Comment science-fiction et fantasy permettent-elles de réfléchir aux transformations économiques et sociales actuelles et aux risques à venir ?
- Catherine Dufour, écrivaine de science-fiction et ingénieure informatique
Du Bal des absents à l’Arithmétique terrible de la misère, entre les princesses qui exploitent le foncier et les spectres qui gèrent des empires immobiliers : les nouvelles et romans de Catherine Dufour sont hantés par des problématiques économiques. Entends la nuit est un anti-twilight version réalité sociale et économique, dans lequel on comprend vite que “les petites filles pauvres n’épousent pas les princes charmants et riches”. Le goût de l’immortalité, sur le modèle de la longue lettre des Mémoires d’Hadrien de Yourcenar, développe deux sociétés à la Métropolis, où les riches occupent les hautes tours et où les pauvres stagnent en bas.
La fantasy et la SF, en tant que genres de l’imaginaire, permettent de réfléchir aux rapports économiques et sociaux actuels, pour les transposer dans des univers autres, dans un futur plus ou moins proche : c’est un exercice de pensée qui relève d’une sorte de naturalisme à la Zola appliqué au futur…
Les romans de science-fiction qui parlent d'économie nous permettent peut-être de dépasser une certaine angoisse de l'avenir, Catherine Dufour ajoute "c'est effectivement l'espoir de la fiction nouvelle manière. Avant, la science-fiction était là pour donner l'alerte. Elle allait voir ce qui se faisait dans les laboratoires et elle disait "faites attention les contemporains, faire de la bio ingénierie et tripatouiller le génome ça va poser des problèmes", c'était donc une littérature d'alerte. Aujourd'hui l'alerte ce n'est peut-être plus la peine, il y a une prise de conscience, ce n'est pas la peine de rajouter de l'angoisse. La nouvelle direction de la science-fiction serait peut-être d'ouvrir des pistes optimistes ou plutôt positives. Si vous posez la question "Comment rêvez-vous le XXIIe siècle ?" aujourd'hui, personne ne va répondre, parce qu'on a une sensation d'avenir bouché, de l'avenir comme un accident de voiture. Or l'avenir, il est dans nos têtes, tout ce qui est autour de nous, qui existe, c'est parce qu'un jour ça existait, dans la tête de quelqu'un, qui l'a mis au point. Si dans nos têtes, on n'a qu'un accident de voiture comme image de l'avenir, c'est cela qui va arriver. Il faut vraiment qu'on arrive à travers la littérature de science-fiction, ou toute autre forme d'expression artistique, à remettre en marche les neurones de l'optimisme".
Bibliographie
- L'arithmétique terrible de la misère (Le Livre de Poche, 2022)
- Au bal des absents (Seuil, 2020)
- Danse avec les lutins (L’Atalante, prix Imaginales et Bob-Morane, 2020)
- Entends la nuit (L’Atalante,2018)
- Ada ou la beauté des nombres (Fayard, 2019)
- Guide des métiers pour les petites filles qui ne veulent pas finir princesses (Fayard, 2014)
- L'Histoire de France pour ceux qui n'aiment pas ça (Mille et une nuits, 2012)
- Outrage et rébellion (Éditions Denoël, 2009)
- L’accroissement mathématique du plaisir (Éditions Le Belial, 2008)
- Le Goût de l’immortalité (2005 Mnémos - 2007 Poche)
- Blanche-Neige et les Lance-missiles (Nestiveqnen, 2001 - Poche 2008)
Références sonores
- Le sociologue Erik Orlin Wright, en conférence à Berkeley le 27 avril 2011, sur les “utopies réelles”
- Lecture, extrait de : Au bal des absents, chapitre 6, Seuil, collection Cadre Noir, 2020 de Catherine Dufour
- Discours d’Ursula K. Le Guin lors de sa remise de médaille pour l’ensemble de son œuvre par le National Book Awards en 2014
À réécouter
Références musicales
- Brazil • Theme Song/Aquarela do Brasil, par Kate Bush & Michael Kamen
- Acid Arab, par Halim Guelil
L'équipe
- Productrice de l'émission "Entendez-vous l'éco ?" sur France Culture
- Production déléguée
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