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Journal de la Soci�t� d'arch�ologie et du Comit�
du Mus�e lorrain
1875
Notre
honorable confr�re M. Chapellier, archiviste de la Soci�t�
d'Emulation des Vosges nous communique la pi�ce suivante, qui se
trouve en original aux Archives de ce d�partement
�� Proc�s verbal au sujet du cri de la f�te � l'abbaye de
Haute-Seille, comt� et principaut� de Salm.
�� Cejourd'huy huicti�me septembre, jour de la Nativit�
Notre-Dame mille sept cents sept, Je soubsign� S�bastien Fery,
jur� en la justice de Badonviller, principault� de Salm,
accompagn� de Nicolas Charpantier, sergent au comt� de Salm,
demeurant � Badonviller, m'etant transport� en l'abbaye de
Haute-Seille suivant l'usage annuel pour y assister � la grande
messe, y aller � l'offrande, et ladite messe finie, y publier la
feste de par Dieu, de par Notre-Dame, de par les Seigneurs
souverains de la terre de Salm, et de par Messieurs les abb�
prieur et religieux de ladite abbaye, Et etans entr� dans
l'Eglise apres le dernier coup de la messe sonn�, toujours
accompagn� dudit Charpantier, le P�re Dom Moreau c�l�brant
ladite messe et ayant present� la paterne, je me serois avanc�
apres ledit Charpantier qui est en preminence, avant tout autre
assistant � ladite messe, pour la baiser et donner mon offrande,
de quoy Dom Moreau s'etant aperceut, auroit refus� audit
Charpantier et � moy de me donner � baiser ladite patene, et
auroit dit � haulte voix qu'il ne nous reconnoissait en rien, Et
� l'instant auroit appell� un certain particulier luy disant : ��
Monsieur le maire avanc� � ; ce qu'ayant fait il luy auroit
donn� � baiser la patene, et je me suis retir�, ladite messe
finie, je me suis transport� hors de l'Eglise dans l'endroit o�
l'on publie ordinairement la feste, et ayant cri� � haulte voix
apres ledit Charpantier : �� Oy�s, Messieurs, oy�s, de par Dieu,
de par Notre-Dame ; de par les seigneurs souverains de la terre
de Salm, et de par Messieurs les abb�, prieur et religieux de
Haute-Seille, la feste est permise, et est deffendu � qui que ce
soit de faire aucun trouble pendant les dances �, Et au moment
que je publiois ainsy la feste, est survenu un religieux de
ladite abaye qui a dit : �� Dites Monseigneur l'Abb� Premier que
de nommer les Princes �, ce qu'estant fait je me suis Iransport�
dans ladite abbaye et ayant rencontr� le P�re Dom Moreau soy
disant abb�, nous luy avons demand� de nous faire donner nostre
paste suivant l'ancien usage lequel nous a repondu qu'il ne nous
reconnoissoit en rien, et que si nous voulions le nommer dans le
cry de la feste le premier avant les Princes qu'il nous le
feroit donner, et nous a dit �� Sort�s, sort�s, je ne vous
reconnois en rien �, ce qui nous a oblig� � nous retirer, ledit
sous-sign� a encore remarqu� que l'on n'a pas chant� � l'Eglise
pour les souverains en commun, ny en particulier, et que tous
les assistans ont �t� fort scandalis�z du proc�d� dudit Dom
Moreau, en telle sorte que la pluspart a eclat� de rire, pendant
le service, De tout quoy j'ay dress� le present proces verbal
que j'ay pri� ledit Charpantier de signer avec moy, audit
Haute-Seille les ans et jour susdits.
�� A. FERRY, N. CHARPANTIER. �
Au dos est �crit : �� Proces verbal de Sebastien Ferry jur� �
Badonviller et de Joseph Charpantier sergent audit lieu contre
les Religieux de l'abbaye de Haute-Seille.
Du 8 septembre 1707, feste Notre-Dame �.
NOTA. Le comte de Salm, alors duc de Lorraine, et le prince de
Salm, �taient seigneurs hauts justiciers, moyens, bas, et
fonciers, en commun, de l'abbaye de Haute-Seille, fond�e en 1140
par leurs anc�tres; il �tait donc tout naturel que leurs
officiers y r�clamassent des pr�rogatives dont l'oubli ne
pouvait �tre consid�r� que comme un manque de respect et de
reconnaissance de la part des religieux, abb� ou autres.
CHAPELLIER.
Dans son �tude sur l'abbaye
de Haute-Seille, Arthur Beno�t pr�sente ainsi ce
proc�s-verbal :
�� Feu Chapellier a fait voir en quelques pages comme l'autorit� des co-seigneurs �tait reconnue en 1707 par un abb� nomm� par le roi de France. Le jur� en la justice de Badonvillers �tait parti de cette ville le 8 Septembre avec son sergent pour annoncer la f�te � l'abbaye; ils la proclam�rent selon la coutume.
���Oyez, Messieurs, de par Dieu, de par
Notre-Dame, de par les seigneurs souverains de la terre de Salm, et de par Messieurs les abb�, prieur et religieux de Haute-Seille, la f�te est permise, et il est d�fendu � qui que ce soit de faire aucun trouble pendant les danses. �
La f�te publi�e, les deux officiers entr�rent � l'�glise pour entendre la messe et se pr�sent�rent � l'offrande, mais l'abb� leur refusa � l'autel de marcher les premiers, malgr� qu'ils repr�sentassent le duc de Lorraine et le comte de Salm, co-seigneurs souverains, et ce pr�lat eut l'insolence de dire � un particulier
���Monsieur le Maire, avancez � Apr�s la messe, la f�te fut encore publi�e, et un moine leur dit
���Dites Monseigneur l'abb�, plut�t que de nommer les princes. � Le cri de la f�te prononc�, les d�l�gu�s entr�rent au couvent pour le d�ner accoutum�, mais l'abb� furieux se pr�senta devant eux, criant
���Sortez, sortez, je ne vous reconnais en rien. � C'est ce que firent les deux officiers qui ne dirent pas o� ils mang�rent, mais qui signal�rent l'abb� comme n'ayant pas, � l'�vangile, chant� pour les souverains ni en commun, ni en particulier,
���ce qui avait scandalis� les
assistans, � selon eux. � |