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MOGEVILLE
dans la Meuse
A �T� D�TRUIT
M.
Fabry, instituteur � Mogeville, �crit au �� Bulletin
meusien � :
�� Le 13 octobre dernier, vers 11 heures du matin,
quelques cyclistes allemands arros�rent les maisons
de mati�res inflammables, y mirent le feu et en un
rien de temps tout y fut consum�. Ils rest�rent l�
jusqu'� 4 heures du soir et de temps en temps
jetaient des grenades sur certaines habitations pour
en activer les flammes. La mairie, l'�cole, le
clocher de l'�glise, rien ne fut �pargn�. (Il y a
quelques jours j'ai pu constater de visu tous ces
d�g�ts.) Une douzaine de personnes du village qui
�taient encore l� � 11 heures, se sauv�rent
�perdues, M. Trisson et sa femme, seuls, rest�rent
au pays et dans l'apr�s-midi furent enlev�s par les
vandales et dirig�s d'abord sur la ferme de l'Epine.
Depuis on ne sait ce qu'est devenu M. Trisson. Quant
� sa femme, elle est venue nous rejoindre �
Vaux-devant-Damloup, car elle a �t� mise en libert�
apr�s avoir fait quelques centaines de m�tres, nos
ennemis tiouvant qu'elle ne marchait pas assez vite.
Le m�me jour, la majeure partie du village de
Maucourt subit le m�me sort que Mogeville. Tout est
br�l� aussi � l'exception d'une dizaine de maisons.
Une huitaine avant, entre 10 et 11 heures du soir,
les Allemands avaient enlev� toutes les personnes
qui y restaient et les ont emmen�es en Saxe. Voici
les noms : Mme et Mlle Willemain, Mme Couquaux
Emile, Mme Marchal et ses trois enfants, Mme
Bertrand,.�g�e de plus de 80 ans, Mlles Marie et
Mathilde Bertrand, M. et Mme Delavaux, Mme Prot et
ses enfants, Mme Trouslard, MM. Lelorrain, Chenet,
Colin, F�vrot (ces deux derniers vieillards de plus
de 75 ans).
Quelques jours apr�s, ils ont aussi enlev�, la nuit,
83 personnes d'Ornes.
Ils ont fait de m�me � Foameix. Mlle Gambette,
institutrice � Verdun et qui se trouvait chez ses
parents � Foameix, a �t� prise par les Allemands.
Elle nous �crivait derni�rement de Saxe que les
jours s'�coulaient lentement et bien tristement pour
les prisonniers comme elle.
Voici quelques renseignements sur des militaires de
Mogeville :
1� Paul Adam, capitaine d'artillerie, a �t� tu� en
septembre ;
2� Henri Simon, sergent d'infanterie, a �t� bless�
mortellement devant Maucourt, le 11 octobre et il
est mort � Verdun le 1 octobre ;
3� Gallois Ren�, adjudant, a eu l'�paule fracass�e
et se trouve actuellement � l'h�pital de P�rigueux.
4� Huvet Georges, ing�nieur chimiste, a �t� bless�
le 29 septembre au camp des Romains. Il est
actuellement prisonnier � Ulm. Son fr�re Pol est
toujours sur la ligne de feu.
FABRY,
Employ� auxiliaire aux bureaux de l'�tat civil de
Verdun. �
R�GLEMENTATION
DE LA CIRCULATION
Nancy,
20 d�cembre.
Communiqu� de la Pr�fecture :
Le territoire est divis�, en ce qui concerne la
circulation, en plusieurs zones.
Les lignes de d�marcation de ces zones diff�rent
selon qu'il s'agit de circuler par chemin de fer ou
de circuler en voiture ou � pied. La zone interdite
en chemin de fer sans laissez-passer sp�cial
s'appelle la zone Z. La zone interdite en voiture ou
� pied sans laissez-passer sp�cial s'appelle la zone
A. Ces zones sont d�limit�es comme il est indiqu�
ci-apr�s :
Circulation en chemin de fer
Tout voyageur doit �tre muni, quelle que soit la
longueur du trajet qu'il a � effectuer, d'un
laissez-passer d�livr� par lie maire ou le
commissaire de police. En principe, ce
laissez-passer n'est jamais d�livr� par l'autorit�
militaire, qui n'appose que son visa pour
autorisation.
La zone de l'int�rieur est s�par�e de la zone Z par
une ligne allant de Delle � Calais, en passant par
Montb�liard, Lure, Faymont, Plombi�res, Bains,
Lorrain, Dcmpaire, Charmes, Nancy, Pont-SaintVincent,
Bariisey, Vaucouleurs, Gondrecourt, Bar-le-Duc,
Vitry-le-Fran�ois, Ch�l�ns, Epernay,
Ch�teau-Thierry, Cr�py-enValois, Senlis, Creil,
Saint-Just-en-Chauss�e, Amiens, Abbeville et
Boulogne.
A) La zone qui se trouve au Sud et � l'Ouest de
cette ligne est libre, c'est-�-dire que l'on peut y
circuler avec le seul sauf-conduit d�livr� par le
maire ou le commissaire de police. Les gares
sus-indiqu�es font partie de cette zone. On peut
donc venir sans laissez-passer sp�cial de
l'int�rieur du pays � Nancy ou vice-versa.
Toutefois, pour utiliser la ligne de Paris par Pagny-sur-Meuse,
Gondrecourt et Bar-le-Duc, il faut le visa pour
autorisation de l'autorit� militaire (du g�n�ral
commandant d'armes de Nancy pour les personnes
habitant Nancy ou s'y trouvant de passage) appos�
sur le laissez-passer d�livr� par le maire ou le
commissaire central.
Le poste de Nancy laisse passer avec le seul
sauf-conduit d�livr� par le maire ou le commissaire
de police tous les voyageurs porteurs de billets
directs pour Barisey et au del�. Il laisse passer
avec le m�me saufconduit tous les voyageurs
circulant entre Nancy et Blainville ou entre Nancy
et Pont-Saint-Vincent.
Le poste de Bains laisse passer avec ce m�me
sauf-conduit les voyageurs porteurs de billets
directs pour Remiremont
B) La zone qui se trouve au Nord ou � l'Est de cette
ligne (ou zone Z) n'est accessible que dans quelques
cas bien d�termines :
1� Si l'on r�side dans la zone Z. - Dans ce cas, le
commissaire sp�cial de la pr�fecture, dont le bureau
est install� � la gare de Nancy, peut donner
l'autorisation d'entrer dans cette zone.
2� Si l'on va y voir un bless� ou un malade - Le
laissez-passer est, dans ce cas, d�livr� par le
maire ou le commissaire central pour celle des gares
sus-indiqu�es o� l'on devra franchir la ligne de
d�marcation. (Exemplels : Blainville pour aller �
Lun�ville ; Charmes pour Rambervillers ; Nancy pour
Frouard ; Vaucouleurs pour Pagny-sur-Meuse, etc.).
Sur pr�sentation de pi�ces �tablissant que l'on va
voir un bless� ou un malade, le gendarme de service
� cette gare pourra d�livrer l'autorisation d'entrer
dans la zone Z, sauf cependant dans les places de
Toul, Epinal et Belfort, qui ne restent accessibles
qu'aux personnes munies d'autorisations d�livr�es
par les gouverneurs de ces places.
Le gendarme de service peut �galement autoriser �
entrer dans la zone Z ou � en sortir les personnes
munies de pi�ces �tablissant leur identit� et
fournissant la preuve qu'elles habitent dans cette
zone.
Toutefois, le fait d'�tre domicili�, dans la zone Z
n'est pas consid�r� comme un motif suffisant pour
�tre autoris� � en sortir.
Dans tous les autres cas, et tout � fait
exceptionnellement, l'autorisation d'entrer dans la
zone Z ne peut �tre accord�e que par les g�n�raux de
la lre arm�e. (Toute personne qui s'adressera au
g�n�ral commandant d'armes � Nancy devra, au
pr�alable, se munir d'un laissez-passer d�livr� par
le maire ou le commissaire de police. Ce
laissez-passer ne sera valable qu'apr�s visa pour
autorisation de l'autorit� militaire.)
Circulation en voiture ou � pied
Les r�gles pour la circulation en voiture ou � pied
restent les m�mes.
La zone interdite, ou zone A, est s�par�e des zones
autoris�es (zones B et C) par une ligne allant du
Thillot � Dagonville, en passant par Cornimont,
G�rardmer, Fraize, Saulcy, Saint-Beno�t, Deneuvre,
Vathim�nil, Lun�ville, Haraucourt, Saulxures,
Agincourt, Faulx, Custines, Dieulouard,
Villers-en-Have, Avrainville, Andilly,
M�nil-la-Tour, Boucq, Corni�ville, Vignot, Commercy,
L�rouville, Cousanges-aux-Bois.
Il est d�fendu d'entrer dans la zone A sans �tre
porteur d'un permis d�livr� soit par les g�n�raux de
la lre arm�e, soit par le commandant d'armes de la
localit� la plus voisine de l'endroit o� l'on veut
aller.
(Toute personne qui s'adressera au g�n�ral
commandant d'armes de Nancy, devra, au pr�alable, se
munir d'un laissez-passer d�livr� par le maire ou le
commissaire de police. Ce laissez-passer ne sera
vadable qu'apr�s visa pour autorisation de
l'autorit� militaire.)
Pour circuler en arri�re de la ligne susindiqu�e
(zone B et zone C) les permis sont d�livr�s par les
maires, par les commissaires de police ou par les
commandants locaux de gendarmerie, sans �tre soumis
au visa de l'autorit� militaire.
La zone C est s�par�e de la zone B par une ligne
longeant la Moselle, du Thillot � Toul, puis la
route de Toul � Ligny-enBarrois par Void.
Pour passer de la zone C dans la zone B en voiture
ou � pied. les permis d�livr�s par les maires ou les
commissaires de police doivent �tre soumis au visa
de l'autorit� militaire.
De cette r�glementation, il r�sulte que des
localit�s comme Champigneulles, Frouard, Liverdun,
etc., d'un acc�s facile aux personnes circulant �
pied ou en voiture (puisque ces localit�s
appartiennent � la zone B) ne sont accessibles par
chemin de fer que dans les conditions indiqu�es au �
b (1� ou 2�) de la �� Circulation en chemin de fer �.
Les personnes habitant dans ces localit�s et venant
travailler � Nancy, pourront obtenir des
laissez-passer sp�ciaux : temporaires, d�livr�s par
le commissaire sp�cial de la pr�fecture, ou
permanents, d�livr�s par le cabinet de M. le pr�fet
(sans visa de l'autorit� militaire).
La dur�e de validit� des laissez-passer pour la
circulation en chemin de fer, � pied ou en voiture,
est en principe limit�e � trois jours.
Exceptionnellement, des permis de quinze jours, non
soumis au visa de l'autorit� militaire, pourront
�tre accord�s par les maires ou le commissaire
central aux employ�s ou ouvriers de l'agglom�ration
nanc�ienne.
L'agglom�ration nanc�ienne comprend :
Nancy, Jarville. Tomblaine, Essey, SaintMax,
Malz�ville, Max�ville, Champigneulles, Villers et
Laxou.
Notre offensive
r�ussit
Leurs attaques �chouent
Bordeaux, 20 d�cembre, 16 heures.
De la mer � la Lys, nous avons gagn� un peu de
terrain en avant de Nieuport et de Saint-Georges.
A l'est et au sud d'Ypres, o� l'ennemi renforce ses
organisations d�fensives, combats d'artillerie et
progression l�g�re de notre part.
De la Lys � l'Oise, les forces alli�es se sont
empar�es d'une partie des tranch�es de premi�re
ligne allemandes, sur le front
Richebourg-l'Avou�-Givonchy -les-la- Bassl�e.
Au sud-est d'Albert, la tranch�e enlev�e par nous le
17, pr�s de Maricourt, et perdue le 18, a �t�
reprise hier.
Dans la r�gion de Lihons, les Allemands ont attaqu�
deux fois, et tr�s violemment, pour nous reprendre
les tranch�es conquises par nous le 18. Ils ont �t�
repouss�s.
De l'Oise � l'Argonne, sup�riorit� de notre
artillerie se manifestant par l'interruption du tir
de l'adversaire, la destruction d'abris de
mitrailleuses et d'observatoires et la dispersion
d'un rassemblement.
En Argonne, dans le bois de la Grurie, nous avons
repouss� trois attaques : deux sur Fontaine-Madame,
une � Saint-Hubert.
Entre Argonne et Vosges, aucun incident saillant.
Paris, 21 d�cembre, 0 h. 19.
Communiqu� officiel du 20 d�cembre, 23 heures :
Sur l'ensemble du front, aucune modification n'est
signal�e.
PRISONNIERS
CIVILS DE LA MEUSE
Nous
extrayons du �� Bulletin Meusien � les renseignements
que voici sur les prisonniers civils de la Meuse :
Prisonniers de Combres � Ulm (Wurtemberg),
Gauserviese, Bar. 4 : MM. Georges Rouyer ; Henri
Colvard ; L�once Rouyer ; Louis Lacaille ; Ren�
Mettavant ; Georges Dessoy ; Marcel Dessoy, On�sime
Wariot ; Louis Sirantoine ; Adrien Warlot ; Camille
Humbert ; Humbert-Lesire ; Ernest Sirantoine ; Henri
Mangin ; Georges Lacaille ; Gaston Finot ; Henri
Kodisch. - Camille Minot est intern� � Zvickau
(Saxe), 3e compagnie. Avec nombre de ses
concitoyens, il a d'abord �t� enferm� pendant quatre
jours, 22-26 septembre, avant d'�tre emmen�
prisonnier.
M. Fel Mailfer, son fils Emile, de Hannonville-sous-les-C�tes,
sont prisonniers avec 43 habitants du m�me pays �
Ulm-sur-Danube Gansw�se, baraque 4 (Wurtemberg). On
sait que tous les hommes de ce village ont �t�
emmen�s en Allemagne Il para�t qu'une douzaine y
sont morts.
D'une lettre d'un prisonnier, il r�sulte que nos
malheureux compatriotes sont soumis � un r�gime des
plus rigoureux, oblig�s souvent de se contenter pour
toute nourriture d'un brouet dans lequel le riz
entre en majeure partie, et qui ressemble, � s'y
m�prendre, � de la colle de tapissier.
M. l'abb� Baur, cur� de Warcq, est en captivit� en
Allemagne. Son fr�re, de Moulins, en a �t� inform�.
MM. Fran�ois, cur� de Nub�court ; P�rin, d'Hennemont
; Maurice, de Paxeid ; Ruiquin, de Pintheville ;
Bastien, d'Apremont ; Lion, de Varn�ville ; Juste,
de RichecoUtrt ; Aubois, d'Hattonch�tei ; Peltier,
vicaire de Stenay.
M. Briet, de Sassey, a �t� emmen� en Allemagne, avec
25 habitants de la commune et a donn� des nouvelles
� un die ses parents. - Virginie Cayer, 6e -Cie, n�
834 Kiiegsgefangenen lager Reicherbackastrass �
Zwickau (Saxe) - Louis Thibert, ancien directeur de
la Soci�t� G�n�rale de Ligny, prisonnier � Munster
(Westphalie). - J. Bouvier, employ� � la caisse
d'�pargne de Bar-le-Duc. - M. R�veillez, employ� de
banque � Bar-le-Duc.
M. l'abb� Tridon, cur� de Heudicourt, apr�s �tre
rest� dans sa paroisse jusqu'au 13 octobre aux mains
des Allemands, fut emmen�, � cette date, et jntern�
� la forteresse d'Ehrenbreitstein, pr�s de Coblentz,
en compagnie de 118 autres Fran�ais, dont deux
pr�tres de la Meuse : M. l'abb� Aubois, cur� d'Hattonch�tel,
et M. l'abb� Reneaux, d'Eton, ainsi que MM. Guet.
Beausiey de Saint-Maurice ; L�on Deville, C�l. Henry
et Fern. L�ridon, de Pillon.
Il fut lib�r� derni�rement avec le maire d'Hom�court
(M.-et-M.). Il est actuellement r�fugi� � Mornes
(Haute-Savoie).
Nous enlevons
ses tranch�es
UN PEU PARTOUT
Il bombarde les villes ouvertes et les h�pitaux
Bordeaux, 21 d�cembre, 16 heures.
Dans la journ�e du 20, rien d'important � signaler
en Belgique. Nous avons fait toutefois quelques
progr�s dans les r�gions de Lombaertzyde, de
Saint-Georges et au sud-est du cabaret Korteker
(sud-ouest de Bixschoote). Nous avons occup�
quelques maisons de Zwartelem (sud de Zillekerke) et
l'ennemi a bombard� l'h�pital d'Ypres.
De la Lys � l'Aisne, nous avons enlev� un bois pr�s
de la route Aix-Nouelette-Souchez et avons occup�
ainsi toute la premi�re ligne de tranch�es
allemandes entre cette route et les premi�res
maisons de Notre-Dame-de-Lorette, au sud-ouest de
Loos.
L'ennemi a bombard� Arras. Notre artillerie lourde a
fait taire � diverses reprises l'artillerie ennemie.
Au nord de Carnoy (est d'Albert), elle a boulevers�
les tranch�es allemandes et culbut� deux pi�ces
d'une batterie �tablie pr�s de Hem (sud-est de
Carnoy). Elle a aussi pris nettement l'avantage sur
l'Aisne et dans le secteur de Reims.
En Champagne, dans les r�gions de Prosnes, de
Perthes et de Beaus�jour, ainsi qu'en Argonne, nous
avons r�alis� sur tout notre front des gains
appr�ciables, en particulier au nord-est de
Beaus�jour, o� nous avons conquis 1.200 m�tres de
tranch�es ennemies.
Dans le bois de la Grurie, nous avons fait exploser
quatre sapes min�es et nous nous sommes �tablis dans
les excavations.
Entre l'Argonne et la Meuse, progr�s sur tout le
front, notamment dans la r�gion de Varennes, o� le
ruisseau de Cheppes a �t� d�pass� de 500 m�tres, et
dans la r�gion de Gercourt et de B�thincourt.
Sur la rive droite de la Meuse, nous avons gagn� du
terrain sur la Croupe � deux kilom�tres au
nord-ouest de Brabant et dans le bois de Consenvoye.
Enfin sur les Hauts-de-Meuse, l�gers progr�s dans le
bois des Chevaliers, au, nord-est du fort de Troyon.
Les Anglais ont
repris leurs tranch�es perdues
NOUS EN AVONS
PRIS DE NOUVELLES
Paris,
22 d�cembre, 5 h. 35.
Voici le communiqu� officiel du 21 d�cembre, 23
heures :
Les troupes britanniques ont attaqu� et, dans la
matin�e, elles avaient repris la plupart des
tranch�es qu'elles avaient perdues.
Devant Lihons, l'ennemi a prononc�, quatre attaques
successives pour reprendre les tranch�es que nous
avions pr�c�dement conquises dans cette r�gion.
Toutes ses attaques ont �t� repouss�es.
Nous avons attaqu� au nord-est de Puisaleine, au sud
de Roy on et nous avons pris pied dans les tranch�es
adverses de premi�re ligne, et progress� dans le
bois de Saint-Mard.
Aucun autre renseignement important, n'est encore
parvenu sur les op�rations de la journ�e.
L'ENTR�E DES
ALLEMANDS A SAINT-DI�
Nous
avons reproduit la d�claration du premier lieutenant
Eberlein qui reconnaissait, dans les M�nchner
Nachrichten du 7 octobre dernier, que les troupes
allemandes, � leur entr�e � Saint-Di�, le 27 ao�t,
s'�taient abrit�es derri�re des civils d�sarm�s. La
Gazette Vosgienne, de Saint-Di�, donne, sur cet
�pisode, les renseignements compl�mentaires qui
suivent :
�� L'extrait des M�nchner Neueste Nachrichten
n'apprendra rien sans doute � nos concitoyens, mais
il nous permet de pr�ciser d�s maintenant les
d�tails du tragique �pisode auquel le lieutenant
Eberlein a apport� son pr�cieux t�moignage.
�� C'est � l'extr�mit� de la rue d'Alsace que les
civils arr�t�s par les Allemands furent oblig�s de
s'asseoir au milieu de la voie.
�� Quant aux civils arr�t�s par le r�giment de
r�serve �� qui est entr� � Saint-Di� plus au nord �,
ils n'ont pas �t� oblig�s de s'asseoir, mais
seulement de marcher � la t�te du d�tachement
ennemi.
�� Ces civils �taient au nombre de quatre : M.
Camille Ch�tel, dit �� le Blanc �, charpentier, �g�
de 34 ans ; L�on Georges, sans profession, �g� de 27
ans ; Henri Louzy et Georges Visser, comptable. Les
deux premiers seuls furent tu�s. Les deux derniers
n'ont �t� que bless�s et sont aujourd'hui r�tablis.
�� Un autre habitant de notre ville fut tu� le m�me
jour, et c'est � lui sans doute que fait allusion le
passage o� le lieutenant Eberlein d�clare : �� Tout
ce qui se montre encore dans la rue est fusill� �
�� Cette derni�re victime, Camille Lafoucri�re,
manoeuvre, �g� de 18 ans, se trouvait � l'angle des
rues du 10e Bataillon et de la Prairie, lorsqu'un
Allemand tira sur lui un coup de fusil qui le tua
net. �
LA LE�ON D'UNE
SEMAINE
R�SULTATS HEUREUX
DE NOTRE OFFENSIVE
Paris,
22 d�cembre, 1 h. 07.
Le r�cit des principaux faits de guerre du 7
d�cembre au 15 dit qu'au cours de cette p�riode,
l'ascendant pris par notre infanterie nous a permis
de r�aliser, sur plusieurs parties du front, des
progr�s qui paraissent avoir inqui�t� l'ennemi.
L'infanterie allemande est partout peu attentive.
Ses tirailleries continuelles d�c�lent chez elle une
certaine nervosit�.
L'emploi, de plus en plus fr�quent, de projecteurs
et de fus�es �clairantes, r�v�le �galement ses
craintes d'attaques.
Apr�s leurs co�teuses et vaines exp�riences du mois
dernier, nos adversaires paraissent presque partout
r�duits � la d�fensive.
C'est nous qui, sur tout le front, avons une
attitude offensive.
Dans les duels d'artillerie, nos batteries affirment
de plus en plus leur sup�riorit�.
Paris, 22 d�cembre, 1 h. 08.
Le r�cit des faits de guerre du 7 au 15 d�cembre
donne encore ces d�tails :
Entre la mer et l'Oise, les attaques des Allemands
ont �t� repouss�es partout.
Elles �taient, d'ailleurs, mal soutenues par leur
artillerie.
Au contraire, l'infanterie fran�aise, prenant
l'offensive, r�ussit � progresser sur divers points,
notamment � Vermelles, dont l'occupation par les
troupes fran�aises contraignit l'ennemi � reculer de
trois kilom�tres.
Sur la route de Lille �galement, nous avons
progress�, apr�s avoir fait sauter � la sape les
tranch�es allemandes.
Contrairement � l'artillerie allemande, qui ne
r�ussit qu'� causer des d�g�ts mat�riels sans
importance, les batteries fran�aises affirment leur
sup�riorit� en bouleversant les tranch�es ennemies,
en g�nant les travailleurs allemands, en atteignant
les rassemblements de troupes.
Malgr� les intemp�ries, le moral des Fran�ais est
parfait ; leur bonne humeur �tonne les prisonniers
allemands par son contraste avec la lassitude de
leurs camarades.
Entre l'Oise et l'Argonne, tandis que l'artillerie
allemande s'acharne � bombarder les villes et les
villages, l'artillerie fran�aise atteint les trains
allemands, disperse les rassemblements, d�truit
mitrailleuses et canons lourds de l'ennemi.
En Argonne, l'ennemi marque toujours la plus grande
activit�.
La guerre de sape se m�le aux attaques de
l'infanterie. Les troupes fran�aises ont r�ussi �
repousser l'ennemi des divers points, notamment
devant Saint-Hubert.
Elles gagnent du terrain � l'ouest de Perthes.
Les Allemands, dont les attaques d'infanterie sont
vaines, ont r�ussi � faire sauter � la mine quelques
tranch�es fran�aises � Haute-Chevauch�e, mais un
barrage emp�che la progression ennemie.
De l'Argonne � la fronti�re suisse, l'artillerie a
montr� surtout de l'activit�, particuli�rement dans
la r�gion de Varennes, mais les Allemands ont
seulement r�ussi � causer des d�g�ts mat�riels,
alors que les batteries fran�aises, rep�rant
habilement les positions ennemies, ont d�truit des
convois et des colonnes de blockhaus ennemis.
Entre la Meuse et la Moselle, la progression
fran�aise est continue. Une attaque fran�aise contre
les bois de Remi�re et de Sonnard �tait parvenue �
occuper la premi�re ligne des tranch�es ennemies,
mais la deuxi�me ligne allemande r�ussit � r�occuper
la premi�re ligne, o� les fantassins fran�ais
�taient dans une position tr�s difficile, par suite
d'un terrain d�tremp� Malgr� l'extr�me difficult� du
terrain, nous reprenions, le m�me jour, 500 m�tres
du front momentan�ment abandonn�.
Des avions fran�ais ont bombard�
Fribourg-en-Brisgau, le 15 d�cembre.
Dans les Vosges, les positions conquises sont
solidement maintenues, malgr� les attaques
allemandes, et nos progr�s continuent et
s'accentuent.
Les Allemands essaient vainement, au prix de lourds
sacrifices, de reprendre Cernay.
Ils r�ussissent � occuper Steinbach, dont les
hauteurs dominant Cernay restent entre nos mains.
En r�sum�, sur un grand nombre de points, nos
attaques furent couronn�es de succ�s.
Nous n'avons abandonn� nulle part le terrain gagn�.
Partout l'ennemi a d� garder une attitude d�fensive,
qui a confirm� les troupes fran�aises dans la
conscience de leur sup�riorit�.
ATTAQUES &
CONTRE-ATTAQUES
Quelques
positions conquises
D'autres consolid�es
Bordeaux, 22 d�cembre, 16 heures.
Entre la mer et la Lys, il n'y a eu dans la journ�e
du 21 que des combats d'artillerie.
De la Lys � l'Aisne, nous avons refoul� une attaque
allemande qui cherchait � d�boucher de Carency et
nous avons pris quelques maisons � Blangy.
Une attaque allemande sur Mametz et les tranch�es
voisines n'a pas permis � nos troupes de progresser
sensiblement de ce c�t� Dans la r�gion de Lihons,
trois attaques ennemies ont �t� repouss�es.
L�ger gain � l'est et � l'ouest de Tracy-le-Val.
Notre artillerie a tir� efficacement sur le plateau
de Nouvrons.
Dans les secteurs de l'Aisne et de Reims, combats
d'artillerie.
En Champagne et en Argonne, autour de Souain,
violents combats � la ba�onnette.
Nous n'avons pas progress� d'une fa�on sensible dans
cette r�gion. Nous avons enlev� aux abords de
Perthes-les-Hurlus trois nouveaux ouvrages allemands
repr�sentant un front de tranch�es de 1.500 m�tres.
Au nord-est de Beaus�jour, nous avons consolid� les
positions conquises le 20 et occup� toutes les
tranch�es qui bordent la cr�te du Calvaire.
Dans le bois de la Grurie, notre progression a
continu�.
A Saint-Hubert, nous avons repouss� une attaque.
Dans le bois de Bolante, o� quelque terrain avait
�t� perdu, nous en avons repris les deux tiers.
Entre Argonne et Meuse, l�gers progr�s aux abords de
Vauquois.
Au nord du bois de Malanoourt, nos troupes ont
r�ussi � franchir un r�seau de fils de fer et �
s'emparer des tranch�es ennemies, o� elles se sont
maintenues.
Sur la droite de la Meuse, dans le bois de
Consenvoye, nous avons perdu, puis reconquis, apr�s
de vifs combats, le terrain gagn� par nous le 20.
Des Hauts-de-Meuse aux Vosges, rien � signaler.
Paris, 23 d�cembre, 0 h. 50.
Communiqu� officiel du 22 d�cembre, 23 heures :
Au nord-ouest de Puisaleine, sud de Noyon, l'ennemi
a ex�cut�, hier soir, de violentes contre-attaques,
qui ont �t� toutes repouss�es.
Au sud de Varennes, nous avons pris pied, hier soir,
dans Boureuilles.
Nos attaques ont continu� aujourd'hui.
Elles paraissent nous avoir fait progresser dans
Boureulles et � l'ouest de Yauquois.
Rien n'est encore signal� du reste du front.
PAROLES DE
REVENANTS
Un jeune
homme, arriv� r�cemment de Longuyon, nous donne,
apr�s avoir lu le r�cit que nous avons publi� le 9
de ce mois, des renseignements compl�mentaires.
Il ne serait pas �tabli avec certitude que M. et Mme
Delorme aient �t� trouv�s morts dans leur cave, il
est certain seulement qu'ils n'ont plus �t� revus.
L'assassinat de M. le cur� Braux et de M. l'abb�
Persyn se serait accompli dans les circonstances
suivantes : Les Allemands firent demander chez les
soeurs M. le cur� et le P�re Oblat Thiriez. Ce
dernier �tait absent. Le cur�, ne sachant ce qu'on
leur voulait, dit � l'abb� Persyn : �� Venez avec moi
�. Tous deux furent d'abord d�tenus, au pain et �
l'eau, pendant trois jours, chez M. Colette,
marchand de vins, puis fusill�s. M. le cur� avait
plant� le drapeau de la Croix-Rouge sur le clocher
de l'�glise pour la pr�server ; les Allemands ont
pr�tendu que c'�tait un signal destin� aux Fran�ais.
Mme Pellerin re�ut deux balles ; elle traversait la
route de Froidcul pendant que les Allemands
entraient. Elle tomba sur l'escalier de la maison
vers laquelle elle se dirigeait, criant : ��
Achevez-moi ! � puis mourut presque aussit�t. Dans
la rue Jeanne-d'Arc, au quartier de la Gaillette, il
n'y a qu'une maison br�l�e, celle qui est situ�e
dans le haut, pr�s d'une maison en construction.
Les maisons habit�es par MM. Clesse et Montagnon ont
re�u chacune un obus qui fit de grands ravages.
Elles n'ont pas �t� br�l�es. Dans la rue de la
Gaillette, au-dessous de la rue Jeanne-d'Arc, il
reste encore deux maisons intactes : celles du bout,
en montant vers le ch�teau-d'eau.
A Froidcul, la maison Thi�baut a �t� cribl�e de
balles, mais non br�l�e. Les
deux premi�res maisons, � gauche, en montant, ont
re�u des obus, mais ne furent pas br�l�es ; les
autres sont d�truites, sauf la derni�re, � gauche
toujours en montant. M. Martin, le facteur, l'a�n�
des fils Reinalter, les enfants de Mme Chr�tien ont
�t� fusill�s. Mme Barth�l�my, de Spincourt, est chez
Mme Goucet, � Longuyon, ainsi que la famille Fondeur
et Mme Comon. M. Feuillade a �t� nomm� non pas
maire, mais adjoint par l'autorit� allemande. Un
changement de commandant lui a retir� cette peu
enviable fonction.
Nous remarquons, par les r�cits des tueries que nous
apportent les r�fugi�s, la pr�occupation des bandits
� trouver un motif justificateur. On a dit que
l'hypocrisie �tait un hommage rendu � la vertu ; les
Allemands reconnaissent ainsi combien il est
criminel de massacrer sans raisons les populations
civiles. Les motifs qu'ils donnent sont improvis�s
d'ailleurs avec une impudeur grossi�re, comme dans
le cas du cur� de Longuyon. Pour Mme Pellerin, ils
ont pr�tendu qu'elle avait un revolver !
De m�me pour les otages. Ils ont emmen� le maire de
Lexy, parce qu'on d�couvrit des soldats fran�ais
r�fugi�s dans une cave du village ; � Herserange, o�
la population fut plac�e devant les batteries
allemandes, MM. Haut, Hendart et le cur� ont �t�
emmen�s parce qu'on trouva des pigeons chez eux (�
Longwy, il fallait porter � l'autorit� les t�tes
coup�es des pigeons que l'on poss�dait) ; le maire
de Remoncourt fut emmen� aussi en captivit� parce
qu'un uhlan �tait mort. On accusa le maire de ne pas
l'avoir assez bien soign�.
Ils ne sp�cifient pas la cause de la mort du baron
de Klopstein, mais pensent s'excuser en racontant
que c'est une balle �gar�e qui le frappa, � sa
fen�tre, en plein front, par un malencontreux
hasard. Seulement, le soir, un capitaine, ivre,
annon�ait triomphalement qu'il avait tu� �� le
gentilhomme du pays �. Et cette brute ricanait en
voyant les larmes que ne pouvait retenir la femme
devant qui son orgueil avin� �ructait ses paroles.
La saoulerie fut digne de la soif allemande : 25.000
bouteilles de vin fin, provenant du pillage du
ch�teau, coul�rent dans les ventres teutons,
remplis, mais non rassasi�s.
GUSTAVE VERNON.
RENTR�E DES
CHAMBRES
La D�claration
minist�rielle
Paris,
22 d�cembre, 15 h. 45.
La rentr�e des Chambres a eu lieu cet apr�s-midi.
Grande affluence � la Chambre. Les tribunes
r�serv�es au public sont pleines, notamment celles
r�serv�es au corps diplomatique.
Tous les d�put�s assistent � la s�ance, qui s'ouvre
� 2 h. 15.
M. Deschanel, pr�sident, prononce aussit�t son
allocution.
Allocution de M. Deschanel
�� Les repr�sentants de la France, dit-il, doivent
�lever leurs �mes vers les h�ros qui combattent pour
elle depuis cinq mois.
�� Jamais la France ne fut plus grande. Jamais, en
aucun temps, en aucun pays, on ne vit plus
magnifique explosion de vertus.
�� C'est que la France ne d�fend pas seulement, en
cette heure d�cisive, sa vie, sa terre, ses
souvenirs sacr�s. Avec l'Angleterre, la Russie, la
Belgique, la Serbie et le Japon elle d�fend encore
le respect des trait�s, l'ind�pendance de l'Europe
et la libert� humaine.
�� Aujourd'hui, il s'agit de savoir si la mati�re
asservira l'esprit, si le monde sera la proie
sanglante de la violence.
�� L'Europe veut respirer. Les peuples entendent
disposer librement d'eux-m�mes
�� Pour nous, nous ferons jusqu'au bout tout notre
devoir, pour r�aliser la pens�e de notre race : Le
droit prime la force. �
Les d�put�s d�c�d�s
M. Deschanel a fait ensuite l'�loge fun�bre des
d�put�s d�c�d�s. Il a rendu surtout un �loquent
hommage � l'h�ro�sme des membres du Parlement tu�s �
l'ennemi.
M. Viviani a alors donn� lecture de la D�claration
du gouvernement.
LA D�CLARATION
La D�claration minist�rielle d�bute ainsi :
L'union nationale
�� Il n'y a, pour l'heure, qu'une politique.
C'est une politique de combat sans merci, jusqu'� la
lib�ration d�finitive de l'Europe, ayant pour gage
une paix pleinement victorieuse.
�� C'est le cri unanime du Parlement, du pays et de
l'arm�e.
�� Devant le surgissement, inattendu pour elle, du
sentiment national, l'Allemagne a �t� troubl�e dans
l'ivresse de son r�ve de victoire. �
L'Allemagne seule responsable
La D�claration constate ensuite qu'il est
actuellement d�montr� que l'Allemagne est
enti�rement responsable de la guerre ; que depuis
plus de 40 ans elle poursuivait inlassablement son
but, l'�crasement de la France, pour arriver �
l'asservissement du monde.
Nous irons jusqu'au bout
�� Puisque, malgr� leur attachement � la paix, la
France et ses allies ont d� subir la guerre, elles
la feront jusqu'au bout.
�� La France n'abaissera les armes qu'apr�s avoir
veng� le droit outrag�, soud� pour toujours � la
Patrie la Belgique dans la pl�nitude de sa vie
mat�rielle et de son ind�pendance politique ; bris�
le militarisme prussien, afin de pouvoir
reconstruire sur la justice une Europe enfin
r�g�n�r�e.
La certitude de la victoire
�� Nous avons la certitude du succ�s. Nous avons pu
montrer au monde qu'une d�mocratie organis�e peut
servir, par une action vigoureuse, l'id�al de
libert� et d'�galit� qui fait sa grandeur. �
La t�che peut �tre longue
La D�claration confirme que notre situation
financi�re nous permet de continuer la guerre
jusqu'au jour o� les r�parations n�cessaires seront
obtenues.
La D�claration continue, en ces termes :
�� Le jour de la victoire d�finitive n'est pas encore
venu. La t�che, jusque-l�, sera rude. Elle peut �tre
longue.
�� Pr�parons-y nos volont�s et nos courages.
�� H�riti�re du plus formidable fardeau de gloire
qu'un peuple puisse porter, la France souscrit
d'avance � tous les sacrifices.
�� Nos alli�s le savent. Les nations neutres le
savent.
�� Une campagne effr�n�e de fausses nouvelles a
essay� vainement de surprendre en elles la sympathie
qui nous est acquise.
�� Si l'Allemagne, au d�but, a feint d'en douter,
elle n'en doute plus � pr�sent. �
L'union des alli�s pour l'id�al du droit
La D�claration conclut :
�� Aujourd'hui comme hier, comme demain, n'ayons que
le cri de la victoire, que la vision de la Patrie,
que l'id�al du droit.
�� C'est pour lui que nous luttons, que luttent
encore la Belgique, qui a donn� � cet id�al tout le
sang de ses veines ; l'in�branlable Angleterre, la
Russie fid�le, l'intr�pide Serbie, l'audacieuse
marine japonaise.
�� Rien de plus grand n'apparut jamais aux regards
des hommes contre la barbarie et le despotisme,
contre le syst�me de provocations et de menaces
m�thodiques que l'Allemagne appelait �� la paix �,
contre le syst�me des meurtres et des pillages
collectifs que l'Allemagne appelle �� la guerre � ;
contre l'h�g�monie insolente d'une caste militaire
qui a d�cha�n� le fl�au...
�� Avec ses alli�s, la France �mancipatrice et
vengeresse, d'un seul �lan, s'est dress�e. �
DEUX BOMBES SUR
NANCY
AUCUN MAL
Mardi,
22 d�cembre, un peu avant une heure de l'apr�s-midi,
un ar�oplane allemand a mis � profit le temps
particuli�rement clair pour survoler Nancy � une
grande hauteur.
En passant au-dessus du faubourg Saint-Georges, il a
laiss� tomber une bombe. Le projectile a atteint la
toiture d'un b�timent des Docks et Magasins
g�n�raux, en bordure sur la rue Lamothe. Apr�s avoir
bris� deux tuiles, il est all� tomber sur le
plancher du grenier, o� il est rest� sans exploser.
Il a �t� ramass� peu apr�s par les employ�s des
Docks qui en ont fait la remise � l'officier
commandant le poste de la gare Saint-Georges.
Cette bombe, tomb�e � une heure moins cinq, n'a
caus� aucun d�g�t.
Dix minutes apr�s, un autre projectile, venait
tomber rue Grandville, devant la maison portant le
num�ro 5. Cette bombe mal dirig�e, s'�crasait par le
culot sur le pav� de la rue. Elle se brisait en
quatre parties, sans faire explosion. La charge,
compos�e d'une poudre de couleur jaun�tre, se
r�pandait sur la chauss�e.
Un enfant, qui se trouvait dans la rue, a ramass�
les morceaux de l'engin et les a remis quelques
minutes apr�s � un officier de la place.
Comme aux Docks, cette bombe n'a caus� ni accident
de personnes ni d�g�ts mat�riels.
Les avions fran�ais ont donn� bient�t la chasse au
Taube qui s'est empress� de regagner les lignes
allemandes afin de se mettre � l'abri.
Nos ennemis, qui ne devaient avoir d'autre but que
de jeter la panique parmi la population nanc�ienne
en sont pour leurs frais, et cette tentative
infructueuse d�montre, une fois de plus, la qualit�
de leur �� camelote �. Mais n'allons pas nous en
plaindre !...
RETOUR DE
PRISONNIERS
Mardi,
22 d�cembre, � 5 heures du soir, MM. Auguste Maire,
maire d'Arracourt ; Joseph Bourdon, de Laneuveville-aux-Bois;
Jules Antoine, d'Arracourt ; Dime, adjoint, d'Emberm�nil
; Dumont, Camille Bontemps, de Bey ; Florentin, d'Arraye-etHan
; Moitrier, de Pont-�-Mousson ; Hostier, maire
d'Hom�court, qui depuis le d�but de la guerre
�taient prisonniers des Allemands et intern�s � la
citadelle d'Ehrensbreisten, pr�s de Coblentz, sont
arriv�s � Nancy, apr�s un long et fatigant voyage.
Ces neuf Fran�ais furent ramen�s de leur lieu
d'internement � Dieuze, qu'ils quitt�rent mardi
matin, � 3 heures. Ils furent dirig�s vers la
Suisse, qu'ils durent traverser avant de rentrer en
France.
Aux quelques personnes avec lesquelles ils se sont
entretenus, ils ont d�clar� que pendant quelque
temps il y eut plus de trois cents Fran�ais civils
intern�s � Ehrenbreisten. Parmi eux se trouvaient de
nombreux Lorrains des pays annex�s, dont les deux
fr�res Samain.
Peu � peu les Allemands d�livr�rent une partie des
intern�s ; au moment du d�part de nos compatriotes,
� peine cent Fran�ais �taient encore dans la
forteresse.
LA MINE ET LA
BA�ONNETTE
ont bien
travaill�
Section de mitrailleuses captur�e
Bordeaux, 23 d�cembre, 16 heures.
En Belgique, nous avons, hier, l�g�rement progress�
entre la mer et la route de Nieuport � Westende,
ainsi que dans la r�gion Steenstraete-Bixchoote, o�
nous avons enlev� un bois, des maisons et une
redoute.
A l'est de B�thune, nous avons repris, en
collaboration avec l'arm�e britannique, le village
de Givenchy-les-La-Bass�e qui avait �t� perdu.
Dans la r�gion d'Arras, un �pais brouillard a
ralenti l'activit� de l'ennemi et la n�tre.
A l'est d'Amiens, sur l'Aisne et en Champagne,
combats d'artillerie.
Dans la r�gion de Perthes-les-Hurlus, nous avons
apr�s une vive canonnade et deux assauts, enlev� le
dernier tron�on de la ligne partiellement conquise
le 21 (gain moyen 800 m�tres).
Dans la derni�re tranch�e prise, nous avons captur�
une section de mitrailleuses compl�te (personnel et
mat�riel). Une violente contre-attaque a �t�
repouss�e.
Nous avons �galement progress� au nord-est de
Beaus�jour, o� l'ennemi a de nouveau contre-attaqu�
sans succ�s.
Sensible avance de nos troupes dans le bois de la
Grurie. Sur un front de tranch�es de 400 m�tres et
une profondeur allant jusqu'� 250 m�tres, nous avons
fait sauter � la mine deux lignes allemandes et
occup� les excavations.
Les combats se poursuivent autour de Boureuilles, o�
les r�sultats assez s�rieux acquis hier matin,
paraissent n'avoir pu �tre enti�rement maintenus.
Aucun incident des Hauts-de-Meuse � la Haute-Alsace.
NOS PROGR�S
ENTRE LA MEUSE ET
L'ARGONNE
Paris,
24 d�cembre, 1 h, 12.
Voici le communiqu� officiel du 23 d�cembre, 23
heures :
Les progr�s r�alis�s par nos attaques, entre la
Meuse et l'Argonne, ont �t� presque enti�rement
maintenus.
Aux derni�res nouvelles, notre front atteignait le
r�seau de fils de fer de l'ennemi, au saillant
sud-ouest du bois de Forges, � l'est de Cuisy, et il
bordait le chemin au bois de Boureuilles.
Aucun autre incident notable � signaler.
NOTRE POUSS�E
Attaques et
contre-attaques, surtout dans le Nord, dans l'Aisne,
en Champagne, en Wo�vre et en Vosges favorisent nos
armes.
Paris,
24 d�cembre, 1 h. 35.
De la mer � la Lys, nous avons progress� � la sape
dans les dunes et repouss� une contre-attaque devant
Lombaertzide.
A Zwartelen (sud-est d'Ypres), nous avons enlev� un
groupe de maisons et refoul� jusqu'� la partie sud
du village, malgr� un feu tr�s vif de l'artillerie
allemande, une contre-attaque ennemie.
L'arm�e belge a pouss� des d�tachements sur la rive
droite dei l'Yser, au sud de Dixmude, et organis�
une t�te de pont.
Dans la r�gion d'Arras le brouillard a continu� �
rendre toute op�ration Impossible.
A l'est et au sud-est d'Amiens, notamment aux abords
de Lassigny, combats d'artillerie.
Dans la r�gion de l'Aisne, les zouaves pendant toute
la journ�e, ont brillamment repouss� plusieurs
attaques et sont demeur�s ma�tres, pr�s du chemin de
Puisaleine, des tranch�es allemandes enlev�es le 21.
En Champagne, nous avons consolid� nos progr�s de la
veille, dans la r�gion de Craonne et de Reims. Pr�s
de Perthes, toutes les contre-attaques de l'ennemi
sur les positions conquises par nous le 22, ont �t�
repouss�es.
Au nord-ouest de Mesnil-les-Hurlus, nous avons
enlev� 400 m�tres de tranch�es allemandes et
repouss� une contre-attaque. Les Allemands ont tent�
de prendre l'offensive du c�t� de Ville-sur-Tourbe.
Notre artillerie les a dispers�s.
En Argonne, nous avons gagn� un peu de terrain dans
le bois de la Grurie et repouss� une attaque
allemande vers Bagatelle.
Dans la r�gion de Verdun, aucune op�ration
importante � cause de la brume.
L'ennemi a contre-attaqu� sans succ�s dans le bois
de Consenvoye.
Dans la for�t d'Apremont notre artillerie a
boulevers� et fait �vacuer plusieurs tranch�es par
l'ennemi.
En Wo�vre, elle a r�duit au silence les batteries
allemandes.
Dans la r�gion du Ban-de-Sapt, au nordest de
Saint-Di�, notre infanterie a fait un bond en avant
et s'est �tablie sur le terraiin gagn�.
Rien � signaler en Haute-Alsace.
Paris, 25 d�cembre, 0 h, 35.
Communiqu� officiel du 24 d�cembre, 23 heures :
Au nord de la Lys, l'ennemi a canonn� assez
violemment les abords de la route d'Ypres � Comines
et ceux de Langemark, mais il n'a prononc� aucune
attaque.
Devants La Boisselle, au nord-est d'Albert, l�g�re
progression de nos troupes.
La nuit derni�re, une attaque allemande sur le bois
de Saint-Mard, � l'est de Tracy-le-Val, a �t�
repouss�e.
Nous organisons les tranch�es enlev�es avant-hier,
pr�s de Puisaleine.
Le terrain conquis dans le Ban-de-Sapt, pr�s de
Launois, au nord de Saint-Di�, a �t� conserv� et
organis�.
Aucune autre nouvelle importante n'est parvenue du
reste du front.
LA
RECONSTRUCTION
DES
VILLAGES LORRAINS
Nancy,
25 d�cembre.
III
Simultan�ment avec la commission des parlementaires
des r�gions envahies, dont nous ignorions les
conclusions, nous avons soutenu, dans l'Est
R�publicain, que la Nation devait supporter la
d�pense de reconstitution des villages d�truits.
Le gouvernement en prit l'engagement solennel devant
les Chambres, proposa une premi�re ouverture de
cr�dit de 300 millions, affirma �� que la France
redresserait ces ruines en escomptant certes le
produit des indemnit�s qu'elle exigerait de l'ennemi vaincu mais, en attendant, � l'aide d'une
contribution que la Nation enti�re paierait, fi�re,
dans la d�tresse d'une partie de ses enfants, de
remplir le devoir de la solidarit� nationale. �
A l'unanimit�, les Chambres ratifi�rent cette
proposition, se r�servant d'en pr�ciser
l'application par une loi sp�ciale.
Au lendemain de ce vote, l'un des membres les plus
actifs de la commission parlementaire nous
encourageait � poursuivre notre modeste
collaboration � l'�tude de cette oeuvre nationale : ��
Continuez, nous �crivait-il, � pousser � la roue,
car nous ne sommes pas au bout de nos difficult�s,
en cette mati�re. �
La besogne est complexe, en effet, car elle
int�resse notre patrimoine d'art, celui des villes
et des villages. Nous nous pr�occupons seulement de
faciliter le retour � la terre et d'y maintenir ceux
qui en tirent leurs moyens d'existence. En Lorraine,
o� de grandes industries se sont cr��es et
d�velopp�es au milieu des campagnes, nous songeons
encore ainsi � assurer l� une r�serve de
travailleurs industriels pouvant jouir de la vie
familiale, au grand air.
Les avis que nous exprimons nous ont �t� sugg�r�s au
cours des visites dans les villages ravag�s par
l'Allemand.
Certains propri�taires de maisons d�truites nous ont
avou� que s'ils touchaient leur indemnit� en
esp�ces, ils n'h�siteraient pas � vendre ensuite
leurs terres � n'importe quel prix, pour aller se
fixer ailleurs.
N'est-ce point les prot�ger contre leur propre
impr�voyance que d'employer cette indemnit� � la
reconstruction de leur maison pour les maintenir l�
o� ils sont assur�s de pourvoir � leurs besoins ?
N'est-ce point d�fendre l'int�r�t collectif du
village que d'emp�cher l'avilissement du prix des
terres et d'assurer la disparition des maisons en
ruines ?
C'est pour d�fendre ce m�me int�r�t collectif que
nous soutenons que l'�tude de l'am�nagement
d'ensemble du village doit pr�c�der celle de toute
reconstruction particuli�re. A Cr�vic, par exemple,
92 maisons ont �t� totalement incendi�es ; les
ruines laissent encore appara�tre le d�faut total du
trac� d'alignement, cause de g�ne pour la
circulation ou l'�tablissement de caniveaux, et la
distribution d�fectueuse de b�timents surajout�s
sans souci de l'�clairage ou de l'a�ration. On ne
doit point reconstruire ce village avant d'avoir
�tabli pr�alablement un plan d'ensemble des voies �
rectifier, des canalisations n�cessaires, et une
�tude avec devis pour chaque maison nouvelle qui
devra non seulement compenser celle d�truite, mais
r�pondre aux besoins r�els de celui auquel elle sera
destin�e, et, � ce sujet, nous pr�ciserons notre
conception de la maison du cultivateur lorrain.
Il conviendra ensuite par raison d'�conomie de faire
emploi de tous les mat�riaux utilisables provenant
des maisons ravag�es en les affectant, au besoin, �
l'ensemble des travaux de reconstruction.
Des r�sistances - s'opposeront pour l'�change des
parcelles et l'attribution de ces mat�riaux ; la
d�claration d'utilit� publique en facilitera la
r�duction.
Il semble donc qu'il conviendrait de dresser un �tat
comprenant le d�tail de chaque sinistre et r�sumant
l'indemnit� globale n�cessaire � chaque village pour
relever ses ruines ; de consid�rer ces travaux de
reconstruction comme un ensemble de travaux
communaux d'utilit� publique ; de soumettre � une
seule expropriation la totalit� des parcelles
occup�es par les maisons � reconstruire, sous
r�serve de r�troc�der, � titre gratuit, � chaque
propri�taire l'emplacement n�cessaire pour sa
nouvelle demeure, et de lui compenser les parcelles
distraites de son patrimoine pour les alignements ou
l'emplacement mieux appropri� des nouveaux b�timents
communaux.
Les lois en vigueur, relatives aux expropriations,
visant particuli�rement les travaux communaux, ne
paraissent point s'opposer � cette proc�dure
d'expropriation globale mais au surplus la loi,
toujours perfectible, doit s'inspirer des besoins
nouveaux du pays, et, dans le cas particulier, la
l�gislation pourrait encore �tre simplifi�e en
donnant � des commissions d'arbitrage les pouvoirs
n�cessaires pour �valuer les dommages et pr�ciser
les compensations.
MAURICE GRUHIER.
PAUL CHARBONNIER..
NOTRE OFFENSIVE
DES
FLANDRES aux VOSGES
Nous avons avanc�
partout
Paris,
25 d�cembre, 16 heures.
En Belgique, combats intermittents d'artillerie.
De la Lys � l'Oise, nous avons atteint, le 23 au
soir, la bifurcation des chemins de Loos au Rutoire
et de Loos � Vermelles.
Au nord-est d'Albert, nous nous sommes empar�s de la
partie du village de la Boisselle, situ�e au
sud-ouest de l'�glise, et d'une tranch�e avanc�e au
sud du village.
Au nord de Roye, � Lihu, pr�s de Lihons, nous avons
�galement fait quelques progr�s. Ces diverses
attaques, men�es avec beaucoup d'entrain, ont
partout conserv� le terrain gagn�.
Au sud de l'Oise, notre artillerie a boulevers� des
organisations d�fensives de l'ennemi dans la r�gion
de Bailly et sur le plateau de Nouvron.
Sur l'Aisne et en Champagne, combats d'artillerie.
Plusieurs attaques allemandes ont �t� repouss�es. Au
nord de Sapigneul (pr�s de Berry-au-Bac) notamment,
une l�g�re avance de nos troupes a �t� suivie d'une
forte contre-attaque ennemie qui a compl�tement
�chou�.
Dans la r�gion de Perthes et de Mesnilles-Hurlus,
nos progr�s des jours pr�c�dents ont �t� poursuivis
et consolid�s.
Au nord de Mesnil, nous nous sommes empar�s d'un
bois, fortement organis� par l'ennemi, � l'est des
tranch�es conquises par nous le 23 d�cembre.
Au nord-est de Mesnil, et � l'est de Perthes, nous
avons chass� l'ennemi des tron�ons de tranch�es
qu'il occupait encore et nous sommes maintenant
ma�tres de toute sa premi�re ligne de d�fense.
En Argonne, dans le bois de la Grurie, � Bagatelle,
Fontaine-Madame et Saint-Hubert, nous avons repouss�
cinq attaques et conserv� notre front.
Entre Argonne et Meuse, malgr� la neige et le
brouillard, nous avons progress� sur le front
Boureuilles-Vauquois.
Dans la r�gion de Cuisy-Bois-de-Forges, notre
artillerie lourde, en ma�trisant les batteries et
les mitrailleuses ennemies, a permis � notre
infanterie de faire un bond en avant.
Sur la rive droite de la Meuse, les Allemands ont
bombard� la corne sud du bois de. Consenvoye, o�
nous sommes �tablis.
Dans le bois d'Ailly et dans la for�t d'Apremont,
notre artillerie a oblig� l'ennemi � �vacuer
plusieurs tranch�es.
Dans les Basses-Vosges, nous nous sommes avanc�s
jusqu'� quinze cents m�tres de Cirey-sur-Vesouze.
Paris, 26 d�cembre, 0 h. 18.
Voici le communiqu� officiel du 25 d�cembre, 23
heures :
L�g�re progression en avant de Nieuport.
Vers Notre-Dame-de-Lorette, au nord de Lens, une
attaque ennemie a �t� repouss�e.
Dans la matin�e, nous avons enlev� de nouvelles
tranch�es pr�s de Puisaleine, et nous nous y sommes
maintenus, malgr� plusieurs contre-attaques.
La nuit derni�re, l'ennemi a attaqu� vigoureusement,
mais sans succ�s, dans les Vosges, � T�te-de-Faux.
LES OTAGES
LORRAINS
SOUS la BOTTE des
BARBARES
M. Florentin, adjoint au maire d'Arraye-et-Han, nous
fait un douloureux tableau des trois mois de
captivit� qu'il a pass�s dans les ge�les.
Nancy,
25 d�cembre.
Parmi les otages revenus � Nancy, mardi dernier, M.
Florentin, adjoint au maire d'Arraye-et-Han, est un
de ceux qui ont v�cu les heures les plus tristes
dans les prisons allemandes.
Allemandes ? Non. M. Florentin est rest� pendant
trois mois � proximit� de la fronti�re, allant d'Arraye
� Delme, puis � Dieuze, � Morhange et enfin �
Phalsbourg.
Il nous a cont� hier son odyss�e en ces termes :
�� Les Allemands sont arriv�s dans le village le 1er
septembre. La municipalit� s'�tait conform�e
scrupuleusement aux instructions administratives :
on avait affich� un appel au calme ; on avait invit�
les habitants qui poss�daient des armes � en
effectuer imm�diatement le d�p�t.
�� Il �tait environ 9 heures et demie du matin,
quand, en sortant du d�bit L�on V..., un client de
l'�tablissement aper�ut dans les jardins un dragon
allemand qui semblait se tenir en embuscade.
�� Presque aussit�t un coup de feu retentit. L'alarme
est donn�e. Les Boches accourent ; ils pr�tendent
que des civils ont tir� sur eux ; ils r�clament la
pr�sence du maire, M. Joseph Rousselot, qui proteste
�nergiquement et affirme que ses recommandations ont
�t� sagement �cout�es par la population.
�� Un capitaine dirige l'enqu�te. Il semble furieux.
Sur son ordre, M. le cur� Lambert attelle une
charrette et se rend � la mairie pour y ramasser les
fusils, pendant qu'une proclamation placard�e sur
les murs menace des pires ch�timents quiconque
s'opposera � l'occupation du pays.
�� Quatre otages, d'ailleurs, r�pondront sur leur vie
du respect de l'autorit� qui vient ainsi de se
substituer � la loi fran�aise : MM. Rousselot et
Godefroy, M. le cur� Lambert et moi sommes d�s lors
prisonniers.
�� Le coup de fusil avait �t� certainement tir� par
le dragon en embuscade ; mais il se garda bien d'en
faire l'aveu. On fr�mit � la pens�e des malheurs
dont Arraye e�t �t� le th��tre, si cette provocation
avait entra�n� les terribles cons�quences, les
ex�cutions, les incendies, les pillages dont on a
enregistr� ailleurs les exc�s criminels.
A Delme
��- Sans permettre aux otages de rentrer chez eux
pour pr�venir leur famille, pour se munir de linge
ou d'argent, une escorte de uhlans nous pousse sur
la route de Delme.
�� Je vous laisse � penser les r�flexions qui
assi�geaient notre esprit. Qu'allait-on faire de
nous ? Une consigne formelle nous emp�chait de
parler. Les uhlans se montraient farouches. Il
n'�tait que trop visible qu'� la moindre incartade
ils assouviraient sur nous leur brutalit�, leur
sauvagerie.
�� En traversant la commune de L�moncourt, une
soldatesque en fureur se pr�cipita vers nous. Le
chef de notre escorte avait rapidement prononc� deux
ou trois mots dont le sens m'�chappait, mais qui
eurent pour effet d'exciter la rage de nos
insulteurs.
�� Leurs menaces, leurs gestes indiquaient une telle
haine, une telle envie de nous �charper que mes
compagnons et moi aurions refus� la libert�, si on
nous l'e�t accord�e � la condition de revenir chez
nous par le m�me chemin.
�� Personne, au surplus, n'�tait d�cid� � nous
l�cher. En arrivant � Delme, les uhlans nous
conduisent directement vers le presbyt�re auquel
l'�tat-major avait donn� l'affectation d'une sorte
de prison civile.
�� C'est l� que j'ai v�cu pendant deux semaines.
Affront, privations ne nous ont pas �t� m�nag�s.
Nous vivions � nos frais; ceux qui poss�daient
quelques ressources devaient naturellement payer la
nourriture de ceux qui avaient �t� emmen�s sans un
marav�dis.
�� Il y avait l� avec nous, trois habitants de
Lanfroicourt et un de M�nil-Flin.
�� L'ennui d'une longue oisivet� fit r�clamer comme
une faveur � plusieurs d'entre nous les fonctions de
cantonniers. Ils cass�rent des cailloux sur la
route, combl�rent les orni�res, moyennant un salaire
quotidien de cinquante sous � trois francs ; mais,
au bout de quelques jours, cette occupation fut
supprim�e.
�� D'autres �preuves nous attendaient.
De Dieuze � Morhange
�� Le 15 ou 16 septembre, l'ordre vint de nous
conduire � Dieuze. Deux �tapes. Voyage sans
incidents s�rieux. D�fense de parler et de fumer.
�� Nous f�mes log�s dans les b�timents de la caserne
avec environ 300 autres prisonniers. On n'y devait
rester que peu de jours.
�� Un matin, nouvel ordre. Nouveau d�part. Il faut
aller � Morhange. Une route de 17 kilom�tres ; peu
de chose pour des jarrets solides, mais une
promenade plut�t rude pour des hommes de notre �ge,
priv�s de sommeil, insuffisamment nourris, bris�s de
fatigue et d'�motion.
�� En franchissant le seuil de la caserne, j'eus
l'impression que le voyage r�serverait � notre
petite troupe des surprises d�sagr�ables ; les
gendarmes charg�s de veiller sur nous �taient rogues
et bourrus ; l'un d'eux engagea si maladroitement un
de ses �triers dans la grille de la porte en passant
qu'il le brisa et qu'une grande heure se passe �
r�parer le d�sastre.
�� Tout alla bien pendant sept ou huit kilom�tres.
Mais, apr�s le village de Conthil, un de nos
camarades commen�a � se plaindre. Il fallut supplier
le chef de l'escorte pour obtenir une halte ; il
fallut supplier davantage pour obtenir
l'autorisation de chercher dans les maisons de
l'endroit une voiture qu'un propri�taire complaisant
voudrait bien nous louer :
�� - Avez-vous de l'argent ? demanda le chef du
d�tachement.
�� - J'ai de quoi payer ce petit d�rangement,
r�pondit un des prisonniers. Cela co�tera quatre ou
cinq mark. J'ai la somme n�cessaire... �
�� Une fermi�re de Conthil consentit � pr�ter sa
voiture ; son fils offrit de conduire ; mais en
apprenant qu'il s'agissait d'�pargner � un
malheureux otage une marche p�nible, ni la femme ni
l'homme n'accept�rent notre argent :
�� - Gardez-le. Vous en aurez besoin. Laissez-nous
donc le plaisir de vous obliger gratuitement.
�� Les Boches se f�ch�rent. Insensibles au mouvement
de g�n�rosit� dont notre caravane �tait l'objet, ils
se r�pandirent en invectives contre la fermi�re, lui
reproch�rent sa faiblesse pour les sales Fran�ais
qui ne m�ritaient aucune piti� :
- �� Vous allez prendre leur argent tout de suite.
Sinon, gare... �
�� Le gendarme ayant exig� de nous une pi�ce de 5
mark, contraignit ensuite les braves paysans de
Conthil � les empocher ; mais ceux-ci, d'un coup
d'oeil, nous montr�rent qu'� l'insu de nos gardiens,
la fermi�re avait gliss� dans la musette d'avoine
une miche �norme de pain avec un app�tissant morceau
de lard !
�� Les dix derniers kilom�tres de l'�tape ne furent
marqu�s d'aucun incident.
La prison de Morhange
�� A Morhange, je fus de nouveau re�u dans une
caserne ou plut�t dans une sorte de prison militaire
avec MM. Dumont, Godefroy et Bontemps, tandis que
nos autres amis, M. Just Florentin, maire de Bey ;
M. Rapp, maire de Lanfroicourt, �taient dirig�s sur
la prison civile, avec le cur� de ce dernier
village.
�� Autour de nous les soldats ne cessaient leurs
grossi�res plaisanteries que pour raconter les
prouesses de leur arm�e, les victoires imp�riales
moissonnant par douzaines des drapeaux russes et
fran�ais, r�fiant canons, mitrailleuses, r�giments
entiers sur tous les champs de bataille.
�� Jamais le pain ne m'a sembl� aussi amer ; il me
br�lait la gorge. Toujours les m�mes privations de
tabac et de nourriture. Toujours la m�me
interdiction d'�changer une parole avec un �tre
humain.
Absolument comme les for�ats au bagne.
�� Quand nos souffrances exhalaient timidement des
r�criminations, nos bourreaux disaient que nous
�tions mieux trait�s que leurs soldats.
�� Une nuit, les calorif�res avaient transform� en
�tuve le cachot o� je cherchais vainement un peu de
repos. Je suffoquais. La fi�vre me battait la charge
aux tempes. J'avais l'impression de cuire dans la
cabine torride d'un hammam et, pour r�clamer
l'ouverture d'un vasistas, j'�tendis la main vers le
bouton �lectrique mis � port�e des d�tenus.
�� Comme s'ils tra�naient derri�re eux un arsenal,
les garde-chiourme p�n�tr�rent arm�s jusqu'aux
dents, dans ma cellule :
- �� Ah ! vous crevez de chaleur. Eh bien, vous allez
changer d'air... � Ils jet�rent ma paillasse dans un
local voisin, avec mes v�tements p�le-m�le, en
pleines t�n�bres, et c'est en grelottant que
j'attendis le r�veil.
�� Les rares visites de l'archipr�tre de Morhange,
des cur�s qui c�l�braient la messe � un autel dress�
dans les corridors m�mes de le prison, apportaient
seules quelque adoucissement � nos peines.
�� Nul moyen de recevoir les nouvelles du pays. M.
Charles Dumont, jardinier chez Mme de Metz-Noblat,
dont les deux filles sont �galement en service dans
cette maison, ne put correspondre avec elles ; M.
Just Florentin avait � Morhange un parent qu'on
refusa de laisser p�n�trer jusqu'� lui.
�� Je passai ainsi cinquante jours et cinquante
nuits. Comment ne suis-je pas devenu fou ?
Derni�re �tape
�� Vers le 20 novembre, notre transfert �'Phalstbourg
fut d�cid�.
�� Le r�gime ne s'am�liora point. Au contraire. On
nous apportait � manger dans une esp�ce de vaste
baquet o� nous devions puiser avec un r�cipient
ayant la contenance d'une gamelle.
�� Nous f�mes cette fois, h�berg�s dans une colonie
p�nitentiaire ; 354 hommes partageaient ma
captivit�, et un pain plus noir, plus amer encore
qu'� la caserne de Morhange.
�� Huit jours s'�cout�rent dans cet asile d�nu�
d'agr�ments. Enfin, le 1er d�cembre, un avis de
lib�ration nous fit entrevoir le terme de tant de
maux : les otages ayant moins de 18 ans et plus de
60 ans allaient �tre rendus � leur patrie.
�� Par quels transports de joie fut salu�e la
nouvelle de notre d�livrance, je renonce � vous le
dire ! Avec quel enthousiasme on passa la fronti�re
� Schaffouse pour p�n�trer sur le territoire suisse,
vous le devinez !
�� Un accueil, par exemple, que je n'oublierai
jamais, c'est la r�ception des comit�s suisses de la
Croix-Rouge. Dans toutes les srares, de Schaffouse �
Gen�ve, on nous accablait de pr�venances : ici du
caf� ou du th�, l� des g�teaux ; plus loin des
cadeaux, etc...
�� Les acclamations, les souhaits se m�laient aux
accents de la �� Marseillaise � et c'est presque en
triomphateurs que nous arriv�mes, le 4 d�cembre,
dans la commune d'Annemasse, o� la population
savoisienne, comme vous le disait hier M. Hottier,
maire d'Hom�court, s'effor�a de nous faire oublier
les tristesses de la prison et de l'exil.
�� Quand je pense que, depuis le 2 ao�t, ma fille a
rev�tu le costume d'infirmi�re � l'h�pital
auxiliaire de La Malgrange, qu'un de mes fils sert �
Toul. dans la boucherie militaire, que mon autre
fils se bat sous le drapeau fran�ais, que le
pavillon des formations sanitaires flotte sur mes
deux maisons d'Arraye-et-Han, que j'ai v�cu trois
longs mois et demi loin de ma femme, de mon foyer,
de mes int�r�ts, j'ai bien le droit, n'est-ce pas,
d'�tre fier que cette guerre m'ait permis
d'accomplir mon devoir et de donner un patriotique
exemple. �
ACHILLE LIEGEOIS.
UN "TAUBE" SUR
LUN�VILLE
En ce
jour de No�l, un �� taube � est venu nous visiter ;
il a laiss� tomber sur la ville une bombe qui n'a
point fait plus de d�g�ts que si c'e�t �t� un sac de
drag�es. Ne nous �tonnons point qu'il y ait une
suite sans plus de dommages.
EN ALSACE
STRASBOURG
Entr�e en campagne
Par le r�cit qu'une de nos concitoyennes a fait de
son s�jour � Metz depuis les d�buts de l'occupation
allemande, on a su, la semaine derni�re, quelles
r�percussions, tant�t l�g�res, tant�t profondes, la
guerre eut aux pays annex�s sur l'�tat g�n�ral des
esprits.
Il n'�tait pas d'un moindre int�r�t de conna�tre
l'impression ressentie � Strasbourg pendant le m�me
temps.
Ce fut pour nous une pr�cieuse rencontre que celle
de Mme S..., dont une d�cision du gouvernement de
Strasbourg vint brusquement interrompre le s�jour
dans cette ville aupr�s de ses enfants qui
exploitaient un fonds de commerce dans le voisinage
de la gare.
- On m'accorda un d�lai de deux heures, juste le
temps de pr�parer en h�te une malle. On m'indiqua la
route que je devais emprunter par la Suisse. Cette
mesure s'appliquait � tous les Fran�ais que leur
�ge, leur situation, leurs relations avaient
jusqu'alors mis � l'abri des tracasseries
administratives. Les Allemands n'avaient d�cid�ment
plus confiance qu'en eux-m�mes ! �
Comme � Metz, la vie suit � peu de chose pr�s son
cours normal dans Strasbourg. Les brasseries
regorgent de consommateurs ; la guerre fait
naturellement l'objet de toutes les conversations o�
la certitude d'une victoire �clatante et d�finitive
cesse toutefois de retentir avec l'arrogance de
nagu�re :
- Au d�but de la campagne, d�clare Mme S..., le
sentiment g�n�ral s'�tait accr�dit� qu'au bout de
six semaines l'arm�e allemande entrerait
triomphalement dans Paris, en raflant sur son
passage les places-fortes. Quand nous voyions partir
en masses �normes pour la fronti�re les r�giments
venus des garnisons de l'Empire, une piti�, une
angoisse indicibles nous oppressaient, nous
serraient douloureusement le coeur :
�� Pauvres Fran�ais ! � r�p�tions-nous � voix basse
comme une pri�re. Dans une partie des milieux
universitaires, quelques femmes de professeurs
semblaient, par moments, s'associer � nos craintes
et, songeant aussi aux formidables chocs des deux
pays, elles disaient comme nous : �� Pauvres Fran�ais
!. �
Les chasseurs alpins
Pendant les premiers jours d'ao�t, une sublime
esp�rance envahit l'�me alsacienne. On apprit la
marche heureuse sur Mulhouse. Du coup, l'hypocrite
attendrissement des immigr�s s'�vanouit. Les
professeurs et leurs sensibles �pouses ne
plaignaient plus les Fran�ais ; ils critiquaient
leur mani�re de se battre, la qualit� et la
pr�cision de leurs armes, ne reconnaissant de
sup�riorit� qu'au canon de 75 qui r�pandait chez eux
une extraordinaire terreur :
- Vos soldats tirent trop haut ; leurs fusils ne
valent pas les n�tres... Oui, sans doute, vous avez
en France des chasseurs alpins dont l'intr�pidit�
d�fie la mort... mais vous seriez perdus sans votre
artillerie de campagne. �
Parmi les premiers convois de prisonniers et de
bless�s, on remarquait principalement les chasseurs
alpins. On se disputait comme des troph�es leurs
b�rets, les boutons de leur uniforme, que l'on
croyait en argent (sic). Plus d'un fut litt�ralement
d�pouill�. Mme S... cite certains cas o� des hommes,
au r�veil, se trouv�rent priv�s de pantalon :
- On leur offrait bien en �change des pantalons �
jambes longues, d'une couleur se rapprochant du bleu
de leur uniforme ; mais ils refusaient avec �nergie
; ils protestaient ; ils r�clamaient leurs bandes
molleti�res ; ils juraient de parcourir les rues ��
en banni�re � ou en cale�on, plut�t que d'y
renoncer. Il y eut des sc�nes inoubliables. �
Quand l'autorit� militaire permit qu'on leur rend�t
visite aux h�pitaux, les m�mes hommes furent l'objet
d'attentions, de soins, de cadeaux sans nombre que
les dames de Strasbourg glissaient discr�tement sous
leur �dredon ou sous leur oreiller.
Tant d'admiration pour les h�ros d'Altkirch et de
Cernay stup�fiait les immigr�s ; une honn�te
bourgeoise de Bitschwiller s'�cria un jour devant
Mme S..., comme si elle rougissait d'un scandale :
- Ah ! qu'est-ce qu'ils ont donc, vos soldats, pour
�tre aim�s comme �a ! �
D�fense de parler fran�ais
Bient�t l'emploi de la langue fran�aise fut
rigoureusement proscrit. Mme S... conte � ce propos
une savoureuse anecdote.
- J'�tais seule dans la boutique ; je venais de
servir un jeune officier. En se retirant il
s'inclina correctement et, sans me souvenir des
consignes, je r�pondis � son salut par ces mots : Au
revoir ! L'officier se retourna et, avec une menace
de l'index comme on ferait pour un enfant surpris en
faute, il me gronda en souriant : �� Vous savez,
Madame, que c'est d�fendu... � La menace �tait si
gentille, le rappel � l'ordre �tait si indulgent que
je devinai sous l'uniforme un coeur d'Alsacien. J'eus
recours cette fois � la langue allemande pour lui
reprocher la m�me infraction, aimablement : �� Ce que
vous venez de me dire l�, Monsieur, c'est aussi
d�fendu... � Et nous part�mes tous deux d'un bel
�clat de rire... �
Il semble, par instant, qu'une longue privation de
sa langue maternelle, ait donn� � notre
interlocutrice une habitude dont elle n'est pas
enti�rement gu�rie.
Sans y prendre garde, elle accueille, en effet, nos
questions par des �� ya ! ya ! � timides que j'ai
envie � mon tour de r�primer sur le m�me ton : ��
imaginez-vous, Madame; que c'est d�tendu � Nancy ? �
Autour de la ville
En ce qui concerne les travaux ex�cut�s autour de
Strasbourg, l'accumulation de paille dans certains
�difices en vue de leur destruction par le feu, Mme
S... ignore m�me ce qu'on a publi� ici a ce sujet :
- Personne n'a maintenant acc�s aux tours de la
cath�drale, d�clare-t-elle... On parlait rarement en
ma pr�sence des choses militaires... J'ai appris
seulement que le grand-duch� de Bade est rempli de
troupes ; mais, par contre, l'Alsace �tait d�garnie
� un tel point de soldats, il y a quelques semaines,
qu'un officier avoua le danger en s'�criant : �� Si
les Fran�ais avaient su !... �
Sans �tre tenue au courant des pr�paratifs de
d�fense, de l'organisation d'un vaste r�seau de
tranch�es et de mines, Mme S... a cependant saisi
parmi les bribes de mainte conversation assez de
renseignements qui ont laiss� dans son coeur plus
d'alarmes que de traces dans sa m�moire :
- Ah ! Monsieur, je ne me rappelle plus ce que les
Boches ont fait dans les environs de Strasbourg.
Mais que nos soldats .., ah ! mon Dieu... que nos
pauvres soldats n'y aillent pas !. Ce serait trop
�pouvantable. �
Quelques pr�cautions
La plupart des Strasbourgeois ont accumul� dans
leurs caves des provisions en grandes quantit�s sans
que ces pr�cautions aient �t� sugg�r�es ou ordonn�es
par une d�cision administrative :
- La population est en proie � une vague inqui�tude,
se borne � constater Mme S... Elle sait que nos
troupes occupent Thann et plusieurs bourgades en
Haute-Alsace. On s'assure �ventuellement contre les
risques d'un si�ge. Pourtant, le commerce marche �
merveille ; les affaires se traitent avec confiance.
Le cours des denr�es n'a pas vari� ; la viande se
vend bon march� ; le pain a subi � peine une faible
augmentation ; mais les l�gumes secs deviennent
rares et sont hors de prix.. Encore une fois, on ne
supposerait jamais que la guerre existe en
consid�rant l'animation des brasseries. Les salles
de spectacle sont ferm�es ; on assiste � des
repr�sentations cin�matographiques ; les films
pr�sentent le kaiser sous toutes ses faces et les
�v�nements sous un jour favorable � ses arm�es. �
Le Journal d'Alsace-Lorraine a disparu. Les gazettes
pangermanistes s'inspirent toutes de la m�thode
inaugur�e par le Wolffbureau : le mensonge est �lev�
� la hauteur d'une institution d'Etat. Jamais les
feuilles � la d�votion de Guillaume n'ont annonc�,
m�me avec de prudentes r�ticences, la bataille de la
Marne :
- La nouvelle que les Fran�ais p�n�traient en Alsace
et s'y installaient, ajoute Mme S..., est arriv�e
quand m�me jusqu'� Strasbourg. Les professeurs ne
disaient plus que nos soldats tiraient trop haut.
Des trains complets ramenaient les Boches qu'ils
avaient �tendus sur le champ de bataille. �
Les jeunes gens et les hommes ayant pass� la
quarantaine n'ont pas encore �t� appel�s sous les
drapeaux ; mais l'�loignement des derniers �trangers
indique �videmment une mesure ayant pour but de
cacher un supr�me effort de mobilisation ou des
dispositions sur l'importance desquelles l'Allemagne
tient � �viter la plus l�g�re indiscr�tion.
- Les Boches auront beau faire... L'Alsace attend sa
d�livrance, conclut Mme S..., et tout le monde,
l�-bas, souhaite qu'on d�barrasse bient�t le pays de
tous les bourreaux qui ont si cruellement retourn�
le fer dans ses plaies vives. �
ACHILLE LI�GEOIS.
AU CHEVET DE
NOS BLESS�S
UNE VISITE A
L'HOPITAL
DU CAMP DE SAINT-NICOLAS
SAINT-NICOLAS-DU-PORT, ... d�cembre. - L'aust�rit�
du devoir, la modestie des vrais d�vouements n'ont
fleuri nulle part mieux qu'au chevet des victimes de
la guerre.
Nous avons �prouv� une vive satisfaction au cours
des visites des h�pitaux de Saint-Nicolas et de la
Malgrange, si diff�rents dans leurs installations,
si parfaitement semblables dans le fonctionnement de
leurs services, si �gaux devant l'�loge que l'on
doit faire du personnel qui prodigue � la fois les
ressources de la science et les tr�sors d'une
in�puisable bont� � nos soldats malades et bless�s.
Il n'y a plus de bless�s � Saint-Nicolas.
Depuis que les horreurs du champ de bataille se sont
transport�es dans les Flandres, les formations
sanitaires ont cess� d'�vacuer en masse les h�ros
dont le sang pr�cieux coula abondamment devant le
Grand-Couronn�. Il y eut de terribles journ�es :
Courbesseaux et Cr�vic emplirent les salles
d'op�rations. En h�te, chirurgiens et docteurs
donnaient les soins urgents, et, suivant le cas,
dirigeaient sur Nancy ou sur une ville plus �loign�e
ceux qui pouvaient supporter les fatigues d'un
nouveau voyage.
C'est en allant porter aux malades les livres, les
brochures, les illustrations, les jeux envoy�s par
la g�n�rosit� des lecteurs de l'�� Est r�publicain �
que nous avons longuement parcouru les chambr�es o�
s'alignent les humbles couchettes aupr�s desquelles
infirmiers et femmes de France rivalisent de z�le
dans l'accomplissement de leur t�che..
La caserne du Camp ne comportait gu�re que des
baraquements s�par�s par un intervalle qui, dot�
d'un nom de bataille ou de g�n�ral s'appelle
orgueilleusement rue Chanzy ou avenue de Malakoff.
Tout l'h�ro�sme de notre histoire se retrouve encore
dans la d�signation des chambres :
ici pas de num�ro d'ordre, mais un souvenir d'�pop�e
: salle d'Extr�me-Orient, salle de Madagascar, etc.
Cela fait partie, sans doute, de la magnifique
m�thode d'�ducation des chasseurs � pied dans l'Est.
D�s que le ...e bataillon eut quitt� le Camp, au
deuxi�me jour de la mobilisation, la transformation
des locaux, leur am�nagement en vue de leur nouvelle
destination, fut men�e activement.
La d�claration de guerre interrompait en outre la
construction des pavillons �lev�s d'un �tage qui
motiv�rent l'an dernier les fr�quentes interventions
des commissions parlementaires d'hygi�ne.
L'organisation totale du Camp fut tr�s vite
termin�e.
Mais, � aucun moment, les m�decins-majors ne
constat�rent la g�ne ni l'encombrement ; ils
pay�rent, comme on dit, de leur personne ; ils
pass�rent sans repos les jours et les nuits ; ils
oppos�rent en quelque sorte la digue de leur
�nergie, de leur volont�, de leur patriotisme au
flot douloureux qui montait vers eux - et
l'obscurit� d'un tel sacrifice m�rite les hommages
d'une affectueuse reconnaissance.
A quoi bon ouvrir une enqu�te pour savoir les
r�sultats obtenus ? Est-ce que les malades ignorent
certains chiffres et manquent de renseignements
exacts sur une statistique o� leur confiance puise
des forces morales aussi utiles pour la gu�rison que
les tisanes et les cataplasmes ?
Il y a peu de cas tr�s graves. La plupart d'entre
nous venaient du Midi ; les premi�res �preuves du
climat nous ont �t� p�nibles. Les malades amen�s au
Camp proviennent de r�giments de toutes armes.
Beaucoup d'activ� et de r�serve ; peu de
territoriale...
Nous allons d'une chambre � l'autre. Partout le m�me
ordre, la m�me propret�. La lumi�re et l'air
circulent. Les magasins de compagnie, vides
d'uniformes et d'�quipements, sont pour la plupart
transform�s en d�p�ts de provisions ; trois ou
quatre chambres de sous-officiers sont devenues des
laboratoires, des officines o� les pharmaciens
pr�parent les ordonnances ; les vastes r�fectoires
ont servi la semaine derni�re � une v�ritable
repr�sentation de gala, o� se firent entendre les
artistes mobilis�s des grandes sc�nes de Paris et de
la C�te d'Azur...
Les cuisines ont re�u une affectation qui satisfait
pleinement aux conditions susceptibles d'en assurer
le service, aussi bien pour l'alimentation ordinaire
que pour les �� r�gimes � si d�licats, dont le lait
et les oeufs composent le principal aliment.
Le sol est nettoy� � grande eau; les fourneaux, avec
leurs robinets de cuivre, sont astiqu�s comme pour
une revue ; le rata fume dans les marmites ;
plusieurs hectolitres de lait ti�de emplissent les
vastes r�cipients de m�tal ; les cuisiniers
eux-m�mes font plaisir � voir, avec leur face
rubiconde, leur tablier irr�prochable, leur
jovialit� de boute-en-train.
Nous les complimentons ; ils ont positivement
l'allure de ma�tres-d'h�tels chez quelque baron ou
de �� chefs � au bouillon Duval :
- Pour s�r qu'on a des r�f�rences, plaisante l'un
d'eux. Vous ne croyez pas si bien dire. On servait
dans les grandes maisons avant de faire ici la
popote... On s'y conna�t en frichti. �
Les lavabos sont admirablement entretenus. Balai et
plumeau ne laissent nulle place o� la main ne passe
et repasse. Un souci constant, m�ticuleux, pr�side �
l'arrangement des tables, tr�s nettes, des bancs,
des ustensiles de toilette. Le m�decin-chef, M.
R..., a ordonn� la confection para�t-il, de meubles
�� ad hoc � remplissant le triple r�le d'escabeaux,
de biblioth�ques et de tables de nuit ; c'est
simple, de bon go�t, commode et peu co�teux.
La planche � bagages se charge des pots de tisane ;
le graphique de temp�rature a remplac� les ��
�tiquettes � du paquetage absent ; les murs sont
blanchis � la chaux; une odeur de coaltar impr�gne
l'atmosph�re convenablement renouvel�e par
l'ouverture des vasistas et une ventilation
soigneusement r�gl�e des corridors.
Les infirmiers sont les dignes auxiliaires des
m�decins-majors qui multiplient leurs consultations
et mettent sur ces visages d'abord p�lis par la
fi�vre, les couleurs vite �panouies de la jeunesse
et de la sant�.
Bon nombre de convalescents, au retour d'une
promenade dans les cours, distraient leurs loisirs :
les uns battent une manille, les autres poussent les
jetons sur les cases d'un �chiquier, d'autres
s'�lancent � la conqu�te d'une noble h�riti�re parmi
les aventures de cape et d'�p�e ; ceux-l� apprennent
par les illustrations de quelle gloire se couvrent
leurs camarades et les h�ros des troupes alli�es.
Toute cette joie est l'oeuvre de nos lecteurs ; rien
ne leur serait plus agr�able que d'entendre les
remerciements dont notre plume est impuissante �
traduire pour eux le charme, la sinc�rit� et la
douceur.
Avant de quitter l'h�tel du Camp, nous sommes entr�
dans le �� bureau � o� le m�decin-chef veut bien nous
pr�senter � ses collaborateurs.
Une aimable surprise nous est r�serv�e ; nous
tombons au milieu d'un groupe de Nanc�iens : MM.
K... et L... additionnent des colonnes de chiffres,
pr�parent les courriers, sous les ordres de M. D...,
officier gestionnaire, charg�, comme son titre
l'indique assez �loquemment, de fournir � ce vaste
�tablissement, la nourriture, les m�dicaments,
etc...
La besogne n'est pas mince, je vous prie de le
croire : mais l'officier gestionnaire est de taille
� porter sans d�faillance le poids des
responsabilit�s qu'il assume d'ailleurs avec le
sourire :
- Eh oui ! j'ai un poste int�ressant... C'est moi
qui fais le march�, nous dit-il... Chaque matin,
comme une attentive ma�tresse de maison, j'ach�te
viande, l�gumes, bo�tes de conserves ou de lait
concentr�, sans compter les oeufs des �� r�gimes �,
les desserts, les friandises qui am�liorent le menu
quotidien. �
Le bureau est install� dans une d�pendance du mess
des sous-officiers du bataillon. Aux murs, des
photographies, remise de d�corations, pr�sentation
du drapeau aux recrues, tableaux offerts par le
commandant Desruelles et orn�s d'une patriotique
d�dicace.
Dans un angle, la biblioth�que dont les rayons
ploient sous les bouquins � couverture de toile
noire :
- Tenez ! voici un cadeau de la Manufacture des
Tabacs, ajoute l'officier en montrant une vitrine
pleine de paquets de cigarettes. Joli cadeau,
n'est-ce pas ? Les fumeurs ont de quoi se r�galer.
L'administration nous promet 30.000 cigarettes par
mois. J'en distribue aux convalescents, heureux de
l'aubaine que l'Etat ajoute ainsi aux envois de la
Croix-Rouge et des souscriptions en faveur des
h�pitaux militaires. �
De son c�t�, le m�decin-chef, M. R..., ne tarit
point en f�licitations sur l'oeuvre accomplie au
milieu de difficult�s sans nombre par les six
m�decins-majors qui d�pensent un courage, une
opini�tret�, une sollicitude, une abn�gation que
n'ont jamais abattus ni troubl�s un seul instant les
terribles �preuves de la guerre. Ils ont travaill�
presque sous le feu de l'ennemi :
- Les obus allemands tombaient en face de nous, en
r�ponse aux tirs du Remb�tant, nous dit-il. �
Maintenant, c'est le repos ; c'est ce qu'on
pourrait, par comparaison avec l'effroyable besogne
du d�but, appeler la vie de ch�teau, une vie aimable
et tranquille, dont les malades appr�cient mieux
encore les bienfaits.
LUDOVIC CHAVE.
LE 45e
BOMBARDEMENT
DE PONT-A-MOUSSON
Un des
collaborateurs du Temps a re�u d'une de ses
parentes, qui r�side � Pont-�-Mousson depuis
l'ouverture des hostilit�s, et qui a refus� de le
quitter, une lettre pleine d'h�ro�que simplicit�.
Nous en extrayons le passage suivant :
...Depuis le mois d'ao�t, nous habitons rue
Magot-de-Rog�ville ; on y est plus � l'abri ; les
rez-de-chauss�es surtout y sont confortables. Il n'y
a plus gu�re de monde en effet qui couche dans les
�tages, surtout au deuxi�me. Presque tous les
quartiers de la ville ont re�u des obus ; le plus
grand nombre est tomb� � Saint-Martin et sur notre
pauvre cimeti�re. Il est tellement ravag�, ce pauvre
champ des morts, qu'on croirait � un vrai
tremblement de terre. Les obus allemands ont soulev�
ici des cercueils, l� des cadavres, ailleurs des
ossements : c'est un spectacle affreux. La rue des
Jardins a �t� souvent atteinte ; un obus est tomb�
sur la maison des Soeurs, place Saint-Antoine ; il
s'est heureusement arr�t� au premier �tage, au coin
d'une chemin�e. Beaucoup d'autres maisons ont leurs
toits crev�s, ou leurs toitures perc�es � jour comme
de la m�chante dentelle. Le jour de la Toussaint,
pendant les v�pres, des shrapnells ont �t� tir�s sur
l'�glise, les �clats ont d�t�rior� tous les vitraux.
Les Allemands savaient qu'il y avait beaucoup de
monde ce jour-l� dans l'�glise ; ils ont choisi
expr�s l'heure des v�pres pour ex�cuter leur tir ;
heureusement leur but n'a �t� atteint qu'en partie ;
il n'y a pas eu de victimes.
C'est le 5 septembre que le tocsin sonna pour
avertir les habitants de l'approche des Allemands.
Les Fran�ais firent sauter le pont sur la Moselle,
mais cinq heures apr�s, les Allemands entraient dans
la ville par les quartiers de Saint-Martin et de
Saint-Laurent. A la vue des Prussiens, notre coeur se
serra ; leurs bataillons compacts arrivaient en
chantant, mais le lendemain nos soldats, qui
s'�taient retir�s par stratag�me, leur tirent payer
cher leur audace. Les Prussiens furent �cras�s pr�s
de Jazainville et pr�s de Sainte-Genevi�ve. Ils
eurent 5.000 tu�s et plus de 8.000 bless�s. Ils
ramen�rent ces derniers au galop dans des trains et
des automobiles et br�l�rent leurs cadavres en les
inondant de p�trole pendant trois jours. Le 9, ils
re�urent du renfort et revinrent place Duroc o� ils
organis�rent un concert. Ils chant�rent aussi dans
les caf�s. Nous �tions enrag�s. Pour comble de
malheur, nous f�mes oblig�s de loger neuf d'entre
eux, un officier et huit soldats. L'officier parlait
tr�s bien le fran�ais ; il fut tr�s convenable,
d�fendit tr�s s�v�rement qu'on nous manqu�t de
respect ou qu'on nous pr�t quoi que ce soit. Cet
ordre fut ex�cut� � la lettre par les soldats. Dans
la nuit du 10, ils eurent une grande alerte et
s'enfuirent, en toute vitesse. Le lendemain matin,
il n'en restait plus un ; nous �tions folles de
joie. Quelques jours apr�s, il en revint
quelques-uns en patrouille ; nos soldats les tu�rent
tous jusqu'au dernier. Les Prussiens avaient compt�,
en entrant � Pont-�Mousson, que la viile �tait � eux
pour toujours ; c'est pourquoi ils ne commirent pas
d'atrocit�s ; dans d'autres maisons que les n�tres,
cependant, ils vol�rent tout ce qu'ils purent. Il
est certain que s'ils �taient rest�s longtemps, nous
n'aurions plus rien eu � manger ; ils
r�quisitionnaient le pain, vidaient les magasins en
payant, arrachaient dans les champs toutes les
racines et toutes les cultures et chargeaient le
tout sur des voitures qui prenaient toutes la route
de Metz. Ils avaient mis un drapeau allemand � la
mairie et � l'horloge, ils avaient marqu� l'heure
allemande. On a trouv� dans plusieurs maisons des
�normes caisses de pastilles incendiaires qu'ils
avaient distribu�es � tous les coins du village, et
qui, aujourd'hui, sont � la mairie.
RETOUR D'OTAGES
Les Fr�res Samain
sont vivants
M. Hottier, le maire d'Hom�court, nous apporte de
leurs nouvelles.
Nancy,
25 d�cembre.
L'ARRESTATION
Ah ! certes, M. Jean-Pierre Hottier, le v�n�rable
maire d'Hom�court, n'aurait jamais suppos� qu'il
retomberait un jour aux mains des Boches.
En 1870, il servait dans une batterie dont son
brigadier et lui furent les derniers survivants
entre Saint-Privat et Amanvillers.
Il y avait autour de sa pi�ce plus de bisca�ens que
de cailloux... Lutte terrible. Le souvenir de cette
journ�e revivait sous la forme d'un ruban vert et
noir dont M. Hottier ornait sans forfanterie sa
boutonni�re.
Quarante-cinq ans apr�s, dans la nuit du 3 au 4
ao�t, ce fut dans son lit cette fois - et non plus
sur le champ de bataille - qu'un capitaine allemand
le fit prisonnier.
Le maire d'Hom�court dormait tranquillement. Un choc
brutal � sa porte, une sommation l'�veill�rent en
sursaut. fi ouvrit. Un officier se dressait devant
lui, revolver au poing, lui ordonnait brutalement de
se v�tir en toute h�te.
- Je crus d'abord qu'on allait me conduire � la
mairie pour une perquisition en ma pr�sence, raconte
M. Hottier. J'avais dans mon portefeuille le
courrier, quelques pi�ces administratives. Je jugeai
inutile d'emporter die l'argent. De mon mieux, je
rassurai ma femme inqui�te. J'�tais � cent lieues de
deviner ce qu'on voulait faire de moi.
Le brave maire d'Hom�court devait effectivement �tre
tra�n� devant un conseil de guerre, jet� sur la
paille humide des ge�les, enferm� dans une
forteresse des bords du Rhin ; il ne devait revenir
en Lorraine qu'hier, avec une dizaine d'otages dont
l'odyss�e est aussi douloureuse que la sienne.
MAIRE ET CUR�
Au moment m�me o� il se rendait, hier, � la
convocation de M. Mirman, nous avons eu la joie de
causer avec lui quelques instants � la pr�fecture de
Meurtheet Moselle :
- Oui, j'ai beaucoup souffert, nous ditil. De telles
�preuves pour un homme de mon �ge sont tr�s dures.
Je croyais ne plus revoir la France. Et, pourtant,
j'ai rencontr� sur la terre �trang�re, en prison,
d'autres hommes qui gardent au coeur une foi
in�branlable et qui ont souvent raffermi mon espoir
chancelant dans les destin�es de notre ch�re patrie.
�
M. Hottier ne quittait pas seul sa commune. On
emmenait avec lui le cur�, M. Varin. Ils avaient
tous deux �t� d�nonc�s par un espion nomm� Maguer,
habitant chez ses parents, � la Petite-Fin, dont les
rapports serviraient bient�t de base � l'acte
d'accusation dress� contre eux par les autorit�s
allemandes.
Maire et cur� furent conduits d'abord � Malancourt
o� si�geait l'�tat-major :
- Mon compagnon �tait plus malheurreux que moi. On
ne lui avait pas laiss� le temps de prendre son
chapeau ni de mettre ses bas ; il �tait v�tu
uniquement die sa soutane ; il marchait avec de
m�chantes savates. Son confr�re de Malancourt
habilla le pauvre eccl�siastique.
L'interrogatoire de M. Hottier lui causa une peine
affreuse. Les injures, les brutalit�s accabl�rent le
vieillard :
Ils me fouill�rent, saisirent mon porte-monnaie
contenant une somme de 27 fr., mes papiers. Mais la
pire des souffrances me d�chira le coeur, quand les
mains de l'officier boche arrach�rtent mon pauvre
ruban de 1870, mon humble d�coration. C'�tait comme
si une d�gradation me suppliciait... �
DEVANT LE CONSEIL DE GUERRE
Les inf�mes rapports de l'espion Maguer devaient
ailleurs porter leurs fruits : MM. Hottier et Varin
furent transf�r�s � Metz et traduits en effet devant
un conseil de guerre. on reprochait au premier
d'avoir organis� une compagnie de francs-tireurs ;
on articulait � l'�gard du second un autre grief,
celui d'avoir exhort� plusieurs jeunes gens des pays
annex�s � contracter un engagement dans la l�gion
�trang�re.
Un double acquittement termina les d�bats.
Mais M. Hottier ne fut point trait� avec plus de
m�nagements. Cinq jours, il g�mit entre les murs
d'une cellule. Le r�gime comportait caf� sans sucre
au matin ; soupe au lard - et quel lard ! - pour le
d�jeuner, puis, de nouveau, un pieu de caf� - et
quel caf� ! - pour le repas du soir. Quant au pailn,
c'�tait une sorte de p�te immangeable que les
prisonniers s'empressaient de jeter dans les po�les
o�, d'ailleurs, il ne br�lait pas :
- Quand nos gardiens ont su que nous faisions de
leur pitance un tel cas, ajoute M. Hottier, ils nous
ont menac�s d'un r�gime plus s�v�re encore...
Une g�n�reuse intervention se produisit. M. Winsbach,
ancien pharmacien, r�ussit � faire fl�chir la
rigueur de certaines consignes. Il jouissait � Metz
d'une haute estime. Il employa ses relations, son
influence, sa connaissance des langues allemande et
fran�aise, tant�t � recommander les malades aux
soins des m�decins, tant�t � nous communiquer les
nouvelles du dehors, tant�t � remplir les fonctions
d'interpr�te pour exprimer nos d�sirs ou transmettre
nos explications ; ce sont l� des services que
n'oublieront jamais les otages � qui M. Winsbach les
rendit avec un infatigable d�vouement.
Le m�decin-major consultait les prisonniers trois
fois pair semaine ; mais M. Winsbach les visitait
r�guli�rement tous les jours et leur apportait le
r�confort, les t�moignages de sympathie, les paroles
d'encouragement n�cessaires pour relever l'�nergie
morale que la tristesse d'une telle situation avait
d�j� �branl�e.
UNE CITADELLE PRUSSIENNE
Les otages quitt�rent Metz au bout d'une semaine.
L'ordre vint de les transf�rer dans la citadelle d'Ehrenbreistein,
sur le Rhin, � trois kilom�tres de Coblentz.
L�, du moins, le gouvernement imp�rial n'aurait rien
� craindre de ses ennemis :
- de hautes murailles d�fiaient l'escalade et
rendaient vaines toutes tentatives d'�vasion ; une
escouade de vigilantes ba�onnettes donnait �
r�fl�chir :
- Il y avait � Ehrenbreistein 232 prisonniers
fran�ais, exactement, nous dit M. Hottier. Entre
eux, la glace fut vite rompue. Metz et Thionville
�taient repr�sent�es par 117 personnes, parmi
lesquelles deux femmes seulement, la soeur du cur� de
Lorry-devant-Metz, une excellente Fran�aise, dont
quatre neveux servent sous les drapeaux (l'un a le
grade de commandant), et Mme la baronne de
Guentrange, arr�t�e sous pr�texte qu'elle �levait
dans son colombier des pigeons voyageurs. �
M. Hottier parle avec attendrissement de ces femmes
au coeur noble et charitable. Mme de Guentrange est
venue en aide aux gens de la campagne, aux ouvriers
agricoles que les Boches avaient saisis dans leurs
masures ou enlev�s � leurs charrues en plein travail
; elle paya de ses propres deniers des costumes
neufs, du linge, des chaussures � tous les
malheureux dont sa compagne s�chait les larmes,
consolait la d�tresse, ranimait la confiance par
l'exemple d'une admirable fermet�.
- Il y avait l�, continue le maire d'Hom�court, le
d�put� thionvillois, M. Zimmer ;, des Messins dont
le nom a �t� souvent prononc� et que l'on crut
longtemps fusill�s, les fr�res Alexis et Jean
Samain, entre autres, M. le docteur Urbain, un des
collaborateurs de M. Jean au �� Souvenir Fran�ais �,
M. l'abb� Riss, fondateur d'une revue et d'oeuvres
s'inspirant du m�me esprit, M. Prevel, directeur
d'une banque d'escompte et de cr�dit commercial, M.
Lambert, r�dacteur du �� Lorrain �.
Alexis Samain, le pr�sident de la �� Lorraine
Sportive �, savait que le bruit de son ex�cution
s'�tait r�pandu en France ; il avait essay� de le
d�mentir ; sa correspondance ne pouvait �chapper au
r�seau �troit de surveillance qui l'enveloppait. A
la fin, il avait pris son parti et acceptait
volontiers son r�le de fusill� par persuasion.
- Quand vous arriverez � Nancy, recommanda-t-il � M.
Hottier, n'oubliez pas que l'�� Est r�publicain � a
montr� pour notre cause et pour moi beaucoup de
sympathie. Portez-y de mes nouvelles. R�p�tez,
surtout que je suis vivant, que mon fr�re est vivant
et que nous comptons bien nous retrouver un jour
ensemble. �
LES FR�RES SAMAIN
Soit que nous ayons pass� chez eux de trop courts
instants au lendemain de la dissolution de leur
soci�t� en janvier 1911, soit que nous ayons �chang�
quelques paroles avant leur comparution devant la
Cour supr�me de Leipzig ; soit que nous ayons eu le
plaisir en mainte circonstance plus heureuse de nous
rencontrer encore avec Alexis et Jean Samain dans
des f�tes patriotiques, il est impossible d'oublier
de tels hommes.
- Ils n'ont pas chang�, poursuit M. Hottier. L'a�n�
a maintenant le visage encadr� d'une barbe �paisse ;
l'autre a toujours les l�vres couvertes � peine
d'une fine moustache. Mais la m�me flamme de volont�
brille dans leurs yeux. Ah ! nous n'avions pas
besoin de grands mots pour nous comprendre ; quelque
chose de myst�rieux avertissait les Messins r�unis
dans, la citadelle, qu'une pens�e, un espoir commun
rapprochaient leurs �mes. �
- Comme par hasard, d�clare malicieusement M.
Hottier, nous voyions monter des batteries sur les
plate-formes de la citadelle et les soldats
racontaient avec na�vet� que l'on creusait chaque
jour de nouvelles tranch�es autour d'Ehrenbreistein...
Malgr� les succ�s annonc�s par leurs journaux, les
Aillemands �prouvaient donc le besoin de consolider
leur d�fense ; cela suffisait � nous renseigner sur
la sinc�rit�. des gazettes. �
Pendant le s�jour � Ehrenbreistein, la femme d'un
otage messin apporta deux ou trois fois des
nouvelles du pays de Briey.
La visite d'un instituteur permit �galement de
savoir que M. Bastien, maire de Joeuf, avait �t�, lui
aussi, emmen� par les Boches, au mois de septembre.
En raison de son �tat de sant�, M. Bastien ne
d�passa pas Montois ; il fut reconduit � Joeuf, o� il
resta en prison.
EN ROUTE POUR LA FRANCE !
Le 20 novembre, M. Hottier et quelques-uns de ses
compagnons apprirent que les otages �g�s de plus de
soixante ans allaient �tre rendus � leur pays :
- J'ai voyag� pendant deux jours � travers le
grand-duch� de Bade, dit-il. Nous avons pass� la
fronti�re suisse � Shaffouse. Un accueil
enthousiaste nous attendait de l'autre c�t� ; mais
notre arriv�e sur le sol fran�ais � Annemasse fut
salu�e par une r�ception plus cordiale encore. Les
comit�s de la Croix-Rouge, la population
savoisienne, ont rendu agr�able mon s�jour dans la
petite commune de Mornex. Quels braves gens que les
Savoyards ! J'ai v�cu parmi eux pendant trois
semaines et je vous garantis que les r�fugi�s,
l�-bas, sont presque tent�s d'oublier la perte de
leurs biens, l'amertume de leur condition, toutes
les horreurs, les atrocit�s de la guerre ! �
Parce qu'il justifiait de moyens d'existence, qu'il
put fournir des r�f�rences, �tablir qu'en Lorraine
des int�r�ts r�clamaient sa pr�sence, on d�livra au
v�t�ran, non sans regret, un laissez-passer gratuit
jusqu'� la gare d'Is-sur-Tille :
- Le diable m'emporte ! on voulait me retenir
prisonnier en Savoie. mais cette fois pour me
choyer, m'entourer de soins, d'affection, de
d�vouement. J'ai fait � mes frais le reste du
voyage... Ah ! j'avais h�te d'atteindre Nancy, de me
rapprocher du foyer, de revoir ma pauvre commune
dont j'attends anxieusement des nouvelles... Revoir
Hom�court, d�livr� des Prussiens, comme je serai
heureux ce jour-l� !. �
ACHILLE LI�GEOIS.
UN ZEPPELIN SUR
NANCY
Paris,
26 d�cembre, 15 h. 18.
Un Zeppelin a survol� Nancy, ce matin, � 5 h. 20. Il
a jet� quatorze bombes sur la ville.
Deux habitants ont �t� tu�s et deux autres bless�s.
Quelques maisons particuli�res ont �t� endommag�es.
Aucun �difice public n'a �t� atteint.
AU PAYS DE
BRIEY
Villerupt,
Villers-la-Montagne, Roman, Tillaucourt, Herserange,
Pierrepont, Longlaville, Briey, Joeuf, Crusnes.
Nous
extrayons du �� Bulletin de Meurthe-et-Moselle � les
renseignements suivants qu'il donne dans son dernier
num�ro :
VILLERUPT
Villerupt a son �glise et quelques maisons
incendi�es, mais il est inexact qu'on ait fusill�
des habitants.- Saulnes n'a pas �t� touch�. A
Hussigny une trentaine de maisons sont br�l�es.
Entre autres celles de MM. Mirgaine, Pierson,
Perroudon, Anglesson, Frantz, Berquin Alfred, J.-B.
Gilles, Fontaine, Aubrion, Fran�ois, Gille, Veber,
Phang, Morand, Mathon, Barth�lemy, Hoison, V. Tarnus,
Fordoxel, F�lix Willens, veuve Gauche, Bodson,
Boncourt, Lallemand, Willaume, l'atelier Toulemonde,
les remises Marasse et Wilbern ; la poste, le bureau
de police, la mairie, l'�glise, la gendarmerie, la
moiti� de la caserne.
VILLERS-LA-MONTAGNE
A Villers-la-Montagne, tout le haut du village est
br�l�. Pendant le si�ge de Longwy, la population a
�t� mise en avant des batteries allemandes. MM.
Haut, Houdard et le cur� ont �t� emmen�s prisonniers
en Allemagne, sous l'accusation d'avoir donn� asile
� des pigeons �gar�s.
TILLAUCOURT
A Tillaucourt, le maire a �t� fusill� parce qu'on a
trouv� une arme dans le village.
ROMAN
Les femmes de Roman ont �t� emmen�es � Esch. L�, les
soldats leur jetaient des cro�tes, des os, des chons
de lard en guise de nourriture. Elles furent enfin
d�livr�es par un officier allemand que, tout de
m�me, une pareille goujaterie �coeura et renvoy�es
chez elles avec quelque argent. �
HERSERANGE
Une femme d'Herserange a quitt� ce village il y a
quelques jours. Nous l'avons interrog�e sur ce qui
s'est pass� dans ce pays depuis le d�but des
hostilit�s.
Elle nous affirme qu'aucune maison d'Herserange n'a
�t� incendi�e et qu'une seule personne a �t� mise �
mort, une dame Lecoq, fusill�e par les Allemands
parce qu'elle avait �t� rencontr�e dans la rue apr�s
7 heures du soir, heure � partir de laquelle - aux
termes des r�glements militaires - aucune personne
n'est plus autoris�e � quitter sa maison.
Le village n'a pas �t� pill�, mais a �t� fortement
pressur� par les r�quisitions. On a r�quisitionn�
toutes les couvertures, les machines � coudre, etc.
Pour �tre �pargn�, le village a d� verser 12.000
francs.
L'usine de Senelle est peu endommag�e; elle n'a re�u
que quelques obus pendant le bombardement de Longwy.
Les troupes d'infanterie allemande qui occupaient le
pays ont �t� retir�es il y a quelques jours et
remplac�es par des uhlans.
Tous les jeunes gens de 15 � 20 ans et tous les
hommes jusqu'� 45 ans ont �t� dirig�s sur
Audun-le-Tiche, o� les Allemands les font travailler
et leur versent un salaire journalier de 50
pfennigs.
Dans le seul village d'Herserange, il y a 95
prisonniers. La m�me mesure a �t� prise dans toutes
les localit�s du bassin.
On nous avait dit, pr�c�demment, que le quartier
Saint-Louis, � Longwy, avait �t� s�rieusement
endommag�. On nous pr�cise aujourd'hui que, parmi
les principaux immeubles incendi�s, se trouve la
maison habit�e par M. Perignon, maire de Longwy.
Plusieurs personnes ont �t� tu�es par Les obus lors
du bombardement, notamment les jeunes Laurent et
Dillon, �g�s de 14 et 15 ans.
PIERREPONT
D'apr�s le Secolo, les Allemands sont entr�s le 22
ao�t � Pierrepont. Ils ont fusill� un Italien, nomm�
Severin Detona, et un Fran�ais nomm� Zaanth, �g� de
62 ans.
Les deux cadavres ont �t� trouv�s dans un bois � un
kilom�tre environ de Pierrepont, li�s ensemble.
LONGLAVILLE
On nous signale la mort de M. Georges, qui tenait le
Caf� du Midi. Les Allemands l'ont fusill� avec sa
femme et ont br�l� sa maison.
BRIEY
Plusieurs de nos r�fugi�s de la r�gion de Briey nous
ont demand� s'il est vrai que le docteur Giry a �t�
tu� � l'ennemi.
Nous pouvons rassurer ses nombreux amis. Nous avons,
en effet, re�u il y a quelque temps, du docteur Giry,
une lettre nous rassurant compl�tement sur son sort.
Ce qui a donn� naissance au bruit qui avait couru de
la mort du docteur Giry, est probablement le fait
suivant :
La 1er novembre, une �� grosse marmite � tombant sur
la maison o� se trouvait le docteur Giry, �clatait �
ses pieds dans le vestibule, au moment o� il allait
monter � cheval.
Englouti et asphyxie sous des mat�riaux de toute
sorte, il fut amen� � Dunkerque pour y �tre soign�.
Un de ses hommes, qui tenait le manteau qu'il allait
endosser, avait eu le, cr�ne fractur�. Deux soeurs
ont �t� bless�es.
Le docteur Giry n'avait aucune blessure apparente,
mais avait re�u une commotion intense.
- Gr�ce aux soins qui lui ont �t� prodigu�s, il est
aujourd'hui compl�tement r�tabli et a insist� pour
reprendre son service.
Il est actuellement m�decin-major, m�decin-chef de
l'h�pital Jean-Bart, � Dunkerque.
JoeUF
La situation est assez calme.
Les familles Bastien, Bosment, Mlles Wansdorff,
Marcelle Gran�ois, Brunier, Pazin, Mme Baudouin sont
en bonne sant�. M. l'abb� Schneider est prisonnier.
M. l'abb� Blin est mort � Consenvoye.
Dans beaucoup de villages environnants les femmes
sont oblig�es de travailler pour l'�quipement des
troupes.
Malavillers est compl�tement d�truit.
CRUSNES
Il n'y a pas eu de combat important � Crusnes ; un
l�ger engagement seulement avec les douaniers lors
de l'arriv�e des Allemands.
Les Allemands ont fusill� � Dudelange MM. Bernard
p�re et Michel, marchand de vins, apr�s leur avoir
fait creuser leur fosse.
Dix-sept personnes ont �t� fusill�es � Sancy, dont
MM. Eug. Belfort et ses deux fils, Dieudonn�,
peindre, et son fils Joseph, Ch. Belfort, la garde
du ch�teau, Mannia, Hall� Joseph.
Attaques et
contre-attaques
SONT HEUREUSES
Sensibles progr�s en Alsace
Bordeaux, 26 d�cembre, 16 heures..
Canonnade peu intense sur le front entre la mer et
la Lys, o� un brouillard �pais a paralys� les
op�rations.
Entre la Lys et l'Oise, nous avons repouss�
plusieurs attaques ennemies, � Noulette, ouest de
Lens, � La Boisselle, nord-est d'Albert, � Lihons,
ouest de Chaulnord-est nes, o� une tranch�e prise �
l'ennemi a �t� perdue, puis reprise apr�s un vif
combat.
Entre l'Oise et l'Aisne, on nous signale que, dans
la journ�e du 24, une tr�s forte attaque allemande a
�t� repouss�e � Chivy, nord-ouest de Soupir.
Dans la r�gion de Perthes, notre artillerie a fait
taire les batteries qui bombardaient les tranch�es
r�cemment conquises par nos troupes ; deux fortes
contre-attaques allemandes ont �t� refoul�es dans la
nuit du 24 au 25.
Hier, une nouvelle contre-attaque particuli�rement
importante a subi un �chec complet.
En Argonne et entre Meuse et Moselle, rien �
signaler.
En Haute-Alsace, la journ�e a �t� marqu�e par de
sensibles progr�s. Devant Cernay, nous avons atteint
la lisi�re des bois sur les collines de l'ouest de
la ville ; nous nous y sommes maintenus malgr�
plusieurs contre-attaques.
Nous occupons les lisi�res d'Aspach-leBas et les
hauteurs qui dominent Carspach � l'ouest.
LES NOUVELLES
DU PAYS MEUSIEN
Du �� Bulletin
Meusien � :
MONTM�DY
M. le docteur Thirion, de Montm�dy, qui habitait
cette ville depuis sa r�cente mise � la retraite,
avait repris du service depuis le d�but de la guerre
; il �tait m�decin-major et s�journa dans cette
ville jusqu'au 23 octobre, date � laquelle les
Allemands l'emmen�rent en Allemagne. Il vient d'en
rentrer, par voie d'�change, avec d'autres m�decins
militaires allemands, et a confi� � un habitant de
Virton qui voyageait avec lui depuis la Suisse que,
jusqu'au 23 octobre, il n'y avait � Montm�dy ni
d�g�ts, ni vexations ; la population �tait, nourrie
suffisamment et des convois de farine y �taient
amen�s par les Allemands chaque semaine. Le nouveau
corps d'occupation allemand �tait d'ailleurs moins
brutal que le premier.
D'autres correspondants racontent que le tunnel,
d�truit par la garnison fran�aise, y serait r�par�
et que les Allemands auraient employ� tous les
habitants valides � d�blayer celui-ci pour r�tablir
la circulation des trains. (Sous toutes r�serves,
bien entendu.)
APREMONT-LA-FOR�T
On nous �crit d'Ernecourt que plusieurs habitants d'Apremont,
enlev�s comme prisonniers le 24 septembre, sont
rentr�s d'Allemagne le 11 novembre. Le maire, M.
Eug�ne Charrois, a �t� emmen� en otage avec vingt
hommes de la commune le 24 septembre, et depuis on
ignore ce qu'ils sont devenus. Sa femme, emmen�e en
m�me temps qu'eux, est r�fugi�e ici. On a �crit de
divers c�t�s pour avoir de leurs nouvelles, mais
sans r�sultat jusqu'ici.
SAINT-JULIEN ET BONCOURT
On nous �crit, � la date du 10 d�cembre, de Commercy
:
�� Ici, nos pauvres pays sont bombard�s
Quotidiennement ; des villages de cette r�gion ne
seront bient�t plus que des ruines. A Saint-Julien,
nous avons eu � d�plorer, ces jours derniers, la
mort de deux civils tu�s : MM. Martin p�re et fils.
A Boncourt, un civil, Mme Girot-Remy, a succomb� aux
suites d'une blessure d'obus � shrapnells.
THONNE-LA-LONG
Nous apprenons la mort de M. Cordier, instituteur de
cette localit�, qui a �t� inhum� � Haumont-les-Samogneux.
DAMVILLERS
On nous a annonc� derni�rement qu'un quartier
g�n�ral allemand �tait install� au village de
R�ville, � quelques kilom�tres nord de Damvillers.
Dans cette premi�re localit� les autorit�s
militaires allemandes n'auraient jug� aucune demeure
digne de les abriter et auraient fait construire �
leur usage personnel!, hors de la ville, un grand
b�timent d�montable en bois.
MARVILLE
Nous apprenons la mort de M. Edmond Mouton, ancien
maire de cette commune, fr�re du g�n�ral Mouton, et
de l'ancien conseiller g�n�ral de Dun.
STENAY
Les journaux publient une information de Milan, en
date du 16 d�cembre, annon�ant que d'apr�s une
d�p�che officielle le kronprinz a �tabli � Stenay
son quartier g�n�ral, probablement au ch�teau des
Tilleuls, d�j� occup� par lui ant�rieurement.
ARRONDISSEMENTS DE MONTM�DY ET VERDUN
Le 9 septembre, � Billy-les-Mangiennes, le bas du
village et la rue habit�e par M. Marc, maire, sont
ab�m�s et br�l�s ; � cette date, il restait
soixante-dix personnes au d�but de d�cembre, il ne
devait plus y avoir que le cur�-doyen et trois ou
quatre personnes.
A Nouillonpont, une vingtaine de maisons d�molies ;
aucune d'incendi�e et personne de tu�.
Pillon est br�l� en partie ; il y reste 30
personnes.
A Duzey, quatre ou cinq maisons d�fonc�es avec
l'�glise ; pas d'incendie.
A Rouvrois, aucun d�g�t.
Etain n'existe plus pour ainsi dire, ainsi qu'Eton.
Amel est tr�s ab�m�, Senon un peu moins, Loison est
ab�m� �galement.
Bouligny ne doit pas avoir souffert ; Spincourt est
en partie br�l�.
L'�glise de Saint-Pierrevillers est ab�m�e ; une rue
d'Arrancy est br�l�e.
Les troupes allemandes sont assez nombreuses dans la
r�gion, qui est n�anmoins tranquille et le
ravitaillement en denr�es n�cessaires est assez
facile.
Mogeville, Maucourt, ont �t� repris par nos troupes
et fortifi�es d'une fa�on tr�s solide.
Le 13 d�cembre, nos troupes ont bombard� Montfaucon
; les Allemands ont fortifi� Romagne-sous-les-C�tes
et toutes les hauteurs voisines.
A Charny, de grosses pi�ces ont �t� install�es aux
environs pour bombarder la population de Romagne.
On nous �crit d'ailleurs :
Maucourt presque enti�rement br�l� par les
Allemands, Moge ville, Fromezey �galement. Nous
occupons Ornes, qui n'est pas beaucoup ab�m�.
Gr�milly est occup� par nos patrouilles. Amel est
presque enti�rement d�truit. Senon a moins souffert.
Quelques maisons br�l�es et ab�m�es par les obus,
une partie du clocher est tomb�e.
Ces deux pays sont occup�s par l'ennemi et
retranch�s, le pays'entour� de fils barbel�s. A
Spincourt, le centre ab�m�, clocher d�truit, les
Allemands en ont fait un centre de ravitaillement
avec chemin de fer � voie r�guli�re, passant �
Vaudoncourt, Billy, Haut-Fourneau, s'engageant dans
la for�t pour le ravitaillement des troupes qui sont
� Romagne. Mangiennes est occup� par un r�giment
d'infanterie allemand avec l'�tat-major, n'a pas
trop souffert.
Nouillonpont a tr�s peu souffert. Muzeray, Rouvrois,
Saint-Pierrevillers �galement.
CANTON D'ETAIN
Eix, Moulainville, les Prussiens n'y sont pas venus.
Alors rien.
Abaucourt : quelques obus marmites sont tomb�s au
milieu du pays tuant six soldats d'infanterie et
faisant des bless�s (devant la mairie) ; pas de
d�g�ts mat�riels, quelques carreaux cass�s. Haucourt
rien. Herm�ville est bien ab�m� par les obus,
quelques maisons incendi�es dans le centre du
village. Warcq occup� par nos troupes a souffert
beaucoup, les fermes environnantes br�l�es.
R�GION SPINCOURT-�TAIN
Un de nos amis, officier, nous communique de
nouveaux renseignements sur la r�gion Spincourt-Etain
:
Mangiennes, Billy Pierrepont, Pillon, Mouzerey sont
fortement ab�m�s. A Billy, les habitants ont �t�
emmen�s � Zvickau (83 personnes), dont le cur�, les
familles Tonnelier. Robinot, Piernet, Humbert,
Mantoulet, Collignon, Alexis Lecomte.
SAINT-JEAN-LES-BUZY
M. Watrin, 58 ans, a �t� emmen� en Saxe par les
Allemands ; sa femme est rest�e au pays.
VI�VILLE-SOUS-LES-COTES
Les Allemands ont fait prisonnier un jeune homme de
18 ans, M. L�on Rodrigue, et l'ont emmen� chez eux.
AUBR�VILLE
Bombardement tous les jours deux fois. Le 4
d�cembre, 21 obus le matin, 5 de soir. Un de ceux-ci
est tomb� sur le fumier de M. Vitry, a cr�pi de
purin toute la fa�ade de la maison et bris� les
fen�tres � quelques pas du presbyt�re et de l'�cole
des filles. Un autre est tomb� sur la maison de soeur
A...
NEUVILLE
Neuville est aussi bombard�. Il reste peu de choses.
Le presbyt�re est br�l�, l'�glise endommag�e.
DES BOMBES SUR
NANCY
Vendredi 25 D�cembre
Un avion allemand a de nouveau survol� Namcy
vendredi matin ; il a lanc� sur notre ville deux
bombes qui, fort heureusement, n'ont fait aucune
victime, causant seulement quelques d�g�ts
mat�riels.
Il �tait pr�s de neuf heures et demie du matin
lorsque l'attention des passants fut attir�e par la
pr�sence d'un biplan voilant � une grande hauteur et
dont la forme indiquait qu'il appartenait � nos
ennemis.
L'avion lan�ait deux bombes, l'une tombait rue de
Mon-D�sert, 26, sur un b�timent d�pendant des
ateliers de la maison Fortin-Hanrion, fabricant de
cordages et literie, rue Saint-Dizier.
Le projectile per�ait dans la toiture un trou d'un
diam�tre de vingt centim�tres, traversait le
plancher du premier �tage et arrivait sur celui du
rez-de-chauss�e o� il brisait une planche sans faire
explosion, malis en d�gageant une �paisse et forte
fum�e noire qui fit croire aux voisins qu'un
incendie venait de se d�clarer.
On avertit les sapeura-pompiers qui arriv�rent en
toute h�te ; mais ils n'avaient pas � intervenir,
car la bombe n'avait provoqu� le moindre sinistre.
Les carreaux des baies d'�clairage n'avaient m�me
pas �t� bris�s ; aucun objet n'avait �t� renvers� et
une forte odeur de sulfure se r�pandait dans
l'atelier.
Un employ� de la maison Hanrion-Fortin ramassa le
projectile bris� en diverses parties, qui fut remis
� un gardien de la paix qui le transporta aussit�t
au bureau central de police.
Peu apr�s, un inspecteur de la s�ret� en fouillant
avec sa canne dans le trou fait dans le plancher y
d�couvrit l'h�lice, se trouvant � la partie
sup�rieure de la bombe.
La deuxi�me bombe est venue s'abattre sur la toiture
de l'h�tel de la Poste, place de la Cath�drale, dans
la partie qui prend jour sur une cour int�rieure du
c�t� du couvent des soeurs de l'Esp�rance.
Le projectile atteignit la partie du toit formant
mansarde,pr�s d'une fen�tre donnant le jour � la
chambre n� 47.
La bombe, en faisant explosion, produisit une forte
d�tonation, elle brisa enti�rement une poutre de
pr�s de quarante centim�tres de c�t�, fit un trou
�norme dans la toiture, couvrant de pl�tras Le lit
et toute la chambre, r�duisant en miettes une glace
appos�e au mur.
L'armoire et les autres meubles subirent �galement
de forts d�g�ts.
Un morceau de plomb de la toiture arrach� par
l'explosion est all� tomber dans le jardin du
couvent o� une soeur le rainassa, Un morceau de fer
servant de poign�e � La bombe y fut �galement
trouv�, ramass� et remis � la police, Plusieurs
vitres des fen�tres de la maison religieuse ont �t�
�galement bris�es par des �clats ; l'un d'eux est
all� se loger dans la paroi d'un couloir, apr�s
avoir travers� une porte.
Des d�bris d'ardoise et de bois provenant de la
toiture de l'h�tel jonchaient le sol du jardin.
La d�flagration fut tellement violente que, dans la
cuisine, situ�e sous une v�randa au pied du b�timent
o� la bombe s'�tait abattue, Mme Dottenville, qui
s'y trouvait, fut projet�e � quelques m�tres.
Elle n'eut fort heureusement qu'une l�g�re foulure
du pied.
M. Simon, maire, pr�venu, s'est rendu � l'h�tel et
au couvent de l'Esp�rance o� sa pr�sence a rassur�
tout le monde. Pendant toute la journ�e, une foule
assez dense s'est rendue place de la Cath�drale,
pour satisfaire sa curiosit� qui a �t� d��ue, aucun
d�g�t ne se voyant de la voie publique.
Samedi 26 D�cembre
Nancy a re�u samedi matin la visite d'un dirigeable
ennemi. Une dizaine de bombes ont �t� lanc�es.
L'a�ronef survolait la ville � une faible altitude.
Il se proposait comme objectif la voie ferr�e ; mais
il a manqu� son but et c'est dans la direction de la
ville vieille que sont tomb�s ses projectiles.
Du quai Claude-le-Lorrain � la P�pini�re, on a
relev� les traces de ce bombardement sur la place
Carnot, rues de la Source et de la Charit�, place
Saint-Epvre, Grande-Rue et aux abords du canal.
Quelques arbres duc cours L�opold ont �t� endommag�s
; les vitres de la place Carnot ont vol� en �clats ;
la. maison portant le num�ro 35, rue de la Source,
est d�t�rior�e ainsi que deux magasins avoisinant la
Petite Carri�re.
Les autorit�s civiles et militaires se trouvaient
sur Les lieux. Des barrages ont �t� �tablis. Les
mesures d'ordre n�cessaires ont �t� prises, afin
d'interdire aux curieux accourus en foule l'approche
des immeubles atteints par ces �� souvenirs �
allemands.
Il s'agit, pour les Boches, de simples souvenirs, en
effet, ainsi qu'en t�moignent deux photographies
ramass�es au boulevard de la P�pini�re par M.
Edouard Schlegel, 32, rue Laflize, et qui portent en
allemand ces d�dicaces : �� Bon No�l. Souhaits du
kaiser Guillaume �, �� Un aviateur allemand vous
salue �. L'envoi �tait contenu dans une enveloppe
avec une balle de bronze fran�aise pour lest.
La premi�re d�tonation s'est produite exactement � 5
h. 20.
Les Nanc�iens ont montr� plus de curiosit� que
d'�motion � la nouvelle d'une visite qui n'est point
pour eux une sensationnelle surprise.
Le bombardement a fait malheureusement plusieurs
victimes :
Mme Anna Go�b, 39 ans, domestique chez M. Jacquemin,
38, quai Claude-le-Lorrain a re�u des blessures qui
ont entra�n� la mort.
M. Louis-Georges Lantoine, 29 ans, originaire
d'Armenti�res, gar�on de caf� au buffet de la gare,
demeurant 4, cours L�opold, qud eut l'art�re
carotide tranch�e par un �clat de verre.
Quelques soldats ont �t� atteints peu gri�vement par
des �clats de verre.
TAUBE &
ZEPPELIN
Nancy,
26 d�cembre.
Nous recevons la communication suivante:
Dans la nuit de vendredi � samedi, un �� zeppelin � a
travers� Nancy laissant tomber une douzaine de
bombes qui firent heureusement beaucoup plus de
bruit que de mal, leur effet s'�tant born� � des
d�g�ts mat�riels peu importants. La population de
Nancy ne s'en est montr�e aucunement alarm�e.
M. le Pr�fet a adress� au Ministre de l'Int�rieur le
t�l�gramme suivant :
�� Pr�fet Nancy � Ministre Int�rieur.
�� Nos f�tes de No�l ont �t� honor�es hier par
pr�sence �� Taube � qui jeta plusieurs bombes vaines
dans le voisinage de la Cath�drale � l'heure de
l'entr�e des fid�les. Cette nuit �� Zeppelin � versa
nombreuses bombes fort bruyantes mais peu
meurtri�res. Population Nancy fort tranquille s'est
rendormie en pensant avec moi qu'il �tait pr�f�rable
que ces bombes fussent tomb�es sur nous que sur nos
soldats dans les tranch�es. �
AVIS A LA POPULATION
M. le G�n�ral commandant les troupes du secteur de
Nancy me communique les recommandations du g�n�ral
commandant en chef relativement au bombardement par
dirigeables et d'apr�s lesquelles �� la meilleure
d�fense est d'�teindre � terre toutes les lumi�res
afin de priver le dirigeable de tout point de
rep�re. �
Deux questions sont, � ce point de vue, � envisager
: l'�clairage public et l'�clairage priv�.
L'�clairage public sera r�duit au minimum
strictement indispensable. Sur l'�clairage priv�, le
g�n�ral ajoute : �� Je crois savoir que les lumi�res
de la ville ont actuellement sensiblement augment�
le soir ; il y aurait int�r�t � faire conna�tre aux
habitants qu'il convient de persister dans les
mesures de prudence qui avaient �t� prises, � ce
point de vue, au d�but des hostilit�s �
Cette double pr�caution est excellente et chacun, en
ce qui le concerne, y devra participer avec une
exacte discipline.
Je me permets d'ajouter ceci : quelques personnes
qui ont vill�giatur� les mois d'ao�t et de septembre
hors de Nancy se sont, para�t-il, montr�es fort
�mues des quelques bombes dont le �� Zeppelin � vient
de nous arroser. Ces personnes, je l'esp�re, et je
les y invite, vont se h�ter de se faire une
mentalit� analogue � celles des Nanc�iens qui sont
rest�s ici aux heures r�ellement critiques ; � ces
heures-l�, Nancy fut une cit� vaillante ; il serait
ridicule, j'ose le dire, que ses nerfs fussent, si
peu que ce soit, �branl�s aujourd'hui par ces
manifestations de l'ennemi plus bruyantes que
meurtri�res et qui ne peuvent comporter aucune
cons�quence strat�gique : de quelque sympathie �mue
que nous entourions les victimes de ces accidents,
n'oublions pas que tous les �� Zeppelins � font moins
de victimes dans une ville que la moindre �pid�mie
de fi�vre typho�de ou m�me de scarlatine, et qu'�
tout prendre, en cette saison, les �� Zeppelins� sont
moins dangereux pour la collectivit� que la
pneumonie. Avis en particulier aux mamans qui ont
des enfants en bas-�ge.
L. MIRMAN,
Pr�fet de Meurthe-et-Moselle.
QUELQUES
PROGR�S
EN ARGONNE ET EN ALSACE
NOS AVIONS
bombardent Frescaty et Metz
Paris,
27 d�cembre, 15 h, 45.
Entre la mer et la Lys, journ�e calme. Canonnade
intermittente.
Entre la Lys et l'Oise, rien � signaler.
Dans la vall�e de l'Aisne et en Champagne, duel
d'artillerie.
Dans la r�gion de Perthes, l'ennemi, apr�s un
violent bombardement, a tent�, sur des tranch�es
qu'il avait perdues, une contre-attaque qui a �t�
aussit�t repouss�e par notre artillerie et notre
infanterie.
En Argonne, l�gers progr�s.
Au sud de Saint-Hubert, une compagnie a gagn� entre
100 et 200 m�tres de terrain, et nous avons bombard�
un ravin o� l'ennemi a �vacu� plusieurs tranch�es.
Entre la Meuse et la Moselle, � l'est de
Saint-Mihiel, deux attaques allemandes contre une
redoute du Bois-Br�l� ont �t� repouss�es.
On sait qu'un dirigeable a lanc� une dizaine de
bombes sur Nancy, au milieu de la ville, et sans
aucune raison d'ordre militaire. Nos avions, au
contraire, ont bombard� les hangars d'aviation de
Frescaty et une des gares de Metz, o� des mouvements
de trains �taient signal�s, ainsi que les casernes
Saint-Privat, � Metz.
En Haute-Alsace, nous avons r�alis� de nouvaux
progr�s sur les hauteurs dominant Cernay et nous y
avons repouss� quelques attaques.
Paris, 28 d�cembre, 0 h. 46.
Voici le communiqu� officiel du 27 d�cembre, 23
heures :
Apr�s avoir, toute la nuit derni�re, dirig� un feu
violent d'artillerie et d'infanterie contre nos
troupes install�es � La Boisselle et dans les
tranch�es voisines, l'ennemi a prononc� deux
attaques cons�cutives, mais sans aucun succ�s.
Nous tenons fortement les tranch�es enlev�es pr�s de
Puisaleine.
Sur les Hauts-de-Meuse, nous consolidons
l'occupation du terrain conquis pr�s de la tranch�e
de Colonne.
Saint-Di� a �t� violemment bombard� de 9 heures et
demie � 12 heures.
PRISONNIERS DE
LA MEUSE
Du ��
Bulletin Meusien � :
M. Juste, cur� de Richecourt, est prisonnier �
Bayreuth, avec trente-six de ses paroissiens, et
quatre-vingt-dix autres de Xivray-Lahayville. Il
�crit le 7 novembre :
�� Le g�n�ral vient de nous annoncer que nous sommes
innocents et que nous sommes ici par une erreur
inexplicable. Alors nous sommes libres de partir, et
ce sera quand tout sera en r�gle. Je suis ici sans
habit, sans linge. Je suis utile � tous, sachant un
peu l'allemand. Je n'ai pas quitt� mes paroissiens ;
ils en ont �t� contents ; le g�n�ral m'en a f�licit�
devant mes gens. Ne vous inqui�tez pas, on fera pour
le mieux. �
M. Aubois, cur� d'Hattonch�tel, prisonnier �
Ehrenbreisten, par Coblentz, avec dix autres
pr�tres, �crit :
�� Hattonch�tel est aux deux tiers incendi� ; la
vo�te de l'�glise s'est �croul�e au-dessus du choeur
et de l'avant-choeur. Les habitants ont pris la fuite
et, apr�s quinze jours, vingt et une personnes
seulement �taient pr�sentes.
�� Hattonville et Vigneulles sont aussi presque
compl�tement d�truits. �
M. Tridon, cur� d'Heudicourt, lib�r� :
�� Dans ma paroisse, il restait � mon d�part cent
quinze habitants et quelques r�fugi�s de Loupmont.
Je me demande avec angoisse de quoi ils peuvent
vivre, car on leur a tout pris, jusqu'au dernier
lapin, jusqu'aux moindres l�gumes, et nos ennemis,
pour les mieux affamer, donnaient les gerbes de bl�
en liti�re � leurs chevaux. �
Mmes Gille et Dussay Fran�oise, de
Romagne-sous-les-C�tes, sont prisonni�res � Zwickau.
M. Louis Hannetelle, de Luzy, m�canicien � la gare
de Longuyon, est prisonnier �galement en Allemagne.
MM. Emile Warlot et Libor, de Combres, sont �
Zwickau, en Saxe.
Mme Vautrin et son fils, Mme Liborr Mlle Catherine
Laurent, Mme Maria Laurent et son fils, sont �
Schwetzingen, caserne de cavalerie n� 21,
grand-duch� de Bade.
Les habitants de Saint-Remy, intern�s � Rastadt
(grand-duch� de Bade) viennent d'�tre rapatri�s et
dirig�s sur Thonon-lesBains (Haute-Savoie).
Le docteur Mutalet, de Mangiennes, actuellement
m�decin militaire, nous informe que sa m�re est du
nombre des prisonniers civils emmen�s par les
Allemands. Elle est avec Mmes Robert et Leroy, de
Mangiennes. � Eratz-sur-Alzette (grand-duch� de
Luxembourg)
M. Constant Sirot �crit � ses parents :
Je suis parti depuis le 19 septembre comme
prisonnier civil. Nous sommes sept de Lissey :
Vital-Rouyer, L�on Richard, Patoche Th�otime, Isaie
Richard, Bon Delz�dar, L�on Fallet, Sirot Constant.
Constant SIROT.
Lager Grafenwohr, Bavi�re (Allemagne).
- M. G. Klein �crit :
Mon beau-fr�re Jules Dauphin, prisonnier en Saxe, me
donne les noms de quelques Meusiens qui sont avec
lui et dont plusieurs n'ont pas de nouvelles de leur
famille. Je vous en donne la liste ci-dessous :
Fulbert, de Bouvigny ; Paul Fauquenot, de Bouligny ;
Antoine et Louis Alzin, de Bouligny ; Aim� Goeuriot,
de Bouligny ; Klein-Saguez, de Bouligny ; Erard-Proth,
de Spincourt ; L�on Fran�ois, de Spincourt ; Victor
Lavigne, de Spincourt ; Didry-Malher, de Landres
(M.-et-M.).
Kriegsgefangener Neues Lager, baraque 24, �
Koenigsbriick, royaume de Saxe, via Pontarlier.
C. KLEIN,
40, rue Georges-R�mond, Gagny (Seine-et-Oise)
LES AVIONS
ALLEMANDS
survolent Nancy
LA CHASSE A�RIENNE
Dimanche
27 d�cembre, � midi et demi, un a�roplane allemand a
survol� Nancy � une grande hauteur. Il a laiss�
tomber quatre bombes. L'une est tomb�e sur le toit
de l'�cole maternelle du boulevard
d'Alsace-Lorraine, o� elle a bris� quelques tuiles :
la seconde, rue de Strasbourg, 70, o� elle a
travers� la toiture de la maison et provoqua dans le
grenier un l�ger commencement d'incendie qui a pu
�tre rapidement �teint par les habitants aid�s par
un gardien de la paix et un soldat territorial. Les
pompiers furent appel�s, mais ils n'eurent pas �
intervenir. Nos braves sapeurs ramass�rent les
d�bris de l'engin, � la poign�e duquel �tait
attach�e une longue banderole aux couleurs
allemandes.
La troisi�me est venue s'abattre rue du Tapis-Vert,
6, chez M. Kahn, n�gociant en chiffons. Elle a
travers� la toiture d'un petit b�timent servant de
cuisine o� se trouvait la domestique, qui n'a eu
aucun mal.
L'engin, en se brisant en deux, communiqua le feu �
des chiffons ; un seau d'eau suffit � l'�teindre.
Les morceaux furent remis � la police.
La derni�re, rue du Man�ge, 6.
Nos aviateurs s'�taient mis rapidement � la chasse
de l'a�roplane ennemi qui se dirigea vers les lignes
allemandes. Dans les rues, un public nombreux �tait
mass�, suivant attentivement des yeux la poursuite
du �� taube � que l'on crut un moment en danger, et
qui put cependant �chapper. Nos grands oiseaux
revinrent ensuite � leur nid. Pas pour longtemps !
A deux heures et demie, en effet, un autre a�roplane
allemand,jouant d'audace, revenait au-dessus de
Nancy. Bient�t une bombe s'abattait sur la maison
portant le num�ro 14 du boulevard d'Alsace-Lorraine.
Elle se brisait sur le toit. Les d�bris venaient
s'abattre sur la voie publique, o� ils �taient
ramass�s par des enfants.
Un autre engin portant une banderole rouge, blanche
et noire tombait dans le iardin de l'�tablissement ��
A Robinson �, prairie de Tomblaine, creusant un
simple trou dans la terre.
Enfin, un dernier engin allait choir dans la Meurthe
o�, bien entendu, nul ne fut tent� de le rep�cher.
Pendant qu'ils survolaient la ville, les deux avions
ennemis ont laiss� tomber une certaine quantit� de
fl�chettes d'acier. Aucune personne n'a �t�
atteinte.
Ces apparitions de �� taubes � effray�rent fort peu
les Nanc�iens qui, pendant toute l'apr�s-midi,
continu�rent leur promenade dominicale dans les rues
centrales de la ville.
DISTRIBUTEURS
AUTOMATIQUES
LES AVIATEURS
BOCHES
ont beaucoup d'esprit
L'habitude est prise.
Chaque jour am�ne � Nancy son taube.
Visite blanche. R�sultats nuls - ou presque. Quand
par hasard des victimes sont frapp�es, ce sont des
femmes, des enfants, ce qui contribue � montrer sous
un angle plut�t f�cheux pour le kaiser ce que serait
dans le monde la civilisation germanique si le
destin lui permettait d'y r�gner.
Les aviateurts boches se sont-ils exactement rendu
compte du peu d'effet mat�riel et moral de leurs
envois ? C'est fort possible. Ils essaient, � cette
heure, de �� faire de l'esprit �, comme ces gens dont
les plans d�jou�s ou les intentions trahies
recherchent une diversion pour expliquer
maladroitement leurs perfidies.
En un mot ils voudraient, selon une expression
populaire, nous �� la faire � la blague � :
- On ne veut point votre mort, insinuent les pilotes
des tauben et des zeppelins ; on d�sire seulement
vous prouver que, le cas �ch�ant, on a en Allemagne
autant d'esprit qu'au pays de Voltaire �.
L�-dessus nos visiteurs a�riens improvisent leurs
fac�ties.
Elles sont du meilleur go�t.
Jugez-en.
Mercredi dernier, un taube lan�ait sur le quartier
Grandville deux bombes inoffensives, garnies
apparemment de poudre de perlinpinpin, mais l'une
d'elles portait un ing�nieux m�canisme peur r�pandre
� profusion des manifestes, des tracts, des
proclamations � la nation fran�aise.
C'est le dernier progr�s, osons le dire nettement,
des distributeurs automatiques, la supr�me
nouveaut�, le jouet de fin d'ann�e, l'article
simple, �l�gant, solide et pratique. Voyez notre
assortiment, messieurs!
Prenez l'objet en mains, mesdames ! L'essayer c'est
l'adopter - et �a d�fie toutes les concurrences.
Les Nanc�iens qui ramass�rent les d�bris de l'engin,
purent ainsi savoir : 1� que le gouvernement de M.
Poincar� avait d�clar� la guerre ; 2� que leur ville
�tait, cern�e ; 3� qu'une formidable l�gion de
casques � pique marchait sur Lyon ; 4� que nos
soldats seraient sagement inspir�s en se pr�cipitant
dans les bras des excellents kamarades qui les
traiteraient comme des fr�res.
Excusez du peu !
Hier, nouvelles distributions d'articles de
propagande �� Made in Germany �. Ce furent d'abord
plusieurs douzaines de fl�chettes en acier sur
lesquelles se revendiquait orgueilleusement le droit
exclusif de propri�t� et d'exploitation :
�� Invent� en France et fabriqu� en Allemagne.�
Les Boches, en v�rit�, se vantent.
D'autres fl�chettes, mod�le identique, annon�aient
sans vergogne aucune :
�� De l'Allemagne victorieuse � la France vaincue. �
Faudra voir !
Un simili-obus de pacotille, adorn� d'une banderole
aux couleurs d'outre-Rhin, tomba dans la prairie de
Tomblaine sans que nous ayons pu savoir quelles
marchandises couvrait ce pavillon, mais nous
pr�sumons qu'il recommandait encore l'exactitude des
pronostics et la sinc�rit� des nouvelles extraites
de l'agence Wolff.
De son c�t�, le Zeppelin de samedi matin laissa
tomber - comme un oiseau sa fiente - deux
photographies d'officiers aux boutons dor�s, aux
�paulettes outrageusement peintes, aux moustaches
onctueuses de cosm�tique, avec ces d�dicaces venues
l'une d'Heidelberg et l'autre de Mulhouse (� Alsace,
pardon !) :
�� Joyeux No�l. Aimable envoi du kaiser Guillaume II.
- Souvenir d'aviateurs allemands �. Suivait une
signature.
A l'instar d'un cabotin sous les hu�es et les coups
de sifflet, les Tauben et les Zeppelin essaient de
se d�gager par une pirouette ; ils virent dlans
l'opprobre mieux que dans l'air en se donnant devant
la galerie une attitude �quivoque de mystificateurs
qui font des plaisanteries.
Derri�re leurs �� rigolades � on rel�ve les femmes,
les enfants, les victimes innocentes.
Si les Boches empruntent � Voltaire un peu de son
esprit, c'est � la cour de Fr�d�ric II qu'ils ont d�
ramasser les miettes.
LUDOVIC CHAVE.
A RAMBERVILLERS
De la Poudre aux
Moineaux
Depuis
trois jours, Rambervillers re�oit la visite des
Tauben qui viennent jeter des bombes sur la ligne de
chemin de fer, dans le but probable de d�truire des
ponts ou des ouvrages et d'emp�cher momentan�ment le
passage de nos trains de ravitaillement. Le jour de
No�l et le lendemain, ils ont survol� la ville, vers
3 heures et demie de l'apr�s-midi et ont laiss�
tomber plusieurs bombes qui n'ont fait aucun d�g�t.
DANS LES DUNES
DES FLANDRES
Nous sommes au
pied de ses lignes de r�sistance
Paris,
28 d�cembre, 15 h. 10.
En Belgique, nous avons continu� � avancer � l'ouest
de Lomba�rzide. Nous sommes actuellement au pied des
dunes sur lesquelles l'ennemi a �tabli sa ligne de
r�sistance.
Au sud d'Ypres, nous avons perdu un �l�ment de
tranch�es, pr�s de Hollebecke.
Dans la r�gion de Lens, pr�s de Carency, l'ennemi a
c�d�, devant nos attaques. 800 m�tres de tranch�es
de premi�re ligne.
Dans la vall�e de l'Aisne et en Champagne, canonnade
intermittente, particuli�rement intense dans les
r�gions de Reims et de Perthes, o� l'ennemi a vis�
sp�cialement les positions que nous avons conquises
� l'ouest de cette localit�.
Sur les Hauts-de-Meuse, nous avons progress�
l�g�rement sur tout le front.
Dans les Vosges, l'ennemi a bombard� la gare de
Saint-Di�. Le service de la vote ferr�e n'est pas
interrompu.
En Haute-Alsace, au nord-est de Steinbach, une
contre-attaque allemande a �t� repouss�e.
Paris, 29 d�cembre, 1 heure.
Voici le communiqu� officiel du 28 d�cembre, 23
heures :
Pendant toute la journ�e une temp�te violente a
emp�ch� les op�rations sur la plus grande partie du
front.
On signale cependant que nous avons r�alis� quelques
progr�s en Argonne.
QUELQUES GAINS
DE PLUS
De la Belgique �
l'Alsace
Paris,
29 d�cembre, 15 h. 22.
En Belgique nous avons enlev� le village de
Saint-Georges, o� nous nous sommes �tablis.
De la Lys � la Somme, l'ennemi a bombard� assez
violemment nos positions dans la r�gion
d'Echelle-Saint-Aubin-Le Quesnoy-Bouchoir
(nord-ouest de Roye).
Calme sur le front, entre la Somme et l'Argonne.
Nous avons gagn� un peu de terrain en Argonne, dans
le bois de la Grurie, le bois Bolante et le bois de
Courte-Chausse.
Sur les Hauts-de-Meuse, plusieurs contre-attaques
allemandes ont �t� repouss�es dans le bois Le
Bouchot (nord-est de Troyon).
L'ennemi, qui avait enlev� nos tranch�es voisines de
la redoute du bois Br�l� (ouest d'Apremont) en a �t�
chass� apr�s trois contre-attaques successives.
En Haute-Alsace, nous investissons �troitement
Steinbach. A la suite d'un violent combat, nous nous
sommes empar�s des ruines du ch�teau, au nord-ouest
du village.
LEUR
RAISONNEMENT
SUR LE
BOMBARDEMENT DE NANCY
Paris,
29 d�cembre, 18 heures.
Le communiqu� allemand pr�sente le bombardement de
Nancy comme une mesure de repr�sailles r�pondant au
bombardement de Fribourg-en-Brisgau par nos
aviateurs.
Or, les avions fran�ais n'ont jamais ex�cut� que des
op�rations de guerre motiv�es par des raisons
d'ordre militaire.
Ils n'ont atteint, � Fribourg-en-Brisgau, que les
hangars et les usines d'aviation, ainsi que la gare
o� des mouvements de troupes �taient signal�s.
Un de nos dirigeables, qui survola Sarrebourg, ne
bombarda que la station, ainsi que d'autres points
de la ligne Sarrebourg- Avricourt.
De m�me, dans la journ�e du 26 d�cembre, nos avions
ayant survol� Metz, ne lanc�rent de projectiles que
sur les hangars de Frescaty, sur une des gares et
sur les casernes de Saint-Privat.
Les bombes allemandes, au contraire, sont tomb�es, �
Nancy, en pleine ville, sur un point �loign� de tout
b�timent militaire, et o� aucune troupe ne se
trouvait rassembl�e. Elles ne pouvaient donc
atteindre que des b�timents civils et ne faire de
victimes que parmi la population.
UN BAPT�ME DU
FEU
au Taube
POUR NOS CONSCRITS DU 160e
Paris,
30 d�cembre, 0 h. 40.
Communiqu� officiel du 29 d�cembre, 23 heures :
Aucun incident notable ne nous a �t� encore signal�
jusque dans la soir�e.
Un �� Taube � a survol� Westende, le 20 d�cembre au
moment de la pr�sentation du drapeau aux soldats de
la classe 1914, nouvellement incorpor�s.
Le colonel Bablon, du 160e d'infanterie, fit ouvrir
le feu, mais sans succ�s.
Le �� Taube � jeta trois bombes. La premi�re �clata
derri�re le 1er bataillon avec un bruit formidable
mais elle n'atteignit personne.
La deuxi�me frappa le sol derri�re le 3" bataillon,
et fusa, sans effet.
La troisi�me tomba � dix pas devant le colonel
Bablon, impassible.
Pas plus que leur chef, aucun homme ne broncha, et
les recrues re�urent ainsi le bapt�me du feu avec la
m�me cr�nerie que les anciens.
AU COL DU
BONHOMME
Comment la
T�te-de-Faux fut prise par nos troupes
Un
territorial qui a particip� � l'attaque raconte
ainsi, dans une lettre, comment fut prise, le 2
d�cembre, la T�te-de-Faux, qui commande le col du
Bonhomme et o� les Allemands avaient �tabli un
observatoire :
�� On nous avait dit : �� Au premier coup de canon,
vous sortirez de vos abris pour prendre place dans
les tranch�es vos postes de combat, � la lisi�re du
bois. �
Nos abris ? Quels abris ! Des esp�ces de tani�res o�
l'on ne p�n�trait qu'� quatre pattes, creus�es en
bas d'invraisemblables pentes, devant un village
d'Alsace, de B... Les Boches l'occupaient ; nous les
voyions; circuler dans l'unique rue, en marche vers
les sentiers qui conduisent sur la hauteur. Et quand
ils grimpaient, ils ne paraissaient pas plus gros
que des fourmis. Ils avaient, � quatre ou cinq cents
m�tres de nous, des tranch�es zigzagantes, o� ils
arrivaient apr�s avoir ras� les murs, utilis� des
replis de terrain.
Vers les huit heures, un mar�chal des logis
d'artillerie passe pr�s de la sentinelle que notre
poste fournissait.
- Vous allez �tre bien ici, dit-il. C'est une
baignoire qu'on vous a fournie � l'oeil pour le
concert.
Cette chose s�rieuse avait l'air d'une plaisanterie.
Machinalement, je jetai un regard autour de moi. La
tranch�e d�couverte o� nous devions prendre place
�tait pleine d'eau. Mais, surplombant la vall�e, les
fermes, le village alsacien, elle avait des allures
d'avant-sc�ne. Le mar�chal des logis s'�loigna,
press�, en ajoutant :
- Vous allez entendre quelque chose.
C'est tout au plus si nous ne nous sent�mes pas
impatients. Il y avait l�-haut des canons de tous
calibres.
L'heure approchait. Quelle fut tout � coup ma
surprise : des mouvements de troupes avaient
commenc� tout pr�s. Des chasseurs alpins, �mergeant
soudain d'un repli, le fusil � la main, arrivaient
au pas de course, un � un, � 25 m�tres d'intervalle
et s'abritaient, entass�s, derri�re une ferme
couverte de zinc, dans un trou en contre-bas,
susceptible de cacher presque toute une compagnie,
Plus loin, d'autres formations se dessinaient.
Une voix claire, brutale, pr�cipit�e, s�che et
volontaire, s'�l�ve soudain, dans unecadence presque
r�guli�re, au rythme quasi math�matique. Ce sont nos
75 Leur mart�lement est pr�cis, nerveux,
impitoyable, obs�dant. Les obus qui tombent
abondamment sur les pentes d'en face, montent, en
�clatant, vers le sommet de la T�te-de-Faux, la
balayent, y faisant une oeuvre terrible de
destruction.
Mais nos chasseurs ont �t� rep�r�s par l'observateur
boche. La premi�re marmite vient tomber derri�re la
ferme o� ils se sont mass�s. Elle �clate � 30
m�tres. Tout � l'heure, la bicoque sautera. Mais de
nouveau le canon a repris ; les chasseurs,
pr�cipitamment, remontent par un repli du sol ; ils
se couchent, se collent � la terre, derri�re le
talus d'un chemin creux. Mais les marmites les
suivent.
Toutes les batteries tonnent � la fois. Invisible,
dissimul�e on ne sait o�, l'artillerie de montagne
fait rage. Comme le 75, elle �l�ve sa voix s�che et
cassante, et le concert s'accentue. Les
mitrailleuses s'en m�lent, puis la fusillade �clate.
L'action presque tout enti�re se d�roule sous bois.
Mais dans le cr�pitement rageur des milliers
d'armes, l'esprit la suit, cette action. Il semble
qu'on entend d'imperceptibles fr�missements, des
bruits de feuilles s�ches, foul�es, de branches qui
cassent sous les pieds, de gens qui marchent,
courent, hal�tent, de corps qui tombent sur la terre
dure avec un bruit mat, sinistre.
D�j�, tout en haut, des clairons sonnent la charge.
Des cris montent, multiples, furieux, f�roces,
emplissant la vall�e.
- En avant !... � la ba�onnette !...
On devine les sections qui s'�lancent, les pointes
qui frappent. Sous mes yeux, la compagnie des
chasseurs s'est lev�e : elle s'est �lanc�e vers les
tranch�es boches, sur le Bonhomme. mais c'est la
gr�le des marmites. Elles sifflent, tombent,
�clatent, empestant l'atmosph�re. Oh ! qu'ils sont
prompts � se garantir ! En voici un qui poursuivi,
trois fois se couche sous la pluie de fer, et trois
fois se rel�ve. En voil� d'autres qui, eux, ne se
rel�veront plus...
Le drame continue. De plus en plus sourd, et comme
ouat�, l'�cho de la fusillade intense vient de
l'autre c�t� des monts. Les n�tres ont d�pass� la
cr�te ; c'est qu'ils sont les ma�tres:
Tout, au fond, en bas, des maisons br�lent,
d�roulant leurs volutes rouges sur l'�cran noir de
la nuit. �
LES
ALSACIENS-LORRAINS
Leur situation de
Fran�ais va �tre officiellement d�termin�e
La
situation des Alsaciens-Lorrains en France a, d�s le
premier jour, vivement pr�occup� le gouvernement.
Suivant les instructions donn�es par le ministre de
l'int�rieur, tous les Alsaciens-Lorrains qui se
trouvaient en France au moment de la mobilisation et
qui ont pu �tablir, soit par des pi�ces
authentiques, soit par des r�pondants, qu'ils sont
vraiment d'origine; alsacienne ou lorraine, ont re�u
un permis de s�jour.
La question la plus d�licate �tait de r�gler la
situation de ceux qui, � la suite de l'occupation
par les troupes fran�aises, ont �t� �vacu�s
d'Alsace-Lorraine soit comme otages, soit parce
qu'en �ge d'�tre mobilis�s, il �tait n�cessaire de
les soustraire � l'autorit� allemande. Il se
trouvait en effet parmi eux des Alsaciens-Lorrains
d'origine et de sentiments fran�ais, et des immigr�s
d'origine et de tendance absolument allemandes.
Les ministres de l'int�rieur et de la guerre ont
d�sign� une commission charg�e de proc�der sur place
� la s�lection n�cessaire et qui a d�j� accompli une
grande partie de sa t�che. Afin de r�gler dans le
plus bref d�lai la situation des Alsaciens-Lorrains
en France, le pr�sident du conseil vient, en outre,
de d�signer plusieurs personnes qui sont, � tous
points de vue, qualifi�es pour �tablir la
distinction n�cessaire entre ceux qui, v�ritablement
Alsaciens-Lorrains, doivent �tre d�s maintenant
assimil�s aux Fran�ais et ceux qui doivent �tre
consid�r�s comme sujets allemands. Ce sont MM.
Wetterl�, Weill, Langei, anciens d�put�s
d'Alsace-Lorraine; Blumenthal, maire de Colmar ;
Helmer, avocat � Colmar ; Ch�telain, Wilmoth et
Growel, originaires d'Alsace-Lorraine et
repr�sentant les soci�t�s d'Alsaciens-Lorrains.
Quatre commissions ont �t� ainsi constitu�es, qui
vont op�rer simultan�ment dans les lieux de d�p�t
qui restent encore � visiter. Ainsi, dans quelques
jours, la situation individuelle de tous les
Alsaciens-Lorrains en France sera d�finitivement
r�gl�e.
NOTRE AVANCE
M�THODIQUE
Nos canons lourds
� l'oeuvre
Paris,
30 d�cembre, 15 h. 10.
En Belgique, nous avons gagn� un peu de terrain dans
la r�gion de Nieuport, en face des polders, au nord
de Lombaertzide.
L'ennemi a bombard� violemment Saint-Georges, que
nous mettons en �tat de d�fense.
Nous avons enlev� un point d'appui allemand, au
sud-est de Zonnebecke, sur la route de Bacelaers �
Paschenda�le.
De la Lys � l'Oise, rien � signaler.
Dans la vall�e de l'Aisne et en Champagne, l'ennemi
a manifest� une recrudescence d'activit� qui s'est
traduite surtout par un violent bombardement, auquel
notre artillerie lourde a r�pondu efficacement.
De l'Argonne � la Moselle, canonnade sur tout le
front. Elle a �t� particuli�rement intense sur les
Hauts-de-Meuse.
Dans les Vosges, l'ennemi a prononc� sur la
T�te-de-Faux une attaque qui a �t� repouss�e.
En Haute-Alsace, nous consolidons nos positions.
Notre artillerie lourde a r�duit au silence les
obusiers allemands qui bombardaient Aspach-le-Haut.
LES VITRAUX DE
SAINT-EPVRE
Du ��
Journal de la Meurthe et des Vosges � :
�� Les vitraux de Saint-Epvre, r�duits en miettes par
le bombardement du zeppelin, �taient l'oeuvre de Carl
Geyling, de Vienne. Il y en avait 72, qui co�t�rent
300.000 fr. au cur� Trouillet et qui datent de 1867.
Le plus c�l�bre �tait celui offert par
Fran�ois-Joseph et repr�sentant saint Fran�ois et
sainte Elisabeth de Hongrie.
Ces vitraux furent expos�s � Vienne et rapport�rent
beaucoup d'argent � l'intr�pide cur�-b�tisseur.
Les vitraux an�antis en tout ou en partie sont :
saint L�on IX et Pie IX, saint Henri, saint Gabriel,
saint Fran�ois, sainte Elisabeth, saint Ferdinand,
sainte Marguerite. saint Hubert, sainte Anne, saint
Paulin, saint L�opold, saint Ferdinand, sainte
Madeleine, saint Mathieu, saint Luc, etc., etc.
Il semble bien qu'aucune verri�re n'est intacte, et
qu'il faudra des ann�es pour refaire tout cet
ensemble artistique.
On pourra, il faut l'esp�rer, remettre
provisoirement en verre blanc ces grandes baies de
Saint-Epvre, au moins pour le printemps prochain.
Les admirateurs nanc�iens de Fran�ois-Joseph peuvent
�tre satisfaits maintenant... le vilain sire, l'�tre
ignoble qui a d�cha�n� tous ces crimes et ces
monstruosit�s a mis le couronnement � sa honte !
Qu'il soit maudit par toute la Lorraine, par toute
la France, par toute la Chr�tient� ! �
R�SUM�
DES PRINCIPAUX EVENEMENTS
de D�cembre 1914
1er
d�cembre. - Le g�n�ral Joffre dit aux Alsaciens de
la r�gion de Thann : �� Notre retour est d�finitif.
Vous �tes Fran�ais pour toujours �. - Le roi George
et M. Poincar� se rencontrent sur le front.
2 d�cembre. - Nos troupes enl�vent Aspach-le-Haut,
en Alsace, Lesm�nils et le Signal de Xon, sur la
rive droite de la Moselle, et la T�te de Faux dans
les Vosges.
7 d�cembre. - Les Allemands entrent dans Lodz. Les
Russes sont devant Cracovie.
8 d�cembre. - Trois croiseurs allemands sont coul�s
par les Anglais pr�s des �les Falkland. - Les Serbes
reprennent l'offensive et repoussent les
Autrichiens.
9 d�cembre. - Nos aviateurs bombardent
Fribourg-en-Brisgau.
14 d�cembre. - La gare de Commercy est bombard�e par
des batteries tirant d'une tr�s grande distance.
D�g�ts insignifiants. - Belgrade est repris par les
Serbes. - Un aviateur fran�ais incendie un train
allemand en gare de Pagny-sur-Moselle.
15 d�cembre. - Trois croiseurs allemands bombardent
Hartlepool et Scarborough. 55 morts, 155 bless�s.
17 d�cembre. - Le protectorat anglais est proclam�
en Egypte.
22 d�cembre. - Rentr�e des Chambres.
D�claration minist�rielle. - Un avion allemand jette
deux bombes sur Nancy. Pas d'accidents.
26 d�cembre. - Dans la nuit du 25 au 26 d�cembre un
Zeppelin survolant Nancy lance 18 bombes, qui tuent
deux civils. - Saint-Di� est violemment bombard� de
9 heures et demie � 12 heures.
27 d�cembre. - Un avion allemand lance 4 bombes sur
Nancy � midi, et un seconds � 2 heures et demie en
lance trois autres ainsi que des fl�chettes. Pas
d'accidents. |