L'actualité mondiale Un regard humain

L'ONU en Ukraine se prépare au pire et espère le meilleur

Travailleurs humanitaires de l'ONU dans la ville d'Odessa, en Ukraine (photo d'archives).
© UNOCHA/Alina Basiuk
Travailleurs humanitaires de l'ONU dans la ville d'Odessa, en Ukraine (photo d'archives).

L'ONU en Ukraine se prépare au pire et espère le meilleur

Paix et sécurité

Alors que l'invasion de grande ampleur de l'Ukraine par la Russie entre dans sa quatrième année, une vague d'activité diplomatique a fait naître un espoir croissant d'un cessez-le-feu, même si la situation reste extrêmement instable. Malgré l'incertitude, l'ONU réfléchit à la meilleure façon de soutenir le pays lorsque les combats cesseront enfin.

Les Ukrainiens continuent de faire face à des attaques quasi quotidiennes, avec des frappes aériennes visant systématiquement les infrastructures civiles, laissant des familles sans abri, sans sécurité et sans électricité. Plus de 10 millions de personnes ont été déracinées de leurs foyers, faisant de l’Ukraine la plus grande crise de déplacement en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale.

Près de 12.600 civils ont été tués et plus de 29.000 blessés. Des milliers d’attaques contre des établissements de santé ont contraint les médecins à travailler dans des conditions quasi impossibles. Tout au long des combats, l’ONU est restée un soutien constant, aidant à acheminer l’aide, à fournir des soins de santé d’urgence et à rétablir les alimentations électriques endommagées.

L’avenir de l’Ukraine reste incertain mais, comme l’a déclaré à ONU Info Matthias Schmale, le Coordonnateur résident et humanitaire de l’ONU pour le pays, l’ONU a planifié toute une série de scénarios post-conflit.

Cet entretien a été édité pour des raisons de clarté et de longueur

« Le sentiment général au sein de la communauté diplomatique est que nous nous rapprochons d’un cessez-le-feu, et que cela pourrait se produire plus tôt que prévu. C’est un scénario auquel nous nous préparons en intensifiant nos efforts de reconstruction et de développement.

L’ONU fait déjà un travail incroyable pour aider à restaurer les installations énergétiques qui ont été touchées, et sans ce travail, la population de ce pays serait dans une situation bien pire, surtout dans ces conditions de froid.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a rouvert ou reconstruit des établissements de soins de santé primaires le long de la ligne de front qui avaient été fermés ou détruits à un moment donné. Si les armes restent silencieuses, nous pouvons évidemment faire beaucoup plus pour aider.

Milana, sept ans, et sa famille ont fui Myrnohrad, dans la région de Donetsk en Ukraine.
© UNICEF/Oleksii Filippov
Milana, sept ans, et sa famille ont fui Myrnohrad, dans la région de Donetsk en Ukraine.

Un lourd tribut sur la santé mentale

Nos partenaires, parmi lesquels figurent des gouvernements, comprennent que l’ONU a pour objectif de ne laisser personne de côté, c’est pourquoi nous nous intéressons aux groupes qui risquent d’être vulnérables une fois la guerre terminée.

Les anciens combattants font partie de ces groupes. On m’a souvent dit qu’environ un million de personnes sont impliquées dans les combats, dont beaucoup sont lourdement armées. Des centaines de milliers de personnes reviendront traumatisées du front, après deux à trois ans loin de leur famille. Cela pourrait provoquer des tensions, notamment une augmentation des violences sexistes.

Le pays continuera de souffrir des conséquences de cette horrible guerre pendant un certain temps, notamment en termes de santé mentale.

Là encore, le système des Nations Unies apporte son soutien. Par exemple, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a contribué à développer une application numérique spécialement destinée aux anciens combattants, pour les aider à accéder aux services dont ils pourraient avoir besoin, et nous gérons plus de 80 « espaces sûrs » où les personnes vulnérables, comme les survivantes de violences sexistes et les enfants de personnes déplacées à l’intérieur du pays, peuvent parler de leurs expériences et recevoir des conseils.

Il y a aussi beaucoup de spéculations sur le retour des réfugiés. Il y a quelques mois, nos collègues du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), en collaboration avec le gouvernement, ont lancé un site Internet qui fournit aux réfugiés à l’étranger des informations sur les services auxquels ils peuvent accéder à leur retour, pour les aider à trouver un logement ou un emploi. Nous essayons d’être prêts à intensifier considérablement ce travail.

Des fournitures de l'UNICEF arrivent au village de Shevchenkove, région de Kharkiv, en Ukraine.
© UNOCHA/Yurii Veres
Des fournitures de l'UNICEF arrivent au village de Shevchenkove, région de Kharkiv, en Ukraine.

Prêt à faire face à n’importe quel scénario

La grande question qui se pose est de savoir à quoi ressemblera l’accord de cessez-le-feu, en particulier en ce qui concerne les territoires occupés de l’est et du sud de l’Ukraine. Environ un million d’Ukrainiens vivent dans ces régions et nous ne savons pas ce qui leur arrivera. Y aura-t-il une zone démilitarisée ? Une force internationale de maintien de la paix maintiendra-t-elle l’accord de cessez-le-feu ? Et quelles sont les possibilités d’acheminement de l’aide humanitaire ?

D’un autre côté, alors que tout le monde espère que les armes se tairont, l’inverse pourrait se produire. Il y a plusieurs centrales nucléaires en Ukraine et si l’une d’elles est directement touchée, nous pourrions tout à coup être confrontés à une catastrophe nucléaire majeure. Les responsables gouvernementaux sont extrêmement préoccupés par cette situation (le 15 février, l’Agence de l’énergie atomique des Nations Unies, l’AIEA, a signalé qu’une frappe de drone avait percé un trou dans la structure construite pour empêcher la fuite de matières radioactives du réacteur endommagé de Tchernobyl. Malgré des dégâts importants, l’AIEA n’a enregistré aucun changement dans les niveaux de radiation sur le site).

Quoi qu’il arrive, nous essayons de faire en sorte que l’ONU soit aussi agile et aussi préparée mentalement que possible à n’importe quel scénario.