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Edition J.O. - d�bats de la s�ance
Articles, amendements, annexes

Assembl�e nationale
XIIIe l�gislature
Session ordinaire de 2011-2012

Compte rendu
int�gral

S�ance du mercredi 1 f�vrier 2012

SOMMAIRE �LECTRONIQUE

SOMMAIRE


Pr�sidence de M. Bernard Accoyer

1. Questions au Gouvernement

Situation en Syrie

M. Jean-Christophe Lagarde

M. Alain Jupp�, ministre d’�tat, ministre des affaires �trang�res et europ�ennes

Prix des carburants � La R�union

Mme Huguette Bello

M. �ric Besson, ministre charg� de l’industrie, de l’�nergie et de l’�conomie num�rique

Taxe sur les transactions financi�res

M. Pierre Morel-A-L’Huissier

M. Fran�ois Baroin, ministre de l’�conomie, des finances et de l’industrie

Logement

Mme Annick Lepetit

M. Benoist Apparu, secr�taire d’�tat charg� du logement

Situation au S�n�gal

M. Christian Bataille

M. Alain Jupp�, ministre d’�tat, ministre des affaires �trang�res et europ�ennes

Finances publiques

M. J�r�me Bignon

Mme Val�rie P�cresse, ministre du budget, des comptes publics et de la r�forme de l’�tat, porte-parole du Gouvernement

Tva sociale dans les d�partements d'outre-mer

M. Alfred Marie-Jeanne

Mme Marie-Luce Penchard, ministre charg�e de l'outre-mer

Rapport de la Cour des comptes sur les co�ts de la fili�re �lectronucl�aire

M. Gu�nha�l Huet

M. �ric Besson, ministre charg� de l’industrie, de l’�nergie et de l’�conomie num�rique

Plans sociaux dans l’industrie textile

M. Pascal Terrasse

M. �ric Besson, ministre charg� de l’industrie, de l’�nergie et de l’�conomie num�rique

Comp�titivit� des entreprises

M. Jean-Michel Fourgous

M. Fran�ois Baroin, ministre de l’�conomie, des finances et de l’industrie

R�forme du financement de la protection sociale

Mme Jeanny Marc

Mme Val�rie P�cresse, ministre du budget, des comptes publics et de la r�forme de l’�tat, porte-parole du Gouvernement

Proposition de loi sur le don d’heures de r�duction de temps de travail

M. Paul Salen

Mme Marie-Anne Montchamp, secr�taire d’�tat aupr�s de la ministre des solidarit�s et de la coh�sion sociale

R�forme du financement de la protection sociale

M. Jacques Valax

Mme Val�rie P�cresse, ministre du budget, des comptes publics et de la r�forme de l’�tat, porte-parole du Gouvernement

Visite d’�tat du pr�sident Ouattara

M. Jean-Louis Christ

M. Alain Jupp�, ministre d’�tat, ministre des affaires �trang�res et europ�ennes

Pouvoir d’achat

M. Guy Delcourt

Mme Val�rie P�cresse, ministre du budget, des comptes publics et de la r�forme de l’�tat, porte-parole du Gouvernement

2. Mise en œuvre du principe de pr�caution

Discussion g�n�rale

M. Alain Gest

Pr�sidence de Mme Catherine Vautrin

M. Philippe Tourtelier

M. Andr� Chassaigne

Mme Genevi�ve Fioraso

M. Christophe Bouillon

Mme Anny Poursinoff

M. Jean-Paul Chanteguet

M. J�r�me Bignon

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’�cologie, du d�veloppement durable, des transports et du logement

Vote sur la proposition de r�solution

3. Protection de l’identit�

M. Claude Gu�ant, ministre de l’int�rieur, de l’outre-mer, des collectivit�s territoriales et de l’immigration

M. Philippe Goujon, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la l�gislation et de l’administration g�n�rale de la R�publique

Motion de rejet pr�alable

M. Serge Blisko

M. Christian Vanneste, Mme Sandrine Mazetier

Motion de renvoi en commission

M. Jean-Jacques Urvoas

M. Philippe Goujon, rapporteur

Discussion g�n�rale

M. Michel Hunault

M. Marc Dolez

M. Christian Vanneste

-->

Article 5

Mme Sandrine Mazetier

Amendement no 1

Vote sur l’ensemble

4. Contr�le moderne des armes

M. Claude Gu�ant, ministre de l’int�rieur, de l’outre-mer, des collectivit�s territoriales et de l’immigration

M. Claude Bodin, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la l�gislation et de l’administration g�n�rale de la R�publique

Discussion g�n�rale

M. Daniel Vaillant

M. Pascal Brindeau

M. Andr� Chassaigne

M. Michel Diefenbacher

M. Patrice Verch�re

M. Michel Hunault

M. Claude Gu�ant, ministre

Discussion des articles

Article 1er

M. Pierre Lang

M. Claude Gu�ant, ministre

Amendements nos 1, 2 rectifi�, 3, 29, 30

Article 2

Amendements nos 31, 4, 28

Avant l’article 3

Amendement no 5 rectifi�

Article 3

Amendements nos 32, 6, 23, 24, 35

Article 5

Article 8

Amendements nos 33, 7, 37, 36

Article 10

Articles 11 et 12

Article 13

Articles 14 et 15

Article 16

Articles 17 � 20

Article 21

Articles 21 bis � 25

Article 27

Amendement no 8

Article 28

Amendement no 9

Article 29

Amendement no 10

Article 30

Amendement no 11

Article 31

Article 32

Amendement no 12

Articles 32 bis, 32 ter et 33

Article 35 A

Article 35

Amendements nos 14, 17, 15, 22

Article 35 ter

Amendements nos 27, 16

Vote sur l’ensemble

M. Claude Bodin, rapporteur

5. Ordre du jour de la prochaine s�ance

Pr�sidence de M. Bernard Accoyer

M. le pr�sident. La s�ance est ouverte.

(La s�ance est ouverte � quinze heures.)

1

Questions au Gouvernement

M. le pr�sident. L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Situation en Syrie

M. le pr�sident. La parole est � M. Jean-Christophe Lagarde, pour le groupe Nouveau Centre.

M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le pr�sident, mes chers coll�gues, ma question s’adresse � M. le ministre d’�tat, ministre des affaires �trang�res et europ�ennes.

Depuis plus de dix mois, l’insurrection syrienne se heurte � la f�rocit� et � la sauvagerie du pouvoir en place. La r�pression des populations civiles se fait de plus en plus sanglante, et, selon l’ONU, � ce jour, plus de 5 000 personnes ont �t� victimes du r�gime du pr�sident Bachar el-Assad. Lundi dernier, on d�nombrait quatre-vingt-seize morts, dont cinquante-cinq civils ; hier, vingt et un morts. Et la comptabilit� morbide ne fait que cro�tre.

Devant cette situation, le statu quo n’est plus tenable. L’attitude du r�gime syrien a conduit l’Union europ�enne � d�cider, avec la fermet� qui s’imposait, d’une s�rie de sanctions � l’encontre de la Syrie. Mais cela ne suffit pas. Ces derniers jours, un pas de plus vers la condamnation du r�gime a �t� franchi avec le d�p�t par la Ligue arabe et les pays occidentaux d’un projet de r�solution � l’ONU. Le Conseil de s�curit� des Nations unies s’est r�uni hier, en votre pr�sence, pour examiner ce projet, qui pr�voit le transfert par le Pr�sident Bachar el-Assad de ses pouvoirs � son vice-pr�sident, qui pr�voit des �lections libres et transparentes, sous supervision arabe et internationale, et qui, enfin et surtout, commande de mettre fin imm�diatement aux violations des droits de l’homme et aux attaques contre ceux qui forcent notre admiration par leur courage et veulent continuer � exercer leurs droits de libre expression et de r�sistance � l’oppression.

Soutenue par la France, cette initiative de la Ligue arabe continue de se heurter � l’opposition de la Russie, alli�e traditionnelle de Damas.

Alors, monsieur le ministre d’�tat, devant cette situation de blocage, li�e notamment � la position russe, pourriez-vous nous �clairer sur l’issue de cette r�union du Conseil de s�curit�, et indiquer � la repr�sentation nationale quels sont les moyens que le Gouvernement fran�ais, que l’Europe et que nos alli�s entendent utiliser pour augmenter encore la pression sur la dictature syrienne, dans l’espoir d’�viter la guerre civile qui se profile l�-bas ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

M. le pr�sident. La parole est � M. Alain Jupp�, ministre d’�tat, ministre des affaires �trang�res et europ�ennes.

M. Alain Jupp�, ministre d’�tat, ministre des affaires �trang�res et europ�ennes. Monsieur le d�put�, je voudrais d’abord excuser M. le Premier ministre, qui est retenu loin de l’Assembl�e par une urgence.

Monsieur le d�put�, vous avez donn� quelques chiffres : j’en ajouterai quelques-uns : 6 000 morts, aujourd’hui ; selon l’UNICEF, 384 enfants massacr�s par le r�gime ; 15 000 prisonniers ; 15 000 r�fugi�s.

Depuis le d�but, la France n’a pas cess� de condamner cette trag�die et d’appeler � la mobilisation de la communaut� internationale. Nous avons malheureusement �t�, jusqu’� aujourd’hui, bloqu�s, au Conseil de s�curit�, par la menace de veto de la Russie et l’hostilit� de ce qu’on appelle les BRICS, qui incluent le Br�sil, l’Inde et l’Afrique du Sud.

Un fait nouveau s’est produit depuis quelques semaines. C’est l’engagement de la Ligue arabe, qui non seulement a envoy� sur le terrain des observateurs, mais qui a �galement �labor� un plan de sortie de crise. Et c’�tait l’objet de la r�union d’hier au Conseil de s�curit�, � laquelle je me suis rendu. L’objectif, c’est de faire endosser par le Conseil de s�curit� ce plan de la Ligue arabe, qui, d’abord, enjoint au r�gime de stopper les violences, et qui, ensuite, propose une transition politique, un peu de la m�me inspiration que ce qui s’est pass� au Y�men.

Nous en avons longuement discut� et, sans faire preuve d’un optimisme excessif, je dois dire que, pour la premi�re fois, l’attitude de la Russie, l’attitude des BRICS, pour reprendre ce terme, a �t� moins n�gative. Cette initiative re�oit bien s�r le soutien de tous les Europ�ens – le Royaume-Uni, le Portugal, l’Allemagne – comme celui des Am�ricains.

Nous allons donc travailler d’arrache-pied, dans les jours qui viennent, pour essayer d’arriver � une r�solution qui permettra ensuite � la Ligue arabe de s’investir pleinement dans la recherche de cette solution. Voil� o� nous en sommes aujourd’hui. Une fen�tre d’espoir s’est ouverte.

Je voudrais, pour terminer, faire remarquer une chose. C’est que la France tire son influence dans le monde de son si�ge de membre permanent du Conseil de s�curit�. Ce serait une grave faute que de l’abandonner. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Prix des carburants � La R�union

M. le pr�sident. La parole est � Mme Huguette Bello, pour le groupe de la Gauche d�mocrate et r�publicaine.

Mme Huguette Bello. Ma question s’adresse � M. le Premier ministre.

Jour apr�s jour, les indicateurs tombent pour confirmer une d�gradation continue de la situation sociale et �conomique. Les territoires les plus fragiles sont frapp�s de plein fouet. Dans les outre-mer, le d�mant�lement minutieux des dispositifs en faveur de l’emploi marchand et la marginalisation de l’�conomie solidaire ont des cons�quences redoutables que la crise ne fait qu’aggraver. Le ch�mage atteint des sommets.

Mais ce n’est pas le seul triste record que nous enregistrons. � partir d’aujourd’hui 1er f�vrier, les R�unionnais paieront leur carburant et leurs bouteilles de gaz plus cher qu’ils ne l’ont jamais fait. Ainsi le litre de super sans plomb va augmenter de neuf centimes pour atteindre 1,66 euro. Ces augmentations constantes sont d’autant moins supportables qu’il n’y a pas d’alternative � la voiture et que le pouvoir d’achat, d�j� s�v�rement mis � mal, le sera encore plus si le projet de TVA dite sociale devait entrer dans les faits.

De toute �vidence, le nouveau mode de fixation des tarifs ne suffit pas pour enrayer l’envol�e des prix � la pompe. Il faut probablement se pencher � nouveau sur les conclusions de la Haute Autorit� de la concurrence et sur les propositions �mises par un rapport parlementaire consacr� � ce probl�me.

Les unes et les autres ont �t� formul�es � la suite des mouvements sociaux qui, en 2008, avaient gagn� l’ensemble des r�gions d’outre-mer, et dont le d�tonateur, je le rappelle, �tait d�j� le prix des carburants. Plusieurs questions li�es au monopole de fait dans ce secteur sont rest�es en suspens, notamment celle des niveaux des droits de stockage ou celle des contrats de location-g�rance.

Professionnels et particuliers, tous les usagers de la route attendent des solutions avec d’autant plus d’inqui�tude que le secteur des �nergies renouvelables, dans lequel l’avance de La R�union est incontestable, subit les soubresauts des d�cisions gouvernementales.

Quelles mesures comptez-vous prendre pour r�pondre durablement � leur attente ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

M. le pr�sident. La parole est � M. le ministre charg� de l’industrie, de l’�nergie et de l’�conomie num�rique.

M. �ric Besson, ministre charg� de l’industrie, de l’�nergie et de l’�conomie num�rique. C’est vrai, madame la d�put�e, le prix du carburant a augment� en janvier en France et dans l’�le de La R�union. Mais � La R�union, les prix sont r�glement�s, ils �voluent une fois par mois.

Au 1er f�vrier, l’application de la formule de calcul conduit � la hausse des prix que vous avez rappel�e : quatre centimes pour le gazole, et neuf centimes pour le sans-plomb. Cette �volution s’explique, en m�tropole comme � La R�union, par les m�mes facteurs. Tout d’abord, les cours du p�trole : vous connaissez la situation de tension g�opolitique, ainsi que la hausse constante de la consommation mondiale. Le second facteur la hausse est le niveau de l’euro : sa valeur a baiss� par rapport au dollar, les prix � la pompe exprim�s en euros ont donc augment�.

Je rappelle que cette hausse fait suite � deux mois cons�cutifs de stabilit� des prix. Je veux ajouter que les consommateurs r�unionnais de gazole paient aujourd’hui leur gazole onze centimes moins cher qu’en m�tropole.

� ceux que j’ai entendu dire au cours des derniers jours qu’il fallait casser la formule de calcul, je r�pondrai que c’est une mauvaise id�e. Cette formule a un caract�re protecteur pour les R�unionnais, du fait du m�canisme de r�glementation des prix. Elle prot�ge le consommateur en fixant un prix maximum � la pompe et sur les bouteilles de gaz.

Nous avons refondu le dispositif en 2010 pour le rendre totalement transparent, le plus r�actif possible, mais aussi le plus proche possible de la r�alit� des co�ts d’approvisionnement. Il s’agit d’un prix maximum, il peut y avoir des prix inf�rieurs si les p�troliers le d�sirent. Quant aux taxes, que vous avez �voqu�es, n’y voyez pas malice mais le conseil r�gional a comp�tence pour fixer le taux de la taxe sp�ciale sur les carburants � La R�union.

La vraie r�ponse � long terme, madame la d�put�e, est de r�duire notre d�pendance aux hydrocarbures. C’est ce � quoi nous nous employons. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Taxe sur les transactions financi�res

M. le pr�sident. La parole est � M. Pierre Morel-A-L’Huissier, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Pierre Morel-A-L’Huissier. Monsieur le pr�sident, mes chers coll�gues, nous venons d’apprendre qu’une solution pour le site Lejaby d’Yssingeaux et ses quatre-vingt-treize salari�s avait �t� trouv�e sous l’�gide du Gouvernement, et notamment de Laurent Wauquiez. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Roland Muzeau. Gr�ce aux travailleurs !

M. Pierre Morel-A-L’Huissier. Mon groupe s’en f�licite, et j’esp�re que ce sentiment est partag� sur l’ensemble de nos bancs.

Ma question s’adresse � M. le ministre de l’�conomie, des finances et de l’industrie. Monsieur le ministre, le Pr�sident de la R�publique a annonc� la mise en œuvre d’une taxe sur les transactions financi�res d�s le mois d’ao�t prochain.

C’est un acte courageux qui s’inscrit dans la suite logique des discussions internationales qui ont lieu � son initiative depuis le d�but de la crise �conomique et financi�re, en vue de r�guler les �changes sur toutes les places boursi�res de la plan�te et de mettre fin � certains exc�s.

Cette taxe frapperait toutes les cessions d’actions d’entreprises cot�es � Paris, quelle que soit la localisation de l’acheteur et du vendeur et quel que soit le lieu de la transaction. Le taux serait de 0,1 %, identique � celui pr�vu dans le projet de directive europ�enne. Il est pr�vu que cette taxe rapporte un milliard d’euros en ann�e pleine.

Pouvez-vous nous indiquer comment cette taxe pourra �tre mise en œuvre unilat�ralement sans provoquer de d�localisations et comment elle s’articule avec le projet de directive communautaire ?

M. Bruno Le Roux. Le ministre n’en sait rien lui-m�me !

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Par ailleurs, pouvez-vous nous expliquer en quoi ce projet se distingue du r�tablissement de l’imp�t de bourse ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. Jean Glavany. Une question surprise !

M. le pr�sident. La parole est � M. le ministre de l’�conomie, des finances et de l’industrie.

M. Fran�ois Baroin, ministre de l’�conomie, des finances et de l’industrie. Monsieur le d�put�, vous avez raison de rappeler que la France a �t� aux avant-postes de ce d�bat dans le concert international sur une contribution du secteur de l’industrie financi�re � la r�paration de la crise mondiale que nous traversons depuis 2009.

M. Jean-Pierre Brard. C’est la r�demption !

M. Fran�ois Baroin, ministre. La France a �t� aux avant-postes dans le cadre de la pr�sidence du G20. Nous avons fait bouger les lignes, nous avons obtenu un mouvement des chancelleries sur cette question, et nous avan�ons dans la bonne direction.

Le m�me esprit…

M. Jean-Pierre Brard. C’est l’Esprit Saint !

M. Fran�ois Baroin, ministre. …a anim� la France sous l’�nergique impulsion du Pr�sident de la R�publique, aux c�t�s de la chanceli�re allemande, pour qu’il y ait une taxe sur les transactions financi�res � l’�chelle de la zone euro, voire plus, � l’exception singuli�re des Britanniques. Leur position, que je qualifierai presque d’id�ologique, s’appuie sur une industrie financi�re qui constitue l’essentiel de leur activit� �conomique.

Vous posez deux questions essentielles. Tout d’abord, comment cette taxe va-t-elle �viter les d�localisations ? Justement par le choix que nous faisons de taxer les entreprises cot�es, et non pas les titres. Si nous avions tax� les titres cot�s sur la place de Paris, alors nous aurions provoqu� des d�localisations. Mais, puisque nous choisissons de taxer les entreprises cot�es quel que soit le lieu de l’�change de titres, nous pr�servons les emplois et leur localisation. D’une certaine mani�re, ce syst�me s’inspire du mod�le actuellement en vigueur en Grande-Bretagne, le stamp duty. Il ne sera donc pas contest� de l’autre cot� de la Manche.

Ensuite, en quoi ce syst�me diff�re-t-il de l’imp�t de bourse ? Tout d’abord, son assiette est plus large et il n’y a pas de plafond ; il rapportera ainsi quatre fois plus. Mais nous avons �galement veill� � ce qu’il n’y ait pas d’impact sur la relance de l’activit� �conomique, et c’est l’une des raisons pour laquelle nous avons exclu la taxation des obligations corporate, ainsi, naturellement, que celle des obligations d’�tat, pour �viter de p�naliser les investisseurs institutionnels qui soutiennent nos dettes.

M. Jean-Pierre Brard. Cela donne quoi, en fran�ais ?

M. Fran�ois Baroin, ministre. Nous avons en revanche d�cid� de taxer les d�riv�s tr�s sp�culatifs et la finance � haute fr�quence. En ce sens, cette taxe pr�figurera la taxe europ�enne. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

M. Jean Glavany. Vifs applaudissements � l’UMP !

Logement

M. le pr�sident. La parole est � Mme Annick Lepetit, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Mme Annick Lepetit. Monsieur le pr�sident, mes chers coll�gues, ma question s’adresse � M. le secr�taire d’�tat charg� du logement.

Monsieur le secr�taire d’�tat, interview� hier matin � la t�l�vision, vous avez d�clar� � propos de l’augmentation du droit � construire de 30 % : � On nous dit en permanence qu’il n’y a pas assez de logements, c’est vrai. On nous dit qu’il n’y a plus d’argent dans les caisses, c’est vrai. On prend la seule mesure possible, qui ne co�te pas un euro et qui fait plus de logements, on va nous dire comme toujours que ce n’est pas possible. �

Ce que nous disons, nous, monsieur le secr�taire d’�tat, c’est que cette mesure est inutile. Elle s’apparente davantage � de l’improvisation qu’� une � mesure extr�mement puissante �, comme l’a qualifi�e le Pr�sident-candidat.

D’abord, elle existe d�j� pour les logements les plus performants socialement et �cologiquement. Vous ne faites que l’�tendre aux logements les moins performants. Quel progr�s !

Ensuite, vous risquez d’encourager l’augmentation du prix des terrains, car les propri�taires les vendront plus cher.

Le jour o� la Fondation Abb� Pierre nous rappelle que plus de 8 millions de personnes sont touch�es par le manque de logements, par des loyers inabordables, par les prix d’achat qui explosent, votre mesure est particuli�rement faible.

Enfin, si les caisses de l’�tat sont vides, c’est parce que vous les avez vid�es. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Vous avez cr�� des dispositifs co�teux et inefficaces, tels le dispositif de Robien, le cr�dit d’imp�t sur les int�r�ts d’emprunt, le pr�t � taux z�ro sans conditions de ressources. Quant � votre � France des propri�taires �, elle n’est, depuis 2007, qu’� l’�tat de slogan.

S’il n’y a pas assez de logements, c’est parce que les sept lois que vous avez vot�es en dix ans ont aggrav� la crise au lieu de la r�soudre.

Pourquoi ne pas plut�t mettre en place l’encadrement des loyers, le doublement du plafond du livret A ou la mise � disposition des terrains de l’�tat par exemple, comme le propose Fran�ois Hollande ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Monsieur le secr�taire d’�tat, les Fran�ais attendent maintenant des solutions efficaces. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le pr�sident. La parole est � M. Benoist Apparu, secr�taire d’�tat charg� du logement.

M. Benoist Apparu, secr�taire d’�tat charg� du logement. Madame la d�put�e, il y a, dans votre question, un point que je n’ai pas bien compris. Cette mesure est-elle inutile ou bien existe-t-elle d�j� ? Les communiqu�s de presse de M. Delano�, tr�s contradictoires, sont d’ailleurs assez �clairants � cet �gard. Lundi, M. Delano� d�clare que cette mesure ne sert � rien et qu’il ne l’appliquera pas. Mercredi, il dit que cette mesure ne sert � rien et qu’il l’applique d�j� � Paris. Je voudrais comprendre quelle est la position exacte du parti socialiste sur ce sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Henri Emmanuelli. On va vous expliquer !

M. Benoist Apparu, secr�taire d’�tat. Par ailleurs, comparons les bilans. Les chiffres ont �t� publi�s hier. En 2011, on a produit 425 000 logements, toutes cat�gories confondues ? Nous sommes tr�s proches des 500 000 logements demand�s par la Fondation Abb� Pierre.

M. Roland Muzeau. Ce n’est pas vrai !

M. Benoist Apparu, secr�taire d’�tat. Cette ann�e, on a produit 124 000 logements sociaux et, sur l’ensemble du quinquennat, 600 000. Sous le gouvernement de M. Jospin, seuls 265 000 logements sociaux furent produits. (Hu�es sur les bancs du groupe UMP.)

M. Roland Muzeau. C’est faux !

M. Benoist Apparu, secr�taire d’�tat. Nous souhaitons continuer dans cette direction. C’est la raison pour laquelle le Pr�sident de la R�publique a annonc� deux mesures puissantes, que nous mettrons en œuvre avec Nathalie Kosciusko-Morizet dans les semaines � venir. La premi�re concerne le foncier public, avec 100 000 logements construits, dont 50 000 en �le-de-France. Quant � la seconde, qui concerne la constructibilit�, nous souhaitons la voir appliquer partout, pour une raison tr�s simple : pour �conomiser du foncier, il faut mieux l’utiliser et construire davantage de logements sur chaque terrain, ce qui fera baisser les prix. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Situation au S�n�gal

M. le pr�sident. La parole est � M. Christian Bataille, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Christian Bataille. Monsieur le ministre des affaires �trang�res, au S�n�gal, pays auquel beaucoup de Fran�ais sont tr�s attach�s, la situation politique prend un chemin pr�occupant et l’on est au bord d’�meutes tr�s graves.

Les opposants n’ont malheureusement plus d’autres solutions que la rue, face aux manquements � la Constitution et � l’obstination du Pr�sident sortant Abdoulaye Wade qui, en contradiction avec la Constitution cherche � briguer un troisi�me mandat.

De plus, il a fait arr�ter des opposants, en particulier de nombreux militants du parti socialiste s�n�galais d’Ousmane Tanor Dieng. Enfin, il a emp�ch� la candidature de Youssou N’Dour.

Le groupe socialiste redit son attachement � l’h�ritage de stabilit� et de d�mocratie de L�opold S�dar Senghor et de Abdou Diouf.

Le g�rontocrate Wade prend le risque de plonger son pays – l’un des rares, en Afrique, � avoir �t� �pargn� par les coups d’�tat, souvent sanglants – dans de graves d�sordres.

Jusqu’� ce jour, le Gouvernement fran�ais s’est r�fugi� dans un mutisme consternant et cautionne implicitement ce pr�sident et son r�gime au bord du gouffre. Monsieur le ministre d’�tat, pourquoi ce silence de votre part alors que l’on a souvent entendu le Pr�sident de la R�publique, ainsi que son gouvernement, se prononcer sur bien des situations � l’�tranger, notamment en Afrique ?

Ne doit-on pas penser que vous dissimulez un soutien honteux � un pr�sident qui doit partir et � un r�gime � la d�rive ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le pr�sident. La parole est � M. Alain Jupp�, ministre d’�tat, ministre des affaires �trang�res et europ�ennes.

M. Alain Jupp�, ministre d’�tat, ministre des affaires �trang�res et europ�ennes. Monsieur le d�put�, ne confondons pas mutisme et surdit�. Je me suis exprim� � de nombreuses reprises sur ce dossier. Si vous ne m’avez pas entendu, c’est qu’il doit y avoir un probl�me d’audition.

M. Roland Muzeau. Vous ne parlez pas assez fort !

M. Alain Jupp�, ministre d’�tat. Face aux processus �lectoraux en Afrique, la France a pris une position d’une tr�s grande clart�. Nous demandons tout d’abord le respect de l’�tat de droit et des libert�s fondamentales. Nous appelons au rejet de toutes les violences, d’o� qu’elles viennent. Et nous ne nous engageons pour aucun candidat, ni d’un c�t� ni de l’autre.

C’est tr�s exactement la position que nous avons prise s’agissant du S�n�gal, pays � longue et profonde tradition d�mocratique.

Le Conseil constitutionnel a valid� quatorze candidatures, dont celle de M. Wade, mais il n’a pas valid� celle de M. Youssou N’Dour, ce qui a provoqu� un certain nombre de manifestations, parfois pacifiques, parfois violentes.

M. Roland Muzeau. Vous trouvez �a normal ?

M. Alain Jupp�, ministre d’�tat. Qu’est-ce que j’ai dit et que vous n’avez pas entendu ? J’ai dit que nous regrettions que certaines sensibilit�s ne soient pas repr�sent�es.

Plusieurs d�put�s du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Arrogant !

M. le pr�sident. Je vous en prie chers coll�gues !

M. Alain Jupp�, ministre d’�tat. Je le r�p�te, vous n’avez pas entendu ce que j’ai dit et je suis tr�s surpris de votre r�action.

M. le pr�sident. �coutons M. le ministre dans le silence.

M. Alain Jupp�, ministre d’�tat. Je disais donc que nous avons regrett� que certaines sensibilit�s ne soient pas repr�sent�es. Nous avons m�me souhait� – ce que vous n’avez pas entendu non plus – que le passage de g�n�ration soit organis� : je vous garantis que, si le message n’a pas �t� entendu au parti socialiste, il l’a �t� � Dakar.

Enfin, nous avons appel� � la retenue et � l’absence de toute violence.

Pendant des ann�es, on nous a parl� de ce qui �tait en grande partie un fantasme, la Fran�afrique. Je peux vous dire aujourd’hui que ce n’est plus qu’une chim�re � laquelle vous �tes les derniers � croire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Finances publiques

M. le pr�sident. La parole est � M. J�r�me Bignon, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. J�r�me Bignon. Ma question s’adresse � Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la r�forme de l’�tat.

D�penser moins, d�penser mieux, voil� l'action � laquelle notre majorit� s'est attel�e gr�ce � de nombreuses r�formes structurelles depuis 2007. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean Glavany. Ah oui ?

M. J�r�me Bignon. Je pense notamment � la r�organisation des services de l'�tat, qui a permis le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux tout en garantissant un service au public effectif et efficient. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Et voil� que, avec la campagne �lectorale, certains voudraient que la France remette en cause ce mouvement de lutte contre les d�ficits et la dette.

En effet, la semaine derni�re, un candidat marchand de sable est pass� et nous a livr� son programme. Beaucoup de nouvelles d�penses : remise en cause de la r�forme des retraites, arr�t du � un sur deux �, contrats d'avenir, cr�ation de 60 000 postes, contrats de g�n�ration…(Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Michel M�nard. Vous l’avez appris par cœur !

M. J�r�me Bignon. J’en oublie probablement ! � c�t� de cela, les Fran�ais n’ont entendu aucune proposition pour r�duire les d�ficits. D�penser, d�penser, �a, vous savez faire !

M. Henri Emmanuelli. Vous aussi ! Et vous ne vous en �tes pas priv�s !

M. J�r�me Bignon. Il est pourtant essentiel pour notre pays de poursuivre ses efforts, pour nos enfants d'abord, mais aussi pour la France, car la parole de la France est engag�e aupr�s de nos partenaires europ�ens. Ceux-ci ont d'ailleurs r�cemment d�cid� de renouveler leur engagement � lutter contre les d�ficits et � mettre en place des mesures structurelles pour favoriser la croissance.

M. Henri Emmanuelli. Trop tard !

M. J�r�me Bignon. Ce matin, r�cidive : au cours d'une intervention de Fran�ois Hollande sur une radio, qu'apprend-on ? (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Je le cite, �coutez-le : � S'il n'y a pas de croissance, nous ne tiendrons pas les objectifs de r�duction des d�ficits publics. �

M. Jean Glavany. Vous non plus !

M. J�r�me Bignon. J’aurais pr�f�r� entendre : � S’il n’y a pas de croissance, on r�duit les d�penses. � Le masque tombe, la v�rit� �clate : la gauche revient � ses vieilles lunes, d�penser, d�penser et encore d�penser sans jamais compter ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Hu�es sur les bancs du groupe SRC.)

M. le pr�sident. La parole est � Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la r�forme de l’�tat, porte-parole du Gouvernement.

Mme Val�rie P�cresse, ministre du budget, des comptes publics et de la r�forme de l’�tat, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le d�put�, il y a effectivement trois sujets d’inqui�tude majeure dans les propos r�cents de Fran�ois Hollande. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Le premier concerne le pacte de discipline budg�taire et de solidarit� au sein de la zone euro qui vient d’�tre approuv�, hier,par vingt-cinq pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Ce pacte est de nature est de ramener la confiance dans la zone euro parce que tous les pays europ�ens s’engagent � respecter une discipline budg�taire et une r�gle d’or. (M�mes mouvements.)

M. Jean Glavany. Quelle pitrerie !

Mme Val�rie P�cresse, ministre. Fran�ois Hollande dit qu’il ren�gociera ce pacte, qu’il ne l’accepte pas. Il prend le risque de d�stabiliser la zone euro. C’est tr�s grave. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Le deuxi�me sujet d’inqui�tude concerne la r�duction des d�ficits publics. Nous sommes sur un chemin de d�sendettement et de r�duction des d�ficits. (M�me mouvement.)

M. Philippe Briand. Tr�s bien !

Mme Val�rie P�cresse, ministre. Nous avons une trajectoire. C’est le retour � l’�quilibre en 2016.

M. Jean Glavany. Ben voyons !

M. Pierre-Alain Muet. Vous avez doubl� le d�ficit en dix ans !

Mme Val�rie P�cresse, ministre. Aujourd’hui, que nous dit Fran�ois Hollande ? � Si la croissance n’est pas au rendez-vous, je ne tiendrai pas cet engagement de la France. � (Hu�es sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Eh bien, nous, ces engagements, nous les avons tenus, y compris cette ann�e, en 2011 au moment o� la conjoncture devenait plus morose.

M. Philippe Briand et M. Franck Riester. Tr�s bien !

Mme Val�rie P�cresse, ministre. Nous les avons tenus et nous sommes m�me en avance.

M. Philippe Briand. Tr�s bien !

Mme Val�rie P�cresse, ministre. Fran�ois Hollande prend le risque de faire perdre la parole de la France, sa cr�dibilit� ; c’est tr�s dangereux. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Hu�es sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean Glavany. Quelle arrogance !

Mme Val�rie P�cresse, ministre. Troisi�me sujet d’inqui�tude, le ch�mage. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean Glavany. C’est un comble ! Le ch�mage a explos� sous ce gouvernement !

Mme Val�rie P�cresse, ministre. Nous avons aujourd’hui 150 000 ch�meurs de plus. Nous devons baisser le co�t du travail en France pour cr�er de l’emploi.

Que propose Fran�ois Hollande ? La suppression d’une partie des all�gements de charges Fillon sur les bas salaires et la hausse de la CSG salariale et patronale pour financer le retour de la retraite � soixante ans. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean Glavany. Nul ! �a suffit !

Mme Val�rie P�cresse, ministre. Il prend le risque de sacrifier l’emploi en France ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean Glavany. Aucun respect du Parlement ! Et le pr�sident Accoyer laisse faire : bravo !

Tva sociale dans les d�partements d'outre-mer

M. le pr�sident. La parole est � M.  Alfred Marie-Jeanne, pour le groupe de la Gauche d�mocrate et r�publicaine

M. Alfred Marie-Jeanne. Ma question s’adresse � M. le ministre de l’�conomie, des finances et de l’industrie.

La Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et La R�union ont un dispositif d'exon�rations diversifi� et assez complexe. Ce dispositif a beaucoup �volu� dans le temps.

Concernant la TVA dite sociale, nous l'avons d�j� exp�riment�e puisque la loi Perben du 25 juillet 1994 l'avait instaur�e pour et je cite : � exon�rer de 100 % les cotisations patronales de s�curit� sociale sur la partie des salaires n'exc�dant pas le Smic, dans des secteurs d'activit� expos�s � la concurrence... �

� l'�poque, cette exon�ration a �t� financ�e par le consommateur avec un rel�vement de deux points de la TVA en Guadeloupe, � la Martinique et � La R�union.

Pour faire face � la crise actuelle, le Pr�sident de la R�publique propose une augmentation de 1,6 point de la TVA pour compenser la suppression des charges familiales patronales.

Ce nouveau dispositif ne va t-il pas entrer en divergence avec les mesures en vigueur dans ces pays depuis la loi d’orientation pour le d�veloppement �conomique de l’outre-mer ?

Ce qui est s�r, c'est que cette TVA p�sera surtout sur les m�nages les plus modestes, alourdira la pression en termes de pr�l�vements et augmentera les prix � la consommation.

Sachez que toutes les enqu�tes ont r�v�l� que le pouvoir d'achat y est r�duit avec un PIB inf�rieur au moins de 33 % � la moyenne fran�aise ; un revenu moindre outre-mer inf�rieur de 38 % au revenu moyen fran�ais ; un diff�rentiel de prix qui fait notoirement d�sordre jusqu'� pr�sent.

Monsieur le ministre, eu �gard � la situation bien connue que je viens de rappeler, pensez-vous que la r�forme envisag�e soit appropri�e � cette conjoncture pr�occupante ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

M. le pr�sident. La parole est � Mme la ministre charg�e de l'outre-mer.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre charg�e de l'outre-mer. Monsieur le d�put�, comme vous l’avez rappel�, le Pr�sident de la R�publique a annonc� l’all�gement des charges sociales compens�, entre autres, par un rel�vement du taux de TVA pour accro�tre la comp�titivit� de nos entreprises et pour pr�server nos emplois.

M. Henri Emmanuelli. Il serait temps !

Mme Marie-Luce Penchard, ministre. S’agissant de l’outre-mer, je vous confirme que ce rel�vement qui est justifi� en m�tropole n’y sera pas appliqu�, comme j’ai eu l’occasion de le dire lors d’un d�placement aux Antilles ce week-end, et ce pour plusieurs raisons.

D’abord, les collectivit�s d’outre-mer, vous le savez, ont, pour certaines, un statut particulier qui ne rel�ve pas de la fiscalit� de droit commun. Ensuite, les d�partements et r�gions d’outre-mer, vous l’avez rappel�, b�n�ficient d’un syst�me d�rogatoire de taxation indirecte avec l’octroi de mer dont les modalit�s d’application sont fix�es par la loi de 2004, destin�e � prot�ger notre �conomie locale.

Par ailleurs, ces d�partements b�n�ficient d’ores et d�j� d’all�gements de charges sociales, en particulier par le biais de la loi d’orientation pour le d�veloppement �conomique de l’outre-mer que le Parlement a vot�e en 2009.

Ces mesures sont destin�es � soutenir et d�velopper les activit�s des entreprises ultramarines et � prot�ger l’emploi. En cons�quence, l’application de la mesure gouvernementale d’all�gement des charges sociales n’aurait pas d’effets �conomiques outre-mer. C’est pourquoi au regard de ces r�gles sp�cifiques fiscales et sociales, le Gouvernement a d�cid� que la hausse de la TVA ne sera pas appliqu�e outre-mer,…

M. Jean-Pierre Brard. C’est laborieux !

Mme Marie-Luce Penchard, ministre. …et si l’on veut agir sur le pouvoir d’achat outre-mer, il faut avoir une r�flexion � l’occasion de la r�vision de l’application de l’octroi de mer.

M. Albert Facon. Personne n’applaudit !

Rapport de la Cour des comptes
sur les co�ts de la fili�re �lectronucl�aire

M. le pr�sident. La parole est � M. Gu�nha�l Huet, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Gu�nha�l Huet. Monsieur le ministre charg� de l’industrie, de l’�nergie et de l’�conomie num�rique, la Cour des comptes vient de rendre public le rapport qui lui avait �t� demand� par le Premier ministre dans un souci de transparence sur les co�ts de l’�nergie nucl�aire.

Le sujet faisant pol�mique depuis longtemps, il �tait n�cessaire de disposer de chiffres aussi pr�cis que possible afin de ne pas laisser le sentiment d’une opacit�, voire d’une volont� d�lib�r�e de ne pas afficher l’ensemble des co�ts de la fili�re nucl�aire, depuis la construction des centrales jusqu’au retraitement des d�chets, en passant par les charges d’exploitation, les co�ts de maintenance et de prolongation des r�acteurs, les co�ts de recherche, les co�ts de transport de l’�lectricit� produite, les co�ts des garanties en responsabilit� civile d’EDF et, enfin, les co�ts de d�mant�lement des centrales.

Pour l’essentiel, la Cour des comptes reconna�t qu’il n’y a pas de co�ts dissimul�s. Elle souligne toutefois l’importance des inconnues financi�res et techniques sur plusieurs des points pr�c�demment cit�s.

Ainsi, selon la Cour des comptes, il faudrait multiplier par deux les investissements pour maintenir la production � son niveau actuel, ce qui augmenterait m�caniquement les co�ts de 10 %. Plus largement, la Cour estime que la France n’a plus les moyens de renouveler son parc de centrales, ce qui imposerait, selon elle, de faire durer nos r�acteurs au-del� de quarante ann�es.

Elle �voque la possibilit� de faire appel aux �nergies renouvelables, ce qui est d’ailleurs conforme au Grenelle de l’environnement qui pr�voit de porter � 23 % leur part dans la production d’�lectricit�, � l’horizon 2020.

Monsieur le ministre, la France a besoin de l’�nergie nucl�aire. Il appara�t que nos voisins allemands ont beaucoup de difficult�s � g�rer les cons�quences de leur d�cision de sortie du nucl�aire. Pouvez-vous nous indiquer les conclusions que tire le Gouvernement de ce rapport ?

M. le pr�sident. La parole est � M. �ric Besson, ministre charg� de l’industrie, de l’�nergie et de l’�conomie num�rique.

M. �ric Besson, ministre charg� de l’industrie, de l’�nergie et de l’�conomie num�rique. Monsieur le d�put�, vous avez raison de souligner que la Cour des comptes a �labor� un rapport de qualit�, objectif, qui fournit des �l�ments d’appr�ciation tr�s int�ressants.

Il a abouti � une premi�re conclusion : il n’y a pas de co�ts cach�s. � celles et ceux qui parlaient d’omerta, d’opacit�, la Cour r�pond clairement qu’il n’existe aucune source de d�penses non identifi�es. Tous les co�ts ont �t� int�gr�s, y compris les d�penses publiques de recherche.

Deuxi�me conclusion : la Cour insiste sur la n�cessit� de pr�ciser le co�t du d�mant�lement et de la gestion des d�chets. Nous avons d�j� lanc� plusieurs audits en ce sens. Les premiers r�sultats seront connus avant la fin de cette ann�e. La Cour indique clairement qu’il n’y aura pas d’augmentation importante du co�t du kilowattheure du fait de ces audits.

Troisi�me conclusion : m�me si l’on int�gre les �ventuelles r��valuations point�es par la Cour, le co�t de l’�lectricit� nucl�aire restera extr�mement comp�titif. Le prix du m�gawatheure est de 42 euros. Avec une augmentation de 10 %, voire de 12 %, il atteindrait 46 euros � 49 euros : dans tous les cas, l’�lectricit� nucl�aire resterait, apr�s l’hydro�lectricit�, la source d’�lectricit� la moins ch�re, � comparer avec l’�nergie �olienne – 75 euros � 80 euros le m�gawatheure – ou avec l’�nergie solaire – 200 euros le m�gawatheure.

Pour l’avenir, les choses sont simples. Il y a la politique que nous pr�conisons, qui allie efficacit� �nerg�tique, d�veloppement des �nergies renouvelables et poursuite du programme nucl�aire, notamment avec l’EPR, le r�acteur de troisi�me g�n�ration, plus s�r que ceux de deuxi�me g�n�ration. Il y a une autre politique qui, en pr�conisant le d�mant�lement de la fili�re du retraitement et l’arr�t de vingt-quatre r�acteurs nucl�aires sur cinquante-huit, aboutirait � la perte de la comp�titivit� fran�aise. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Plans sociaux dans l’industrie textile

M. le pr�sident. La parole est � M. Pascal Terrasse, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Pascal Terrasse. Ma question s’adresse � M. le ministre charg� de l’industrie, de l’�nergie et de l’�conomie num�rique. Je ne reviendrai pas sur les propos qu’il vient de prononcer, lesquels sont, � mon avis, en dehors de la r�alit�. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Apr�s une succession d’annonces de plans sociaux en France, c’est au tour de l’Ard�che de subir l’�pouvantable choc d’un plan social massif : le groupe Chomarat vient de d�cider d’engager un plan pr�voyant 182 suppressions de postes sur un site comptant 690 salari�s.

Avec mon coll�gue Jean-Jack Queyranne et les �lus locaux, nous avons mis en place des politiques d’accompagnement et des actions de sauvegarde de l’emploi. La p�rennisation de l’emploi dans ce territoire fragile est un enjeu majeur.

L’entreprise Chomarat, qui a b�n�fici� d’aides publiques, se trouve aujourd’hui confront�e � une situation �conomique difficile. Pourtant, cette holding dispose d’une tr�sorerie importante.

Face � cette situation dramatique, d’un point de vue �conomique comme social, chacun doit prendre ses responsabilit�s.

D’abord, il importe que l’�tat accompagne le maintien de l’outil industriel par des mesures �conomiques. Monsieur le ministre, avez-vous encore une strat�gie industrielle pour notre pays ? L’�tat doit �galement encourager des mesures d’�ge, quand cela est possible. Les salari�s de Lejaby � Yssingeaux, mais aussi au Teil et � Bourg-en-Bresse, le demandent. L’�tat doit �galement contribuer � maintenir des activit�s menac�es d’�tre d�localis�es dans des pays low cost.

Ensuite, il importe que les collectivit�s locales prennent toutes les mesures n�cessaires. Je souhaite que le Gouvernement fasse de m�me et qu’il prenne toutes les mesures � m�me d’all�ger le prix que paient injustement les salari�s � cause d’une politique qui a conduit � fermer en trois ans 880 sites industriels et � mettre au ch�mage 100 000 personnes.

Quelles mesures comptez-vous prendre, monsieur le ministre, pour enrayer le massacre �conomique que subissent nos r�gions ?

M. Franck Gilard. La nationalisation ?

M. Pascal Terrasse. Pensez-vous sinc�rement que vous allez freiner la d�sindustrialisation de la France en augmentant la TVA ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le pr�sident. La parole est � M. �ric Besson, ministre charg� de l’industrie, de l’�nergie et de l’�conomie num�rique.

M. �ric Besson, ministre charg� de l’industrie, de l’�nergie et de l’�conomie num�rique. Monsieur le d�put�, vous affirmez que ce que j’ai dit en r�ponse � la question pr�c�dente �tait faux. Vous vous �tes bien gard� d’aller plus loin, ce qui est normal : vous savez pertinemment que l’application de l’accord Verts-PS, que plus personne sur vos bancs ne d�fend, signifierait la mort pure et simple du site nucl�aire du Tricastin que nous avons en commun. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Sachez que nous sommes compl�tement mobilis�s en faveur de l’activit� textile, qui r�clame, soulignons-le au passage, une �lectricit� peu ch�re, celle que fournit notre programme nucl�aire.

Concernant le site de Chomarat, vous savez qu’un plan de sauvegarde de l’emploi portant sur 122 salari�s a �t� annonc�. Avec Xavier Bertrand, nous avons demand� aux repr�sentants du groupe de mettre en œuvre tous les dispositifs existants pour pr�server le maximum d’emplois au Cheylard. Je pense en particulier � l’activit� partielle de longue dur�e, dispositif dont le Pr�sident de la R�publique a annonc� le renforcement � la suite du sommet social du 18 janvier dernier. Nous demandons �galement � ce qu’une concertation ait lieu avec les organisations syndicales.

Concernant Lejaby, nous nous sommes battus en deux temps. Il s’est d’abord agi de sauvegarder l’entreprise elle-m�me : nous avons obtenu une offre, retenue par le tribunal de commerce de Lyon, qui concerne 195 emplois � Rillieux-la-Pape. Il s’est ensuite agi de trouver une solution pour les quatre-vingt-treize salari�s du site d’Yssingeaux, ce qui a mobilis� le Gouvernement dans son entier. Mon coll�gue Laurent Wauquiez a annonc� il y a quelques minutes que, parmi la dizaine d’offres de grande qualit� que nous avons re�ues, il y en a une qui nous para�t particuli�rement solide, celle du maroquinier Sofama, situ� dans l’Allier, partenaire du groupe LVMH : il vient de proposer de reprendre la soci�t� et de garder l’ensemble des salari�s.

Vous le voyez, monsieur le d�put�, le Gouvernement est totalement mobilis� en mati�re de politique industrielle. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Comp�titivit� des entreprises

M. le pr�sident. La parole est � M. Jean-Michel Fourgous, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Jean-Michel Fourgous. Monsieur le ministre de l’�conomie, des finances et de l’industrie, ma question porte sur la comp�titivit�. En pleine guerre mondiale �conomique (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR), il faut tout faire pour prot�ger nos emplois et nos entreprises,…

M. Philippe Briand. C’est d�cisif !

M. Jean-Michel Fourgous. …mais les vieilles recettes du pass� ne marchent plus ! (Nouvelles exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Julien Dray. Du pass� faisons table rase !

M. Jean-Michel Fourgous. Il ne s’agit plus de cr�er de l’emploi public avec de l’argent emprunt� sur les march�s. Depuis 1981, l’embauche de plus d’un million de fonctionnaires repr�sente plus de 1 000 milliards d’euros de dette, d’imp�ts et de charges suppl�mentaires pour les Fran�ais. (M�mes mouvements.) Il ne s’agit plus d’appliquer les 35 heures, principales responsables de la d�sindustrialisation de la France, ou d’augmenter l’ISF qui, accrochez-vous bien, mesdames et messieurs, a fait fuir 500 milliards d’actifs financiers hors de France en trente ans ! (M�mes mouvements.) Il ne s’agit plus, non plus, de revenir � la retraite � soixante ans, mesure qui nous a co�t� plus de 1 000 milliards d’euros de dette en trente ans ! (Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Enfin, il ne s’agit plus, comme nous le propose le parti socialiste, d’ouvrir les vannes de la d�pense publique, qui repr�sente d�j� 57 % de notre PIB, record mondial, contre moins de 47 % en Allemagne. R�sultat : les Allemands ont un taux de ch�mage de 5,5 %, alors que le n�tre est de 9,8 % ! Car, avec toutes ces mesures, nos entreprises payent 140 milliards d’euros suppl�mentaires de charges annuelles que leurs concurrentes allemandes. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Au XXIe si�cle, la priorit� des priorit�s, c’est la comp�titivit� de nos entreprises, de nos PME !

M. Albert Facon. Vous �tes au pouvoir depuis dix ans !

M. Jean-Michel Fourgous. Ce mot est totalement absent du programme socialiste. Pourtant, c’est la meilleure et la seule protection sociale des Fran�ais, la seule mani�re de prot�ger leurs emplois durablement !

Il est grand temps de choisir (� Oui ! � sur les bancs du groupe SRC) entre la hausse des d�penses publique et la cr�ation de richesse et d’emploi productif.

M. Michel M�nard. Le changement, c’est maintenant ! (Rires.)

M. Jean-Michel Fourgous. Et, je vous le rappelle, seules nos entreprises cr�ent la richesse.

Monsieur le ministre, ma question est simple : que compte faire le Gouvernement pour soutenir la comp�titivit� de nos entreprises afin de relancer la croissance et de lutter contre le ch�mage ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. — Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. le pr�sident. La parole est � M. le ministre de l’�conomie, des finances et de l’industrie.

M. Fran�ois Baroin, ministre de l’�conomie, des finances et de l’industrie. Chacun, monsieur le d�put�, conna�t votre engagement, votre implication, vos convictions en mati�re de d�veloppement de la libert� au service de la cr�ation de richesses, de l’emploi et �videmment du d�veloppement de nos entreprises.

Je vous rejoins sur un certain nombre de points, notamment sur l’id�e que la r�ponse pour 2012 ne peut passer par la relance de la d�pense publique. Plus aucun pays, que son gouvernement soit de gauche ou de droite, ne propose aujourd’hui de soutenir l’activit� �conomique par une relance de la d�pense publique. C’est un temps qui est derri�re nous : c’est la grande le�on de la crise de 2009, dont la r�plique se fait aujourd’hui sentir dans la zone euro.

M. Henri Emmanuelli. Et vous �tes cr�dible, pour parler de la crise !

M. Fran�ois Baroin, ministre. La question de l’endettement public conditionne aujourd’hui l’ensemble des politiques publiques, y compris celles qui sont au service du d�veloppement de la comp�titivit� de nos entreprises et de la cr�ation d’emplois.

M. R�gis Juanico. Redites-nous de combien est la croissance !

M. Fran�ois Baroin, ministre. Toutes les propositions qui iront dans le sens de la cr�ation d’emplois publics, de l’augmentation de la d�pense publique, iront � rebours de ce qui est n�cessaire pour coordonner, pr�server notre monnaie, garantir la stabilit� de la zone euro, relancer la croissance mondiale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Julien Dray. Comment se fait-il que la crise continue ?

M. Fran�ois Baroin, ministre. Le chemin propos� par le Gouvernement, et pr�sent� par le Pr�sident de la R�publique dimanche dernier, est un chemin qui va dans le sens que vous �voquez, c’est-�-dire…

M. Julien Dray. C’est-�-dire une impasse !

M. Fran�ois Baroin, ministre. … la comp�titivit� de notre �conomie.

Nous aurions pu choisir simplement la piste du temps de travail : elle est ouverte, dans les entreprises, avec les syndicats, avec les accords comp�titivit�-emploi. Mais nous avons choisi de nous mobiliser aussi pour faire baisser le co�t du travail. Baisse du co�t du travail, augmentation de la TVA : c’est un solde neutre, mais c’est un �l�ment de comp�titivit� puissant pour nos entreprises. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Michel M�nard. Personne n’y croit !

M. Fran�ois Baroin, ministre. Une baisse de 5 % des charges, cela aidera �videmment nos entreprises qui exportent et qui b�n�ficieront d’un co�t du travail plus faible, d’un co�t de revient moins �lev� ; cela p�nalisera naturellement les entreprises qui importent, puisqu’elles ne b�n�ficieront pas des all�gements de charges propos�s pour les entreprises de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Michel Issindou. Bla-bla-bla !

R�forme du financement de la protection sociale

M. le pr�sident. La parole est � Mme Jeanny Marc, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Mme Jeanny Marc. Madame la ministre du budget, des comptes publics et de la r�forme de l’�tat, les populations vivant outre-mer ont entendu avec beaucoup d’inqui�tude l’annonce faite par le Pr�sident de la R�publique du rel�vement de 1,6 point du taux de la TVA. Ces populations savent – et aucune �tude s�rieuse ne peut le contester – que toute augmentation de la TVA accro�t inexorablement la vuln�rabilit� des m�nages sans pour autant favoriser le d�veloppement des entreprises.

Les outre-mer, figurez-vous, ont d�j� v�cu l’exp�rience de la TVA sociale : en 1994, la loi Perben avait pr�vu un rel�vement de deux points du taux de la TVA, pass�e de 7,5 � 9,5 %. Ce pr�l�vement devait, en contrepartie, participer au financement d’exon�rations de charges sur les salaires dans certains domaines d’activit�.

Au regret de devoir doucher quelques-uns de vos espoirs, madame la ministre, nous n’avons pas, outre-mer, gard� le souvenir que cette mesure ait cr�� de l’emploi, am�lior� la comp�titivit� de nos entreprises, soutenu l’activit� ou encore favoris� l’exportation. En revanche, nous pouvons vous rappeler que cette mesure a eu des cons�quences imm�diates : la flamb�e des prix, l’augmentation du co�t de la vie et la diminution du pouvoir d’achat.

Les r�cents �v�nements sociaux ont montr� � quel point le d�licat probl�me des prix reste une question s�rieuse, qu’aucun gouvernement ne peut ignorer. Le Pr�sident de la R�publique n’a eu de cesse de nous ressasser, lors du conseil interminist�riel de l’outre-mer en 2009, que les outre-mer devaient �tre les laboratoires de la R�publique.

Puisque votre politique �conomique a �chou� outre-mer, comment pouvez-vous envisager qu’elle soit un succ�s pour le reste du territoire national ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le pr�sident. La parole est � Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la r�forme de l’�tat, porte-parole du Gouvernement.

M. Jean-Pierre Brard. Oh non ! Je pr�f�re Roselyne ! (Sourires.)

Mme Val�rie P�cresse, ministre du budget, des comptes publics et de la r�forme de l’�tat, porte-parole du Gouvernement. Mesdames et messieurs les d�put�s, madame la d�put�e, comme Marie-Luce Penchard vous l’a tr�s bien expliqu�, l’augmentation de la TVA voulue par le Pr�sident de la R�publique en contrepartie d’une baisse du co�t du travail en m�tropole ne s’appliquera pas outre-mer. En effet, des all�gements de charge y existent d�j�, selon un m�canisme tr�s particulier, d’ailleurs plus favorable que celui de la m�tropole.

Nous avons, vous le voyez, le souci constant de prot�ger l’emploi et l’activit� outre-mer...

Mme Huguette Bello. Et pourtant le ch�mage y est plus �lev� !

M. Roland Muzeau. Donc, la TVA d�truit l’emploi !

Mme Val�rie P�cresse, ministre. …et nous prenons en compte les sp�cificit�s de vos territoires et leur �loignement de la m�tropole.

Mais, madame la d�put�e, puisque vous vous souciez, � juste titre, de l’activit� et de l’emploi dans les territoires ultramarins, je vous sugg�rerai, si vous me le permettez, une autre question. Je vous proposerai de poser, � votre candidat � l’�lection pr�sidentielle, Fran�ois Hollande, une question. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Puisqu’il souhaite supprimer les niches fiscales, puisqu’il souhaite plafonner � 10 000 euros les niches de l’imp�t sur le revenu, demandez-lui s’il inclut dans ce plafonnement les niches qui concernent le logement social outre-mer et les investissements productifs outre-mer ! (M�mes mouvements.)

M. Jean Glavany. �a suffit ! On en a marre !

Mme Val�rie P�cresse, ministre. Je crois que les ultramarins attendent sa r�ponse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Hu�es sur les bancs du groupe SRC.)

Proposition de loi sur le don d’heures
de r�duction de temps de travail

M. le pr�sident. La parole est � M. Paul Salen, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Paul Salen. Monsieur le pr�sident, mes chers coll�gues, ma question – � laquelle j’associe mes coll�gues de la Loire Dino Cinieri et Fran�ois Rochebloine – s’adresse � Mme la secr�taire d’�tat aupr�s de la ministre des solidarit�s et de la coh�sion sociale.

La semaine derni�re, notre assembl�e a adopt� un texte qui prouve, une fois de plus, notre volont� constante de trouver des solutions concr�tes pour renforcer notre solidarit� nationale.

Je fais r�f�rence � la proposition de loi que j’ai port�e avec plus de 140 de mes coll�gues d�put�s et qui vise � faire don d’heures de r�duction de temps de travail ou de r�cup�ration � un parent d’un enfant gravement malade.

Depuis son adoption, j’ai re�u de tr�s nombreux t�moignages me prouvant de mani�re concr�te le bien-fond� de cette loi. Permettez-moi de vous donner lecture d’un tr�s court extrait provenant d’un m�decin ni�ois.

M. Jean-Pierre Brard et M. Michel M�nard. C’est de l’autosatisfaction !

M. Paul Salen. � Il y a un projet qui m’a particuli�rement touch�, lors de ma lecture quotidienne de la presse m�dicale, c’est le v�tre qui est tr�s humaniste. Souhaitons que votre projet se g�n�ralise rapidement, non seulement pour la fin de vie mais �galement en cas de maladie importante, lorsque des coll�gues sont pr�ts � faire don de RTT ou de jours de cong�s. �

M. Jean Glavany. Voil� qui valide les 35 heures !

M. Paul Salen. Madame la secr�taire d’�tat, nous avons lev� ici un immense espoir en direction de ces familles. Celles-ci esp�rent un vote d�finitif de ce texte pour une promulgation aussi rapide que possible. Cela suppose qu’il soit inscrit dans les meilleurs d�lais � l’ordre du jour des travaux du S�nat.

Durant les d�bats que nous avons men�s, tant en commission que dans l’h�micycle, vous avez su �couter avec cœur et conviction et enrichir la proposition initiale.

Aussi, que chacun en soit remerci�, y compris ceux qui, sur les bancs de l’opposition, ont su faire taire les clivages pour que soit adopt�e une loi fid�le aux principes humanistes de la R�publique.

Pour toutes ces familles qui attendent, je souhaiterais que vous nous pr�cisiez vos intentions quant � l’inscription en urgence de ce texte � l’ordre du jour du S�nat. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le pr�sident. La parole est � Mme la secr�taire d’�tat aupr�s de la ministre des solidarit�s et de la coh�sion sociale.

Mme Marie-Anne Montchamp, secr�taire d’�tat aupr�s de la ministre des solidarit�s et de la coh�sion sociale. Monsieur le d�put�, la semaine derni�re, l’Assembl�e nationale a en effet adopt� une proposition de loi que vous avez port�e et surtout �labor�e � la lumi�re d’une magnifique solidarit�.

Dans le d�partement de la Loire, � Saint-Galmier, des salari�s de l’entreprise Badoit ont fait le don de 170 jours de RTT…

M. R�gis Juanico. Merci les 35 heures !

Mme Marie-Anne Montchamp, secr�taire d’�tat. …� l’un de leurs coll�gues pour qu’il puisse accompagner son fils, Mathis, en fin de vie.

Ce formidable �lan de solidarit�,…

Plusieurs d�put�s du groupe SRC. Gr�ce aux 35 heures !

Mme Marie-Anne Montchamp, secr�taire d’�tat. …vous l’avez inscrit dans ce texte, recevant le soutien de 140 de vos coll�gues.

Le groupe UMP et le groupe Nouveau Centre ont adopt� cette proposition de loi qui apporte, dans notre protection sociale et dans notre code du travail, un dispositif compl�mentaire du cong� de solidarit� familiale et du cong� de soutien familial. C’est une avanc�e consid�rable de la solidarit�.

M. Jean-Paul Lecoq. Cela exon�re les patrons !

Mme Marie-Anne Montchamp, secr�taire d’�tat. Je forme le vœu que la majorit� nouvelle du S�nat ne fera pas obstacle, pour des raisons doctrinales ou id�ologiques, (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) � ce qui constitue une avanc�e sociale et de solidarit�. Je crains que nos compatriotes qui attendent ne le comprennent pas.

Monsieur le d�put�, je le r�p�te, je soutiens, au nom du Gouvernement, cette avanc�e consid�rable que vous avez port�e et je vous en remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

R�forme du financement de la protection sociale

M. le pr�sident. La parole est � M. Jacques Valax, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Jacques Valax. � Quand les hommes ne peuvent changer les choses, ils changent les mots �, disait Jean Jaur�s.

M. Jean Auclair. Pourquoi ne pas citer Staline, pendant que vous y �tes ?

M. Jacques Valax. C’est ce que l’on pourrait dire aujourd’hui de l’attitude des membres de votre Gouvernement dont les gesticulations de fin de mandature ne peuvent faire oublier les choix d�sastreux qui ont creus� le d�ficit public.

Un exemple est r�v�lateur de votre comportement, celui de la TVA. Le rel�vement de cette taxe est une mesure antisociale. C’est une attaque en r�gle contre les classes populaires et moyennes. Elle ruinera leur pouvoir d’achat en leur faisant supporter toute la charge financi�re de leur protection sociale. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Richard Malli�. Vous ne savez m�me pas compter !

M. Jacques Valax. Cette TVA antisociale n’est rien d’autre qu’une augmentation massive des imp�ts pour les m�nages. Elle ne cr�era pas d’emplois.

Je rappelle ici que la suppression des cotisations patronales, pour ceux qui touchaient entre 1 et 1,6 SMIC, n’a pas r�duit le ch�mage puisque la France compte aujourd’hui 1 million de ch�meurs suppl�mentaires…

M. Richard Malli�. Si on ne l’avait pas fait, qu’est-ce que cela donnerait aujourd’hui ?

M. Jacques Valax. …et que les emplois agricoles ne sont pas concern�s.

Comment, d�s lors, expliquer aux 5 millions de ch�meurs et aux 8 millions de personnes qui vivent avec moins de 880 euros par mois que votre mesure anti�conomique va cr�er des emplois ?

Nous savons tous qu’un �tat strat�ge et fort doit investir dans la recherche, l’innovation, et accompagner les investissements lourds des PME et des artisans. Or vous n’avez eu de cesse que de casser et le r�le et l’image de l’�tat.

Vous devriez m�diter cette phrase de Talleyrand (� Ah ! � sur les bancs du groupe UMP) : � Les financiers ne font bien leurs affaires que lorsque l’�tat les fait mal �. Votre �tat a mal fait les affaires !

M. Dominique Dord. Ridicule !

M. Jacques Valax. Monsieur le Premier ministre, ne pensez-vous pas que Fran�ois Hollande, � qui vous avez adress� beaucoup de questions aujourd’hui, a raison quand il dit que l’augmentation de la TVA est inopportune, injuste, infond�e et improvis�e ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Claude Goasguen. Talleyrand, mod�le de Fran�ois Hollande !

M. le pr�sident. La parole est � Mme la ministre du budget, des comptes publics…

M. Jean Glavany. Du ch�mage !

M. le pr�sident. …et de la r�forme de l’�tat, porte-parole du Gouvernement.

Mme Val�rie P�cresse, ministre du budget, des comptes publics et de la r�forme de l’�tat, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le d�put�, vous pr�sentation est tronqu�e et donc volontairement trompeuse.

Vous parlez de la hausse de la TVA, mais vous oubliez de dire pourquoi elle est n�cessaire. L’�tat ne mettra pas un seul euro sans sa poche.

M. Jean Glavany. Cette mesure n’en est que plus idiote !

Mme Val�rie P�cresse, ministre. La hausse de la TVA vient compenser la baisse du co�t du travail.

Visiblement, vous aimez les bons auteurs. Savez-vous qui a dit : � La taxation du travail constitue probablement un facteur d�favorable au d�veloppement de l’emploi dans notre pays � ?

M. Henri Emmanuelli. Confucius ? (Sourires.)

Plusieurs d�put�s du groupe UMP. Hollande ?

Mme Val�rie P�cresse, ministre. C’�tait Lionel Jospin (� Oh ! � sur les bancs du groupe UMP), pour justifier la commande d’un rapport � l’�conomiste Malinvaud sur l’�volution des cotisations patronales. Qui �tait ministre du travail et de l’emploi, � l’�poque ? Martine Aubry ! (� Oh ! � sur les bancs du groupe UMP.)

Oui, vous avez command� des rapports sur le r�le pervers des cotisations patronales. Pour notre part, nous allons les baisser et, pour vous expliquer pourquoi, je prendrai un exemple. En raison du co�t du travail, les producteurs fran�ais et �trangers de voiture sont tous int�ress�s pour aller produire hors de France et r�importer ensuite leur production pour que les Fran�ais l’ach�tent.

M. Michel M�nard. Merci, madame � Je sais tout � !

Mme Val�rie P�cresse, ministre. Cela d�truit de l’emploi en France. Ainsi, nous avons perdu 500 000 emplois industriels…

Plusieurs d�put�s du groupe SRC. Non, 100 000 !

Mme Val�rie P�cresse, ministre. …et notre balance commerciale est d�ficitaire.

Nous allons donc baisser le co�t du travail…

M. Michel M�nard. Pourquoi ne l’avez-vous pas fait avant ?

Plusieurs d�put�s du groupe SRC. Dix ans !

Mme Val�rie P�cresse, ministre. …afin de diminuer le co�t des produits en France, et nous allons taxer les importations pour que les producteurs fran�ais et �trangers aient int�r�t � cr�er de l’emploi en France. Voil� ce que nous allons faire, et qui n’est pas ce que vous d�crivez. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Visite d’�tat du pr�sident Ouattara

M. le pr�sident. La parole est � M. Jean-Louis Christ,…

M. Jean Mallot. Mon Dieu !

M. le pr�sident. …pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Jean-Louis Christ. Monsieur le ministre d’�tat, ministre des affaires �trang�res et europ�ennes, huit mois apr�s son installation � la pr�sidence de la C�te-d’Ivoire, Alassane Ouattara a effectu� la semaine derni�re sa premi�re visite officielle en France.

Rappelons que, pendant pr�s de dix ans, les Ivoiriens ont �t� priv�s d’�lections et, durant ces longues ann�es, la France n’a pu d�velopper ces liens historiques, culturels…

M. Jean-Paul Lecoq. Et financiers !

M. Jean-Louis Christ. …et �conomiques qu’elle entretenait avec la patrie du pr�sident Houphou�t-Boigny.

Au terme d’une grave crise politique, le pr�sident Ouattara a �t� �lu d�mocratiquement. Il repr�sente aujourd’hui le choix libre des Ivoiriens et peut faire reposer son action sur la l�gitimit� du suffrage universel.

M. Marc Dolez. N’en rajoutez pas trop !

M. Jean-Louis Christ. Homme de courage et de consensus, le nouveau pr�sident n’a eu de cesse de multiplier ses efforts pour r�concilier le peuple ivoirien dans la reconstruction de son pays et de le remettre sur le chemin de l’unit� et de la concorde avec cette ambition : assurer la s�curit� pour chacun et asseoir durablement la d�mocratie et le progr�s.

Cette visite repr�sente le symbole d’une relation nouvelle entre la C�te-d’Ivoire et la France.

Fort de ce que la France est le premier partenaire �conomique de la C�te-d’Ivoire et fort de nos liens historiques avec ce pays, le Pr�sident de la R�publique fran�aise a propos� de nouer un partenariat exemplaire et �quilibr� entre nos deux nations.

Dans cet esprit, il a assur� le pr�sident Ouattara de la solidarit� de la France et de son plein appui face aux nombreux d�fis que la C�te-d’Ivoire s’engage � relever, notamment la lutte contre la pauvret�, le red�marrage �conomique et le renforcement de l’�tat de droit.

Lors de cette visite, plusieurs accords ont �t� sign�s et des partenariats nou�s.

Dans ce contexte, pouvez-vous, monsieur le ministre d’�tat, nous indiquer quel bilan vous dressez de ces entrevues et quelles perspectives se pr�sentent d�sormais pour la C�te-d’Ivoire ? Enfin, comment la France compte-t-elle soutenir le pr�sident Ouattara et son �quipe dans la reconstruction de leur pays ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le pr�sident. La parole est � M. le ministre d’�tat, ministre des affaires �trang�res et europ�ennes.

M. Alain Jupp�, ministre d’�tat, ministre des affaires �trang�res et europ�ennes. Monsieur le d�put�, chacun se souvient, dans cette assembl�e, de la situation de la C�te-d’Ivoire il y a un an : le pays �tait au bord de la guerre civile.

� l’occasion de la visite d’�tat du pr�sident Ouattara, du 24 au 27 janvier, nous avons pu mesurer le chemin parcouru. Et si la C�te-d’Ivoire est aujourd’hui repartie dans la bonne direction, si elle se reconstruit, on le doit en grande partie � la sagesse du pr�sident Ouattara et � son esprit de r�conciliation.

Le Pr�sident de la R�publique l’a donc assur� du soutien de la France dans trois domaines.

Politique, tout d’abord : nous avons avec la C�te-d’Ivoire un dialogue constant sur tous les sujets bilat�raux mais aussi sur les questions r�gionales car ce pays y joue un r�le important.

En mati�re de s�curit�, ensuite, nous avons sign� un nouveau trait� de d�fense qui remplace celui de 1961. Ce nouveau trait� est enti�rement public et ne contient donc aucune clause secr�te. Et tous les �l�ments fran�ais qui seront maintenus en C�te-d’Ivoire auront pour seule mission d’aider ce pays dans le secteur de la formation.

Enfin, en mati�re de partenariat �conomique, des liens �troits existent entre nos entreprises et les entreprises ivoiriennes. Des r�unions ont eu lieu en ce sens. Le Pr�sident de la R�publique a confirm� un engagement tr�s fort de la France : un contrat de d�sendettement-d�veloppement, portant sur 2 milliards d’euros, permettra � la C�te-d’Ivoire de r�aliser un certain nombre de ses priorit�s. L’Agence fran�aise de d�veloppement est �galement pr�sente sur le terrain.

Ce qui ce passe en C�te-d’Ivoire est pour moi l’occasion de saluer le nouveau cours de la politique fran�aise en Afrique : nous avons refondu la quasi-totalit� de nos accords de d�fense, resserr� nos liens avec l’Afrique anglophone et lusophone ; enfin, nous soutenons partout les processus de d�mocratisation.

L’Afrique sera le continent �mergent du XXIe si�cle et la France y jouera tout son r�le. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Pouvoir d’achat

M. le pr�sident. La parole est � M. Guy Delcourt, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

M. Guy Delcourt. Madame la ministre du budget, des comptes publics et de la r�forme de l’�tat, Jean-Paul Delevoye, membre influent de l’UMP, pr�sident du Conseil �conomique, social et environnemental, estime aujourd’hui entre 12 � 15 millions le nombre de personnes qui, en fin de mois, sont en d�ficit de 50 � 150 euros.

�tienne Pinte, d�put� UMP des Yvelines et pr�sident du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvret� et l’exclusion sociale, confirme que les r�sultats ne sont pas � la hauteur des besoins des publics les plus d�favoris�s.

Ces propos qui �manent d’�lus de la majorit� pr�sidentielle sont sans �quivoque quant � l’action du Pr�sident de la R�publique dans ce domaine. Plut�t que d’honorer sa promesse d’octobre 2007 � la suite de laquelle il demandait � votre gouvernement de r�duire d’au moins un tiers la pauvret� durant son quinquennat, il a privil�gi� le monde de la finance aux d�pens des 8 millions de Fran�ais victimes de la pr�carit�.

Les chiffres parlent d’eux-m�mes et dressent un triste bilan de votre action. � titre d’exemple : 25 % des travailleurs ne gagnent que 750 euros par mois. Que dire de ceux qui sont au ch�mage ? Et – on n’en parle pas assez – pr�s d’un quart des jeunes femmes isol�es vivent sous le seuil de pauvret�.

Ces derniers jours ont de nouveau d�montr� l’urgence � agir. Les moins riches des Fran�ais d�pensent 40 % de leur budget � se loger dans le secteur priv�. Les sans-abris sont toujours plus nombreux � chercher un toit pour la nuit. Et les queues s’allongent aux points de distribution de repas mis en place par les associations humanitaires oblig�es de compenser les absences d’un �tat qui ne peut � la fois nourrir les banquiers et les pauvres. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Claude Goasguen. �a suffit !

M. Guy Delcourt. Et l’on peut penser que la situation va se d�t�riorer avec la taxation des mutuelles de sant�, la r�duction des indemnit�s pour les accident�s du travail, avec le nouveau tour de vis touchant les retrait�s et les assur�s sociaux ou encore avec la TVA sociale.

Face � ce constat accablant, madame la ministre, soyez moins arrogante avec vos le�ons de sinc�rit� et d’honn�tet� que vous rab�chez ici m�me � l’adresse des �lus de la gauche ! (Vives protestations sur les bancs du groupe UMP.) Qui a �chou� ? Vous-m�mes, la majorit� parlementaire, Nicolas Sarkozy, ou les trois ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le pr�sident. La parole est � Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la r�forme de l’�tat, porte-parole du Gouvernement.

Mme Val�rie P�cresse, ministre du budget, des comptes publics et de la r�forme de l’�tat, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le d�put�, je ne partage absolument pas votre diagnostic. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Pierre Brard. Quelle surprise !

Mme Val�rie P�cresse, ministre. Jamais un Gouvernement n’a autant fait pour les plus fragiles des Fran�ais. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Nous avons fait un v�ritable bouclier social qui s’appelle le revenu de solidarit� active. Nous l’avons d’ailleurs mis en place avec quelqu’un qui n’�tait pas de la majorit� pr�sidentielle, Martin Hirsch,…

M. Jean-Paul Bacquet. Qui est all� � la soupe !

Mme Val�rie P�cresse, ministre. …qui est venu nous aider parce qu’il croyait que c’�tait un beau projet, un projet social, une avanc�e sociale. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Claude Goasguen. Souhaitez-vous donc le supprimer, chers coll�gues de l’opposition ?

Mme Val�rie P�cresse, ministre. Une �valuation ind�pendante r�cente nous r�v�le que, gr�ce au RSA, 150 000 de nos compatriotes sont sortis du seuil de pauvret�.

Plusieurs d�put�s du groupe SRC. Et les autres ?

Mme Val�rie P�cresse, ministre. Alors reconnaissez-le, monsieur Delcourt !

Par ailleurs, les minima sociaux ont augment� de mani�re in�dite pendant ce quinquennat. Nous avons augment� le minimum vieillesse de 25 %. C’�tait l’engagement du Pr�sident de la R�publique, nous l’avons tenu. (Exclamations continues sur les bancs du groupe SRC.) Nous avons augment� de 25 % l’allocation d’adulte handicap�. C’�tait l’engagement du Pr�sident de la R�publique, il a �t� tenu. Nous avons augment� de 37 % les d�penses de protection sociale du budget de l’�tat.

Jamais les filets de protection sociale n’ont �t� aussi fort dans notre pays, jamais, monsieur le d�put�. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Et vous seriez bien en peine de trouver un seul dispositif qui aurait �t� sacrifi� par le Gouvernement, car il n’y en a pas eu ! Nous avons lutt� contre le ch�mage (Nouvelles exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) et nous continuerons avec la baisse du co�t du travail parce que l� o� vous avez raison, monsieur le d�put�, c’est que le ch�mage est la premi�re source de pr�carit�. Et pour lutter contre le ch�mage, il faut baisser le co�t du travail, il faut conclure des accords de comp�titivit�, il faut encourager l’activit� partielle. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

M. le pr�sident. Nous avons termin� les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la s�ance

M. le pr�sident. La s�ance est suspendue.

(La s�ance, suspendueseize heures, est repriseseize heures vingt.)

M. le pr�sident. La s�ance est reprise.

2

Mise en œuvre du principe de pr�caution

Discussion d’une proposition de r�solution

M. le pr�sident. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de r�solution d’Alain Gest et Philippe Tourtelier relative � la mise en œuvre du principe de pr�caution (n� 4008).

Discussion g�n�rale

M. le pr�sident. Dans la discussion g�n�rale, la parole est � M. Alain Gest.

M. Alain Gest. Monsieur le pr�sident, madame la ministre de l’�cologie, mes chers coll�gues, le d�bat que nous ouvrons est la cons�quence de la d�cision de notre Comit� d’�valuation et de contr�le, que vous pr�sidez, monsieur le pr�sident, de retenir, comme premier sujet de son premier programme de travail 2009-2010, le th�me de l’�valuation de la mise en œuvre de l’article 5 de la Charte de l’environnement, relatif au principe de pr�caution. Cinq ans apr�s l’entr�e en vigueur de la Charte, le moment �tait en effet venu de juger de l’effectivit� de sa disposition phare : le principe de pr�caution.

Nomm�s co-rapporteurs par le Comit� d’�valuation et de contr�le, Philippe Tourtelier et moi-m�me avons d’abord men� une s�rie d’auditions aupr�s de juristes, de scientifiques, de repr�sentants de la soci�t� civile, d’organismes publics, de philosophes, d’entreprises, et je pourrais poursuivre la liste. Nous avons �galement b�n�fici� de nombreux travaux concernant la mise en œuvre du principe de pr�caution. Cette premi�re approche a �t� compl�t�e par un s�minaire parlementaire organis� le 1er juin 2010, sur la base d’un rapport d’�tape dans lequel nous nous �tions volontairement cantonn�s � poser un certain nombre de questions, afin de faire r�agir les participants au d�bat. Ce travail nous a conduits � quelques constats.

En premier lieu, aucun de nos interlocuteurs n’a clairement souhait� remettre en cause l’existence du principe de pr�caution, qui vous est cher, madame la ministre. Nous avons donc fid�lement tir� les conclusions de cette situation en repoussant d’embl�e l’id�e d’une abrogation ou m�me d’une modification de l’article 5 de la Charte de l’environnement. Je tiens � le r�affirmer ici sans ambigu�t�, car certains, ext�rieurs � cette assembl�e, ont soit parce qu’ils ne s’�taient pas livr�s � une lecture suffisamment attentive du rapport, soit parce qu’ils avaient d�cid� de faire croire � de telles conclusions, nous ont fait ce mauvais proc�s.

En revanche, la plupart des contributions re�ues nous ont fait part de la n�cessit� de rendre plus claire, donc plus efficiente l’utilisation du principe.

Deux aspects devaient � l’�vidence �tre pris en compte.

D’abord, le principe de pr�caution est invoqu� le plus souvent dans des cas tr�s �loign�s de sa d�finition constitutionnelle, notamment dans le domaine sanitaire, que le l�gislateur, je le rappelle, n’avait pas retenu comme domaine d’application de la Charte constitutionnelle. Les exemples pour illustrer cette situation ne manquent pas, ne serait-ce que durant la p�riode de nos travaux : par exemple, la suspension des vols des avions de ligne � la suite de l’�ruption du volcan islandais ou la grippe H1N1.

Dans le premier cas, le risque �tait � l’�vidence av�r�, en raison du danger pour les avions de voler dans un nuage opaque. Le risque �tait �galement av�r� dans le second cas dans la mesure o� chacun sait que, s’il peut y avoir doute sur l’intensit� du risque dans le cas de la propagation d’un virus, il n’y en a pas sur l’existence de ce risque ni sur la r�ponse � apporter, � savoir vacciner.

Dans aucun de ces deux cas, le principe de pr�caution n’�tait concern�, mais le grand public, les m�dias, voire les pouvoirs publics, confondaient pr�caution et pr�vention, c’est-�-dire risque non av�r� et risque r�ellement connu. Premier travers, donc, du principe de pr�caution : la terminologie employ�e, tr�s souvent inadapt�e et � l’origine des critiques port�es � l’encontre de l’existence m�me du principe.

Dans le rapport de suivi que le Comit� d’�valuation et de contr�le nous a demand� de r�aliser pour juger de la mise en œuvre des conclusions de notre premier rapport, nous avons �t� amen�s � constater d’autres utilisations inappropri�es du principe de pr�caution.

Ce fut le cas, d’abord, de la question pos�e par la m�thode de prospection des gaz et huiles de schiste. Ce sujet qui, de mon point de vue personnel – je n’engage pas mon co-rapporteur –, a �t� abord� dans la plus extr�me confusion, o� l’�motionnel a pr�valu sur le rationnel, a de nouveau mis en lumi�re la difficult� de distinguer entre pr�vention et pr�caution, selon que les uns et les autres consid�raient le risque comme av�r� ou non, s’agissant de la m�thode dite de fracturation hydraulique. L’avenir nous montrera sans doute que le Parlement se serait honor� de prendre le recul n�cessaire avant de condamner, sans doute d�finitivement, un �l�ment non n�gligeable de l’ind�pendance �nerg�tique de notre pays.

Ensuite, l’affaire du Mediator a mis en exergue l’int�r�t de l’utilisation du principe de pr�caution, donc de l’�valuation en termes de b�n�fices-risques, en mati�re m�dicale.

Par ailleurs, le d�bat sur les �ventuels dangers pour la sant� du t�l�phone mobile et de ses antennes relais, que j’avais pu �tudier dans le cadre d’un rapport pour l’Office parlementaire d’�valuation des choix scientifiques et technologiques, m’avait aussi alert� sur les difficult�s, pour la jurisprudence, de bien interpr�ter la volont� du l�gislateur en mati�re de pr�caution. N’est-il pas curieux de constater qu’en France, alors m�me que l’absence de risques li�s aux antennes relais r�unit un quasi-consensus scientifique, c’est justement dans ce domaine que les cours d’appel de Versailles, en 2009, et de Montpellier, en 2010, ont rendu des d�cisions visant � d�manteler des antennes relais, en se fondant sur un unique rapport dont le caract�re authentiquement scientifique n’est pas reconnu, et en s’appuyant sur le principe de pr�caution ? D�cisions judiciaires contestables, absence de jurisprudence de la Cour de cassation, divergences d’appr�ciation des juridictions judiciaires et administratives, notamment du Conseil d’�tat, tout cela concernant les antennes relais mais en aucun cas la question plus l�gitime de l’exposition � long terme aux t�l�phones mobiles eux-m�mes, et s’ins�rant dans un contexte m�diatique qui rend, l� encore, tr�s difficile une appr�ciation rationnelle de la probl�matique du risque �ventuel pour la sant�.

Outre que le principe de pr�caution est invoqu� le plus souvent de fa�on inappropri�e, il n’est pas mis en œuvre de fa�on raisonn�e, r�fl�chie et organis�e. C’est la raison pour laquelle nous avons consid�r�, pour � la fois en faciliter l’utilisation et davantage �clairer les juges, qu’il convenait d’imaginer une proc�dure en plusieurs �tapes, encadrant son usage tant dans le domaine environnemental que sanitaire. Il nous a sembl� indispensable de renforcer la valeur des expertises permettant d’identifier le caract�re plausible ou non des risques incertains, de mieux appr�cier la notion de b�n�fices-risques, sous l’angle scientifique, bien s�r, mais aussi soci�tal, de mieux organiser de d�bat public et de laisser � un op�rateur unique le soin de contribuer � la prise de d�cision, du seul ressort des autorit�s publiques.

La premi�re phase de cette proc�dure est celle de l’identification de l’�mergence de nouveaux risques pour l’environnement, la sant� publique ou la s�curit� alimentaire. Cette identification serait confi�e � une instance que nous avons jug� pouvoir �tre le Comit� de la pr�vention et de la pr�caution, qui a le m�rite d’exister, ce qui nous �vite de cr�er un nouvel organisme, et qui pourrait �tre utilis� sous r�serve de la modification de sa composition et, sans doute, de son caract�re, qui devrait devenir interminist�riel.

Le Comit� de la pr�vention et de la pr�caution pourrait �tre saisi par le Gouvernement, par le Parlement et par le Conseil �conomique, social et environnemental. D�s lors qu’il aurait identifi� un risque plausible, il d�signerait un r�f�rent unique qui rendrait compte publiquement de la mise en œuvre du r�gime de pr�caution. Ce r�f�rent susciterait une double expertise, scientifique et soci�tale, contradictoire et ind�pendante. Son rapport devrait faire �tat des co�ts et b�n�fices de l’action ou de l’absence d’action. � l’issue de l’expertise, le r�f�rent soumettrait aux autorit�s comp�tentes les �l�ments n�cessaires � l’organisation d’un d�bat public, dont il serait �galement charg� de rendre publics les r�sultats.

C’est � l’issue de ce processus que les pouvoirs publics seraient appel�s � d�cider des mesures � prendre. La proc�dure comporterait donc quatre phases : identification, �tudes, d�bat public et d�cision de l’autorit� comp�tente. Elle serait, � nos yeux, susceptible d’�viter les difficult�s de mise en œuvre du principe de pr�caution. Ces quatre phases ont pour objectif de d�montrer que le principe de pr�caution a toujours �t� entendu non comme un principe d’inaction syst�matique mais comme l’encadrement de mesures provisoires et proportionn�es au regard des dommages envisag�s ; elles offrent aussi l’opportunit� de proposer des expertises qui permettent de mieux conna�tre les risques.

Mes chers coll�gues, nous avons souhait�, avec cette proposition de r�solution, expliciter la position de notre assembl�e sur les conditions proc�durales de mise en oeuvre du principe de pr�caution. Il s’agit ni plus ni moins d’un guide, d’un outil pour rendre le principe efficient et �clairer la jurisprudence. Il nous a sembl� important de ne pas mettre sur le m�me plan experts et parties prenantes, car nous croyons n�cessaire la r�habilitation de l’expertise, m�me s’il faut avoir la volont� d’associer la soci�t� civile � la proc�dure. Mais il nous a surtout paru indispensable qu’une initiative parlementaire soit prise pour r�pondre aux interrogations encore � lever. Cette r�solution prendrait toute sa force dans un vote unanime, auquel je ne peux que vous convier. Plus tard peut-�tre, dans un contexte plus �loign� d’�ch�ances �lectorales, la proposition de loi dont Philippe Tourtelier et moi-m�me sommes les initiateurs, qui d�finit le principe de pr�caution dans le domaine de sant�, compl�terait donc utilement un dispositif plus op�rationnel de mise en œuvre du principe de pr�caution.

Mes chers coll�gues, voter cette r�solution, c’est tout simplement conforter le principe de pr�caution. Voil� pourquoi j’ai confiance dans votre d�cision.

(Mme Catherine Vautrin remplace M. Bernard Accoyer au fauteuil de la pr�sidence.)

Pr�sidence de Mme Catherine Vautrin,
vice-pr�sidente

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Philippe Tourtelier.

M. Philippe Tourtelier. Madame la pr�sidente, madame la ministre, mes chers coll�gues, je vous prie par avance de m’excuser pour certaines redites apr�s l’intervention d’Alain Gest, mais outre le fait qu’elles t�moigneront de notre accord profond sur la proposition de r�solution, elles sont n�cessaires pour les lecteurs �ventuels qui ne prendraient connaissance que de mon intervention. (Sourires.)

La pr�occupation de plus en plus affirm�e de notre assembl�e de ne pas s’en tenir au vote de la loi, mais de proc�der aussi au contr�le de l’application des lois a amen� le Comit� d’�valuation et de contr�le des politiques publiques et son pr�sident, Bernard Accoyer, � nous confier, � Alain Gest et � moi-m�me, une mission sur l’�valuation de la mise en oeuvre de l’article 5 de la Charte de l’environnement relatif � l’application du principe de pr�caution, depuis son introduction dans la Constitution en 2005.Rappelons-nous en effet nos d�bats de l’�poque � partir des propositions de la commission Coppens, d�bats souvent transpartisans, mais aussi parfois simplificateurs, aboutissant alors � se positionner pour ou contre le principe de pr�caution, ind�pendamment du contexte de son application.

Six ans apr�s, nous avons donc auditionn� de nombreux protagonistes de ce domaine, des chercheurs, des chefs d’entreprise, bref tous ceux qui ont �t� confront�s � ce nouvel environnement constitutionnel. Nous avons vu �merger de nouveau les questions sous-jacentes au principe de pr�caution : le risque, la recherche, le progr�s, l’expertise, la responsabilit�, la place de la soci�t� civile, la justice, et j’en passe. Avant de r�diger notre rapport, nous avons souhait� confronter nos premi�res conclusions � des avis qui nous semblaient autoris�s, lors d’un s�minaire parlementaire r�uni le 1er juin 2010, avec deux tables rondes r�unissant scientifiques, philosophes, repr�sentants de l’administration, repr�sentants de la soci�t� civile, sociologues, �conomistes – la liste n’est pas exhaustive. Enfin, nous l’avons r�dig� d�finitivement, faisant des propositions au gouvernement, et l’avons pr�sent� au CEC le 8 juillet 2010.

Quelles en �taient les principales conclusions ?

Tout d’abord, �voquons le contexte. Nous avons constat� que si, dans le droit international, le principe de pr�caution est une r�f�rence encore �mergente, dans le droit europ�en, qui s’impose � notre droit, il est pr�sent, d�fini et s’applique dans trois domaines : l’environnement, la sant� et la s�curit� des consommateurs. Qu’en est-il en France ? Quatre constats nous ont paru essentiels.

Le premier, Alain Gest vient de le rappeler, c’est qu’aucun de nos interlocuteurs – m�me les plus r�ticents � l’�gard du principe de pr�caution – ne nous a propos� de faire marche arri�re et de l’enlever de la Constitution. Le risque de st�rilisation de la recherche a bien s�r �t� �voqu�, mais jamais constat� – sauf momentan�ment sur les organismes g�n�tiquement modifi�s et certaines biotechnologies, suite au d�bat sur les OGM. Mais certains chercheurs ont l’impression d’avoir une �p�e de Damocl�s suspendue au-dessus de leur t�te en raison des incertitudes entourant l’application du principe de pr�caution.

Le deuxi�me constat, Alain Gest l’a aussi �voqu�, c’est l’extr�me confusion sur le sens m�me du principe de pr�caution, tr�s souvent confondu avec le principe de pr�vention par les m�dias, l’opinion publique et m�me les politiques au plus haut niveau. Cela s’explique d’ailleurs par la langue fran�aise : quand on applique le principe de pr�vention, pour �viter l’arriv�e de ce que l’on redoute et que l’on conna�t, l’usage courant est de � prendre ses pr�cautions �, ce qui ne favorise pas en effet la clarification. Mais une telle attitude de prudence dans une situation de pr�vention ne doit pas �tre confondue avec le principe de pr�caution.

Troisi�me constat : le principe de pr�caution introduit dans la Constitution via la Charte de l’environnement est d’abord invoqu� dans le domaine de la sant�, beaucoup plus que dans celui de l’environnement.

Le dernier constat s’explique dans ce contexte : des jurisprudences divergentes, rappel�es par Alain Gest, nous renvoient nous, l�gislateurs, � nos insuffisances dans l’�nonc� de la loi.

Suite � ces constats, non pas de remise en cause du principe de pr�caution mais de confusion dans son approche, nous avons fait, conform�ment � la loi, des propositions au Gouvernement, qu’Alain Gest a rappel�es. Elles ont pour objet de r�pondre � des enjeux qui nous apparaissent essentiels et sur lesquels je voudrais insister.

Le principal enjeu, c’est l’humanisme, dont je rappelle la d�finition selon Le petit Robert : � Th�orie, doctrine qui prend pour fin la personne humaine et son �panouissement. � Il s’agit en fait de la croyance dans la capacit� des femmes et des hommes de d�velopper leurs potentialit�s individuelles et collectives. Le principe de pr�caution est au coeur de l’humanisme du XXIe si�cle car il tente de concilier deux dimensions : la croyance au progr�s et la responsabilit�. La croyance au progr�s, issue de l’humanisme de la Renaissance et du si�cle des Lumi�res, a largement favoris� l’�mergence des sciences, sur laquelle se sont appuy�s essor technologique et d�veloppement, mais avec les effets pervers que l’on conna�t et qui am�nent certains � rejeter l’id�e m�me de progr�s et donc l’humanisme.

Or ne confondons pas la science, c’est-�-dire le progr�s dans la connaissance, avec la technologie, qui est l’usage que l’on fait de cette connaissance. Ainsi, un marteau peut aussi bien servir � aider un voisin � construire sa maison qu’� le tuer. Faut-il pour autant interdire le marteau ? D’ailleurs, dans le domaine de la sant�, on constate que les technologies efficaces ne sont pas remises en cause. Personne ne demande la suppression de la production de l’insuline par les OGM, alors qu’on peut l�gitimement s’interroger sur le syst�me �conomique induit par les OGM en agriculture. De m�me, les recherches sur les nanomat�riaux visant � cr�er des nanovecteurs permettant de transporter la mol�cule qui gu�rit sur la cellule canc�reuse ne sont pas remises en cause, alors qu’on peut douter de l’int�r�t de prendre des risques avec les nanoparticules d’argent pour d�sodoriser les chaussettes quand on sait qu’on retrouvera ces nanoparticules dans l’eau potable.

L’humanisme, ce n’est pas la technologie, c’est le d�veloppement de la connaissance de l’homme sur lui-m�me et sur ce qui l’entoure. Ne nous laissons pas aveugler par le sentiment que cette connaissance serait d�j� bien avanc�e : nous ne sommes pas au bout de la science, nous n’en sommes qu’aux pr�mices. Les fronti�res entre les disciplines scientifiques sont de plus en plus floues, en particulier dans l’infiniment petit, et notre rapport au vivant risque d’�tre boulevers� dans le si�cle qui commence.

Quand on voit les possibilit�s qui apparaissent dans la construction du vivant, ou dans sa reconstruction en cas de d�g�n�rescence, faut-il s’interdire toute recherche porteuse de progr�s sous pr�texte qu’elle est aussi porteuse de risques potentiels ? La question n’est pas nouvelle, et la r�ponse ne rel�ve pas d’abord de la science mais de la morale, c’est-�-dire de ce qui caract�rise l’homme parmi les �tres vivants. Mais la r�ponse morale ne peut �tre trouv�e au d�triment de cette autre sp�cificit� humaine qu’est notre aspiration � la science, c’est-�-dire � la connaissance. Il nous faut concilier les deux. D�s le XVIe si�cle, Rabelais, un des premiers humanistes, � la fois scientifique – puisqu’il �tait m�decin – et litt�raire, l’avait compris lorsqu’il �crivait : �Science sans conscience n’est que ruine de i’�me. �

En effet, la responsabilit� est la deuxi�me dimension essentielle de l’humanisme, celle qui doit emp�cher un d�veloppement incontr�l� de techniques qui serait n�faste pour l’humanit�. Le principe de pr�caution est au coeur de cette articulation entre progr�s scientifique et responsabilit�, puisqu’il concerne aussi les g�n�rations futures et ne s’applique que s’il y a incertitude scientifique. Dans le cas d’une incertitude scientifique, qui a la l�gitimit� pour repr�senter les g�n�rations futures ? Personne ; ou plut�t chacun d’entre nous, tout le monde. C’est pourquoi, dans l’application du principe de pr�caution que nous proposons, il est indispensable d’instaurer un d�bat avec la soci�t�, de plus en plus m�fiante vis-�-vis des experts et de la science car elle n’a pas l’occasion de s’exprimer sur ces sujets. Toute d�couverte scientifique, si elle est un progr�s dans la connaissance, n’en est pas forc�ment un dans ses applications technologiques : la m�decine nucl�aire ne peut faire oublier la bombe atomique. Dans Le Monde du 28 janvier dernier, St�phane Foucart commente un ouvrage collectif r�cemment publi�, La science et le d�bat public, notant � les dangers d’une soci�t� scientifique en ce qu’elle menace parfois de nous faire tendre vers l’oligarchie �, mais rappelant aussi � l’importance de la science dans le maintien de la d�mocratie en ce qu’elle permet de construire l’esprit rationnel du citoyen �.

L’application du principe de pr�caution telle que nous la proposons, si elle devient un mode op�ratoire assimil� par tous, et cela peut prendre du temps, participe de cette d�marche d�mocratique permettant des d�bats plus sereins et moins �motionnels, en rappelant que la pr�caution n’est pas la pr�vention, en pr�cisant ce qu’est un lanceur d’alerte, une alerte plausible, l’incertitude scientifique, en d�finissant l’expertise comme �tant l’�tat de la science � un instant donn�, avec ses divers points de vue. Le d�bat scientifique sera replac� dans son contexte soci�tal, pr�sent et futur, avec une appr�ciation collective des risques et des avantages. Ainsi, on peut esp�rer que les d�cisions � provisoires et proportionn�es � prises par les pouvoirs publics seront mieux comprises, en particulier leur caract�re provisoire li� � la r�duction �ventuelle de l’incertitude scientifique gr�ce � l’acc�l�ration de la recherche li�e au principe de pr�caution. On pourra d�s lors r�concilier la soci�t� civile et l’expertise autour du principe de pr�caution.

Enfin, si le principe de pr�caution est invoqu� devant la justice, la recherche en responsabilit� ne se fera plus seulement sur un tri plus ou moins subjectif de l’avocat ou du juge parmi les �tudes scientifiques �voqu�es au proc�s, tri pour lequel ils n’ont ni l’un ni l’autre aucune comp�tence particuli�re, ce qui explique � la fois les quelques jurisprudences contradictoires et le peu de recours explicite � ce principe. En revanche, le juge pourra exercer son contr�le sur le respect de la proc�dure de mise en oeuvre du principe de pr�caution telle que nous la proposons.

L’application du principe de pr�caution propos�e dans notre r�solution nous para�t ainsi susceptible de lever beaucoup d’ambigu�t�s et de r�introduire le d�bat politique au sens noble du terme, celui de la cit�, dans le d�bat scientifique.

Au d�but du mois de janvier, l’Acad�mie des sciences et l’Acad�mie de m�decine, saisies de la proposition de r�solution, ont relev� quelques points sur lesquels il y a lieu d’apporter des pr�cisions utiles.

Mme la pr�sidente. Il faut conclure, mon cher coll�gue.

M. Philippe Tourtelier. M. le pr�sident de l’Assembl�e m’ayant demand� d’�voquer ces points, si vous me laissez une minute, madame la pr�sidente, je pourrai r�pondre � sa requ�te.

Mme la pr�sidente. Dans un �lan de bont�, je vous accorde une minute suppl�mentaire.

M. Philippe Tourtelier. Je vous en remercie.

Il ne fait aucun doute que le r�f�rent ind�pendant mentionn� au premier alin�a de l’article unique devra �tre dot� d’une solide protection juridique, sinon il se trouvera peu de candidats. De m�me, l’instance charg�e d’identifier les risques plausibles devra �tre rattach�e au Premier ministre car ses comp�tences pr�sentent un caract�re interminist�riel manifeste, nous l’avons montr� dans l’expos� des motifs. Enfin, la lecture de l’alin�a 14 ne doit pas susciter d’ambigu�t� : il n’y est nullement question de m�langer l’expertise scientifique et l’expression de la soci�t� civile ; elles ont chacune leur l�gitimit�, mais ne sont pas de m�me nature.

Cela dit, il reste des questions difficiles en suspens, par exemple dans le domaine de la sant� o� le principe de pr�caution se pose aussi de fa�on individuelle : il peut exister une incertitude sur la fa�on dont tel ou tel patient r�agira � tel ou tel m�dicament. C’est alors dans le dialogue entre le m�decin et le patient qu’est abord�e la question risques-avantages. Mais le principe de pr�caution individuel peut se heurter � des actions collectives de pr�vention, telle une campagne de vaccination. Faut-il rendre celle-ci obligatoire au m�pris du principe de pr�caution individuel ou la laisser facultative au risque d’�tre collectivement inefficace en multipliant ainsi le danger individuel ? Le probl�me de la gestion individuelle ou collective du risque, autrement dit du rapport entre libert� individuelle et s�curit� collective, n’est d’ailleurs pas propre � notre discussion d’aujourd’hui.

En conclusion, je rappelle que notre proposition de r�solution n’a pas la pr�tention de r�pondre � toutes les questions pos�es par le principe de pr�caution. Elle se veut le reflet des suggestions que nous ont faites un certain nombre d’acteurs que nous avons consult�s et qui r�fl�chissent � ce sujet depuis une dizaine d’ann�es. Outre la lev�e des incertitudes juridiques, elle a d’abord pour ambition de r�affirmer que le principe de pr�caution, bien appliqu�, est la clef pour �viter un divorce entre la science et nos concitoyens. C’est pourquoi je vous invite, comme Alain Gest, � l’adopter. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Alain Gest. Tr�s bien !

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Andr� Chassaigne.

M. Andr� Chassaigne. Madame la ministre, mes chers coll�gues, je voudrais tout d’abord souligner la qualit� du travail men� depuis plusieurs ann�es par les rapporteurs de ce texte, qui ont souhait� traduire leur r�flexion sur la mise en application du principe de pr�caution dans une proposition de r�solution.

En prolongement des diff�rents travaux de l’Office parlementaire d’�valuation des choix scientifiques et technologiques, le Comit� d’�valuation et de contr�le des politiques publiques de l’Assembl�e nationale, qui s’est saisi de cette th�matique d�s 2009, a permis aux rapporteurs d’avoir une vision d’ensemble des difficult�s pos�es par l’inscription de ce principe dans notre loi fondamentale, notamment au travers des conclusions du rapport d’information de 2010.

La r�vision constitutionnelle introduisant la Charte de l’environnement dans notre Constitution est entr�e en vigueur le 1er mars 2005. Le principe de pr�caution, mentionn� et d�fini � l’article 5 de la Charte, avait fait l’objet, lors de l’examen de la loi constitutionnelle par le Parlement au printemps 2004, de d�bats nourris traduisant des appr�ciations tr�s diff�rentes sur la port�e de ce principe constitutionnel, ses limites et la capacit� qu’aurait la puissance publique � le mettre en application en rapport avec tous les risques potentiels touchant � notre environnement.

Tout en d�fendant l’inscription de ce principe dans la Constitution, je m’�tais � l’�poque longuement exprim�, en d�fendant une motion de renvoi en commission, sur le fait que la r�daction de cet article 5 de la Charte de l’environnement nourrissait beaucoup d’incertitudes. Je pr�cisais certes que la constitutionnalisation de ce principe marquait � la reprise en main du politique, dont le silence avait laiss� les juges trop souvent d�munis devant leur obligation de dire le droit et de pr�ciser la port�e juridique d’un principe �mergent en droit national comme en droit communautaire. � Mais je relevais aussi que la r�daction de l’article 5 � renvoyait l’application directe du principe de pr�caution � la justice, sans l’encadrer suffisamment au pr�alable �. Seule la justice �tait donc � m�me de pr�ciser les conditions de sa mise en œuvre, d�poss�dant la repr�sentation nationale de la facult� d’arr�ter les modalit�s d’application, alors m�me que l’autorit� judiciaire ne pouvait se pr�valoir de la l�gitimit� d�mocratique des �lus et que ses comp�tences scientifiques �taient � la fois limit�es et in�gales d’une juridiction � l’autre.

Le travail des rapporteurs, sept ans plus tard, revient � ces interrogations initiales � la lumi�re des conditions d’application – ou souvent d’invocation – du principe de pr�caution par tous ceux qui cherchent un d�bouch� r�glementaire � une probl�matique environnementale ou de sant�.

L’article 5 devait encadrer � la fois l’expertise et la gestion des risques par les autorit�s publiques, mais cela n’a pas �t� le cas et le juge judiciaire continue de construire sa doctrine sans forc�ment respecter l’esprit du texte constitutionnel.

Le principe de pr�caution est devenu une sorte de parapluie � la fois pour tous ceux qui �voquent la probabilit� de risques environnementaux ou de sant� qui devraient �tre anticip�s et pour les autorit�s, qui le substituent � bon compte au principe de pr�vention, en installant une confusion entre risque potentiel et risque av�r�, quitte � donner le primat � l’�motion et � l’irrationalit�.

Partant de ce constat, la proposition de r�solution se fixe essentiellement pour objectif de d�finir une m�thodologie pour l’identification et la mise en place du principe de pr�caution en cr�ant une instance nouvelle qui serait charg�e � une fois l’�mergence d’un risque hypoth�tique analys�e comme plausible, de d�signer un r�f�rent ind�pendant, pilotant la mise en œuvre du r�gime de pr�caution �. C’est l’objet du premier point.

Les huit autres points de la proposition pr�cisent le contenu du travail d’expertise que devra effectuer le r�f�rent, les principes qui doivent r�gir son action, la n�cessit� d’ouvrir sur la base des �l�ments fournis aux autorit�s comp�tentes un d�bat public et d’aboutir � des mesures proportionn�es au niveau de risque.

Sur l’ensemble des propositions pr�sent�es, je ferai quatre remarques pour exprimer des r�serves quant � l’int�r�t et � la port�e de ce texte.

Premi�rement, il me semble toujours plus facile, devant un probl�me de fond qui se pose au l�gislateur, de cr�er une �ni�me structure ad hoc charg�e de le conseiller ou d’�mettre des avis.

Cela me rappelle les d�bats sur le projet de loi relatif aux organismes g�n�tiquement modifi�s, et la cr�ation du Haut conseil des biotechnologies, cens� faire la lumi�re sur les risques potentiels de la diffusion de chaque organisme dans l’environnement. Ce conseil a eu toutes les peines du monde � fonctionner correctement, faute de moyens suffisants d’abord, mais aussi en raison de la primaut� accord�e aux avis du comit� scientifique par rapport aux recommandations du comit� �conomique, �thique et social. Cela conduit encore actuellement � l’�mission d’avis qui ne tiennent pas suffisamment compte de dispositions l�gislatives pourtant tr�s clairement d�finies, comme c’est le cas pour l’application du fameux et excellent amendement n� 252 qui pr�cise : � La mise en culture, la commercialisation et l’utilisation ne peuvent se faire que dans le respect des structures agricoles, des �cosyst�mes locaux, et des fili�res de production et commerciales qualifi�es "sans organismes g�n�tiquement modifi�s", et en toute transparence. �

La composition et les modalit�s d’organisation de la nouvelle structure font aussi in�vitablement l’objet de critiques, quels que soient les principes d’ind�pendance ou d’autonomie avanc�s pour la justifier, car nous touchons l� � des probl�mes majeurs. N’oublions pas que la science n’est pas homog�ne et que le champ scientifique subit des influences comme tous les autres, qu’il n’est pas hors la soci�t�. Les disciplines scientifiques sont soumises � une rude concurrence, voire au client�lisme, ce qui influe sur les moyens octroy�s : certaines re�oivent plus que d’autres, et certains domaines sont ignor�s alors qu’ils pourraient offrir de fortes perspectives d’am�lioration des connaissances.

C’est ainsi que l’�cotoxicologie – dont j’avais longuement parl� lors du Grenelle de l’environnement – n’a toujours pas la place que devrait lui conf�rer une politique de recherche ambitieuse dans le domaine de l’environnement et de la relation entre sant� et environnement. D’autres exemples concernent des choix de recherche internes � des domaines disciplinaires ou la volont� de scl�roser certaines recherches.

� la lumi�re de cette exp�rience, je crois qu’il ne faut pas voir la cr�ation d’un comit� ou d’un haut conseil comme la planche de salut pour lever les ambigu�t�s auxquelles l’application d’un principe constitutionnel expose directement le l�gislateur et la puissance publique.

Ma deuxi�me r�serve porte sur le caract�re complexe de ces propositions qui pr�voient deux niveaux de d�l�gation : l’instance charg�e d’identifier l’�mergence d’un risque nouveau ; le r�f�rent ind�pendant charg� de conduire l’expertise. Cette m�canique me semble d’autant plus complexe, que le texte ne pr�cise pas sous quelle tutelle agiraient cette nouvelle instance et les r�f�rents qu’elle d�signerait.

Ma troisi�me r�serve tient aux cons�quences de cette organisation sur le travail de la repr�sentation nationale. Indirectement, ne s’agit-il pas de limiter nos propres capacit�s d’expertise et de d�cision en confiant � cette structure toute interrogation autour du principe de pr�caution dans un domaine donn� ? Quelle place sera r�serv�e � nos commissions d’enqu�te et � nos rapports d’information ?

Ma derni�re r�serve tient � un constat : les limites du d�bat d�mocratique quand les autorit�s charg�es de mettre en place des d�bats publics se fondent sur les seuls �l�ments transmis par des r�f�rents dits comp�tents, avec le risque de privil�gier, dans notre syst�me marchand, l’int�r�t d’une certaine vision �conomique sous l’habillage d’une analyse co�ts-avantages. Nous avons besoin de donner toute sa place � une d�marche alliant les savoirs techno-scientifiques � la pluralit� des analyses provenant de savoirs non techniques.

M. Philippe Tourtelier. C’est exactement ce que nous proposons !

M. Andr� Chassaigne. � mon sens, cela implique de ne pas permettre � un comit� d’experts de tout cadenasser � l’avance. Les fameux d�bats publics sont souvent des leurres d�mocratiques utilisant les arguments d’autorit� des experts dits officiels, faisant eux-m�mes �cho aux arguments avanc�s par des groupes d’int�r�t puissants.

Pourquoi ne pas imaginer de nouvelles d�marches comme celle des conventions de citoyens, en partant d’exp�riences d�j� conduites dans de nombreux pays ? Ne soyons pas dupes d’une confrontation scientifique par�e de toutes les vertus de transparence et d’ind�pendance, alors qu’en r�alit� elle ne s’extrairait pas des rapports de force qui se font jour dans ces instances. Cela exige aussi de donner � la recherche publique, notamment � la recherche fondamentale, des moyens � la hauteur des enjeux.

Pour toutes ces raisons, bien que nous partagions de nombreux �l�ments de constat relevant de la difficile application du principe de pr�caution dans notre pays, notre groupe s’abstiendra dans le vote sur cette proposition de r�solution.

M. Alain Gest. Oh !

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’�cologie, du d�veloppement durable, des transports et du logement. Vraiment, monsieur Chassaigne ?

M. Andr� Chassaigne. Je pr�cise qu’il s’agit du groupe des d�put�s communistes, citoyens et du parti de gauche, et que j’en suis le porte-parole.

M. Philippe Tourtelier. C’�tait laborieux !

Mme la pr�sidente. La parole est � Mme Genevi�ve Fioraso.

Mme Genevi�ve Fioraso. Madame la pr�sidente, madame la ministre, chers coll�gues, cette proposition de r�solution fait suite au rapport d’information tr�s complet r�alis� par Philippe Tourtelier et Alain Gest en juin 2010, dans le cadre de la mission d’�valuation et de contr�le de la mise en œuvre des dispositions de la loi constitutionnelle de 2005 relatives au principe de pr�caution.

Ce rapport et le d�bat parlementaire qui l’a accompagn� ont confirm� l’int�r�t du principe de pr�caution qui, il faut le rappeler, concerne les risques potentiels, c’est-�-dire les risques de risques, les risques av�r�s relevant de la pr�vention et non pas de la pr�caution.

M. Jean Mallot. Tr�s bien !

Mme Genevi�ve Fioraso. Il est important de rappeler ce qui semble une �vidence, tant il y a eu d’interpr�tations erron�es de ce principe, qui reste un principe d’action puisqu’il oblige, par des recherches compl�mentaires, � r�duire les incertitudes et � mettre en œuvre des proc�dures d’�valuation des risques.

Par ailleurs, ce n’est pas un moratoire puisque le principe de proportionnalit� donne � l’�tat la responsabilit� de mettre en place les mesures provisoires et r�visables les plus adapt�es, en pesant les int�r�ts en pr�sence : impact sur l’environnement, seul champ th�oriquement concern� par la loi de 2005 ; mais aussi cons�quences sur l’innovation, l’�conomie, les avanc�es de la science et les risques et b�n�fices soci�taux, dans une approche �quilibr�e.

Tout cela, c’�tait l’esprit de la loi de 2005.

Dans la r�alit� des saisines et des jurisprudences depuis 2005, que s’est-il exactement pass� ? Pourquoi cette loi et m�me la r�solution que nous prenons aujourd’hui suscitent-elles tant d’inqui�tudes chez les chercheurs et les industriels, qui craignent de prendre du retard par rapport � d’autres pays, mais aussi dans une partie de la population, qui assimile volontiers risque potentiel et risque av�r� et qui a largement perdu confiance dans l’expertise scientifique, comme l’indiquent de r�centes �tudes ?

M. Alain Gest. Exact !

Mme Genevi�ve Fioraso. Ajoutons � cela le r�le jou� par les m�dias, qui abordent ces sujets � l’occasion de dysfonctionnements, r�els ou non, dans un climat charg� �motionnellement, ce qui n’encourage pas la s�r�nit� n�cessaire � des d�bats souvent complexes et ce qui accentue les peurs face � des avanc�es scientifiques et technologiques de plus en plus rapides.

L’exp�rience de ces six ann�es montre que la jurisprudence a de facto �largi le cadre initial puisque le contentieux porte majoritairement sur les questions d’urbanisme et de sant�. Elle souligne aussi l’absence de r�f�rent et de coordinateur du dispositif du principe de pr�caution, et donc la pr�dominance de la jurisprudence.

L’exemple le plus flagrant est fourni par la Cour d’appel de Versailles qui, le 4 f�vrier 2009, a d�cid� de surseoir � l’installation d’une antenne relais, au motif d’un trouble anormal de voisinage, en fondant sa d�cision non pas sur le risque sanitaire ou une quelconque expertise, mais sur l’angoisse ressentie par les plaignants face � l’impossibilit� d’obtenir la garantie d’une absence totale de risque sanitaire. Cette interpr�tation extensive pourrait d’ailleurs s’appliquer � de nombreux �quipements consid�r�s comme g�nants – voitures, industrie, �oliennes, camions – et engendrer des exc�s faciles � imaginer.

Compar� � d’autres pays d�velopp�s, le n�tre reste en retrait dans le domaine des biotechnologies, des cellules souches, des OGM. Dans ce contexte, il est n�cessaire de bien pr�ciser le cadre mais aussi de rendre cr�dible le recours au principe de pr�caution, en am�liorant sa gouvernance et son champ d’application.

Cette r�solution vise � cr�er un r�f�rent ind�pendant, dont il faudra pr�ciser les caract�ristiques dans les d�bats li�s au principe de pr�caution pour �viter que ce dernier ne soit r�gul� par une jurisprudence forc�ment al�atoire et parfois incoh�rente.

Cette r�solution va, je l’esp�re, r�tablir l’�tat d’esprit qui a pr�sid� � l’inscription dans la Constitution du principe de pr�caution comme principe d’action. Elle me para�t donc bienvenue et je la soutiens. Cependant, pour �viter de nouveaux dysfonctionnements et ne pas retarder le d�veloppement de notre recherche, de notre industrie, des progr�s sanitaires, sociaux et environnementaux, je me permets d’insister sur quelques points que le r�f�rent devra approfondir.

Premier point : r�tablir la cr�dibilit� de l’expertise, en l’ouvrant aux sciences humaines et sociales, en favorisant la pluralit� de l’expression et en distinguant l’expertise scientifique de l’expertise soci�tale.

Deuxi�me point : hi�rarchiser les risques, en les mettant en perspective et en favorisant une approche b�n�fices/risques, prenant aussi en compte l’impact �conomique et la cr�ation d’emplois.

Troisi�me point : am�liorer l’environnement de la prise de d�cision en d�veloppant la culture scientifique et technique d�s le plus jeune �ge, en finan�ant les �tudes en �pid�miologie, bios�curit�, bios�ret�, �co-toxicologie, en parall�le aux travaux de recherche et en s’engageant � publier les r�sultats de ces �tudes de fa�on compr�hensible, en toute transparence. Nous avons les technologies qui le permettent.

Quatri�me point : r�introduire la science et la technologie dans le discours des politiques et des m�dias, de fa�on responsable et partag�e.

Cinqui�me point : tenir compte du caract�re tr�s �volutif des domaines nouveaux et tr�s prometteurs pour leurs applications, comme la biologie de synth�se, et pr�voir des �valuations transparentes, cr�dibles et r�actualis�es r�guli�rement.

Enfin, d�velopper des lieux de dialogue pluralistes et d�centralis�s, � l’image de ce qui a �t� organis� au Royaume-Uni par la Royal Society dans les r�gions, avec des experts, des citoyens et des m�dias pr�alablement form�s, sur un domaine �mergent et sensible : la biologie de synth�se. Ces �changes ont permis un d�bat �clair� et serein, qui a donn� lieu � des recommandations. Nous avons de bonnes pratiques � d�velopper en France � partir de ces exp�riences r�ussies, en impliquant davantage l’Office parlementaire d’�valuation des choix scientifiques et technologiques, sous-utilis� dans le d�bat national organis� � propos des nanotechnologies, un d�bat qui – c’est un euph�misme – n’a pas �t� tr�s r�ussi.

C’est bien cette culture du projet partag� qu’il nous faut d�velopper en toute transparence, en identifiant les risques potentiels et en faisant tout pour les �viter, sachant que le risque z�ro n’existe pas. Je souhaite vivement que cette r�solution nous aide � y parvenir, en toute transparence et en toute s�r�nit�, avec un pilote cr�dible dans l’avion et une responsabilit� partag�e par le plus grand nombre. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Christophe Bouillon.

M. Christophe Bouillon. Madame la pr�sidente, madame la ministre, mes chers coll�gues, c’est avec le m�me enthousiasme que ceux qui m’ont pr�c�d� � la tribune que je prends la parole pour d�fendre l’adoption de la proposition de r�solution de nos coll�gues Alain Gest et Philippe Tourtelier sur la mise en œuvre du principe de pr�caution.

Ce texte a pour objet de r�affirmer et de pr�ciser la volont� du l�gislateur en mati�re de mise en œuvre du principe de pr�caution, t�che qui se r�v�le n�cessaire au vu du travail produit ces derni�res ann�es par notre assembl�e, notamment par son Comit� d’�valuation et de contr�le des politiques publiques, mais �galement au vu de la production scientifique, associative, citoyenne autour du principe de pr�caution.

Nous devons en effet, en tant que l�gislateurs, veiller en permanence � rester au contact des �volutions de la soci�t�. Or celle-ci est marqu�e, depuis un certain nombre d’ann�es d�j�, par des bouleversements technologiques, techniques et scientifiques qui appellent � la vigilance.

Cette vigilance ne se fonde pas sur des pr�jug�s. Elle trouverait plut�t son origine, si vous me permettez ce d�tour philosophique, dans le concept aristot�licien de phron�sis d�velopp� dans l’�thique � Nicomaque, que certains auteurs traduisent par � prudence � ou par � sagacit� �, voire par � sagesse pratique �. Cette phron�sis doit permettre � l’homme de choisir ce qui lui para�t juste, de mani�re rationnelle, dans des circonstances et des moments, tous diff�rents, qui comportent une part d’incertitude, une part d’impr�visible. C’est tout le sens de la r�solution qui nous est pr�sent�e aujourd’hui : permettre au l�gislateur d’appliquer ce principe de prudence ou de sagacit� � des situations toujours nouvelles o� l’impr�visible et l’incertitude rendent difficile l’application du droit.

Ce principe de prudence renouvel�, red�fini � la lumi�re de l’�valuation faite par le Comit� d’�valuation et de contr�le de la mise en œuvre du principe de pr�caution tel qu’inscrit � l’article 5 de la Charte de l’environnement, doit permettre de r�pondre � de nombreux enjeux dans un contexte particulier.

N’oublions pas, en effet, que les bouleversements technologiques qui marquent notre soci�t� depuis quelques ann�es ont rendu les citoyens plus vigilants car plus inform�s, ce qui est une tr�s bonne chose. Nous avons aujourd’hui, peut-�tre plus qu’hier, � rendre des comptes � de v�ritables citoyens-acteurs qui, lorsqu’une question scientifique vient � faire son entr�e dans le d�bat public, s’informent, recoupent leurs sources, s’int�ressent et posent de v�ritables questions.

L’heure n’est donc plus aux choix obscurs, faisant l’�conomie d’explications. L’heure est, au contraire, � des d�marches publiques et transparentes.

C’est tout le sens de cette r�solution qui rel�ve le d�fi de l’application, dans notre pays, d’un principe de pr�caution mani� de fa�on claire et transparente via un r�f�rent ind�pendant, qu’il faut en effet pr�ciser et d�finir.

L’application de ce principe de pr�caution sera le fruit d’une v�ritable expertise scientifique contradictoire, qui prendra en compte le plus vaste champ de variables en utilisant, pour y parvenir, des m�thodes d’analyse d’ordre social ou �thique incontestables. Elle se traduira dans les faits par des mesures proportionn�es de protection, qui nous mettront ainsi � l’abri de toute perte de chance dans le domaine du progr�s scientifique.

Le principe de pr�caution s’inscrira dans la dur�e. Il sera appliqu� tant que le doute ne sera pas lev�, tant que les travaux scientifiques demeureront incomplets, impr�cis ou non concluants. Aussi, mes chers coll�gues, en votant la r�solution propos�e par nos coll�gues Alain Gest et Philippe Tourtelier, nous demandons que notre pays r�affirme, dans un contexte particulier, dans une �poque de changement constant, sa volont� de g�rer s�rieusement tous les risques et, ainsi, de remplir efficacement son devoir de protection de tous nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la pr�sidente. La parole est � Mme Anny Poursinoff.

Mme Anny Poursinoff. Madame la pr�sidente, madame la ministre, chers coll�gue, en tant qu’�cologiste, je suis bien �videmment favorable � l’application du principe de pr�caution.

On ne regrettera jamais assez que ce principe n’ait pas �t� appliqu� d�s que les risques li�s � l’utilisation de l’amiante ont �t� observ�s. C’�tait, je le rappelle, en 1906.

Aujourd’hui, vingt ans apr�s la conf�rence de Rio, force est de constater que m�me la pr�vention de l’aggravation du r�chauffement climatique n’est pas encore une r�alit�. Alors, que dire du principe de pr�caution que nous aurions d� appliquer pour assurer le devenir de notre plan�te et l’avenir des g�n�rations futures ?

Le principe de pr�caution doit s’appliquer de mani�re large et ouverte, en faisant appel � l’expertise mais aussi au d�bat d�mocratique. J’ai d�j� pu le dire dans le rapport sur les cr�dits de la sant� que je vous ai pr�sent�, et j’y reviendrai.

Il ne faut cependant pas invoquer ce principe en vain. Ma coll�gue s�natrice Marie-Christine Blandin l’a dit avant moi : l’invoquer, par exemple, pour justifier l’achat de millions de doses de vaccins contre la grippe H1N1 n’�tait pas justifi�. En revanche, le principe de pr�caution devrait s’appliquer pour les adjuvants et les conservateurs utilis�s dans les vaccins, notamment l’aluminium.

Le principe de pr�caution aurait d� s’appliquer concernant l’industrie nucl�aire. Ceux qui pr�nent de mettre en balance les risques avec ce qu’ils appellent � les co�ts �conomiquement acceptables � doivent admettre aujourd’hui que le calcul �tait erron� depuis le d�part puisque personne n’est en mesure de chiffrer les co�ts du d�mant�lement et du traitement des d�chets. Les id�ologues, aujourd’hui, sont du c�t� des pro-nucl�aire, pas du c�t� des �cologistes. Ces derniers proposent des solutions pragmatiques pour sortir de cette �nergie dangereuse, on�reuse et sans avenir.

Quant � l’int�gration de la sant� dans le champ de la pr�caution, elle me semble aller de soi. Je le dis d’autant plus volontiers que j’ai insist� sur la n�cessit� de la pr�caution dans le rapport sur la pr�vention et la s�curit� sanitaire que je vous ai remis, chers coll�gues, au mois de novembre dernier.

En effet, sant� et environnement sont �troitement li�s ; on le voit dans bien des domaines, qu’il s’agisse des pesticides, des perturbateurs endocriniens ou de la pollution atmosph�rique.

D’autres questions appellent notre attention ; je pense aux OGM en agriculture et � la limitation des ondes �lectromagn�tiques. Elles ne sont pas r�serv�es � l’expertise scientifique : elles impliquent l’ensemble de la soci�t�.

C’est la raison pour laquelle le d�bat d�mocratique est essentiel. C’est la raison pour laquelle des d�bats contradictoires et des conf�rences de consensus sont indispensables.

Pour que le principe de pr�caution s’applique, il faut aussi une recherche publique ind�pendante et mieux financ�e, comme vient de le r�affirmer notre coll�gue Andr� Chassaigne.

Il faut encore que l’expertise soit mieux valoris�e dans la carri�re des chercheurs et que le r�le des lanceurs d’alerte soit reconnu. Les exemples de chercheurs qui ont subi ou subissent des discriminations ou des sanctions sont nombreux. La reconnaissance du statut de lanceur d’alerte et la protection qu’il conf�re sont donc essentielles. Sans tomber dans une soci�t� de la psychose, il faut bien reconna�tre que, face � de nouveaux risques, les proc�dures ne peuvent pas �tre d�finies � l’avance. Les alertes sont souvent informelles. C’est la raison pour laquelle il faut aussi savoir �couter les personnes de bonne foi qui d�tectent des risques �mergents.

Si cette r�solution a pour objectif d’encourager r�ellement le d�bat public, elle contribuera alors � remplir les exigences d�mocratiques qui doivent �tre les n�tres. Cependant, il ne faudrait pas, sous couvert d’une �valuation du principe de pr�caution ou de son encadrement, donner des moyens � ceux qui voudraient continuer � mettre sur le march� des substances ou des produits hasardeux. Les �cologistes seront absolument vigilants sur ce point.

Le pr�sident Accoyer s’est inqui�t� d’une h�morragie de nos savoir-faire et de nos cerveaux scientifiques que pourrait, selon lui, entra�ner une trop large application du principe de pr�caution. Je crois qu’il se trompe, car le principe de pr�caution peut, au contraire, �tre un formidable acc�l�rateur de l’innovation, une v�ritable stimulation pour la recherche.

La comp�titivit� ne se construit pas sur des innovations � risque pour l’environnement et la sant�, car la r�paration, quand elle est possible, co�te davantage, et sur des fonds publics. La vraie comp�titivit�, c’est plut�t de concevoir des produits sains et recyclables, ou encore d’investir dans les �nergies renouvelables plut�t que dans le nucl�aire, technologie archa�que et gouffre financier.

Le principe de pr�caution, c’est se donner les moyens du changement maintenant, pour mieux assumer nos responsabilit�s � long terme. C’est bien ce � quoi nous aspirons dans les mois � venir.

Cela implique notamment de prendre la responsabilit� de choix �nerg�tiques courageux, en particulier de tourner le dos au nucl�aire et de lutter efficacement contre le d�r�glement climatique.

En conclusion, cette r�solution a le m�rite de rappeler l’importance de l’application du principe de pr�caution et de la dimension d�mocratique de l’anticipation des risques. Cependant, je tiens � mettre en garde mes coll�gues contre un encadrement trop strict du principe de pr�caution, qui pourrait �touffer dans l’œuf l’�mergence de nouvelles alertes et leur prise en compte.

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Jean-Paul Chanteguet.

M. Jean-Paul Chanteguet. Madame la pr�sidente, madame la ministre, mes chers coll�gues, le principe de pr�caution n’est pas nouveau puisque c’est en 1987 que sa premi�re reconnaissance internationale intervint, � Londres, lors d’une conf�rence pour la protection de la mer du Nord, et que c’est au mois de juin 1992, lors de la conf�rence des Nations unies sur l’environnement et le d�veloppement � Rio de Janeiro que sa cons�cration mondiale eut lieu. Il n’est pas inutile de rappeler le principe 15 de la d�claration de Rio : � Pour prot�ger l’environnement, des mesures de pr�caution doivent �tre largement appliqu�es par les �tats selon leurs capacit�s. En cas de risque de dommages graves ou irr�versibles, l’absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de pr�texte pour remettre � plus tard l’adoption de mesures effectives visant � pr�venir la d�gradation de l’environnement. �

La m�me ann�e, l’article 130 R du trait� de Maastricht a pr�cis� que la politique de la Communaut� europ�enne dans le domaine de l’environnement � est fond�e sur les principes de pr�caution et d’action pr�ventive �.

C’est en 1995 que le principe de pr�caution fait son entr�e dans le droit fran�ais gr�ce � la loi dite � loi Barnier �.

C’est enfin en 2005 qu’il conna�t une cons�cration constitutionnelle avec son introduction dans la Charte de l’environnement adoss�e � la Constitution.

Au vu de l’exp�rience des cinq premi�res ann�es de sa mise en œuvre, nos rapporteurs ne peuvent que constater l’urgence de mieux organiser son application et de prendre une initiative parlementaire pour pr�ciser la volont� du l�gislateur. Il para�t en effet judicieux de ne pas laisser cette responsabilit� � la seule jurisprudence, puisque la formation de celle-ci est longue et incertaine et qu’elle manque de coh�rence entre les ressorts juridictionnels, tant qu’elle n’est pas exprim�e par le Conseil d’�tat ou la Cour de cassation saisis par les parties. Il peut en outre y avoir des divergences entre les ordres juridictionnels.

La n�cessit� de d�finir un mode d’emploi s’impose aujourd’hui � nous. Ce mode d’emploi est d�j� balis� par les jurisprudences fran�aise, communautaire et internationale au travers de proc�dures concr�tes d’organisation et de crit�res � satisfaire. Ce mode d’emploi est aussi grandement influenc� par les autorit�s communautaires, qui imposent progressivement dans la gestion des risques �mergents une �volution proc�durale et des principes directeurs.

Ainsi, tandis que le Parlement europ�en introduit des obligations relatives � la consultation publique et � l’expertise dans la proc�dure l�gislative relative � la proposition de r�glement sur les OGM, la Cour de justice de l’Union europ�enne a rappel� les exigences qui s’imposent d�j� aux �tats membres en vertu de la jurisprudence et qui portent sur le caract�re proportionn� et provisoire des mesures et leur justification sur la base d’une expertise scientifique pr�alable aussi compl�te que possible.

Pour nous, la proc�dure et la m�thodologie retenues dans cette proposition de r�solution ne portent pas atteinte au principe de pr�caution et permettent de pr�server des conditions acceptables de d�veloppement du progr�s technique et scientifique. La proposition pr�voit en effet de confier � une instance choisie � dessein l’identification de l’�mergence de nouveaux risques pour l’environnement, la sant� publique et la s�curit� alimentaire, et la d�signation d’un r�f�rent ind�pendant qui aura la facult� de susciter l’expertise scientifique, qui soumettra aux autorit�s comp�tentes les �l�ments n�cessaires � l’organisation d’un d�bat public et, enfin, qui saisira de l’ensemble des conclusions de l’expertise et des d�bats les autorit�s publiques afin qu’elles prennent les mesures qui s’imposent pour limiter le risque.

Pour Dominique Bourg, cette r�solution n’�mane pas du lobby anti-principe de pr�caution, contrairement � ce que pense Arnaud Gossement, pour qui on est en train d’encadrer le principe de pr�caution pour mieux l’�touffer ; n’affirme-t-il pas que cette proposition de r�solution revient � l’ensevelir sous une montagne de conditions pr�alables, inscrites si possible dans le marbre du droit, avec pour seul effet de paralyser son application ?

Pour Dominique Bourg, la proposition de r�solution ne porte pas atteinte au principe de pr�caution. En effet, elle ne renvoie pas tout � une analyse co�ts-b�n�fices puisqu’elle est pr�conis�e � lorsque cela est appropri� et r�alisable, sans pr�judice d’autres m�thodes d’analyse non �conomiques, notamment d’ordre social ou �thique, tout particuli�rement pour ce qui touche � la protection de la sant� �.

D’ailleurs, il ne partage pas l’avis de certains, comme Jacques Attali – ou plut�t comme la Commission pour la lib�ration de la croissance fran�aise, qui proposait dans son rapport remis au d�but de l’ann�e 2008 le retrait du principe de pr�caution de la Constitution, au motif que ce dernier briderait l’innovation dans notre pays. Cela reviendrait � consid�rer que tout progr�s technologique est b�n�fique, ce que Dominique Bourg ne pense pas.

Enfin, il tient � affirmer, soutenant en cela la d�marche de nos deux rapporteurs, que � la mise sur pied d’une proc�dure, pour �viter un mauvais usage du principe, ne va pas � son encontre �.

C’est pourquoi le groupe SRC votera, bien entendu, cette proposition de r�solution qui �clairera � n’en pas douter utilement l’ensemble des parties prenantes, qu’il s’agisse des tribunaux, des acteurs de la soci�t� civile, de l’administration ou encore des scientifiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. J�r�me Bignon.

M. J�r�me Bignon. Madame la pr�sidente, madame la ministre, mes chers coll�gues, comme vous le savez, la r�solution est un acte par lequel notre assembl�e �met un avis sur une question d�termin�e. Cette modalit� d’expression qui avait �t� quasiment �limin�e, au nom du parlementarisme rationalis�, par les constituants de 1958 a repris vigueur avec les actes europ�ens, qui lui ont redonn� vie. C’est surtout la r�forme constitutionnelle que nous avons vot�e en 2008 qui a ouvert la voie � un renouveau de cette proc�dure.

C’est ainsi qu’Alain Gest et Philippe Tourtelier ont men� un tr�s important travail d’�valuation, dont ils ont scrupuleusement rendu compte au Comit� d’�valuation et de contr�le, sur la mise en œuvre du principe de pr�caution inscrit en 2005 � l’article 5 de la Charte de l’environnement. Ce travail a donn� lieu � deux rapports, le premier en 2010 et le second en 2011, sur le suivi des conclusions du premier.

Nos coll�gues ont �t� amen�s � d�poser un projet de r�solution qui traduit � l’opportunit� d’une initiative parlementaire pour pr�ciser la volont� du l�gislateur �. J’approuve bien �videmment cette initiative, pertinente et heureuse, tant dans sa forme que dans son contenu.

Le principe de pr�caution est conceptuellement complexe et sa simple lecture peut plonger dans une certaine perplexit�. On aurait donc pu imaginer que la jurisprudence, en tant que source du droit, vienne jouer le r�le utile qui est le sien dans la tradition juridique fran�aise. Mais chacun sait que, pour �tre source du droit, la jurisprudence doit �tre r�p�t�e, car un m�me point de droit doit �tre interpr�t� dans le m�me sens par diff�rents tribunaux, et hi�rarchis�e, les cours supr�mes fixant au bout du compte la r�gle qui devient source de droit, c’est-�-dire la jurisprudence dite � constante � de la Cour de cassation ou du Conseil d’�tat.

La difficult� du principe de pr�caution, chacun l’a compris, est que son interpr�tation a �t� et reste soumise � une jurisprudence d’abord supranationale, rendue par l’Organisation mondiale du commerce ou par la Cour de justice de l’Union europ�enne ou encore par la Cour europ�enne des droits de l’homme. Certes, on sent, dans la quarantaine de d�cisions qui ont �t� rendues apr�s une douzaine d’ann�es, une certaine homog�n�isation progressive de la jurisprudence mais on est encore loin du compte pour pouvoir consid�rer que les choses sont stabilis�es.

Les juridictions fran�aises ont �galement apport� leur contribution � la jurisprudence. Les r�dacteurs de la Charte avaient certes essay� de colmater les br�ches � l’avance : ils �taient conscients des difficult�s qu’ils allaient provoquer en posant ce principe extr�mement int�ressant mais complexe. Cette mission �tait probablement impossible puisque, dans sa conception, ce principe met en œuvre trop de notions qui sont, par nature, al�atoires : l’incertitude scientifique du risque, l’incertitude quant aux connaissances scientifiques du moment – � quel moment doit-on se situer pour l’appr�cier ? –, l’incertitude quant � l’irr�versibilit� du dommage. Toutes ces incertitudes rendent les craintes r�elles ; elles sont fond�es m�me s’il est trop t�t pour faire un bilan.

En outre, il n’y a pas en France un seul juge mais plusieurs : Conseil constitutionnel, avec maintenant la question prioritaire de constitutionnalit�, juge administratif, juge civil, juge p�nal. Il y a aussi plusieurs contentieux : celui de la l�galit�, celui de la responsabilit�. C’est dire � quel point, dans une mati�re supranationale, diverse et avec des contentieux de types diff�rents, il est difficile de cr�er une jurisprudence stabilis�e qui permette � nos concitoyens de comprendre dans quel cadre le principe de pr�caution doit �tre appr�ci�.

Si certains juges semblent pourtant s’�tre bien situ�s dans la logique de la Charte, d’autres, par des glissements insidieux, ont fait �voluer la jurisprudence de la pr�caution vers la pr�vention, de telle sorte qu’il est aujourd’hui pr�f�rable d’opter pour une autre solution. Certains juges nationaux d’autres pays de l’Union europ�enne ont d’ailleurs adopt� une position similaire : on a vu par exemple les juges belges faire d�river consid�rablement l’apport que peut constituer la jurisprudence en d�naturant fondamentalement le principe de pr�caution.

J’�voquais � l’instant la question prioritaire de constitutionnalit�, qui conna�t un d�veloppement assez fantastique mais qui n’a pas encore donn� toute sa mesure s’agissant du principe de pr�caution. Sans qu’il faille en avoir peur, ce m�canisme aurait pu rendre difficile la stabilisation de la jurisprudence sur ce sujet.

La proposition de r�solution qui nous est soumise doit �tre soutenue. Le r�le qu’elle confie au Comit� de la pr�vention et de la pr�caution para�t pertinent. Ce dernier est compl�t� et enrichi, mais on ne cr�e pas un organisme nouveau. La proc�dure pr�conis�e pour la saisine est coh�rente. La prise en compte de la sant� para�t conforme aux aspirations de nos concitoyens et aux premi�res tendances de la jurisprudence, dont je viens d’�carter l’utilisation mais qu’il n’est n�anmoins pas inutile de prendre en compte.

Pour conclure, je suis favorable � l’adoption de cette proposition de r�solution.

M. Alain Gest. Tr�s bien !

Mme la pr�sidente. La discussion g�n�rale est close.

La parole est � Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’�cologie, du d�veloppement durable, des transports et du logement.

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’�cologie, du d�veloppement durable, des transports et du logement. Madame la pr�sidente, mesdames et messieurs les d�put�s, je veux tout d’abord saluer le travail de fond consid�rable r�alis�, depuis pr�s de deux ans, par Alain Gest et Philippe Tourtelier, auteurs de cette proposition de r�solution. On peut dire qu’ils sont tous deux devenus d’�minents sp�cialistes d’un concept relativement jeune dans notre corpus juridique, ce qui est peu commun.

Nous avions pr�cis�ment besoin que ce jeune concept soit regard�, auscult�, travaill� par des parlementaires avis�s et chevronn�s…

M. Serge Blisko. Ils vont subitement se sentir bien vieux… (Sourires.)

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre. ...qui s’en emparent et se l’approprient pour l’inscrire plus nettement encore dans notre paysage normatif, mais aussi dans notre paysage mental en le mettant � l’horizon de nos d�bats dans de nombreux domaines. Vous avez fait, messieurs, œuvre de pionniers, je vous en f�licite et vous en remercie.

Voil� donc sept ann�es que le principe de pr�caution est inscrit dans notre Constitution, avec la Charte de l’environnement adopt�e en 2005. Chacun conna�t mon engagement personnel dans cette reconnaissance n�cessaire, je n’y reviens pas.

Toutefois, je ne me cache pas la r�alit�. Je sais que des voix s’�l�vent encore, ici ou l�, pour contester le principe de pr�caution, pour le critiquer, pour continuer d’affirmer qu’il constituerait un frein aux activit�s de recherche et m�me au d�veloppement �conomique.

Vous ne serez pas �tonn�s que je ne partage pas du tout ce point de vue. Le principe de pr�caution n’est pas la n�gation du progr�s, il n’est pas la n�gation de la science. Il est m�me tout le contraire, car le doute, qu’il soit m�thodique ou hyperbolique, mais aussi l’�thique sont partie int�grante de la d�marche scientifique : Philippe Tourtelier nous a rappel� � ce propos la citation de Rabelais. Int�grer le doute et l’�thique, c’est l’inverse du dogme et c’est le contraire de l’obscurantisme, c’est tout simplement une science bien ordonn�e. En fait, le principe de pr�caution est aujourd’hui l’une des conditions de possibilit� et de cr�dibilit� de la science moderne.

Il constitue � mon sens un exemple d’une vision nouvelle de l’�cologie : non plus une �cologie de l’objection et de l’obstacle, mais une �cologie � int�gr�e � aux processus tant politiques qu’�conomiques ou scientifiques, une �cologie qui les accompagne, les fonde en l�gitimit� et leur donne de la viabilit�.

De la m�me mani�re, le principe de pr�caution constitue une assurance de long terme, tant pour le chercheur que pour l’industriel. Face � des risques toujours plus incertains, � des cons�quences qui peuvent �tre toujours plus graves, � mesure que progressent la science et la port�e de ses applications techniques, il serait incons�quent – plus incons�quent encore que par le pass� – d’attendre pour voir, pour conna�tre et pour �prouver la r�alit� du risque. En la mati�re, il ne faut pas confondre les exp�riences de la science, balis�es et ma�tris�es, avec les exp�rimentations, tentatives et tentations d’apprentis sorciers pas toujours d�sint�ress�s.

Le r�sultat d’un laisser-faire int�gral en la mati�re serait, comme tout laisser-faire, exactement l’inverse de l’effet recherch�, de la m�me mani�re que la libert� excessive peut d�g�n�rer en tyrannie.

Et puis, outre ses cons�quences concr�tes, le laisser-faire total aurait pour r�sultat de d�multiplier la d�fiance du corps social vis-�-vis des travaux et des professions scientifiques, dont le prestige a pourtant besoin d’�tre restaur� si nous voulons construire une � soci�t� de la connaissance �, capable de nous distinguer dans la mondialisation et que nous appelons de nos vœux.

Pour que la France reste un pays d’innovation, de progr�s technique, de technologies de pointe, il faut qu’elle soit un pays dans lequel la science est cr�dible parce qu’elle sait anticiper. Les exemples sont multiples, certains en ont donn�. Je n’entrerai pas dans le d�tail car je sais que l� se trouvent peut-�tre des sources de contentieux.

Mais je veux dire ici que je ne d�fends pas une vision fig�e du principe de pr�caution. C’est au contraire un principe profond�ment dynamique, parfaitement adaptable en fonction de l’�tat des connaissances scientifiques. Ce n’est pas un principe d�connect� du droit, c’est avant tout un principe proc�dural. C’est pourquoi il est indispensable de clarifier les conditions de sa mise en œuvre. Je partage sur ce point l’analyse extr�mement fine de la jurisprudence que vient de faire J�r�me Bignon, rejoignant me semble-t-il, les propos de Christophe Bouillon.

Il faut battre en br�che l’id�e encore trop r�pandue que le flou, voire l’arbitraire pr�siderait � l’application du principe de pr�caution : tel n’est pas le cas ! Ce principe est tout sauf d�nu� de rationalit�. Toute sa difficult� r�side dans le fait que, par d�finition, le champ de la pr�caution suppose un tr�s fort niveau d’incertitude.

J’indique au passage que je partage le point de vue d’Alain Gest quant � la n�cessit� de bien distinguer le r�gime de la pr�caution – o� nous ne savons pas quantifier le niveau de risque – du r�gime de la pr�vention, dans lequel le risque est assez bien connu et o� il s’agit de prendre des mesures qui permettent de le maintenir � un niveau jug� acceptable par la soci�t�. C’est une d�marche que l’on conna�t bien par exemple dans les installations Seveso ou dans les ph�nom�nes naturels comme les inondations. Les outils de la pr�vention des risques sont fondamentalement diff�rents et vous avez raison d’insister, les uns et les autres, sur le fait qu’il ne faut pas les confondre avec ceux de la pr�caution. C’est trop souvent le cas, et pourtant ils n’ont rien � voir.

Pour toutes ces raisons, je juge particuli�rement stimulant le travail qui vous est pr�sent� aujourd’hui dans le cadre de cette proposition de r�solution.

Je trouve en particulier int�ressante l’id�e de mettre en place un processus clair, ce n’est pas Andr� Chassaigne, apr�s son intervention, qui me contredira, au moins sur ce point.

Il est d’abord int�ressant de s’appuyer sur des processus pluridisciplinaires, donc sur de nouvelles expertises. Pour renforcer l’acceptabilit� sociale des d�cisions, je crois � la n�cessit� de compl�ter l’expertise scientifique par une expertise socio-�conomique, pour faire clairement le bilan co�t-avantage – dont Jean-Paul Chanteguet a soulign� la n�cessit� – de chaque d�cision. Vous le savez, c’est ce que nous nous effor�ons de r�aliser, par exemple dans le domaine des biotechnologies.

Il faut aussi mettre en place, lorsque cela est n�cessaire, une coordination pr�cise. On rejoint l� l’id�e de r�f�rent qui est d�velopp�e dans le projet de r�solution et � laquelle tiennent particuli�rement Alain Gest et Philippe Tourtelier.

� ce propos, je ne partage pas la s�v�rit� d’Andr� Chassaigne sur le Haut conseil des biotechnologies. Les avis des deux comit�s du Haut conseil ont leur importance. Sur un sujet comme les OGM, on ne peut pas s’attendre � ce qu’il y ait facilement consensus, mais des travaux de qualit� ont �t� men�s par ces deux comit�s. Leurs �clairages respectifs sont utiles, en particulier pour le Gouvernement. Je citerai � ce propos un d�cret d’actualit�, puisque c’est hier, 31 janvier, qu’a �t� publi� au Journal officiel le d�cret sur l’�tiquetage des produits sans OGM. Il s’appuie tr�s fortement sur l’avis du HCB, quelle que soit par ailleurs la diversit� des opinions qui ont pu s’exprimer. Les structures grenelliennes nous ont permis d’avancer.

Comme vous l’avez soulign�, madame Fioraso, nous avons aussi besoin d’associer le public aux �tapes successives de la mise en œuvre du principe de pr�caution, selon des modalit�s qui restent � pr�ciser. C’est l’intuition fondamentale du Grenelle de l’environnement, et ce mode de gouvernance semble absolument n�cessaire pour assurer l’acceptabilit� sociale de la d�cision qui devra �tre prise in fine.

Enfin, il faut distinguer tr�s nettement ce qui rel�ve de l’expertise et ce qui appartient � la d�cision publique sur les suites � donner.

Vous l’aurez compris, j’adh�re � l’essentiel du projet de r�solution. J’aurai, en revanche, des nuances � exprimer sur deux points d’organisation.

S’agissant d’abord du r�le que vous proposez de confier au r�f�rent, je partage avec vous l’id�e qu’il est n�cessaire d’avoir un point focal unique pour coordonner les diff�rentes expertises � mettre en œuvre, mais je suis plus r�serv�e quant � l’id�e de confier � ce r�f�rent l’organisation des autres phases, celle par exemple du dialogue avec le public.

Je pense en effet qu’il faut clairement distinguer dans le processus ce qui rel�ve strictement de l’expertise et n�cessite un pilote technique, et ce qui est du domaine du d�bat et de la d�cision, qui devrait rester dans le champ de responsabilit� des autorit�s publiques – o� le Parlement peut avoir un r�le important � jouer. Je marque donc une r�serve sur ce point de la proposition de r�solution.

Le second sujet qui me semble devoir �tre nuanc� concerne l’initialisation de la d�marche. Vous proposez que le Gouvernement, le Parlement et le Conseil �conomique, social et environnemental puissent lancer le processus. Ne faut-il pas prendre d’abord le temps d’apprendre et d’�valuer ce processus de mise en œuvre du principe de pr�caution ? Ne faut-il pas, a minima, mettre en place des garde-fous – r�gles de majorit�, vœux adress�s au Gouvernement charg� de la saisine – pour �viter que le nombre de saisines ne discr�dite le processus ?

Enfin, je voudrais revenir sur votre proposition d’�tendre le processus aux domaines de la sant� et de la s�curit� alimentaire.

Nous avons eu ce d�bat, d�j� tr�s vif, � l’occasion de l’examen du texte relatif � la Charte de l’environnement. Le choix fait � l’�poque a �t� de d�finir le principe de pr�caution dans le champ environnemental.

Il est vrai que, si l’on adopte un instant le point de vue d’un non-sp�cialiste, on peut �tre tent�, dans la vie courante, de faire r�f�rence � ce principe pour d’autres sujets que l’environnement. Je veux le dire tr�s clairement : dans les domaines de la sant� et de la s�curit� alimentaire comme dans l’environnement, des situations de grande incertitude scientifique peuvent se produire et nous conduire � craindre des cons�quences graves. Il est vrai aussi qu’il existe des liens entre les diff�rents domaines. Anny Poursinoff, notamment, a �voqu� les liens existant entre la sant� et l’environnement. C’est pourquoi je comprends parfaitement les raisons qui vous ont conduits � poser la question de l’extension du processus � ces champs.

Cela �tant, il ne faut pas m�conna�tre les implications juridiques – et singuli�rement constitutionnelles – qu’entra�nerait une telle �volution.

Il sera sans doute n�cessaire d’ouvrir ce d�bat, mais il s’agira d’un d�bat constitutionnel. Il serait � l’�vidence pr�matur� de pr�tendre le trancher aujourd’hui, dans le cadre de la discussion de cette proposition de r�solution, et ce avant m�me qu’il n’ait lieu ! Je doute que le moment comme le texte soient ad�quats.

Je vois, en tout cas, dans cette volont� d’extension du principe de pr�caution le signe indubitable qu’un pas essentiel a �t� franchi dans l’appropriation de ce principe par la repr�sentation nationale, et je tenais � vous dire � quel point je m’en r�jouis. C’est avec �motion que je me souviens des d�bats tr�s vifs qui ont accompagn� l’entr�e du principe de pr�caution dans la Constitution.

Je donnerai donc, au nom du Gouvernement, un avis favorable � cette proposition de r�solution. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Vote sur la proposition de r�solution

Mme la pr�sidente. Je ne suis saisie d’aucune demande d’explication de vote.

Je mets aux voix la proposition de r�solution.

(La proposition de r�solution est adopt�e.)

3

Protection de l’identit�

Discussion, en nouvelle lecture,
d’une proposition de loi

Mme la pr�sidente. L’ordre du jour appelle la discussion, en nouvelle lecture, de la proposition de loi relative � la protection de l’identit� (nos 4223, 4229).

La parole est � M. Claude Gu�ant, ministre de l’int�rieur, de l’outre-mer, des collectivit�s territoriales et de l’immigration.

M. Claude Gu�ant, ministre de l’int�rieur, de l’outre-mer, des collectivit�s territoriales et de l’immigration. Madame la pr�sidente, monsieur le rapporteur de la commission des lois, mesdames, messieurs les d�put�s, nous sommes r�unis une nouvelle fois aujourd’hui autour de la proposition de loi relative � la protection de l’identit� de nos concitoyens.

Je dis � une nouvelle fois �, car il s’agit d’une proposition de loi qui a d�j� fait l’objet d’un long et fructueux d�bat : elle a �t� pass�e au crible par le Conseil d’�tat, elle a �t� �valu�e par la CNIL, elle s’est nourrie de nos �changes et elle s’est enrichie de vos amendements.

Au terme de la deuxi�me lecture, nous nous �tions accord�s ici, � l’Assembl�e, sur un texte �quilibr� et coh�rent entourant de toutes les garanties l�gales n�cessaires l’�tablissement d’un lien fort entre donn�es biom�triques et donn�es d’�tat civil au sein de la base TES – titres �lectroniques s�curis�s.

La commission mixte paritaire, qui s’est r�unie le 10 janvier dernier, a d�natur� cet �quilibre en substituant un lien faible au lien fort.

Vous avez rejet�, la semaine derni�re, les conclusions de la CMP et �tes revenus une premi�re fois � la version issue de la deuxi�me lecture.

Le S�nat, malheureusement, a refus� de suivre l’Assembl�e nationale dans ce choix de l’�quilibre et de l’efficacit�. Aujourd’hui, � la suite de votre rapporteur, je vous demande donc de confirmer une deuxi�me fois la version sur laquelle nous nous �tions accord�s.

Je ne vous le demande pas seulement par souci de coh�rence. Je vous le demande parce que ce texte auquel nous �tions parvenus – conforme, permettez-moi de le rappeler, � l’esprit voulu par les auteurs m�mes de cette proposition de loi, les s�nateurs Jean-Ren� Lecerf et Michel Houel – se fonde sur une vision partag�e de la protection de l’identit�.

Nous partageons d’abord une m�me vision des enjeux qui sous-tendent la lutte contre l’usurpation d’identit�. Nous ne d�battons pas aujourd’hui de principes abstraits. Bien au contraire. Nous d�battons, tr�s concr�tement, de la vie et de l’avenir de plusieurs centaines de milliers de nos concitoyens chaque ann�e. Nous ne pouvons pas, nous ne devons pas perdre de vue ces enjeux et la souffrance des victimes. Mais au-del� de cette claire vision des enjeux, nous partageons surtout la m�me vision des moyens concrets de prot�ger l’identit� de chacun de nos concitoyens.

Je dis � des � moyens, mais je devrais plut�t dire � du � moyen. Seul le lien fort, en effet, est une solution. Le lien faible, lui, n’est qu’une illusion.

Illusion, d’abord, car il ne permet que de constater l’usurpation d’identit�, mais en aucun cas de remonter jusqu’� l’identit� de l’usurpateur.

Illusion, ensuite, car l’entreprise qui propose le lien faible doute elle-m�me de sa fiabilit� en reconnaissant qu’il n’est pas op�rationnel.

Aux nombreux d�fauts du lien faible r�pond en revanche la solidit� technique, op�rationnelle et – je le souligne – juridique du lien fort.

Sur le plan des libert�s publiques, le texte apporte les garanties recherch�es.

Je pense aux garanties d�finies par la CNIL en mati�re d’utilisation des fichiers : restriction de l’acc�s � la base aux seuls agents charg�s de la fabrication et de la d�livrance des titres, et tra�abilit� de ces acc�s ; segmentation des donn�es ; s�curit� des transmissions et s�curit� contre les intrusions.

Des garanties l�gales suppl�mentaires ont �galement �t� pr�vues par la proposition de loi dont nous discutons aujourd’hui : interdiction de croiser la base TES avec les autres fichiers publics ; limitation � deux du nombre d’empreintes enregistr�es ; interdiction de la reconnaissance faciale ; limitation � trois cas, et trois cas seulement, de l’utilisation de la fonction d’identification � partir des empreintes pour retrouver une identit� : pour la d�livrance ou le renouvellement du titre ; sous le contr�le du procureur de la R�publique, dans le cadre d’une proc�dure judiciaire, pour des infractions en lien avec une usurpation d’identit� ; enfin, pour l’identification de victimes d’accidents collectifs ou de catastrophes naturelles.

Mesdames et messieurs les d�put�s, en r�tablissant le texte de cette proposition de loi dans la version que vous aviez adopt�e � l’issue de la deuxi�me lecture, vous inscrirez dans notre droit les moyens de lutter vraiment contre l’usurpation d’identit�.

� la suite de votre rapporteur, au nom du Gouvernement et dans l’int�r�t de nos concitoyens, je vous demande donc de revenir � cette version. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Philippe Goujon, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la l�gislation et de l’administration g�n�rale de la R�publique.

M. Philippe Goujon, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la l�gislation et de l’administration g�n�rale de la R�publique. Madame la pr�sidente, monsieur le ministre, mes chers coll�gues, les enjeux de ce texte m�ritent mieux que de vaines pol�miques. Aussi ne r�pondrai-je pas aux critiques injustifi�es adress�es � notre assembl�e par le pr�sident de la commission des lois du S�nat dans ce que l’on pourrait appeler une regrettable d�marche d’intimidation.

Les faits parlent pour nous : dans un esprit de dialogue constructif, le ministre l’a excellemment rappel�, l’Assembl�e nationale a pr�sent� � la commission mixte paritaire un article 5 largement r��crit en deuxi�me lecture, pour aboutir � un compromis avec le S�nat.

Aussi, la version qui vous est pr�sent�e ce jour est-elle, conform�ment � l’article 45 de la Constitution, compte tenu du rejet du texte de la CMP par le S�nat, celle que nous avions adopt�e le 13 d�cembre dernier, en deuxi�me lecture. Il s’agit bien de la version d’�quilibre � laquelle nous �tions parvenus, autour d’un lien fort qui, certes, permet d’identifier les usurpateurs et les fraudeurs, mais un lien fort tr�s encadr�, seul � m�me de rendre op�ratoire l’objectif de la loi qui est, je le rappelle, la protection de l’identit� de nos concitoyens.

Conform�ment aux recommandations de la CNIL et du Conseil d’�tat comme aux observations du S�nat, le nombre d’empreintes conserv�es dans la base est limit� � deux, la reconnaissance faciale explicitement exclue, et l’acc�s � la base sur r�quisition judiciaire restreint aux seules infractions li�es � l’usurpation d’identit� et � la recherche de corps de victimes de catastrophes collectives et naturelles.

Dois-je rappeler encore les insuffisances du lien faible ? Qualifi� de syst�me d�grad� par son inventeur lui-m�me, jamais mis en œuvre nulle part au monde pour son manque de fiabilit�, le lien faible n’offre aucune possibilit� de retrouver l’identit� d’un usurpateur qui se serait introduit dans la base ni d’identifier un cadavre. Le naufrage du Costa Concordia vient de nous rappeler cruellement � quel point une telle base est utile pour l’identification des corps des victimes. C’est pr�cis�ment l’objet que peut avoir une telle loi.

M. Serge Blisko et M. Jean-Jacques Urvoas. Tous les arguments sont bons !

M. Philippe Goujon, rapporteur. C’est un argument suppl�mentaire, mais nous en avons d�j� suffisamment…

M. Christian Vanneste. C’est un excellent argument !

M. Richard Malli�. �videmment !

M. Philippe Goujon, rapporteur. Un argument si fort qu’il s’impose ! Je vous remercie, monsieur Vanneste !

Perm�able � la fraude, le taux d’impr�cision du syst�me � lien faible – vous-m�me, monsieur Blisko, �tes oblig� de le reconna�tre – g�n�rerait des centaines de milliers d’enqu�tes annuelles et priverait tout simplement la justice d’un moyen efficace de confondre les d�linquants. La police n’aurait tout simplement pas le temps d’effectuer les enqu�tes et la fraude identitaire s’aggraverait au rythme m�me de son impunit�.

Votre rapporteur vous propose donc, mes chers coll�gues, de maintenir votre texte, le seul de nature � rassembler aussi bien les d�fenseurs des libert�s que ceux qui œuvrent pour une meilleure s�curit� des Fran�ais, c’est-�-dire nous tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Raymond Durand. Tr�s bien !

Motion de rejet pr�alable

Mme la pr�sidente. J’ai re�u de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une motion de rejet pr�alable d�pos�e en application de l’article 91, alin�a 5, du r�glement.

La parole est � M. Serge Blisko.

M. Serge Blisko. Monsieur le ministre, mes chers coll�gues, j’ai bien compris que vous �tiez impatients d’en terminer avec ce texte. Pour la quatri�me fois dans cet h�micycle, nous nous heurtons � ce d�saccord entre nos deux chambres sur un seul article, certes fondamental, vous l’avez dit, monsieur Goujon, le fameux article 5 qui d�montre que la conception de la majorit� � l’Assembl�e nationale est tr�s diff�rente de celle qui a pr�valu au S�nat dans sa sagesse et dans une quasi-unanimit�, je tiens encore une fois � le souligner.

M. Philippe Goujon, rapporteur. Il est revenu sur sa r�daction ! Il est moins unanime maintenant !

M. Serge Blisko. Sans doute, monsieur le ministre, consid�rez-vous que les interventions des d�put�s de l’opposition sont vou�es � ne pas �tre entendues, en tout cas � ne pas �tre suivies – c’est superf�tatoire – en raison de la majorit� automatique que vous avez � l’Assembl�e. Je peux d�j� vous annoncer, m�me si je ne suis pas pronostiqueur, que vous aurez certainement le dernier mot…

M. Philippe Goujon, rapporteur. Vous �tes perspicace !

M. Serge Blisko. …puisque, apr�s un passage au S�nat, l’Assembl�e se prononcera une derni�re fois. Nous l’esp�rons tous, parce que les meilleures pi�ces ont tout de m�me une fin et que nous connaissons les arguments.

Ce texte qui touche aux libert�s publiques, ce qui est fondamental, avait un but tout � fait honorable et louable que nous partageons : lutter contre une d�linquance qui peut �tre particuli�rement destructrice pour les victimes – l’usurpation de leur identit� –, qui a des effets ravageurs et dont les cons�quences �conomiques, sociales, fiscales, voire judiciaires, peuvent se poursuivre durant des ann�es. Il n’est, en effet, rien de plus compliqu� que de d�montrer que quelqu’un a usurp� votre identit�.

Sans doute les termes sont-ils quelque peu indistincts, mais il y a ce que l’on peut appeler l’usurpation d’identit� et la cr�ation, gr�ce � un certain nombre de moyens informatiques nouveaux, la scanographie entre autres, d’une identit� totalement invent�e. Je n’entrerai pas dans le d�tail, car ce n’est absolument pas l’objet de la proposition de loi. Il n’en reste pas moins que nous reconnaissons tous, m�me si les chiffres annonc�s – 200 000 infractions constat�es chaque ann�e – nous laissent quelque peu dubitatifs, qu’il est plus qu’ennuyeux et d�sagr�able d’�tre victime d’une usurpation d’identit�.

Vous profitez de ce fait d�lictueux que nous ne contestons pas pour r�aliser finalement – permettez-moi cette expression, monsieur le ministre – le vieux r�ve de la Place Beauvau : cr�er aujourd’hui un grand fichier informatique tr�s moderne, rassemblant des donn�es biom�triques de millions de Fran�ais. On sait qu’une carte d’identit� est exig�e pour se rendre � l’�tranger et il est parfois obligatoire de pr�senter deux pi�ces d’identit� au commer�ant lorsque l’on r�gle un important achat par ch�que. Tous les Fran�ais qui renouvelleront, � partir de l’�ge de quinze ans, soit leur vieille carte en carton – un certain nombre d’exemplaires �tant toujours en circulation – soit les cartes plastifi�es que nous connaissons depuis quelques ann�es figureront dans un fichier, qui rassemblera donc, � terme, cinquante millions de citoyens. Vous parlez doucereusement d’une base, monsieur le ministre mais, dans les textes, il s’agit d’un fichier.

M. Philippe Goujon, rapporteur. C’est un fichier administratif !

M. Serge Blisko. Certes, monsieur le rapporteur, mais il n’emp�che que c’est un fichier num�rique, informatique et biom�trique.

M. Richard Malli�. Au XXIe si�cle, on n’en est plus � �crire � la main !

M. Serge Blisko. Personne ne conteste les progr�s fulgurants de l’informatique, encore faut-il y r�fl�chir !

M. Richard Malli�. Vivez avec votre temps !

Mme la pr�sidente. Seul M. Blisko a la parole !

M. Serge Blisko. Si la CNIL a �t� cr��e en 1978, c’est justement parce que les fichiers informatiques pr�sentent plus de dangers pour les libert�s publiques et les libert�s individuelles que les fiches en carton.

M. Michel Hunault. Parlons-en !

M. Serge Blisko. Je ne critique pas l’informatique, mais l’usage que vous en faites. En effet, les donn�es biom�triques touchent � l’intimit� physique, voire g�n�tique. On nous dit aujourd’hui qu’un certain nombre de donn�es biom�triques figureront dans la puce de cette carte d’identit�. Chacun d’entre nous a des caract�ristiques biom�triques uniques. La biom�trie �tablit notre identit�.

M. Philippe Goujon, rapporteur. C’est fait pour cela !

M. Serge Blisko. Le terme de � biom�trie � est une sorte de grand portefeuille qui peut contenir un certain nombre de donn�es, mais la reconnaissance faciale et des donn�es g�n�tiques n’y figurent pas : Dieu nous en garde, si j’ose dire dans cet h�micycle ! Certes, le passeport biom�trique contiendra deux et non huit empreintes comme cela avait �t� envisag� � l’origine et nous sommes heureux de ce recul, mais qui nous dit que, demain, un autre ministre de l’int�rieur ne demandera pas, suite � une affaire, que des donn�es g�n�tiques, voire m�dicales y soient int�gr�es ?

M. Philippe Goujon, rapporteur. Pas si nous restons au pouvoir !

M. Serge Blisko. Il y a, aujourd’hui, un risque de glissement extr�mement grave et pernicieux, car seront rassembl�es dans un minist�re r�galien, le minist�re de l’int�rieur – et je n’ai rien contre cette belle maison qui emploie de tr�s grands fonctionnaires –, les donn�es sensibles de millions de Fran�ais.

M. Michel Hunault. Ce n’est pas ce que dit le texte !

M. Serge Blisko. Nous devrions mener une r�flexion plus approfondie sur cette question. Je n’entrerai pas dans le d�tail, mais nous connaissons tous ce que l’on appelle dans notre jargon la � puce r�galienne �. M�me s’il y a eu, � ce propos, une pr�cision int�ressante et de bon aloi, notre intimit� la plus personnelle sera tout de m�me accessible sur r�quisition judiciaire aux services de police et de gendarmerie. Vous nous avez assur�s – de bonne foi, je le crois – de la parfaite �tanch�it� de cette puce dite r�galienne, contenant les donn�es biom�triques, y compris par rapport � la deuxi�me puce de la carte d’identit�, dite puce commerciale, qui s�curisera les transactions dans les magasins ou sur internet.

La France, de ce point de vue, est en avance. Nombre de pays ont des cartes de paiement moins s�curis�es que la n�tre. Cette proposition de loi – et c’est ce qui fait son charme – laisse appara�tre nos r�ussites industrielles en ce domaine. Notre nation en a besoin, tout comme d’autres pays que nous pouvons ainsi aider. Ce texte est donc sous-tendu, nous l’avons assez dit, par de gros enjeux industriels et �conomiques, auxquels nous ne sommes pas oppos�s, surtout dans cette saison, si j’ose dire, mais il ne faut pas agir au d�triment de principes fondamentaux pour nos libert�s.

J’ai d�j� fait remarquer, monsieur le ministre, qu’aucune puce contenant des donn�es n’�tait � l’abri d’une intrusion, d’un piratage, d’un d�tournement, dans un monde o� des cybercriminels, situ�s en g�n�ral dans un pays inaccessible ou tr�s lointain et totalement incontr�lables, peuvent avec un seul ordinateur en contr�ler des dizaines de milliers et en retirer, au moyen de techniques virales, des donn�es personnelles. Ces cybercriminels ont assez de connaissances informatiques pour pirater ou bloquer des sites internet pourtant tr�s s�curis�s, comme ceux des agences f�d�rales am�ricaines, du Pentagone, ou des bases de donn�es bancaires extr�mement confidentielles. Ils ont m�me, pire encore, mis en difficult� des gouvernements, comme cela a �t� le cas voici quelques mois dans les pays baltes. Vous imaginez bien que la base de donn�es centralis�es que vous pr�voyez de cr�er va attiser bien des convoitises. Ce ne serait pas le cas si les donn�es biom�triques, que je ne remets pas en cause, n’�taient pas rassembl�es dans un immense fichier, mais restaient stock�es sur la future carte d’identit� biom�trique. C’est le fichier qui pose probl�me et non la biom�trie.

Le S�nat, vous le savez, a estim� � trois reprises qu’il �tait l�gitime de cr�er une base de donn�es biom�triques. Si nous allons jusqu’au bout du raisonnement s�natorial, et c’est en cela que nous diff�rons avec M. Goujon, nous devons admettre que cette base ne peut en aucun cas avoir un lien univoque, par exemple la connaissance de l’identit� � partir des empreintes digitales. Vous pouvez aujourd’hui comparer les empreintes relev�es sur une sc�ne de crime avec celles figurant dans des fichiers de type d�linquants sexuels, mais avec le fichier que vous allez cr�er, vous acc�derez � la base de donn�es de tous les Fran�ais, c’est-�-dire au fichier des gens honn�tes. Le fait d’avoir d�pos� vos empreintes digitales permettra ainsi � des gens plus ou moins bien intentionn�s de conna�tre vos faits et gestes � tout moment de la journ�e. Vous allez, j’y insiste, cr�er un fichier de toute la population � partir d’une base de donn�es biom�triques. Il ne s’agit pas simplement d’un fichier de suspects, de personnes incrimin�es, recherch�es ou d�j� condamn�es, mais du fichier de tout le monde, de citoyens honn�tes dont le seul tort aura �t� d’avoir demand� le renouvellement de leur carte d’identit�, pourtant bien utile.

� maintes reprises le S�nat s’est exprim� contre l’existence de ce lien univoque, appel� lien fort dans notre jargon, pour pr�f�rer ce que nous appelons, faute de meilleur terme, lien faible, terme quelque peu p�joratif qui vous permet une certaine ironie.

Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vous persistez � imposer ce lien fort dont nul ne contestera qu’il est beaucoup plus puissant que le lien faible, bien entendu. C’est justement ce qui pose probl�me.

M. Philippe Goujon, rapporteur. Il est efficace !

M. Serge Blisko. Il est trop efficace et trop fort.

M. Christian Vanneste. Extraordinaire : on prot�ge trop les honn�tes gens !

M. Serge Blisko. En effet, vous n’arrivez toujours pas � expliquer pourquoi il est utile de ficher toute la population vivant sur le territoire fran�ais. Je ne suis pas parvenu � comprendre en quoi, consid�rant votre chiffre, sans doute un peu trop fort, de 200 000 usurpations d’identit� par an, il serait utile de ficher cinquante millions de personnes.

M. Philippe Goujon, rapporteur. Avec le lien faible, vous fichez aussi tout le monde !

M. Serge Blisko. Vous d�passez le lien de proportionnalit� que la CNIL a toujours essay� de mettre en avant depuis trente ans. On ne cr�e pas un fichier �norme pour une infraction faiblement r�pandue. Vous �tablissez un rapport excessif entre cinquante millions et 200 000, chiffre que je veux bien admettre. C’est pourquoi le S�nat a refus� le lien fort dans sa r�daction de l’article 5 adopt�e par 340 voix contre cinq, puis vot�e par la majorit� de la CMP. Vous avez cependant r�tabli l’article 5 dans sa r�daction initiale.

Comme je l’indiquais il y a trois semaines, l’attention du groupe socialiste a �t� alert�e en particulier par l’alin�a 10 de l’article 5 qui, dans le syst�me que vous voulez instaurer, �tend � trop de d�lits la possibilit� pour l’autorit� polici�re de consulter ce fichier biom�trique. Est-il utile de consulter un fichier biom�trique comportant des renseignements intimes sur plusieurs dizaines de millions de personnes pour des d�lits mineurs tels que le franchissement illicite d’un portillon dans le m�tro ou le d�placement sans titre de transport ? C’est en effet ce que cela signifie. Je veux bien croire que, pour certains, sauter le portillon dans le m�tro doit �tre puni d’une peine tr�s lourde. Mais faut-il pour autant recourir � un fichier biom�trique ? Nous craignons une telle d�rive. Il est encore temps de revenir � la raison, de ne pas faire en France ce qui n’existe dans aucun pays d�mocratique d’Europe et de mettre � l’abri nos concitoyens d’aujourd’hui et de demain de ce monde � orwellien � – permettez-moi cette expression – de fichage g�n�ralis�.

Je vous invite, en cons�quence, � voter la motion de rejet pr�alable. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la pr�sidente. Dans les explications de vote, la parole est � M. Christian Vanneste, pour le groupe UMP.

M. Christian Vanneste. Le groupe UMP votera contre cette motion.

Tout d’abord, je vous remercie, monsieur Blisko, d’avoir rappel� qu’il y avait deux chambres dans notre pays, l’une compos�e de personnes qui ne sont pas �lues au suffrage direct et qui oublient un peu la r�alit� de la souffrance quotidienne de nos citoyens (Protestations sur les bancs du groupe SRC)

M. Michel Hunault. Ce n’est pas convenable de tenir de tels propos !

M. Christian Vanneste. …et l’autre compos�e de repr�sentants �lus directement. Je constate que, d’un c�t�, on a d�fendu les libert�s abstraites et que nous, nous nous int�ressons aux libert�s concr�tes, menac�es par l’usurpation d’identit�.

Vous avez fait allusion � plusieurs reprises aux victimes, mais je suis tout de m�me un peu surpris. Vous parlez de la douleur de ces victimes, vous trouvez que c’est bien ennuyeux mais, � aucun moment, vous ne voulez prendre les mesures n�cessaires pour r�pondre � leur attente.

Enfin, je trouve assez extraordinaire votre argumentation selon laquelle on ne peut avoir un fichier public r�pondant aux exigences de l’ordre public, prot�g� bien �videmment par la justice, parce que des cybercriminels pourraient acc�der aux donn�es.

On pourrait m�me ajouter qu’il existe aujourd’hui des fichiers incroyablement fournis qui sont entre les mains non des pouvoirs publics mais de grandes entreprises internationales.

C’est cela que vous favorisez, monsieur Blisko, et c’est la raison pour laquelle nous rejetterons bien s�r cette motion.

Mme la pr�sidente. Pour le groupe SRC, la parole est � Mme Sandrine Mazetier.

Mme Sandrine Mazetier. Je vous rappelle, monsieur Vanneste, que vos coll�gues du groupe UMP au S�nat et l’ensemble de mes coll�gues sur ces bancs sont des d�fenseurs des libert�s et de la s�curit�…

M. Michel Hunault. Comme nous !

Mme Sandrine Mazetier. …et luttent avec une �gale intensit� contre l’usurpation d’identit�.

M. Michel Hunault. Tr�s bien !

M. Christian Vanneste. Ils n’en donnent pas la preuve !

Mme Sandrine Mazetier. Pourtant, avant m�me le changement de majorit�, vos coll�gues du groupe UMP du S�nat se sont oppos�s � l’article 5.

M. Serge Blisko. �trange tout de m�me !

M. Philippe Goujon, rapporteur. Ils ont chang� d’avis depuis !

Mme Sandrine Mazetier. Ils n’�taient pas contre l’objectif de lutter contre l’usurpation d’identit� mais ils refusaient la disproportion et les dangers induits par ce fichage g�n�ralis�.

Il n’y a pas, d’un c�t�, ceux qui luttent contre l’usurpation d’identit� et, de l’autre,…

M. Christian Vanneste. Les d�fenseurs de la d�linquance !

Mme Sandrine Mazetier. …ceux qui d�fendent les libert�s individuelles. Il y a les personnes s�rieuses et les personnes comme vous, un peu l�g�res sur ces sujets. (� Tr�s bien ! � sur les bancs du groupe SRC.)

(La motion de rejet pr�alable, mise aux voix, n’est pas adopt�e.)

Motion de renvoi en commission

Mme la pr�sidente. J’ai re�u de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une motion de renvoi en commission d�pos�e en application de l’article 91, alin�a 6, du r�glement.

La parole est � M. Jean-Jacques Urvoas.

M. Jean-Jacques Urvoas. Madame la pr�sidente, monsieur le ministre, mes chers coll�gues, 250 lois ont �t� vot�es au cours de cette l�gislature, une centaine relevant de la commission des lois, et nous avons souvent de cette tribune d�nonc� les proc�dures acc�l�r�es dont le Gouvernement use et abuse.

Nous sommes dans le cadre d’une discussion l�gislative o� le temps pour confronter nos opinions et affirmer nos convictions nous a �t� donn�. Nous vivons les d�lices du bicam�risme. Le S�nat, dans sa quasi-unanimit�, a adopt� un texte contre l’avis du Gouvernement, et la commission mixte paritaire a confirm� ce vote. Il y a donc eu en CMP une majorit� compos�e des d�put�s de l’opposition et d’une partie des s�nateurs, dont certains de l’opposition s�natoriale, pour voter ce texte. Nous avons ainsi deux versions diff�rentes et nous devons en discuter une nouvelle fois.

Je crains de ne pas apporter d’�l�ments suppl�mentaires, mais �tre d�put� de l’opposition, c’est avoir des convictions et de la pers�v�rance, mettre en garde nos coll�gues contre d’�ventuels votes qui pourraient mettre en place des bombes � retardement, pour reprendre le terme utilis� par Fran�ois Pillet dans le premier rapport qu’il avait d�pos� au S�nat lors de la discussion initiale de la proposition de loi.

Nous avons d�j� beaucoup d�battu des avanc�es que permet ce texte et des diff�rents probl�mes qu’il pose.

Lien fort, lien faible : la question est apparemment technique mais, en r�alit�, elle est politique. Elle touche � l’id�e que nous nous faisons de l’ad�quation des moyens � un objectif que nous partageons tous, la lutte contre l’usurpation d’identit�, d�s lors qu’il est question de la pr�servation des libert�s publiques.

Nous aboutissons � un d�saccord sur un article, l’article 5.

Selon le Gouvernement et la majorit� de l’Assembl�e, il faut retenir le lien fort, qui permet d’�tablir de mani�re univoque un lien entre les empreintes digitales d’une personne et son identit�.

Le lien faible, que nous d�fendons, ne l’autorise nullement. Il est fond� sur le principe de non-r�versibilit� totale entre l’identit� et les empreintes d’une personne. Cela dit, il permet de constater l’usurpation d’identit�. Le proc�d� est donc techniquement aussi valable que celui que vous d�fendez puisque c’�tait l’objectif initialement recherch� par la proposition de loi m�me si, au fil de nos d�bats, il a pu y avoir des �volutions.

Le probl�me est que ce but fort louable n’est plus suffisant pour le Gouvernement, qui, avec le soutien de la majorit�, a fait adopter des amendements modifiant l’objectif, ce qui nous am�ne � avoir une confrontation sur les libert�s publiques.

Sur la forme, m�me si c’est constitutionnel, le fait que le Gouvernement ait d�pos� un amendement apr�s la r�union de la commission mixte paritaire m’a sembl� inopportun. Il aurait suffi, en effet, que l’Assembl�e nationale rejette les conclusions de la commission pour parvenir au m�me r�sultat. D’ailleurs, saisir l’Assembl�e alors que c’�tait une proposition d’initiative s�natoriale �tait pour le moins discourtois pour le S�nat, m�me si c’�tait, j’imagine, un hommage rendu � l’Assembl�e nationale. La proc�dure �tait assez surprenante, mais cela me permet de rendre hommage au travail parlementaire li� au bicam�risme.

Sur le fond, j’ai pris connaissance du jugement formul� par M. Richert au S�nat, selon lequel, apr�s la derni�re lecture � l’Assembl�e, le texte serait parvenu � une version �quilibr�e et efficace dans la lutte contre l’usurpation d’identit� et pr�senterait de s�rieuses garanties au regard des libert�s publiques.

J’entends bien que des assouplissements ont �t� consentis, comme le passage de huit � deux du nombre des empreintes digitales enregistr�es dans la base, ainsi que le voulait le Conseil d’�tat. Il n’en demeure pas moins que le cœur du dispositif n’a pas chang�.

Nous sommes de nouveau en harmonie avec le S�nat, qui, avec la sagesse qu’on lui pr�te d’habitude et la capacit� de discernement dont il lui arrive de faire preuve, a rejet� le texte le 26 janvier dernier.

Au fond, la t�che qui nous incombe est de trouver un point d’�quilibre entre la protection de l’identit� de nos concitoyens et la protection des libert�s publiques. La version de la proposition de loi qui nous est soumise n’y parvient pas. Elle sacrifie, au nom d’une pr�tendue efficacit� dont l’effectivit� reste � d�montrer, monsieur le rapporteur – c’est en effet un pari sur l’avenir, une intention et pas encore un r�sultat –, un certain nombre de principes fondamentaux auxquels nous sommes attach�s, qui nous paraissent menac�s, pour ne pas dire bafou�s.

Nous ne comprenons toujours pas pourquoi la France cherche � se dissocier des autres pays de l’espace Schengen. Les pays voisins, en effet, vous le savez comme moi, n’ont pas fait le choix de cette base centralis�e que vous pr�voyez. Or dans cet espace de libre circulation, la lutte contre l’usurpation d’identit� ne peut �tre conduite avec efficacit� que si nous n’agissons pas seuls et � notre guise, sans nous pr�occuper de ce que font nos voisins. Pourquoi donc cette singularit� fran�aise qui fait que nous aurions besoin d’un fichier centralis� alors que nos voisins s’en passent fort bien ? La Commission nationale de l’informatique et des libert�s, dans laquelle l’opposition de l’Assembl�e nationale n’est pas repr�sent�e puisque nos deux coll�gues qui y si�gent sont membres du groupe UMP, ne pr�conisait d’ailleurs pas une telle solution.

Certes, l’usurpation d’identit� constitue un probl�me dont personne ici ne sous-estime la port�e. Nous sommes tous conscients, pour avoir rencontr� des victimes ou lu des t�moignages, qu’il pourrit la vie d’un nombre croissant de nos concitoyens, sans que l’on sache d’ailleurs exactement combien puisque nous n’avons pas d’�tude incontestable sur le sujet. Mais la proposition de loi initiale offrait des garanties pour lutter contre ce ph�nom�ne.

C’est le cas notamment du renforcement des contr�les de la d�livrance des documents d’�tat civil autorisant l’�tablissement d’une carte nationale d’identit�, qui doit en toute logique induire une diminution des tentatives de fraude. Si cela ne suffit pas, autrement dit si l’instauration d’un fichier se r�v�le n�cessaire – � vrai dire, nous n’en discutons plus puisque c’�tait l’objet d’un autre article dont nous n’avons plus � d�battre –, appliquons-nous au moins � prescrire une th�rapie adapt�e au mal que nous avons � combattre.

Notre objectif doit �tre d’instituer un dispositif permettant de v�rifier que le porteur d’un titre d’identit� en est bien le titulaire l�gitime. La proposition de loi du 27 juillet 2010 d�pos�e par nos coll�gues UMP au S�nat, notamment M. Lecerf, y r�pondait pleinement. Elle retenait, dans son article 5, le principe de la constitution d’une base biom�trique selon la technique du lien faible. Nous persistons � penser qu’une telle base, tout en prot�geant parfaitement des risques d’usurpation d’identit�, constitue la meilleure garantie contre d’�ventuelles utilisations d�tourn�es.

Le Gouvernement, fid�le � son habitude, a pr�f�r� opter pour un rem�de de cheval qui risque bien � terme de tuer le patient. En vue de lutter contre un fl�au bien r�el, il veut en effet �tablir un fichier national o� l’on ne sait m�me pas combien de millions de personnes seront int�gr�s. On �voque le chiffre maximal, c’est-�-dire 50 millions, y compris les enfants.

J’entends bien que le Gouvernement tente de nous rassurer en r�duisant les finalit�s d’acc�s � la base, mais l’exp�rience montre que, dans ce pays, il est dans l’ordre des choses que, un fichier une fois constitu�, les possibilit�s de le consulter soient �tendues.

Monsieur le ministre, vous avez fait semblant de croire, dans Le Nouvel observateur du 19 janvier, que nous �tions oppos�s au fichier des empreintes g�n�tiques. Comme vous �tes attentif � ce que nous disons, � ce que nous �crivons, vous savez que ce que nous contestons, ce sont ses �largissements successifs.

Nous continuons � contester le fait que son alimentation soit forc�e puisque le pr�l�vement est juridiquement contraint et que le refus constitue un d�lit. Nous n’acceptons pas ce principe, comme nous n’avons pas accept� que, pour une simple suspicion, on figure dans le fichier alors que ce n’�tait pas son objectif initial, sans compter que l’actualit� judiciaire de ces derniers mois nous incite � la plus grande prudence sur le possible d�tournement de certains fichiers.

Comment ne pas voir les risques majeurs que ferait courir � la protection des libert�s individuelles la constitution d’une base de dizaines de millions d’entr�es ? Qui peut sinc�rement nous garantir que l’usage qui en sera fait demain restera dans les limites fix�es aujourd’hui ? Comment ne pas voir l’irr�sistible tentation que cela peut repr�senter pour des apprentis sorciers peu scrupuleux ?

Je rappelle que M. Pillet avait estim� que le dispositif envisag� �tait une bombe � retardement. Nous partageons pleinement ses craintes � l’�gard d’un fichier policier intrusif.

La CNIL a elle aussi �mis les plus extr�mes r�serves sur une telle �ventualit�.

Pour la Cour europ�enne des droits de l’homme, l’�tablissement de fichiers contenant des donn�es biom�triques pour des citoyens ne faisant l’objet d’aucune poursuite judiciaire en cours constitue une violation flagrante des articles 8 et 14 de la Convention europ�enne de sauvegarde des droits de l’homme et des libert�s fondamentales. Il contrevient par ailleurs manifestement � la convention pour la protection des personnes � l’�gard du traitement automatis� des donn�es � caract�re personnel du Conseil de l’Europe. En substance, la promulgation de cette proposition de loi nous exposerait donc � des recours devant la CEDH, g�n�rant ainsi un climat d’ins�curit� juridique dont nous pouvons bien nous passer.

Pour toutes ces raisons, nous souhaitons le retour au lien faible. Lui seul impose des restrictions techniques qui rendent impossible l’usage de la base � des fins d�tourn�es.

Dans cette perspective, les freins juridiques pr�conis�s par le Gouvernement seront toujours moins efficaces, car constamment susceptibles d’�tre contourn�s ou lev�s.

Je suis m�me tr�s perplexe sur ce qui est parfois pr�sent� comme le grand atout du syst�me de base de donn�es � lien fort, � savoir sa fiabilit� � toute �preuve. Vous avez vous-m�me reconnu, monsieur le ministre, qu’un tel dispositif ne pourrait permettre de mettre un terme d�finitif au probl�me pos� par l’usurpation d’identit�. Vous avez signal� qu’on serait dans l’incapacit� de retrouver le fraudeur d�s lors que celui-ci se serait fait d�livrer le titre d’identit� d’une personne non encore inscrite dans les bases. Sur internet, d’ailleurs, il est toujours possible de se faire passer pour quelqu’un d’autre ou d’envoyer des messages avec une identit� usurp�e.

Bref, le lien fort est non seulement potentiellement attentatoire aux libert�s individuelles mais, en plus, il est loin d’�tre d’une efficacit� absolue. Et chacun d’entre nous sait tr�s bien que nous disposons d’ores et d�j� d’outils informatiques qui nous permettent ais�ment, en recourant � un syst�me de tamis, de lier, le cas �ch�ant, une identit� biographique � une identit� biom�trique.

Bref, m�me en s’affranchissant de consid�rations relatives � la d�fense des libert�s individuelles, le fait est que nous n’avons pas besoin d’une base de donn�es � lien fort. Si le seul objectif recherch� est la protection des victimes, alors le lien faible est la solution suffisante.

Au final, le dispositif envisag� par le Gouvernement aurait donc tout � la fois pour effet d’isoler notre pays en Europe, ce qui n’est jamais une bonne chose ; de l’exposer � d’inqui�tantes d�rives, dont chacun ici serait fort marri ; et surtout, s’agissant du fl�au que nous pr�tendons combattre, l’usurpation d’identit�, de laisser des marges de manœuvre aux d�linquants, qui arriveraient toujours � s’en sortir.

La voie propos�e m�ne, au mieux, � l’impasse, et au pire, � un contr�le policier de la population, inacceptable dans un r�gime comme le n�tre. Nous vous sugg�rons donc une derni�re fois d’avoir la sagesse, le bon sens de ne pas emprunter cette voie, et donc de renvoyer ce texte en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. le rapporteur.

M. Philippe Goujon, rapporteur. Je ne vais pas entrer � nouveau dans le fond du dossier. Cette motion de renvoi en commission est d’autant plus injustifi�e que nous avons examin� ce texte � trois reprises en commission, et que nous aurons l’occasion de l’examiner encore – ce sont les joies de la proc�dure parlementaire.

Surtout, je voudrais rappeler les conditions dans lesquelles la CMP a adopt�, par une majorit� de circonstance,…

M. Serge Blisko. Oh !

Mme Sandrine Mazetier. C’est scandaleux de dire cela !

M. Philippe Goujon, rapporteur. …un texte qui ne correspond pas du tout � ce sur quoi aurait d�bouch� une discussion normale de CMP. Lorsqu’une commission mixte paritaire se r�unit, et c’est l’article 45 de la Constitution qui le pr�voit, il s’agit pour chacune des deux assembl�es de tenter de faire un pas vers l’autre en vue d’aboutir � un texte qui puisse recueillir l’assentiment des deux chambres. C’est ce qu’a fait notre assembl�e. D’ailleurs, Serge Blisko a lui-m�me d�clar� en CMP que l’Assembl�e nationale avait finalement adopt� un texte beaucoup moins attentatoire aux libert�s publiques qu’en premi�re lecture, ce qui r�v�lait…

M. Serge Blisko. Gr�ce au S�nat !

M. Philippe Goujon, rapporteur. Mais enfin, c’est quand m�me l’Assembl�e qui a modifi� le texte !

…ce qui r�v�lait, disais-je, une v�ritable �volution.

M. Serge Blisko. Voil� un bon travail parlementaire.

M. Philippe Goujon, rapporteur. Voil� un bon travail parlementaire. Tr�s bien ! Il y a donc des critiques plus v�h�mentes.

� partir de l�, � quoi avons-nous eu affaire en CMP ? � un refus total, de la part du S�nat, de modifier si peu que ce soit ses positions. Mme Mazetier a eu raison de dire qu’il y avait une majorit� pour rejeter le texte dans une premi�re version, mais en CMP, une bonne partie de la majorit� s�natoriale a accept� le nouveau texte �manant de l’Assembl�e nationale. Par cons�quent, d�j�, la majorit� n’�tait plus la m�me. Or, ce qui se passe habituellement lorsque les positions des deux chambres sont inconciliables et qu’une seule d’entre elle fait des efforts de compromis, ce n’est pas qu’une assembl�e l’emporte sur l’autre, mais que la CMP �choue, apr�s quoi il est proc�d� � une nouvelle lecture du texte dans chacune des chambres. On peut donc consid�rer que nous sommes, peut-�tre pas devant un d�voiement de la proc�dure parlementaire, mais du moins devant une mauvaise mani�re qui a �t� faite au regard de l’usage habituel qui pr�vaut dans l’application de cette proc�dure.

Les propos de Mme Mazetier m’am�nent, pour finir, � donner une pr�cision. Le s�nateur Jean-Ren� Lecerf, qui est quand m�me l’auteur de la proposition de loi dont nous discutons – et qui fut �galement l’auteur d’un rapport remarqu� sur la fraude identitaire –, a d�clar� lors de cette CMP : � Il faut adopter le fichier � lien fort que propose l’Assembl�e, et dont elle a retir� – c’est cela qui est important, et que vous auriez d� reconna�tre, mes chers coll�gues – toute la toxicit�, faute de quoi nous n’aurons rien fait qui vaille. �

(La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n’est pas adopt�e.)

Discussion g�n�rale

Mme la pr�sidente. Dans la discussion g�n�rale, la parole est � M. Michel Hunault, premier orateur inscrit.

M. Michel Hunault. Madame la pr�sidente, mes chers coll�gues, comme l’ont rappel� le ministre et le rapporteur, apr�s deux lectures � l’Assembl�e nationale et au S�nat, et l’�laboration par la commission mixte paritaire d’un texte reprenant la version adopt�e par le S�nat, nous abordons � nouveau l’examen de cette proposition de loi relative � la protection de l’identit�, sur laquelle j’esp�re que nous parviendrons � trouver un accord.

S’il est un point sur lequel nous nous accordons tous, sur tous les bancs de cet h�micycle, c’est bien la n�cessit� de lutter contre le v�ritable fl�au qu’est l’usurpation d’identit�. Ce ph�nom�ne, comme l’a rappel� notre rapporteur, fait aujourd’hui plus de 200 000 victimes. Et j’insiste sur le mot � victime �, car si ce texte nous est soumis, c’est bien en vue de leur venir en aide.

Le souci des libert�s n’est pas partag� d’un seul c�t� de cet h�micycle. Mais il faut bien que nous trouvions une solution � un probl�me qui existe. C’est le but de cette proposition de loi. Il n’est pas toujours inutile de rappeler les objectifs des textes dont nous discutons.

Au-del� de la question de l’existence m�me d’un fichier, nous sommes appel�s � d�battre de ce qui constitue le cœur de la r�forme : l’architecture du fichier destin� � centraliser les donn�es biom�triques, ainsi que les garanties qui les entourent.

Poser la question de l’architecture d’un fichier central biom�trique, c’est s’interroger sur l’opportunit� d’une telle mesure au regard des droits et des libert�s fondamentaux dont chacun de nos concitoyens est en droit d’exiger le respect, notamment pour la protection de son intimit�. Ces droits et libert�s, nous devons les concilier avec la n�cessit� pour les services de police et de renseignement de disposer d’outils, de r�pertoires qui leur permettent de remplir efficacement leurs missions. Car, au-del� des pol�miques, c’est bien de la s�curit� qu’il s’agit, celle que l’�tat doit garantir � chacun.

Et je note, malgr� le d�part de nos coll�gues socialistes, qu’� chaque fois, monsieur le ministre, que vous-m�me ou vos pr�d�cesseurs nous avez propos� de doter vos services de fichiers, il y a toujours eu des oppositions. Je n’aurai pas la cruaut� de les rappeler � cette tribune. Et l’on sait aujourd’hui qu’en mati�re de recherche criminelle, ces fichiers ont permis de retrouver un certain nombre d’auteurs et d’�lever consid�rablement le taux d’�lucidation.

M. Philippe Goujon, rapporteur. Il a doubl� !

M. Michel Hunault. J’entends certains de mes coll�gues parler de la CNIL. Je respecte cette institution, qui est l� pour garantir les libert�s individuelles. Mais je n’oublie pas, monsieur le ministre, et je veux le dire solennellement � cette tribune, que quand vous �tes venu devant la commission pour parler de la s�curit� des biens et des personnes, le repr�sentant de la nation que je suis – au m�me titre que ses 576 coll�gues – vous a interrog� sur la position de la CNIL, qui combat mes amendements tendant � autoriser les cam�ras autour des �tablissements scolaires afin d’accro�tre la s�curit� des lyc�ens et des coll�giens victimes du racket et du trafic de drogue, et que j’ai re�u le lendemain une lettre de la nouvelle pr�sidente de la CNIL s’�tonnant qu’un d�put� de la R�publique puisse oser demander au ministre de l’int�rieur que l’on installe � nouveau des cam�ras. Eh bien oui, j’assume ici, � la tribune de cet h�micycle, devant mes �lecteurs et devant la nation, qu’il est de notre mission d’assurer la s�curit� des biens et des personnes.

M. Philippe Goujon, rapporteur. Absolument !

M. Michel Hunault. Mes engagements, notamment au sein de la commission des droits de l’homme du Conseil de l’Europe, o� j’ai si�g� durant dix-huit ans, d�montrent que je suis au moins aussi attach� que tout autre aux libert�s individuelles. Mais je suis � vos c�t�s, monsieur le ministre, quand il s’agit de doter vos services des moyens indispensables pour qu’ils puissent s’adapter aux nouvelles formes de la criminalit�. Et l’usurpation d’identit� est une forme de criminalit� organis�e, dont 200 000 de nos compatriotes sont victimes, et contre laquelle ce texte a pour but de lutter efficacement.

Plut�t que de donner des le�ons en mati�re de respect des libert�s, chacun devrait mesurer ses propos. Personne n’a le monopole de la d�fense des libert�s individuelles.

M. Pierre Lang. Ni de la vertu !

M. Michel Hunault. Le dispositif que vous nous proposez, monsieur le rapporteur, est �quilibr�. La r�daction de l’article 5 propos�e par le S�nat enl�ve � la proposition de loi tout son sens, � savoir la protection de l’identit�. Comment �viter � nos concitoyens de se trouver d�poss�d�s de leur identit� s’il est impossible d’identifier les fraudeurs ? C’est l� une question de bon sens, qui appelle la r�ponse que vous nous proposez.

Il me semble qu’on aurait pu faire l’�conomie d’un d�bat sur le point de savoir lequel, du d�put� ou du s�nateur, serait le plus soucieux de l’efficacit�. Dans un r�gime qui compte deux chambres, elles ont une �gale l�gitimit� d�mocratique. Et je suis de ceux qui pensent que les deux chambres sont utiles.

M. Christian Vanneste. L’une plus que l’autre, quand m�me !

M. Michel Hunault. Je me f�licite que le texte adopt� par notre assembl�e en deuxi�me lecture ait retenu la technique du lien fort. Ces dispositions sont les bienvenues. En deuxi�me lecture, nous avons apport� des garanties juridiques importantes, afin de pr�server les libert�s fondamentales de nos concitoyens. C’est m�me M. Blisko qui l’a dit tout � l’heure : il est n�cessaire de recueillir l’autorisation du juge pour avoir acc�s � certaines donn�es.

Monsieur le ministre, nous avons d�battu hier soir d’une proposition de loi relative � la simplification du droit. Je me suis �lev� contre l’amendement � l’article 59 qui a affaibli le dispositif de lutte contre le blanchiment. Il se trouve que j’ai �t� le rapporteur des lois de lutte contre le blanchiment et la corruption. Vous savez que l’�conomie souterraine est une r�alit�. Je pense que ce n’est pas le moment de baisser la garde.

J’avais par ailleurs d�pos� un amendement tendant � permettre � vos services, avec l’autorisation du juge, de proc�der � l’ouverture des coffres de voiture, ce qui n’est aujourd’hui possible que pour les services de douane. On m’a dit que mon amendement �tait irrecevable. Notre souci doit �tre de proposer des textes �quilibr�s. Or la s�curit� est la premi�re des libert�s.

M. Yvan Lachaud. Tr�s bien !

M. Christian Vanneste. Montesquieu.

M. Michel Hunault. C’est une mission r�galienne, que vous vous efforcez de mener � bien, monsieur le ministre. Lutter contre les d�linquants, avoir un langage de fermet�, ce n’est pas forc�ment populaire. Mais il y a une exigence qui est commune au ministre et au l�gislateur : nous ne sommes pas l� pour plaire, nous sommes l� pour remplir notre mission. Je regrette qu’il y ait un d�s�quilibre dans certains textes que vous voulez faire passer, monsieur le ministre.

S’agissant de celui-ci, dont l’objet est fondamental, nous en sommes � la troisi�me lecture. Nous sommes aussi garants que nos coll�gues de l’opposition de cette exigence de respect des libert�s individuelles. C’est au nom de mes coll�gues du Nouveau Centre, et tout particuli�rement d’Yvan Lachaud, qui travaille beaucoup sur ces questions, que je vous apporte notre soutien. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Marc Dolez.

M. Marc Dolez. Madame la pr�sidente, monsieur le ministre, mes chers coll�gues, depuis son d�p�t en juillet 2010, cette proposition de loi a fait l’objet d’un long feuilleton marqu� par l’obstination du Gouvernement � �tablir une base de donn�es � lien fort. Notre conviction est � la hauteur de cette obstination. La carte d’identit� biom�trique associ�e � un fichier central de grande ampleur, portant sur plus de 40 millions de Fran�ais, pourrait se transformer en outil dangereux voire liberticide.

La tra�abilit� des individus est susceptible de g�n�rer des contr�les et surveillances � leur insu, comme l’a brillamment d�montr� l’ancien pr�sident de la CNIL, le s�nateur du Nord Alex T�rk, dans un ouvrage intitul� La vie priv�e en p�ril, des citoyens sous contr�le.

Les donn�es biom�triques ne sont pas des donn�es � caract�re personnel comme les autres. Elles pr�sentent la particularit� de permettre � tout moment l’identification de la personne concern�e sur la base d’une r�alit� biologique qui lui est propre, permanente dans le temps, et dont elle ne peut s’affranchir. Cette sp�cificit� implique une vigilance toute particuli�re quant � leur utilisation ; en respectant les deux principes fondateurs du droit � la protection des donn�es � caract�re personnel : la finalit� et la proportionnalit�.

Or c’est pr�cis�ment � cet �gard que cette proposition de loi suscite de vives inqui�tudes. La Commission nationale de l’informatique et des libert�s, qui n’a pas �t� consult�e sur cette proposition de loi, a pris l’initiative de pr�senter des observations le 25 octobre dernier. Si elle n’est pas hostile par principe � l’utilisation de la biom�trie dans le cadre de la d�livrance des titres d’identit�, la CNIL estime en revanche que � la proportionnalit� de la conservation sous forme centralis�e de donn�es biom�triques, au regard de l’objectif l�gitime de lutte contre la fraude documentaire, n’est pas � ce jour d�montr�e �.

Cet avis est �galement partag� par le Comit� consultatif national d’�thique et par la Commission nationale consultative des droits de l’homme. La Cour europ�enne des droits de l’homme, par un arr�t du 4 d�cembre 2008, a jug� que la pratique du � fichage g�n�tique �, comportant notamment les empreintes digitales de la population, �tait incompatible avec la Convention europ�enne des droits de l’homme. La Cour a ainsi estim� que � le caract�re g�n�ral et indiff�renci� du pouvoir de conservation des empreintes digitales, �chantillons biologiques et profils ADN des personnes soup�onn�es d’avoir commis des infractions mais non condamn�es [...] ne traduit pas un juste �quilibre entre les int�r�ts publics et priv�s concurrents en jeu �.

Cet arr�t s’inscrit dans la continuit� de la jurisprudence ant�rieure qu’il vient syst�matiser autour de trois propositions principales, comme le rel�ve le professeur Fr�d�ric Sudre. En premier lieu, la m�morisation des donn�es relatives � la vie priv�e d’un individu constitue une ing�rence dans le droit garanti par l’article 8, que ces donn�es soient utilis�es par la suite ou non.

En second lieu, pour d�terminer si les donn�es conserv�es rel�vent de la � vie priv�e �, et donc du champ prot�g� par l’article 8, la Cour recourt � plusieurs crit�res : la nature des donn�es et le contexte dans lequel elles ont �t� consign�es ; les modalit�s de leur conservation et de leur traitement ; la finalit� de leur utilisation.

En troisi�me lieu, rappelant que la protection des donn�es � caract�re personnel joue un r�le fondamental pour l’exercice du droit au respect de la vie priv�e et familiale, la Cour affirme le principe, d�j� �nonc� � propos des informations relatives � la sant�, du contr�le rigoureux de la proportionnalit� de l’ing�rence au but poursuivi.

Cela implique que, pour �tre conformes � l’article 8, la conservation et l’utilisation de donn�es � caract�re personnel sans le consentement de la personne concern�e doivent s’accompagner de garanties ad�quates contre les abus, lesquelles sont pr�cis�es par la Convention du Conseil de l’Europe de 1981 sur la protection des donn�es.

Si elle �tait adopt�e, cette proposition de loi s’exposerait donc � des recours devant la Cour europ�enne des droits de l’homme, et le risque est grand que la France soit condamn�e.

Le syndicat de la magistrature, le syndicat des avocats de France et la Ligue des droits de l’homme ont vivement d�nonc� dans un communiqu� commun ce fichage � terme de l’ensemble de la population fran�aise qui repr�sente, selon eux, � une disposition d�mesur�e et dangereuse pour les libert�s publiques, unique dans les pays d�mocratiques, et qui laisse la porte ouverte � toutes les d�rives. �

M. Pierre Lang. Si les syndicats l’ont d�nonc�e, alors c’est une bonne proposition de loi !

M. Marc Dolez. En d�pit de toutes ces critiques et mises en garde, le Gouvernement reste h�las d�termin� � r�tablir le lien fort qui permet techniquement d’utiliser le fichier � d’autres fins que la protection contre l’usurpation d’identit�. Il suffit de se r�f�rer � l’article 5 pour comprendre que la finalit� du fichier n’est pas simplement administrative.

M�me si des assouplissements ont �t� ins�r�s en deuxi�me lecture, tendant � consolider le r�gime juridique d’acc�s au fichier central, ceux-ci ne sont gu�re suffisants pour garantir la protection des libert�s individuelles, car le cœur du dispositif reste identique. D’ailleurs, apr�s la deuxi�me lecture, la CNIL a r�it�r� son opposition en ces termes : � Sur la carte d’identit� biom�trique, nous avions consid�r� que la cr�ation d’une base centrale �tait disproportionn�e au regard de l’objectif de s�curisation des titres. Si toutefois la base centrale est constitu�e, la meilleure garantie contre les utilisations d�tourn�es serait la garantie technique, celle du lien faible. C’est pourquoi la CNIL est inqui�te : les restrictions juridiques seront toujours moins efficaces que les restrictions techniques, qui rendent impossibles l’utilisation de la base � des fins d�tourn�es. �

Pour notre part nous contestons la cr�ation de ce type de fichier central, qui constitue une menace pour les libert�s publiques. C’est pour cette raison essentielle que le groupe GDR votera une nouvelle fois contre ce texte.

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Christian Vanneste.

M. Christian Vanneste. Madame la pr�sidente, monsieur le ministre, mes chers coll�gues, nous arrivons aujourd’hui � la derni�re �tape de l’�tude du texte consacr� � la protection de l’identit�. Je serais tent� de dire que le chemin que nous avons suivi a �t� beaucoup trop long en raison des obstacles que certains ont cru devoir mettre � notre recherche d’une protection des personnes contre un d�lit particuli�rement douloureux de notre �poque, notamment en raison de son d�veloppement sur internet.

L’usurpation de l’identit� consiste � s’emparer de ce qui constitue l’essentiel pour une personne dans son existence sociale : �tre bien celle qu’elle est, �tre reconnue comme telle par les autres, capable d’agir et de faire valoir ses droits. � partir du moment o� l’usurpateur a pris sa place, la vie de la victime peut devenir un cauchemar. Elle peut �tre ainsi priv�e de l’usage de ses biens et de ses avoirs, poursuivie en justice pour des faits qu’elle n’a pas commis, emp�ch�e de se marier et de se d�placer. Bref, sa vie peut �tre totalement vampiris�e.

Il existe trois fa�ons de lutter contre ce fl�au, qui est en expansion. L’Observatoire national de la d�linquance et des r�ponses p�nales recensait 13 900 fraudes documentaires � l’identit� en 2009, la direction des affaires criminelles et des gr�ces avait estim� � 11 621 le nombre des condamnations correspondantes. Si l’on �largit le champ de la d�linquance identitaire � l’usage illicite de donn�es personnelles, les chiffres sont beaucoup plus consid�rables, puisque le Credoc a publi� une �tude relevant 210 000 victimes en 2009 et 213 000 en 2010. Le co�t en est �valu� pour 2010 par l’inspection g�n�rale de l’administration � 20 milliards d’euros.

Certes, il est possible de consid�rer que le champ de ces infractions est plus large que celui de l’usurpation d’identit�, mais il me para�t int�ressant de souligner que ces fameuses donn�es personnelles que l’on veut prot�ger de l’intrusion des services publics ne sont effectivement pas suffisamment prot�g�es, mais des fraudeurs.

La premi�re solution consiste � prendre la fraude en g�n�ral, et la fraude � l’identit� en particulier, au s�rieux. Deux r�ponses peuvent alors �tre apport�es : soit l’on pr�vient le risque en amont en �tablissant un registre national des personnes, avec un num�ro unique d’identification. Cette mesure, qui existe dans plusieurs pays europ�ens, de vieilles d�mocraties comme la Su�de ou la Belgique, est un moyen de contr�le l�gitime dans une d�mocratie sociale ou l’�tat providence se donne les moyens d’�viter les abus et les fraudes qui peuvent na�tre d’un syst�me de protection sociale tr�s g�n�reux. Soit l’on consid�re, dans une conception plus lib�rale, que l’individu, moins prot�g� socialement, ne doit pas non plus subir un contr�le social trop important, ce qui est le cas en g�n�ral dans les pays anglo-saxons. Mais alors, on punit tr�s s�v�rement les usurpations.

Depuis 2005, le Royaume Uni avec le Fraud Bill consid�re l’usurpation d’identit� comme un crime passible de dix ans d’emprisonnement. Le Canada applique la m�me peine de dix ans. De nombreux pays augmentent les peines afin d’enrayer l’accroissement des usurpations d’identit� num�rique. On comprend la logique propre aux deux syst�mes, pr�ventif ou r�pressif : soit l’on prot�ge les victimes a priori en contr�lant davantage tout le monde ; soit l’on prot�ge au maximum les donn�s personnelles de tout contr�le, mais alors on r�prime avec s�v�rit� et a posteriori les atteintes � l’identit� qui proviennent justement de la faiblesse du contr�le.

La seconde solution adopt�e par le S�nat dans ce que certains appellent sa sagesse consiste � ne jeter qu’un regard distrait sur les victimes et � se priver des moyens d’identifier l’usurpateur. Vous pensez : cela risquerait d’�viter la r�cidive ! La raison invoqu�e est le respect des libert�s publiques, c’est-�-dire des libert�s abstraites qui vont prot�ger l’anonymat du d�linquant au d�triment de ses futures victimes. La belle �me socialiste d�tourne pudiquement son regard des victimes pour se p�mer devant la statue de la libert� tandis que, tr�s concr�tement, des personnes en chair et en os perdent leur libert� r�elle d’agir, de vivre, d’�tre elles-m�mes. La belle �me socialiste veut avoir les mains pures, mais c’est parce qu’elle n’a pas de mains, comme aurait dit Charles P�guy, des mains capables d’arr�ter les faussaires.

Il faut d’ailleurs reconna�tre que la belle �me socialiste en conna�t un bout en mati�re d’usurpation !

M. Serge Blisko. Pardon ?

M. Christian Vanneste. � La R�publique rattrapera les d�linquants �, proclame son candidat, mais nous voyons, nous, que texte apr�s texte le parti socialiste fait tout pour qu’on ne les rattrape pas ou qu’on les rel�che au plus vite. C’est particuli�rement net dans le cas pr�sent puisque le groupe socialiste s’arc-boute sur la technique du lien faible qui ne permet pas d’identifier l’usurpateur, de rattraper le d�linquant. Dites-le � votre candidat !

Lors de son audition par la mission d’�valuation et de contr�le des lois de financement de la s�curit� sociale, Michel Bergue, directeur du projet de lutte sur la fraude documentaire et d’identit�, soulignait que 80 % des fraudes � l’identit� d�tect�es sont le fait de ressortissants �trangers souhaitant se maintenir irr�guli�rement sur le territoire. Il ajoutait que ces faux titres de s�jour pouvaient servir de support � d’autres fraudes, � la l�gislation du travail comme � la l�gislation fiscale ou sociale, ou encore � mettre en place des escroqueries pures et simples. On comprend mieux, avec cet exemple, l’hostilit� du groupe socialiste, notamment au S�nat, � l’encontre de ce texte.

Entre ces deux solutions, nous en avons choisi une troisi�me, m�diane, que le rapporteur a rappel�e tout � l’heure. Cette solution devait s’adapter aux avis de la CNIL, toujours frileuse quant aux croisements de fichiers. Je rappelle, comme l’a tr�s bien fait Michel Hunault tout � l’heure, que la CNIL doit certes �tre �cout�e, mais que sa l�gitimit� est inf�rieure � celle du Parlement. Dans le texte issu de la seconde lecture � l’Assembl�e nationale, il s’agit d’une part de se donner les moyens d’identifier les usurpateurs afin d’�viter toute r�cidive et de prot�ger efficacement les victimes. C’est pourquoi nous avons retenu la technique du lien fort dans la base TES.

En revanche, nous avons exclu toute possibilit� de recours � la reconnaissance faciale. La base ne pourra �tre consult�e que sous le contr�le d’un magistrat, uniquement dans le cadre des enqu�tes de flagrance, des enqu�tes pr�liminaires, dans l’ex�cution de commissions rogatoires li�es � des infractions de fraudes � l’identit�, ou encore pour l’identification de victimes de catastrophes naturelles. Un exemple r�cent vient de nous rappeler l’utilit� de cet usage, M. le rapporteur y a fait r�f�rence.

Ces reculs par rapport au texte initial avaient pour but de permettre un consensus, une unanimit� sur un sujet qui n’aurait pas d� cr�er de pol�mique puisqu’il touche � trois questions majeures. Malheureusement l’opposition d�sormais majoritaire au S�nat s’y est refus�e en ignorant superbement trois questions.

D’abord celle de la protection des victimes. Il est clair que l’opposition d�fend la libert� du renard fraudeur dans le poulailler des honn�tes gens.

Ensuite celle de la lutte contre la fraude, qui contribue si puissamment au d�s�quilibre de notre d�pense publique et transforme donc tous les Fran�ais en victimes.

Enfin celle de la volont� de faire que non seulement le d�lit soit rendu plus difficile mais aussi que le d�linquant soit rattrap� et sanctionn�.

Ce texte est donc n�cessaire m�me s’il n’est pas suffisant, et le groupe UMP le soutient en soulignant du m�me coup l’irresponsabilit� � r�p�tition de l’opposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la pr�sidente. La discussion g�n�rale est close.

Article 5

Mme la pr�sidente. J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, l’article 5 de la proposition de loi, qui est le seul restant en discussion.

La parole est � Mme Sandrine Mazetier, inscrite sur l’article.

Mme Sandrine Mazetier. Je reviendrai sur la gen�se de cette proposition de loi et sur l’�tonnante vision de la coproduction l�gislative qui est celle du Gouvernement et du rapporteur de ce texte � l’Assembl�e.

Le Gouvernement a fait plusieurs tentatives de projet de loi et, � plusieurs reprises, il a d� retirer son texte pour finalement passer par une proposition de loi.

Celle-ci a �t� combattue par la majorit� des membres du groupe auquel appartenait l’auteur de cette proposition de loi au S�nat. Aujourd’hui, dans le rapport de notre coll�gue Goujon, on d�crit comme un insupportable d�voiement de la proc�dure pr�vue par l’article 45 de la Constitution le fait que la commission mixte paritaire rassemblant des s�nateurs et des d�put�s qui, soumis au principe de l’entonnoir, travaillent et tentent de se mettre d’accord, se soit oppos�e � ce qui reste en discussion, l’article 5 de cette proposition de loi.

Loin d’�tre une majorit� de circonstance, comme le dit M. Goujon, c’est une majorit� de fond et d’id�es qui d�fend une vision des parlementaires partag�e par des parlementaires, tous groupes confondus, dans le Parlement, au sens le plus noble.

M. Marc Dolez. Eh oui !

Mme Sandrine Mazetier. Le Gouvernement, qui se d�guise derri�re cette initiative parlementaire, s’obstine � passer en force. Il devrait plut�t prendre acte du regard extr�mement n�gatif, en mati�re de lutte contre l’usurpation d’identit� et de protection des libert�s individuelles et collectives, que le Parlement de la France a, presque unanimement, jet� sur la technique contenue dans l’article 5, auquel nous nous opposons une nouvelle fois.

Mme la pr�sidente. Je suis saisie d’un amendement n� 1.

La parole est � M. Serge Blisko, pour le d�fendre.

M. Serge Blisko. Nous avons eu ce d�bat � plusieurs reprises et Mme Mazetier a d�j� tout dit.

Mais je ne peux pas laisser dire qu’il y aurait une bonne majorit� � l’Assembl�e nationale et qu’au S�nat on ne trouverait que des irresponsables, comme semble le penser M. Vanneste, ou des personnes soucieuses de libert�s formelles plus que r�elles.

Un vrai d�bat a eu lieu et, par un �trange court-circuit, vous oubliez de pr�ciser que la CMP �tait conclusive et qu’une majorit� s’y est constitu�e.

Comme l’a dit excellemment Mme Mazetier, ce n’�tait pas la majorit� automatique et simpliste de la droite contre la gauche.

Mme Sandrine Mazetier. C’�tait une majorit� d’id�es.

M. Serge Blisko. Cette majorit� repr�sentait tous les groupes et toutes les familles politiques. C’est important, car, sur cette question des libert�s collectives et individuelles, les r�publicains se sont retrouv�s.

M. Philippe Goujon, rapporteur. Ce n’est pas vrai !

M. Serge Blisko. Nous aussi, nous avons fait des concessions. M. Dolez l’a dit, nous �tions contre tout fichier et toute base de donn�es.

Le S�nat, dans sa diversit� r�publicaine, est arriv� � cette conclusion, et cet amendement reprend ce qu’il a vot�. Nous r�tablissons cet amendement pour montrer � quel point nous sommes respectueux et attach�s au travail que cette majorit� d’id�es r�publicaine a men� au S�nat.

Je regrette que le Gouvernement et la majorit� de l’Assembl�e nationale soient ferm�s au bon travail parlementaire qui a �t� fait tout au long de ces mois.

Nous pr�sentons donc cet amendement qui est fid�le au texte du S�nat.

M. Marc Dolez. Tr�s bien !

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Goujon, rapporteur. L’avis de la commission est d�favorable.

Ce plaidoyer s�natorial de mes coll�gues est assez touchant, d’autant plus qu’il est tr�s r�cent.

Mme Sandrine Mazetier. C’est plut�t un plaidoyer parlementaire !

M. Philippe Goujon, rapporteur. Mais l’histoire n’est pas celle qui vient d’�tre d�crite.

En commission mixte paritaire – commission qui doit se r�unir pour aboutir � un compromis et non pas pour passer en force –, je vous rappelle, mes chers coll�gues, que le groupe UMP a vot� dans le sens contraire de votre majorit� s�natoriale.

M. Serge Blisko. C’est donc � revoir !

M. Philippe Goujon, rapporteur. Non, c’est tr�s clair. Il n’y a pas une majorit� r�publicaine pour un texte et une minorit� contre. Les choses ne se sont pas pass�es de cette mani�re.

Je ne reviendrai pas sur le fond du texte, mais, il est �vident, comme l’ont rappel� excellemment mes coll�gues Vanneste et Hunault, que le syst�me � lien faible ne fonctionne pas.

D’ailleurs, il n’est utilis� nulle part au monde et, de surcro�t, il ne peut pas �tre produit par nos industriels, qui en refusent le principe m�me. M. Blisko, qui �tait pr�sent � l’audition du GIXEL, le Groupement fran�ais des industries de composants et de syst�mes �lectroniques, s’en souvient comme moi.

Il est plus intrusif pour les libert�s publiques que le syst�me � lien fort. En effet, s’il n’y a pas de lien univoque entre l’identit� et les empreintes, la police doit intervenir et faire des enqu�tes sur une centaine de personnes pour retrouver un fraudeur. Ainsi, une centaine de suspects seront d�rang�s et leur vie sera troubl�e, pour que la police puisse d�tecter le fraudeur parmi eux. Avec un lien univoque, on obtiendra imm�diatement l’identit� du fraudeur par des moyens informatiques. C’est essentiel et beaucoup plus efficace.

On a entendu beaucoup de contrev�rit�s. Je rappelle donc qu’il ne s’agit pas d’un fichier judiciaire, mais d’un fichier administratif comme il en existe beaucoup – je pense notamment au fichier du surendettement, qui recense des dizaines de millions de personnes.

Vous l’avez reconnu vous-m�me, monsieur Blisko, nous avons fait du bon travail et nous avons fait �voluer ce texte en apportant des garanties � la protection des libert�s publiques.

� ce titre, l’amendement du Gouvernement est essentiel : l’acc�s � la base centrale a �t� restreint par rapport au droit commun des fichiers administratifs. Sur r�quisition judiciaire, on ne pourra acc�der � la base centrale que pour des recherches de fraudes identitaires qui, certes peuvent prendre de nombreuses formes. Mais c’est la seule raison qui permettra � la police d’entrer dans la base de donn�es pour rechercher le fraudeur.

� cela s’ajoute bien s�r l’identification des corps des victimes de catastrophes naturelles. Mon coll�gue Vanneste l’a rappel�, des recherches de ce type sont extr�mement utiles dans le cas de catastrophes comme celle du Costa Concordia.

Beaucoup d’avanc�es ont �galement �t� faites en mati�re de protection des libert�s publiques en r�ponse aux souhaits de la CNIL. Nous avons pratiquement accept� toutes les demandes de la CNIL, notamment l’encadrement de la base centrale, mais aussi les recommandations du Conseil d’�tat, qui reconna�t le caract�re proportionn� de la base centrale.

J’entendais certains d’entre vous attaquer la base centrale. Pourtant, le Conseil d’�tat comme la CNIL en admettent le bien-fond�, cela ne fait pas de doute.

Nous avons renonc� � l’interconnexion des donn�es digitales et faciales, puisque la reconnaissance faciale a �t� explicitement exclue, comme le souhaitait la CNIL. Nous sommes pass�s de huit � deux empreintes biom�triques, conform�ment � la demande de la CNIL.

Nous allions la protection des libert�s publiques et l’efficacit� dans la lutte contre la fraude identitaire.

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Claude Gu�ant, ministre. Je ne r�p�terai pas les arguments que vient de pr�senter votre rapporteur.

Mais, en effet, il est tr�s clair, monsieur Blisko, que nous avons des approches diff�rentes de ce dossier. Voici pourquoi.

Nous partageons tous le m�me constat : l’usurpation d’identit� est un fait grave, c’est un fl�au qui, quantitativement, est important. Par cons�quent, il faut nous donner les moyens de lutter contre.

Mais nous constatons deux approches. Celle du Gouvernement et du rapporteur consiste � dire : � Puisque nous avons les moyens techniques pour identifier l’usurpateur, utilisons-les. � L’autre approche, exprim�e par les orateurs de gauche, consiste � dire : � Surtout, ne nous donnons pas les moyens de parvenir � l’identification de l’usurpateur. Nous disposons d’un moyen formidable, le lien faible, qui permet de ne pas �tre efficace. � Ce syst�me nous conduit � l’identification de quelques dizaines de personnes suspectes d’usurpation, voire d’une centaine, selon les experts. Par cons�quent, il faudra mener une enqu�te particuli�re sur chacune de ces personnes. C’est une conception assez curieuse pour exprimer la volont� d’aboutir � l’�radication de l’usurpation qui, comme tout le monde le dit, est un v�ritable fl�au.

Malheureusement, nous avons pu constater cette diff�rence d’approche en �coutant les propos de M. Urvoas sur le fichier national des empreintes g�n�tiques. Lors de la derni�re lecture, il avait regrett� – il l’a encore regrett� aujourd’hui mais de mani�re moins d�taill�e – toutes les infractions pour lesquelles il existait une extension de la possibilit� d’utiliser le fichier. Je suis constern� par l’�num�ration de ces infractions car, tous les jours, des victimes trouvent justice gr�ce aux preuves apport�es par le fichier. M. Urvoas aurait pu pr�ciser que, d�s la cr�ation du fichier, son parti y �tait hostile.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement �met un avis d�favorable.

(L’amendement n� 1 n’est pas adopt�.)

(L’article 5 est adopt�.)

Vote sur l’ensemble

Mme la pr�sidente. Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.

(L’ensemble de la proposition de loi est adopt�.)

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Contr�le moderne des armes

Discussion, en deuxi�me lecture, d’une proposition de loi

Mme la pr�sidente. L’ordre du jour appelle la discussion, en deuxi�me lecture, de la proposition de loi relative � l’�tablissement d’un contr�le des armes moderne, simplifi� et pr�ventif. (nos 4062, 4184)

La parole est � M. Claude Gu�ant, ministre de l’int�rieur, de l’outre-mer, des collectivit�s territoriales et de l’immigration.

M. Claude Gu�ant, ministre de l’int�rieur, de l’outre-mer, des collectivit�s territoriales et de l’immigration. Madame la pr�sidente, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les d�put�s, un peu plus d’un an apr�s son examen en premi�re lecture, la proposition de loi relative � l’�tablissement d’un contr�le des armes moderne, simplifi� et pr�ventif revient devant vous, apr�s son adoption par le S�nat le 8 d�cembre dernier.

Comme vous, les s�nateurs ont adopt� le texte � l’unanimit�. Ces deux votes consensuels illustrent l’importance que nous accordons tous � ce texte et, au-del�, � la n�cessit� de faire �voluer la r�glementation des armes.

D�s le 28 mai 2009, devant les principaux acteurs de la s�curit�, de la cha�ne p�nale et de l’�ducation nationale, le Pr�sident de la R�publique avait demand� que soit engag�e une r�flexion � sur les moyens d’am�liorer la r�glementation du commerce d’armes � afin, notamment, de � mettre fin � la banalisation du port d’armes dans la rue �.

Plusieurs drames r�cents sont venus nous rappeler la n�cessit� d’engager la r�forme voulue par le chef de l’�tat.

Rappelons-nous que, lors de l’examen du texte au S�nat, nous avions appris avec peine et �motion le d�c�s du lieutenant Lales, fonctionnaire de police d’Aix-en-Provence, abattu par des malfaiteurs � l’arme de guerre.

Nous devons tout faire pour emp�cher que des armes, souvent m�me des armes de guerre, ne se retrouvent entre les mains des trafiquants et des d�linquants.

Le Gouvernement est pleinement conscient de ces dangers. La lutte contre les trafics d’armes fait partie de ses priorit�s. La mobilisation des forces de s�curit� int�rieure porte ses fruits.

En 2011, ce sont 3 500 armes qui ont �t� saisies, contre 2 719 en 2010, soit une augmentation de plus de 28 %. Il faut donc poursuivre les efforts. C’est pourquoi une nouvelle l�gislation est n�cessaire.

Ce texte a fait suite aux travaux de la mission d’information parlementaire sur les violences par armes � feu et l’�tat de la l�gislation, que vous aviez cr��e.

Son rapport a �t� adopt� en juin 2010 � l’unanimit� des membres de la commission des lois de l’Assembl�e nationale.

Il s’est enrichi des r�flexions et �changes nombreux avec les d�tenteurs l�gitimes d’armes � feu, chasseurs, tireurs sportifs, collectionneurs ou armuriers, r�unis dans le comit� Guillaume Tell, avec lequel le minist�re de l’int�rieur entretient un dialogue r�gulier et constructif.

Vous l'avez compris, le texte qui vous est pr�sent� aujourd'hui refl�te le long et fructueux travail de concertation avec l'ensemble des parties prenantes.

Il s'agit surtout d'un texte de qualit�, que votre commission des lois a adopt� il y a quelques jours, apr�s avoir compl�t� et ajust� les dispositions issues du S�nat. Sous l'�gide de votre rapporteur, elle a fait, pendant la gen�se de ce texte, un remarquable travail que je veux saluer ici.

Gr�ce � tous ces efforts combin�s, nous examinons aujourd'hui un texte �quilibr� r�pondant � une double exigence : exigence de simplification du droit, d'abord, car pour �tre connue et appliqu�e par tous, la loi doit �tre claire et compr�hensible ; exigence de s�curit� publique, ensuite, en renfor�ant les moyens juridiques de lutte contre le trafic d'armes.

Le texte que nous examinons aujourd'hui r�pond d'abord � l'imp�ratif de simplification de notre l�gislation sur les armes.

La l�gislation en vigueur est devenue, au fil du temps, inadapt�e par rapport aux enjeux actuels. Tous les acteurs le soulignent.

H�riti�re du d�cret-loi du 18 avril 1939, notre l�gislation sur les armes n'a pris en compte ni les �volutions technologiques ni les �volutions sociologiques de la d�linquance survenues depuis.

Il ressort ainsi des travaux conduits par l'Assembl�e nationale et le S�nat la n�cessit� d'une refonte de ce dispositif complexe, ma�tris� seulement par quelques sp�cialistes.

Le texte propose donc une nouvelle classification des armes. Plus simple et plus accessible, elle permet aussi de mettre notre droit en conformit� avec nos obligations europ�ennes en la mati�re.

Au lieu des huit cat�gories actuelles, il y aura donc, d�sormais, quatre grandes cat�gories d'armes :

Cat�gorie A : les armes de la cat�gorie A sont � interdites � l'acquisition et � la d�tention � ;

Cat�gorie B : armes � soumises � autorisation � ;

Cat�gorie C : armes � soumises � d�claration � ;

Cat�gorie D : les autres armes, celles soumises � enregistrement et celles dont la d�tention est libre.

Par ailleurs, et c’est une innovation consid�rable, les crit�res de classification correspondront d�sormais � la dangerosit� r�elle : le tir est-il r�p�table rapidement et facilement, l'arme a-t-elle une grande capacit� de tir, etc. Ils ne reposeront plus sur le crit�re d�pass� du �calibre de guerre � m�me si les calibres les plus dangereux resteront toujours interdits � l'acquisition et � la d�tention.

M. Pierre Lang. Tr�s bien !

M. Claude Gu�ant, ministre. Le texte adopt� par le S�nat a pr�cis� la d�finition de la cat�gorie A et rend donc plus ais�e la mise en oeuvre des dispositions de la loi du 22 juin 2011 relative au contr�le des importations et des exportations de mat�riels de guerre et de mat�riels assimil�s, � la simplification des transferts des produits li�s � la d�fense dans l'Union europ�enne et aux march�s de d�fense et de s�curit�.

De nouvelles dispositions sont �galement pr�vues pour les collectionneurs avec la cr�ation de la carte du collectionneur, que nous avions �voqu�e il y a un an, et qui a �t� pr�cis�e au S�nat, au terme d'une r�flexion approfondie avec les repr�sentants des associations de collectionneurs. Ses titulaires se voient reconna�tre la possibilit� d'acqu�rir et de d�tenir des armes soumises � d�claration, la collection constituant d�sormais un motif l�gitime d'acquisition.

Les collectionneurs pourront �galement acc�der librement � de nouvelles armes et � de nouveaux mat�riels de guerre, en raison du rel�vement � 1900 pour les armes et 1946 pour les mat�riels les mill�simes d�finissant le caract�re d'arme ou de mat�riel de collection.

Au-del� de la simplification du droit, le texte que nous examinons aujourd'hui renforcera les dispositifs techniques existants de lutte contre le trafic d'armes.

Le Gouvernement a d'ores et d�j� pris deux mesures d'ordre r�glementaire pour renforcer le contr�le de la circulation des armes dans notre pays.

Premi�re mesure : le fichier AGRIPPA – application de gestion du r�pertoire informatis� des propri�taires et possesseurs d’armes – est devenu un outil efficace et moderne de tra�abilit� des armes en circulation. Cette application recense � ce stade 3,5 millions de d�tenteurs d'armes.

Cet outil permet de tracer les armes soumises � autorisation, � d�claration et, depuis le 1er d�cembre 2011, � enregistrement pour les armes de chasse acquises � compter de cette date.

Depuis l'adoption de la loi � l'Assembl�e nationale le 25 janvier 2011, la base AGRIPPA s'est modernis�e pour rem�dier aux imperfections signal�es dans le rapport de la mission d'information parlementaire. Jusqu'� tr�s r�cemment, seuls les agents des pr�fectures b�n�ficiaient d'un acc�s direct � cette application. Si les forces de s�curit� avaient besoin d'un renseignement, elles devaient donc saisir les pr�fectures avec les d�lais que cela induit. Le rapport de la mission parlementaire avait � juste titre relev� cette anomalie. Aussi, je vous confirme que l'ensemble des unit�s de police et de gendarmerie peuvent d�sormais acc�der directement � la base AGRIPPA.

Deuxi�me mesure : le fichier national des interdits d'armes a �t� cr�� par le d�cret du 5 avril 2011. L’objectif est simple : nous voulons que des personnes pr�sentant un danger pour autrui ne puissent plus acqu�rir une arme.

D'ores et d�j�, 18 000 personnes font l'objet d'une interdiction de d�tention d'armes. Pour faire respecter plus efficacement cette interdiction, un nouveau fichier, le fichier national des interdits d'acquisition et de d�tention d'armes – FINIADA – a �t� cr�� le 5 avril 2011 dernier.

Parce qu'il permet de renforcer l'information des services pr�fectoraux, des services de police et de gendarmerie, des services des douanes, des armuriers, de la F�d�ration nationale des chasseurs et de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage quant aux personnes interdites d'acquisition et de d�tention d'armes, ce fichier permet d'�viter qu'une arme ne soit vendue ou qu'un permis de chasse ne soit d�livr� � une personne jug�e inapte � d�tenir une arme.

Aujourd'hui pleinement op�rationnelle, cette base nationale r�pertorie les personnes frapp�es d'interdiction d'acquisition et de d�tention d'armes suite � une d�cision du pr�fet territorialement comp�tent. La gestion de ces dossiers est d�volue aux services des armes des pr�fectures.

Votre proposition de foi vient renforcer, enfin, l'efficacit� des moyens de lutte contre le trafic d'armes et alourdir les sanctions p�nales.

Outre la simplification de la classification des armes que j'ai d�j� mentionn�e et qui facilitera le contr�le de l'application de la l�gislation sur les armes, je mentionnerai notamment trois mesures tr�s positives.

Premi�re mesure : assurer une plus grande s�curisation des conditions d'acquisition pour les d�tenteurs l�gaux.

En clarifiant ces conditions, le texte s�curise les d�tenteurs l�gaux tout en facilitant la t�che des services de contr�le qui peuvent, ainsi, mieux se concentrer sur les d�linquants et les trafics.

Dans un souci de lisibilit� et de s�curisation des conditions d'acquisition des armes des cat�gories B et C, votre rapporteur a propos� de distinguer plus pr�cis�ment les formalit�s requises pour la demande d'autorisation d'une arme de cat�gorie B et pour le d�p�t d'une d�claration pour l'acquisition d'une arme de cat�gorie C.

Le Gouvernement souscrit � cette mesure qui assurera une plus grande lisibilit� de la liste des pi�ces � fournir par les tireurs sportifs, les chasseurs et les collectionneurs lors de l'acquisition de l'arme.

La s�curisation des conditions d'acquisition est aussi renforc�e en mati�re de vente par correspondance ou � distance des armes des cat�gories B et C. Dans notre soci�t� o� ce mode de transaction se d�veloppe, il faut assurer une compl�te s�curit� juridique et la n�cessaire tra�abilit� aux tireurs sportifs, aux chasseurs ou aux collectionneurs qui utilisent ce proc�d� d'acquisition.

Ainsi, votre commission des lois a �tendu la vente par correspondance aux armes de cat�gorie B. D�sormais, ces armes ainsi que celles de la cat�gorie C pourront �tre directement livr�es � l'acqu�reur, sous conditions. Le Gouvernement prendra un d�cret qui encadrera et s�curisera ces transactions.

Deuxi�me mesure : l'acquisition et la d�tention d'une arme deviendront impossibles pour une personne qui a �t� condamn�e pour une infraction d�notant un comportement violent, incompatible avec la possession d'une arme � feu.

Le texte adopt� par votre commission des lois ainsi que par le S�nat �tend le fichier FINIADA aux personnes interdites d'armes par d�cision judiciaire, en particulier celles qui auront �t� condamn�es � une peine compl�mentaire d'interdiction d'acquisition et de d�tention d'armes.

Ainsi, la base de donn�es couvrira progressivement toutes les personnes qui, en raison de leur comportement, pr�sentent une menace pour la s�curit� publique si elles sont mises en possession d'une arme.

Votre assembl�e avait limit� le champ d'application de cet article aux seules infractions volontaires ; le S�nat a pr�cis� la liste des incriminations p�nales concern�es. Des infractions telles que la fabrication, la vente ou l'exportation sans autorisation d'un engin ou produit explosif incendiaire ont �t� ajout�es � celles qui interdiront � leurs auteurs la d�tention l�gale d'une arme.

Tr�s concr�tement, une v�rification du bulletin n� 2 du casier judiciaire permettra de s'assurer, au moment de la vente, qu'une personne souhaitant acqu�rir une arme n'a pas fait l'objet par le pass� d'une condamnation pour l'une des infractions mentionn�es dans la proposition de loi. Ces infractions sont graves : vol, extorsion, atteinte � la vie ou � l'int�grit� physique ou psychique de la personne. Personne ne conteste qu'elles sont incompatibles avec la d�tention d'une arme.

Troisi�me mesure : des peines compl�mentaires obligatoires telles que l'interdiction de port d'arme sanctionneront les auteurs de violences volontaires condamn�s d�finitivement.

Ce texte compl�te le dispositif p�nal en instaurant des peines compl�mentaires automatiques pour un certain nombre de crimes ou de d�lits commis avec une arme.

Le dispositif a �t� concentr� sur les infractions les plus graves, en ne rendant plus automatique la peine compl�mentaire pour certaines contraventions et pour certaines infractions mineures sans lien direct avec l'usage d'une arme.

En revanche, les infractions d'attroupement arm� ou de provocation � un tel attroupement et d'introduction d'armes dans un �tablissement scolaire ont �t� ajout�es � la liste de celles entra�nant les peines automatiques.

Au nom du Gouvernement, j'approuve totalement ce dispositif, que le S�nat a confirm�, en suivant la d�marche engag�e par votre assembl�e pour rendre plus syst�matique et plus effectif le prononc� des peines compl�mentaires relatives aux armes.

Vous l'avez compris, mesdames et messieurs les d�put�s, le Gouvernement soutient tr�s largement l'initiative qu'ont prise plusieurs de vos coll�gues et les en remercie.

L'�quilibre actuel qui vous est soumis, fond� sur un esprit de responsabilit� et de s�curit� publique, s'est enrichi des �changes tr�s constructifs qui se sont d�roul�s dans les deux assembl�es autour de cette proposition.

Je salue encore une fois le travail du rapporteur Claude Bodin, qui a favoris� un large consensus que je tiens � saluer. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Claude Bodin, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la l�gislation et de l’administration g�n�rale de la R�publique.

M. Claude Bodin, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la l�gislation et de l’administration g�n�rale de la R�publique. Madame la pr�sidente, monsieur le ministre, mes chers coll�gues, nous examinons aujourd'hui, en deuxi�me lecture, la proposition de loi relative � l'�tablissement d'un contr�le des armes moderne, simplifi� et pr�ventif.

Par un vote unanime, notre assembl�e avait, le 25 janvier 2011, approuv� un texte qui repr�sente une r�forme in�dite du r�gime d'acquisition et de d�tention des armes et des mat�riels de guerre en France. Le 8 d�cembre 2011, le S�nat a lui-m�me ajout� sa pierre � ce nouvel �difice en approuvant � son tour la proposition de loi, �galement � l'unanimit�, tout en lui apportant quelques modifications.

Il s'agit donc de parachever ici l'important travail que le Parlement a accompli en premi�re lecture. Comment et sur quels points ?

En premier lieu, en nous en tenant aux objectifs que nous nous �tions assign�s avec Bruno Le Roux et l'ensemble des d�put�s qui formaient la mission d'information sur les violences par armes � feu et l'�tat de la l�gislation.

Je tiens � les r�affirmer. En premier lieu, simplifier la vie de ceux de nos concitoyens – chasseurs, pratiquants du tir sportif et du ball-trap, collectionneurs – qui ont acquis et d�tiennent des armes conform�ment aux lois et aux r�glements ; �tablir un cadre dans lequel les obligations correspondent � la dangerosit� des armes et ne soient source d'aucune formalit� ou contrainte inutile ; enfin, garantir la s�curit� de tous en permettant aux pouvoirs publics de lutter contre les d�linquants qui font trafic ou usent d'armes pour leurs m�faits.

En deuxi�me lieu, en poursuivant la d�marche raisonn�e et collective que les pouvoirs publics, et au premier chef les assembl�es parlementaires, ont adopt�e afin d'entreprendre cette r�forme.

Pour ce qui concerne l'Assembl�e nationale, cette m�thode a consist� � prendre en consid�ration les remarques qu'ont pu exprimer les minist�res charg�s de la mise en œuvre du texte, notamment le minist�re de l’int�rieur, avec qui nous avons travaill� de fa�on tr�s fructueuse, mais �galement les utilisateurs l�gaux d'armes, et ce dans toute leur diversit�, repr�sent�e par l’actif et constructif comit� Guillaume Tell.

C’est ainsi que nous avons souhait� et d�fendu la cr�ation d’un v�ritable statut du collectionneur qui, dans le respect de la s�curit� publique, permettra la pr�servation de notre patrimoine et fera de la collection un motif l�gitime, � part enti�re, d’acquisition et de d�tention d’armes. Certes, � l’issue de nos d�lib�rations, certaines demandes pourraient demeurer sans suite dans l’imm�diat. Toutefois, rien n’interdira dans une phase ult�rieure de la r�flexion collective d’aborder, dans un cadre ad hoc, les questions plus sp�cifiques que soul�ve la collection d’armes en France.

La r�glementation des armes pr�sente depuis toujours un caract�re complexe et chacun pourra convenir de la difficult� � reb�tir un dispositif dont les plus anciennes fondations remontent � un d�cret d’avril 1939.

Cependant, nous pouvons sans doute donner � cette d�licate entreprise un premier aboutissement. Pour ce faire, il convenait en dernier lieu d’apporter les quelques ultimes ajustements que n�cessitait le texte adopt� au S�nat, ce qu’a fait la commission des lois lors de son examen de la proposition de loi en deuxi�me lecture.

J’emploie � dessein ce terme d’� ajustements �, car il existe � l’�vidence un r�el accord de fond entre le S�nat et l’Assembl�e nationale sur les finalit�s et les modalit�s du nouveau cadre juridique dans lequel doit s’exercer le contr�le des armes. Cette communaut� de vue explique qu’au total, par-del� quelques modifications au demeurant peu nombreuses et circonscrites, le S�nat ait maintenu les grands �quilibres de la proposition de loi.

Sans rappeler le d�tail de toutes les dispositions du texte, les termes de cet �quilibre se r�sument en deux �l�ments fondamentaux.

Il s’agit, premi�rement, d’une simplification et d’une r�duction significative des cat�gories du classement des armes, d�sormais fond� sur un r�gime encadrant les conditions d’acquisition et de d�tention, et non plus sur les caract�ristiques d’une arme ou d’un mat�riel.

Il s’agit, deuxi�mement, de l’instauration d’un cadre comportant des obligations gradu�es et proportionn�es pour les utilisateurs l�gaux d’armes et sanctionnant mieux et plus les d�linquants et les trafiquants.

Cette volont� se traduit, � l’issue de la premi�re lecture au S�nat, par la reprise et la confirmation de plusieurs �l�ments.

La notion de dangerosit� est �tablie comme pierre angulaire du classement des armes tandis que sont repris les crit�res �num�r�s par l’Assembl�e nationale pour encadrer son appr�ciation par le pouvoir r�glementaire. Le champ de la d�finition des armes historiques et de collection est �largi, avec notamment le choix du 1er janvier 1900 pour les armes et du 1er janvier 1946 pour les mat�riels de guerre – je vous renvoie � l’article 2.

Les conditions communes d’acquisition et de d�tention sont �nonc�es par le texte sous certaines r�serves : pour l’ensemble des armes, il faut �tre majeur et disposer d’un bulletin n� 2 du casier judiciaire ne comportant pas de mention de condamnation pour l’une des infractions mentionn�es par la proposition de loi et ne pas se signaler par un comportement dangereux – article 3.

Sont �galement �tablies les r�gles principales des r�gimes de prohibition, d’autorisation, de d�claration et de libert� �nonc�es par le texte adopt� par l’Assembl�e nationale – article 3.

Est cr�� � l’article 3 un statut du collectionneur – nous l’avons d�j� �voqu�.

La proposition de loi pr�voit encore des dispositions destin�es � renforcer les sanctions p�nales encourues pour les infractions portant atteinte � la l�gislation sur les armes – articles 25 � 34 – et le caract�re progressif des conditions d’entr�e en vigueur du texte afin de permettre l’�diction des mesures r�glementaires d’application et de mettre nos concitoyens en mesure de prendre connaissance des modalit�s de la r�forme – articles 35 A et 35 ter.

Tout en restant dans le cadre des grands �quilibres du texte, la commission des lois a, lors de l’examen de la proposition de loi en deuxi�me lecture, apport� quelques ajustements.

� l’article 8, la commission a �tendu le champ du dispositif de la carte de collectionneur d’armes, en permettant � ses titulaires d’acqu�rir et de d�tenir des armes de cat�gorie D soumises � enregistrement, ainsi que des munitions �num�r�es par arr�t� interminist�riel, compte tenu de leur int�r�t culturel, historique ou scientifique. Je sais que ces modifications, en d�pit de l’encadrement strict qu’a pr�vu la commission des lois, ne sont pas totalement approuv�es par le Gouvernement, mais nous aurons l’occasion de revenir sur ce point lors de l’examen des articles.

� l’article 32, la commission a clarifi� les dispositions relatives aux conditions de transport et de port l�gitimes des armes utilis�es pour l’activit� de chasse : � la diff�rence du texte adopt� par le S�nat, le texte adopt� par notre commission a distingu� le transport – uniquement soumis � la condition de possession d’un permis de chasser, sans condition tenant � sa validation – du port des armes, lequel est soumis � la double condition de la possession d’un permis de chasser et de la validation de celui-ci pour l’ann�e en cours ou l’ann�e pr�c�dente.

Il s’agit l� d’un �quilibre tout � fait satisfaisant, qui permet de concilier parfaitement les deux objectifs de simplification de la vie des chasseurs et de protection de la s�curit� publique.

Enfin, � l’article 35, la commission a inclu les armes de la cat�gorie B parmi celles pouvant �tre directement livr�es � leur acqu�reur dans le cadre d’une vente par correspondance ou � distance.

En conclusion, chers coll�gues, si nous faisons la part de nos ambitions initiales, des n�cessit�s de la s�curit� publique et des int�r�ts l�gitimes de chacun des acteurs de ce dossier, nous pouvons aujourd’hui estimer que nous sommes parvenus � un dispositif satisfaisant, car il est �quilibr� : non seulement il est compatible avec les obligations d�coulant de la directive europ�enne du 18 juin 1991, mais il pr�serve les sp�cificit�s du droit national et de notre mode de vie.

C’est pourquoi je vous demande d’adopter la pr�sente proposition de loi, avec – je le souhaite – la m�me unanimit� qu’en premi�re lecture. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Discussion g�n�rale

Mme la pr�sidente. Dans la discussion g�n�rale, la parole est � M. Daniel Vaillant.

M. Daniel Vaillant. Madame la pr�sidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers coll�gues, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser Bruno Le Roux, qui regrette de ne pouvoir �tre pr�sent du fait d’un d�placement organis� par le groupe d’amiti� France-Su�de, qu’il pr�side.

Bruno Le Roux fait figure, depuis 1998, de pionnier en mati�re de lutte contre la prolif�ration des armes. Connaissant mon engagement en faveur d’une am�lioration de la l�gislation encadrant et contr�lant l’acquisition et de la d�tention d’armes, il m’a demand� de le remplacer et c’est avec plaisir que j’ai accept� d’intervenir ce soir en faveur de cette proposition de loi qui constitue une avanc�e r�elle et attendue dans le domaine de l’encadrement, de l’acquisition et de la d�tention des armes. Je tiens d’ailleurs � saluer le travail du rapporteur, Claude Bodin.

Comme vous le savez, j’ai �t� confront� en tant que ministre de l’int�rieur � la trag�die de la fusillade de Nanterre en 2002. J’ai beaucoup regrett� que l’auteur de cette tuerie ait pu disposer aussi facilement d’armes � feu, d’autant qu’il �tait connu des services d�partementaux de psychiatrie.

Depuis, d’autres drames de ce type sont venus h�las noircir l’actualit�. Les r�centes fusillades qu’ont connues les villes de Marseille, Colombes ou encore Saint-Ouen, les arsenaux d�couverts ce week-end � Marseille, ne font que confirmer la n�cessit� d’une am�lioration de l’encadrement de l’acquisition et de la possession d’armes, dans l’int�r�t nos concitoyens et pour leur s�curit�.

Dix ans apr�s mes initiatives r�glementaires, qui n’ont pas fait consensus � l’�poque, cette position fait aujourd’hui l’objet d’un large accord au sein des deux chambres du Parlement, de l’opposition � la majorit� gouvernementale, ce dont je m’en r�jouis. Elle re�oit aussi l’assentiment des utilisateurs et d�tenteurs l�gaux d’armes : c’est encore mieux.

Cela n’aurait pu �tre possible sans le travail d’�coute et de prise en compte des pr�occupations de tous les acteurs concern�s : police, gendarmerie, justice et associations de chasseurs, de tireurs sportifs et de collectionneurs.

Je veux donc rendre hommage au travail minutieux et efficace r�alis� en amont dans le cadre de la mission d’information sur les violences par armes � feu, qui a permis d’aboutir � un texte �quilibr�, offrant une v�ritable avanc�e dans les domaines du contr�le des armes, de la pr�vention des violences et de la simplification du droit. Cette proposition, qui nous revient en seconde lecture, ne r�glera pas tous les probl�mes mais constitue une r�ponse l�gislative efficace qui m�rite d’�tre salu�e.

La recrudescence du nombre de victimes de violences par arme � feu, � l’origine de la demande de cr�ation d’une mission d’information, a permis de mettre en �vidence de nouvelles probl�matiques li�es � la d�tention et � l’utilisation des armes dans notre pays. On a constat� une �volution pr�occupante du trafic, une augmentation du nombre d’armes de guerre en circulation mais aussi une augmentation de l’usage d’armes factices, qui si elles sont bien �videmment moins dangereuses, t�moignent d’une r�elle intention de nuire.

S’agissant du trafic, les conclusions de la mission d’information s’av�rent plut�t rassurantes quant au nombre d’armes qui circulent ill�galement en France et plus particuli�rement dans les quartiers les plus touch�s par la d�linquance. Contrairement aux apparences, les auditions ont fait appara�tre que leur nombre n’avait pas sensiblement augment�, mais que les membres d’un m�me groupe d�linquant mutualisaient de plus en plus leur usage. D’autre part, ces m�mes conclusions tendent aussi � relativiser le r�le que peut jouer Internet en favorisant l’acc�s ill�gal aux armes. S’agissant du cadre l�gal actuellement en vigueur, la mission d’information a fait appara�tre sa trop grande complexit� et son obsolescence dues � l’empilement des dispositions relatives � la classification, � l’acquisition et � la d�tention des armes depuis le d�cret-loi du 18 avril 1939.

Cette proposition de loi vise donc � simplifier la classification des armes � feu en rempla�ant les huit cat�gories du d�cret du 6 mai 1995 par quatre cat�gories – A, B, C, D – plus conformes � la l�gislation europ�enne.

En modifiant l’ancienne classification fond�e sur les caract�ristiques techniques des armes, le nouveau classement introduit une meilleure lisibilit� pour les forces de l’ordre, les pr�fectures ainsi que pour les utilisateurs et d�tenteurs l�gaux. Les r�gles encadrant l’acquisition et la d�tention sont ainsi proportionn�es selon les diff�rentes cat�gories d’armes, organis�es selon leur degr� de dangerosit� et donnent lieu � une gradation des r�gimes juridiques. L’acquisition et la d�tention de certaines armes seront ainsi soit interdites, soit autoris�es ou feront l’objet d’une d�claration, d’un enregistrement. Les moins dangereuses resteront librement accessibles.

D’autre part, ce texte op�re une distinction entre les d�tenteurs l�gaux d’armes � feu, qu’il s’agisse des tireurs sportifs, des chasseurs, des collectionneurs, et les d�tenteurs ill�gaux. Il r�pond ainsi positivement aux pr�occupations des citoyens, d�tenteurs l�gitimes d’armes, en s�curisant le cadre juridique li� � l’exercice de leurs activit�s sans porter atteinte au droit de chasser, de pratiquer le tir sportif ou de collectionner des armes. Les questions soulev�es par les associations de collectionneurs pourront d’ailleurs, comme il a �t� dit, faire l’objet d’un texte sp�cifique de clarification. En effet peut-on mettre sur le m�me plan un collectionneur d’armes anciennes et la personne gardant chez elle des munitions datant de la premi�re guerre mondiale r�cup�r�es dans des champs du Nord-Est de la France ? J’ai ainsi pu voir une collection de bombes de gaz de la guerre de 14-18 align�es sur un manteau de chemin�e. Je ne sais d’ailleurs pas o� en est le d�bat sur le d�mant�lement des armes et la construction de l’usine Sequoia, sur le territoire de Vimy, que vous connaissez bien pour y �tre n�, monsieur le ministre.

Enfin, ce texte offre � nos forces de l’ordre des moyens suppl�mentaires pour pr�venir et lutter contre les violences par armes � feu, contre la d�linquance et les trafiquants d’armes.

Les dispositions relatives au fichier national automatis� nominatif des personnes interdites d’acquisition et de d�tention des armes – le FINADIA – sont �largies aux personnes qui font l’objet d’une condamnation visant � la confiscation de leurs armes ou leur interdisant la d�tention et le port d’armes. Elles participeront ainsi au renforcement des dispositifs de pr�vention.

Les nouvelles dispositions �tendant le champ d’application de la proc�dure de saisie, harmonis�es avec le code de proc�dure p�nale, permettront quant � elles d’aller chercher les armes l� o� elles se trouvent.

Acceptez que je m’arr�te un instant sur ce point. L’�largissement du fichier FINADIA et l’extension des possibilit�s de mise en œuvre des saisies administratives ne constituent pas en eux-m�mes des moyens suffisants pour �radiquer le ph�nom�ne de la d�tention ill�gale d’armes. En effet, si la pr�sence des armes dans les quartiers sensibles s’av�re, et heureusement, moins massive que nous ne pouvions le craindre, il ne faut pas avoir la na�vet� de penser que les armes sont absentes. Elles restent accessibles aux voyous qui savent, par le trafic, se les procurer.

Pour lutter contre cette criminalit�, qui n’h�site plus � s’armer, � tirer et � tuer dans le seul but de faire – pardonnez-moi cette expression triviale – toujours plus de fric, il faut que les forces du droit disposent des moyens mat�riels et humains � la hauteur des enjeux.

M. Pierre Lang. Et informatiques !

M. Daniel Vaillant. Une loi, si bonne soit-elle, n’y suffira pas.

Malgr� cette observation sur la pr�sence polici�re qui doit se renforcer l� o� c’est le plus n�cessaire, je vous confirme que le groupe socialiste, radical et citoyen votera en faveur de ce texte consensuel, avec enthousiasme, afin de permettre son adoption d�finitive par l’Assembl�e nationale.

Permettez-moi d’ajouter, avant que nous ne passions � l’examen des articles, que j’ai d�couvert un peu tardivement la liasse des amendements. Je veux d’ores et d�j� vous dire qu’ayant eu connaissance du travail approfondi men� en commission, je me garderai bien de m’�loigner des propositions de M. le rapporteur Claude Bodin, excluant ainsi de voter d’autres amendements qui pourraient rompre le consensus.

Nous voterons donc cette proposition de loi, ainsi que les amendements du rapporteur, en accord avec lui, mais sans aller au-del�. (Applaudissements.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Pascal Brindeau.

M. Pascal Brindeau. Madame la pr�sidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers coll�gues, la proposition de loi que nous examinons en seconde lecture est l’occasion de traiter d’une question importante, qui touche � la fois � la s�curit� et aux libert�s fondamentales, comme d’ailleurs la discussion pr�c�dente sur la lutte contre l’usurpation d’identit�.

L’examen de cette proposition de loi par les deux chambres du Parlement et son adoption � l’unanimit� par chacune d’elles nous permettent de mesurer le consensus politique et parlementaire – c’est heureux et important de le rappeler – qui se d�gage sur un sujet primordial participant � l’�dification de notre pacte r�publicain.

Ce consensus na�t d’un constat lui aussi consensuel, comme vous l’avez rappel�, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur : notre l�gislation, largement h�rit�e du d�cret-loi de 1939, ne correspondait plus aux n�cessit�s de l’ordre et de la s�curit� publics. Inefficace pour appr�hender la dangerosit� r�elle des armes � feu et leur trafic, trop complexe pour ceux qui d�tiennent et utilisent l�galement ces armes, l’arsenal l�gislatif actuel se r�v�le incomplet et inadapt�.

Garantir un meilleur contr�le des armes, c’est en premier lieu en �tablir une classification plus lisible et compr�hensible de tous. La pr�sente proposition de loi �tablit un classement des armes dont les cat�gories ne sont plus d�finies en fonction de leurs caract�ristiques propres, mais du r�gime applicable aux conditions d’acquisition et de d�tention de celles-ci. De huit cat�gories, nous passons � quatre, pour plus de clart� et de lisibilit�.

Le dispositif vise �galement � simplifier les d�marches administratives, tant pour les usagers que pour les services charg�s d’assurer le contr�le des armes, rejoignant en cela une indispensable d�marche de simplification du droit, dans tous les champs de celui-ci, dont nous d�battions hier encore dans cet h�micycle.

Les modifications apport�es tant par l’Assembl�e nationale que par le S�nat ont permis d’aboutir � un texte que chacun qualifie d’�quilibr�, soucieux � la fois de la s�curit� collective et des libert�s individuelles.

En effet, la l�gitimit� de notre d�marche et la r�ussite de cette l�gislation renouvel�e se fondent sur la n�cessit� d’assurer une protection effective de la soci�t� tout en pr�servant la libert� de nos concitoyens, particuli�rement de ceux qui, dans le cadre de pratiques strictement r�glement�es, font des armes un usage l�gitime. On pense ici bien s�r aux tireurs sportifs, aux chasseurs et aux collectionneurs notamment.

En rendant obligatoire le prononc� de peines compl�mentaires et en renfor�ant les sanctions p�nales en cas de violation de la l�gislation sur les armes, la proposition de loi r�pond au premier objectif. Nos consciences restent bien �videmment frapp�es par des faits divers tragiques, rappel�s par M. Vaillant, qui l�gitiment une refonte du dispositif existant, une meilleure pr�vention et une plus grande s�ret� de notre soci�t�.

Le deuxi�me objectif commande de mettre en œuvre une r�glementation qui ne soit pas pr�judiciable aux d�tenteurs l�gaux d’armes � feu, chasseurs, tireurs sportifs ou encore collectionneurs, qui ont pu nourrir de l�gitimes inqui�tudes.

� ce titre, je me f�licite de la suppression par notre assembl�e, en premi�re lecture, de dispositions qui n’�taient pas indispensables et qui suscitaient des r�serves : je pense � la mise en place d’une � carte grise � de l’arme ou encore � l’instauration d’un � d�lai de refroidissement � entre l’achat d’une arme et sa remise effective � l’acheteur.

Nos coll�gues s�nateurs ont �galement enrichi le texte : le statut du collectionneur, menac� de suppression, sort finalement renforc� et �largi des travaux parlementaires. Je veux rappeler qu’en premi�re lecture, au nom du groupe Nouveau Centre, j’avais interpell� M. le garde des sceaux sur les interrogations qu’avait fait na�tre la proposition de loi, en particulier chez les collectionneurs d’armes.

Il me para�t en effet important d’accorder une juste place – dans le respect de r�gles �l�mentaires de pr�caution et de s�curit� publique – aux quelque 100 000 collectionneurs d’armes et de mat�riels de guerre, qui œuvrent � une meilleure connaissance de l’histoire des armes et par cons�quent � une meilleure connaissance du danger de leur usage non ma�tris�.

En outre, les contraintes qui pesaient sur la d�tention de carabines de chasse ont �t� supprim�es par le S�nat.

Gr�ce aux pr�cisions apport�es par la commission des lois et � celles susceptibles de l’�tre par le rapporteur, le groupe Nouveau Centre apportera son soutien � cette proposition de loi qui �tablit un cadre juridique coh�rent, alliant r�pression accrue contre les trafiquants et d�linquants et respect garanti des droits des utilisateurs l�gaux d’armes � feu. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Andr� Chassaigne.

M. Andr� Chassaigne. Madame la pr�sidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers coll�gues, apr�s son adoption � l’unanimit� par le S�nat, cette proposition de loi montre la pr�occupation, partag�e par l’ensemble de la repr�sentation nationale, de revoir la l�gislation sur les armes, et pas seulement les armes � feu, comme l’indiquait le pr�c�dent titre de la proposition de loi en premi�re lecture.

Cette pr�occupation part d’un double constat : d’une part, les armes prolif�rent en France, o� elles semblent se vendre tr�s facilement, faisant d�sormais l’objet d’un v�ritable trafic ; le nombre des victimes augmente, en lien avec la diffusion d’armes de plus en plus dangereuses, et parmi ces victimes il y a notamment des policiers. D’autre part, les textes actuels visant � contr�ler et � sanctionner la d�tention ill�gale d’armes sont trop complexes, et l’encadrement juridique insuffisamment dissuasif et proportionn� devant une telle propagation.

Des mesures ont bien �t� prises pour renforcer la s�curit� : le d�cret du 8 juillet 2010 modifiant le r�gime des mat�riels de guerre, armes et munitions a institu� un r�gime d’autorisation administrative d’ouverture pour les armuriers ; un amendement visant � soumettre les armuriers � un agr�ment individuel a �galement �t� vot� dans le cadre du projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la s�curit� int�rieure.

Mais c’est bien parce qu’il est apparu que l’encadrement juridique des armes � feu ne r�pondait plus � l’objectif de pr�servation de la s�curit� publique que la commission des lois a cr�� en octobre 2009 une mission d’information sur les violences par armes � feu et l’�tat de la l�gislation.

Ce texte fait suite aux conclusions du rapport de cette mission ; il se fixe plusieurs objectifs qui vont dans le bon sens : �tablir une classification plus lisible et conforme � la r�elle dangerosit� des armes ; mettre en place une action pr�ventive � l’�gard des d�tenteurs d’armes repr�sentant un danger pour eux-m�mes ou pour la soci�t� ; r�primer plus s�v�rement et plus efficacement les trafics d’armes, avec la volont� politique et toutes les implications que cela suppose, notamment s’agissant de l’argent et de son blanchiment, ce qui pour nous est essentiel.

M. Michel Hunault. Tr�s bien !

M. Andr� Chassaigne. Enfin, il propose d’assurer la tra�abilit� des armes en renfor�ant l’efficacit� des fichiers recensant les armes � feu et leurs d�tenteurs.

Si – vous le savez, mes chers coll�gues – nous ne sommes pas pour le recours syst�matique au fichage des citoyens, la question de la d�tention d’armes fait exception, eu �gard aux risques encourus pour la s�curit� publique. Cette question sort en effet du domaine du fichage injustifi� des citoyens auquel on nous a, h�las ! peu � peu habitu�s.

Nous avons pris acte du fait que le texte qui nous est propos� est issu d’une r�elle concertation et r�pond aux attentes des chasseurs, des tireurs sportifs, des amateurs de ball-trap, des collectionneurs et des armuriers.

Au-del� de notre accord sur ce texte et des avanc�es unanimement approuv�es, je souhaite soulever quelques interrogations.

L’article 1er renvoie � un d�cret en Conseil d’�tat la d�termination des � mat�riels, armes, munitions, �l�ments essentiels, accessoires et op�rations industrielles compris dans chacune des cat�gories �tablies �. On peut regretter que cette d�termination ne revienne pas au l�gislateur.

Je souhaiterais plus particuli�rement �voquer certaines armes de quatri�me cat�gorie : les armes � impulsions �lectriques, permettant de provoquer un choc �lectrique � distance, et les armes � impulsions �lectriques de contact, permettant de provoquer un choc �lectrique � bout touchant, armes qui, comme les armes � feu, sont th�oriquement interdites � la vente libre.

J’estime que, comme pour les armes � feu, le pouvoir ex�cutif doit, dans le d�cret, au moins interdire la vente aux particuliers des pistolets � impulsion �lectrique, puisque, comme l’a jug� le Conseil d’�tat dans sa d�cision du 2 septembre 2009, leur emploi � comporte des dangers s�rieux pour la sant�, r�sultant notamment des risques de trouble du rythme cardiaque, de syndrome d’hyperexcitation, augment�s pour les personnes ayant consomm� des stup�fiants ou de l’alcool, et des possibles complications m�caniques li�es � l’impact des sondes et aux traumatismes physiques r�sultant de la perte de contr�le neuromusculaire ; que ces dangers sont susceptibles, dans certaines conditions, de provoquer directement ou indirectement la mort des personnes vis�es. �

Un contr�le renforc� quant au respect de ce contr�le devrait �tre effectu�. Souvenons-nous que le comit� de l’ONU contre la torture, dans un rapport sur le Portugal du 23 novembre 2007, indiquait au sujet du Taser que � l’usage de ces armes provoque une douleur aigu�, constituant une forme de torture, et que, dans certains cas, il peut m�me causer la mort. �

Je rappelle que des s�nateurs communistes et du parti de gauche avaient d�pos� en 2010, avec d’autres, une proposition de loi visant � interdire l’utilisation d’armes de quatri�me cat�gorie par la police ou la gendarmerie contre des attroupements ou manifestations, ainsi que leur commercialisation ou leur distribution pour des polices municipales ou des particuliers.

Monsieur le ministre, lors des d�bats au S�nat, votre coll�gue Philippe Richert a r�pondu � ma coll�gue Nicole Borvo Cohen-Seat : � je rappellerai que le Taser est une arme non l�tale, ayant vocation � �tre class�e dans la cat�gorie B, parmi les “armes soumises � autorisation pour l’acquisition et la d�tention”. Cette arme a donc un usage parfaitement r�glement� et elle remplit sa vocation op�rationnelle. � Cette subtile distinction conduit � dire que ces armes ne sont mortelles que pour certaines personnes. Il reste que, lorsqu’on les emploie, on ne sait pas si les personnes susceptibles d’�tre atteintes font partie de celles pour lesquelles elles sont l�tales. Doit-on comprendre par ailleurs que le Gouvernement a toujours une appr�ciation tr�s diff�rente des risques soulev�s par le comit� de l’ONU contre la torture et la d�cision du Conseil d’�tat sur le Taser ? Nous pensons que ce n’est pas acceptable, et je vous propose d’y revenir dans nos d�bats.

De plus, la Commission nationale de d�ontologie de la s�curit�, � la suite de nombreux drames li�s � l’usage par la police de ce type d’arme, a recommand� de ne pas utiliser le flash-ball � lors de manifestations sur la voie publique �. Dans ce domaine encore, il serait souhaitable que l’actuel d�bat apporte des avanc�es.

La CNDS rappelait en effet que cette arme, dont les policiers municipaux peuvent �tre �quip�s, risque de causer des blessures graves et irr�versibles, d’autant que leurs trajectoires de tir sont impr�cises. Elle soulignait en outre que des n�gligences et des manquements professionnels graves ont �t� constat�s � maintes reprises quant � l’utilisation de ces armes dites � subl�tales �. Voil� pr�s d’un an, le lundi 13 d�cembre 2010, � Marseille, un homme d�c�dait victime d’un arr�t cardiaque apr�s avoir re�u un tir de flash-ball d’un policier.

C’est pourquoi je renouvelle dans l’imm�diat notre souhait de voir proclamer un moratoire pour l’utilisation de ces armes de quatri�me cat�gorie par l’ensemble des forces de l’ordre et des polices municipales.

Enfin, monsieur le ministre, j’aimerais que vous apportiez dans ce d�bat des r�ponses pr�cises concernant l’application du d�cret n� 2011-795 du 30 juin 2011. Celui-ci autorise les repr�sentants de l’�tat, militaires et fonctionnaires en charge des missions de maintien de l’ordre public, � utiliser des armes � feu dans le cadre d’actions pour le maintien de l’ordre public, � en fonction des situations �.

En r�gle g�n�rale, seuls les grenades lacrymog�nes et leurs lanceurs sont autoris�s. Avec ce d�cret, il semble que dans les situations pr�vues au quatri�me alin�a de l’article R. 431-3 du code p�nal, c’est-�-dire lorsque des violences ou voies de fait sont exerc�es contre la force publique ou lorsque cette derni�re est dans l’impossibilit� de d�fendre autrement le terrain qu’elle occupe, il soit possible aux forces de s�curit� d’utiliser le fusil � r�p�tition de calibre 7,62 qui est une arme de guerre.

Puisque la France n’est ni en �tat de si�ge ni sous le coup d’une guerre civile, j’aimerais conna�tre l’int�r�t de telles dispositions qui pourraient mettre en p�ril la vie des citoyens. Mon coll�gue Jean-Jacques Candelier vous avait interpell� par �crit � ce sujet, mais vous n’avez pas r�pondu.

Monsieur le ministre, m�me si cela ne conditionne pas notre vote positif, nous serons tr�s attentifs aux r�ponses que vous nous apporterez sur ces points � propos desquels le Gouvernement n’a pas encore tranch�.

Puisque j’ai �voqu� une question �crite sans r�ponse de mon coll�gue Candelier, j’en profite pour rappeler que les r�ponses de votre minist�re aux questions des d�put�s sont une denr�e rare. Il va jusqu’� ne pas r�pondre � certaines questions signal�es, comme cela a �t� le cas pour la question n� 116 558 pos�e le 16 ao�t 2011 et signal�e le 8 novembre 2011. Il est pourtant convenu que les questions signal�es obtiennent une r�ponse dans les quinze jours qui suivent. Le respect de la repr�sentation nationale passe aussi, monsieur le ministre et peut-�tre prochain d�put�, par la prise en compte de certaines petites r�gles r�publicaines qui organisent les relations entre le Gouvernement et notre assembl�e.

Pour conclure, je rappellerai les engagements du ministre Hortefeux en premi�re lecture concernant les armes blanches, et plus particuli�rement les couteaux fermants. Vous comprendrez que cette question m’int�resse tout particuli�rement en tant que d�put� de Thiers. Ces armes rel�vent de la cat�gorie D ; leur acquisition et leur d�tention demeurent libres. Cependant, cette proposition de loi renvoie � un d�cret en Conseil d’�tat, soumettant l’acquisition et la d�tention de certaines d’entre elles � des obligations particuli�res. Je ne doute pas que la r�daction de ce d�cret sera attentive aux particularit�s que repr�sentent les couteaux pour notre patrimoine industriel ni que vous confirmerez les propos apaisants sur ce point de votre pr�d�cesseur auvergnat.

Et puisque vous �voquiez le dynamique et efficace comit� Guillaume Tell, je suis convaincu que vous n’interpr�terez pas mes diff�rentes interrogations comme un ver gliss� artificiellement dans la pomme d’un exceptionnel consensus. (Sourires.)

M. Daniel Vaillant. Tr�s bien !

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Michel Diefenbacher.

M. Michel Diefenbacher. Madame la pr�sidente, monsieur le ministre, mes chers coll�gues, avec cette deuxi�me lecture de la proposition de loi sur le contr�le des armes, nous arrivons au terme d’une proc�dure l�gislative que l’on peut qualifier d’exemplaire.

C’est notre commission des lois qui s’est interrog�e sur la pertinence d’un dispositif qui remontait pour l’essentiel � 1939, c’est-�-dire � une p�riode troubl�e o� tout d�tenteur d’une arme � feu �tait regard� comme constituant une possible menace pour l’ordre public.

C’est une mission d’information, pr�sid�e par Bruno Le Roux, d�put� SRC, et rapport�e par Claude Bodin, d�put� UMP, qui a conclu � la n�cessit� de r�former.

C’est notre assembl�e qui lors de la premi�re lecture a fait pr�valoir ces id�es qu’une arme n’est dangereuse que si elle est utilis�e d’une mani�re dangereuse, qu’il faut donc traiter d’une mani�re diff�rente, d’un c�t� les propri�taires et les utilisateurs pacifiques – chasseurs, tireurs sportifs, collectionneurs – et de l’autre ceux qui menacent la s�curit� publique ; qu’il est par cons�quent n�cessaire de supprimer les tracasseries qui p�sent sur les premiers et de renforcer les contr�les sur la cession des armes pour �viter qu’elles tombent dans de mauvaises mains ; qu’il faut �tre impitoyable dans la lutte contre le trafic et l’utilisation d�lictuelle des armes.

Je voudrais f�liciter la commission des lois pour sa lucidit� et son pragmatisme dans cette approche, et pour la qualit� des �changes qu’elle a constamment entretenus avec les professionnels qui produisent, vendent ou utilisent des armes et les associations, c’est-�-dire les chasseurs, les sportifs, les collectionneurs. Ces compliments s’adressent tout particuli�rement � Jean-Luc Warsmann, pr�sident de la commission, et � Claude Bodin, rapporteur du texte apr�s avoir �t� rapporteur de la mission d’information.

Je souhaite �galement saluer l’approche de ce texte par la Haute assembl�e en premi�re lecture. Le S�nat partage pour l’essentiel les analyses de notre assembl�e sur la n�cessit� de simplifier la l�gislation, d’instaurer des obligations gradu�es selon non seulement les caract�ristiques des armes mais aussi la nature des d�tenteurs, de durcir les sanctions � l’encontre des d�linquants et des trafiquants, notamment par le prononc� obligatoire de peines compl�mentaires.

La plupart des modifications que propose la Haute assembl�e ne portent atteinte ni � l’�quilibre ni � l’efficacit� de la r�forme que nous souhaitons.

Il reste � pr�sent � mettre au point les derniers r�glages. Et il �tait important que cet exercice soit fait non seulement en pleine transparence � l’�gard des professionnels et des associations, mais �galement avec leur participation. Comment, � cet effet, ne pas saluer l’initiative prise par la commission des lois d’organiser, le 12 janvier dernier, la table ronde qui a permis � chacun de pr�ciser ses positions ?

Il nous reste quatre points majeurs � trancher.

Le premier concerne le champ des d�rogations apport�es � l’interdiction d’acquisition et de d�tention des armes de la cat�gorie 1. Il est clair que ces d�rogations doivent �tre tr�s strictement limit�es. Toutefois, il est indispensable que certains services publics ou certaines professions puissent en b�n�ficier. Il s’agit des services op�rationnels, civils ou militaires, charg�s de la s�curit� publique, mais aussi des entreprises priv�es qui sont en relation �troite avec ces services et qui sont expos�es � des risques majeurs. Je pense notamment aux convoyeurs et � certaines soci�t�s de gardiennage ou de surveillance. Sur ce point, la position exprim�e par la commission des lois me para�t proc�der d’une appr�ciation tr�s lucide – h�las ! – de la situation.

Le deuxi�me point concerne les conditions d’acquisition des armes de cat�gories B et C. Il faut simplifier les proc�dures, mais il faut �galement s�curiser les transactions. Les pr�cisions pr�conis�es par la commission des lois me paraissent � cet �gard particuli�rement bienvenues.

Le troisi�me point porte sur les droits qui s’attachent � la possession d’une carte de collectionneur. La d�tention d’une carte simplifiera consid�rablement la vie des collectionneurs. D�s lors qu’ils auront satisfait aux conditions fix�es par la loi, conditions qui ont �t� durcies par le S�nat, ils ne seront plus tenus de disposer d’un permis de chasser ou d’une licence de tireur sportif des armes de cat�gories C et D. Reste la question des munitions neutralis�es, sur laquelle le Gouvernement manifeste des r�ticences. Nous en d�battrons dans un instant.

Le quatri�me point concerne les conditions de transport et de port d’armes, pour lesquelles la solution propos�e par la commission des lois tient compte des observations justifi�es formul�es par les chasseurs : plus de souplesse pour le transport des armes de chasse puisque les chasseurs pourront l�gitimement transporter ces armes m�me si leur permis de chasser n’a pas �t� valid� l’ann�e en cours ou l’ann�e pr�c�dente ; en revanche, plus de rigueur pour le port d’une arme de chasse, en action de chasse ou pour une activit� qui y est li�e, la d�tention d’un permis de chasse, valid� l’ann�e en cours ou l’ann�e pr�c�dente �tant dans ce cas requise.

Je ne doute pas que, sur ces diff�rents points, notre assembl�e saura trouver un tr�s large consensus, en plein accord avec le Gouvernement.

En d�finitive, les d�bats parlementaires auront permis d’aboutir � une large convergence de vues entre la majorit� et l’opposition, entre l’Assembl�e nationale et le S�nat, entre le Parlement et le Gouvernement.

Dans cet h�micycle o� les affrontements sentent parfois la poudre (Sourires), il aura fallu que l’on traite de la l�gislation des armes pour que les tensions s’apaisent et que le consensus se fasse. � l’approche des d�bats du printemps, serait-ce le signe annonciateur de l’�mergence d’une d�mocratie apais�e ? On peut bien s�r r�ver.

M. Pierre Lang. Si vis pacem, para bellum !

M. Michel Diefenbacher. En tout �tat de cause, c’est en toute lucidit� que le groupe UMP adoptera cette r�forme qui devrait satisfaire aux exigences, en g�n�ral si difficiles � concilier, de la s�curit� et de la libert�. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Patrice Verch�re.

M. Patrice Verch�re. Madame la pr�sidente, monsieur le ministre, mes chers coll�gues, nous voici donc saisis, en deuxi�me lecture, d’un texte de loi tr�s attendu par les diff�rents utilisateurs l�gaux d’armes � feu.

Tr�s attendu car il constitue un grand progr�s par rapport � la l�gislation actuelle, qui est une accumulation de dispositions prises � la suite du d�cret-loi de 1939.

Tr�s attendu aussi car, gr�ce au travail du pr�sident de la commission des lois, Jean-Luc Warsmann, de l’excellent rapporteur de la proposition, Claude Bodin, et du pr�sident de la mission parlementaire, Bruno Le Roux, ce texte r�pond quasiment � l’ensemble des attentes l�gitimes des chasseurs, des tireurs sportifs, des amateurs de ball-trap, des collectionneurs et des armuriers.

Cette proposition de loi fait remarquablement consensus, probablement gr�ce au travail de concertation et de dialogue entre les pouvoirs publics et la soci�t� civile, qui a abouti � un diagnostic partag� sur la n�cessit� d’une r�forme profonde du cadre h�rit� d’avant la seconde guerre mondiale.

Ce cadre ne correspond plus aux n�cessit�s de la protection de l’ordre et de la s�curit� publics et constitue une source de d�marches parfois inutiles et de complexit� injustifi�e pour les utilisateurs l�gaux d’armes.

Ainsi, l’excessive complexit� de la r�glementation actuelle est pr�judiciable, tant pour les citoyens que pour les administrations charg�es de son application.

Si, malheureusement, aucune soci�t� n’est � l’abri de comportements d�viants, les pouvoirs publics n’en doivent pas moins s’efforcer de trouver le moyen de garantir la s�curit� publique sur tout le territoire sans remettre en cause l’exercice de passions individuelles. Monsieur le rapporteur, votre texte parvient, d’un c�t� � garantir les droits des honn�tes gens et, de l’autre, � mieux r�primer ceux qui utilisent ou seraient tent�s d’utiliser des armes � feu dans un cadre d�lictueux et criminel.

Ainsi, votre texte a trouv� un certain �quilibre entre la n�cessaire r�glementation de l’acc�s aux armes � feu pour toutes celles et tous ceux qui d�tiennent ou souhaitent d�tenir l�galement, et de la mani�re la plus pacifique, des armes � leur domicile, parce qu’ils sont collectionneurs, chasseurs ou encore tireurs sportifs, et la n�cessaire l�gislation permettant de mener aussi efficacement que possible le combat contre ceux qui utilisent les armes � feu dans un cadre inappropri� et ill�gal.

Il me semble que l’introduction de la notion de dangerosit� comme principe de classement des armes constitue une importante innovation juridique. Celle-ci traduit la volont� de mettre fin au classement actuel, selon lequel des armes d’une dangerosit� comparable peuvent se trouver dans des cat�gories diff�rentes.

Toutefois, si cette notion de dangerosit� pour le classement des armes constitue une am�lioration, il n’en reste pas moins que la dangerosit� est un terme subjectif et peut donc �tre sujet � interpr�tation.

Des associations qui ont rappel� les avanc�es significatives de votre proposition de loi craignent n�anmoins, et cela semble �tre du v�cu, que le pouvoir r�glementaire n’applique un classement des armes diff�rent en d�cidant seul, sans concertation, sans expertise, et que ce m�me pouvoir r�glementaire modifie unilat�ralement ce classement suivant les circonstances ou l’actualit� du moment.

Afin de pr�venir le risque d’instabilit� r�glementaire qui fait craindre aux d�tenteurs d’armes d’en �tre d�poss�d�s du jour au lendemain, je souhaite que le ministre puisse les rassurer en apportant des garanties.

Enfin, je me r�jouis que cette proposition de loi comporte des dispositions favorables aux collectionneurs d’armes, en particulier le fait que la date en de�� de laquelle une arme est consid�r�e comme arme de collection soit repouss�e, sauf dangerosit� particuli�re, � 1900.

Je suis �galement satisfait de la cr�ation du statut de collectionneur qui permet de reconna�tre la possibilit� au titulaire de ce statut d’acqu�rir et de d�tenir des armes soumises � d�claration, la collection constituant d�sormais un motif l�gitime d’acquisition et de d�tention dont la justification permet de ne plus avoir � obtenir la qualit� de chasseur ou de tireur sportif.

Ces nouvelles dispositions vont assurer une meilleure pr�servation de notre patrimoine et une meilleure conservation de mat�riels pr�sentant un int�r�t historique, technique, industriel ou culturel ind�niable.

En effet, ces objets repr�sentent un �l�ment du patrimoine commun en tant que vestiges de p�riodes souvent malheureusement douloureuses de l’histoire de notre pays.

Mes chers coll�gues, la proposition de loi pr�voit un cadre juridique moderne, �quilibr�, simplifi� et adapt� aux nouvelles contraintes du contr�le des armes. L’objectif �tait de parvenir � un texte coh�rent, assurant l’efficacit� du contr�le de la circulation des armes. Il me semble que nous nous en sommes bien approch�s. Je pense que nous le devons probablement au fait que ce texte a �t� consensuel et a d�pass� les clivages politiques traditionnels. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Michel Hunault.

M. Michel Hunault. Madame la pr�sidente, monsieur le ministre, mes chers coll�ges, rassurez-vous, je n’allongerai pas le d�bat, d’autant que mon coll�gue Pascal Brindeau s’est d�j� exprim�.

Je tiens tout d’abord � remercier le rapporteur, Claude Bodin. Je suis membre de la commission des lois depuis quelques l�gislatures et je veux saluer la m�thode qui y a �t� utilis�e et que le ministre a rappel�e : un rapport parlementaire, une mission d’information, un groupe de travail compos� de personnes concern�es par le texte, notamment les collectionneurs qui se posaient beaucoup de questions.

L’enjeu �tait consid�rable, puisqu’il s’agit de la s�curit�.

Je salue l’esprit de responsabilit� de l’un de vos pr�d�cesseurs, Daniel Vaillant. Quand je l’entendais parler � la tribune, je me disais que, gr�ce � la grandeur de la fonction de ministre de l’int�rieur, les clivages pouvaient parfois s’estomper au nom d’une cause telle que la s�curit�.

C’est un d�fi. Nous sommes tous au contact de nos populations mais �galement des forces de police, qui sont confront�es � cette dangerosit� et cette violence de plus en plus graves, avec des armes de plus en plus inqui�tantes. Vous avez cit� l’exemple de Marseille mais on aurait pu �voquer la criminalit� organis�e de fa�on plus large.

Il s’agit d’un texte d’�quilibre. La nouvelle classification va permettre de s�curiser, de conforter ceux qui poss�dent des armes en toute l�galit� – vous avez cit� les collectionneurs, les chasseurs et les sportifs –, et de lutter contre la grande criminalit� organis�e.

Je ferai miennes les interrogations d’Andr� Chassaigne : nous ne devons pas sous-estimer les armes blanches. Nous avons �t�, dans l’Ouest et plus particuli�rement en Loire-Atlantique, marqu�s par des drames �pouvantables. Je pense aussi � ce film, Scream, � la publicit� qui en a �t� faite dans le m�tro, � l’utilisation d’armes blanches qu’il met en sc�ne… Nous avons vu � quel point cela pouvait d�boussoler un certain nombre de personnes. Aussi ne faut-il pas oublier les armes blanches.

Outre une nouvelle classification, la lutte contre les trafics d’armes, ce texte pr�voit deux fichiers qui, pour une fois, font l’unanimit�. C’est que la cr�ation de fichiers est mise au service de la s�curit� pour une plus grande efficacit�.

Vous n’�tes par ailleurs pas sans savoir, monsieur le ministre, que je suis en mission aupr�s du ministre d’�tat, ministre des affaires �trang�res et europ�ennes, pour r�fl�chir sur les institutions que la France accueille en mati�re de s�curit�. Pourquoi ne pas �largir la pr�sente probl�matique au niveau europ�en ?

La France, si elle adopte ce texte, se situera plut�t � la pointe en mati�re de lutte contre tous les trafics d’armes et contre la criminalit� organis�e. Le ministre de l’int�rieur ainsi que Daniel Vaillant le savent bien : c’est l� aussi un d�fi pour les autres pays europ�ens. Peut-�tre, monsieur le ministre, y aurait-il une dimension � donner � ce texte afin de mieux coordonner la lutte contre les trafics au plan europ�en.

Comme notre coll�gue Pascal Brindeau, j’apporte le soutien des d�put�s du groupe Nouveau Centre � l’immense travail accompli par le rapporteur Claude Bodin, travail dont je le remercie.

Mme la pr�sidente. La parole est � M. le ministre.

M. Claude Gu�ant, ministre. Je salue � mon tour l’esprit qui caract�rise ce d�bat, et en particulier l’intervention de mon pr�d�cesseur, Daniel Vaillant.

Ce qui fera sans doute le plus plaisir � M. Chassaigne sera d’apprendre que les couteaux de la ville de Thiers seront en d�tention libre. C’est que le Gouvernement, comme lui, se soucie de cette grande tradition industrielle fran�aise.

Pour ce qui est des flashballs, ils seront class�s en cat�gorie B ou C selon leur puissance de tir, et les tasers, les appareils � impulsion �lectrique, pour employer une expression plus g�n�rique, sont et resteront interdits.

M. Chassaigne a �voqu� un moratoire pour l’utilisation de ces �quipements par les forces de l’ordre. Ces armes ne sont pas compl�tement sans danger mais j’appelle l’attention sur le fait qu’elles permettent d’�viter l’utilisation des armes � feu, des armes l�tales. Le Gouvernement n’entend donc pas en enlever l’utilisation aux forces de l’ordre. J’ajoute que, compte tenu des conditions tr�s rigoureuses en op�rations, difficiles � interpr�ter en mati�re de l�gitime d�fense, il est parfois tr�s important de disposer d’un pistolet � impulsion �lectrique plut�t que d’h�siter � utiliser une arme � feu.

M. Verch�re a �voqu� quant � lui la question importante de la stabilit� de la r�glementation et de sa pertinence, en aval par cons�quent du travail du l�gislateur. Je lui confirme que les d�crets seront pr�par�s en relation avec les repr�sentants des diff�rentes cat�gories d’utilisateurs. J’ajoute que si certains d’entre vous souhaitent, �tant donn� la sp�cialit� qu’ils ont acquise, s’associer � ces travaux, j’en serai heureux.

Michel Hunault a envisag� l’�ventualit� d’un �largissement au niveau europ�en de la r�flexion sur la r�glementation des armes. Je souscris tout � fait � cette d�marche. R�cemment, dans un domaine de s�curit�, nous avons pu v�rifier la pertinence d’une extension de la r�flexion au plan europ�en : il s’agissait de la r�glementation sur les achats d’or. Nous pouvons tous constater, dans les journaux, la grande abondance de publicit�s � ce sujet, et l’augmentation des cours de l’or entra�ne incontestablement une recrudescence des vols. La r�glementation en la mati�re est assez s�v�re et, par exemple, les acheteurs d’or ne peuvent payer en liquide. Seulement, il suffit d’aller dans des pays limitrophes pour que cela soit possible. Une r�flexion europ�enne est donc utile.

Mme la pr�sidente. La discussion g�n�rale est close.

Discussion des articles

Mme la pr�sidente. J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi sur lesquels les deux assembl�es du Parlement n’ont pu parvenir � un texte identique.

Article 1er

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Pierre Lang, inscrit sur l’article 1er.

M. Pierre Lang. Vous avez rappel�, monsieur le ministre, qu’il y a pr�s d’un an j’avais soulev� la question importante du lien qu’il ne fallait pas faire entre la dangerosit� de l’arme, c’est-�-dire la capacit� � tirer en rafales ou avec des chargeurs importants, et le calibre. �tablir ce lien mettrait le texte en grande difficult� par rapport � la l�gislation en vigueur partout ailleurs en Europe et rendrait chaque chasseur europ�en utilisant un calibre autoris� chez lui en toute l�galit� passible des poursuites les plus graves en France.

Si je me r�f�re � un catalogue qu’on trouve chez tous les armuriers, il existe une quarantaine de calibres courants. Une dizaine, toujours dans ce catalogue, sont marqu�s d’un ast�risque indiquant qu’il s’agit de calibres qui, en France, ont �t� un jour utilis�s par des arm�es ou le sont encore, et de ce fait sont interdits puisque class�s dans la cat�gorie A.

Dans l’alin�a 11 de l’article 1er, on a retir� la notion de calibre, et je f�licite les d�put�s et les s�nateurs pour leur travail. En revanche, l’alin�a 12 m’inqui�te beaucoup : il pr�voit que, par d�rogation, on pourrait � nouveau classer des armes en cat�gorie A ou B en fonction de leur calibre.

Bien s�r, les calibres des mitrailleuses lourdes n’int�ressent pas les chasseurs.

M. Claude Bodin, rapporteur. Il vaut mieux !

M. Pierre Lang. Bien s�r, la kalachnikov n’est pas une arme de chasse puisqu’elle est automatiquement class�e dans la cat�gorie A.

Reste que les calibres les plus usuels, ceux qui figurent dans le catalogue cit�, y compris le 308 Winchester, qui est le calibre de l’OTAN, mais aussi le 223 Remington, �quivalent au 5,56 x 49 utilis� par l’OTAN, sont couramment utilis�s par les chasseurs �trangers des pays limitrophes. Nous ne voudrions pas mettre en prison les chasseurs allemands, belges ou luxembourgeois, possesseurs de telles armes, parce qu’ils auraient travers� nos fronti�res pour chasser en toute l�galit�, pourvus d’un permis europ�en l�gal.

Un arr�t� minist�riel d’une telle nature serait automatiquement soumis � une juridiction europ�enne. Je souhaite par cons�quent, monsieur le ministre, que vous nous apportiez des pr�cisions et des garanties � ce sujet.

Mme la pr�sidente. La parole est � M. le ministre.

M. Claude Gu�ant, ministre. Je suis en mesure de rassurer M. Lang. En effet, l’alin�a qu’il cite vise pr�cis�ment une arme du type de la kalachnikov. En revanche, les autres armes qu’il a mentionn�es, comme la 223 Remington ou la 308 Winchester, ont vocation � �tre class�es en cat�gorie C, c’est certain.

Un travail fin de classification reste � r�aliser au niveau r�glementaire mais, je le r�p�te, les professions seront associ�es � la r�daction des textes r�glementaires et si des parlementaires le souhaitent, comme vous-m�me qui suivez de tr�s pr�s les questions relatives � la chasse, ils seront les bienvenus.

Mme la pr�sidente. Je suis saisie d’un amendement n� 1.

La parole est � M. le rapporteur.

M. Claude Bodin, rapporteur. Il s’agit de mettre en coh�rence, d’une part, l’article 1er instituant le classement des mat�riels et des armes et, d’autre part, les dispositions de l’article 3 qui fixent leurs conditions d’acquisition et de d�tention.

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Claude Gu�ant, ministre. Favorable.

(L’amendement n� 1 est adopt�.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n� 2 rectifi�.

M. Claude Bodin, rapporteur. Cet amendement se justifie par le fait que la notion d’accessoire ne repose sur aucune d�finition juridique et qu’il importe donc d’en supprimer la mention dans l’�nonc� des cat�gories constitutives du classement des mat�riels et des armes.

(L’amendement n� 2 rectifi�, accept� par le Gouvernement, est adopt�.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n� 3.

M. Claude Bodin, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de pr�cision.

(L’amendement n� 3, accept� par le Gouvernement, est adopt�.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement n� 29.

M. Charles de Courson. Cet amendement vise � substituer aux alin�as 10 � 12 trois alin�as qui pr�cisent davantage les futures classifications en quatre cat�gories.

Il s’agit d’obtenir une plus grande stabilit� et une plus grande s�curit� juridiques ainsi qu’une meilleure harmonisation dans les classements par cat�gories pour les citoyens d�tenteurs l�gaux d’armes. En effet, si la description pr�cise du contenu des quatre cat�gories peut relever du pouvoir r�glementaire, il ne fait pas de doute qu’elle doit imp�rativement consister en la transcription fid�le des obligations de la directive sans �voquer de notions impr�cises et floues comme la dangerosit�. En effet, monsieur le ministre, la dangerosit� concerne plut�t celui qui porte l’arme et non l’arme en elle-m�me.

M. Philippe Bo�nnec. �a se discute !

M. Charles de Courson. Une arme n’est pas dangereuse en soi.

Pour simplifier le dispositif, il s’agit, je l’ai dit, de proposer un classement en quatre cat�gories. La cat�gorie A concernerait les armes automatiques et les mat�riels de guerre – canons, chars, missiles, puisque certains ont encore des collections de ce type. Dans la cat�gorie B, on classerait les armes � feu courtes � r�p�tition ainsi que les armes � feu longues semi-automatiques pouvant tirer plus de trois coups. Figureraient notamment en cat�gorie C les armes � feu longues � r�p�tition � canon ray�, quel que soit leur calibre, tandis que les armes de chasse � un coup � canon lisse seraient class�es en cat�gorie D, tout en �tant soumises � enregistrement lors de leur acquisition. Les autres armes, armes blanches, historiques et de collection, resteraient en vente et d�tention libres, elles aussi en cat�gorie D.

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Bodin, rapporteur. D�favorable pour trois raisons. D’abord, il ne semble pas utile de faire r�f�rence � la directive europ�enne du 18 juin 1991 puisque, suivant la jurisprudence du Conseil d’�tat, les actes administratifs doivent n�cessairement respecter les directives europ�ennes.

Ensuite, la r��criture de l’alin�a 11 telle que la propose l’amendement appara�t tr�s probl�matique car elle supprime la notion fondamentale de dangerosit�.

M. Daniel Vaillant. Absolument !

M. Claude Bodin, rapporteur. La r�daction que vous proposez remet en cause le consensus qui se d�gage entre l’Assembl�e et le S�nat et m�me, au-del�, avec les utilisateurs et le Gouvernement, sur les crit�res d’appr�ciation de cette dangerosit� et sur le caract�re subsidiaire du calibre parmi eux.

Enfin, les modifications propos�es n’am�liorent pas la qualit� du texte.

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Claude Gu�ant, ministre. Pour les m�mes raisons, l’avis du Gouvernement est d�favorable.

Mme la pr�sidente. Retirez-vous votre amendement, monsieur de Courson ?

M. Charles de Courson. Oui, madame la pr�sidente.

(L’amendement n� 29 est retir�.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement n� 30.

M. Charles de Courson. Je le retire �galement, madame la pr�sidente, par coh�rence.

(L’amendement n� 30 est retir�.)

(L’article 1er, amend�, est adopt�.)

Article 2

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement n� 31.

M. Charles de Courson. Il s’agit du probl�me un peu technique de la neutralisation des armes. L’amendement n� 31 a pour objet de pr�ciser que les munitions et chargeurs neutralis�s sont bien en cat�gorie D, le terme de neutralisation �tant reconnu juridiquement. En effet, la directive europ�enne de 2008 d�finit ainsi l’arme � feu : � On entend par arme � feu toute arme � canon portative qui propulse des plombs, une balle ou un projectile par l’action d’un propulseur combustible. � Or l’�pave d’une arme � feu est un bloc de rouille compacte dont la culasse ne fonctionne pas. Ce n’est donc pas une arme � feu. Elle peut �tre class�e dans les armes de collection ou exclue de la l�gislation sur les armes.

Bien s�r, monsieur le ministre, si vous nous pr�cisez que ce sera le cas, je retirerai l’amendement.

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Bodin, rapporteur. Cet amendement inclut dans la d�finition des armes historiques et de collection les munitions neutralis�es et les �paves d’armes. L’amendement que j’aurai l’occasion de pr�senter � l’article 8 �tend d�j� le champ de ce qui peut �tre acquis et d�tenu par les titulaires d’une carte de collectionneur d’armes aux munitions neutralis�es, suivant un dispositif sp�cifique.

S’agissant des �paves d’armes, la notion ne repose sur aucune d�finition juridique �tablie, ni en droit fran�ais ni dans la directive europ�enne du 18 juin 1991 � laquelle, cher coll�gue, vous faisiez pr�c�demment r�f�rence. Des crit�res satisfaisants apparaissent difficiles � d�finir dans l’imm�diat ; il vaut mieux que la notion fasse l’objet d’un examen approfondi, dans le cadre d’une r�flexion plus globale sur les collections d’armes. J’�mets donc un avis d�favorable.

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Claude Gu�ant, ministre. M�me avis que le rapporteur.

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. M. le rapporteur fait quelques ouvertures, dans l’amendement qu’il vient de rappeler, au sujet de la neutralisation des armes. S’agissant des �paves d’armes, inaptes au tir, il est par contre rest� flou, h�sitant. Le danger, c’est que certains requalifient une arme inapte au tir comme une arme pure et simple. D�s lors que d’anciennes armes sont inaptes au tir, classons-les parmi les armes de collection.

Mme la pr�sidente. La parole est � M. le rapporteur.

M. Claude Bodin, rapporteur. La notion est aujourd’hui tr�s floue. Ce que je propose et que j’ai indiqu� dans ma r�ponse, c’est que nous prenions le temps et le recul n�cessaires pour examiner ce probl�me avant de prendre la d�cision d’inclure ou non les �paves d’armes parmi les armes de collection.

M. Charles de Courson. Je retire l’amendement.

(L’amendement n� 31 est retir�.)

Mme la pr�sidente. Je suis saisie d’un amendement de coordination n� 4 de M. le rapporteur.

(L’amendement n� 4, accept� par le Gouvernement, est adopt�.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement n� 28.

M. Charles de Courson. L’amendement n� 28 pose une vraie question, car le droit fran�ais est pour le moment cal� sur 1946 et non sur 1950.

Il s’agit de mieux assurer la pr�servation du patrimoine et la conservation de mat�riels d�tenus par des particuliers ou des associations, et qui pr�sentent un int�r�t historique, technique, industriel ou culturel ind�niable quant au devoir de m�moire. La date de 1950 correspond � des crit�res techniques pr�cis ainsi qu’� des exigences communautaires et europ�ennes. Il me semble donc qu’il vaut mieux caler le dispositif sur cette date plut�t que sur l’actuelle date de 1946, afin d’�viter tout probl�me pour les ann�es entre 1946 et 1950.

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Bodin, rapporteur. D�favorable. Cet amendement reporte au 1er janvier 1950 la date de conception au-del� de laquelle les mat�riels de guerre ne peuvent entrer dans le champ des armes historiques et de collection. L’alin�a 9 de l’article 2 permet de d�passer cette question du mill�sime puisqu’il �voque � les mat�riels de guerre relevant de la cat�gorie A2 dont le mod�le est post�rieur au 1er janvier 1946 et dont la neutralisation est garantie dans les conditions pr�vues au 4� et qui sont �num�r�s dans un arr�t du ministre de la d�fense compte tenu de leur int�r�t culturel, historique ou scientifique �. Le texte ouvre donc d�j� consid�rablement les possibilit�s de collection, dans le respect de la s�curit� publique.

Par ailleurs, sur ce dossier, il existe un consensus avec le S�nat sur la date du 1er janvier 1946. M. le s�nateur C�sar, dans son rapport sur l’�volution du cadre juridique applicable aux collectionneurs d’armes et de mat�riels de guerre de collection, l’a de fait retenue comme permettant de proc�der � un examen au cas par cas des mat�riels � d�classer de mani�re pertinente.

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Claude Gu�ant, ministre. D�favorable �galement. J’ajouterai deux arguments. Tout d’abord, les progr�s technologiques entre 1945 et 1950 ont �t� consid�rables en ce qui concerne les performances des armes ; en termes de s�curit�, c’est un �l�ment que nous devons avoir � l’esprit. Ensuite, il existe une coh�rence entre la date de 1946 et certaines r�glementations europ�ennes.

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Je ne suis pas du tout d’accord, monsieur le ministre. C’est l’inverse : si vous avez ouvert cette possibilit�, comme l’a rappel� M. le rapporteur, c’est pr�cis�ment afin de d�caler la date pour toute une s�rie d’armes. Il existe une cat�gorie un peu bizarro�de entre 1946 et 1950 ; certaines armes basculeront et d’autres non. Ce n’est pas tr�s clair. Cela dit, il y a des sujets plus importants ; je retire l’amendement.

(L’amendement n� 28 est retir�.)

(L’article 2, amend�, est adopt�.)

Avant l’article 3

Mme la pr�sidente. Je suis saisie d’un amendement n� 5 rectifi� tendant � introduire un article additionnel avant l’article 3.

La parole est � M. le rapporteur.

M. Claude Bodin, rapporteur. Cet amendement se justifie par le fait que la notion d’accessoire ne repose sur aucune d�finition juridique.

(L’amendement n� 5 rectifi�, accept� par le Gouvernement, est adopt�.)

Article 3

Mme la pr�sidente. � l’article 3, je suis saisie d’un amendement n� 32.

La parole est � M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Voil� un bel amendement qui plaira, j’en suis s�r, au ministre de l’int�rieur ! (Sourires.) Il y a aux �tats-Unis un grand d�bat sur ce sujet depuis trente ou quarante ans : a-t-on le droit, en d�mocratie, de priver les citoyens du droit de porter des armes ?

M. Michel Hunault. Pour des raisons de s�curit� !

M. Charles de Courson. Pour des raisons de s�curit�, bien s�r, mais chacun sait que l’interdiction ne fait pas r�gresser les attaques � main arm�e.

C’est un amendement de principe, qui dispose : � L’�tat garantit aux citoyens le droit d’avoir des mat�riels, armes et munitions, ces derniers ayant le devoir de respecter les conditions pr�vues par la loi pour les acqu�rir et les d�tenir. � C’est l’inverse de l’attitude fran�aise qui consiste � interdire tout et � autoriser par exception. Il serait beau, monsieur le ministre, de dire : � Nous faisons confiance au citoyen ! � Il faut sortir de ce mod�le de soci�t� qui, syst�matiquement, commence par interdire et autorise ensuite certaines choses. Ce serait une d�mocratie plus �quilibr�e.

Je ne me fais cependant aucune illusion sur votre position. Tous vos conseillers vont bien s�r vous expliquer qu’il ne faut surtout pas reconna�tre le droit des citoyens � porter des armes dans le respect des conditions fix�es par la loi.

M. Andr� Chassaigne. M. de Courson veut porter l’�p�e ! (Sourires.)

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Bodin, rapporteur. Cet amendement est davantage l’affirmation d’une position philosophique qu’une modification profonde du texte sur des aspects techniques. Je crois avoir d�j� dit, en premi�re lecture, qu’� nos yeux, acqu�rir et d�tenir des armes est un droit,…

M. Charles de Courson. Tr�s bien !

M. Claude Bodin, rapporteur. …�videmment assorti de devoirs et d’obligations. Dans la mesure o� je l’ai affirm� en tant que rapporteur, il ne me para�t pas n�cessaire de le redire par un amendement qui vient modifier l’article 3 sans grande n�cessit�.

Mme la pr�sidente. La parole est � M. le ministre.

M. Claude Gu�ant, ministre. Le Gouvernement est tent� de demander � M. de Courson de retirer son amendement. Le texte tout entier cr�e des droits au profit des personnes qui ont envie de disposer d’armes de fa�on l�gitime, que ce soit pour la chasse, le tir sportif ou la collection. Il ne me semble pas n�cessaire d’affirmer un droit sup�rieur. Sur le fond, je rejoins volontiers sa philosophie politique : c’est la libert� qui droit primer.

M. Charles de Courson. Voil� !

M. Claude Gu�ant, ministre. Il me permettra toutefois d’ajouter, en tant que ministre de l’int�rieur, que plus il y a d’armes en circulation, plus les dangers sont grands.

M. Andr� Chassaigne. �videmment !

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Daniel Vaillant.

M. Daniel Vaillant. Il peut arriver que je sois d’accord avec M. le ministre de l’int�rieur.

M. Michel Hunault. Quel consensus !

M. Daniel Vaillant. Ce n’est pas en l’occurrence sur la notion de libert�, car je ne crois pas que le droit de porter une arme soit une libert�. Quand M. de Courson fait allusion � la philosophie am�ricaine en mati�re de d�tention d’armes, cela me fait m�me froid dans le dos. Il faut en rester aux propos du rapporteur, au travail effectu� en commission. En mati�re de droits, il y a quand m�me autre chose � d�fendre que le droit de porter une arme !

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Monsieur l’ancien ministre de l’int�rieur, si je peux le dire avec humour, vous �tes contre-r�volutionnaire ! (Sourires.) Avez-vous relu la discussion de la nuit du 4 ao�t 1789 et la fameuse intervention du comte de Mirabeau, qui rappelait que, jusque-l�, seuls les aristocrates avaient le droit de porter des armes ? Vous avez un comportement aristocratique (Rires)

M. Daniel Vaillant. Certainement, monsieur de Courson !

M. Charles de Courson. …puisque, au lieu de dire, comme au moment de la R�volution fran�aise, que tout �tre libre a le droit de porter des armes dans le respect de la loi, vous voulez revenir sur le vote de la nuit du 4 ao�t 1789. Avouez que, dans l’histoire politique fran�aise, on aura tout vu !

Ce qui m’�tonne, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, c’est que vous �tes au fond d’accord avec mon amendement. Adoptons-le donc !

M. Claude Gu�ant, ministre. Je n’ai pas dit que j’�tais d’accord !

M. Charles de Courson. Vous avez dit que vous aviez la m�me philosophie. Le principe, c’est la libert� de porter des armes.

Mme la pr�sidente. Retirez-vous l’amendement, monsieur de Courson ?

M. Charles de Courson. Non, madame la pr�sidente !

(L’amendement n� 32 n’est pas adopt�.)

Mme la pr�sidente. Je suis saisie d’un amendement de coordination n� 6 du rapporteur.

(L’amendement n� 6, accept� par le Gouvernement, est adopt�.)

Mme la pr�sidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 23 et 24, qui peuvent faire l’objet d’une pr�sentation commune.

La parole est � M. Charles de Courson, pour pr�senter ces deux amendements.

M. Charles de Courson. L’amendement n� 23 est de bien moindre port�e que le pr�c�dent. Il a pour objet de permettre au Conseil d’�tat d’apporter les pr�cisions n�cessaires aux conditions de d�livrance des autorisations d’acquisition et de d�tention des armes anciennes de cat�gorie B pour l’exercice de la collection. En effet, il permettra, notamment, aux organismes d’int�r�t g�n�ral ou � vocation culturelle, historique ou scientifique, tels que les mus�es, ou encore les personnes qui contribuent, par la r�alisation de collections, � la conservation, � la connaissance ou � l’�tude des armes anciennes de cat�gorie B, de continuer � les acqu�rir et � les d�tenir. En tout �tat de cause, l’�tat doit garantir aux citoyens le respect de leur droit aux loisirs, inscrit au onzi�me alin�a du pr�ambule de la Constitution de 1946 dont vous vous souvenez tous, mes chers coll�gues.

L’amendement n� 24 est �galement un amendement de pr�cision. Il a pour objectif de permettre au Conseil d’�tat d’apporter les pr�cisions n�cessaires aux conditions de d�livrance des autorisations d’acquisition et de d�tention des armes de cat�gorie B pour l’exercice de la l�gitime d�fense.

Il serait int�ressant que M. le ministre nous apporte quelques petites pr�cisions sur ces questions.

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Bodin, rapporteur. Ces deux amendements sont satisfaits ; je ne peux donc qu’�mettre un avis d�favorable. En plus de pr�ciser, � droit constant, les conditions d’acquisition et de d�tention des armes de cat�gorie B, le IV de l’article 3 comporte d�j� une habilitation du pouvoir r�glementaire suffisante pour permettre le maintien ou la reconduction des r�gles actuelles du d�cret n� 95-589 du 6 mai 1995 pour le cas relativement singulier des organismes d’int�r�t g�n�ral ou � vocation culturelle, historique ou scientifique, ou encore les personnes qui contribuent, par la r�alisation de collections, � la conservation, � la connaissance ou � l’�tude des armes.

M. Michel Hunault. Tr�s bien !

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Claude Gu�ant, ministre. D�favorable �galement.

Mme la pr�sidente. M. de Courson me fait signe qu’il retire les deux amendements.

M. Charles de Courson. Puisqu’ils sont satisfaits !

(Les amendements nos 23 et 24 sont retir�s.)

Mme la pr�sidente. Je suis saisie d’un amendement n� 35.

La parole est � M. le ministre.

M. Claude Gu�ant, ministre. Monsieur le rapporteur, dans l’esprit des modifications apport�es � l’article 3 par le S�nat, la commission, � votre initiative, a pr�cis� plus nettement les formalit�s requises pour l’acquisition des armes de cat�gorie B. Cet amendement confirme que la licence de tir d�livr�e par une f�d�ration sportive qui a re�u d�l�gation au titre du code du sport est le seul titre permettant d’acqu�rir et de d�tenir des armes, �l�ments d’armes et munitions de la cat�gorie B. La disposition que le Gouvernement propose est conforme � la r�glementation actuelle, qu’il ne s’agit pas de modifier sur ce point. L’amendement s’inscrit dans la logique d’am�lioration de la lisibilit� de la loi, comme je l’ai d�j� �voqu�.

(L’amendement n� 35, accept� par la commission, est adopt�.)

Mme la pr�sidente. En cons�quence, les amendements n�s 26, 20 et 25 tombent.

(L’article 3, amend�, est adopt�.)

Article 5

(L’article 5 est adopt�.)

Article 8

Mme la pr�sidente. Je suis saisie d’un amendement n� 33.

La parole est � M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Il convient de confirmer l’existence d’un statut de collectionneur de munitions permettant de d�tenir des exemplaires non neutralis�s en nombre limit�, tout en �vitant la constitution de d�p�ts de munitions. Aucun proc�d� de neutralisation des munitions n’est d�fini � ce jour et les cartouches de collection perdraient toute valeur historique en �tant neutralis�es. De plus, les munitions de collection ne pr�sentent aucun int�r�t � �tre utilis�es et leur grande vari�t�, voire leur p�remption, induiraient par elles-m�mes une dispersion au tir les rendant impropres � cet usage.

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Bodin, rapporteur. L’amendement est satisfait. Il vise � maintenir le dispositif remani� au S�nat en �tendant le champ de la carte de collectionneur d’armes � la collection de munitions en pr�cisant que cette carte, dont la d�nomination serait en cons�quence compl�t�e, permettrait d’acqu�rir et de d�tenir un �chantillonnage adapt� � la collection. Mais, en l’�tat, la proposition de loi comporte d�j� un dispositif sp�cifique encadrant l’acquisition et la d�tention de certaines munitions. Je demande donc le retrait de cet amendement. � d�faut, l’avis de la commission serait d�favorable.

Mme la pr�sidente. Monsieur de Courson ?...

M. Charles de Courson. Je le retire, madame la pr�sidente.

(L’amendement n� 33 est retir�.)

Mme la pr�sidente. Je suis saisie d’un amendement de cons�quence, n� 7, pr�sent� � titre personnel par M. le rapporteur.

(L’amendement n� 7, accept� par le Gouvernement, est adopt�.)

Mme la pr�sidente. Je suis saisie d’un amendement n� 37.

La parole est � M. le ministre.

M. Claude Gu�ant, ministre. Cet amendement a pour objet de supprimer la disposition introduite par la commission des lois visant � �tendre la carte du collectionneur d’armes � celles de la cat�gorie D. En effet, inscrire les armes de la cat�gorie D soumises � enregistrement, normalement acquises en vue de la pratique de la chasse, sur la carte du collectionneur conduirait � un d�tournement de l’obligation de d�tenir un permis de chasser pour leur acquisition.

Par ailleurs, alors que la cat�gorie C int�gre certaines armes historiques ou ayant un caract�re patrimonial fort, celles de la cat�gorie D sont diff�rentes, g�n�ralement plus utilitaires, et leur acquisition � un autre titre pourrait favoriser des activit�s de braconnage. Nous assiterions � une augmentation importante des acquisitions, � la constitution de stocks d’armes par des particuliers, stocks qui repr�senteraient une source d’approvisionnement importante pour le banditisme en cas de cambriolage. Je rappelle que chaque ann�e environ 4 000 armes sont vol�es dans notre pays.

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Bodin, rapporteur. Il n’a pas �t� examin� par commission, mais je tiens � donner mon avis personnel. L’amendement porte suppression de la mention des armes de cat�gorie D soumises � enregistrement parmi celles que peuvent acqu�rir et d�tenir les titulaires de la carte du collectionneur d’armes cr��e � l’article 8. L’extension du statut du collectionneur r�sulte d’un amendement que la commission des lois a adopt� � mon initiative. Nous avons en effet estim� que les modalit�s de d�livrance de cette carte comportent suffisamment de garanties pour que l’acquisition et la d�tention des armes de cat�gorie D soumises � enregistrement ne mettent pas en cause la s�curit� publique.

Cela �tant,…

M. Charles de Courson. Ah !

M. Claude Bodin, rapporteur. …je comprends les appr�hensions que peut susciter, dans le cas de la l�gislation sur les armes, un statut relativement nouveau. Le dispositif que nous proposons doit sans doute faire ses preuves. C’est pourquoi je m’en remets au souhait du Gouvernement tout en esp�rant vivement que nous n’abandonnerons pas une v�ritable r�flexion sur le statut du collectionneur, y compris s’il faut remettre sur la table le probl�me des armes de cat�gorie D.

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Michel Hunault.

M. Michel Hunault. Je comprends l’amendement du Gouvernement. Notre excellent rapporteur s’en remet � vous, monsieur le ministre, et, pour ma part, je pense que je vais voter votre amendement. Vous avez propos� une m�thode tout � l’heure en disant que cette proposition de loi n�cessiterait un suivi, invitant, au-del� du rapporteur, les membres des diff�rents groupes parlementaires int�ress�s par cette question � suivre l’�volution de l’application du texte. J’ai cru comprendre que nous sommes parvenus � un �quilibre, et je ne vois pas que votre amendement constitue une entorse � cet �gard puisque vous avez raison de mettre l’accent sur ce que la commission n’avait peut-�tre pas vu : les cons�quences des cambriolages, � savoir plusieurs milliers d’armes vol�es chaque ann�e. Mais, monsieur le ministre, je souhaite un engagement de votre part que, dans le cadre du suivi de cette loi, nous pourrons en �valuer les effets.

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Daniel Vaillant.

M. Daniel Vaillant. Dans la discussion g�n�rale, j’ai envisag� une clarification de la notion de collectionneurs, et je pense que cela correspond � l’�tat d’esprit de l’ensemble des d�put�s tel qu’il est apparu lors de la discussion en commission des lois. Mais j’ai peur que nous mettions la charrue avant les bœufs. Un suivi de la loi, c’est tr�s bien, mais je pr�f�rerais, si le rapporteur en �tait d’accord et si M. le ministre l’acceptait, que l’on retravaille sur ce sujet apr�s l’adoption de cette proposition de loi car cet amendement n� 37, de m�me que l’amendement no 36, nous �loignent quelque peu du consensus sur lequel nous nous sommes exprim�s positivement. Voil� pourquoi je suis r�serv� sur ces deux amendements.

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Je suis h�sitant sur l’amendement n� 37. Votre grand argument, monsieur le ministre, c’est que le dispositif de l’article 8 risquerait de conduire � un d�tournement de l’obligation de d�tenir un permis de chasser pour acqu�rir des armes de cat�gorie D. Mais si on veut acqu�rir une arme de chasse, ce n’est en r�alit� pas difficile. C’est pourquoi je trouve l’argument un peu faible. Si on pousse au bout votre raisonnement, je rappelle qu’il y a aussi des gens qui chassent parfois ill�galement avec des armes de cat�gorie B ou C. Je trouve que la commission a plut�t raison et je serais plut�t contre cet amendement. Mais, monsieur le ministre, je n’en fais pas une affaire d’�tat.

Mme la pr�sidente. La parole est � M. le ministre.

M. Claude Gu�ant, ministre. Chacun sent bien une certaine g�ne parce que nous sommes en train d’esquisser un statut dont les contours ne sont pas bien nets. Suivons la suggestion de M. Vaillant et celle de Michel Hunault, qu’il serait bien de poursuivre la r�flexion et de mener cette affaire sans prendre aujourd’hui de risques, ce que permet pr�cis�ment cet amendement.

(L’amendement n� 37 est adopt�.)

Mme la pr�sidente. Je suis saisie d’un amendement n� 36.

La parole est � M. le ministre.

M. Claude Gu�ant, ministre. Il est dans le m�me esprit que l’amendement pr�c�dent : je ne me r�p�terai donc pas.

(L’amendement n� 36, accept� par la commission, est adopt�.)

(L’article 8, amend�, est adopt�.)

Article 10

Mme la pr�sidente. La commission a maintenu la suppression de l’article 10.

Articles 11 et 12

(Les ‘articles 11 et 12, successivement mis aux voix, sont adopt�s.)

Article 13

Mme la pr�sidente. La commission a maintenu la suppression de l’article 13.

Articles 14 et 15

(Les articles 14 et 15, successivement mis aux voix, sont adopt�s.)

Article 16

Mme la pr�sidente. La commission a maintenu la suppression de l’article 16.

Articles 17 � 20

(Les articles 17 � 20, successivement mis aux voix, sont adopt�s.)

Article 21

Mme la pr�sidente. La commission a maintenu la suppression de l’article 21.

Articles 21 bis � 25

(Les articles 21 bis, 22, 23, 23 bis, 24, 24 bis et 25, successivement mis aux voix, sont adopt�s.)

Article 27

Mme la pr�sidente. Je suis saisie d’un amendement de coordination, n� 8, pr�sent� par M. le rapporteur � titre personnel.

(L’amendement n� 8, accept� par le Gouvernement, est adopt�.)

(L’article 27, amend�, est adopt�.)

Article 28

Mme la pr�sidente. Je suis saisie d’un amendement de coordination, n� 9, pr�sent� par M. le rapporteur � titre personnel.

(L’amendement n� 9, accept� par le Gouvernement, est adopt�.)

(L’article 28, amend�, est adopt�.)

Article 29

Mme la pr�sidente. Je suis saisie d’un amendement de coordination, n� 10, pr�sent� par M. le rapporteur � titre personnel.

(L’amendement n� 10, accept� par le Gouvernement, est adopt�.)

(L’article 29, amend�, est adopt�.)

Article 30

Mme la pr�sidente. Je suis saisie d’un amendement, n� 11, pr�sent� par M. le rapporteur � titre personnel.

(L’amendement n� 11 est adopt�.)

(L’article 30, amend�, est adopt�.)

Article 31

(L’article 31 est adopt�.)

Article 32

Mme la pr�sidente. Je suis saisie d’un amendement de coordination, n� 12, pr�sent� par M. le rapporteur � titre personnel.

(L’amendement n� 12, accept� par le Gouvernement, est adopt�.)

(L’article 32, amend�, est adopt�.)

Articles 32 bis, 32 ter et 33

(Les articles 32 bis � 33, successivement mis aux voix, sont adopt�s.)

Article 35 A

(L’article 35 A est adopt�.)

Article 35

Mme la pr�sidente. Je suis saisie d’un amendement de coordination, n� 14, pr�sent� par M. le rapporteur � titre personnel.

(L’amendement n� 14, accept� par le Gouvernement, est adopt�.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Christian Estrosi, pour d�fendre l’amendement n� 17.

M. Christian Estrosi. D’une part, cet amendement vise � mieux assurer la pr�servation du patrimoine et la conservation de mat�riels pr�sentant un int�r�t historique, technique, industriel ou culturel ind�niable ; en effet, il appara�t important que les mus�es, les collectivit�s locales, les organismes d’int�r�t g�n�ral � vocation culturelle, historique ou scientifique, ainsi que les personnes physiques participant � la pr�servation du patrimoine, puissent se porter acqu�reurs dans les ventes publiques des mat�riels, armes, �l�ments d’armes et munitions des diff�rentes cat�gories afin d’en assurer la pr�servation pour les g�n�rations futures.

D’autre part, l’amendement assure la transposition des cat�gories constitutives du nouveau classement des armes en rempla�ant, � l’article L. 2336-2 du code de la d�fense, la mention de celles de l’ancien classement des armes et mat�riels.

(L’amendement n� 17, accept� par la commission et le Gouvernement, est adopt�.)

Mme la pr�sidente. Je suis saisie d’un amendement de coordination, n� 15, pr�sent� par M. le rapporteur � titre personnel.

(L’amendement n� 15, accept� par le Gouvernement, est adopt�.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Christian Kert, pour d�fendre l’amendement n� 22.

M. Christian Kert. Il s’agit d’un amendement de m�me nature que celui de M. Estrosi. C’est un v�ritable amendement patrimonial, monsieur le ministre, et je crois que votre sensibilit� culturelle doit vous conduire � l’accepter.

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Bodin, rapporteur. L’amendement est satisfait par l’adoption de celui de M. Estrosi. Je demande donc � M. Kert de bien vouloir le retirer.

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Claude Gu�ant, ministre. Il est en effet satisfait par l’amendement de M. Estrosi. Mais nous pourrons retenir que la paternit� de sa proposition est double. (Sourires.)

Mme la pr�sidente. Monsieur Kert, retirez-vous votre amendement ?

M. Christian Kert. Je le retire, madame la pr�sidente.

(L'amendement n�22 est retir�.)

(L’article 35, amend�, est adopt�.)

Article 35 ter

Mme la pr�sidente. La parole est � M. Charles de Courson, pour d�fendre l’amendement n� 27.

M. Charles de Courson. Cet amendement vise � concr�tiser le fait qu’aucune arme l�galement d�tenue avant la publication des mesures r�glementaires d’application de la pr�sente loi ne sera class�e en cat�gorie A1, conform�ment � l’accord conclu entre le comit� Guillaume Tell, le ministre de l’int�rieur et le ministre de la d�fense. Il est donc inutile de pr�voir un cas de figure qui n’a pas de raison d’�tre.

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Bodin, rapporteur. Le dispositif de l’alin�a 4 de l’article 35 ter garantit seulement la souplesse de l’ensemble du dispositif pour l’avenir : les technologies �voluent, de m�me que les n�cessit�s de l’ordre public. Il n’anticipe pas un reclassement de certaines armes en cat�gorie A, la quasi-totalit� des armes et des mat�riels de l’ancien classement ayant vocation � �tre reclass�e dans des cat�gories B, C et D.

Je pr�conise donc le rejet de cet amendement.

Mme la pr�sidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Claude Gu�ant, ministre. Le Gouvernement partage l’avis du rapporteur.

(L’amendement n� 27 n’est pas adopt�.)

Mme la pr�sidente. L’amendement n� 16 du rapporteur est de coordination.

(L’amendement n� 16, accept� par le Gouvernement, est adopt�.)

(L’article 35 ter, amend�, est adopt�.)

Vote sur l’ensemble

Mme la pr�sidente. Nous avons achev� l’examen des articles.

Je ne suis saisie d’aucune demande d’explication de vote.

Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.

(L’ensemble de la proposition de loi est adopt�.)

Mme la pr�sidente. La parole est � M. le rapporteur.

M. Claude Bodin, rapporteur. Je voudrais remercier tous les repr�sentants des groupes, qui se sont exprim�s ce soir et qui l’avaient d�j� fait lors de la premi�re lecture, de leur soutien et de leur vote puisque, comme en premi�re lecture, le vote est acquis � l’unanimit�.

Je voudrais aussi remercier tous ceux avec lesquels nous avons pr�par� cette proposition de loi : le minist�re de l’int�rieur avec la bienveillance du ministre en personne ; les utilisateurs des armes et notamment le comit� Guillaume Tell ; les collaborateurs et administrateurs de la commission des lois qui ont apport� une aide pr�cieuse � ce travail ; mes coll�gues Bruno Le Roux et Jean-Luc Warsmann, eux aussi tr�s pr�sents lors de l’�laboration de ce texte.

5

Ordre du jour de la prochaine s�ance

Mme la pr�sidente. Prochaine s�ance, jeudi 2 f�vrier 2012 � neuf heures trente :

Questions orales sans d�bat.

La s�ance est lev�e.

(La s�ance est lev�e � vingt heures cinquante.)