� � G�pa et p�re de Beaudoin et de Rambaud.
La d�fense et l'organisation devenaient chaque jour : plus n�cessaires. On crut r�pondre aux besoins du moment en �rigeant des ch�teaux de divers c�t�s. C'est l'�poque o� fut construit, sur un piton qui domine Raon-l'Etape, le ch�teau de Belroward ou Beauregard, que l'on attribue � un vou� de Vezeval et de Moyenmoutier, nomm� Othon, fr�re de Roland de Badonviller. Ainsi s'accusait la vitalit� de la noblesse mosellane.
Noblesse alsacienne
Dans le m�me temps, une noblesse alsacienne trouvait le moyen de se m�ler plus directement aux affaires de notre contr�e. Issue d'Etikon, p�re de sainte Odile, tronc. vigoureux qui se ramifiait � l'infini dans les vieilles demeures d'Eguisheim, de Dagsbourg, d'Andlau, elle d�bordait des burgs pittoresques, dont les ruin�s couronnent encore les flancs escarp�s de l'autre versant vosgien, et offrait � chaque g�n�ration une nouvelle liste de G�rard, d'Ad�lard, d'Eberhard, de Liutfried, de Volmar, qu'il est parfois difficile d'identifier (9). Toute cette jeunesse s'en vint chercher fortune dans nos pays mosellans, attir�e par les richesses intellectuelles qu'offrait le milieu toulois, ou choisie pour son renom de pi�t� et de vaillance, par les �v�ques de Metz, afin de servir � leur d�fense. C'est ainsi que vint � Toul, amen� par sa m�re � l'�ge de six ans, l'illustre Brunon de Dagsbourg (1008). On sait les progr�s qu'il y fit dans les
�coles �piscopales, en compagnie des nobles mosellans. On sait aussi qu'il fut �v�que de cette ville (1026-1049), avant de ceindre la tiare pontificale (1049-1052), sous le nom de L�on IX.
Toute une dynastie de G�rard, proche parente du pr�c�dent, devint de la m�me fa�on le bras droit des �v�ques qui se succ�d�rent � Metz de 1005 � 1048. On lui attribue la cr�ation d'une ligne de d�fense tr�s opportune de ce c�t� des Vosges, constitu�e par plusieurs forteresses fameuses. Nous avons cit�; Arrenstein; pr�s de la Petite-Pierre (Lutezelstein); Veverstein ou Veherstein, entre Berthelming et Sarrebourg, Turquestein, vers les sources de la Sarre. Pour prouver la commune origine de ces citadelles est-il besoin d'invoquer d'autres signes que leurs ressemblances de nom, de structure, et d'emplacement m�me sur des rocs �tranges, comme celui de Dabo ? Ces forteresses, nous dirions volontiers ces nids d'aigles, rest�rent, pendant de longs si�cles, les boulevards du Temporel messin. Les seigneurs � qui la garde en fut confi�e avaient seulement qualit� de ch�telains ou de vou�s. Tel fut G�rard Ier d'Alsace, qui �tait � la fois comte de Metz et vou� de Turquestein, quand Berthold de Toul lui confia l'avouerie de Saint-Sauvent' (1010). Son successeur en cette qualit� fut Albert ou Adalbert Ier, que certains disent un fils et d'autres son fr�re. Laurent de Li�ge, auteur d'une histoire des �v�ques de Verdun, l'appelle : �� le tr�s noble Albert, comte de Longui castro�. Il �tat bien tel, en effet, aux Lieux-Saints, en 1026, et en Italie chez la comtesse Mathilde, sa parente. Cependant ce titre de �� comte de Longui-castro � a pour nous un int�r�t particulier : il nous permet de croire qu'il fut l'un des premiers possesseurs, sinon le cr�ateur du ch�teau de Langenstein, ou Langstein, d�nomm� plus tard Pierre-Perc�e. M. Schaudel a cru pouvoir identifier ces deux noms : Longui-castro et Langenstein et son hypoth�se est fond�e (10). Albert, devient ainsi pour notre histoire un personnage important. On sait qu'� sa mort (1036), ses nombreux enfants occup�rent des postes brillants dans le pays messin.
G�rard II fut vou� de Senones et de plusieurs autres monast�re:.; il accompagna saint L�on IX dans les voyages qu'il fit dans nos parages entre 1046 et 1048. Adalbert II, cr�� duc de Mosellane en 1047, fut massacr� l'ann�e suivante par Godefroy-le-Barbu. Ce meurtre appela son neveu, G�rard III, � prendre sa succession, ce qui permit � celui-ci de devenir le premier duc h�r�ditaire de Lorraine, en 1048.
Cependant, Adalbert II, priv� de descendance masculine, laissait une fille, Mathilde, qui �pousa un Folmar de Lun�ville. Par ce mariage, on s'expliquera facilement que Langenstein et plusieurs autres possessions situ�es dans le Bl�montois se soient trouv�s au pouvoir des Folmar, comme nous le dirons plus loin.
Comme dans la Mosellane, la noblesse d'Alsace s'est montr�e remuante et belliqueuse et telles de ses aventures � travers les Vosges pourraient figurer � c�t� des prouesses racont�es dans la chanson de
Roland. Des �chos plus ou moins fid�les nous en viennent encore, transmis par les l�gendes de la montagne. Ainsi les angoisses inflig�es � la c�l�bre comtesse Helvvige, m�re de saint L�on IX. Son mari, Hugues IV d'Eguisheim, faisait campagne, comme un intr�pide paladin, pour l'empereur d'Allemagne et ses alli�s de Luxembourg contre Thierry de Bar, �v�que de Metz. Son exp�dition dura cinq ans (1012-1017), pendant lesquels Heilvige se crut plus en s�ret� dans son ch�teau paternel de Dagsbourg. Qui ne
conna�t cette demeure a�rienne qui semblait d�fier toute attaque ? Or, un certain jour, l'alarme est jet�e dans le castel solitaire; des bruits mena�ants montent jusqu'au roc �lev�. Ce sont les gens de l'�v�que de Metz qui essayent un assaut. L'escalade est impossible; mais, si la place est cern�e, elle devra bient�t se rendre, car elle n'a d'eau que celle qui tombe du ciel. De fait, pour ne pas mourir de soif, la ch�telaine prend le parti de fuir avec sa maisonn�e. La nuit cache son d�part et les sentiers des bois l'am�nent � Turquestein qui peut offrir un refuge assur�.
Mais les brigands ne se contentent pas d�valiser le ch�teau abandonn�, c'est la fugitive qu'ils veulent comme une proie lucrative, et ils ont bient�t d�couvert sa retraite. Un m�me blocus recommence, bient�t suivi d'une capitulation pareille. Cette fois encore, Heilvige trompe la surveillance, s'enfu�t avec peu de personnes et ses filles en bas et vient frapper, toute haletante, aux du monast�re de Moyenmoutier. La course avait �t� longue. Sans autres bagages que son livre d'heures, la comtesse fut avec grande charit� et demeura plusieurs mois chez les la paix conclue, �tant l�, disent les chroniques, plus en s�ret� sous protection des saints que sous celle des hommes (11). Le danger pass�, la sainte ch�telaine rejoignit son �poux et tous deux restaur�rent leur logis d�vast� pour recevoir leur fils Brunon, l'�tudiant de Toul, �g� de 15 ans, qui revenait, en 1017, leur accorder quelques mois de pr�sence, avant d'�tre l'ornement de la ville par son savoir et ses vertus. On sait que les dignes parents, v�n�r�s comme des saints par les contemporains, ne virent pas leur fils �lev� au souverain pontificat. Tous deux moururent avant 1045; Heilvige s'�teignit en 1037, suivant Mabillon. Ils furent inhum�s dans le clo�tre de Volfenheim, pr�s d'Eguisheim, qu'ils avaient auparavant fond�.
Plusieurs autres �pisodes du m�me genre seraient � citer, s'il n'�tait n�cessaire d'�tre court.
Les Folmar de Lun�ville
Cette souche alsacienne si m�ritante eut parmi ses nombreux rameaux une famille Volmar (en roman Folmar), qui joua dans notre histoire un r�le capital et qui m�rite une �tude attentive. Les rejetons qui porent ce nom apparaissent � chaque g�n�ration; ainsi est-il malais� de souder cette dynastie � l'arbre commun. Avec les meilleurs g�n�alogistes, nous donnons le nom de Folmar 1er � celui qui appara�t, au d�but du Xe si�cle, pr�pos� au Sargau (Pagus sarravensis) et � l'Albechove (pagus Albensis). La qualit� de comt�, dont lui et ses descendants furent rev�tus, leur permit de s'implanter dans notre r�gion et d'�chelonner, tout le long de la voie qui m�ne du Donon au L�omont, une multitude de possessions dont ils firent leur apanage, group� autour de Lun�ville, leur capitale. La preuve en est dans les donations qu'ils feront plus tard aux monast�res fond�s par eux, Saint-R�my de Lun�ville et Hugoncourt en Alsace. Ces possessions comprennent Raon-l�s-Leau, Fr�monville, le Blanc-Mont, Amenoncourt
(12), Remoncourt, Parroy, H�nam�nil, V�ho, B�nam�nil, Pessincourt pr�s d'Einville, Adom�nil sous le L�omont
Folmar Ier est donc r�put� le fondateur de la dynastie des comtes de Lun�ville, il fut aussi bailli de Tr�ves et mourut en 929. De sa femme, Richilde, il eut trois fils : Etienne, qui fut �v�que de Toul (994-995) sous le nom d'Etienne de Lun�ville, mort accidentellement � Bonmoutier, au cours d'une visite pastorale, le 20 d�cembre 995
(13), Folcuin d'Amance, Folmar II, comte de Metz, Lun�ville et Sargau en 970,comte du Bliesgau en 982, mort en 995. Berthe, femme de ce dernier, lui donna Richilde d'Amance, femme du duc de Lorraine, Thierry Ier, et Folmar III, dit le Vieux, qui fonda l'abbaye de Saint-R�my de Lun�ville, vers 999, tandis que son proche parent, V�her, ou Vuher, ou m�me Vernher d'Alsace, fondait une abbaye semblable � Hugoncourt, non loin de Vill�
(14).
Ce Folmar III fut tr�s c�l�bre. Comte du palais �piscopal de Metz (1012-1026), il re�ut le titre honorifique de Vou� des Eglises et il mourut en 1033. Mari� � Getberge, fille de Godefroy Ier de Verdun, il en eut deux fils, appel�s par les contemporains comtes catholiques des Fran�ais, dont l'un, Godefroy Ier de Lun�ville, v�cut surtout � la t�te du Bliesgau, o� l'appela l'�v�que Thierry II de Metz (1033), et l'autre, Heymann, fut plus m�l� � la vie de notre r�gion o� il organisa plusieurs manses rurales qui portent son nom
(15). La descendance de ce dernier est rest�e inconnue. Peut-�tre �clairerait-elle le myst�re qui plane sur la parent� rapproch�e, qui est d�s lors certaine. mais inexplicable, entre les familles de Lun�ville et de Parroy. Au contraire, la descendance de Godefroy, son fr�re, mari� � Judith de Luxembourg, se poursuit dans la personne de Folmar IV de Lun�ville et de Godefroy II, qui fut probablement la souche des Folmar de Castres ou Bliescastel.
Les moines install�s � Saint-R�my par Folmar-le-Vieux furent, parait-il, bient�t � court de ferveur et durent �tre licenci�s pour faire place � des religieuses ou moniales, que gouverna d'abord Ad�la�de, puis Uda, v�n�rable nonne qui �tait soeur d'Adalb�ron III, �v�que de Metz. Elles adjoignirent. � leur monast�re une Maison-Dieu hospitali�re. Sur les entrefaites mourut le fondateur. Pour honorer sa m�moire et lui obtenir des pri�res, les deux fils d�tach�rent de leur patrimoine commun des parcelles qu'�num�re une charte dat�e de 1034 et les donn�rent � Saint-R�my. Ce sont : 1� le village de B�nam�nil avec son �glise; 2� celui de Fr�monville avec son �glise; 3� quatre manses � Vihoth avec son bois
(16); 4� une chapelle � Pessincourt, village d�truit pr�s d'Einville; 5� Adom�nil avec toutes ses d�pendances. Ces donations furent Confirm�es par une bulle d'Innocent II, en 1140, mais alors les religieuses n'�taient plus � Saint-R�my. Les chanoines r�guliers de Notre-Sauveur, qui les rempla�aient, devaient garder l'abbaye jusqu'� la R�volution.
Folmar IV, comte de Metz et de Lun�ville (1055), mort en 1075, �pousa Mathilde, fille d'Adalbert de Longui-castro (Langenstein) et en eut : 1� Folmar V comte Metz (1075-1111), fondateur de l'abbaye de Lixheim; 2� Theotg�re qui fut �v�que de Metz (1117-1120). : 3� Hermann II; 4� Cl�mence, qui �pousa son cousin Folmar, fils de Godefroy II de Castres, le premier des Folmar de Castres; 5� Godefroy III, qui eut de sa m�re Langenstein et les possessions avoisinantes et qui fut le premier mari d'Agn�s de Bar, h�ro�ne remarquable que notre histoire nous fera retrouver, quelques pages plus loin, avec Folmar V et les autres seigneurs du temps.
Notre connaissance de ces est trop sommaire pour nous permettre de plus longs d�veloppements. Nous ajouterons cependant que les maux caus�s par les luttes des seigneurs entre eux turent moindres que les terreurs bien connues de l'an mil, que les souffrances de la famine, surtout dans les ann�es 1028 � 1031, et que les horreurs des pestes apport�es de l'Orient. L'an 1042 vit se d�cha�ner la plus meurtri�re de ces �pid�mies. On l'appela le mal des ardents et on y vit une punition divine. Au dire des savants de ce temps, le rna1 attaquait la t�te, descendait comme un feu dans l'estomac, puis dans les entrailles,
enfin dans les jambes. S'il sortait par les pieds apr�s avoir travers� le corps, comme un serpent subtil, il y avait espoir de gu�rison; sinon, c'�tait la mort rapide dans d'horribles souffrances. Effray�s, les peuples accouraient aux sanctuaires de Saint-Vanne � Verdun, de Saint-Goeury � Epinal, de Saint-Quirin dans les Vosges. Pour implorer la d�mence du ciel, ils baisaient les saintes reliques, promettaient la Tr�ve-Dieu, buvaient du vin b�nit, se munissaient d'eau aux sources miraculeuses.
Cc fut l'origine de plusieurs p�lerinages et l'occasion de march�s fameux. Sit�t le fl�au disparu, la vie normale reprenait. Mais, � ce compte, la population croissait difficilement et les villages restaient avec un nombre d'habitants peu consid�rable.
Ce sombre, tableau justifie le nom de si�cle de fer donn� � ce temps; les visions de demain vont �tre plus radieuses et plus po�tiques.
II
Les premiers F�odaux de la r�gion
1� Les d�buts de la F�odalit�
Le r�gime f�odal, d�j� connu en France au Xe si�cle, se d�veloppa en Lorraine an si�cle suivant et finit par gagner notre r�gion au XIIe si�cle. Son but; on le sait, fut d'unir la souverainet� � la propri�t� terrienne, de mani�re � r�aliser le principe bien connu : point de seigneur sans terres, point de terres sans seigneur.
M ais terres et seigneurs se subordonnaient suivant une hi�rarchie bas�e sur des droits et des devoirs r�ciproques entre suzerains et vassaux.
Tous �taient �galement soumis � cette r�gle. Chacun �tait souverain dans son fief, mais restait n�anmoins justiciable devant ses sup�rieurs. En un temps o� la conscience et l'honneur jouissaient d'un prestige magnifique, ce syst�me imposa une subordination sociale d'une puissance �tonnante.
Est-il besoin. de d�finir l'hommage et l'investiture qui �taient � la hase du droit ? Le vassal, pour inaugurer son pouvoir; pr�sentait � son sup�rieur
le d�nombrement de son fief et lui jurait fid�lit� : c'�tait l'hommage, Le suzerain le confirmait dans ses droits, en lui remettant une banni�re : c'�tait l'investiture. Ce rite �tait valable jusqu'� la mort, � moins de forfaiture. Le propri�t� ainsi acquise se transmettait par h�ritage et pouvait devenir l'objet de transactions diverses.
Les b�n�fices ou concessions des biens, faites pal' les grands (ducs, comtes, �v�ques, abb�s), assujettissaient d'ordinaire � une redevance et toujours au service militaire. Mais le subordonn�, l'homme-lige, savait retrouver sa pleine autorit�, soit sur son fonds, soit sur ses sujets, et il se proclamait leur seigneur.
Ainsi, le clerg� mis � part, trois classes composaient la soci�t� d'alors : les nobles, les roturiers et les serfs.
Parmi les premiers s'organisa la chevalerie, dont on conna�t les titres et les degr�s. Il nous suffira de rappeler le luxe de ses cours, l'appareil majestueux de ses ch�teaux et de ses maisons fortes. la vari�t� plaisante de ses armoiries et de ses f�tes. Jamais on ne v�t plus chatoyante parure embellir la soci�t� fran�aise.
Les seconds, manants et vilains, form�rent la grande masse de l� population libre, qui, dans les villes, acquit bient�t rang de bourgeoisie, et, dans les campagnes, eut facult� de poss�der et m�me de transmettre par h�ritage le sol qu'elle cultivait.
Quant aux troisi�mes, serfs ou anciens esclaves, ils furent affranchis par le. mouvement communal, qui fut tr�s r�pandu dans le pays, messin, au cours des XIIIe et XIVe si�cle. La loi de Beaumont ne fut appliqu�e chez nous qu'� Reillon et � Domjevin, et encore � une date inconnue, Son esprit cependant s'est infiltr� dans tous nos milieux et y a cr�� une condition aussi privil�gi�e. On cite bien, vers'1494, une charte qui affranchit l�s b�cherons de Dabo, et une autre, les habitants de Parux, mais les termes de ces �crits paraissent si surann�s qu'on les croirait tomb�s d'un monde p�rim�.
Pour se transformer ainsi, la soci�t� devait fatalement contrarier les institutions religieuses dont le prestige avait �t� pr�pond�rant jusque-l� La f�odalit� supplanta le monachisme vosgien et ne lui laissa que son r�le spirituel : desservir les paroisses, pr�senter des titulaires aux cures, subventionner des �difices sacr�s en �change des d�mes pr�vues. La zone de Moyenmoutier fut ainsi restreinte au ban Saint-Pierre, celle de Senones, au ban de la Rivi�re, celle de Saint-Symphorien, au ban Le Moine, celle de Saint-Sauveur, au ban du m�me nom. Nous avons dit aussi que les monast�res avaient d� se choisir des Vou�s. Ces protecteurs, en exag�rant leurs droits, finirent par se cr�er des Etats personnels au sein des domaines qu'ils devaient sauvegarder, sans que les proc�s, les excommunications m�mes; fussent capables. de r�primer leur audace. Le temps enfin sanctionna tous les faits accomplis. Nos premiers seigneurs f�odaux furent les artisans de cette quasi-r�volution; voyons les � l'oeuvre.
2� Nos ch�teaux primitifs :
Deneuvre et Turquestein
A la fin du XIe si�cle, notre Bl�montois ne poss�dait pas encore de ch�teau proprement dit, bien qu'il compt�t de nombreux alleux ou terres franches. Cependant on en pouvait voir tout autour et � une faible distance de ses limites. Les ch�teaux de Deneuvre et de Turquestein nous sont connus. Ils appartenaient � l'�v�que de Metz. Les ch�telains qui les gardaient rest�rent �trangers aux destin�es du pays et born�rent leur action � soutenir des si�ges (� Deneuvre, 1073 et 1078) qu'infligeaient des brigands, ou plus justement des Lorrains en guerre avec les Messins
Lun�ville
Au ch�teau de Lun�ville r�gnait un grand calme et il n'y fut pas question d'empi�tement sur l'abbaye de Saint-R�my, puisqu'au contraire les comtes s'attachaient � compl�ter son patrimoine. Quel �tait, au fond, ce castel primitif et quel s�jour y faisait son ma�tre, Folmar V ? L'histoire pr�te � ce paladin la vie la plus mouvement�e. Elle le montre r�sidant
� Hombourg, revenant � Metz pour soutenir avec fougue le parti de Gr�goire VII contre l'empereur, fondant l'abbaye de Lixheim, accompagnant Poppon de Tr�ves au concile de Clermont (1095), partant pour la premi�re croisade avec Adalb�ron, archidiacre de Metz, et Pierre, fils du comte de Toul En 1106, il est chez la comtesse Mathilde � Guastalla (Italie). Il assiste � la fondation de Saint-Pierremont, dote Krauffthal, donne son ch�teau de Lixheim � Th�otg�re, abb� de Saint-Georges. Il prend tant�t le titre de comte de Hunebourg (pr�s de Herrenstein, Alsace), tant�t celui de comte de Hombourg (pr�s de Marsal, Lorraine) et il finit sa vie, sous l'habit religieux, pr�s de son fr�re Th�otg�re, � Lixheim, o� il a sa s�pulture. Il laissa trois fils que lui donna une comtesse de Dagsbourg-Eguisheim dont le nom est inconnu : Folmar VI, que nous retrouverons, Hugues, mort en 1121, et Albert, comte de Marimont ou Morsperch.
Ces d�tails montrent en quelle estime il faut tenir la maison de Lun�ville, dont tous les membres aimaient � prendre le titre de comte, en raison de leurs fonctions pr�s des �v�ques de Metz
(17).
Langenstein
Un fr�re de Folmar V, Godefroy III, nous int�resse plus directement, puisqu'il poss�da le ch�teau de Langenstein et y v�cut en r�gissant la part de patrimoine qui lui �tait �chue dans ces parages. Son histoire serait bien sommaire sans les d�ductions minutieuses qu'a su tirer M. Schaudel de documents divers, puis�s chez les auteurs qui se sont occup�s de ce temps. Nous ne reproduirons pas ces discussions savantes
(18). Nous nous contenterons d'en indiquer les conclusions, en les estimant plausibles et bonnes, selon l'expression de l'�rudit arch�ologue, il �clairer, comme autant d'�tincelles, des personnages semi-l�gendaires, dont les figures ont �t� estomp�es par les enjolivures des si�cles.
Godefroy III recueil1it, comme cadet, ce qui entrait dans la dot de sa m�re. Or, d'apr�s les meilleures donn�es, celle-ci fut Mathilde, fille unique du comte Adalbert, pourvu du titre de Longui-castro (Langenstein)
(19). De ce ch�teau, dont on conna�t le site pittoresque aux abords d'une voie ancienne allant de Deneuvre au Donon, ce seigneur �tendait

son autorit� sur Raon-les-Leau, o� il percevait un droit de p�age, sur le Blanc-Mont, sans doute, et sur les lieux de cette contr�e qui �chappaient � la domination de Saint-Sauveur.
Le mariage de ce comte fut digne de son rang. Il prit femme dans la tr�s noble famille de Bar-Mousson-Montb�liard, dont on sait la grande place dans notre r�gion de. l'Est. Agn�s fut le nom de cette femme, l'une des sept, enfants de Thierry Ier et d'Ermentrude de Bourgogne
(20). Frapp�e sans doute du r�le qu'elle remplit au ch�teau de Langenstein, la tradition ne lui a conserv� que ce nom, mais, en r�alit�, elle. fut de Bar par sa naissance, de Langenstein par son premier mariage et de Salm par sa seconde union. Issue d'un mariage que l'on sait contract� en 1076, elle put �tre �pous�e elle-m�me dans la derni�re dizaine du XIe si�cle. On place, en effet, son union avec Godefroy entre 1090 et 1100.
C'�tait l'�poque mouvement�e de la premi�re croisade, �poque glorieuse mais tragique pour les fr�res d'Agn�s de Bar. L'un, Louis, dit de Mousson ou le Crois�, partait avec Godefroy de Bouillon, le 21 mai 1096, et promenait sa banni�re d'azur � deux barbeaux d'argent sur les chemins de Nic�e et de Tarse en Cilicie ; il commandait en chef au si�ge d'Antioche et entrait � J�rusalem aux c�t�s de Tancr�de, de Gaston de Foix, de Renaud de Toul et d'autres paladins c�l�bres. De retour en 1102, il fondait le prieur� d'Amange (Insming) et, bient�t apr�s, trouvait une mort vulgaire, en voulant apaiser une �meute de serfs r�volt�s.
Un autre fr�re, Renaud le Borgne, faisait en Lorraine des chevauch�es dont le but nous �chappe. Fait prisonnier par des ennemis implacables, il fut tra�n� jusqu'au pied de Mousson, sa citadelle, afin d'en voir le si�ge et la ruine, sans pouvoir l'emp�cher. Sa femme valeureuse �tait dans la place et en assurait la d�fense. Comme le castel r�sistait et paraissait devoir �tre imprenable, les assaillants d�putent un h�raut � la ch�telaine, pour la sommer d'ouvrir ses portes, sinon son mari. sera pendu. Or, la nuit m�me, la ch�telaine �tait accouch�e d'un gar�on : �� Faites savoir � vos ma�tres, r�pondit simplement l'h�ro�ne, que le p�re aura un successeur, s'ils lui infligent la mort. � Tant de fiert� d�couragea les assi�geants qui d�sarm�rent et firent la paix, en se contentant d'une ran�on pour le comte qu'ils laiss�rent en vie. Agn�s �tait d'une trempe pareille, incapable de d�mentir ni son sang ni sa race.
Le jeune couple fut d'abord heureux. Il menait une existence tranquille au milieu des grands bois et dans la solitude des montagnes. La' r�sidence de Langenstein avait besoin d'�tre agrandie, embellie. Fermer de murailles l'�troite surface; d�j� inabordable, de la longue roche, y dresser des logis pour les gens de service, un donjon pour la famille, une chapelle d�di�e � saint Antoine, protecteur bien choisi, installer en contre-bas et aux abords de l'entr�e une cour, la basse cour, surtout creuser un puits pour fournir l'eau n�cessaire, tels �taient les ouvrages
� r�aliser; La tradition, on ne sait pourquoi, en attribue le m�rite principal � la ch�telaine. Le dernier de ces travaux, qui aboutit � trouver de l'eau � cent soixante pieds de profondeur sur une montagne de gr�s; parut m�me si �tonnant que le castel. en perdit son nom alsacien pour prendre le nom plus roman de Petra Perceia ou Pertuisata, Pierre-Perc�e, qui lui est rest�
(21).
Cette habitation, plus pittoresque que gaie, prenait-elle tous les instants du couple seigneurial ? On peut en douter, car Raon-les-Leau leur offrait, � quelque distance, un s�jour plus vivant et plus fructueux. Les march�s du Donon
(22) et les affaires qui se traitaient entre l'Alsace et la Lorraine attiraient de ce c�t� de nombreux voyageurs, sur lesquels pesait un droit de p�age au profit du comte. D'autre part, l'�glise de ce lieu
(23), comme l'attestent des �crits post�rieurs, a re�u la d�pouille mortelle du comte Godefroy, de son fils Vuillaume et m�me, dit-on, de la comtesse Agn�s. Si l'on ajoute la facilit� de recourir au minist�re des. moines, soit de Hugoncourt, soit de Saint-Sauveur, toujours chers dans la famille, toutes ces raisons font croire � une pr�f�rence marqu�e pour l'alleu que dominait la masse g�ante du Donon.
Combien d'ann�es dura ce mariage heureux et quel genre de mort emporta. le p�re et le fils? Aucun document ne l'indique. Godefroy cependant dut s'�teindre avant 1108, puisque sa veuve �tait d�j� remari�e en 1110 ; d'autre part, Vuillaume, son fils, avait atteint l'�ge adulte, puisque le but de la donation, faite en 1138 par Agn�s, sera d'obtenir des suffrages pour les deux d�funts.
De cette union trop courte nous connaissons trois enfants : 1� Vuillaume ou Guillaume, ci-dessus nomm�; 2� Mathilde, la future �pouse de Bencelin de Turquestein, qui figure, en 1147; dans la donation de l'�glise de Lorquin � Senones ��par son mari Bencelin, sa femme Mathilde, son fils Cuonon et ses filles et par son neveu G�rard �
(24) ; 3� Conrad, dit de Langenstein dans des actes ant�rieurs � 1127 et de Pierre-Perc�e dans d'autres. Ce seigneur tient une place � part � c�t� de ses fr�res ut�rins, toujours appel�s consuls
(25). Sa qualit� de descendant direct de Godefroy en fera, plus tard, le possesseur de la seigneurie de Pierre-Perc�e et l'associ� exclusif de sa m�re dans les donations qu'elle fera apr�s son second mariage et qui portent sut des biens situ�s dans l'apanage de son premier mari. Malheureusement il vivra peu et
son avoir ira grossir celui de Salm, Il �pousa Havide, fille de Gugues d'Eguisheim; et en eut trois enfants : Hugues, cit� dans une charte de 1140; mort sans post�rit�, probablement avant son p�re; Conon, qui c�dera � Haute-Seille un droit de p�turage sur ses for�ts; Ad�la�de, bienfaitrice aussi de Haute-Seille et morte sans post�rit�
(26), Toute cette famille �tait disparue pour 1147 et-les deux h�ritages de Langstein et de Salm �taient fondus ensemble, entre les mains d'Agn�s, qui vivait encore, Nous laisserons l� cette lign�e, la : plus importante de la r�gion en ce d�but du XIIe si�cle
(27).
Dans le voisinage imm�diat de Pierre-Perc�e, au lieu m�me de Badonviller, alors tr�s petit, s'annon�ait, pleine d'espoir, une famille qui donna deux vou�s au monast�re de Moyenmoutier et qui disparut bient�t sans laisser de traces. Le chroniqueur Jean de Bayon nous a conserv� le nom de ces deux vou�s : Roland et Otton, en mentionnant une donation faite par eux pour avoir une s�pulture dans le clo�tre abbatial; dans cette donation figuraient des manses, champs et pr�s situ�s pr�s de Pexonne. Un peu plus tard (1124) on trouve, parmi les signataires de la d�dicace de Senones, Rainero de Baldovillare, qui est certainement de la m�me famille. Plus tard encore (1243), il sera question de deux fr�res : Rodolphe et Raimbald, seigneurs de Fraquelfing, qui disposent en faveur de Saint-Sauveur d'une portion de leur alleu situ� � Badonviller : Toutes ces personnes ont d� �tre li�es entre elles par une parent� que nous ne pouvons �tablir. Furent-elles m�l�es � la formation du ban le Moine
(28) et � son attribution � l'abbaye de Saint-Symphorien de Metz, ou m�me � la cr�ation de la Chapelotte
(29), sanctuaire si connu aujourd'hui et qui semble avoir �t� l'�glise m�re pour ce ban ? La question se pose, mais sans r�ponse possible, du moins avec nos connaissances actuelles.
Parroy
En un point tout oppos� et � la limite du Bl�montois, il faut signaler l� famille de Parroy, dont les attaches avec la famille de Lun�ville sont certaines, � partir de Folmar V, bien que le trait d'union reste inconnu.
Cette lign�e descendait de leudes puissants dans le Chaumontois. On lit

Clich� du �� Pays Lorrain �
LES RUINES DU CHATEAU DE PIERRE-PERC�E EN 1829 (D'apr�s une s�pia de la Biblioth�que publique de Nancy)
dans sa charte familiale (30) : �� Les Seigneurs de Parroye sont si grands seigneurs qu'ils tiennent le village de Dieu et de l'�p�e et ne le tiennent ny de roy, ny de prince, le tenant comme franc alloeuf et h�ritage; le peuvent et d�pendre sans prendre cong� � personne, etc... � Cette fi�re d�claration donne l'id�e des franchises reconnues aux alleux du m�me genre. Les armoiries de cette famille �taient toutes sp�ciales : de gueules � trois lions d'or, � la bordure engrel�e d'azur; elles pourraient peut-�tre servir � fixer son origine. Toujours est-il qu'au temps de Bertrice, abb� de Moyenmoutier (1077-1115), Albert Ier de Parroy fit � ce dernier donation de son alleu de Malz�ville, et Vauthier de Lorey, son fr�re, de la cense de Givicourt
(31). Un peu plus tard, Albert II, fils du pr�c�dent, donna �galement � S�h�rus, abb� de Chaumousey (1094-1128), un quartier et un petit bois � Basemont (Bauzemont)
(32). De m�me, vers 1130, Simon de Parroy et ses fils G�rard et Beaudoin c�dent � Senones leur terre de Basemont
(33). Ce sont des anc�tres dont nous retrouverons plus tard des descendants directs.
Pour terminer cette liste d�j� longue de nos seigneurs f�odaux, mettons en belle place une veuve vertueuse et bienfaisante. Cun�gonde de Richecourt, � qui sa pi�t� sugg�ra des donations sans nombre aux monast�res de la r�gion. Son histoire est des plus attachantes et parait m�l�e � celle des sires de Parroy. Les B�n�dictins de Metz font de cette femme la fille d'un certain G�rard de Richecourt (Ch�teau-Br�hain) et de dame Marthe. Elle se marie d'abord � Geoffroy ou Rottfried de Viviers, chevalier (1042), mais elle est bient�t veuve-et, en souvenir de Geoffroy, elle donne -� Chaumousey une portion de son patrimoine propre, situ� � Bauzemont. C'est, du moins, le t�moignage de l'abb� S�h�rus.
Remari�e � Mattfried de Tincry, elle est de nouveau veuve en 1103.
Ainsi s'expliquent les qualifications nombreuses que les auteurs lui attribuent
(34).
On lui connait trois enfants :
1�' Thierry, tu� dans sa jeunesse, et enterr� � Senones vers 1097. De l� vient la bienveillance de la comtesse pour l'abb� Antoine, qui venait d'y �tre transf�r� au sortir du prieur� de Saint-Christophe � Vic.
2� Gobert, fils du second mari, qui fut sous-vou� de Senones. entre 1100 et 1110. C'est en 1103, alors que son p�re vivait encore. que furent' donn�s � Senones les biens situ�s � Xures et � Mouacourt, qui servirent, en 1129, � constituer le prieur� de
Xures.
3� Ad�la�de ou Ala�de, qui �pousa : Simon de Parroy, et dont les fils, Thierry et G�rard, sont bien connus.
D'autres donations compl�t�rent celles que nous venons d'�num�rer, portant sur d�s terres situ�es � Fresnes-en-Saulnois, Mouacourt, Coincourt, Martincourt (pr�s de Vaucourt), Craincourt, la for�t de Valandies (pr�s de Xures), l'�glise de Berg (Mont) avec une vigne � Foulcrey, les eaux et la p�cherie du Sanon, le prieur� de Mervaville sur Azerailles, fond� en 1129. On ignore la date et le lieu de la mort de cette v�n�rable personne.
A lire ce qui pr�c�de, on aper�oit d�j� les �l�ments principaux qui fournirent au Bl�montois sa structure f�odale. L'organisme n'aura plus qu'� grandir en s'assimilant chacun de nos villages.
(A suivre)
(1) R. PARISOT : Les origines de la Hante Lorraine. - E. MARTIN : Histoire du dioc�se de Toul, I, p. 137.
(2) Plusieurs monast�res re�urent le m�me vocable; le n�tre fut toujours nomm� Saint-Sauveur en V�ge., On sait que l'abb� E. Chatton en a publi� une histoire tr�s compl�te.
(3) R. PARISOT : Le royaume de Lorraine sous les Carlovingiens, p. 572.
(4) L. JEROME : Hist. de Moyenmoutier, p. 225 et 239
(5) Leur g�n�alogie se trouve dans plusieurs histoires de Lorraine, notamment dans Les origines de la
Haute-Lorraine, de M. R. PARISOT.
(6) Dans l'apanage de Montb�liard. il y avait un ch�teau nomm� Bl�mont; d'o� cette inscription relev�e par M. de Martimprey sur un sceau, � la date de 962 : S.
Oleardi. com. Ablamontis (sceau d'Ol�ard, comte de Bl�mont). Ol�ard,
Liutfried, Ludvig. sont des formes diverses de Louis et s'appliquent au m�me personnage : Louis de
Dabo.
(7), Pour ces g�n�alogies de Bar, consulter : DUCHESSE : Histoire de la Maison de Bar.; L : DUVERNOY : Eph�m�rides du comt� de Montb�liard, L. VIELLARD : Documents, etc.; TUEFFERT : Histoire des comt�s souverains de Montb�liard, 1877.
(8) Une charte de Pibon, �v�que de Toul, dat�e de 1091, �num�re les terres donn�es par ce seigneur sur
Froville, Dom�vre et Gondrexon. - H. LEPAGE : Comm., I, art. Froville.
(9) Pour ces g�n�alogie, consulter : SCHOEPFLIN : Alsatia diplomatica et Alsatia
illutstrata; P. BRUCKER : Vie de saint L�on IX; CHATELAIN : Le comt� de Metz et la vouerie �piscopale du VIIe au XIIIe si�cle
(Jahrbuch, 1898-1899).
(10) L. SCHAUDEL; Les comtes de Salm et l'abbaye de Senones, p. 16.
(11) Chroniques de Moyenmoutier, par Jean de BAYON, cit� par D. BELHOMME.
(12) Pourquoi. le qualificatif amoenus (agr�able) qui entre dans la composition de ce mot ? Sans doute, � cause de la bonne exposition de ce lieu, en plein midi. Cet adjectif ne peut �tre contest�. Un document, concernant H�nam�nil, cite ce lieu sous la forme Amenow�lla. La for�t voisine s'appelle les
Amnienbois, et le ruisseau qui en d�coule vers Emberm�nil : le ruisseau des Amis.
(13) N�crologe de Bonmoutier, cit� par E. AMBROISE : Les vieux Ch�teaux de la
Vezouze, p. 14.
(14) Les formes onomastiques �taient alors tr�s peu fix�es. On ne s'�tonnera pas de ces alt�rations qui paraissent importantes. Certains auteurs vont m�me jusqu'� identifier ce V�her avec
Volmar, et lui attribuent ces deux fondations, Voir H. LEPAGE : Les communes de la Meurthe, art. Lun�ville.
(15) Ainsi : Hermamagney, �crit aussi par Lepage, Hermam�nil ou Hennam�nil, terres peu fertiles entre les Amniemboix et
Remoncourt; H�nam�nil, pr�s de Parroy, et m�me Remoncourt, Remabois, si d�pla�ant
l'r, on prononce Ermoncourt, comme le fait encore le langage vulgaire.
(16) En rapprochant les formes anciennes de V�ho : � savoir V�hoth (1034), V�hois ou Vehey (1311). de m�me Vihuviler et Huviller (Jolivet), de
Vuher; ou V�her, ou Vernher, mentionn� plus haut, on peut se demander si ce dernier n'a pas contribu� � la formation de ces lieux.
(17) Par l� s'explique le titre de comt� donn� � ses principaux apanages ? En un temps o� chaque famille noble avait soin d'adopter un blason, Folmar V choisit pour Lun�ville les armoiries que l'on sait : d'or � la bande d'azur, charg�e de trois croissants montant d'argent,
(18) L. SCHAUDEL : Les comtes de Salm et l'abbaye de Senones, chap. II.
(19) Schoepflin et Ch�telain, qui l'appellent Spanehilde, h�riti�re de
Dagshourg-Eguisheim, font une confusion, � moins qu'il ne s'agisse d'un second mariage de Folmar V, ce qui serait encore possible. (L.
SCHAUDEI, op. cit., p. 60.)
(20) GERMAIN DE MAIDY : Note sur Agn�s de Langstein J.S.A.L., 1888.
(21) Ce nom apparait pour la premi�re fois, en 1127, dans la fondation du Moniet de
Deneuvre.
(22) Voir sur ces march�s : T. LINCKENHELD : Un sanctuaire de fronti�re -
Notre-Dame de D�livrance aux pieds du Donon. B.S.A.L., 1929, p. 180.
(23) Cette �glise, d�di�e � Saint-Pierre, �tait situ�e � une faible distance du village actuel. L'�glise plus r�cente de ce lieu est sous le vocable de la Nativit� de la Sainte Vierge.
(24) D. CALMET : Hist. de Lorr., IV, col. 285.
(25) Ce titre, dit Bertholet, �tait donn� aux fils de familles consid�rables, sans impliquer une fonction particuli�re.
(26) SCHAUDEL. op.. cit., p. 97, et Arch. d�part. de M.-et-M. II. 542.
(27) J.-C Docteur, enfant du lieu, en publiant Le Ch�teau de Pierre-Perc�e (Raon-l'Etape 1840) a fait un roman historique plus curieux � lire que s�r � consulter. De tels �crits bourr�s de l�gendes controuv�es, d�forment plut�t l'histoire, Cependant l'auteur fut en grande vogue dans nos campagnes, avec son almanach de la gaiet� et d'antres �crits du m�me genre, il est mort � Pierre-Perc�e en 1880. M. Ren� Perrou a donn� sa biographie et son portrait dans la Revue Lorraine illustr�e (1913).
(28) Le ban le Moine comprenait Br�m�nil et Neuviller (rive droite de la Brune), le hameau de
Sainte-Agathe. Angomont, Allemcombe et I,uvigny.
(29) La chapelle actuelle est une reconstruction r�cente, Elle abrite une madone remarquable en pierre. que les connaisseurs font remonter au XVe si�cle, non loin se dresse un joli portail roman du XIIe si�cle, seul vestige d'un b�timent inconnu.
(30) H. Lepage a publi�. cette charte dans Les Communes de la Meurthe, H, p. 758.
(31) Givicourt, pr�s de Parroy, avait l'�glise-m�re pour Parroy. H�nam�nil et
Bauzemont.
(32) Doc. Hist. des Vosges, t. II, p. 129.
(33) D. CALMET : Hist. de Lorraine, IV, 66,46.
(34) Certains auteurs la nomment m�me dame de R�chicourt, Ce qui est une confusion �vidente. La seigneurie de R�chicourt-le-Ch�teau, constitu�e � cette �poque par quelque membre de la famille de
Dabo, ne tarda pas � tomber. par suite de mariage, dans l'apanage de la famille de Leyningen
(Linange) et n'en est pas sortie.
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