Automate - Edward Hopper - 1927 - Des Moines Art Center ©Getty - Francis G. Mayer
Publicité

Toffick a d'abord connu l'isolement au Burkina Faso, puis en France, loin de sa famille. Jeanne, atteinte de la maladie des "os de verre", n'a jamais reçu d'attention de la part de ses parents. Deux trajectoires de vies singulières racontées à l'occasion de la Journée Mondiale des solitudes.

"La solitude, selon moi, est une et multiple.", disait la journaliste Clara Candiani le 22 septembre 1970 au micro de France Inter. Elle donnait alors la voix à une jeune mère de 25 ans ayant grandi sans famille, et à une femme quittée par son mari après des années de ménage.

Publicité

55 ans plus tard, le constat est le même, et l'isolement social et relationnel est devenu un sujet de recherche académique et de préoccupation grandissante.

Depuis 2010, la Fondation de France et l'Observatoire de la philanthropie réalisent des études quantitatives et qualitatives annuelles pour interroger l'isolement de manière générique ou auprès d'une population ou d'un angle spécifique. Les derniers résultats sont présentés dans la synthèse de l'étude "Le temps des solitudes" publiée le 22 janvier 2025.

"La solitude, c'est la pire des choses que puisse vivre un être humain."

Toffick, 25 ans, raconte son expérience de jeune instituteur dans un petit village du Burkina Faso où il a été affecté après l'obtention de son diplôme. "Quand je suis arrivé, je me suis dit que ce n'était pas possible. J'ai pleuré pendant des jours." Isolé à plus d'une centaine de kilomètres de sa famille, sans accès à Internet ni au réseau téléphonique, Toffick vit une première année difficile mais il tient bon, car "quand on a la chance de travailler, de gagner des sous pour sa famille et pour soi-même, c'est quelque chose ".

Une autre expérience de la solitude attend Toffick en France, où il part sur les conseils de son "papa de cœur ", un français qui l'a parrainé depuis l'enfance. Mais lorsque à 23 ans, il arrive à Chambéry, celui-ci est hospitalisé, et meurt rapidement.

"Déjà quitter ma famille, c'était pas évident. Et là je sentais que j'allais perdre un confident."

Jeanne était une enfant silencieuse. Elle ne parlait pas de sa "maladie des os de verre", l'ostéogenèse imparfaite, et on ne lui demandait pas vraiment comment elle allait. "Cette maladie n'avait pas sa place dans cette famille."

Étudiante, elle découvre de manière fortuite qu'elle souffre d'une fracture au bassin. Jeanne est immobilisée pendant une dizaine de jours. "Sans l'aide concrète de mes parents et sans l'aide au handicap, j'étais prisonnière."

"Un jour ma mère est venue et m'a dit : « Alors c'est ça ta vie ? Tu peux rien faire ? Tu me déprimes. »"

Jeanne quitte le domicile familial pour tenter de gagner son indépendance, mais sa maladie l'empêche finalement de travailler. Forcée de retourner chez ses parents, ces derniers, qui vivent sa présence comme un poids, lui demandent de partir, malgré son état...

Merci aux personnes rencontrées, à Toffick, Monsieur Galiban et Benjamin. Merci à la Fondation de France, le Cerlis, le Crédoc et Audencia. Et particulièrement à Hadrien Riffaut, Séverine Dessajan et Delphine Saurier. Merci à Santé Psy Etudiant.

  • Reportage : Valérie Borst
  • Réalisation : Eric Lancien

Musique de fin : "Eleanor Rigby", Tété - Album : L'air de rien (2001)

Pour aller plus loin

"Le temps des solitudes. Les fragilités relationnelles à l'épreuve des temporalités.", Étude de la Fondation de France et de l'Observatoire de la philanthropie, 2024. Il en ressort notamment que le taux de personnes isolées ne baisse pas sur la période 2023-2024 et concerne 12% de la population (l'isolement faisant référence à un état où une personnes est physiquement coupée des autres);

L'équipe