Éditorial

Condamnation de Nicolas Sarkozy : la justice, par principe

Séverin Husson, directeur adjoint de la rédaction.
Séverin Husson, directeur adjoint de la rédaction. Franck Ferville / pour La Croix
L’ancien président de la République a été condamné ce jeudi à cinq ans de prison ferme pour « association de malfaiteurs » dans le dossier libyen et va être incarcéré.

« Je dormirai en prison la tête haute. » Nicolas Sarkozy s’est montré bravache à la sortie du tribunal correctionnel de Paris qui l’a condamné à cinq ans d’emprisonnement avec mandat de dépôt à effet différé et exécution provisoire. Le jugement est pourtant exceptionnellement lourd puisque pour la première fois de l’histoire de la République, un ancien président devrait prochainement dormir derrière les barreaux, même en cas d’appel. Il a été condamné pour avoir laissé ses proches solliciter les autorités libyennes en vue d’obtenir un financement illégal de sa campagne de 2007 – sans que la justice puisse prouver la réalité de ce financement.

Si la place d’un ancien président n’est évidemment pas en prison, Nicolas Sarkozy est un justiciable comme les autres. Or, les faits qui lui sont reprochés sont d’« une gravité exceptionnelle », assure la présidente du tribunal. Au long de ses quarante ans de vie politique, l’ancien président a montré qu’il était prêt à beaucoup pour conquérir le pouvoir. Il a d’ailleurs déjà été définitivement condamné pour « corruption » et « trafic d’influence » dans une autre affaire. C’est ainsi qu’on peut lire ce jugement : une étape de plus du mouvement de fond de moralisation de la vie politique.

Ce qui rend la décision spectaculaire, et surprenante, c’est le mandat de dépôt. Les critiques sur la lenteur de la justice et sur la généralisation de l’exécution provisoire méritent d’être examinées. Mais plutôt que de les répéter ad nauseam, chacun devrait garder son sang-froid. Les réactions ironiques de parlementaires de gauche sont tout aussi regrettables que les commentaires rageurs de députés de droite. Tout cela fragilise notre État de droit, électrise le débat public et accroît la défiance des électeurs. Plus que jamais, nous devons nous tenir du côté de la justice, réaffirmer notre confiance dans le travail de ceux qui la font et respecter leurs décisions. Par principe.