BLAMONT.INFO

Documents sur Bl�mont (54) et le Bl�montois

 Pr�sentation

 Documents

 Recherche

 Contact

 
 Plan du site
 Historique du site
 
Texte pr�c�dent (dans l'ordre de mise en ligne)

Retour � la liste des textes - Classement chronologique et th�matique

Texte suivant (dans l'ordre de mise en ligne)

Acc�s � la rubrique des textes concernant 1914-1918
 

Octobre 1914 - La Vie en Lorraine (1/3)

Page suivante
ao�t 1914 septembre 1914 octobre 1914 novembre 1914 d�cembre 1914
janvier 1915 f�vrier 1915 mars 1915 avril 1915  

La Grande guerre. La Vie en Lorraine
Ren� Mercier
Edition de "l'Est r�publicain" (Nancy)
Date d'�dition : 1914-1915


La Grande-Guerre
LA VIE EN LORRAINE OCTOBRE 1914
L'Est R�publicain
NANCY

Voici le mois d'octobre. Les combats continuent. Mais la ligne de feu, apr�s la victoire de la Marne, va se fixer pour la campagne d'hiver.
La tentative d'encerclement de Verdun �choue. Pendant que les Belges r�sistent toujours, nous tenons. Nous comprenons que la guerre sera plus longue qu'on ne l'avait g�n�ralement estim� au d�but.
Le mois d'octobre est le mois de l'organisation tenace pour les civils comme pour les combattants.
En m�me temps les r�cits des r�fugi�s nous renseignent sur l'oeuvre des Barbares.
La Vie en Lorraine du mois d'octobre raconte au jour le jour cette action admirable d'une nation qui veut vivre et qui vaincra.
La province d'avant-garde est r�solue, et commence, au milieu de ses atroces douleurs, � sourire des vains efforts germaniques.
Ren� MERCIER.

LA BATAILLE
DU
GRAND-COURONN�

Nous partons de Nancy � huit heures et demie du matin. C'est le 4 mars. Le ciel, gris d'abord ; un petit soleil de premier printemps va l'�clairer. Des automobiles militaires, servies par des chauffeurs de l'�tat-major, sont mises � notre disposition. Elles filent vers l'est sur la route nationale, qui tend � la Lorraine annex�e, et auraient bient�t pass� la fronti�re, nous conduisant � Ch�teau-Salins, Morhange et Sarreguemines, si les tranch�es allemandes n'�taient pas l�, sur l'autre rive de la Seille.
D�s qu'on est sorti de la ville, le regard fouille un vaste horizon. La contr�e est tr�s ouverte et sem�e de collines de grand relief. Les prairies, d'aspect maigre, alternent avec les bois d�feuill�s. Les villages et les maisons isol�es sont assez rares. La vue est ferm�e devant nous � quinze ou vingt kilom�tres par une cr�te en demi-cercle, qu'occupent encore les Allemands. Bien qu'aucun engagement important ne se livre dans la journ�e, le canon tonne � notre gauche, vers le bois Le Pr�tre, au nord de Pont-�-Mousson, devant nous, pr�s de Nomeny.
Nous faisons halte sur un tertre, o� l'officier d'�tat-major commis � ce soin nous explique la bataille qui pr�serva Nancy de l'occupation allemande. Il faut d'abord la situer dans l'histoire de la guerre pour en montrer l'importance et les r�sultats.

La deuxi�me et la troisi�me semaines d'ao�t avaient �t�, pour l'arm�e fran�aise, heureuses et presque faciles. La double offensive pr�vue par l'�tat-major progressait. L'arm�e du g�n�ral Pau, apr�s s'�tre rendue ma�tresse des d�fil�s des Vosges poussait en Alsace. Mulhouse avait �t� une seconde fois occup�e et les avant-gardes avaient atteint les acc�s de Colmar.
Dans la Lorraine annex�e, les arm�es du g�n�ral Sarrail et du g�n�ral de Castelnau, une fois le Donon, sommet septentrional des Vosges, en leurs mains, avaient pouss� hardiment dans le terrain qui s'�tend au sud de Metz. D'abord, tout alla bien ; au del� de la Seille, les Fran�ais avaient, le 19 ao�t au soir, atteint Delme, Dieuze et Morhange. Ils ne s'�taient heurt�s qu'� des troupes de couverture. C'est le 20 que commen�a la malempar�e. Plusieurs corps d'arm�e allemands attaqu�rent tout � coup. La droite fran�aise c�da la premi�re, entra�nant apr�s elle, le centre et la gauche, qui pouvaient �tre d�bord�s. Le grand �tat-major allemand lan�a le 21 ao�t un bulletin triomphant :
�� Conduites par le prince h�ritier de Bavi�re, des troupes appartenant � toutes les races germaniques ont remport� hier une victoire dans des batailles livr�es avec des forces consid�rables entre Metz et les Vosges.
�� L'ennemi s'avan�ant en Lorraine a �t� rejet�. avec de grosses pertes sur toute la ligne.
�� Le succ�s total ne peut pas �tre encore appr�ci�, attendu que l'�tendue du champ de bataille est plus grande que ne le fut celle des luttes de toutes nos arm�es en 1870-1871.
�� Anim�es d'un �lan irr�sistible, nos troupes poursuivent l'ennemi et continuent � le combattre aujourd'hui. �
Le lendemain, 22 ao�t :
�� Les troupes fran�aises battues hier entre Metz et les Vosges ont �t� poursuivies et leur retraite a d�g�n�r� en fuite. Jusqu'ici, plus de dix mille prisonniers ont �t� faits et au moins cinquante canons pris. Les forces ennemies battues comportaient plus de huit corps d'arm�e,. �
L'empereur adressait au roi de Bavi�re une d�p�che de f�licitations pour les hauts faits du prince Ruprecht. A Munich, devant le palais des Wittelsbach, ce fut un d�lire et, du haut de son balcon, le roi Louis III haranguait la foule en ces termes :
�� Je suis fier de voir mon fils remporter de si beaux succ�s � la t�te de ses vaillantes troupes ; mais ceci n'est qu'un d�but. De grandes victoires nous attendent encore. J'ai la confiance dans la qualit� de l'arm�e allemande, qui restera victorieuse quel que soit le nombre des ennemis. �
Eh bien ! la bataille du Couronn� de Nancy devait pourvoir � ce que les Allemands fussent arr�t�s net, sur la fronti�re m�me, apr�s leur victoire de Metz, comme ils disent, de Morhange, comme l'appellent les Fran�ais.
Ce r�sultat allait permettre � Joffre de rallier son arm�e sur la Marne, quand venant de Belgique, les Allemands eurent d�bord� sur le Nord de la France apr�s la bataille de Charleroi. Sans la r�sistance du Grand-Couronn�, ce formidable coup d'arr�t e�t �t� impossible. Avan�ant de l'est � l'ouest les Allemands eussent franchi la trou�e de Charmes et d�bord� la droite du g�n�ralissime, rendant sa position intenable, soit qu'ils eussent march� droit devant eux vers l'ouest, soit qu'ils eussent pris le plateau de Langres pour objectif. Joffre aurait d� reculer au moins jusqu'� la ligne de la Seine.
L'arm�e imp�riale comptait bien cueillir rapidement les fruits de son succ�s du 20 ao�t. Le premier qui s'offrait �tait de choix : Nancy. Cette ville n'est pas une forteresse. En 1870, elle fut occup�e, sans coup f�rir, par une avant-garde de uhlans. On la consid�rait comme sacrifi�e. Si les Allemands prenaient l'offensive, c'est derri�re la ligne Epinal-Toul-Verdun et les Hauts-de-Meuse que l'arm�e pourrait opposer une premi�re r�sistance efficace. La litt�rature militaire fran�aise ne le mettait pas en doute. La litt�rature militaire allemande, moins encore. Si bien que certaines cat�gories de r�servistes avaient, d�s le d�but de la guerre, re�u l'ordre de rejoindre leur corps � Nancy dans les derniers jours d'ao�t. Une entr�e triomphale sur la place Stanislas, l'une des plus �l�gantes de l'Europe avec sa ceinture de grilles dor�es �tait pour sourire � Guillaume II. Nancy, Nanzig, comme ils disent, devait devenir, apr�s la paix, une ville allemande capitale de la Westfranken, ou Franconie occidentale. Le 22 ao�t l'empereur arrivait � Delme, avec le r�giment des cuirassiers blancs, pour pr�parer ce grand spectacle.
Qui donc e�t imagin� qu'apr�s huit mois de guerre se d�roulant en majeure partie sur le sol fran�ais, Nancy serait encore inviol�e et confiante ? C'est une surprise, presque un miracle. Comment la bataille du Grand-Couronn�, dont les r�sultats furent si d�cisifs, n'a-t-elle pas, d�s aujourd'hui, sa place au rang des plus m�morables ?

J'avais cru que le Grand-Couronn� �tait un ensemble de travaux du g�nie construits � loisir en temps de paix. Il n'en est rien. C'est une position naturelle, renforc�e o� il fallait par des ouvrages de campagne h�tifs. Supposez une demi-lune, un demi-cercle de hauteurs, les unes bois�es, les autres d�nud�es, prot�geant Nancy du nord au sud, la Meurthe sinueuse, large et lente en formant la corde. Il commence au nord, vers Pont-�-Mousson, pour se fermer au sud vers Saint-Nicolas-de-Port, Dombasle et la for�t de Vitrimont. Les collines dont il est fait sont �lev�es d'une centaine de m�tres, tr�s allong�es, � pentes sym�triques, sans angles morts, avec de grands champs de tir.
Le g�n�ral de Castelnau avait pour mission de d�fendre le Grand-Couronn�.
Il disposait � cet effet de quatre corps d'arm�e, ceux qui avaient combattu � Morhange, o� les d�p�ches officielles allemandes pr�tendaient en avoir mis huit �� en fuite �. C'�taient les 9e, 15e, 16e et 20e corps. Ils �taient appuy�s par trois divisions de r�serve, les 68e, la 59e et une autre dont le num�ro m'�chappe. Les Fran�ais �taient donc un peu moins de 200.000.
L'attaque allemande se produisit sur deux directions principales. L'arm�e du prince royal de Bavi�re, venant de Delme, avait pour objectif le secteur nord du Grand-Couronn� ; des �l�ments de la garnison de Metz et l'arm�e du g�n�ral Heeringen, venant de Sarrebourg et de Dieuze, devaient attaquer, en partie directement sur Nancy, par la for�t de Champenoux, en partie plus au sud, par Cirey, Bl�mont, Badonviller, Baccarat, Gerb�viller, tournant la droite de la position fran�aise. Cette aile de l'arm�e �tait de beaucoup la plus avanc�e, puisque, apr�s un vif combat, elle occupa Lun�ville le 21 ao�t.

Je ne puis retracer toutes les phases de la bataille, qui, avec des accalmies, dura une douzaine de jours et ne fut achev�e que vers le 6 au 7 septembre., avant - notons-le bien - qu'e�t commenc� la bataille de la Marne.
L'arm�e venant de Delme vint se heurter au sud de Mousson, au mont Sainte-Genevi�ve, qui commande la vall�e de la Moselle. Apr�s des combats r�p�t�s, dont plusieurs corps � corps furieux, l'attaque fut abandonn�e le 7 septembre. Depuis lors, l'arm�e allemande a recul� de quelques kilom�tres. Les m�mes troupes tiraillent encore chaque jour dans le bois Le-Pr�tre dont nous entendons distinctement le canon.
Ce n'est pas cette partie du grand Champ de bataille que nous avons parcourue, mais la partie sud.
L'officier qui nous sert de guide la raconte de la fa�on la plus saisissante, sans grand d�ballage de d�tails tactiques, mais nous montrant ce qu'il a vu. �� Notre �tat-major �tait l�. A l'aide de nos jumelles, nous avons aper�u les premiers Allemands sortant de la lisi�re de ce grand bois, l�-bas, � gauche. Alors nos 75, en batterie derri�re cette cr�te, ont ouvert le feu. � Et ainsi de suite. Racont�e de la sorte, sur les lieux, par un t�moin bien disant et expert, le r�cit prend vie et nous voyons les principaux �pisodes de la bataille.
A notre gauche, se dresse le Grand-Mont d'Amance, avec un village entre le Petit et le Grand-Mont, comme Monnetier entre le Petit et le Grand-Sal�ve. Il a jou�, pour le secteur sud le r�le sauveur du mont Sainte-Genevi�ve pour le secteur nord, bien qu'il ait �t� �cras� d'obus, plusieurs jours durant, par des batteries lourdes allemandes qu'on n'arrivait pas � rep�rer et auxquelles il e�t �t� du reste inutile de chercher � r�pondre, puisque leur port�e �tait plus longue que celle des pi�ces dont les Fran�ais disposaient alors.
Un des �pisodes les plus sanglants fut l'entr�e en ligne de la brigade de Toul,. form�e des 168e et 169e de ligne.
�� Elle �tait dans ce bas-fond. Elle a re�u l'ordre de traverser l�, � gauche de la route, ce saillant de, la for�t de Champenoux, puis, arriv�e � l'autre lisi�re, de gravir � couvert la pente qui aboutit au petit plateau que vous voyez, de le traverser, de franchir la route et de marcher sur le bois d'Erb�viller, qui s'�tend � droite. Nous suivions d'ici tout ce mouvement. La brigade s'est calmement d�ploy�e. Nous l'avons vue peu � peu dispara�tre sous bois.
Pas un coup de canon. Pas un coup de fusil. Apr�s une longue attente, ses lignes ont �merg� de la for�t, � l'angle fix�. Apr�s une conversion bien ex�cut�e pour prendre la nouvelle direction, elle a gravi le coteau en ordre, toujours sans �tre inqui�t�e.
Mais, quand elle a d�bouch� sur le petit plateau, nous l'avons vue fauch�e en quelques minutes. A la lisi�re du bois d'Erb�viller, les Allemands avaient soigneusement dissimul� douze mitrailleuses, qui, tout � coup, sans que rien e�t r�v�l� leur pr�sence, se mirent � cracher � trois ou quatre cents m�tres. Leurs gerbes de balles balayaient le sol. En vain nos hommes se jetaient � terre pour riposter. Ils �taient touch�s � la t�te. Quelques-uns avaient mis leur sac devant eux. Rempart illusoire. Presque tout ce qui avan�ait au sommet du coteau est tomb�. La terrasse �tait encombr�e de morts et de bless�s qui se touchaient tous sur plusieurs centaines de, m�tres carr�s. �

Nous allons voir. Sept mois ont pass� et les traces du charnier restent toujours apparentes. D'abord ce, sont de longues, longues tombes anonymes, o� des centaines de jeunes hommes dorment c�te � c�te. Une croix surmont�e d'un k�pi rouge, parfois aussi d'une ceinture bleue, et quelques inscriptions sommaires. Nous nous d�couvrons, la gorge serr�e. Le canon du bois Le Pr�tre, � quelques kilom�tres, nous rappelle qu'il s'agit, non d'un �mouvant spectacle d'histoire, mais de la r�alit� pr�sente et toute voisine.
(Journal de Gen�ve.) Ab. B...

LE 10 AOUT A MULHOUSE

Un Alsacien, t�moin oculaire de la premi�re occupation de Mulhouse par les Fran�ais, publie son journal dans les �� Basler Nachrichten �. Apr�s avoir peint, l'accueil fait aux Fran�ais par la population, d'abord r�serv�e, puis se laissant gagner par l'enthousiasme, et racont� la retraite des troupes d'occupation, il en arrive � la rentr�e des Allemands, le matin du 10 ao�t.
Le matin d�j�, les officiers des troupes qui entraient se comportaient comme en pays ennemi. Ils criaient continuellement : �� Ouvrez les volets ! Fermez les fen�tres ! � Comme je n'avais pas compris le premier ordre et m'en enqu�rais, un officier me cria : �� Ferme ta gueule ! ou je te f... bas ! �. Et il braquait sur moi son pistolet. Il n'y a naturellement pas de r�plique � un langage si clair.
Quoique les gens n'eussent pas cess� d'apporter � boire et � manger aux troupes qui passaient, ils �taient continuellement malmen�s. Les officiers, le revolver au poing, for�aient les spectateurs � saluer non seulement les drapeaux mais tous les officiers qui d�filaient. �� Chapeau bas ! � criaient-ils. Et comme un vieux monsieur employ� de la ville, r�pondait poliment : �� J'ai salu� �, un blanc-bec de lieutenant lui cria : �� Eh ! bien, saluez de nouveau. Devant un officier allemand la bande des Wackes n'a qu'� se d�couvrir �. Fusse la femme d'un haut employ� communal rentrant � la maison avec son gar�on. �� Chapeau ! � lui crie un officier. La dame, tremblante d'angoisse, �tait d�j� son �pingle de chapeau quand l'officier lui dit en ricanant : �� Dumme Gans ! � C'est le gosse qui doit saluer, ce qui fut fait.
Le soir, les officiers se pavan�rent sur les trottoirs, bousculant � coups de coude les civils qui ne descendaient pas. Il y avait du reste peu de passants ; la plupart des gens all�rent au lit de bonne heure, apr�s une journ�e si mouvement�e. Mais quelle nuit ! Peu apr�s 10 heures, des coups de feu �clatent dans tous les coins de la ville, une fusillade bien pire que celle des deux jours de bataille. Le motif ?
Jusqu'� pr�sent on n'est pas encore au clair. Le fusil d'un soldat �tait-il parti par m�garde ? Un aviateur fran�ais avait-il lanc� une bombe, comme plusieurs pr�tendent l'avoir vu ? On n'en sait rien. Le fait est que les soldats, fatigu�s et surexcit�s par deux jours de combat, crurent � une surprise des Fran�ais et se mirent � tirer � l'aveuglette dans toutes les rues et de toutes les fen�tres. Un vacarme d'enfer, bient�t accompagn�, comme la nuit pr�c�dente, du cr�pitement des mitrailleuses. Seulement, cette fois le tir �tait dirig� contre la ville, et les traces des balles sont encore visibles sur des centaines de maisons. Dans quelques rues gisaient des soldats, tous atteints par des balles allemandes. Ainsi � la rue de Rixheim, huit soldats qui regagnaient en courant leur cantonnement furent fauch�s par les mitrailleuses parce qu'on les prit pour des assaillants fran�ais.
Les sc�nes qui suivirent sont indescriptibles. Les portes furent enfonc�es, les volets bris�s, les fen�tres enfonc�es, des salves tir�es dans des appartements o� logeaient parfois des soldats allemands. Tous les habitants des rues avoisinantes, les plus jeunes comme les plus vieux, furent chass�s des maisons et parqu�s sur des places d�couvertes o� ils durent rester jusqu'au lendemain matin, les mains en l'air et souvent moiti� v�tus. D�fense de dire un mot ; si quelqu'un, dans le sentiment de son innocence, voulait protester contre ce traitement inhumain, on lui appliquait sur la poitrine le revolver ou la ba�onnette. Des commer�ants de vieille souche germanique et de hauts fonctionnaires subirent les m�mes affronts que le simple ouvrier alsacien qui y trouvait quelque consolation. Oui, m�me le tenancier de l'H�tel Central, o� logeaient l'�tat-major du 14e corps, le g�n�ral de Huene et le prince Max de Baden, subit le m�me sort, quoiqu'il soit bon Bavarois et bon patriote. Des douzaines de notables, professeurs, fabricants, directeurs, ma�tres, h�teliers furent menac�s d'�tre fusill�s. Le traitement qui leur fut inflig� d�fie toute description.
Les officiers qui avaient ordonn� ces mesures �taient fermement convaincus crue la population avait tir� sur eux. La m�me nuit encore, on proc�da � des perquisitions, mais sans r�sultat. Jusqu'� aujourd'hui on n'a pas pu �tablir un seul cas prouvant que les coups de feu provenaient de la population civile, quoique le maire ait offert une prime de 1.000 mark. Toutes les balles trouv�es jusqu'� pr�sent proviennent au contraire exclusivement des fusils d'ordonnance allemands. Et il s'est tir� au moins 500 coups ! Officiers et soldats avaient perdu la t�te.
Le lendemain, 11 ao�t, fut la digne suite de cette nuit de terreur. Officiers et soldats devaient avoir re�u l'ordre expr�s de traiter la population sans m�nagement. A tous les coins de rue des postes terrorisaient les passants. A la porte de la Jeunesse, des mitrailleuses braqu�es tournent leurs gueules mena�antes contre les principales art�res de la ville, tandis que d'autres commandent les places Evidemment l'autorit� militaire croyait � une r�bellion, tandis que la population angoiss�e ne demandait qu'� �tre laiss�e en repos.
Ce ne fut qu'apr�s une enqu�te approfondie que l'autorit� militaire revint de ses pr�ventions et fit �loigner les mitrailleuses et rel�cher les personnes arr�t�es. Mais depuis 8 heures du soir, tous les civils devaient �tre rentr�s. Les soldats seuls remplissaient les caf�s. Quant aux sentiments des officiers vis �-vis de la population civile, mais apr�s la fin de l'affaire, vous en jugerez par l'apostrophe suivante adress�e � des dames, mes voisines, qui causaient tranquillement sur leur balcon : �� Allez vous cacher, damn�e bande de cochons ! (Verfluchte Schweinebande). Ces canailles de Fran�ais n'ont pas besoin de prendre l'air ! � Et ils soulignaient ces gentillesses en brandissant leur revolver. Ces m�mes dames avaient tout le jour offert des rafra�chissements aux troupes qui passaient.

UNE JOLIE C�R�MONIE

Bayonne, le 30 septembre.
Dans la cour du Lyc�e transform� en h�pital temporaire, une touchante c�r�monie a eu lieu ce matin. Devant tous les bless�s valides r�unis, le sergent Andr� Bruelle, du 37e d'infanterie, 2e section de mitrailleuses, port� � l'ordre du jour de l'arm�e, a �t� f�licit� publiquement. L'ordre du jour porte : �� A command� une section de mitrailleuses avec la plus grande �nergie, malgr� un feu violent d'infanterie ; est rest� jusqu'au dernier moment � son poste de combat o� il a �t� gri�vement bless�. � Ajoutons que bien que gri�vement bless� d'une balle � la jambe, il a fait huit kilom�tres en portant sa mitrailleuse sur son dos. Cet acte de courage a �t� accompli au combat de Morhange, en Lorraine, le 20 ao�t.
Apr�s la c�r�monie militaire du Lyc�e, une autre plus intime, que nous pourrions appeler une f�te de famille, avait lieu � la clinique du docteur Delay, o� le sergent Bruelle est en traitement. Sous les arbres, tous les bless�s r�unis autour d'une table, ont bu gaiement � leur camarade, heureux de le f�liciter de sa vaillance et de son courage.
Ces petites f�tes patriotiques sont r�confortantes et jolies.

EN HAUTE-ALSACE
Nouvelles de source suisse

Nous lisons dans le �� Pays �, Porrentruy, du 26 septembre :
Nous tenons d'une personne qui revient de Mulhouse les renseignements suivants :
Mardi dernier, la ville, occup�e par les Allemands, �tait calme. Elle craignait que les Allemands, oblig�s de se retirer devant les troupes fran�aises, n'incendiassent Mulhouse.
Quelques jours auparavant, la police avait oblig� les habitants � pavoiser leurs maisons, pour c�l�brer une victoire allemande � Thann.
Mercredi apr�s midi, un a�roplane fran�ais survolait la ville. On ne put d�s lors entrer � Mulhouse sans un laissez-passer du commandant de place, car on supposait que les Fran�ais approchaient.
Officiellement, il n'y a eu que six personnes fusill�es � Mulhouse, mais bien d'autres ont �t� tu�es dans des caves, dans des r�duits, par des soldats allemands.
On a dit que l'h�pital de Mulhouse avait �t� endommag� par le feu de l'artillerie fran�aise. Il y a eu, en effet, quelques d�g�ts, d'ailleurs peu importants. Cela provient de la circonstance que les Allemands avaient plac� des canons pr�s de l'h�pital et qu'ils tiraient, de l�, sur les Fran�ais, si bien que le m�decin qui dirigeait l'�tablissement d�clara que, si l'on ne consentait pas � retirer ces canons, il s'en irait et abandonnerait ses malades.
Burtwiller pr�sente un aspect lamentable depuis le bombardement. Quand les Fran�ais revinrent � Mulhouse pour la seconde fois, �mus de ce d�sastre, ils organis�rent une qu�te chez les officiers en faveur des malheureux habitants, laquelle produisit une somme de cinq mille francs.
BONCOURT. - Jeudi matin, on a entendu d'ici une forte canonnade dans la direction de Dannemarie. D'apr�s des renseignements que je crois s�rs, une bataille aurait �t� engag�e pr�s de Ballersdorf, � quelques kilom�tres de Dannemarie. On me dit que les Fran�ais se sont servis de pi�ces de gros calibre, amen�es de Belfort.
Je ne connais pas encore le r�sultat de la bataille, mais je sais que les Fran�ais re�oivent continuellement d'importants renforts.
Les Allemands font, de temps � autre, des incursions sur le territoire fran�ais de Belfort. Jeudi, huit uhlans sont arriv�s � Faverois. Ils ont �t� re�us � coups de fusil par les Fran�ais et ont �t� tu�s.
Un dragon suisse m'a racont� que jeudi, au point 509, pr�s de Boncourt, on avait compt� 670 coups de canon pendant la journ�e de jeudi. Il est probable qu'une action d�cisive se pr�pare en Haute-Alsace.

Nous lisons dans le �� Jura �, de Porrentruy, du 29 septembre :
Les combats de la semaine derni�re, entre Waldighofen et Roppenzweiler, ont tourn� au d�savantage des Allemands, comme on le pr�voyait. Deux r�giments de landwehr ont �t� an�antis. On dut r�quisitionner partout o� on le put des chars pour transporter les nombreux bless�s.
Il est imprudent, m�me dangereux, de se rendre actuellement en Alsace. Les curieux sont pr�venus. Tous les hommes valides de 17 � 45 ans ont �t� lev�s et emmen�s par les Allemands. Aujourd'hui m�me sont partis ceux de la r�gion de Ferrette.
Les nouvelles sont rares en Alsace. Seuls quelques journaux de la r�gion sont encore distribu�s. M�me les journaux b�lois sont interdits dans le Reichsland, malgr� leurs tendances germanophiles.

LA SITUATION G�N�RALE
Attaques repouss�es
Nombreux prisonniers

Bordeaux, 29 septembre, 16 h. 10.

A NOTRE AILE GAUCHE
Au nord de la Somme et entre la Somme et l'Oise, l'ennemi a tent�, de nuit et de jour, plusieurs attaques qui ont �t� repouss�es.
Au nord de l'Aisne, aucun changement.

AU CENTRE
En Champagne et � l'est de l'Argonne, l'ennemi s'est born� � de fortes canonnades.
Entre Argonne et Meuse, l�gers progr�s de nos troupes qui trouvent devant elles des positions fortement organis�es par les Allemands.

SUR LES HAUTS-DE-MEUSE DANS LA WOEVRE ET A L'AILE DROITE (Lorraine et Vosges)
Pas de modification notable.
D'une fa�on g�n�rale, notre front est jalonn�, de l'est � l'ouest, comme il suit :
R�gion de Pont-�-Mousson : Apremont, la Meuse.
Dans la r�gion de Saint-Mihiel : les hauteurs au nord de Spada et la partie des Hauts-de-Meuse au sud-est de Verdun.
R�gion de Varennes : le nord de Souain, Chauss�e romaine qui aboutit � Reims, les avanc�es de Reims, la route de Reims � Berry-au-Bac, les hauteurs dites du Chemin-des-Dames sur la rive droite de l'Aisne. La ligne se rapproche ensuite de l'Aisne jusque dans la r�gion de Soissons.
Entre Soissons et la for�t de l'Aigle, elle comprend les premiers plateaux de la rive droite de l'Aisne.
Entre l'Aisne, et la Somme, elle passe par Rib�court. (qui est � nous), Lassigny (occup� par l'ennemi), Roye (� nous), Chaulnes (� l'ennemi).
Au nord de la Somme, elle se prolonge sur les plateaux entre Albert et Combles.
Nous avons fait encore de nombreux prisonniers au cours de la journ�e d'hier :
ils appartiennent notamment au 7e corps actif, au 7e de r�serve, aux 10e, 12e, 15e et 19e corps d'arm�e allemands.

ACAD�MIE DE NANCY

Bordeaux, le 29 septembre 1914.
Le ministre de l'Instruction publique, M. Albert Sarraut, a envoy� la circulaire suivante aux recteurs d'Acad�mie :
Les lyc�es, coll�ges et �coles de l'enseignement public vont s'ouvrir � la jeunesse fran�aise, partout o� le devoir sup�rieur d'hospitaliser nos glorieux bless�s n'aura pas fait obstacle � la reprise des �tudes.
Je d�sire que le jour de la rentr�e, dans chaque cit�, et dans chaque classe, la premi�re parole du ma�tre aux �l�ves hausse les coeurs vers la Patrie, et que sa premi�re le�on honore la lutte sacr�e o� nos armes sont engag�es. Dans tout le pays, � la m�me heure, les fils de France v�n�reront le g�nie de leur nation et salueront l'h�ro�sme de ceux qui versent leur sang pour la libert�, la justice, le droit humain.
La le�on du ma�tre sera simple et forte. Elle devra convenir � l'�ge de ses auditeurs, les uns enfants, les autres adolescents. Chacune de nos �coles a envoy� sur la ligne de feu des combattants, professeurs ou �l�ves, et chacune, je le sais, porte d�j� la douleur fi�re de ses deuils : la parole du ma�tre, dans la classe, �voquera d'abord le souvenir de ces morts, pour exalter leur exemple, en graver la trace dans la m�moire des enfants. Puis, � grands traits, sobrement, clairement, elle dira les causes de la guerre, l'agression sans excuse qui l'a d�cha�n�e, et comment devant l'univers civilis�, la France, �ternel champion du progr�s et du droit, a d� se dresser encore, avec des alli�s valeureux, pour repousser l'assaut des barbares modernes.
La lutte acharn�e qui nous conduit irr�sistiblement � la victoire ajoute chaque jour � la gloire de nos soldats mille traits d'h�ro�sme o� le ma�tre d'�cole puisera le meilleur de sa le�on. A la vaine emphase du verbe, il pr�f�rera, pour �mouvoir l'enfant, ces mod�les souverains de l'action.
De cette premi�re heure de classe, il faut que le viril souvenir reste � jamais empreint dans l'esprit de l'�l�ve, citoyen de demain. Le ma�tre qui aura su l'inscrire sera rest� digne de la confiance de la R�publique.
Sign� : Albert SARRAUT.

L'ACTION S'�TEND
Succ�s au Nord comme en Wo�vre

Bordeaux, 30 septembre, 15 h. 20.
A NOTRE AILE GAUCHE
Au nord de la Somme, l'action continue � se d�velopper de plus en plus vers le nord.
Entre l'Oise et l'Aisne, l'ennemi a prononc� une vigoureuse attaqu� sur Tracy-le-Mont, situ� au nord-est de la for�t de l'Aigle.
Il a �t� repouss� avec de fortes pertes.

AU CENTRE
Accalmie sur le front qui s'�tend de Reims � la Meuse.
Entre Argonne et Meuse, nous avons l�g�rement progress�.

EN WOEVRE
Violents combats.
Nos troupes ont avanc� sur plusieurs points, notamment � l'est de Saint-Mihiel.

A NOTRE AILE DROITE
En Lorraine et Vosges, pas de modification.

L'ATTAQUE ALLEMANDE
violente
MAIS BIEN MAINTENUE

Paris, 30 septembre, 13 h. 45.
LONDRES, 29 septembre. - Le Bureau de la Presse annonce que, dans la soir�e, la situation n'avait pas chang�.
Des combats tr�s violents s'�taient produits � l'aile gauche des Alli�s, mais l'arm�e anglo-britannique s'�tait bien maintenue.
Paris, 1er octobre, minuit 50.
La situation g�n�rale est satisfaisante.
Aucune modification nouvelle sur le front, sauf dans la Wo�vre m�ridionale, o� nous avons occup� Seicheprey et pouss� jusque sur les pentes du Rupt-de-Mad.

NOS H�ROS

Nancy, 1er octobre.
Nous apprenons la mort de M. Georges Lorrain, capitaine au ...e r�giment d'infanterie, mort au champ d'honneur, tu� d'une balle au coeur le 22 septembre, aux environs de Vigneulles-Hattonch�tel, � la t�te de sa compagnie.
M. le capitaine Lorrain, qui comptait tant de sympathies � Nancy, �tait le fils de M. Lorrain, capitaine lors de la guerre de 1870, qui fut pendant 25 ans juge de paix de Nomeny, et aussi le fr�re de notre concitoyen.

HEUREUSE ACTION
dans la Somme et progr�s dans l'Argonne

Paris, 1er octobre, 0 h. 55.
Ce soir, rien de particulier � signaler, sauf dans la r�gion de Roye, o� une violente action a heureusement tourn� pour nous, ainsi que dans l'Argonne. o� nous avons fait quelques progr�s nouveaux.
L'impression g�n�rale reste satisfaisante.

ENCORE UN PAS EN AVANT
sur la Somme ainsi qu'en Wo�vre

Paris, 1er octobre, 15 h. 40.
La situation dans l'ensemble n'a pas subi de changement.
Nous avons cependant progress� � notre gauche, au nord de la. Somme, ainsi qu'� notre droite, dans la Wo�vre m�ridionale.

L'ARDENTE BATAILLE

C'est surtout au Nord que la bataille est violente
Paris, 2 octobre, 15 h. 30.
A NOTRE AILE GAUCHE
La bataille continue tr�s violente, notamment dans la r�gion de Roye o� les Allemands paraissent avoir concentr� des forces importantes L'action s'�tend de plus en plus vers le Nord. Le front de combat se prolonge actuellement jusque dans la r�gion au sud d'Arras.
SUR LA MEUSE
Les Allemands ont tent� de jeter, pr�s de Saint-Mihiel, un pont qui a �t� d�truit cette nuit.
EN WOEVRE
Notre offensive continue. Elle progresse pas � pas, notamment dans la r�gion entre Apremont et Saint-Mihiel.
Sur tout le reste du front, il n'a �t� tent�, de part et d'autre, que des op�rations partielles.

ILS PASSENT

Nancy, 2 octobre.
Barbus jusqu'aux yeux, jusqu'aux yeux redevenus des yeux d'enfant, crott�s et gouailleurs, une couronne de pain au bras, des fleurs au bout du fusil, les voil� qui passent, nos braves troupiers.
O� vont-ils ? Au feu.
Mais vers quel endroit ? Ils n'en savent rien, et ils s'en fichent. Ils vont o� on leur dit d'aller, devant eux. Ils montent dans les trains, ou marchent � pied, vers l'Ouest, vers l'Est, vers le Nord, qu'importe ?
Tout leur est �gal, � condition cependant que le chemin qu'ils prennent les conduise vers l'ennemi. Ils ont fait de ceci une affaire personnelle.
Les grands mots, c'est tr�s bien. Bon pour les orateurs en chambre, ou les litt�rateurs d'occasion. Eux veulent des faits. Ils ne parlent pas, ils agissent, et ils rient. Ils ne sont pas charg�s d'�crire l'Histoire. Ils sont charg�s de la faire, et je vous assure qu'ils s'en chargent bien.
Ils ne prennent pas de poses. Non. Ils marchent sur les routes ou dans les bois, ils couchent dans les tranch�es ou dans les fermes, ils attendent en embuscade ou bondissent ba�onnette en avant.
La guerre d'aujourd'hui, ce n'est pas la guerre d'un gouvernement, ni des nations, c'est leur guerre � eux. Cette guerre leur appartient tout � fait. Ils s'occupent � cette oeuvre immense comme ils s'occupent � leur culture, � leur atelier, � leur bureau. Ils sont dans cette affaire comme chez eux.
C'est un travail qui leur va. Ils en sont tout r�jouis. Et �a se voit � leur rire, � leurs gestes, � leur adorable sans-fa�on, � tout ce qui appara�t de leur �me tranquille et enthousiaste.
Pourvu qu'on leur donne des Allemands pour taper dessus, le reste ne leur est rien. Ils cognent, ils cognent, sans souci de la mort qui fouette l'air, ils cognent � tour de bras, avec pr�cision, avec joie, avec le sourire.
Que d'autres tirent de leur action h�ro�que pour le bien de la France les b�n�fices n�cessaires, ils n'y, songent gu�re. Il y a quelque part des Allemands qui depuis des ann�es et des ann�es les ennuyaient de leur morgue et de leurs exigences, et qui redoublaient cette morgue et ces exigences � mesure qu'on leur c�dait.
Alors un jour on leur a dit :
- Est-ce que vous n'en avez pas assez ?
Et ils ont r�pondu :
- Mais oui, en voil� assez.
- Eh ! bien, allez !
Ils sont all�s, ils vont, ils courent, nos braves petits soldats, barbus jusqu'aux yeux, jusqu'� leurs yeux candides et rieurs d'enfants. �
On leur demande de se retirer, ils se retirent. On leur ordonne de rester, ils restent. On leur commande la charge, ils chargent, ah ! oui, ils chargent.
Je vous dis qu'ils font de tout cela une affaire personnelle.
Que parlez-vous de discipline impos�e ? Allons donc ! Ils ont une discipline tr�s �troite, et ils la veulent, et ils l'adorent, cette discipline qui scelle leur fraternit� et qui les conduit en ordre au combat d�sir�.
Leur capote est souill�e de la boue des tranch�es, de la poussi�re des routes, leur face est un peu tir�e parfois par la fatigue. Et ils sont, jolis comme tout cependant, nos soldats, parce que sur les traits un peu amaigris appara�t leur �me, et rayonne cet esprit railleur que ne saurait �teindre la douleur physique.
Ils les auront, les Allemands. Ils les auront pour tant qu'il en co�te. Ils les auront parce que dans cette foule arm�e et joyeuse une volont� claire s'est affermie.
Ils savent, nos soldats, qu'ils ne se battent pas seulement pour eux. Ils se battent pour leurs vieux parents, pour leurs femmes, pour leurs fianc�es, pour les enfants. Ils se battent pour qu'enfin on fiche la paix � tous ceux qu'ils aiment et qu'ils ont quitt�s, et auxquels ils veulent rendre la joie, de vivre, plus jamais g�t�e par l'orgueil germanique.
C'est bien de les voir passer, saluant des mains libres, le fusil en bandouli�re, le sabre brinquebalant ou le coupe-choux, et la pipe au bec comme de vieux troupiers qu'ils sont tous devenus.
Je ne cesse point de les admirer. Non pas � cause de leur courage certes. Ce serait insulte que de les admirer pour une chose si naturelle. Mais bien pour leur gaiet�, pour leur entrain, pour le d�dain qu'ils ont de tout ce qui n'est pas la bataille, pour leur gr�ce pu�rile.
Territoriaux ? R�servistes ? Active ? Non.
Ce sont tous de vieux grognards, et ce sont d'enrag�s gamins. Ils se battent comme des tigres et jouent comme de jeunes chats.
Et je me plais � les voir passer, et je m'arr�te pour voir sur leurs faces barbues le sourire goguenard de leurs yeux d'enfants.
REN� MERCIER.

AUTOUR DE MULHOUSE
Les Allemands battus
Le Suicide du Colonel Koch
�a sent mauvais

On lit dans le �� National Suisse � du 2 octobre :
Des personnes apparent�es � des familles de notre ville sont rentr�es de Mulhouse mardi soir, 22 septembre ; elles �taient parties de La Chaux-de-Fonds, lundi matin, pour aller voir les leurs et ont quitt� Mulhouse mardi, � midi. Voici, transcrit aussi fid�lement que possible, ce qu'elles nous ont rapport� :
�� Il est exact que des combats ont eu lieu la semaine pass�e, en Haute-Alsace, entre autres du c�t� de Thann, vendredi dernier. Ces combats ont �t� parfois tr�s meurtriers et les Allemands se sont fait battre. Le commandant de la place de Mulhouse, Koch, a re�u t�l�gramme sur t�l�gramme de l'�tat-major, lui enjoignant de passer les Vosges co�te que co�te. A plusieurs reprises, le commandant donna l'ordre � ses troupes d'op�rer une trou�e dans les positions fran�aises, solidement fortifi�es. Toutes ces attaques furent repouss�es. En d�sespoir de cause, le commandant de la place se suicida apr�s avoir envoy� � l'empereur cette laconique mais �loquente d�p�che : �� Impossible de passer. � De solennelles obs�ques militaires lui furent faites, samedi 19 septembre : le deuil, parmi les troupes allemandes, �tait g�n�ral.
Il est exact aussi que tous les hommes du landsturm, de 17 � 45 ans, ont �t� brusquement appel�s � quitter Mulhouse, et voici pourquoi : Dans toute la campagne, dans la partie de la Haute-Alsace occup�e par eux, les Fran�ais ont fait annoncer au son du tambour que les hommes dispos�s � aller vendanger dans le Midi de la France recevraient trois francs par jour ; c'est par milliers que les Mulhousiens partirent. Pour parer le coup, les Allemands, samedi apr�s-midi, annon�aient par voie d'affiches que les hommes du landsturm, de 17 � 45 ans, devaient se tenir pr�ts ; samedi, les affiches laissaient esp�rer que l'appel serait diff�r� de deux ou trois semaines au moins. Mais, dimanche matin, � 10 heures, ordre �tait donn�, sous peine de trois mois de prison, de se mettre en route, � pied, pour Mullheim, via l'�le de Napol�on. Vingt mille hommes partirent ainsi, plus d'un p�re donnait la main � ses jeunes fils, �g�s de 17 ou de 18 ans, des enfants presque.
Grande fut la consternation, grande est l'inqui�tude. Les Mulhousiens rest�s en ville - presque rien que des femmes - craignent de conna�tre � nouveau les horreurs de la. guerre, l'incendie et le pillage.

Mauvaise Farce de Somnambule

Nancy, 2 octobre.
L'une de nos pythonisses, et non des moins cot�es, vient de jouer un vilain tour � un certain nombre de ses clientes nanc�iennes. Son excuse est qu'elle ne l'a sans doute pas fait expr�s.
Donc, l� somnambule en question avait pr�dit, pour le 27 septembre, un nouveau bombardement de Nancy. Dans son sommeil magique, elle avait vu des maisons effondr�es, des flammes et du sang, beaucoup de sang...
Ce n'�tait pas trop de cent sous pour payer un pareil avertissement.
Aussi, dans l'attente de cette nouvelle visite des obus allemands, les personnes ainsi pr�venues par le calcul des tarots, avaient-elles pris toutes les pr�cautions n�cessaires.
Les matelas avaient �t� descendus dans les caves - les caves vo�t�es de pr�f�rence. Parents, voisins et amis avaient �t� charitablement pr�venus. On avait pr�pare lumi�res et victuailles, et, lorsque la nuit du 26 arriva, tous les initi�s s'�taient empress�s de gagner les abris pr�par�s.
Et l'on avait attendu, bravement, l'arriv�e des boulets.
Au moindre souffle de vent, au moindre claquement de porte, on se demandait si ce n'�tait pas un sifflement et claquement d'obus !
- Ah ! certes, nul ne ferma l'oeil, cette nuit-l�, dans les caves !
- Etes-vous bien certaines, mesdames, que c'�tait pour cette nuit ? demanda-t-on, � l'aube, aux clientes de la somnambule.
- Ce sera peut-�tre seulement pour la nuit prochaine !
En v�rit�, le 27 pouvait aussi bien comprendre la nuit �coul�e que la nuit � venir.
Et l'on recommen�a, � tout hasard, la nuit suivante, la descente � la cave !
L'attente fut aussi vaine que celle de la veille, et, comme l'on s'aper�ut, au retour du soleil, que si l'on n'avait pas eu � frissonner de peur, on frissonnait de froid, on jura de dormir d�sormais dans son lit, sous son �dredon bien chaud, comme l'avaient fait l'immense majorit� des Nanc�iens.
Nos devins ont sans doute baiss�, depuis le c�l�bre Calchas ?

DANS LE NORD
l'effort allemand est bris�
LA RIVE GAUCHE DE LA MEUSE
VERS SAINT-MIHIEL
d�barrass�e des Allemands

Paris, 3 octobre, 1 h. 15.
1� A l'aile gauche, un de nos d�tachements, qui d�bouchait d'Arras, a recul� l�g�rement � l'est et au nord de cette ville.
Au nord de la Somme, nous avons progress� en avant d'Albert.
Entre Roye et Lassigny, l'ennemi a prononc� de violentes attaques qui se sont bris�es contre notre r�sistance.
2� Calme sur le reste du front.
On signale qu'aux abords de Saint-Mihiel il ne reste plus d'ennemis sur la rive gauche de la Meuse.

DEUX ACTIONS HEUREUSES

Malgr� des renforts, l'ennemi est repouss� dans la Somme. - L'arm�e du kronprinz est aussi refoul�e.

Bordeaux, 3 octobre, 16 h. 15.
A NOTRE AILE GAUCHE L'action violente engag�e depuis hier continue, en particulier dans la r�gion de Roye, o� nous avons repouss� toutes les attaques, bien que, sur cette partie du front, l'ennemi ait �t� renforc� par de nouveaux pr�l�vements op�r�s sur le centre de sa ligne.

AU CENTRE
Rien � signaler de Reims � l'Argonne.

DANS L'ARGONNE
Le XVIe corps allemand (arm�e du kronprinz). qui avait essay� de se glisser par le bois de la Grurie, a �t� refoul� au nord de la route Varennes-La Haraz�e-Vienne-laVille.

EN WO�VRE DANS LES HAUTS-DE-MEUSE
Notre progression est toujours lente, mais continue.

NOTRE OFFENSIVE.
Elle est surtout sensible et heureuse
dans le Nord et l'Argonne

Bordeaux, 4 octobre, 15 h. 35.

A NOTRE AILE GAUCHE
Apr�s avoir repouss� toutes les attaques ennemies, nous avons repris l'offensive sur plusieurs points.
AU CENTRE
Rien � signaler jusqu'� l'Argonne.
Dans l'Argonne, nous avons refoul� l'ennemi vers le nord.
Nous progressons, mais tr�s lentement.
A NOTRE AILE DROITE
En Lorraine et en Vosges, rien de nouveau.

RENTR�E
de la Cour et des Tribunaux

Nancy, 4 octobre.
Vendredi matin, le tribunal civil a tenu son audience de rentr�e, sous la pr�sidence de M. Barrabino, qui a donn� la parole � M. Schuler, procureur de la R�publique, pour la d�claration d'ouverture de l'ann�e.
Cette formalit� accomplie, M. le Pr�sident en a donn� acte au procureur de la R�publique. Il a ensuite fait conna�tre que M. Lacroix, greffier du tribunal �tant mobilis�. M; Larivi�re, le plus ancien commis-greffier, avait �t� d�sign� pour le remplacer.
Apr�s la fixation des audiences : mercredi pour les affaires civiles; jeudi pour le tribunal correctionnel, l'audience de rentr�e a �t� lev�e.

AU CHAMP D'HONNEUR

Nancy, 4 octobre.
Un nouveau mais glorieux deuil vient de frapper notre ville en la personne du capitaine Andr� Dennery, tomb� au champ d'honneur dans un r�cent combat.
Le capitaine Dennery sortait de Saint-Cyr. Il �tait en outre licenci� en droit.
Les vieux Nanc�iens se rappelleront, non Sans �motion, son p�re, M. Dennery, chef de musique de notre cher 26e, qui entra � Nancy � la t�te de ce r�giment, en 1873, et qui resta ensuite des n�tres pendant pr�s de quinze ans.
Que la veuve de son fils et toute la famille veuillent bien accepter l'hommage de ce souvenir �mu, avec nos condol�ances.

UN BRAVE

Nancy, le 4 octobre.
Un de nos concitoyens, M. Charles Bronner, architecte-paysagiste. rue de Strasbourg, lieutenant de r�serve au 6 d'infanterie. a �t� bless� au combat de Vitrimont.
Atteint une premi�re fois au bras gauche, il continua n�anmoins � commander sa section six heures apr�s. Il recevait bient�t un �clat d'obus qui lui fracturait le pied gauche. Malgr� sa souffrance, Charles Bronner encouragea ses hommes jusqu'au moment o� il fut relev� pour �tre conduit � l'ambulance.
Ce brave est actuellement en traitement � Nice.

MARCH� DE NANCY

Nancy, le 4 octobre.
Samedi matin, le march� de Nancy �tait bien approvisionn� en l�gumes frais : salades, carottes, flageolets, et en fruits :
poires, noix et quelques quetsches.
Aux halles, quelques volailles, dont les prix varient suivant grosseur et qualit�.
Voici les prix extr�mes des diverses denr�es :
Boeuf, 1 fr. 80 � 3 fr. le kil. - Veau, 2 fr. 60 � 4 fr. le kil. - Mouton, 2 fr. 20 � 3 fr. le kil. - Lard frais, 2 fr. � 2 fr. 40 le kil. - Lard sec, 2 fr. 40 � 2 fr. 60 le kil. - Grillade, 2 fr. 80 � 3 fr. le kil. - Beurre, 3 fr. 20 � 4 fr. 40 le kil. - oeufs, 1 fr. 40 � 2 fr. la douzaine. - Pommes de terre, 13 fr. � 30 fr. les 100 kil.

La lutte sans merci
VERS ARRAS
Nous avan�ons vers Soissons et en Wo�vre

Paris, 5 octobre, 5 h. 19.
1� A notre aile gauche, la lutte bat son plein, dans la r�gion d'Arras, sans qu'au-curie d�cision ait encore �t� obtenue. L'action a �t� moins violente entre l� vall�e sup�rieure de l'Ancre et la Somme, et entre la Somme et l'Oise.
Nous avons progress� dans la r�gion de Soissons, o� les tranch�es ennemies ont �t� prises.
2� Sur presque tout le reste du front l'accalmie d�j� signal�e persiste.
En Wo�vre, nous avons fait quelques progr�s entre Apremont et la Meuse, et sur le Rupt-de-Mad.

MARCH� DE NANCY

Nancy, le 5 octobre.
Les arrivages ont �t�, samedi matin, tr�s abondants pour ce qui concerne le beurre, les oeufs et la volaille ; les amateurs trouveront au march� de quoi satisfaire leurs go�te et �. des conditions tr�s avantageuses.

TRIBUNAL DE COMMERCE

ancy, 5 octobre.
Lundi, � deux heures, le tribunal de commerce de Nancy a tenu son audience de rentr�e. Elle a �t� tr�s courte. Quelques affaires nouvelles ont �t� mises au r�le
puis le Tribunal a annonc� qu'il tiendrait jusqu'� nouvel ordre une seule audience par semaine, le lundi, � deux heures.

La grande Bataille
CONTINUE
Attaques repouss�es sur les Hauts-de-Meuse

Paris, 6 octobre, minuit 55.
Un communiqu� officiel, dat� du 5 octobre, 23 heures, dit :
La situation g�n�rale est stationnaire.
A l'aile gauche, l'action dure toujours.
Dans l'Argonne et les Hauts-de-Meuse, nous avons repouss� des attaques de nuit.
et de jour.

POUR LE GRAND CHOC
Des masses de cavaliers allemands arrivent

Bordeaux, 6 octobre, 15 h. 35.
A NOTRE AILE GAUCHE
Le front prend une extension de plus en plus grande.
Des masses de cavalerie allemande tr�s importantes sont signal�es aux environs de Lille, pr�c�dant d�s �l�ments ennemis qui font mouvement par la r�gion nord de la ligne de Tourcoing � Armenti�res.
Autour d'Arras et sur la rive droite de la Somme, la situation se maintient sensiblement.
Entre la Somme et l'Oise, il y a eu des alternatives d'avance et de recul.
Pr�s de Lassigny, l'ennemi a tent� une attaque importante et a �chou�.
Sur- la rive droite de l'Aisne, au nord de Soissons, nous avons avanc� l�g�rement. Avec la coop�ration tr�s efficace de l'arm�e britannique, nous avons r�alis� quelques progr�s dans la r�gion de Berry-au-Bac.
Sur le reste du front, rien � signaler.

DU DANGER
de glaner des Obus

Nancy, le 6 octobre.
Depuis qu'ont cess�, dans nos parages, les batailles vives, on trouve de nombreuses personnes qui, par les bois, les pr�s ou les champs vont glaner des souvenirs de la guerre. Certaines ramassent tout ce qui se trouve sous leur main.
Qu'elles se m�fient des obus non �clat�s.
Il en est par milliers, surtout du c�t� allemand.
D�j� divers accidents mortels se sont produits la semaine derni�re.
A Blainville, un gamin qui avait ramass� un projectile de l'artillerie prussienne, a �t� �ventr� par l'explosion ; le lendemain, au m�me endroit, c'�tait un brave homme qui, ayant charg� sur sa brouette douilles et �clats d'obus, perdait la vie de fa�on semblable, le cahot de son v�hicule ayant fait �clater un shrapnell.
Vendredi, � Mont-sur-Meurthe, un cultivateur labourait son champ. Le soc de sa charrue heurta dans le sol un obus qui �tait dans une raie. Une d�tonation effroyable retentit et la mitraille mettait en lambeaux les malheureuses b�tes et tuait net leur conducteur.
Dans les environs, on ne fauche qu'avec pr�caution ce qui reste des avoines et le regain.
Une brave femme de Dombasle nous disait, dimanche matin :
- Nous avons renonc�, mon mari et moi, � arracher les pommes de terre du petit champ que nous avons du c�t� du Remb�tant. tant nous rencontrons de bombes non �clat�es. Voyez-vous qu'avec notre croc nous en heurtions une ? Notre compte serait vite r�gl�.
Ce danger durera longtemps : il ne fera pas bon de sit�t aller dans les bois � la cueillette des champignons. Les obus vont faire maintenant concurrence aux esp�ces les plus terribles de ces cryptogames.
Aux personnes qui remarqueraient sur leur chemin de ces projectiles, nous donnons le conseil, afin d'�viter des accidents, de planter � c�t� une baguette avec un bout de papier ou de chiffon. Cela servira d'indication � l'�quipe d'artillerie qui parcourt actuellement les champs de bataille pour faire exploser tous ces obus.

SILENCE AUX BAVARDS

Nancy, le 6 octobre.
Depuis quelques jours la ville de Nancy recommence � �tre intoxiqu�e de fausses nouvelles : les unes magnifiques, les autres sinistres, celles-l� annon�ant des r�sultats extraordinaires, celles-ci des calamit�s effroyables. Aujourd'hui �� les Fran�ais bombardent Metz �, ce qui actuellement est absurde. Le lendemain �� les Allemands ont pris Verdun �, ce qui est inepte.
Ainsi les gens d�soeuvr�s s'�nervent et leur agitation risque de troubler ceux qui travaillent.
Il faut que cela cesse. La population de Nancy, qui a su montrer de si hautes qualit�s en des heures difficiles, ne voudra pas se laisser plus longtemps compromettre par quelques bavards ou quelques bavardes. Je lui demande son concours.
Il ne suffit pas de ne pas cr�er et lancer de fausses nouvelles, bonnes ou mauvaises. Je n'ai pas besoin de d�clarer que ceux ou celles qui se livreraient � ce jeu et qui pourraient �tre saisis, seraient imm�diatement d�f�r�s au conseil de guerre.
Tout bon Fran�ais a un autre devoir, moins passif, et qui est de ne pas tol�rer que qui que ce soit r�p�te devant lui ces histoires invent�es par d'autres.
J'invite tout bon citoyen - et les femmes. je le sais, ont des coeurs de citoyens - quand il entendra, o� que ce soit, une personne quelconque se faire le colporteur de ces nouvelles, � lui imposer rudement silence et, au besoin, � lui mettre la main au collet. Je ne manquerai pas pour ma part, si l'occasion se pr�sente, de �� cueillir � ces colporteurs perfides ou frivoles, mais �galement dangereux, et de les d�poser moi-m�me entre les mains du sympathique g�n�ral de la Masseli�re, commandant d'armes. Que chacun soit pr�t � agir de m�me.
Les soldats savent bien, dans la tranch�e et sous le feu, montrer une sto�que endurance qui, chaque jour, am�liore et fortifie notre cause et qui assure la victoire de la France ; durant de longs jours ils gardent le silence, eux, et ils agissent ; c'est bien le moins que les non-combattants, qui ne sont pas expos�s au danger, mettent au service de la patrie quelques semaines et, s'il le faut, quelques mois de patience vaillante et de confiance sereine.
Que ceux qui travaillent imposent donc, de gr� ou de force, silence aux bavards.
Le pr�fet de Meurthe-et-Moselle,
L. MIRMAN.

EXHUMATION

Nancy, 6 octobre.
Je, soussign�, L. Mirman, pr�fet de Meurthe-et-Moselle, Consid�rant que le maire a qualit� pour autoriser les exhumations quand il s'agit de transf�rer un cadavre d'un point � un autre d'une m�me commune, le sous-pr�fet de l'arrondissement quand le d�placement a lieu dans les limites de l'arrondissement et que, dans Les autres cas, l'autorisation doit �maner du pr�fet du d�partement ou a eu lieu le d�c�s. Consid�rant que, dans le cas o� le d�placement a lieu dans les limites d'une m�me commune, l'exhumation est une op�ration d�licate qui exige certaines garanties au point de vue de l'hygi�ne et de l'ordre publics, et qu'il appartient au pr�fet d'�dicter � cet �gard des mesures pr�ventives d'ordre g�n�ral Consid�rant qu'en particulier le cas se pr�sente aujourd'hui fr�quemment d'une famille qui demande l'autorisation d'exhumer un des siens, tu� au champ d'honneur, alors m�me que le jeune h�ros a �t� inhum� dans une tranch�e avec un certain nombre d'autres combattants ; qu'une telle exhumation serait doublement inadmissible puisque, d'une part, elle ne pourrait �tre effectu�e sans manquer de respect aux camarades moins fortun�s du soldat d�funt, puisque d'autre part il est certain que celui-ci, s'il avait pu faire conna�tre sa volont�, aurait exprim� le d�sir de n'�tre pas s�par� de ceux dont il a partag� les esp�rances, les dangers et la mort, pr�s desquels il a combattu, il est tomb�, il a souffert et auxquels il a �t� r�uni dans la m�me tombe ; Vu les conclusions adopt�es par le Conseil sup�rieur d'hygi�ne publique et consign�es dans la circulaire minist�rielle du 15 juillet 1911, conclusions d'o� il r�sulte que si l'exhumation ne peut �tre op�r�e qu'apr�s un d�lai de un ou trois ans, lorsque le d�funt a succomb� � une maladie contagieuse, elle peut l'�tre, au contraire, sans conditions de d�lai lorsqu'il s'agit d'urne personne �� ayant succomb� soit � une mort violente, soit � la suite de blessures re�ues dans un engagement militaire. �

ARR�TE :
Article 1er. - Peuvent �tre pratiqu�es sans conditions de d�lai, mais avec les pr�cautions antiseptiques d'usage, les op�rations d'exhumation et de transport des corps de militaires tomb�s au champ d'honneur.,
Article 2. - Cette exhumation ne peut �tre autoris�e que si le mort a �t� enterr� seul et dans une tombe nettement rep�r�e, de fa�on qu'il n'y ait pas lieu de le rechercher et de risquer, au cours de ces recherches, de d�placer les restes d'autres Fran�ais morts comme lui au champ d'honneur. En particulier, elle est rigoureusement interdite l� o� le militaire, que sa. famille voudrait exhumer, a �t� enterr�, dans une m�me tranch�e ou fosse commune avec ses compagnons d'armes et de gloire.
Article 3. - MM. les sous-pr�fets et MM. les maires sont charg�s de l'ex�cution du pr�sent arr�t�.
Fait � Nancy, le 4 octobre 1914.
Le Pr�fet, L. MIRMAN.

L'ACHARNEMENT DE LA BATAILLE

Paris, 7 octobre, minuit 55.
Les caract�ristiques de la situation sont les m�mes.
A l'aile gauche, au nord, l'action est de plus en plus violente.
Au centre, calm� relatif.
Un peu de terrain a �t� gagn� dans la partie nord des Hauts-de-Meuse.

LA BATAILLE IMMENSE
Nos cavaliers aux prises jusqu'au nord de Lille

Bordeaux. 7 octobre, 16 h.30.
A NOTRE AILE GAUCHE
La bataille continue toujours avec une grande violence.
Les fronts oppos�s s'�tendent jusque dans la r�gion de Lens-Labass�e, prolong�s par des masses de cavalerie qui sont aux prises jusque dans la r�gion d'Armenti�res.
Sur le front, depuis la Somme jusqu'� la Meuse, rien � signaler.
EN WO�VRE
L'ennemi a tent� un nouvel effort pour arr�ter nos progr�s, mais ses attaques ont encore �chou�.

LES LETTRES
sont des actes

Nancy, 7 octobre.
J'ai sous les yeux la lettre la plus follement tendre que j'aie jamais lue. Elle est d'un soldat qui �crit � sa femme quelques heures avant d'�tre dirig� sur la. ligne de feu.
Elle est ardente comme on ne peut plus, et confiante avec s�r�nit�.
Elle pr�voit sans trouble le destin auquel sont expos�s les combattants, et respire le courage tranquille.
Pourquoi faut-il qu'� travers les lignes on sente chez ce soldat hardi l'angoisse horrible d'�tre oubli� des siens quand pour eux et pour la Patrie il se pr�pare � vaincre ou � succomber ?
�� Ce qui me d�sesp�re, �crit-il tristement, c'est. de ne pas avoir de nouvelles de toi. Me faudra-t-il donc mourir peut-�tre avant de te lire ?
�� Oh ! amie, j'ai le coeur bien gros. Va, pourtant je ne veux pas croire que tu m'aies abandonn�. Ce serait trop cruel. �
Avec tout le monde nous avons protest� contre l'insuffisance du service des postes. Il n'est certainement pas un Fran�ais, pas une Fran�aise qui n'ait souffert atrocement de cette insuffisance.
Celles qui sont le plus tortur�es, et d'une double torture, sont certainement les femmes des combattants. Elles subissent noblement l'angoisse de savoir que leurs aim�s sont au p�ril, parce qu'elles mettent la France au-dessus de leur amour. Mais comment supporter avec la m�me noblesse la douleur des reproches imm�rit�s ?
L'arm�e a pr�par� la guerre avec une m�thode admirable, avec une intelligence lucide dont nos ennemis m�mes sont �merveill�s.
Est-il possible que les services postaux auxquels on a laiss� toute leur organisation, tout leur haut personnel, et que l'on a m�me renforc�s, soient d�sorganis�s subitement, et qu'ils ne puissent pas affermir les liens d'amour confiant de ceux que s�parent aujourd'hui les �v�nements tragiques ?
On nous parle de l'irr�gularit� des convois, de l'extr�me mobilit� des troupes. La poste ne savait donc pas qu'en temps de guerre les soldats ne resteraient point � la caserne et que les trains seraient pour la plupart affect�s � leur transport ?
Les services civils sont-ils si l�g�rement �tablis qu'apr�s deux mois de guerre ils ne retrouvent pas leur �quilibre ?
Il n'est pas possible que cela dure ainsi. Il faut, il faut de toute n�cessit� que les services postaux fonctionnent plus s�rieusement. II faut. que les m�res et les femmes ne souffrent plus de l'absence de nouvelles, qu'elles ne soient pas accus�es pour la faute d'autrui.
Tout le monde en France a du courage. Mais les femmes et les m�res savent mieux que personne verser au coeur des combattants l'ardente confiance.
Quand nos soldats savent qu'on les aime toujours, qu'on les aime encore davantage, ils vont au feu en souriant.
Ils se battent mieux, ayant dans le coeur le souvenir d'une lettre, le souvenir d'un mot qui les a �mus.
Une lettre vaut un baiser.
�� Je pars, �crit le sous-officier dont j'ai les lignes sous les yeux, comme chef de peloton. Et dans quelques jours peut-�tre, - si les balles m'�pargnent, - je serai sous-lieutenant. Allons, amie ch�rie, courage et espoir. Moi je pars avec l'espoir de revenir, apr�s avoir fait tout mon devoir. Quoi qu'il arrive, ne m'oublie jamais, ne m'oublie pas pr�s de tous, et surtout pr�s des enfants, si je ne dois plus les revoir. Dis-leur bien que ma derni�re pens�e sera pour toi et pour eux. �
Et ce soldat, qui a tant de coeur pour aimer, n'en aurait-il pas encore plus pour se battre s'il recevait de sa femme les lettres qu'elle lui �crit, et s'il pouvait lire ces lignes qui ne lui parviennent pas ?
�� Et moi aussi j'ai grand courage et espoir absolu. Moi aussi j'ai confiance que tu me reviendras. Et sache bien que jamais je ne t'oublierai, que tes enfants jamais ne t'oublieront, car tous les jours et � toute heure nous parlons de toi. D'esprit nous sommes toujours � c�t� de toi. Nous nous battons avec toi. Avec toi nous sommes, mes enfants, moi, tous les tiens. Il n'est pas une minute que ton souvenir ne soit dans notre t�te et dans notre coeur. Et le danger que tu affrontes pour la France fait notre amour plus fort, plus profond, plus ardent.
�� Je suis avec toi. Nous sommes avec toi. Avec toi nous aurons la victoire parce qu'ensemble nous la voulons. �
Il faut que de telles lettres soient lues par les combattants. Et je suis certain que toutes les lettres qui n'arrivent pas, lettres de m�res, lettres de femmes, lettres d'enfants, toutes disent cela, et le disent mieux.
Alors pourquoi ne fait-on pas l'impossible pour que leur parviennent les paroles de courage et d'espoir, les paroles d'amour ?
REN� MERCIER.

DANS LES VOSGES
L'oeUVRE DES BARBARES
Tout est ruines et deuil
A RAON - L'�TAPE

Pourquoi le douloureux �� Legs d'une Lorraine � me revenait-il en m�moire devant le spectacle effrayant que pr�sentent les ravages de Raon-l'Etape, apr�s une halte des Barbares ? Je me rappelais les vers d'Andr� Theuriet, le triste p�lerinage de la m�re au tombeau des �tres chers,
avec son jeune fils.
Viens, allons d'abord vers ce champ de seigle.
Les n�tres y sont morts, assassin�s
Par ces loups prussiens au front ceint d'un aigle.
L� dorment ton p�re et tes deux a�n�s.
Voici notre seuil d�truit. La couleuvre
Habite ces murs qu'a noircis le feu.
La Prusse a pass� par l�. Voici l'oeuvre
De ceux qu'on nommait les soldats de Dieu.
La Prusse a pass� par l�. Sa signature, est visible. Elle a paraph� en traits rouges ses crimes. Raon-l'Etape a perdu ses plus beaux quartiers dans un d�sastre qui stup�fie. Partout des cendres, des cendres o� l'on cherche vainement le vestige d'un meuble, le d�bris d'une poutre. On dirait qu'un vandalisme sans piti� s'est acharn� sur les moindres objets. Il y a de la minutie dans le ravage ; on sent une m�thode dans ce chaos, une exp�rience du crime dans l'ex�cution du mot d'ordre, dans l'accomplissement de la t�che confi�e � quelque horde de d�mons La torche incendiaire ne s'est point promen�e au hasard. Elle a d'abord supprim� les maisons des citoyens qui avaient particip� � l'organisation de soci�t�s patriotiques ou de pr�paration militaire. C'est ainsi que, d�s le lundi 24 ao�t, pendant la premi�re nuit de l'occupation, trois brasiers s'allum�rent. La quincaillerie Idoux, le magasin de cristalleries et porcelaines Gauchenot,. l'h�tel de la Belle-Vall�e, o� habite M. Henri Perrin, flamb�rent comme des bols de punch.
Avant de p�n�trer dans Raon-l'Etape, les Bavarois, qui devaient saccager odieusement la coquette cit� vosgienne, avaient naturellement signal� leur passage dans la vall�e de Celles par d'�pouvantables exc�s.
Le cur� de Luvigny tombait sous les balles d'un feu de peloton; le cur� d'Allarmont et le maire de cette localit�, l'honorable M. Charles Lecuve, subissaient le m�me sort, sans que la lumi�re soit faite sur les pr�textes invoqu�s par leurs bourreaux.
Ce fut le �� courrier � de la vall�e, M. Mathieu, qui apporta la nouvelle qu'une troupe de Bavarois avait franchi le Donon. Il avait failli tomber aux mains de l'ennemi. On avait tir� sur sa voiture. Par miracle, les balles ne l'atteignirent point. Il fut observ� plus loin par des patrouilles explorant � courte distance la lisi�re des bois ; mais, sans doute pour �viter de donner l'�veil par une fusillade qu'ils jugeaient inutile, les Allemands, le laiss�rent continuer tranquillement sa route.
Une panique s'empara de la population. Tout le monde se r�fugia dans les caves. L'entr�e de l'ennemi se signala par la d�charge incessante de leurs fusils. Personne n'osait sortir. Raon �tait plong� dans une sorte de stupeur. Plus tard, les chefs ont pr�tendu que l'absence des autorit�s, la fuite des citoyens valides, r�v�laient un manque de confiance en eux et qu'un tel outrage � la dignit� de l'arm�e germanique expliquait leur indignation, leur fureur et leurs instructions pour le pillage en r�gle de toute la ville.

Les Incendies
En m�me temps que les soldats vidaient les meilleures caves, leurs camarades s'occupaient � propager l'incendie dans la plupart des quartiers.
Dressons ce triste bilan.
Tout l'�lot de maisons, rue Jules-Ferry, comprenant l'�picerie Creus�t, le caf� Arnould, les magasins de mercerie Bodard, le d�p�t de fa�ences Mainbourg, est radicalement d�truit � l'exception d'une partie de la maison Creusat.
Dans la rue de la Gare, depuis le canal de la Plaine, tout est br�l� jusqu'� la maison de M. le docteur Wendling.
Par trois fois, les incendiaires ont attaqu� l'�glise ; ils ont enfin achev� leur sinistre besogne. Le clocher s'est l�zard� sous l'action du feu et les cloches se sont lourdement, ab�m�es dans la fournaise.
Place Jules-Ferry, le bureau de postes dresse ses murs calcin�s. Apr�s les �difices scolaires, tous les immeubles suivants ont �t� la proie des flammes.
Place de la R�publique, une seule maison a �t� sacrifi�e. Les Halles ne sont plus qu'un amas de d�combres. Toute la rue Jules-Ferry, depuis le caf� des Vosges jusqu'� l'�tude de Me Marcillat, notaire, except� la maison de M. Charrier, loueur de voitures, aligne maintenant ses fa�ades noircies. Rue Jacques-Meslez, sur le c�t� droit depuis la propri�t� de M. Grandjean et derri�re la Synagogue, l'aspect des ruines d�fie toute description L'usine Martin Dorget n'a pas �t� davantage �pargn�e.
Pass� le pont sur la Plaine, depuis l'�tablissement des bains jusqu'� l'�cole de gar�ons, il ne reste rien. De m�me; dans la rue Jules-Ferry, jusqu'� la rue du Moulin, la plus grande partie des immeubles, sur le c�t� droit, atteste la violence des ravages, au milieu desquels la maison Chenal demeure seule intacte, - ou presque.
Si nous visitons La Neuveville, on suit les traces des incendiaires chez M. Amos, dont le pavillon est br�l�, chez M. Paul Lecuve, dont l'usine a disparu, ainsi que tous les chantiers de la gare.

Le Pillage
Pendant deux longs jours et pendant deux longues nuits, la plupart des habitants rest�rent blottis dans leurs caves comme en des casemates, mourant de faim et priv�s de sommeil.
Quand ils sortirent de leurs retraites, ils assist�rent aux premiers pillages. Les maisons inhabit�es re�urent d'abord la visite des Bavarois qui appartenaient principalement � l'�tat-major de la division engag�e dans la r�gion foresti�re de la Chipotte, vers Saint-Benoit et dans la r�gion de Badonviller.
On remarquait les fantassins du fameux 99e'd'infanterie, le r�giment de Saverne si lamentablement illustr� par les Forstner, les von Reuter et consorts, puis d�s �l�ments du 60e de ligne, ainsi que des r�servistes du Grand-Duch� de Bade.
Parmi ces Bavarois figuraient quelques r�servistes de Strasbourg qui d�clar�rent que les Allemands appliquaient sans merci les lois de la guerre et qu'ils se montraient d'autant, plus f�roces, plus implacables qu'ils ne rencontraient dans les localit�s personne pour les recevoir �� officiellement �. Leur orgueil en souffrait. De rage et de d�pit, ils commettaient alors les pires exactions. Sous pr�texte qu'en abandonnant leur ville envahie les fuyards ne m�ritaient aucune consid�ration, c'est par deux villas que le d�m�nagement commen�a dans Raon-l'Etape, mais les autres ne tard�rent pas � recevoir les m�mes visiteurs.
Les propri�t�s les plus riches offrant naturellement un butin plus abondant, on s'en prit aux maisons de M. de Longeau, aux Ch�telles, aux appartements de M. Martin-Dorget, l'industriel bien connu, de M. Victor Brajon, etc.
Meubles de style, pianos, tapisseries, lingerie fine, tableaux, couvertures de soie, rideaux, biblioth�ques, collections d'amateurs, bibelots rares ou pr�cieux, pendules, bijoux, toute l'argenterie qui garnissait les buffets, toutes les dentelles et les broderies qui emplissaient les armoires, furent charg�s sur des camions et, des chars-�-bancs. Un train sp�cial �tait sous pression dans la gare pour le transport commode et direct du produit des rapines allemandes.
Il fallait en quelque sorte une �quipe de connaisseurs pour guider le choix des cambrioleurs. Qu'� cela ne tienne ! Des officiers �taient suivis de leurs dignes �pouses ; celles-ci se paraient avec fiert� des robes tailleur, essayaient les chapeaux devant les glaces, raflaient les accessoires l�gers et brillants des cabinets de toilette, jetaient leur d�volu sur des objets qui flattaient leur coquetterie.
Comme les d�m�nageurs ne pouvaient tout emporter, ils laiss�rent � leurs compagnons le soin d'achever leur oeuvre de d�vastation. A coups de ciseaux et de canifs, les �toffes furent lac�r�es, r�duites en lambeaux, les vaisselles vol�rent en �clats ; des tableaux furent crev�s ; les appareils d'�clairage jonch�rent le plancher, p�le-m�le avec le contenu �pars des tiroirs vid�s minutieusement.
Une sorte de sadisme, de monomanie ignoble les poussait vers l'ordure, la sanie, l'abjection. Ils souill�rent les v�tements des enfants. Ils mirent le couvert chez l'instituteur d'Hymbeaumont, comme s'ils attendaient des h�tes de marque et, dans chaque assiette, en guise de dessert, ils ont...
Ah ! que l'Allemagne est donc spirituelle !
Spirituelle et experte dans l'appr�ciation des vins. Les caves de la maison Creusat ont �t� consciencieusement pill�es. Trois mille flacons de vieux bourgogne arros�rent les banquets de la horde. Les barriques furent mises en bouteilles pour les futures libations ; les �piceries ne poss�daient plus une bo�te de conserves quand, le 19 septembre, l'�vacuation de Raon-l'Etape et la retraite vers la fronti�re commenc�rent.
Un ordre de l'�tat-major avait invit� tous les habitants, sous la menace des peines les plus s�v�res en cas d'infraction, � apporter toutes leurs provisions de p�trole ; mais les Allemands se content�rent de garder les bidons complets de cinq litres.
En gens pr�voyants, ils emportaient dans leurs automobiles assez de p�trole pour d�truire plus loin d'autres villages.
Pendant les trois longues semaines de l'occupation, les �� victoires � de l'arm�e allemande, d�frayaient chaque jour les conversations. Von Kluck et le kronprinz ne faisaient de nos troupes qu'une demi-bouch�e ; une moyenne de quarante mille prisonniers grossissait quotidiennement le contingent de pantalons rouges exp�di�s sur les forteresses pom�raniennes !
Certain jour qu'ils avaient cantonn� dans les anfractuosit�s des carri�res de trapp, exploit�es par M. Ramu, ils s'�cri�rent, triomphants :
�� Nous occupons la citadelle de Raon ! �.
En somme, la destruction des principaux quartiers de Raon-l'Etape ne s'est accompagn�e d'aucune ex�cution. Il convient de proclamer qu'en cette circonstance M. le docteur Raoul a montr� de rares qualit�s. Son sang-froid, sa circonspection, les relations qu'il a r�ussi � maintenir entre l'�tat-major et lui-m�me ont certainement pr�serv� la ville d'irr�parables malheurs.
C'est ainsi que des chasseurs s'�tant cach�s dans la grange d'une maison foresti�re, leur d�couverte faillit provoquer de sanglantes �� repr�sailles �. Le propri�taire finit par convaincre les Allemands qu'il ignorait la pr�sence, chez lui, de ces soldats, profond�ment enfouis pendant quatre jours dans la paille.
A La Neuveville, le maire, M. Bourgeois resta � son poste d'honneur. M. Paul Lecuve, d�sign� comme un des citoyens coupables d'avoir tenu sur le kaiser des propos insolents, fut sauv� du poteau d'ex�cution par une admirable circonspection.
Quand la patrouille de quarante Bavarois p�n�tra chez lui, M. Paul Lecuve, dont le fr�re avait �t� fusill� � la mairie d'Allarmont, attendait dans son bureau ceux qui devaient lui infliger le ch�timent supr�me :
- Est-il vrai, lui demanda l'officier, que vous ayez outrag� �� notre � empereur ?
- Messieurs, r�pondit M. Paul Lecuve, tr�s calme, je ne vous dirai point ce que les Fran�ais et moi pensons de votre souverain. Vous �tes ici les ma�tres. Agissez donc en cons�quence. Ma maison, ma cave, tout vous appartient, en vertu des droits du plus fort. En ce qui me concerne, je suis pr�t au sacrifice de mes biens, de ma libert�, de ma vie. Faites ce qui vous plaira. �
Les Allemands s'install�rent en ma�tres ; ils vid�rent la cave, mais ils s'inclin�rent devant la bravoure de M. Paul Lecuve.

AUX ENVIRONS
On nous avait annonc� que dans la r�gion vosgienne, bon nombre de villages avaient eu beaucoup � souffrir. L'�motion publique a exag�r�, au moins pour Saint-Blaise, o� une seule maison est br�l�e, pour Etival, o� deux immeubles appartenant � M. Huin, hameau de Vivier, subirent le m�me sort, et pour Clairfontaine, o� trois maisons, avec un d�p�t d'�picerie coop�rative, ne sont plus que ruines.
Azerailles a �t� enti�rement respect� ; Bertrichamp aussi. Par contre, les Allemands, en maint endroit, ont r�quisitionn� la literie pour rendre plus confortables les tranch�es o� ils s'abritaient.
On a d�j� relat� les incidents qui signal�rent l'occupation de Saint-Di�.
Mais le bombardement, l'incendie, malgr� les promesses allemandes, devaient raser, h�las ! une partie de la rue de la Bolle, o� cinquante maisons ont presque enti�rement disparu. Une p�tisserie d�molie dans la rue Gambetta ; une boutique de tailleur, en face, �ventr�e par un obus ; l'h�tel du Globe, atteint par un projectile ; quatre ou cinq magasins litt�ralement pill�s par les vandales, tels sont les t�moignages qui prouvent la sinc�rit� des garanties offertes par les officiers.
Plus loin, le village de Saulcy-sur-Meurthe ne montre, au bord de la route et au pied des verdoyantes collines, que les vestiges d'un v�ritable cataclysme.
La Prusse a pass� par l�.
ACHILLE LI�GEOIS.

LES ALLEMANDS
repouss�s sur les deux ailes
Nous avan�ons aussi sur la Somme et au Centre

Paris, 8 octobre, minuit 30.
Sauf sur les deux ailes, o� les attaques allemandes ont �t� repouss�es, le calme a �t� � peu pr�s complet sur le front.
A l'aile gauche, la cavalerie allemande a �t� maintenue au nord de Lille, o� elle avait �t� refoul�e.
Entre Chaulnes et Roye, le terrain pr�c�demment c�d� a �t� repris.
Au centre, nous avons avanc� sur certains points.
A l'aile droite, rien � signaler.

TOUJOURS PLUS AVANT
De la Somme � la mer du lord la lutte s'�tend, heureuse pour nous, ainsi que sur les Hauts-de-Meuse

Bordeaux, 8 octobre, 15 h. 45.
A NOTRE AILE GAUCHE
Dans la r�gion du Nord, l'ennemi n'a progress� nulle part.
Il a recul� sur certains points, particuli�rement au nord d'Arras, o� l'action se d�roule dans de bonnes conditions pour nous.
Les op�rations des deux cavaleries se d�veloppent maintenant presque jusqu'� la mer du Nord.
Entre la Somme et l'Oise, dans la r�gion de Roye, l'ennemi est toujours en force, mais nous avons repris la majeure partie des positions que nous avions d� c�der.
Au nord de l'Aisne, la densit� des troupes allemandes semble diminuer.

AU CENTRE
Entre Reims et la Meuse, rien � signaler.
Sur les Hauts-de-Meuse, entre Verdun et Saint-Mihiel, l'ennemi a recul� au nord d'Hattonch�tel.
Il tient toujours Saint-Mihiel et quelques positions, sur la rive droite de la Meuse.

EN WO�VRE
Les violentes attaques tent�es par l'ennemi en Wo�vre, � l'ouest d'Apremont, ont �chou�.

A NOTRE AILE DROITE
En Lorraine et en Vosges, pas de modifications.

NOS CONCITOYENS AU FEU

Nancy, 8 octobre.
Un de nos jeunes concitoyens, M. Alexis Bonnaud, coutelier, rue Saint-Dizier, 62, caporal r�serviste dans un r�giment de Nancy, vient de recevoir la m�daille militaire pour sa belle conduite sur le champ de bataille de Vitrimont.
Le caporal Bonnaud, voyant que ses chefs �taient tous bless�s, put rallier sa section et la maintenir sur la ligne, de feu.
Bless� � la t�te et au pied, le caporal Bonnaud continua � encourager ses camarades jusqu'au moment o� ses forces l'abandonn�rent.
Sur le champ de bataille, son capitaine lui adressa des compliments pour la bravoure et le sang-froid qu'il avait d�ploy�s.
M. Alexis Bonnaud a �t� �vacu� � M�con. C'est � l'ambulance o� il est soign� que la m�daille des braves lui a �t� remise.
Il n'est actuellement gu�ri et n'a qu'un d�sir, celui de rejoindre ses trois autres fr�res, qui se battent aussi pour la Patrie. L'a�n� et son �� benjamin � plus jeune de 12 ans, servent dans la m�me compagnie.

UNE FAMILLE ITALIENNE
fusill�e � Lun�ville par les Allemands

Nancy, 8, octobre.
La municipalit� de Lugano (Italie) est inform�e que la famille tessinoise Bernasconi a �t� fusill�e, sans motif, par les Allemands, � Lun�ville, lors de l'invasion.

AU TABLEAU D'HONNEUR

Nancy, 8 octobre.
Capitaine Martin-Sen�, du 2e bataillon de chasseurs (Lun�ville), atteint successivement, au cours d'un combat, le 11 ao�t 1914, de trois blessures dont la derni�re mortelle, est rest� sous un feu violent d'artillerie pour commander sa compagnie, a exhort� jusqu'au dernier moment ses chasseurs � faire leur devoir et, avant de mourir, leur a indiqu� le point de ravitaillement du bataillon. (Ordre du 16 ao�t 1914.) Le lieutenant Jean Husson, du 15e r�giment de chasseurs, vient d'�tre inscrit au tableau de la L�gion d'honneur au titre de chevalier.
�� A fait preuve, lit-on � l'Officiel, de beaucoup d'�nergie au cours d'une reconnaissance. dans laquelle il a �t� bless� gri�vement. �

MORT AU CHAMP D'HONNEUR

Nancy, 8 octobre.
Nous apprenons qu'un de nos jeunes concitoyens, M. Maurice Blosse, r�cemment frapp� au champ d'honneur, vient de succomber des suites de ses blessures � l'h�pital d'Amiens.
M. Maurice Blosse, qui faisait partie de la classe 1914, avait obtenu un sursis pour compl�ter son �ducation commerciale en Angleterre, o� il se trouvait au moment de la mobilisation.
Notons � son �loge qu'il se h�ta de rejoindre le d�p�t de son r�giment et qu'� peine exerc� il demanda � aller sur la ligne de feu.
Toutes nos condol�ances � Mme sa m�re, � sa soeur et � son beau-fr�re, Mme et M.
Eug�ne Corbin.

TU� A L'ENNEMI

Nancy, 8 octobre.
Encore un brave mort au champ d'honneur.
Robert P�cheur, juge suppl�ant au tribunal de Montm�dy, est tomb� le 17 septembre, aux environs de Sainte-Menehould. Il avait d�j� pris part � de nombreux combats et, quelques jours avant, il avait �t� fait sous-lieutenant sur le champ de bataille. Robert P�cheur, fils du procureur de la R�publique de Sedan, petit-fils de l'ancien conseiller � la Cour de Nancy, neveu du g�n�ral Poline, �tait tr�s connu � Nancy, o� il avait longtemps �t� attach� au parquet.
La sympathie et l'amiti� allaient d'instinct � ce grand gar�on plein de vie, d'intelligence et d'entrain. Aujourd'hui � sa famille et � ses amis, il ne reste qu'une consolation : Robert est mort en brave pour son pays.
Depuis le d�but de cette terrible guerre, la magistrature lorraine et le barreau ont �t� bien cruellement �prouv�s.
A P�cheur, aux magistrats d�j� frapp�s s'applique la belle et forte pens�e qu'exprimait � l'audience de rentr�e le procureur g�n�ral pr�s la Cour d'appel de Paris :
�� Qu'il me soit permis d'�voquer le souvenir de ceux dont la carri�re, destin�e pr�cis�ment � l'�tude et au culte du droit, a �t� pr�matur�ment couronn�e par la plus belle des morts, la mort pour le triomphe supr�me du droit. �

UN BOULET OPPORTUN

Nancy, 8 octobre.
Ceci se passait, un de ces derniers jours, dans une commune de Meurthe-et-Moselle, aux confins de la Meuse, sur le Rupt-de-Mad.
Le village �tait occup� par les Allemands, et, comme d'habitude, les Barbares s'y livraient � mille vexations odieuses � l'�gard de la population, et notamment des femmes.
Le brave cur� s'avisa de manifester hautement son indignation. Un officier r�pondit � ses protestations par des injures et des menaces.
- Et puis, conclut ce dernier � bout d'arguments, je vais vous faire fusiller comme espion !
- Comme espion, r�pliqua le cur�, surpris.
- Oui, comme espion. Il y a de la lumi�re dans votre �glise, et vous faites des signaux aux Fran�ais.
Le cur� croyait sa derni�re heure venue, lorsque un obus �clata soudain � quelques pas, le renversant d'un c�t� et l'Allemand de l'autre.
Le cur� se releva presque aussit�t. Il �tait indemne. Mais, pr�s de lui, gisait l'officier allemand presque coup� en deux.
- Je n'eus que le temps de lui donner l'absolution ! a d�clar�, hier, le cur�, qui se trouvait � Nancy.
Et, comme on s'�tonnait et qu'on �tait d'avis m�me qu'il aurait pu lui donner tout autre chose, le cur� r�pondit :
- Que voulez-vous ? Nous avons tellement l'habitude !

CAMP RETRANCH� DE TOUL
LOCALITES INTERDITES
pour lesquelles il ne sera d�livr� aucun sauf-conduit.

Nancy, 8 octobre.
Andilly, Bicqueley, Bl�nod-les-Toul (sauf la gare), Boucq, Bouvron, Bruley, Charmes-la-C�te (sauf la gare), Chaudeney (sauf la gare), Choloy (sauf la gare), Dommartin-les-Toul, Domgermain (sauf la gare), Ecrouves, Foug (sauf la gare), Fontenoy (sauf la gare), Francheville, Gondreville, Grandm�nil. Gye, Jaillon, Lagney, Laneuveville-derri�re-Foug, Lucey, M�nil-la-Tour, Mont-le-Vignoble, Moutrot, Pagney-derri�re-Barine, Pierre-la-Treiche (sauf la gare), Toul (sauf la gare), Trondes, Velaine-en-Haye, Villey-le-Sec (sauf la gare), Villey-Saint-Etienne.

RANCUNE DE SAUVAGES
Pour punir M. Poincar� de sa visite aux arm�es ils d�truisent "Le Clos"

Bordeaux, 8 octobre.
Les Allemands ont bombard� de nouveau Sampigny, hier.
Ils ont vis� presque exclusivement la propri�t� de M. Poincar�, qu'ils ont d�truite en lan�ant sur elle 48 obus.

BRAVES ENTRE LES BRAVES
Notre 20e Corps
A L'ORDRE DE L'ARM�E

Paris, 9 octobre, 1 h. 22.
BORDEAUX. - Le 20e corps d'arm�e est cit� � l'ordre de l'arm�e, pour avoir, depuis le commencement de la campagne, montr� les plus belles qualit�s manoeuvri�res, une endurance, une vigueur, un entrain que rien n'a pu abattre.
Sur toutes les parties du front o� il a �t� employ�, il a toujours progress� et toujours r�sist� aux plus furieuses attaques de l'ennemi.

Le Bombardement
DE SAINT-DI�

Nous recevons les lettres suivantes :
Saint-Di�-des-Vosges, 9 octobre 1914.
Monsieur Burlin, 1er adjoint, et Monsieur Colin, 2e adjoint au maire de Saint-Di�, � Monsieur le Directeur de l'�� Est r�publicain �, � Nancy.
Les Allemands ont bombard� Saint-Di� le 27 ao�t, de 6 heures du matin � 3 heures de l'apr�s-midi. La fusillade en ville a �t� si vive que personne ne pouvait se risquer, sans danger, dans les rues ; les quelques rares D�odatiens qui s'y sont aventur�s ont essay� d'enrayer les progr�s des incendies allum�s par les bombes allemandes, notamment celui qui prenait une grande extension dans la maison Andrez-Brajon, rue des Fr�res-Simon.
C'est seulement vers 3 heures et demie que le g�n�ral allemand, qui avait �tabli son quartier � Sainte-Marguerite (4 kilom�tres de Saint-Di�), envoya comme parlementaire un habitant de cette commune porteur d'une note adress�e � la municipalit�, indiquant que les habitants de Saint-Di� ne seraient pas violent�s s'ils ne se livraient � aucun acte hostile envers les troupes allemandes.
Cette note fut remise au d�vou� M. Kl�ber, directeur des travaux de la ville, dont le logement est contigu � l'H�tel de Ville ; ce dernier donna l'ordre de hisser le drapeau blanc sur la mairie et fit conna�tre au g�n�ral allemand que la municipalit� adressait aux habitants un appel au calme. C'est � ce moment seulement que les derniers soldats fran�ais, qui avaient �lev� des barricades dans les rues, se retiraient dans la direction de Bruy�res.
Le premier adjoint au maire, M. Burlin, arriva aussit�t � la mairie, o� M. Collin le rejoignit quelques minutes apr�s.
Avant l'arriv�e de ce dernier, M. Burlin avait d�j� parlement� avec le commandant de la premi�re compagnie allemande d�bouchant par le grand pont, rue Thiers.
Quant � l'indemnit� de 39.000 francs impos�e � Saint-Di� le lendemain de l'occupation par le g�n�ral allemand, elle a �t� vers�e deux jours apr�s � la mairie, entre les mains de deux officiers allemands, par M. Burlin, assist� de M. Lavalle, receveur municipal ; de M. G�rard, secr�taire de la mairie, et en pr�sence de M. Fran�ois, ancien adjoint, pr�sident de la Soci�t� de la Croix-Rouge ; celui-ci, qui s'�tait rendu � la mairie pour demander des renseignements concernant Les bless�s, fut requis comme t�moin du versement.
M. Colin n�gociait, de son c�t�, la restitution, au gouvernement allemand, des otages, femmes et enfants, arr�t�s par l'autorit� militaire, au cours des op�rations de nos troupes dans la vall�e de la Bruche.
Il avait �t� charg� de cette, mission par le g�n�ral allemand, pendant que M. Burlin devait administrer la ville.
Voil�, exactement mis au point, les faits.
Veuillez agr�er, Monsieur le Directeur, l'assurance de notre parfaite consid�ration.
Louis BURLIN, Ernest COLIN.

Saint-Di�-des-Vosges, 10 octobre 1914.
Monsieur le R�dacteur de l'�� Est r�publicain �, Nancy.
Je tiens � vous faire conna�tre la mission qui me fut impos�e par Le g�n�ral allemand, le 28 ao�t, � 10 heures du matin, devant l'H�tel de Ville. J'esp�re plus tard en faire un r�cit d�taill�, gr�ce aux documents officiels que j'ai en ma possession.
L'ordre qui me fut donn� �tait de partir imm�diatement afin de me mettre en relations et n�gocier avec le gouvernement la remise des femmes et enfants arr�t�s dans la vall�e de la Bruche pendant l'occupation de nos troupes dans cette r�gion.
Si je ne r�ussissais pas, au moins autant de femmes et d'enfants de notre ville seraient arr�t�s, en commen�ant par les membres de ma famille, nos maisons incendi�es, et s'ils mettaient la main sur moi, je serais fusill�.
Le 9 septembre, tous les otages �taient rendus, la r�ponse du gouvernement fran�ais, le 29 ao�t, avait �t� favorable, � la condition que notre ville n'aurait en rien � souffrir pendant l'occupation et que la population serait m�nag�e.
Le 4 septembre, tous ces suspects n'ayant pu encore leur �tre rendus, ma femme fut arr�t�e et emmen�e comme otage jusqu'� mon retour.
Elle resta en prison � Strasbourg jusqu'au 11 et apr�s put se rendre � Ribeauvill� en libert� provisoire ; tous les matins elle devait aller � la kreisdirection faire constater sa pr�sence. Ce n'est que le 24 que, gr�ce � mes d�marches, je pus la faire rentrer � Saint-Di� par la Suisse.
Recevez, Monsieur le R�dacteur, l'assurance de ma parfaite consid�ration.
E. COLIN.

D'autre part nous avons communication d'une lettre qui met au point certains d�tails :
Saint-Di�, le 2 octobre.
�� Le 29 septembre, � 7 heures et demie du matin, l'ennemi a commenc� � nous bombarder, et nous a envoy� une trentaine d'obus jusqu'� 11 heures. D�g�ts importants � la maison Verdenal et Hem, incendie du grand magasin de tissage Alph. L�vy, - pertes d'environ 350.0000 fr. - incendie des maisons Masson et Kuehn, c�t� rue de Foucharupt.
A midi, nous avons d�jeun� � la salle � manger, et nous pensions �tre tranquilles quand, � 4 heures et quart, pour la seconde fois, le bombardement recommen�ait et durait une demi-heure. D�g�ts � la maison Landau, rue d'Alsace, et une autre maison rue de la Prairie.
A 10 heures, le bombardement recommen�ait pour la troisi�me fois, et 20 � 25 obus sont tomb�s sur notre quartier, - un au milieu de la pelouse du jardin, un autre dans le trottoir de M. Renard n'a pas �clat�.
Le matin du 4 septembre nous avons appris que la maison du concierge de la filature J.-M. de Perichamp avait �t� incendi�e, et sa jeune fille, 22 ans, tu�e par un obus.
Ce m�me jour, � 3 heures 5 de l'apr�s-midi, quatri�me bombardement. Une soixantaine d'obus. La maison qui est en face du passage � niveau de Foucharupt incendi�e, la gare assez d�t�rior�e. Le bombardement a cess� vers 5 heures et demie du soir.
A 9 heures et demie, le lendemain, cinqui�me bombardement qui a dur� une demi-heure : 8 obus sont tomb�s sur le quartier. Un a d�moli le mur de cl�ture de la propri�t� Louis Feltz, dont les moellons ont �t� lanc�s par-dessus le tissage L�vy et sont tomb�s sur des m�tiers. Un autre a fait un trou �norme dans le trottoir devant la porte de la maison Gerspach, et enlev� les volets retomb�s dans le trou. Vitres bris�es.
Nous pensons que le plus gros est pass� maintenant, et nous attendons les bonnes nouvelles qu'on nous annonce pour aujourd'hui.

DANS LES VOSGES
Les Bombardements de Saint-Di� :
USINES D�TRUITES
Combats dans les vall�es

Nancy, 9 octobre.
De nouveau, le canon allemand a parl�. Pendant les trois journ�es du 30 septembre, des 1er et 2 octobre, les obus se sont abattus sur la coquette cit�, continuant l'oeuvre de d�vastation que l'ennemi avait se bien commenc�e dans les quartiers de la Bolle et des Tiges.
On se croyait bien d�barrass�s pour toujours de ces h�tes, � qui la destruction et le massacre procurent une volupt� l�chement assouvie chez les malheureuses populations de la fronti�re.
Malgr� les dispositions prises pour repousser l'�ventualit� de nouvelles attaques, nos batteries, d'un tir plus court que celles de l'adversaire, ne pouvaient toutefois emp�cher les tentatives de bombardement par lesquelles l'ennemi voudrait prouver qu'il se tenait dans notre voisinage.
Pendant trois jours, la pluie d'obus s'est abattue chaque matin avec une m�thode, une r�gularit� parfaites, entre 9 heures et 11 heures, avec une reprise dans le courant de l'apr�s-midi.
Il semble que l'objectif ait �t� un d�p�t d'essence et de munitions dont l'espionnage avait r�v�l� l'adresse exacte. Celui qu'on soup�onne d'avoir fourni � l'ennemi ces indications a comparu devant une cour martiale et ex�cut� � Saulcy-sur-Meurthe. Deux personnes, sur qui pesaient des pr�somptions de complicit�, ont pu �tablir leur innocence et elles ont �t� relax�es.
La gare a peu souffert. Les trains de ravitaillement ont �t� sans incident �vacu�s, ainsi que ceux qui se trouvaient � la gare de Raon-l'Etape. Seuls les b�timents ont �t� la proie des flammes ; de m�me aux gares de Saulcy et de Saint-L�onard.
Les d�g�ts laissent intacts les services de la voie. Voyageurs et marchandises circulent librement. Le personnel de la Compagnie de l'Est, anim� d'un z�le et d'un patriotisme auxquels il faut rendre hommage, se tient pr�t d'ailleurs � remettre en �tat ce que l'artillerie r�ussirait � d�t�riorer.
La ville de Saint-Di� a perdu la plupart de ses filatures et de ses tissages. Les deux usines Feltz sont d�truites ; le tissage L�vy n'est plus qu'un monceau de d�combres ; l'usine Camille G�rard a disparu dans la tourmente, ainsi que celle de M. Trimbach, la fabrique de stores Pierron-D�rivaux et presque tous les b�timents industriels qui donnaient � la ville tant d'animation et lui assuraient une si belle prosp�rit�.
Quelques obus sont tomb�s �� et l�, �ventrant les immeubles, crevant les toitures, ab�mant l'ancienne tannerie Chr�tien, allumant un brasier dans les magasins Andrez-Brajon o� les pertes d�passent 100.000 francs.
La nouvelle caserne d'artillerie a �t� endommag�e � peine. La maison Wautrin, pr�s du passage � niveau de S�richamp, haute de trois �tages, est maintenant, ras�e.
Parmi les victimes, on cite Mlle Sutter, concierge de l'usine Marchal, atteinte mortellement ; un soldat soulev� de terre et jet� sur un toit, rue d'Alsace, o� son corps fut litt�ralement d�chiquet� par l'explosion d'un shrapnell.
Le deuxi�me jour du bombardement, l'appariteur municipal annon�ait � son de caisse que, tout danger ayant disparu, la population devait recouvrer son calme et pr�ter une oreille attentive aux conseils de ses �lus.
Le brave crieur n'avait pas encore achev� sa lecture, quand un boulet s'abattit � deux cents m�tres de l'attroupement form� autour de lui par les curieux rassur�s et confiants. Inutile de dire que tout le monde s'enfuit au plus vite vers les caves et que, rengainant ses baguettes et son tambour, l'appariteur, ce jour-l�, ne poursuivit pas sa tourn�e plus avant !
Les adjoints, MM. Colin et Burlin, se chargent de l'administration municipale. Ils s'acquittent de leurs d�licates fonctions avec la clairvoyance, la d�cision, la fermet� qui les d�signaient pour un tel poste d'honneur - malgr� la p�nurie de personnel et l'importance, le nombre des affaires qu'il s'agit d'�tudier et de solutionner � la satisfaction g�n�rale.
L'occupation allemande, � Saint-Di� et dans les environs, a �t� marqu�e par de furieux combats � La Bourgonce, � La Salle, � Nompatelize, dont la date du 6 octobre ram�ne aujourd'hui l'anniversaire : les chasseurs alpins se sont montr�s les dignes successeurs des francs-tireurs dont les derni�res cartouches s'�puis�rent, en 1870, dans une des plus h�ro�ques r�sistances que l'Allemagne ait rencontr�es dans les Vosges.
H�las ! ces jolis villages, aimablement pelotonn�s autour de leur clocher, �gayant les bois par la tache claire de leurs fa�ades, berc�s par le charme frais des cascades ou par le bruit monotone des scieries, ces centres d'excursions o� se donnaient rendez-vous les caravanes de touristes, tous ces pays aux noms tant�t rudes, tant�t po�tiques, ont connu l'�pouvante et l'horreur de la d�vastation.
Le hameau de Sainte-Marguerite n'a plus qu'une dizaine de maisons avec son �glise et son presbyt�re ; une partie de Rougiville et de Taintrux a �t� d�molie par un duel d'artillerie � l'issue duquel l'ennemi fut oblig� d'�vacuer le Haut-Jacques, non sans �prouver des pertes cruelles.
Chaque jour, un millier de cadavres jonchaient la vall�e que les Allemands ont baptis�e le �� Trou de la Mort �, cette vall�e o� le matin suspend ses �charpes l�g�res, o� il fait si bon courir dans la ros�e � la cueillette des myrtilles !
Les D�odatiens ne comprennent pas le recul si pr�cipit� des Bavarois ; ils ont fil� prestement, sans qu'en apparence aucun danger imminent les condamn�t � la retraite. Mais les D�odatiens se rendent parfaitement compte, � cette heure, que la pr�sence chez eux d'un corps d'�lite les met � l'abri d'une nouvelle agression. Les b�rets alpins sont l�.
Nous occupons d'excellentes positions.
Par intervalles, le canon gronde dans la direction de Provench�res et du col de Saales ; mais les r�percussions des �chos ne permettent pas de pr�ciser l'emplacement des batteries ennemies.
L'action de nos troupes, si pleines d'entrain, ne tardera pas � �carter d�finitivement l'adversaire dont les bombardements de la semaine derni�re semblent nous marquer les adieux.
ACHILLE LI�GEOIS.

LES MORTS GLORIEUSES

Nancy, 9 octobre.
On vient de c�l�brer � Paris, � Notre-Dame-de-Lorette, les obs�ques de deux soldats bless�s et d�c�d�s � l'h�pital de l'Institut.
Au cimeti�re de Pantin, M. Fr�d�ric Masson, de l'Acad�mie fran�aise, a prononc� les paroles d'adieu. Nous en extrayons ce passage :
�� Ils sont tomb�s tous deux face � l'ennemi, frapp�s en pleine poitrine. L'un, un Normand, Eug�ne-Louis Boulet, soldat au 21e d'infanterie (Langres), du canton de Royen-Nord ; l'autre, Hardouin, du 79e (Nancy) ; nous ne savons ni ses pr�noms, ni son �ge, ni le pays o� il est n�. Seulement, lorsqu'il est arriv� � l'h�pital, il a murmur� qu'on pr�v�nt son p�re � Ivoy-le-Marron, en Touraine ; et l'autre aussi avait demand� qu'on avert�t sa femme � Sainte-Catherine, pr�s Auffray, en Seine-Inf�rieure. �

Prisonnier chinois � Lun�ville

Nancy, 9 octobre.
Lun�ville a �t� envahi par les Allemands le samedi 22 ao�t : trois semaines apr�s, les Fran�ais chassaient les envahisseurs. Ceux-ci, au nombre de leurs prisonniers, emmen�rent un jeune Chinois, Paul Liang, �g� de 15 ans, �l�ve de l'Institution Saint-Pierre-Fourier, de Lun�ville le consid�rant comme espion japonais.
Le sup�rieur de l'Institution a fait un rapport que le pr�fet de Meurthe-et-Moselle a d� envoyer � la l�gation chinoise.
Paul Liang �tait un brillant �l�ve, tr�s aim� de ses condisciples ; ses fr�res a�n�s, qui ont fait leur �ducation dans le m�me coll�ge, occupent en Chine des situations honorables. Paul est n� � Tche-Fou et porte fid�lement la queue traditionnelle des Chinois.

LE VIEUX ZOUAVE ALSACIEN:

Nancy, 9 octobre.
Mardi soir est pass� en gare de Montlu�on, venant d'Angoul�me, o� il �tait hospitalis�, un petit d�tachement de bless�s appartenant au 2e r�giment de zouaves.
Parmi ces jeunes gens se trouvait un vieil Alsacien de 68 ans, Joseph Frendenreith, qui, apr�s avoir �t� bless� lors de la guerre de 1870, s'�tait cependant engag� le 2 ao�t dernier.
Pendant cinquante jours, le vieillard a march� gaiement, avec les jeunes, a �t� fait prisonnier en Belgique, s'est �vad�, a retrouv� le 2e zouaves. Le 17 septembre dernier, � Craonne, il a �t� bless� d'une balle � la cuisse.
Le vieux brave, toujours plein d'entrain, a re�u les plus vives marques de sympathie de la population.

A ROG�VILLE

Nancy, 9 octobre.
La petite commune de Rog�ville, canton de Dom�vre-en-Haye, qui compte 166 habitants, a �t� presque enti�rement d�truite par les Allemands, qui l'ont bombard�e pendant plus d'une heure.
De l'�glise, il ne reste que des ruines, les murs �tant tomb�s sous les coups des projectiles.
Des soixante-dix maisons qui composaient le village, c'est � peine s'il en reste six debout. Toutes les autres ont �t� an�anties.
Les Allemands se sont principalement acharn�s sur une grande ferme, situ�e � l'entr�e du village. Elle a �t� enti�rement ras�e par les projectiles ennemis.
Les habitants sont all�s chercher un refuge dans les communes de la Meuse.

LA LUTTE
de la Somme � la Meuse

Bordeaux, 9 octobre, 16 h. 10.
La situation g�n�rale n'a pas subi de modification.
A NOTRE AILE GAUCHE
Les deux cavaleries op�rent toujours au nord de Lille et de la Bass�e, et la bataille se poursuit sur la ligne jalonn�e par les r�gions de Lens, Arras, Bray-sur-Somme, Chaulnes, Roye et Lassigny.
AU CENTRE
De l'Oise � la Meuse, on ne signale que des actions de d�tail.
A NOTRE AILE DROITE
En Wo�vre il y a eu lutte d'artillerie sur tout le front.
En Lorraine, dans les Vosges et en Alsace, pas de changement.

LA BATAILLE DE ROYE

Bordeaux, 10 octobre, 7 heures.
Rien de nouveau � signaler, sinon une vive action dans la r�gion de Roye (au sud-est du d�partement de la Somme) o�, depuis deux jours, nous avons fait 1.600 prisonniers.

La Lutte gigantesque
NOUS RESTE FAVORABLE
Progr�s surtout au nord de l'Oise et vers Saint-Mihiel

Bordeaux, 10 octobre, 15 h. 30.
L'action continue dans des conditions satisfaisantes.
Tout notre front de combat a �t� maintenu, malgr� de violentes attaques de l'ennemi sur plusieurs points.
A NOTRE AILE GAUCHE
Dans la r�gion comprise entre Labass�e, Armenti�res et Cassel, les combats engag�s entre les cavaleries oppos�es ont �t� assez confus, en raison de la nature du terrain.
Au nord de l'Oise, nos troupes ont marqu� de r�els avantages sur plusieurs parties de leurs zones d'action. Dans la r�gion de Saint-Mihiel, nous avons fait des progr�s sensibles.

Paris, 11 octobre, minuit 35.
Des renseignements arriv�s dans la soir�e du grand quartier g�n�ral signalent des contacts entre les deux cavaleries, au sud-ouest de Lille ; une violente action au sud-est et au nord d'Arras, et de tr�s vives attaques de l'ennemi sur les Hauts-de-Meuse.

A BLAINVILLE
Un Obus dans un lit

Nancy, 10 octobre.
C'est un nomm� Hugg qui a �t� tu� l'autre jour � Blainville par un obus qu'il transportait dans sa brouette et qui explosa soudainement.
A Blainville et aux environs, il y a nombre de ces engins dangereux. On en a rep�r� d�j� beaucoup qu'on a marqu�s d'�tiquettes, car il en est sur le bord des chemins.
On a d�fendu aux enfants de vagabonder dans les champs. Et l'on a bien fait.
Au cours du duel d'artillerie, le 23 ao�t et les jours suivants, entre les canons fran�ais et les batteries allemandes, quelques obus lanc�s par celles-ci sont tomb�s sur les nouvelles cit�s que la compagnie de l'Est construisait pour ses employ�s, en raison de l'extension que prend la gare de Blainville.
Un des obus a perc� de part en part une maison ; deux autres sont tomb�s dans une maison au-dessus ; un a �clat� ; l'autre, apr�s avoir travers� la fen�tre, portes et toutes sortes de cloisons, est venu s'affaler, � la chambre 38, dans un petit lit � ressort en fer o� �taient entass�es des piles de draps.
Il est l�, non �clat�, au milieu des pl�tras, semblant dormir comme un enfant, ce terrible projectile � la m�linite.
La question se pose : comment s'en d�barrasser ? Si on le fait exploser l� o� il est, la maison tout enti�re sautera ; si on l'enl�ve, est-ce qu'il ne tuera pas le sapeur qui sera charg� de cette mission p�rilleuse tout en saccageant encore la maison ?
Le probl�me est difficile � r�soudre.

LES COMMUNES �PROUV�ES
VISITE de M. MINIER
sous-pr�fet de Lun�ville

Nancy, 10 octobre.
M. Minier, sous-pr�fet, accompagn� de M. M�quillet, d�put�, a visit� les communes suivantes :
Bonviller. - Une victime, pertes mat�rielles consid�rables, 28 maisons d�truites. Le maire est rest� courageusement � son poste.
Bionville-la-Petite. - Commune pas �prouv�e.
Crion et Sionviller. - Ces deux communes ont �t� peu �prouv�es, pas de victimes, quelques maisons d�truites. Les municipalit�s sont rest�es � leur poste, le cur� de Crion a soutenu le courage de ses paroissiens.
Jolivet. - Peu de d�g�ts mat�riels, le moulin a un peu souffert, la propri�t� Bichat a �t� assez s�rieusement endommag�e. Le maire est demeur� � son poste.
Lamath. - L'occupation allemande a dur� deux jours. La municipalit� est demeur�e � son poste au moment du danger. Le maire et deux de ses concitoyens ont �t� emmen�s comme otages. On est depuis sans nouvelles d'eux. Si les d�g�ts mat�riels se r�duisent � deux maisons incendi�es ou d�truites, il faut d�plorer la perte de quatre vies humaines.
M�honcourt. - Les Allemands ne sont rest�s � M�honcourt qu'une demi-journ�e.
Ils ont fait �vacuer la commune � toute la population. Quelques heures apr�s, le maire et le garde champ�tre revenaient bravement � leur poste et restaient pendant deux jours les seuls habitants de la commune.
Deux maisons d�truites. Pas de victimes
Bayon. - Simple visite � la municipalit� qui assura avec d�vouement et comp�tence les lourdes charges du moment.
Xermam�nil. - Arr�t au retour � Xermam�nil, dont le maire a abandonn� ses administr�s pendant l'occupation allemande. L'adjoint, �g� de 75 ans, M. Gillet, est bravement rest� au poste et assure depuis quinze jours les services administratifs de la commune.
L� encore, il faut d�plorer la perte de deux vies humaines : trois maisons incendi�es ou d�truites.

SERVICE DES TRAINS

Nancy, 10 octobre.
Direction de Toul, Neuf ch�teau et Bar-le-Duc : d�parts � 3 h. 14, 9 h. 14, 15 h. 14,
Direction de Merry : d�parts � 0 h. 46, 6 h. 46. 12 h. 46, 18 h. 46.
Direction de Blainville : d�parts � 8 h. 51, 14 h. 51, 20 h. 51.

La Reprise des Cours
SOLENNIT� PATRIOTIQUE
� la Salle Poirel

Nancy, 10 octobre.
A l'occasion de la rentr�e des classes et de la reprise du travail scolaire, une r�union g�n�rale de tout le personnel enseignant a eu lieu, le jeudi 8 octobre, dans la salle Poirel.
Les �coles et les lyc�es de Nancy �taient repr�sent�s par de nombreuses d�l�gations.
Loges et parterre pr�sentaient un coup d'oeil pittoresque. La coquetterie des toilettes, le sourire un peu triste des visages �clairaient cette solennit�.
On remarquait autour de M. le Pr�fet qui pr�sidait, MM. Gustave Simon, maire de Nancy ; Adam, recteur de l'Universit� de Nancy ; C�lice, procureur g�n�ral ; Floquet, doyen de la Facult� des sciences ; Binet, Auerbach, Martz ; MM. les adjoints Schertzer, Souriau, Dorez, Peltier, Devit ; les membres du Conseil municipal ; MM. Alfred Krug, Guignard, L�on Pignot, Danis, Guyot, etc.

DISCOURS DE M. LE RECTEUR
Le silence s'�tablit, quand M. le recteur Adam s'avance sur la sc�ne et prononce un discours empreint d'une sinc�re et patriotique �motion :
�� Il y a 44 ans, dit-il, en octobre 1870, la rentr�e des classes s'est faite � Nancy.
en pleine guerre. Mais quelle diff�rence ! Les enfants ressentaient alors les tristesses et les humiliations de la Patrie ; mais aujourd'hui, on n'a qu'� se tourner vers l'h�tel de ville pour y voir flotter encore nos trois couleurs.
C'est le coeur plein d'espoir que nous rouvrons toutes grandes les portes de nos �coles comme en pleine paix.
Les nouvelles qu'on vous lira sont bien diff�rentes que celles qui nous accabl�rent coup sur coup jusqu'� la d�faite finale dont la France devait si t�t se relever.
Ce n'est pas dans ce pays fronti�re qu'on peut donner le change pour savoir qui a commenc�, dans quel camp sont les agresseurs.
Vous aurez le r�confort de sentir que la France n'est plus seule aujourd'hui. Jamais elle n'a compt� dans le monde autant d'amiti�s, autant de sympathies ! �
En proie � une �motion croissante, M. le Recteur continue en ces termes :
�� Quelle diff�rence avec ce temps o� Thiers s'en allait implorer tous les souverains sans recueillir autre chose que des paroles qui traduisaient le d�sir de voir l'abaissement de notre pays !
Vous avez sous les yeux le spectacle de la r�conciliation nationale et de la fraternit� des peuples civilis�s. A c�t� de cette magnifique le�on, les le�ons de vos ma�tres vous para�tront peut-�tre moins dignes d'int�r�t. Mais non ! J'ai vu avec quel sentiment de la gravit� de l'heure pr�sente vous repreniez votre place dans les �coles.
C'est pour vous que l'on travaille ; mais jamais je n'ai si bien compris que c'est pour vous que l'on meurt ; jamais je n'ai si bien senti la continuit� de notre race et combien elle m�rite d'�tre �ternelle, comme le dit le grand po�te Victor Hugo.
Notre nation repr�sente un id�al qu'elle a inscrit dans sa noble devise : libert� de tous les peuples opprim�s sous un joug impos� par la force ; �galit� de tous les peuples ayant les m�mes droits ; fraternit� des peuples � la condition d'�vincer celui qui a choisi dans la famille humaine la part du maudit ! �
Les �l�ves des �coles chantent ensuite l'Hymne des Chants du Cr�puscule :
Gloire � notre France �ternelle !
Gloire � ceux qui sont morts pour elle !

ALLOCUTION DE M. LE MAIRE
M. Gustave Simon, maire de Nancy, prend la parole, pour retracer les �preuves douloureuses qu'a travers�es Nancy depuis les d�buts des hostilit�s. Au bruit du canon, qui tonnait sur la fronti�re, dit-il, nous avons maintenu les services administratifs.
M. le Maire �num�re les travaux accomplis par ses coll�gues � l'h�tel de ville ; il fait un vif �loge de M. Laurent, dont l'activit�, l'exp�rience et les conseils ont assur� la continuit� de la vie municipale dans les instants les plus difficiles de la crise.
M. le Maire remercie M. le Recteur de l'Universit�, M. le Pr�fet de Meurthe-et Moselle, les professeurs, les institutrices ; il exhorte la jeunesse qui pr�pare � la France de si nobles et de si grandes destin�es.
Les �l�ves chantent un choeur patriotique sur. la Lorraine.

DISCOURS DE M. LE PR�FET
A son tour, M. le Pr�fet de Meurthe-et-Moselle prononce un discours o� l'�l�gance de la forme soutient l'�l�vation des sentiments exprim�s avec �loquence :
�� M. le Maire vient de vous donner un double exemple, dit-il, celui de la fid�lit� � ses amis et celui de la modestie.
Le Maire de Nancy est un homme de t�te et de coeur, un simple et un vaillant ; je salue en sa personne la ville de Nancy et la population nanc�ienne tout enti�re.
Enfants, cette r�union n'est pas une f�te, mais une c�r�monie solennelle par laquelle nous avons voulu que s'ouvr�t votre ann�e scolaire.
Vos m�res, aujourd'hui, pleurent dans leurs foyers ; mais leur tristesse et leurs larmes ont de la fiert� ; il y a sur les cercueils qui passent dans notre ville en deuil un linceul aux couleurs du drapeau. Ils savent bien lutter, ils savent bien mourir, les petits soldats de France. Le g�n�ral en chef a dit que la R�publique peut �tre fi�re des arm�es qu'elle a pr�par�es.
Notre arm�e, c'est la nation ; les �coles peuvent �tre fi�res aussi d'avoir pr�par� la g�n�ration actuelle, pleine d'ardeur, de g�n�rosit�, de force, capable de se sacrifier pour une id�e.
Le moment est venu, l'occasion s'est offerte; vous savez quelle noble conduite fut celle de notre jeunesse. Il ne s'agit pas seulement de d�fendre le sol sacr� de la Patrie, l'honneur du drapeau, l'int�grit� de la race. Ces raisons suffiraient � exalter vos coeurs. Mais nous avons le sublime orgueil de repr�senter la civilisation.
M. le Pr�fet compare ensuite l'influence exerc�e par les conqu�tes de Rome dans les pays o� subsistent des t�moignages de son g�nie, puis la superbe et folle aventure de Napol�on qui a laiss� partout les monuments imp�rissables de la pens�e humaine, le Code civil et la D�claration des Droits de l'Homme.
�� Qu'apporte aujourd'hui l'Allemagne ? demande M. le Pr�fet. Son empereur abaisse jusqu'� la Divinit� qu'il ravale au rang d'un feld-mar�chal prussien et qui arracherait au front du Christ sa couronne d'�pines pour la remplacer par un casque � pointe.
L'oeuvre allemande se traduit par une puissance dominatrice, par la m�chancet� et par la haine. Elle ne repr�sente pas un principe de bont�. Alors est-ce pour imposer ses notions d'art ? La destruction de Louvain et de Reims suffit � la juger. Est-ce pour donner un exemple du respect de l'honneur, de la v�rit� et de la foi jur�e ?
Toutes ses d�p�ches, ses discours, ses d�clarations sont autant de mensonges, elle a d�chir� les contrats, reni� sa signature, d�clar� que les trait�s ne sont que des.
chiffons de papier.
Ce que l'Allemagne repr�sente aux yeux de l'Univers ? Une puissance de destruction et de haine. Aussi l'Univers se dresse tout entier contre sa domination, son arrogance et son danger.
M. le Pr�fet de Meurthe-et-Moselle passe en revue la situation europ�enne � la suite de la guerre qui ensanglante les nations. Ni la Serbie, ni l'Angleterre, ni la Russie, ni la Belgique, ni la France, n'ont baiss� la t�te. Etant sans reproche, elles se sont �lev�es sans peur afin d'�tablir contre cette nation fratricide, malgr� elle, la fraternit� des peuples.
Enfants, soyez sans crainte ! Notre pays triomphera. L'�p�e ne sera remise au fourreau qu'apr�s la victoire. Les alli�s ont tous les �l�ments de succ�s : sup�riorit� num�rique, sup�riorit� �conomique, sup�riorit� morale. Apr�s combien de ruines et de deuils ? Je l'ignore. Mais une esp�rance illumine nos larmes.
Quand nous irons sur les tombes des h�ros pour y verser des fleurs, des pri�res et des larmes, les morts tressailliront dans le s�pulcre, en pensant que si l'on porte le deuil de leur tendresse, personne ne porte, du moins, le deuil de la Patrie.
Pendant plus de 40 ans, notre adolescence, toute notre vie s'est �coul�e dans le cauchemar perp�tuel de l'oppression. Sur notre route, � chaque pas, on rencontrait une interdiction ; mais votre jeunesse, enfants, va s'ouvrir sous l'aube lumineuse de la victoire ; vous aurez la route libre ; vous ne conna�trez pas sur vos r�ves l'ombre tragique d'un casque insolent.
Marchez donc ! Dans tous les domaines de l'action, pour les individus comme pour les peuples, il est plus difficile de conserver le bien que de le conqu�rir. Il vous appartiendra de r�aliser l'id�al magnifique de vos a�n�s, de vous montrer dignes des sacrifices qu'ils ont consentis avec un h�ro�sme sublime, de pr�parer dans l'avenir la moisson f�conde qu'ils ont arros�e de-leur sang g�n�reux.
Unissons-nous donc, malgr� les deuils, dans ce cri de foi et d'esp�rance : �� Vive la France ! �
De longs applaudissements �clatent.
Les �coles entonnent une �� Marseillaise � � deux voix, que l'assistance enti�re �coute debout, dans un recueillement profond.
Il est onze heures et demie quand cette impressionnante c�r�monie prend fin, laissant dans tous les coeurs une ineffa�ables �motion.
LUDOVIC CHAVE.

LES OP�RATIONS MILITAIRES DEPUIS
le d�but de la Guerre

Nancy, 10, octobre.
Le Temps publie l'int�ressante �tude suivante des op�rations poursuivies par l'arm�e fran�aise depuis le commencement de la guerre :
Nos arm�es ont �t� concentr�es sur notre fronti�re d'Alsace-Lorraine, et c'est par la Belgique, sur la fronti�re du Nord, que l'attaque allemande s'est produite.
Nous avions commis une erreur. L'erreur n'�tait nullement imputable au commandement, mais au pays tout entier. Nous �tions hant�s par l'id�e de l'occupation de Nancy par l'ennemi et on �tait arriv� � vouloir dans cette r�gion une fronti�re inviolable. Toute la concentration de l'arm�e a �t� organis�e depuis longtemps sur cette base. Une r�action contre ce dispositif a �t� tent�e depuis plusieurs ann�es, on faisait valoir que les Allemands �viteraient de se heurter contre notre arm�e dans une r�gion o� elle trouverait de solides places fortes : Verdun, Toul, Epinal, Belfort, et qu'ils tourneraient ces obstacles en passant par la Belgique.
Ce n'est pas en France seulement que l'entr�e de l'arm�e allemande par la Belgique �tait envisag�e. De nombreux �crivains militaires allemands et belges en avaient fait le sujet de leurs ouvrages.
Tout cela, notre commandement ne l'ignorait pas, mais dans notre pays on est forc� de compter avec l'opinion publique qui n'aurait pas compris l'abandon provisoire de Nancy et de la fronti�re lorraine.
Dans la nuit du 2 au 3 ao�t, l'Allemagne adressait � la Belgique un ultimatum exigeant le droit de passage. Le gouvernement belge, qui avait d�j� d�cr�t� la mobilisation, r�pondit qu'il �tait r�solu � d�fendre la neutralit� de son pays et fit appel � la France et � l'Angleterre.
Le 4 ao�t, avant d'avoir termin� leur mobilisation, les Allemands p�n�traient en Belgique. Le 8 ao�t, le 1er corps d'arm�e fran�aise, ayant termin� sa mobilisation, �tait envoy� au secours des Belges. Il allait �tre rapidement appuy� par les troupes anglaises qui commen�aient � d�barquer � Ostende, Dunkerque et Calais. C'�tait loin d'�tre suffisant, car, d�masquant le plan de son �tat-major, la masse de l'arm�e allemande suivait de pr�s les corps qui avaient tent� de forcer les colonnes de d�fense de Li�ge et montrait ses t�tes de colonnes au sud et au nord de cette place.
Le plan de l'�tat-major allemand dans le cas d'une guerre contre la France et la Russie alli�es �tait de porter aussi rapidement que possible le gros de son arm�e par le chemin le plus court sur Paris, d'y p�n�trer de vive force et, apr�s avoir contraint le gouvernement fran�ais � se reconna�tre vaincu, de se retourner contre l'arm�e russe, dont la mobilisation et la concentration �taient beaucoup moins rapides en raison de l'�tendue du pays et du nombre restreint de ses voies ferr�es.
N'avant plus de doute sur les intentions allemandes, le commandement fran�ais prit rapidement sa d�cision. Laissant devant Nancy et en Lorraine l'arm�e du g�n�ral de Castelnau, il dirigea le gros de ses forces droit sur les Allemands qui �taient en Belgique. Pour des arm�es aussi consid�rables, ce changement de front �tait une op�ration d�licate. Pour arriver � temps avant que notre fronti�re f�t atteinte par l'adversaire, il fallait aller vite et marcher sur un grand front. Les premi�res rencontres ne nous furent pas favorables ; des marches longues et rapides avaient fatigu� nos soldats.
Une de nos arm�es avait �t� dirig�e par Neufch�teau dans l'Ardenne belge contre des forces allemandes qui avaient travers� le Grand-Duch� de Luxembourg. Une deuxi�me, passant aux environs de Sedan, s'�tait port�e a l'attaque de corps allemands en marche entre la Meuse et la Sambre. Devant le flot allemand, l'arm�e belge avait d� se replier sur Anvers.
Nous avions affaire � un adversaire formidable. Les meilleures troupes de l'Allemagne �taient contre nous, entrain�es par des officiers d'une �nergie atteignant la violence et soumises � une discipline inexorable. Notre commandant n'h�sita pas. Les conditions n'�taient pas favorables ; il se replia sur le territoire fran�ais, combattant pied � pied l'adversaire, l'�puisant, n'attendant que l'heure o� cet �puisement lui permettrait de reprendre l'offensive.
Il n'eut pas une d�faillance, pas un instant de d�couragement. Malgr� des combats journaliers, notre retraite se fit rapidement et en ordre.
Le 28 ao�t, l'ennemi atteignit la fronti�re ; le 30, il arrivait � Guise et Novion-Porcien, deux points sur lesquels nous prononcions des contre-attaques.
Tout en se repliant, le g�n�ral Joffre avait ramen� vers l'ouest celles de ses arm�es qui avaient p�n�tr� dans l'Ardenne belge, de mani�re � n'avoir aucune solution de continuit� dans sa ligne de bataille, et il avait donn� comme point de direction � son aile ouest, la lisi�re est du camp retranch� de Paris, ce qui lui permettrait de parer � une tentative d'investissement de la capitale
Le 2 septembre, la droite allemande atteignait la for�t de Compi�gne. L'�motion fut vive � Paris, et. le gouvernement prit la d�termination de se transporter � Bordeaux.
Les Allemands n'avaient plus l'espoir de terminer la guerre du c�t� fran�ais par leur entr�e � Paris. Le g�n�ral Galli�ni, dont le pass� prouvait qu'il n'�tait pas un homme de vaines paroles, leur montrait qu'ils ne p�n�treraient pas dans la capitale, sinon apr�s un si�ge long et p�nible. Ce si�ge m�me, ils ne pouvaient l'entreprendre qu'apr�s avoir d�finitivement dispers� l'arm�e du g�n�ral Joffre.
Mais l'arm�e Joffre avait re�u des hommes de remplacement. Lorsque l'arm�e allemande la rencontra le 6 septembre, d�ploy�e sur une ligne jalonn�e par Meaux, le Grand-Morin, Verdun, elle �tait pr�te � prendre l'offensive.
Le moment que guettait le commandement fran�ais �tait arriv�. L'�tat-major allemand avait voulu faire vite, nous �craser en quelques jours et transporter ensuite le gros de ses forces contre les Russes. Nos alli�s nous ont �t� indirectement d'un grand secours. En voulant marcher trop vite, les Allemands avaient �puis� leurs soldats qui n'�taient pas d'une qualit� suffisante pour r�sister � de telles fatigues.
Loin d'�craser l'arm�e du g�n�ral Joffre, les Allemands subirent une attaque sur tout le front et celle des troupes de Paris qui se port�rent contre leur flanc droit sur l'Ourcq, d�s le 6 septembre, en les refoulant. Les corps fran�ais et anglais poursuivirent l'ennemi, ramassant des canons, du mat�riel et de nombreux prisonniers.
Les fatigues occasionn�es par cette lutte h�ro�que d'une semaine ne permirent pas de donner � la poursuite de l'ennemi l'�nergie n�cessaire pour transformer la retraite en d�route. Il put se ressaisir en arrivant sur la ligne de l'Aisne et les forts de Reims qu'il occupait. Sur ce front, il re�ut des renforts, fit t�te et, le 15 septembre, une grande et nouvelle bataille s'engagea., bataille formidable s'�tendant, au d�but, de Noyon � Saint-Mihiel, sur la Meuse, puis se d�veloppant progressivement entre Meuse et Moselle, � l'est et au del� de l'Oise, vers Lassigny et Roye � notre aile gauche.
Voil� plus de vingt jours qu'on se bat sur cette Immense ligne. La bataille engag�e finira-t-elle par la rupture de l'arm�e allemande ou va-t-elle continuer en se d�roulant pas � pas vers le Nord ? L'avenir nous le dira, Dans les deux hypoth�ses, un r�sultat important sera acquis : l'�vacuation du territoire fran�ais par les Allemands.

(� suivre)

Mentions l�gales

 blamont.info - H�bergement : Amen.fr

Partagez : Facebook Twitter Google+ LinkedIn tumblr Pinterest Email