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Avril 1915 - La Vie en Lorraine (2/3)

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NOS SUCC�S entre MEUSE et MOSELLE
Plus de 1, 000 Allemands tu�s aux Eparges. - Les seuls survivants d'une compagnie sont faits prisonniers au bois de Morville. - Succ�s dans les bois d'Ailly et de Mortmare.
De VERDUN au BOIS LE PR�TRE

Paris, 8 avril, 15 heures.
Combats d'artillerie, en Belgique, dans la vall�e de l'Aisne et � l'est de Reims.
Les r�sultats obtenus entre Meuse et Moselle, et signal�s hier soir, sont confirm�s.
Les pluies de ces jours derniers ont profond�ment d�tremp� le sol argileux de la Wo�vre, ce qui rend les mouvements d'artillerie difficiles et emp�che les projectiles d'�clater.
Nos troupes ont consolid� les progr�s faits la veille. Nous avons maintenu tous nos gains, malgr� des contre-attaques extraordinairement violentes Aux Eparges, notamment, la derni�re contre-attaque des Allemands, men�e par un r�giment et demi, a �t� compl�tement repouss�e.
Ils ont subi d'�normes pertes. Leurs cadavres couvrent le terrain. Trois cents hommes, qui avaient un moment pu progresser en avant des lignes allemandes, ont �t� fauch�s par nos mitrailleuses. Aucun d'eux n'a �chapp� Au bois Br�l�, nous avons enlev� une tranch�e ennemie.

Communiqu� officiel du 8 avril, 23 heures :
Malgr� le mauvais temps persistant, nous avons � enregistrer de nouveaux succ�s entre Meuse et Moselle, dans la nuit du 7 au 8 avril et dans la journ�e du 8.
Aux Eparges, une attaque de nuit nous a permis de faire un nouveau bond en avant. Nous avons maintenu notre progr�s, malgr� trois, violentes contre-attaques.
Nous avons d�j� compt� sur le terrain plus de, mille cadavres allemands.
Plus au sud, au bois de la Morville, dans une vive action d'infanterie, nous avons d�truit une compagnie allemande dont il n'est rest� que dix survivants, qui ont �t� faits prisonniers par nous.
Au bois d'Ailly, nous avons enlev� de nouvelles tranch�es et repouss� deux contre-attaques.
Au bois de Mortmare, au nord de Flirey, nous avons pris pied dans les organisations d�fensives de l'ennemi et nous nous y sommes maintenus, en d�pit des efforts qu'il a faits pour les reconqu�rir.
Au nord-ouest de ce bois, � Pannes, un ballon captif allemand a eu son c�ble coup� par un nos obus et s'en est all� � la d�rive dans nos lignes, vers le sud-est.
En r�sum�, les reconnaissances offensives et les attaques que nous poursuivons depuis le 4 avril entre la Meuse et la Moselle, nous ont donn�, d�s maintenant, les r�sultats, suivants :
1� Sur les fronts nord-est et est de Verdun, nous avons gagn�, sur un front de vingt kilom�tres de long, de un � trois kilom�tres en profondeur. Nous avons occup� les hauteurs qui dominent le cours, de l'Orne et enlev� les villages de Gussainville et de Fremezey ;
2� Sur les Hauts-de-Meuse, aux Eparges nous avons conquis la presque totalit� des fortes positions tenues par l'ennemi sur le plateau qui domine Combres, et conserv� le terrain gagn�, malgr� des contre-attaques nombreuses et extr�mement violentes ;
3� Plus au sud, pr�s de Saint-Mihiel nous nous sommes empar�s de toute la partie sud-ouest du bois d'Ailly, o� les Allemands �taient fortement �tablis et qu'ils n'ont pas pu reprendre, malgr� des contre-attaques r�p�t�es ;
4� Dans, la vall�e de la Wo�vre m�ridionale, entre le bois de Mortmare et le bois Le Pr�tre, nous avons conquis, sur un front de sept � huit kilom�tres de long, trois kilom�tres en profondeur et enlev� � l'ennemi les villages de Fey-en-Haye et R�gnieville.
Sur tous ces points, les Allemands ont subi des pertes, dont le nombre des cadavres trouv�s aux Eparges permet d'appr�cier l'importance.

DEVANT LE FRONT
LA GUERRE SOUS BOIS

Nous roulons � grande allure de Chalons vers Nancy. L'activit� militaire se manifeste sur les routes par la rencontre de nombreux v�hicules : tant�t ce sont des trains de voitures r�gimentaires ou des convois automobiles que nous croisons, tant�t nous longeons dans les bourgs ou en pleine campagne de v�ritables parcs de moyens de transport. De temps � autre on rencontre des patrouilles de mar�chauss�e. Mais dans ces r�gions de la zone des arm�es, on ne voit pas de troupes en armes, on ne fend pas des flots de soldats, contrairement � l'opinion populaire et � l'image qu'on se fait de la guerre. Les soldats sont � leurs postes. Ils semblent, cach�s, m�me hors des tranch�es. Souvent, dans certains villages, on trouve des cantonnements paisibles qui rappellent plut�t les grandes manoeuvres. Des hommes pansent des chevaux ; d'autres, les bras nus, en corps de chemise, les ferrent, devant la porte d'une remise. Dans les villes, toujours des voitures et des voitures. On dirait d'une guerre de livraisons.
Nous avons constat� que partout on a remu� de la terre. Des travaux de d�fense nombreux s'�chelonnent et t�moignent que les le�ons de retranchements ont �t� vite et bien apprises. Les fils de fer h�riss�s �tendent leurs r�seaux inextricables autour de ces terrassements profonds. En chemin, nous avons �t� re�us par le g�n�ral X..., qui commande une arm�e. Install� dans une �cole, o� l'on n'a jamais travaill� avec autant de z�le, le g�n�ral nous accueille dans une salle tapiss�e de cartes d'�tat-major ray�es de larges traits. �� Vous allez au bois Le Pr�tre, nous dit-il, vous verrez ce qu'est la guerre sous bois, la guerre de sape. Vous vous rendrez compte des difficult�s que nous avons � vaincre et de la valeur incomparable de nos soldats. Le g�n�ral R..., qui vous conduira - c'est lui qui dirige les op�rations du bois Le Pr�tre - est pr�venu. Il vous attend.� La r�ception a �t� courte. Nous reprenons la route d�tremp�e, dans les orni�res de laquelle les autos font jaillir des gerbes ou plut�t des faux de liquides boueux.
Voici Nancy. Les habitants vont et viennent comme en temps normal ; et c'est une surprise de cette guerre paradoxale que cette ville, qui �� pouvait � �tre prise d�s le d�but d�s, hostilit�s, qu'il fallait le cas �ch�ant, sacrifier � des n�cessit�s strat�giques, ait gard� sa physionomie, son calme et sa force, tandis que Lille, qui n'est pas sur la fronti�re allemande, conna�t la dure loi de l'occupation. Nancy, de fait, a une tenue admirable. Chacun y reste � son poste, fier du r�le qu'il a � remplir: les �� coeurs inutiles � sont partis.
Il est midi quand nous arrivons dans la noble cit� lorraine. Deux heures apr�s, nous repartions pour Pont-�-Mousson et le bois Le Pr�tre. Dans la partie de Pont-�-Mousson que nous avons travers�e, nous n'avons pas vu les effets du bombardement presque quotidien. Quelques, soldats et de rares civils marchent le long des maisons, �vitant le milieu de la rue. A partir de Pont-�-Mousson, les autos qui nous m�nent ont la consigne de garder une assez longue distance entre elles, par mesure de prudence. Notre procession automobile s'�gr�ne. A l'endroit fix�, le g�n�ral R..., accompagn� de ses officiers d'ordonnance, nous accueille tr�s aimablement. Nouvellement promu, sur place, le g�n�ral, un �� sapeur �, colonel du g�nie de la veille, porte un uniforme sans indignes visibles : une longue capote � une rang�e de boutons de drap bleu sombre, un k�pi de m�me couleur ; deux �toiles en acier bruni sar les manches et le couvre-chef marquent le grade. Elles n'attirent pas le regard. Aussi ai-je entendu un soldat que le g�n�ral interrogeait r�pondre : �� oui, mon... �. Le soldat voyait bien qu'il avait affaire � un chef, mais il ne savait pas son grade.
Messieurs, nous dit le g�n�ral, nous allons de ce pas au bois Le-Pr�tre. Nous monterons d'abord sur ce plateau qui domine la position et d'o� vous pourrez voir tous les environs. Puis nous irons � la maison du p�re Hilarion, qui a �t� le th��tre d'un combat acharn�.

Le Bois Le Pr�tre
La contr�e qui �tait devant nos yeux offrait, quoique � une �chelle r�duite, tous les caract�res des pays de for�ts et de montagnes. De grands mouvements de terrain formaient des alternances de vall�es nues et de hauteurs bois�es, espaces labour�s et masses noires de sapins. A notre gauche, sur un flanc d�couvert, � mi-coteau, on apercevait des ouvertures carr�es de distance en distance, entr�e d'une ligne de tranch�es ; devant nous une for�t de haute futaie s'infl�chissait vers un repli de terrain, - o� �tait tapie la maison du p�re Hilarion - et sur notre droite la for�t se redressait presque � pic et se terminait par une croupe arrondie couverte d'arbres dont l'extr�me pointe touffue faisait �� la corne� du Bois. Le ciel �tait couvert ; le vent soufflait par rafales ; de gros nuages noirs couraient au-dessus des collines et semblaient s'accrocher et se d�chirer aux piques de sapins. Une pluie glaciale et drue nous fouettait le visage. Une boue �paisse, gluante et glissante g�nait notre marche. Par un chemin montant, un sentier plut�t, nous nous rendions sur le plateau dont avait parl� le g�n�ral. Le bruit des d�tonations ne cessait de r�sonner, r�percut� par les �chos. C'�taient des coups sourds ou �clatants, non pas un roulement continu mai� des explosions intermittentes qui donnaient � la solitude et au silence de ce paysage grave je ne sais quoi de tragique. Les officiers, nos guides, nous �� pr�sentaient � ces d�tonations : �� Celle-ci, c'est une pi�ce lourde allemande ; celle-l� c'est une bombe boche ; ah ! voil� que notre grosse artillerie r�pond. � Parfois un grondement qui �branlait l'air nous avertissait qu'une mine venait d'exploser. Soudain, tout pr�s, devant nous, � un d�tour du sentier et se d�tachant sur l'horizon sombre, apparurent quatre hommes portant une civi�re. Nos regards se fix�rent sur deux pieds d�mesur�s, sur deux masses de boue qui d�passaient la couche portative et qui avan�aient, Nous nous range�mes sur les c�t�s, �tant nos chapeaux. Nous v�mes, alors, quand il passa devant nous, un soldat �tendu, la t�te band�e, le front et les joues avec des tra�n�es de sang frais, le nez pinc� et blanc. Le pauvre gar�on venait d'�tre tu� un instant auparavant dans les tranch�es voisines. La mort frappait dans ces parages.
Sur le plateau, la pluie redoubla de violence. Le g�n�ral R... nous fit un petit �� topo � d'orientation. Il nous d�signa tous les bois des environs, toutes les cr�tes et nous montra la direction de nos lignes et celle des Allemands. �� L�-bas, derri�re cette colline, c'est Xon, que nous occupons, et plus loin les hauteurs de Norroy, d'o� l'ennemi bombarde journellement Pont-�-Mousson. Devant nous s'�tend le bois Le-Pr�tre. Nous en occupons la plus grande partie, � partir de la corne du bois. Les Allemands l'ont tenue longtemps. Leur premi�re ligne de tranch�es se trouvait presque � l'entr�e du bois.
Nous la verrons tout � l'heure. Ils y �taient solidement retranch�s, ainsi que vous pourrez en juger. Mais nous les avons forc�s � les �vacuer apr�s une lutte terrible. Poursuivant notre avantage; nous nous sommes avanc�s dans la m�me direction � plusieurs centaines de m�tres; nous avons d'autre part, tandis que se produisait cette attaque de front, attaqu� la colline oppos�e, prenant l'ennemi de flanc. Il a recul�, apr�s des alternatives d'attaques et de contre-attaques, notamment dans le repli o� s'�l�ve la maison du p�re Hilarion. Il s'est port� � plus d'un kilom�tre en arri�re de la lisi�re de la for�t qui, �tant donn� la nature du terrain, marque pour lui un gros �chec. Depuis, nous nous �� moulons � sur les lignes ennemies. Partout nous sommes nez � nez. Nous avons entrepris un r�seau de sape, dans lequel l'ing�niosit� de nos hommes et leur vaillance font merveille. Ce sont sans cesse des �pisodes qui prouvent, que nous avons acquis l'ascendant sur l'adversaire. � J'ai retrac� d'une mani�re g�n�rale et vague les paroles pr�cises du g�n�ral R... pour une raison qui se comprend facilement. Du haut du plateau, la vue embrassait l'ensemble de la vall�e et la lisi�re du bois. On voyait sortir de la for�t des hommes qui suivaient les sentiers et les routes en terrain d�couvert par petits groupes, � la file indienne ou deux par deux. Et par un mouvement inverse, d'autres hommes montaient de la vall�e vers la for�t. Ce tableau �voquait assez l'image des cort�ges de fourmis qui se croisent, mais qui partent toutes d'une m�me fourmili�re ou y aboutissent. Ici on devinait sans peine ce qu'�tait la fourmili�re, le trou invisible qui d�terminait cette activit�. Parmi ces hommes, les uns avaient �t� relev�s de leur poste, les autres �taient de corv�e. Ils montaient des seaux � incendie remplis d'eau potable. Ils avaient des costumes �tranges. Certains rev�taient une fa�on d'imperm�able qui d�fie la description exacte. C'�tait un caoutchouc-sac d'une couleur o� se heurtaient toutes les nuances du vert ou du jaune. Ni peau de l�zard, ni peau de grenouille, il semblait avoir �t� tremp� dans une d�coction de mousse, de feuilles s�ches dor�es, de frondaisons rouill�e s, d'aiguilles de sapin d'un vert cru, de foug�res fonc�es. Par un ph�nom�ne de mim�tisme curieux, les habitants de ces lieux avaient pris les couleurs vari�es d'un bois �pais, les couleurs de ses quatre saisons. D'autres portaient des esp�ces de cuirasses de peau de mouton : la toison �tait tourn�e � l'ext�rieur. Les bras restaient libres et d�gag�s dans les manches de la capote r�glementaire. Ces soldats des bois avaient vraiment un pittoresque hardi et une tournure martiale.

La maison du p�re Hilarion
Nous p�n�trons dans le bois. Une odeur lourde de champignons moisis et des senteurs acides de cyclamens vous frappent vivement. Nous suivons une all�e bord�e de grands arbres qui d�coupent dans le ciel comme un canal gris lumineux dans la masse de la futaie obscure. Mais le canal d�verse tout son contenu sur nos t�tes. Nous enfon�ons de plus en plus dans la boue. De droite et de gauche, partent des layons jonch�s de feuilles qui brillent. Nous voici � la premi�re tranch�e allemande conquise par nos troupes. Ce sont au ras du sol des trous profonds qui vus du dehors, ne semblent pas communiquer entre eux. Recouverts de branches et de feuillage, ils ont form�s de cavit�s larges pouvant contenir sept ou huit hommes et s�par�s par un boyau �troit. Derri�re est le poste de commandement de l'officier. Tout autour des arbres sont coup�s. A mesure que nous avan�ons, le concert de l'artillerie para�t s'accentuer. Les coups succ�dent aux coups, les explosions aux explosions. Une note nouvelle s'ajoute � cette bruyante orchestration. On croirait s'approcher d'un stand. Le claquement sec des coups de fusil larde les �chos de la for�t. Nous arrivons � la maison du p�re Hilarion. C'est une masure rustique blanche et rose, rendez-vous des Mussipontains pendant les beaux jours. Ils y trouvaient des victuailles et � c�t� une source fra�che et pure. C'est m�me pour la possession de cette fontaine qu'on s'est battu avec tant d'acharnement. Une inscription sur une planche de sapin nous avertit qu'il est d�fendu de laver son linge � cette fontaine. A gauche de la maison du p�re Hilarion, une all�e que coupe la premi�re, celle que nous avons d�j� suivie, nous montre � deux cents m�tres une barri�re, et, plus loin, une clart� diffuse tr�s p�le indique, ou une clairi�re ou la lisi�re du bois. C'est � cet endroit clair que se trouve la ligne allemande. De quatre � cinq cents m�tres nous en s�parent. Les Allemands retranch�s sur la droite n'ont pas la vue de l'all�e. Deux balles sifflent dans les arbres. �� C'est des Boches! � nous dit l'officier. Nous sommes pr�s du front et cependant nous ne voyons pas un soldat � son poste. Tout le travail se fait sous terre. Seuls les canons nous signalent que les positions sont bombard�es.
Nous revenons par le m�me chemin, sous la m�me pluie glaciale, dans la m�me boue gluante et glissante. Nous croisons des soldats, qui montent ou descendent, en petits groupes s�par�s. Les uns ont des fusils les autres des pelles. Qui dira jamais l'admiration que m�ritent ces h�ros ? Quelle endurance il leur faut pour lutter contre ces �l�ments qui s'appellent la pluie, la boue, le froid ! Quelle �nergie pour vivre sous terre, dans ce bois, et pour mener une attaque incessante ! Dans cette guerre de mines, l'engagement ne conna�t ni tr�ve, ni repos. L'action continue de jour et de nuit. Et voil� des mois que cela dure. Mais quand on a vu le terrain, on s'explique pourquoi un gain de quelques m�tres repr�sente un fait d'armes important. Soldats et chefs sont pleins d'entrain, malgr� leurs tr�s dures �preuves. Ils ont de la belle humeur et une confiance souriante. Je remarquai des soldats qui se pressaient autour de quelques-uns d'entre nous qui leur distribuaient du tabac et des cigares. Ils avaient l'air d'�coliers en vacances. A leur figure, on voit qu'ils ne souffrent pas de la faim. Le service de l'alimentation n'est certainement pas en d�faut sur cette partie du front. Le g�n�ral R... nous a invit�s � prendre le th� � son poste de commandement. C'est une ferme fort simple : une entr�e �troite en forme de couloir que les hommes balayent tant telle est envahie par l'eau; une assez vaste pi�ce basse, �clair�e mod�r�ment par une lampe � p�trole, une chemin�e monumentale en pierre � tablier et � colonnes dans laquelle flambe un fagot imposant. Sur la table, une table dress�e, une nappe blanche, au milieu une couronne de fleurs des bois, et tout autour des bouteilles, des g�teaux, une brioche, de grande pointure. De jeunes officiers font les ma�tresses de maison. La salle donne directement sur l'�curie ; une autre porte ouverte nous montre une pi�ce avec des tables rondes charg�es de cartes, de papiers et d'�critures ; un t�l�phone brille sur un bureau. La fen�tre; de la salle n'a plus qu'un ou deux carreaux de verre, des carr�s de papier blanc bouchent le reste de la fen�tre. �� Hier, nous dit le g�n�ral, un obus est tomb� devant la fen�tre, � quelques m�tres et a bris�, les vitres. � Le son du canon nous rappelle que nous sommes pr�s des premi�res lignes. Tout � l'heure d'ailleurs, � une crois�e de chemins, tandis que les autos �taient arr�t�es, un obus a �clat� � une vingtaine de m�tres de la route, � c�t� d'un abri dans lequel un soldat a eu juste le temps de se glisser. Et plus tard, au retour, apr�s avoir pris cong� du g�n�ral, au moment o� les chauffeurs allumaient les phares, une d�tonation effroyable nous avertissait qu'il n'�tait pas l'heure de musarder en chemin.

Un autre aspect de for�t
Le d�cor change. Nous visitons un autre th��tre de la guerre sous bois. Mais actuellement ce th��tre fait rel�che. Nous sommes dans une for�t aux environs de Nancy, qu'il est inutile que je nomme. A la pluie de la veille ont succ�d� un soleil �clatant et un froid qui mord. Le sol est d�tremp� et c�de sous les roues des autos qui s'enfoncent. Des artilleurs doivent d�sembourber une de nos voitures. Partout le silence. Aucun coup de canon pas le moindre coup de fusil. Avant d'entrer dans la for�t, nous avons long� de nombreuses tombes, petits tertres rectangulaires de terre surmont�s d'une croix portant un petit drapeau ou un k�pi. A un des croisements de chemins qui s'appellent d'ordinaire la �� Croix du Grand-Veneur � ou la �� Croix des Gardes �, nous mettons pied � terre. Nous entrons sous bois. Nous voici dans un village d'une �poque primitive. Ce ne sont que des huttes, faites de branches d'arbres. Je p�n�tre dans l'une d'elles d'o� s'�chappe une fum�e abondante. J'y trouve un �� poilu � devant un fourneau improvis� sur lequel bout une grande marmite app�tissante.
C'est un rata de pommes de terre. Les hommes qui habitent ce village portent tous la capote grise. Ils sont propres et ne ressemblent gu�re dans leur uniforme clair aux �� mineurs � du bois Le-Pr�tre.
Nous avons visit� la hutte du capitaine, qui loge avec son lieutenant : il faut descendre une ou deux marches ; la pi�ce n'est pas vaste ; une table sur laquelle on voit une cuvette en caoutchouc, un blaireau, une lampe, quelques livres ; un po�le et au fond une esp�ce de lit de camp, plan, inclin� o� on remarque un sommier � gauche et un matelas � droite. Le premier est pour le capitaine, le second pour le lieutenant. Nous visitons aussi une hutte-abri pour les soldats : longue galerie divis�e en deux parties ; la premi�re contient les sacs, les fusils, c'est le refuge de jour ; l'autre couverte de paille, est le couloir profond et sombre d'une section. La tranch�e o� on nous conduit a �t� faite d'apr�s le dernier cri de r�gles de l'art : le toit en est form� de branches solides, l'int�rieur est clayonn� soigneusement, des sacs de terre ext�rieurs encadrent les meurtri�res. Une pompe d'�puisement assure l'ass�chement de la tranch�e. Il nous a �t� donn� de voir un des gros canons de marine servi par des canonniers de la flotte. L'engin formidable est cach� dans une coupole sur b�ton et recouvert d'une carapace �paisse de terre. La premi�re ligne de tranch�es est � peu de distance de la for�t. De la lisi�re de celle-ci on aper�oit, en terrain d�couvert, des villages de la Lorraine annex�e, dont les clochers se dressent dans le ciel bleu. Dans ce coin qui appartient au �� Grand-Couronn� � de Nancy, il n'y a pas, en c moment, d'activit� offensive ou d�fensive.
On y attend. Mais on y attend avec calme parce qu'on sait qu'on est pr�t. Les troupes qui occupent ces postes avanc�s ne se sont pas crois� les bras. Les travaux tr�s importants qui ont �t� ex�cut�s permettent d'envisager l'avenir avec confiance. Tous ceux, qui entrent dans cette for�t y trouvent l'esp�rance.
(�� Le Temps �). JOSEPH GALTIER.

LES BOMBARDEMENTS DE PONT-A-MOUSSON

ont-�-Mousson, 9 avril.
Au cours des derniers bombardements, notamment de celui de mardi, la place du Paradis et l'avenue de Metz ont encore une fois de plus souffert. Les maisons Houpert et Renard sont inhabitables ; les projectiles crevant le toit, ont tout boulevers� � l'int�rieur des maisons et les locataires ont d� �vacuer leurs appartements. Deux bless�s, l�g�rement toutefois, M. Claisse et Mme Gauthier, qui habitent place du Paradis.

Toute, la position des Eparges
EST A NOUS
Quinze attaques allemandes au bois de Mortmare ont abouti � quinze �checs et � des monceaux de morts allemands.

Paris, 9 avril, 15 heures.
Les troupes britanniques ont repouss�, dans la nuit du 7 au 8, une attaque allemande entre Kenimel et Wulverghem.
Entre Meuse et Moselle, de nouveaux progr�s ont �t� r�alis�s. Aux Eparges nous avons encore gagn� du terrain, retourn�, face � l'ennemi, les tranch�es allemandes qui �taient encombr�es de cadavres, et repouss�, � la fin de la journ�e, deux contre-attaques.
Au bois d'Ailly, o� nous avons pris six mitrailleuses et deux lance-bombes, l'ennemi n'a plus contre-attaqu� depuis hier midi.
Au bois de Mortmare, tous nos progr�s ont �t� maintenus, malgr� une tr�s violente contre-attaque qui s'est produite hier, � 19 heures.

Paris, 10 avril, 0 h. 58.
Voici le communiqu� officiel du 9 avril, 23 heures :
Apr�s une nouvelle et brillante attaque, l'importante position des Eparges, qui domine la plaine de la Wo�vre, et que l'ennemi d�fendait obstin�ment, est tout enti�re en notre pouvoir.
Nous avions enlev�, hier, plus de 1.500 m�tres de tranch�es et, ce matin, les Allemands ne conservaient plus, sur le plateau, que deux �lots de quelques m�tres encore fortement tenus.
Nous nous en sommes empar�s cet apr�s-midi, en faisant 150 prisonniers ces derniers jours.
Plus au sud, au bois d'Ailly, nous avons maintenu tout notre gain de deux cents m�tres de profondeur sur quatre cents m�tres de front, et repouss� trois contre-attaques.
Au bois de Mortmare, les Allemands ont prononc� quinze attaques pour reprendre les tranch�es que nous leur avions enlev�es hier. Ils ont �t� quinze fois repouss�s. Il y a sur le terrain des monceaux de cadavres allemands.

Sur l'Yser, en Champagne et en Alsace

Sur le reste du front, les actions � signaler sont les suivantes :
En Belgique, pr�s de Driedgrachten, une attaque allemande, a occup� un �l�ment de tranch�e sur la rive gauche de l'Yser, tandis qu'une attaque belge, d�bouchant non loin de l�, sur la rive droite, y installait une t�te de pont.
En Champagne, une action d'infanterie, toute locale, mais tr�s vive, s'est d�roul�e au nord de Beaus�jour. Les Allemands ont essay� de reconqu�rir une partie des tranch�es perdues par eux le mois dernier, mais leur attaque a �t� fauch�e, sauf sur un point, o� ils ont r�ussi, hier soir, � s'installer dans un �l�ment avanc�.
Aujourd'hui, nous les avons contre-attaqu�s. Nous avons repris cet �l�ment et ramen� l'ennemi � son point de d�part en lui infligeant des pertes sensibles.
Sur les pentes sud-est de Hartmansviler, le nombre de prisonniers faits par nous dans la derni�re journ�e est de 150.

Nouvelles du Pays meusien

Pareid. - Un �l�ve de l'�cole Saint-Louis, r�cemment rapatri�, adresse de Grignon (Savoie), la lettre suivante :
�� Le 27 ao�t, nous v�mes des dragons allemands qui vinrent en �claireurs et coup�rent les fils t�l�graphiques. Durant huit jours, on les vit aussi mais ils ne firent aucun mal � Pareid, mon pays natal. A Maizeray, qui se trouve � 2 kilom�tres environ, le t�l�phoniste qui avait mal compris les ordres de la receveuse des postes de Fresne fut tu� dans la plaine en tentant de rejoindre ce village avec ses appareils.
Le 4 ou le 5 septembre, au soir, arriva le gros de l'arm�e. Ce fut alors que commenc�rent pour nous les douleurs de l'invasion. Le lendemain, les Boches r�quisitionn�rent hommes, chevaux et voitures, et enlev�rent toutes les poutres, planches, volets et m�me les portes qu'ils purent trouver. Les maisons inhabit�es furent soumises � un pillage m�thodique et en r�gle. Il n'y resta que les quatre murs.
Ils commenc�rent leurs tranch�es couvertes dans la plaine et, afin de faciliter leur besogne, ils faisaient couper les avoines par des hommes qu'ils conservaient ensuite comme otages. Ils arr�t�rent le cur�, le maire et plusieurs conseillers municipaux, les enferm�rent dans une maison et ne les rel�ch�rent qu'au bout de quelques jours.
Du matin au soir, des bandes de pillards entraient dans toutes les maisons et y volaient tout ce qu'ils voulaient. On n'avait rien � dire et ils nous mena�aient lorsque nous n'�tions pas contents. De plus, nous avions continuellement des troupes � loger. Ils nous r�quisitionnaient tout. Le village �tait sous une v�ritable terreur ; il fallait se cacher pour manger, cuire le pain, etc... Il fallait tout dissimuler, ou bien ils nous volaient tout. Lorsqu'ils d�couvraient des provisions quelconques ou tombaient sur des caves bien garnies, c'�tait une maison mise � sac.
On vivait aussi sous la perp�tuelle menace de se voir tous fusill�s et de voir en m�me temps le village br�l�. Ils nous accusaient d'espionnage ou de faire les francs-tireurs.
Cependant, ils ne fusill�rent personne � Pareid. Il y eut des morts caus�es par une �pid�mie de faux chol�ra, dont les Boches avaient une frousse terrible. Leurs majors soignaient les malades.
Le village n'avait aucunement souffert avant mon arrestation.
Le 30 septembre, on arr�ta tous les hommes et on les enferma dans l'�glise. On prit les noms et les �ges. Nous y pass�mes la nuit et, � 2 heures du matin, un sous-officier, qui parlait fran�ais, vint avec une liste et nous appela � vingt. Nous part�mes pour Metz.
On nous incarc�ra. Nous all�mes ensuite � Darmstadt. Les autres hommes, � partir de 48 ans, rest�rent enferm�s � l'�glise, puis � la mairie. Ils durent arracher les pommes de terre pour les Boches. Ensuite, on �vacua le village trois semaines apr�s notre arrestation. �

UN TAUBE SUR NANCY

Nancy, 11 avril.
Samedi, vers cinq heures du soir, plusieurs d�tonations ont averti les habitants de Nancy que nos braves artilleurs post�s sur les collines tiraient sur un �� taube � qui essayait de venir survoler la ville.
L'avion ennemi, s'apercevant qu'il �tait d�couvert, s'empressait de faire demi-tour et de regagner les lignes allemandes.

LEURS PERTES AUX �PARGES
Durant les deux derniers mois les pertes allemandes auraient atteint l� 30.000 hommes. - Nous avions en face de nous leurs meilleures troupes.

Paris, 10 avril, 15 heures.
Rien � ajouter au communiqu� d'hier soir.
Des rapports compl�mentaires arriv�s dans la nuit relatent que les deux attaques qui nous ont rendus ma�tres, hier, des derni�res positions allemandes aux Eparges, ont donn� lieu � des combats acharn�s � la ba�onnette.

Paris, 11 avril, 0 h. 58.
Communiqu� officiel du 10 avril, 23 heures :
Entre Meuse et Moselle, nous avons conserv� tout le terrain gagn� et fait de nouveaux progr�s.
Entre l'Orne et la Meuse, il n'y a eu aucun engagement.
Aux Eparges, l'ennemi n'a r�agi ni par son infanterie ni par son artillerie. La journ�e a �t� calme. La totalit� de la position est en notre pouvoir.
Les d�clarations des prisonniers soulignent l'importance de notre succ�s.
Les Allemands, depuis la fin de f�vrier, avaient engag�, sur cette partie du front, toute la 33e division de r�serve, puis vers la fin de mars, quand cette division fut �puis�e, ils y envoyaient la 10e division active du 5e corps d'ann�e, constitu�e avec les meilleures troupes de leur arm�e. C'est cette division qui vient de perdre une v�ritable forteresse, �difi�e sur l'�peron des Eparges.
Ces troupes avaient re�u, � diverses reprises, l'ordre de tenir co�te que co�te. Il leur avait �t� sp�cifi� que la position �tait de la plus haute importance et leur g�n�ral avait dit que pour la conserver il sacrifierait �� la division, le corps d'arm�e, cent mille hommes s'il le fallait �.
Les pertes subies aux Eparges par les Allemands, dans les deux derniers mois, atteignent trente mille hommes.
Dans le bois de Mortmare, nous avons enlev� une nouvelle ligne de tranch�es et repouss� une contre-attaque.
Au nord de Regni�ville, nous avons consolid� et �largi l�g�rement notre position.
En Lorraine, une demi-compagnie qui, dans la nuit du 9 au 10 avril, avait pouss� jusqu'au village de Bezange-la-Grande, situ� entre nos lignes et les lignes allemandes, a �t� envelopp�e par des forces sup�rieures et faite prisonni�re.

A HOUDELAINCOURT

Nous recevons de M. Mage, notaire a Houdelaincourt, la lettre suivante :
�� Dans l'int�r�t de la v�rit�, afin de rendre � un bon Fran�ais la justice qui lui est due, je vous serai oblig� de rectifier l'article que vous avez fait para�tre dans votre journal, relatant l'incendie � la ferme de Toulon.
Votre correspondant vous fait dire que cette ferme �� �tait afferm�e � un sieur Schmitt, sujet allemand, qui, au d�but des hostilit�s, s'est empress� de repasser la fronti�re �.
La v�rit� est toute autre.
Schmitt est Fran�ais, et bien Fran�ais. Il a fait son service militaire en France, et, actuellement, il est soldat et combat avec les n�tres contre l'Allemagne, qu'il ex�cre, cela, je puis vous l'assurer.
Son fr�re unique, qui a �galement fait son service en France, combat aussi avec nous contre les Allemands (le bruit a m�me couru qu'il �tait tu�).
Quant aux p�re et m�re Schmitt, qui sont encore existants et habitent Horville, canton de Gondrecourt (Meuse), ce sont de ces Alsaciens r�int�gr�s dans leur qualit� de Fran�ais, qui d�testent nos ennemis, plus qu'aucun de nous.
Ce pauvre Schmitt n'est peut-�tre pas m�me assur� contre l'incendie, ou l'est insuffisamment. Ce sera assez p�nible pour lui de faire cette perte et de risquer sa vie tous les jours pour la France, que de se voir encore traiter d'Allemand.
Je connais particuli�rement Schmitt et sa famille. C'est moi qui lui ai lou� la ferme. C'est pourquoi j'estime que je dois le d�fendre de cette accusation, en son absence.
Le chiffre des pertes indiqu�es est bien inf�rieur � la r�alit�, mais cela n'a pas d'importance. �

ENTRE MEUSE & MOSELLE
Progr�s au Bois Le Pr�tre et dans celui de Mortmare

Pas, 11 avril, 15 h 05.
En Belgique, sur l'Aisne et en Champagne, actions d'artillerie.
Les progr�s entre Meuse et Moselle, signal�s dans le communiqu� de Ce matin, sont confirm�s.
Au bois de Mortmare, le front conquis a �t� �tendu vers l'Est par l'enl�vement de nouvelles tranch�es. Plusieurs contre-attaques ont �t� repouss�es.
Au Bois-le-Pr�tre, une avance a �t� r�alis�e � la lisi�re Ouest du te Quart en r�serve �. Une mitrailleuse allemande a �t� prise.
La neige, la pluie et le vent ont fait rage presque toute la journ�e.

�CHECS ALLEMANDS
pr�s d'Albert et dans l'Argonne

Paris, 12 avril, 3 heures.
Voici le communiqu� officiel du 11 avril, 23 heures:
Au Nord d'Albert, les Allemands ont prononc�, dans la nuit du 10 au 11 avril, une attaque sur les deux rives de l'Ancre, au centre de nos tranch�es de Hamel et du bois de Thiepval. Ils ont �t� repouss�s apr�s un combat corps � corps.
Dans l'Argonne, une lutte tr�s vive s'est d�roul�e pendant toute la nuit. Nous avons d�moli un blockhaus ennemi, pris trois cents m�tres de tranch�es et maintenu notre gain, malgr� deux contre-attaques allemandes.
Entre Meuse et Moselle, aucune action d'infanterie n'est signal�e dans la r�gion des Eparges et de Combres depuis notre succ�s du 9 avril.
Au bois d'Ailly, une attaque lanc�e dans la soir�e du 10 avril, nous a rendus ma�tres d'une nouvelle ligne de tranch�es.
Au bois de Mortmare, les Allemands ont r�ussi, dans la nuit, � reconqu�rir les tranch�es qu'ils avaient perdues au cours de la journ�e, mais les positions que nous avions conquises le 8 avril demeurent tout enti�res en notre possession.
Dans le bois Le-Pr�tre, � la lisi�re Ouest du �� Quart en r�serve �, deux violentes contre-attaques ennemies ont �chou� sous notre feu d'artillerie.
Nos avions ont lanc� des obus de 155 sur la gare maritime et sur la fonderie de Bruges.

UN ZEPPELIN m NANCY
Six bombes pour un incendie
Pas de victimes

Nancy, 12 avril.
Dans la nuit de dimanche � lundi, par un ciel magnifiquement constell� d'�toiles, Nancy a eu sa seconde, visite de zeppelin. Il y avait bien eu, on le sait, depuis le 26 d�cembre, un certain nombre d'autres tentatives, mais les mastodontes a�riens avaient toujours jug� prudent de ne pas d�passer les points d'o� l'on peut efficacement les canonner. Il �tait un peu plus d'une heure, lorsque deux fortes d�tonations, pour ainsi dire accoupl�es, et bient�t suivies d'une troisi�me, r�veill�rent, divers quartiers de Nancy en sursaut.
On pourrait croire que, se conformant � de sages recommandations, chacun s'�tait h�t� de descendre � la cave, ou de gagner du moins les �tages inf�rieurs.
Il n'en fut rien, pour la plupart des Nanc�iens, qui s'empress�rent, au contraires de se mettre � leurs fen�tres., afin de jouir du spectacle.
On ne pouvait cependant avoir aucun doute sur la nature de cette alerte nocturne. On entendait tr�s distinctement le bruit des moteurs, que l'on peut comparer celui d'une batteuse ou encore d'une locomotive haletant sur quelque plaque tournante mal ajust�e.
Nos r�flecteurs inondaient le ciel d'immenses rubans de clart�, tandis que les canons, tiraient de tous c�t�s sur le bandit des airs.
Ce dernier jugea prudent de ne pas insister davantage, et, sans prendre le temps de nous lancer de nouveaux engins, il filait � toute vitesse vers la fronti�re.
Un quart d'heure s'�tait � peine �coul� depuis son apparition, que le bruit de ses moteurs s'�vanouissait dans le lointain.

Le zeppelin, pendant son cours passage au-dessus de Nancy, avait donc envoy� six bombes. H�tons-nous de dire qu'elles n'ont fait heureusement aucune victime. Mais elles ont provoqu� un incendie, deux commencements d'incendie et les d�g�ts mat�riels sont, assez importants.

Rue Victor
L'incendie s'est d�clar� rue Victor, 16, dans les d�p�ts de M. Maurice, n�gociant en couleurs et vernis, rue des Carmes. L�, dans un vaste enclos, se trouvent trois constructions parall�les et perpendiculaires � la rue. Elles renferment des mati�res destin�es � la pr�paration des couleurs : des alcools et des essences de p�trole et de t�r�benthine, le tout, on le comprend, essentiellement inflammable.
C'est dans le b�timent du milieu, construit en planches, que la bombe incendiaire est tomb�e. En peu d'instants, le feu s'est d�velopp�. Le camionneur de M. Maurice, qui s'�tait, r�veill� au bruit de la d�tonation, s'est lev� aussit�t - il �tait alors 1 h. 25. Voyant que l'incendie prenait des proportions, il s'est empress� d'appeler les voisins, d'organiser les premiers secours et de faire avertir les sapeurs-pompiers.
Ceux-ci, pr�venus quelques minutes auparavant qu'un commencement d'incendie s'�tait d�clar� rue de la Prairie, 13, dans les chantiers de MM. Bernanose et Lhomm�e, entrepreneurs, s'�taient d�j� rendu � cette adresse, mais l�, � leur arriv�e, tout �tait �teint.
Le lieutenant Collignon, qui commande les sapeurs, aper�ut alors la vive lueur d'incendie des entrep�ts de M. Maurice. Il se dirigea imm�diatement de ce c�t�.
A son arriv�e sur les lieux, il organisa les secours avec l'effectif de la compagnie accouru avec le mat�riel au complet.
Le feu fut rapidement combattu. Apr�s une heure de travail, nos braves sapeurs �taient ma�tres du sinistre, malgr� la violence des flammes qui avaient trouv� un aliment facile dans les mati�res enferm�es dans le b�timent ; les autres constructions o� se trouvaient des mati�res aussi dangereuses avaient pu �tre pr�serv�s. Il y avait notamment un petit b�timent, distant seulement de quelques m�tres, et o� �taient emmagasin�es plusieurs pipes d'alcool et des f�ts de benzine.
A deux heures et demie, les sapeurs rentraient � l� caserne, laissant sur les lieux un piquet pour continuer � arroser les d�combres.
Les d�g�ts sont assez importants. Ils peuvent �tre �valu�s � cent mille francs environ.

A une trentaine de m�tres des magasins de M. Maurice, � l'angle de la rue du Progr�s, une bombe est tomb�e sur la chauss�e, o� elle a fait un trou �norme d'une profondeur d'environ un m�tre sur trois m�tres de diam�tre.
L'explosion fut particuli�rement violente. Un mur en briques, �lev� en fa�ade de la rue du Progr�s, s'effondra, sur une longueur de trois m�tres, renvers�, laissant apercevoir l'int�rieur des magasins de M. Henri Essig, fabricant de meules � �meri.
La partie de la construction sur la rue Victor a �t� disloqu�e, mais n'est pas tomb�e.
Fait qui m�rite d'�tre constat� : en explosant, la bombe n'a envoy� que tr�s peu d'�clats, car les maisons voisines ne portent presque pas de traces.
Une autre bombe explosive est tomb�e dans le pr� situ� entre le boulevard d'Austrasie et la rue des Chaligny, devant l'abattoir. Elle a creus� simplement un �norme trou en terre.
Sur le quai du canal, devant les chantiers de M. Kronberg, n�gociant en houilles, une bombe, en explosant, a fait aussi au trou dans le sol, soulevant les pav�s, brisant les rails d'une petite voie ferr�e qui sert au d�chargement des bateaux.
Un morceau de la bombe a �t� lanc� avec une telle force qu'il est all� retomber de l'autre c�t� du canal, o� il a �t� retrouv�.
Rue de la Prairie, n� 13, une bombe incendiaire est venue tomber sur un petit appentis peu �lev�, construit en planches, en bordure de la rue. Elle a travers� la toiture peur venir s'abattre sur le sol.
Au brait de la d�tonation, M. Bernanier, chef de chantier de la maison Bernanose, qui habite la maison voisine, s'est lev� et avec le plus grand sang-froid, a ouvert la porte de la maisonnette atteinte. Apercevant sur le sol une bombe en train de br�ler en projetant une grande lueur, il l'a saisie par l'anse, au risque de se br�ler et s'en est all� la placer sous une fontaine du voisinage.
L'engin, une fois bien d�tremp�, a pu �tre rapport� dans le chantier de M. Bernanose. Ajoutons qu'� l'aide de quelques seaux d'eau, on avait pu �teindre le l�ger commencement d'incendie, avant m�me l'arriv�e des sapeurs-pompiers.

La derni�re bombe est venue s'abattre pr�s de la panne fa�ti�re du toit de l'�cole maternelle du quai de la Bataille. Apr�s avoir bris� quelques tuiles, elle est all�e heurter le plancher du grenier, o� le choc a provoqu� l'explosion, qui la fit rouler pr�s du mur.
En achevant de br�ler, elle a communiqu� le feu au plancher et au plafond de l'unique �tage, qu'elle a travers�s pour s'abattre sur le plancher d'une chambre � coucher, o� fort heureusement, il n'y avait personne.
Le plancher a brul� tr�s lentement et c'est vers quatre heures seulement que Mme Schwab la directrice de l'�cole, qui couche dans une autre pi�ce, aper�ut la lueur et qu'elle donna l'alarme.
Les pompiers accoururent. Ils purent rapidement conjurer tout danger. Les d�g�ts caus�s � cet immeuble sont peu importants.
Mme Schwab, qui est d�j� d'un certain �ge, habite seule � la maison maternelle. Un peu apr�s une heure, elle avait entendu la d�tonation produite par la bombe, et avait cru que celle-ci �tait tomb�e dans la cour ; justement, effray�e, elle n'avait pas os� sortir de son lit. Ce n'est que lorsque l'incendie se d�clara qu'elle prit la r�solution de se lever.
Mme Schwab a d�j� �t� �prouv�e par la guerre, car un de ses fils, capitaine d'infanterie, a �t� tu� au d�but de la campagne, et ses autres enfants sont encore sur le front.
Aussi, lorsqu'elle nous eut racont� les incidents de cette nuit terrible, elle ajouta: �� Lorsque mes enfants vont savoir cela, ils auront encore plus de courage pour combattre et exterminer ces Allemands. �
Puis, toute tremblante encore, Mme Schwab rentre dans son logement, en maudissant les Barbares qui commettent de tels m�faits, sans n�cessit� militaire.

L'engin tomb� sur le quai du canal devait �tre particuli�rement puissant, car un pav� en granit, arrach� du sol, fut en partie bris� et projet� jusqu'� la rue Lasalle, o� il tomba sur la toiture de la maison portant le num�ro 26.
Il traversa la toiture et vint s'abattra sur le sol de la cage de l'escalier, sans causer d'autre d�g�t, ni d'accident de personne. Ce morceau de pierre p�se deux kilogrammes cinq cents grammes.

Beaucoup de Nanc�iens �taient sortis dans la rue au bruit des d�tonations. Ils ont pu constater que le dirigeable ennemi avait �t� parfaitement rep�r� par nos projecteurs, et c'est sans doute pour cela qu'il s'�loigna sans avoir �puis� l'habituelle provision de bombes.
Lundi matin, Nancy avait sa physionomie laborieuse et calme de tous les jours.

Nous avons organis� nos gains
ENTRE MEUSE et MOSELLE
UNE BONNE PRISE

Paris, 12 avril, 15 heures.
Il n'a pas �t� signal� d'action d'infanterie pendant la journ�e du 11 avril.
En Belgique, sur l'Ancre, entre l'Oise et l'Aisne et en Champagne, canonnades de part et d'autre.
Entre Meuse et Moselle, nous nous sommes organis�s sur les positions conquises par nous au cours des combats pr�c�dents. L'ennemi n'a pas contre-attaqu�.
Nous avons, le 10 avril, au bois d'Ailly et au bois Le-Pr�tre, pris cinq mitrailleuses et un lance-bombes.

Des Eparges au Bois Le Pr�tre
ILS NOUS
contre-attaquent mais vainement

Paris, 13 avril, 0 h. 02.
Voici le communiqu� du 12 avril, 23 heures :
Aux Eparges, pendant la nuit du 11 au 12 avril, apr�s une canonnade et une fusillade assez vives, les Allemands ont contre-attaqu� � 4 h 30 et ont �t� repouss�s.
Au bois d'Ailly, dans la r�gion de Flirey, actions d'artillerie violentes, mais sans engagement d'infanterie.
A u bois Le-Pr�tre, le 11 avrils vers vingt heures, une tentative d'attaque de l'ennemi, dans la partie du �� Quart de r�serve �, a �t� facilement enray�e.
Au cours de la journ�e du 12 avril, nous avons chass� les Allemands d'un �l�ment de tranch�e d'une ligne pr�c�demment conquise et dans lequel ils avaient r�ussi � se maintenir.
Dans la nuit du 11 au 12 avril, vers 1 h. 30, un dirigeable allemand a jet� sur Nancy sept bombes, dont une est tomb�e pr�s de l'h�pital civil et une autre pr�s d'une �cole. Deux commencements d'incendie ont �t� rapidement �teints.

LE ZEPPELIN ET LES TAUBES

Nancy, 13 avril.
Dans la matin�e de lundi, plusieurs habitants de notre ville ont signal� qu'en plus des six bombes dont on avait retrouv� les traces � la premi�re heure, d'autres engins avaient �t� lanc�s par le zeppelin, pendant son court passage au-dessus de Nancy.
Dans la rue du Mar�chal-Oudinot, � l'angle du boulevard d'Alsace Lorraine, une bombe est tomb�e dans un jardin au pied d'un arbre en faisant un simple trou en terre.
A peu de distance de l�, dans la propri�t� de Saurupt, appartenant � M. de Villars, un autre projectile n'a �galement fait aucun mal.
Rue du Montet, n� 13, un engin a travers� la toiture d'un atelier de la manufacture de chaussures de M. Laurent. Il est all� s'abattre sur une table, provoquant un commencement d'incendie, qui a �t� rapidement �teint par M. Laurent � l'aide de quelques seaux d'eau. La table et quelques paires de chaussures ont �t� d�truites ; plusieurs carreaux ont �t� bris�s.
Une autre bombe s'est abattue dans le jardin de l'hospice Saint-Julien devant la chapelle. L� encore, il n'y a eu qu'une petite excavation dans la terre.
Enfin, pr�s de la Meurthe, dans le prolongement du boulevard d'Austrasie, un projectile a creus� aussi son trou.
Sur le territoire de Tomblaine, au lieu dit La M�chelle, plusieurs bombes sont tomb�es dans les pr�s. Deux ont fait explosion. Le r�sultat a �t� des excavations assez vastes.
Enfin, � Vandoeuvre et � Nab�cor, deux bombes sont venues s'abattre, l'une dans un jardin, l'autre dans une cour pr�s d'un b�timent. Il n'y a eu aucun d�g�t. Pr�s de la ferme de Brichambeau, un projectile a fait aussi une excavation dans un champ.
Gomme on peut le constater, � part les d�g�ts caus�s rue Victor et rue du Progr�s, la visite du zeppelin n'a eu pour les Allemands aucun r�sultat pratique. Quant � la population de notre ville, on peut r�p�ter qu'elle a tout son sang-froid et n'a �t� nullement impressionn�e. Lundi, chacun �changeait tranquillement ses impressions sur cette visite nocturne.

Nous avons eu la visite des taubes.
Dans la matin�e de lundi, vers sept heures et demie, trois avions ennemis, qui essayaient de traverser nos lignes du c�t� de Frouard ont �t� accueillis par une vive canonnade. Tous trois se sont empress�s de regagner leurs hangars.
Dans l'apr�s-midi, � quatre heures, un taube venant du c�t� de Seichamps a �t� �galement canonn� et s'est empress� de fuir au plus vite, pour �chapper � nos projectiles, dans prendre le temps de nous apporter les siens.

Lutte de mines et de grenades
DE TRANCH�E A TRANCH�E
Nos avions sur Vigneulles

Paris, 13 avril, 15 h. 05.
De la mer � l'Aisne, rien � signaler, si ce n'est quelques actions d'artillerie.
A l'est de Berry-au-Bac, nous nous sommes empar�s d'une tranch�e allemande.
En Argonne, luttes de mines et combats � coups de bombes et de grenades d'une tranch�e � l'autre.
Entre Meuse et Moselle, journ�e relativement calme. Nos troupes sont parvenues en plusieurs points au contact du r�seau de fils de fer de la d�fense ennemie.

Paris, 14 avril, 1 heure.
Le communiqu� officiel du 13 avril, 23 heures, dit :
Journ�e calme sur l'ensemble du front.
Nous avons maintenu et consolid� nos positions sur les divers points o� nous avons progress� depuis huit jours.
Nos avions ont bombard�, avec succ�s les hangars militaires de Vigneulles-en-Wo�vre, et dispers� non loin de l� un bataillon allemand en marche.

INT�GRAL ?

Nancy, 14 avril.
Pendant que nos soldats combattent pour d�fendre la Patrie, il est bon que les civils pr�parent ou r�tablissent pour eux les foyers d�laiss�s et dont quelques-uns ont �t� d�truits.
Ce n'est pas une oeuvre vaine de pol�mique que l'on a entreprise en sollicitant, en exigeant du gouvernement, et des repr�sentants du peuple la r�paration des dommages caus�s par la guerre. La justice n'existerait pas si elle ne commandait � tout le pays de donner aux combattants qui reviendront et � leurs familles la possibilit� de reprendre avec courage et confiance le travail que le salut national a interrompu.
La Lorraine a �t� pour une grande partie envahie, bombard�e, pill�e, d�vast�e, br�l�e. Il faut qu'elle revive comme elle vivait avant, et que les cruels sacrifices ardemment consentis ne soient pas aggrav�s par la-perte de ce qui est le motif principal de vivre.
Le principe a �t� adopt� par le gouvernement. Mais il a �t� entour� de telles r�ticences, d'une si obscure explication que certaines personnes se demandent avec angoisse si la promesse formelle aura sa r�alisation compl�te. Nous avons trop de foi en la R�publique pour en douter un seul instant.
Pourtant, afin que n'existe plus aucune ambigu�t�, ni aucune crainte, disons ce qui est n�cessaire de dire.
Certains s'effarent un peu devant le mot �� int�gral � que nos amis veulent ajouter au mot �� r�paration �. Ils estiment que ce serait aller trop loin, qu'on peut ainsi demander r�paration non point seulement des dommages mat�riels et constat�s, mais aussi des r�percussions plus ou moins indirectes, et aussi du �� manque � gagner �.
- Prenons, disent-ils, l'exemple des chapeaux de paille. Il n'est pas contestable que la guerre en a arr�t� la fabrication. Devrons-nous aussi payer ce dommage ?
C'est pousser trop loin la logique. En demandant la r�paration int�grale des dommages caus�s par la guerre, nous n'entendons pas que l'on rembourse � tous les Fran�ais ce que la guerre leur a enlev� de b�n�fices � bon droit escompt�s. Les commer�ants que la guerre aura enrichis n'ont nullement l'intention de rendre l'argent qu'ils auront gagn�. Il ne saurait donc �tre question de d�bourser des millions pour les commer�ants ou les industriels qui auront �t� pendant la campagne priv�s de leurs b�n�fices habituels.
Mais ce que nous demandons, c'est que le propri�taire de toute maison incendi�e, bombard�e ou pill�e, soit d�dommag� int�gralement. C'est que le possesseur ou le fermier d'un champ dont la r�colte a �t� ravag�e par la bataille soit d�dommag� int�gralement.
C'est que la famille dont le foyer a �t� d�truit ou d�t�rior� soit d�dommag�e int�gralement.
C'est que le soldat, apr�s la victoire, ait � nouveau en ses mains int�gralement le bien qu'il faisait fructifier, et les moyens de le travailler. Il a donn� son coeur, son corps, son sang � la patrie. Il s'est vou� enti�rement � sa d�fense. La patrie pendant la paix a en �change le devoir de le d�fendre aussi.
- Mais alors, objecte-t-on, si un collectionneur a �t� par l'envahisseur d�poss�d� de la collection de timbres qu'il avait amoureusement rassembl�e dans son ch�teau maintenant incendi�, il faudra lui payer sa collection de timbres qu'il estimera un ou deux millions ? O� irons-nous ?
Eh! oui il faudra lui payer ses timbres non pas au prix qu'il estimera, mais � dire d'experts. Et on n'ira pas plus loin que la justice.
Que comptent d'ailleurs les belles collections, dans le r�glement final, au regard de toutes les chaumi�res, de toutes les fermes, de toutes les maisons br�l�es ou d�molies, des r�coltes perdues, des sources nourrici�res taries dans les r�gions envahies ? Quand vous aurez donn� quelques millions pour les collections, enlev�es, cela n'ajoutera pas grand'chose aux milliards que vous devez donner � l'agriculture, au commerce, � l'industrie que les Allemands ont r�duits � rien dans certaines contr�es.
Ne laissons pas d�vier une id�e de justice vers l'examen sp�cieux des sophismes.
Les propri�taires expuls�s par la fusillade, la canonnade ou les n�cessit�s militaires, les commer�ants ruin�s par la guerre, les industriels dont les usines ont �t� arr�t�es ont droit � la justice. La justice, en cette circonstance, est la r�paration int�grale des dommages.
Que l'on remplace �� int�gral � par un autre mot, si l'on veut. Nous ne tenons pas � la formule. Nous ne r�clamons que le droit, mais le droit pr�cis, et �crit dans une loi claire.
Ren� MERCIER.

LA BATAILLE DU GRAND-COURONN�

Nancy, 14 avril.
Nous partons de Nancy � huit heures et demie du matin. C'est le 4 mars. Le ciel, gris d'abord, un petit soleil de premier printemps va l'�clairer. Des automobiles militaires, servies par des chauffeurs de l'�tat-major, sont mises � notre disposition. Elles filent vers l'est sur la route nationale, qui tend � la Lorraine annex�e, et auraient bient�t pass� la fronti�re, nous conduisant � Ch�teau-Salins, Morhange et Sarreguemines, si les tranch�es allemandes n'�taient pas l�, sur l'autre rive de la Seille.
D�s qu'on est sorti de la ville, le regard fouille un vaste horizon. La contr�e est tr�s ouverte et sem�e de collines de grand relief. Les prairies, d'aspect maigre, alternent avec les bois d�feuill�s. Les villages et les maisons isol�es sont assez rares. La vue est ferm�e devant nous � quinze ou vingt kilom�tres par une cr�te en demi-cercle, qu'occupent encore les Allemands. Bien qu'aucun engagement important ne se livre dans la journ�e, le canon tonne � notre gauche, vers le bois Le Pr�tre, au nord de Pont-�-Mousson, devant nous, pr�s de Nomeny.
Nous faisons halte sur un tertre, o� l'officier d'�tat-major commis � ce soin nous explique la bataille qui pr�serva Nancy de l'occupation allemande. Il faut d'abord la situer dans l'histoire de la guerre pour en montrer l'importance et les r�sultats.

La deuxi�me et la troisi�me semaines d'ao�t avaient �t�, pour l'arm�e fran�aise, heureuses et presque faciles. La double offensive pr�vue par l'�tat-major progressait. L'arm�e du g�n�ral Pau, apr�s s'�tre rendue ma�tresse des d�fil�s des Vosges, passait en Alsace. Mulhouse avait �t� une seconde fois occup�e et Les avant-gardes avaient atteint les acc�s de Colmar. Dans la Lorraine annex�e, les arm�es du g�n�ral Sarrail et du g�n�ral de Castelnau, une fois le Donon, sommet septentrional des Vosges, en leurs mains, avaient pouss� hardiment dans le terrain qui s'�tend au sud de Metz. D'abord, tout alla bien ; au del� de la Seille, les Fran�ais avaient, le 19 ao�t au soir, atteint Delme, Dieuze et Morhange. Ils ne s'�taient heurt�s qu'� des troupes de couverture. C'est le 20 que commen�a la malempar�e. Plusieurs corps d'arm�e allemands attaqu�rent tout � coup. La droite fran�aise c�da la premi�re, entra�nant apr�s elle le centre et la gauche, qui pouvaient �tre d�bord�s. Le grand �tat-major allemand lan�a le 21 ao�t un bulletin triomphant :
Conduites par le prince h�ritier de Bavi�re, des troupes appartenant � toutes les races germaniques ont remport� hier une victoire dans des batailles livr�es avec des forces consid�rables entre Metz et les Vosges.
L'ennemi s'avan�ant en Lorraine a �t� rejet� avec de grosses pertes sur toute la ligne.
Le succ�s total ne peut pas �tre encore appr�ci�, attendu que l'�tendue du champ de bataille est plus grande que ne le fut celle des luttes de toutes nos arm�es en 1870-1871.
Anim�es d'un �lan irr�sistible, nos troupes poursuivent l'ennemi et continuent � le combattre aujourd'hui.
Le lendemain, 22 ao�t :
Les troupes fran�aises battues hier entre Metz et les Vosges ont �t� poursuivies et leur retraite a d�g�n�r� en fuite. Jusqu'ici, plus de dix mille prisonniers ont �t� faits et au moins cinquante canons pris. Les forces ennemies battues comportaient plus de huit corps d'arm�e.
L'empereur adressait au roi de Bavi�re une d�p�che de f�licitations pour les haut faits du prince Ruprecht. A Munich, devant le palais des Wittelsbach, ce fut un d�lire et, du haut de son balcon, le roi Louis III haranguait la foule en ces termes:
Je suis fier de voir mon fils remporter de si beaux succ�s � la t�te de ses vaillantes troupes ; mais ceci n'est qu'un d�but. De grandes victoires nous attendent encore. J'ai la confiance dans la qualit� de l'arm�e allemande, qui restera victorieuse quel que soit le nombre des ennemis.
Eh bien ! la bataille du Couronn� de Nancy devait pourvoir � ce que les Allemands fussent arr�t�s net, sur la fronti�re m�me, apr�s leur victoire de Metz, comme ils disent, de Morhange, comme l'appellent les Fran�ais.
Ce r�sultat allait permettre � Joffre de rallier son arm�e sur la Marne, quand venant de Belgique les Allemands eurent d�bord� sur le Nord de la France apr�s la bataille de Charleroi. Sans la r�sistance du Grand-Couronn�, ce formidable coup d'arr�t e�t �t� impossible. Avan�ant de l'Est � l'Ouest les Allemands eussent franchi la trou�e de Charmes et d�bord� la droite du g�n�ralissime, rendant sa position intenable, soit, qu'ils eussent march� droit devant eux vers l'Ouest., soit qu'ils eussent pris le plateau de Langres pour objectif. Joffre aurait d� reculer au moins jusqu'� la ligne de la Seine.
L'arm�e imp�riale comptait bien cueillir rapidement les fruits de son succ�s du 20 ao�t. Le premier qui s'offrait �tait de choix : Nancy. Cette ville n'est pas une forteresse. En 1870, elle fut occup�e, sans coup f�rir, par une avant-garde de uhlans. On la consid�rait comme sacrifi�e. Si les Allemands prenaient l'offensive, c'est derri�re la ligne Epinal-Toul-Verdun et les Hauts-de-Meuse que l'arm�e pourrait opposer une premi�re r�sistance efficace. La litt�rature militaire fran�aise ne le mettait pas en doute. La litt�rature militaire allemande, moins encore. Si bien que certaines cat�gories de r�servistes avaient, d�s le d�but de la guerre, re�u l'ordre de rejoindre leur corps � Nancy, dans les derniers jours d'ao�t. Une entr�e triomphale sur la place Stanislas, l'une des plus �l�gantes de l'Europe avec sa ceinture de grilles dor�es �tait pour sourire � Guillaume II. Nancy, Nanzig, comme ils disent, devait devenir, apr�s la paix, une ville allemande, capitale de la Westfranken, ou Franconie occidentale. Le 22 ao�t l'empereur arrivait � Delme, avec le r�giment des cuirassiers blancs, pour pr�parer ce grand spectacle.
Qui donc e�t imagin� qu'apr�s huit mois de guerre se d�roulant en majeure partie sur le sol fran�ais, Nancy serait encore inviol�e et confiante? C'est une surprise, presque un miracle. Comment la bataille du Grand-Couronn�, dont les r�sultats furent si d�cisifs, n'a-t-elle pas, d�s aujourd'hui, sa place au rang des plus m�morables ?

J'avais cru que le Grand-Couronn� �tait un ensemble de travaux du g�nie construits � loisir en temps de paix. Il n'en est rien. C'est une position naturelle renforc�e, o� il fallait, par des ouvrages de campagne h�tifs. Supposez une demi-lune, un demi-cercle de hauteurs, les unes bois�es, les autres d�nud�es, prot�geant Nancy du Nord au Sud, la Meurthe sinueuse, large et lente en formant la corde. Il commence au Nord, vers Pont-�-Mousson, pour se fermer au Sud vers Saint-Nicolas-du-Port, Dombasle et la for�t de Vitrimont. Les collines dont il est fait sont �lev�es d'une centaine de m�tres, tr�s allong�es, � pentes sym�triques, sans angles morts, avec de grands champs de tir.
Le g�n�ral de Castelnau avait pour mission de d�fendre le Grand-Couronn�.
Il disposait � cet effet de quatre corps d'arm�e, ceux qui avaient combattu � Morhange, o� les d�p�ches officielles allemandes pr�tendaient en avoir mis huit �� en fuite �. C'�taient les 9e, 15e, 16e et 20e corps. Ils �taient appuy�s par trois divisions de r�serve, la 68e, la 59e et une autre dont le num�ro m'�chappe. Les Fran�ais �taient donc un peu moins de deux cent mille.
L'attaque allemande se produisit sur deux directions principales. L'arm�e du prince royal de Bavi�re, venant de Delme, avait pour objectif le secteur nord du Grand-Couronn� ; des �l�ments de la garnison de Metz et l'arm�e du g�n�ral Heeringen, venant de Sarrebourg et de Dieuze, devaient attaquer, en partie directement sur Nancy, par la for�t de Champenoux, en partie plus au sud, par Cirey, Bl�mont, Badonviller, Baccarat, Gerb�viller, tournant la droite de la position fran�aise.
Cette aile de l'arm�e �tait beaucoup la plus avanc�e, puisque apr�s un vif combat, elle occupa Lun�ville le 21 ao�t.

Je ne puis retracer toutes les phases de la bataille, qui, avec des accalmies, dura une douzaine de jours et ne fut achev�e que vers le 6 au 7 septembre, avant - notons-le bien - qu'e�t commenc� la bataille de la Marne.
L'arm�e venant de Delme vint se heurter au sud de Mousson, au mont Sainte-Genevi�ve, qui commande la vall�e de la Moselle. Apr�s des combats r�p�t�s, dont plusieurs corps � corps furieux, l'attaque fut abandonn�e le 7 septembre. Depuis lors, l'arm�e allemande a recul� de quelques kilom�tres. Les m�mes troupes tiraillent encore chaque jour dans le bois Le Pr�tre, dont nous entendons distinctement le canon.
Ce n'est pas cette partie du grand champ de bataille que nous avons parcourue, mais la partie sud.
L'officier qui nous sert de guide la raconte de la fa�on la plus saisissante, sans grand d�ballage de d�tails tactiques, mais nous montrant ce qu'il a vu. �� Notre �tat-major �tait l�. A l'aide de nos jumelles, nous avons aper�u les premiers Allemands sortant de la lisi�re de ce grand bois, l�-bas, � gauche. Alors nos 75, en batterie derri�re cette cr�te, ont ouvert le feu. � Et ainsi de suite. Racont�e de la sorte, sur les lieux, par un t�moin bien disant et expert; le r�cit prend vie et nous voyons les principaux �pisodes de la bataille.
A notre gauche, se dresse le Grand-Mont d'Amance, avec un village entre le Petit et le Grand-Mont, comme Monnetier entre le Petit et le Grand-Sal�ve. Il a jou� pour le secteur sud le r�le sauveur du mont Sainte-Genevi�ve pour le secteur nord, bien qu'il ait �t� �cras� d'obus, plusieurs jours durant, par des batteries lourdes allemandes qu'on n'arrivait pas � rep�rer et auxquelles il e�t �t� du reste inutile de chercher � r�pondre, puisque leur port�e �tait plus longue que celle des pi�ces dont les Fran�ais disposaient alors.
Un des �pisodes les plus sanglante fut rentr�e en ligne de la brigade de Toul form�e des 168� et 169e de ligne.
�� Elle �tait dans ce bas-fond. Elle a re�u l'ordre de traverser l�, � gauche de la route, ce saillant de la for�t de Champenoux, puis, arriv�e � l'autre lisi�re, de gravir � couvert la pente qui aboutit au petit plateau que vous voyez, de le traverser, de franchir la route et de marcher sur le bois d'Erb�viller, qui s'�tend � droite. Nous suivions d'ici tout ce mouvement La brigade s'est calmement d�ploy�e: Nous l'avons vue peu � peu dispara�tre sous bois. Pas un coup de canon. Pas un coup de fusil. Apr�s une longue attente, ses lignes ont �merg� de la for�t, � l'angle fix�. Apr�s une conversion bien ex�cut�e pour prendre la nouvelle direction, elle a gravi le coteau en ordre, toujours sans �tre inqui�t�e. Mais, quand elle a d�bouch� sur le petit plateau, nous l'avons vue fauch�e en quelques minutes. A la lisi�re du bois d'Erb�viller, les Allemands avaient soigneusement dissimul� douze mitrailleuses qui, tout � coup, sans que rien e�t r�v�l� leur pr�sence, se mirent � cracher � trois ou quatre cents m�tres. Leurs gerbes de balles balayaient le sol. En vain nos hommes se jetaient � terre pour riposter. Ils �taient touch�s � la t�te. Quelques-uns avaient mis leur sac devant eux. Rempart illusoire. Presque tout ce qui avan�ait au sommet du coteau est tomb�. La terrasse �tait encombr�e de morts et de bless�s qui se touchaient tous sur plusieurs centaines de m�tres carr�s... �
Nous allons voir. Sept mois ont pass� et les traces du charnier restent toujours apparentes. D'abord ce sont de longues, longues tombes anonymes, o� des centaines de jeunes hommes dorment c�te � c�te. Une croix surmont�e d'un k�pi rouge, parfois aussi d'une ceinture bleue, et quelques inscriptions sommaires. Nous nous d�couvrons, la gorge serr�e.
Le canon du bois Le Pr�tre, � quelques kilom�tres, nous rappelle qu'il s'agit, non d'un �mouvant spectacle d'histoire, mais de la r�alit� pr�sente et toute voisine.
(Journal de Gen�ve) ALB. B.

LA FIN D'UN TAUBE

Nancy. 14 avril.
Mardi matin, un taube, venant de la fronti�re, semblait se diriger sur Lun�ville, Il fut aper�u par un de nos avions, qui lui livra aussit�t line chasse acharn�e.
Le taube, atteint probablement dans son r�servoir d'essence, ne tarda pas � prendre feu et alla s'abattre pr�s de Croismare.
Les uns disent que les deux officiers qui le montaient ont �t� carbonis�s ; d'autres assurent qu'ils sont seulement bless�s et faits prisonniers.

CALME SUR LE FRONT D'OCCIDENT
Un Zeppelin a tu� trois civils et nous avons abattu trois avions allemands

Paris, 14 avril, 15 h. 15.
Rien � signaler depuis le communiqu� de ce matin.
Un zeppelin a jet� des bombes au-dessus de Bailleul. Il visait le terrain d'aviation qu'il n'a pas atteint Trois civils ont �t� tu�s.
Deux avions allemands ont �t� oblig�s d'atterrir dans nos lignes, l'un pr�s de Braine, l'autre pr�s de Lun�ville. Les aviateurs ont �t� faits prisonniers.
Un troisi�me appareil ennemi, atteint par le feu de nos avant postes, est tomb� pr�s d'Ornes (nord de Verdun), � six cents m�tres de nos lignes. Un des aviateurs a �t� atteint par une balle.

CONTRE-ATTAQUE ALLEMANDE
Ils sont arr�t�s et repouss�s, � Perthes, aux Eparges, au bois d'Ailly et au bois de Mortmare.

Paris, 15 avril, 0 h. 15.
Voici le communiqu� officiel du 14 avril, 23 heures :
Pr�s de Berry-au-Bac, nous avons enlev�, hier soir, une tranch�e allemande que l'ennemi a reprise; pendant la nuit. Nous avons pu nous installer � proximit� dans une tranch�e nouvelle.
En Champagne, dans la r�gion de Perthes, un d�tachement d'infanterie allemande a tent� de sortir de ses tranch�es. Il a �t� arr�t� sur place par notre feu.
Aux Eparges, une contre-attaque allemande a d�bouch�, hier soir, de Cambres. Elle a �t� imm�diatement arr�t�e par notre artillerie.
Dans le bois d'Ailly, nous avons �largi notre front et repouss� une contre-attaque.
Dans le bois de Mortmare, nous avons progress� � l'ouest de notre ligne et repouss� deux contre-attaques. Nous avons fait des prisonniers, pris un canon de 37 et beaucoup de fusils et de munitions sont rest�s entre nos mains.

NOUVEAUX PROGR�S DE L'ARGONNE � L'ALSACE

Paris, 15 avril, 15 h. 15.
Pr�s de La Boisselle, notre artillerie lourde a compl�tement boulevers� les tranch�es et les abris de l'ennemi, � Ovillers.
En Argonne, pr�s de. Fontaine-aux- Charmes, une action toute locale, de tranch�es � tranch�es, s'est poursuivie � notre avantage. Notre ascendant sur l'ennemi s'affirme de plus en plus dans ce secteur.
Aux Eparges, l'ennemi a bombard� nos positions, mais n'a pas attaqu�.
Au bois d'Ailly, nos derniers progr�s nous ont rendus ma�tres d'une partie de la tranch�e principale allemande, et, au nord de cette tranch�e, d'une bande de terrain de 400 m�tres de long sur 100 m�tres de profondeur.
Pr�s de la route Essey-Flirey-bois de Mortmare, la nouvelle tranch�e que nous avons conquise est toujours en notre pouvoir.
Pr�s de Fey-en-Haye, bombardement sans attaque d'infanterie.
Au bois Le-Pr�tre, apr�s avoir conquis, le 13, une partie de la ligne ennemie, nous avons, hier, maintenu nos gains et arr�t� une contre-attaque.
En Alsace, au nord le la Lauch, nous avons progress� de quinze cents m�tres dans la direction du Schnepfenriethkopf, au sud-ouest de Metzeral.

BRILLANT SUCC�S PRES DE NOTRE-DAME-DE-LORETTE
Leur acharnement inutile, de la Meuse � la Moselle, surtout aux Eparges, dans le bois de Mortmare et au bois Le Pr�tre

Paris, 16 avril, 1 heure.
Communiqu� officiel du 15 avril, 23 heures :
Au nord d'Arras, nous avons remport� un brillant succ�s, qui compl�te celui du mois dernier. Tout l'�peron sud-est de Notre-Dame-de-Lorette a �t� enlev� � la ba�onnette par nos troupes, qui tiennent maintenant la totalit� des pentes du sud-est, jusqu'� lia lisi�re d'Ablain-Saint-Nazaire. Nous avons fait 160 prisonniers, dont plusieurs officiers, et pris trois lance-bombes et deux mitrailleuses.
A Thi�val et � La Boisselle, dans la r�gion d'Albert, l'ennemi a tent� deux attaques, qui ont �t� imm�diatement arr�t�es.
En Argonne, � Bagatelle, notre artillerie a d�moli la tranch�e principale des Allemands.
Plus � l'est, aux Nourrissons, nous avons repouss� une attaque.
Aux Eparges, l'ennemi a contre- attaqu� trois fois, dans la nuit de mercredi � jeudi, pour nous reprendre le saillant est, mais il a �t� repouss� et a subi de fortes pertes.
A midi, il a violemment bombard� nos positions, mais il n'a pas attaqu�.
Dans le bois de Mortmare, nous avons repouss� une contre-attaque et poursuivi sur le terrain conquis le 13, l'inventaire de notre butin qui se compose de deux canons-revolvers, de deux lance-bombes, d'une mitrailleuse, de plusieurs centaines de fusils et de milliers de cartouches et de grenades.
Dans le bois Le-Pr�tre, nous avons repouss� une attaque et fait des prisonniers.

UN TAUBE ABATTU

Paris, 16 avril, 15 heures.
Aucune action nouvelle sur le front depuis le communiqu� de ce matin.
Notre artillerie a abattu, hier apr�s-midi, un avion qui est tomb�, en face des lignes anglaises en arri�re des, tranch�es allemandes, au nord d'Ypres.

LEUR RAGE INUTILE CONTRE
Notre-Dame-de-lorette et les Eparges
Succ�s d'artillerie � Mortmare

Paris, 17 avril, 0 h. 40.
Voici le communiqu� officiel du 16 avril, 23 heures :
A Notre-Dame-de-Lorette, les Allemands ont contre-attaqu� trois fois, en pr�parant chaque contre-attaque par un violent bombardement. Ils ont �t� toutes les fois arr�t�s.
Ils ont �chou� �galement dans une tentative de contre-attaque aux Eparges, la nuit derni�re.
Au bois de Mortmare, combat d'artillerie. Nous avons r�duit au silence trois batteries et fait sauter un d�p�t de munitions.

UN TAUBE SUR BELFORT

Pars, 17 avril, 18 h. 05.
BELFORT. - Ce matin, � neuf heures, un avion allemand a survol� Belfort, � une tr�s grande hauteur. Il a jet� trois bombes. L'une d'elles, en �clatant, a bless� mais peu gri�vement un homme et une femme. Les deux autres n'ont caus� que des d�g�ts mat�riels insignifiants.
Vivement canonn� par les forts et pourchass� par un de nos aviateurs, le taube a regagn� vite les lignes allemandes.

NOS VAILLANTS AVIATEURS
Ils bombardent une fabrique d'obus une poudrerie et une usine d'�lectricit� puis battent, au retour, 3 aviatiks

Paris, 17 avril.
Notre aviation s'est montr�e tr�s active. Dix bombes ont �t� jet�es sur les ateliers du chemin de fer � la gare de L�opoldsthohe, � l'est de Huningue, actuellement utilis�s pour la fabrication des obus.
Dix obus mit �t� lanc�s sur la poudrerie de Rothweil. Six ont port�. Une grande flamme rouge s'est �lev�e, surmont�e d'une �paisse fum�e. Nos aviateurs ont re�u des �clats d'obus dans leur appareil mais ils sont rentr�s sains et saufs.
Quarante obus, dont la plupart ont port�, ont �t� jet�s sur le central �lectrique de Maizi�res-les-Metz, � quinze kilom�tres au nord de Metz, usine qui fournit la force et l'�clairage � la ville et aux forts de Metz. Une �paisse fum�e s'est �lev�e du b�timent central.
A leur retour, nos aviateurs rencontrant trois aviatiks leur ont donn� la chasse et les ont forc�s � atterrir.
Ils n'ont eu aucun accident, malgr� la violente canonnade des forts de Metz.

LE 88e BOMBARDEMENT DE PONT-A-MOUSSON

Pont-�-Mousson, 17 avril.
Un de nos confr�res re�oit des d�tail sur le 88e bombardement de Pont-�-Mouson, qui a eu lieu lundi :
�� Lundi, vers six heures du soir, alors que les habitants vaquaient tranquillement � leurs occupations, des obus siffl�rent. Une dizaine de projectiles de gros calibre (du 210) tomb�rent sur la ville, en diff�rents endroits.
La maison qui abrite les bureaux de la r�gie eut sa fa�ade endommag�e, ainsi que les maisons voisines. Beaucoup de vitres bris�es et quelques arbres mutil�s.
Un �clat d'obus fracassa le bras gauche du jeune Baillard, �g� de 18 ans. Transport� � l'ambulance la plus proche, ce jeune homme re�ut les soins n�cessaires et son �tat est aussi satisfaisant que possible.
Un projectile a �clat� dans une courette, causant des d�g�ts mat�riels tr�s importants dans les maisons Mar�chal, Demairon, Toussaint et Sellier, o� heureusement il n'y a pas eu de victimes. Les murs sont en partie �croul�s ou souffl�s, gondol�s comme du carton. Les logements des �tapes sup�rieurs sont inhabitables, remplis des d�combres de la toiture.
Mme Mar�chal a d� �vacuer son logement, qui ne pr�sente plus de s�curit�, certaines cloisons �tant pr�tes � tomber au moindre choc ; plusieurs poutres des appartements ont �t� arrach�es par la force de l'explosion et projet�es � quelques m�tres plus loin.
Mardi les Allemands ont encore bombard� Pont-�-Mousson avec des pi�ces de gros calibre.
La malheureuse petite ville en est � son 88e bombardement. �

NOS SUCC�S DE LA SOMME A L'ALSACE.

Paris, 17 avril, 15 heures.
Rien n'a �t� signal� depuis le communiqu� de ce matin.

Paris, 18 avril, 1 h. 04
Communiqu� officiel du 17 avril, 23 heures :
A Notre-Dame-de-Lorette, nous avons arr�t� net, dans la nuit de vendredi � samedi, trois contre-attaques, moins fortes que celles de la nuit pr�c�dente.
Nos troupes se sont organis�es solidement sur la position conquise.
Dana la vall�e de l'Aisne, notre artillerie lourde a bombard� les grottes de Pasly, qui servent, d'abri aux troupes allemandes. Des explosions successives ont t�moign� de l'effondrement de plusieurs d'entre elles.
En Champagne, au nord-ouest de Perthes, l'ennemi a fait exploser deux mines � proximit� de nos tranch�es. Il a occup� les deux entonnoirs, mais nous l'avons chass� de l'un d'eux aussit�t. Il a conserv� l'autre et aucune partie de nos tranch�es n'a �t� occup�e par lui.
Non loin de l�, au nord de Mesnil, une attaque contre un des saillants de notre ligne a �t� facilement repouss�e.
Dans la Wo�vre, combat d'artillerie, notamment dans la r�gion du bois de Mortmare, mais aucune action d'infanterie ni hier, ni aujourd'hui.
Dans les Vosges, nous avons r�alis� des progr�s sensibles sur les deux rives de la Fecht.
Sur la rive nord, nous nous sommes empar�s de l'�peron ouest de Sillakerwasen, � l'ouest, de Metzeral, et nous avons d�bouch� dons le ravin qui descend vers la Fecht.
Sur la rive sud, nos chasseurs, apr�s une attaque brillante, ont enlev� le somment du Schnepfenriethkopf, qui a 1.235 m�tres d'altitude au point culminant du massif qui s�pare les deux vall�es aboutissant � Metzeral

Un Taube abattu
Un de nos dirigeables sur Fribourg

Un avion anglais a abattu un avion allemand en Belgique, pr�s de Boesinghe. L'appareil est tomb� dans nos lignes. Le pilote a �t� tu� et l'observateur fait prisonnier.
Un de ros dirigeables a bombard� la gare et les hangars d'aviation de Fribourg-en-Brisgau.

HUIT OBUS SUR SAINT-DI�

Saint-Di�, 18 avril.
On nous �crit :
�� Depuis plusieurs semaines, notre ville semblait devoir �tre tranquille, et ne recevait plus que quelques visites de Taubes ou d'Aviatiks.
�� Jeudi soir, vers 1 heures de l'apr�s-midi, huit obus de petit calibre sifflaient au-dessus de nos t�tes. En un clin d'oeil, les rues �taient d�sertes. Les obus tomb�rent sur plusieurs points, la plupart sans �clater : rien que des d�g�ts mat�riels. C'est le 26� bombardement. �

HOMMAGE AUX FEMMES DE LORRAINE

Nancy, 18 avril.
Notre ami Louis Michel, maire de Tomblaine, pr�sident de la Soci�t� centrale d'agriculture de Meurthe-et-Moselle, fait aux F�d�rations agricoles et � la presse, sous le titre : �� Rendons hommage aux femmes des agriculteurs lorrains �, la communication suivante :
Les habitants du Centre, du Midi ou de l'Ouest de la France seraient tr�s �tonn�s s'ils visitaient le d�partement de Meurthe-et-Moselle, en voyant l'activit� d�ploy�e dans les campagnes par les femmes de nos agriculteurs mobilis�s.
Le d�partement de Meurthe-et-Moselle comprend 600 communes, dont 171 sont occup�es ou �vacu�es. Sur les 429 communes, actuellement libres, 145 ont �t� sinistr�es et ont touch� de l'Etat, � titre d'avance sur les indemnit�s qui leur seront vers�es plus tard, des semences de printemps et quelques instruments agricoles pour leur permette de travailler.
Le d�partement de Meurthe-et-Moselle ensemence, en ann�e normale, environ 70.000 hectares d'avoine, ce qui repr�sente sensiblement 100.000 quintaux de semences.
Dans les communes qui n'ont pas �t� touch�es par la guerre, les ensemencements sont faits compl�tement, aussi bien en bl� qu'en avoine, malgr� le manque d'hommes et de chevaux.
Aux 145 communes sinistr�es, il a �t� distribu� 12.000 quintaux d'avoine, et l'on estime qu'un certain nombre de cultivateurs de ces r�gions, pouvant se passer du concours de l'Etat, en ont sem� environ 4.000 quintaux. Ces 145 communes ont donc ensemenc� 16.000 quintaux, c'est-�-dire 70 % de leur ensemencement normal, qui n�cessite 23.000 quintaux.
Comment ne pas admirer ces femmes, dont les maris sont mobilis�s, dont les maisons sont br�l�es pour la plupart, et qui ont pris la direction de leurs fermes ?
Les hommes sont dans les tranch�es, le canon tonne de toute part, la charrue, en tra�ant son sillon, descend fr�quemment dans les trous creus�s par les obus ; peu importe, le travail se fait normalement.
A cinq heures du matin, les femmes de nos cultivateurs sont dans les champs ; elles surveillent les ouvriers d'occasion, que le hasard leur a mis sous la main, les leurs �tant mobilis�s. Elles d�ploient une �nergie que l'on ne rencontre pas souvent, m�me chez les hommes.
Si, dans quelques coins de la France, se trouvent des personnes impatientes ou d�courag�es, qu'elles jettent un regard sur nos vaillantes femmes lorraines, leurs coeurs se raffermiront en pr�sence de tant de courage et d'abn�gation.
Un pays qui poss�de de telles forces ne peut �tre vaincu.
Louis MICHEL,
Pr�sident de la Soci�t� Centrale d'Agriculture de Meurthe-et-Moselle et des F�d�rations agricoles du Nord-Est de la France.

Les Fran�ais que les affaires conduisent en Lorraine ou la curiosit� de savoir ce qui se passe �� presque � sur le front, ont maintes fois manifest� leur �tonnement de la prodigieuse vitalit� qu'ils rencontrent � Nancy visit� par les Zeppelins, � Pont-�-Mousson bient�t � son centi�me bombardement, � Lun�ville que les Allemands occup�rent pendant vingt jours, et o� ils assassin�rent et br�l�rent, de ci de l�. Ils n'ont, pas assez de termes admiratifs pour rendre leur surprise et aussi leur �motion.
Ce calme sto�que et cette souriante tranquillit� sous les obus, sous les bombes, sous la menace germaine, seront, quand on �crira plus tard l'histoire de la grande guerre, les titres de gloire les plus �clatants pour la Lorraine.
Le courage des femmes dans nos grandes cit�s est partout cit� en exemple. Mais nos visiteurs d'un jour ou d'une semaine, si on leur procure la possibilit� de s'approcher des tranch�es, n'ont pas le temps de voir la vie dans les villages. Ils ne savent pas que nos �vacu�s allaient parfois, parmi la mitraille, regarder leurs champs, les cultiver, arracher la r�colte abandonn�e, et que, par amour de la terre o� ils sont n�s, o� ils travaillent, ils bravaient tous les p�rils pour aller quelques heures la toucher de leurs mains calleuses, la caresser de leur regard reconnaissant.
Il fallait qu'une parole autoris�e rend�t aux femmes des cultivateurs l'hommage qui leur est d�. M. Louis Michel, qui conna�t et qui aime d'une profonde affection le sol lorrain et tous ceux et toutes celles qui vivent sur ce sol, a voulu que la vaillance des villageoises lorraines f�t connue de toute la France.
Et il a cit� devant le pays le noble travail des Lorraines de la campagne comme on cite devant l'arm�e les exploits h�ro�ques des combattants.
Il n'est pas besoin de chercher des mots magiques pour glorifier les actes en temps de guerre. La parole se sent faible devant le regard tranquille qui dit : �� Je fais mon devoir �.
Ainsi que nos soldats les femmes des cultivateurs accomplissent leur devoir, qui est fait de ferme volont� et d'indestructible esp�rance.
Honneur � celles qui aux mains des hommes r�clam�s par le salut de la patrie ont saisi la robuste charrue, et, dans le tumulte de la bataille qui s'�loigne, continuent � tracer sans peur le sillon, un jour interrompu, au creux de notre terre deux fois sacr�e par le sang et par le travail !
REN� MERCIER.

POURQUOI UN ZEPPELIN
a bombard� Nancy

Nancy, 18 avril
Le communiqu� officiel allemand du 12 avril nous apprend pourquoi un zeppelin est venu jeter quelques bombes sur Nancy, dans la nuit de dimanche � lundi. Il dit :
�� A titre de repr�sailles de l'attaque a�rienne du 5 avril, contre la ville ouverte de Mulheim, o� trois femmes ont �t� tu�es, un de nos dirigeables a arros� abondamment de bombes incendiaires Nancy, centre du groupe des fortifications de ce nom. �
Le communiqu� aurait bien d� ajouter, le lendemain, pour la plus grande joie des Boches, que le �� centre des fortifications de Nancy � avait, d� beaucoup souffrir, puisque les bombes avaient atteint une �cole maternelle et failli toucher un h�pital et l'abattoir !

UN TAUBE A NANCY

Nancy, 18 avril.
Les Nanc�iens ont eu le plaisir, vendredi soir, vers heures, de voir un Taube de tout pr�s. Mais il ne survolait pas les maisons pour leur lancer des bombes, car charg� sur une auto sp�ciale, solidement encha�n�, le sinistre oiseau �tait conduit de la gare vers Toul, d'o� il ira, dit-on, � Paris.
Cet avion boche, dont les ailes �taient dispos�es sur le chariot de fa�on � bien montrer leur grand croix noire, �tait celui descendu ces jours derniers pr�s de Croismare, et qu'on avait dit d'abord avoir �t� incendi�.

LES BOMBARDEMENTS DE PONT-A-MOUSSON

Pont-�-Mousson, 18 avril.
Pont-�-Mousson a encore �t� bombard� � deux reprises, dans l'apr�s-midi et la nuit de mardi avec des projectiles de gros calibre. Fort heureusement il n'y a eu aucune victime.
Le fond du jardin de M. Bonnette p�re fut copieusement labour� et la toiture de la loge de ce jardin fut projet�e sur les arbres des environs. Un obus alla se perdre dans l'�le d'Esch.
Les maisons situ�es entre le caf� Janin et la boulangerie Kauffmann furent s�rieusement atteintes. Il en fut de m�me, sur un autre point, de la maison de M. Marchal, dont le propri�taire et sa femme r�fut�s dans le couloir furent litt�ralement soulev�s par l'explosion.
Les obus du second bombardement �clat�rent � peu pr�s aux m�mes points que ceux du premier. Un cheval fut enseveli sous les d�combres de l'�curie de M. Gaudiot. Les maisons de M. Lejaille, conducteur des ponts et chauss�es, de M. Isler, de Mme Dieudonne et la boulangerie Beno�t ont beaucoup souffert. Il n'y a eu heureusement, pas d'accidents de personnes, et pourtant, � cette beure (1 h. 10, ainsi qu'en t�moigne la pendule de M. Lejaille, qui s'est arr�t�e), tout le monde �tait couch�, ses lits occup�s furent, travers�s, on a retrouv� des �clats dans les sommiers, les paillasses, etc.
Enfin, le dernier obus �clata sur le groupe scolaire Saint-Charles, causant aussi des d�g�ts aux maisons avoisinantes.

VIOLENTE ATTAQUE REPOUSS�E
pr�s d'Orbey, en Alsace

Paris, 18 avril, 15 heures
Une attable allemande pr�par�e par un violent bombardement, a �t� prononc�e par un bataillon contre nos positions au nord-ouest d'Orbey (Alsace). Elle a �t� repouss�e. L'ennemi a laiss� de nombreux morts devant nos tranch�es. Nous avons fait une quarantaine de prisonniers.
Un avion belge a abattu un avion allemand pr�s de Roulers.
Dans la m�me r�gion, une de nos escadrilles a efficacement bombard� un terrain d'aviation.

UNE JOURN�E D'�CHECS ALLEMANDS
Dans l'Aisne, en Champagne en Lorraine et en Alsace

Paris, 19 avril, 6 h. 40.
Communiqu� officiel du 18 avril, 23 heures :
Journ�e relativement calme, marqu�e surtout par des combats d'artillerie et par quelques action d'infanterie toutes locales. Dans la vall�e de l'Aisne, au bois de Maintmard, l'ennemi a attaqu� nos tranch�es sur la fin de l'apr�s-midi. Notre artillerie l'a arr�t� net puis une charge � l� ba�onnette lui a inflig� des pertes s�rieuses.
En Champagne, au nord-ouest de Perthes, les Allemands ont d� �vacuer un entonnoir qu'ils occupaient encore, � proximit� de nos lignes.
Par explosion de mines, suivie d'une attaque, nous avons enlev� soixante m�tres de tranch�es ennemies.
Dans la Wo�vre, simple canonnade.
L'ennemi � prononc�, en Lorraine aux environs de la for�t de Parroy, plusieurs petites attaques, avec de faibles effectifs, notamment pr�s de Bures, Mouacourt, Emberm�nil et Saint-Martin. Toutes, ces tentatives ont �t� facilement repouss�es. En Alsace, les Allemands ont attaqu� trois fois, sans aucun succ�s, nos tranch�es du petit Reichackerkopf. Nous avons fait de nouveaux progr�s dans la r�gion de Schnepfenrieth.

PROGR�S EN BELGIQUE
ET SUR LES DEUX RIVES DE LA FECHT

Paris, 19 avril, 15 heures.
Les troupes britanniques ont enlev� hier, en Belgique pr�s de Zvartelen, deux cents m�tres de tranch�es allemandes. Malgr� plusieurs contre-attaques, elles ont conserv� le terrain gagn� et consolid� leurs positions.
En Alsace, progr�s sensibles. Notre avance se poursuit sur les deux rives de la Fecht.
Sur la rive nord, nous avons occup� la cr�te du Burgkopfte (sud-ouest du Schilleckervassen), qui commande directement la vall�e.
Sur la rive sud, dans la r�gion de Schnepfenrietch, nous avons notamment progress� en marchant du sud au nord.
Dans la direction de la Fecht et de Metzeral, nous avons occup� notamment une s�rie de hauteurs dont la plus septentrionale commande le cours de la Fecht, face au Burgkopfle. Au cours de cette action, nous avons pris une section d'artillerie de montagne, deux canons de 74 et deux mitrailleuses.

Les Taubes sur Belfort

es avions allemands qui ont survol� Belfort ont jet� quatre bombes. Celles-ci ont endommag� deux hangars et mis le feu � quelques caisses de poudre. Il n'y a au ni accidents de personnes ni d�g�ts s�rieux.

ATTAQUE VAINE CONTRE LES �PARGES
Nos progr�s en Alsace

Paris, 30 avril, 1 h. 10.
Voici le communiqu� officiel du 19 avril, 23 heures :
Dans la nuit du 18 avril, � 3 h. 30, une contre-attaque allemande s'est produite aux Eparges. Elle a �t� compl�tement repouss�e.
Au bois de Mortmare, action d'infanterie, sans r�sultat appr�ciable, ni d'une part ni de l'autre.
Dans la r�gion de Regni�ville, lutte d'artillerie assez violente, o� nous avons pris nettement l'avantage.
Dans les Vosges, nos attaques men�es sur les deux rives de la Fecht, ont accentu� nos progr�s et forc� l'ennemi � �vacuer pr�cipitamment Eselsbrucke, en amont de Metzeral, o� il a abandonn� un nombreux mat�riel.

Garros prisonnier

'aviateur Garros, oblig� d'atterrir � lngelmunster, � dix kilom�tres au nord de Courtrai, a �t� fait prisonnier dans la soir�e du 18 avril.

Nouvelles du Pays meusien

Braquis. - Tr�sauvaux. - Beauz�e. - M�nil-sous-les-C�tes. - Moranville. - Mont-sous-les-C�tes.-L'autorit� militaire a fait �vacuer en ces derniers temps les villages ci-dessus par leurs habitants qui ont �t� dirig�s sur Verdun o� ils furent hospitalis�s dans les meilleures conditions possibles.
Cette mesure fut prise pour faciliter nos op�rations dans la Wo�vre qui �taient entrav�e par la pr�sence de ces populations.

Les Allemands mettent en s�ret� les, merveilles d�rob�es aux Fran�ais. - On a transport� � Metz, dans la chapelle des Templiers, les oeuvres d'art provenant des localit�s fran�aises situ�es � proximit� du front.
On y remarque surtout une statue gothique de Ligier-Richier, datant de 1523 et un panneau sculpt� d�tach� d'une chaire. Ces deux objets proviennent de Hattonch�tel.
A Etain, les Allemands ont enlev� un groupe de pierre, par Ligier-Richier, datant die 1528 et repr�sentant Marie devant le cadavre du Christ, ainsi qu'un splendide b�nitier en bronze avec inscription gothique.
Les Boches disent bien qu'ils ont proc�d� � l'enl�vement de ces oeuvres d'art, afin de les pr�server d'une destruction imminente, mais il est peu probable qu'ils aient l'intention de les restituer.

APR�S LES OBUS, LES BOMBES

Saint-Di�, 20 avril.
Samedi, � 2 heures 25 de l'apr�s-midi, un Taube, qui survolait la ville, lan�a simultan�ment deux bombes qui tomb�rent dans un jardin, sans causer aucun d�g�t, ni faire de victimes, fort heureusement.

DES BOMBES DANS LES PR�S

Bruy�res, 20 avril.
Vendredi, vers 9 heures du matin, un Taube a lanc� six bombes, qui sont toutes heureusement tomb�es dans un pr�. Les pissenlits ont beaucoup souffert.
L'oiseau boche a d� souffrir aussi, car il tanguait fortement en fuyant sous nos obus.

LES TAUBES

Verdun, 20 avril.
Deux Taubes ont lanc� cette semaine des bombes sur Verdun. Pas de victimes et d'insignifiants d�g�ts. Un de ces engins est entr� dans l'h�tel du �� Coq-Hardi � par la verri�re de la salle � manger, o� il a bris� une demi-douzaine d'assiettes et fait une grosse tache d'huile sur le parquet. L'autre est tomb�e sur le bateau �� Jeune-Augusta �, au Pont-Chauss�e, et a d�moli divers ustensiles de cuisine. D�cid�ment, les bombes boches, comme leurs propri�taires, en veulent � nos salles � manger.
Ajoutons que quelques autres bombes sont tomb�es dans les champs, o� elles ont fait un petit trou.

LA R�PARATION DES DOMMAGES DE GUERRE
Une tourn�e de conf�rences
La premi�re a lieu � l'H�tel de Ville de Nancy

Nancy, 20 avril.
On sait que la Soci�t� d'assistance aux r�fugi�s �vacu�s et sinistr�s de Meurthe-et-Moselle a organis� une s�rie de conf�rences sur la tr�s int�ressante question de la r�paration des dommages caus�s par la guerre. Il convient, en effet, que les populations �prouv�es soient mises au courant de leurs droits et qu'elles connaissent exactement la fa�on la plus efficace de les faire valoir.
Telle est la double t�che, entreprise par les conf�renciers.
La premi�re de ces conf�rences a eu lieu dimanche, � quatre heures et demie de l'apr�s-midi, dans le grand salon de l'h�tel de ville, mis obligeamment � la disposition des organisateurs par la municipalit� de Nancy.
Notre chambre de commerce, que l'on trouve toujours � la t�te des oeuvres sociales, si intimement li�es a la prosp�rit� �conomique du pays, avait accord� son haut patronage � cette r�union Aussi, pouvait-on remarquer, parmi la nombreuse assistance, plusieurs des grands noms de l'industrie de l'agriculture et du commence de notre Lorraine .
M. Vilgrain, pr�sident de la Chambre de Commerce, pr�side avant � sa droite M. le pr�fet et � sa gauche M. Simon, maire de Nancy.
On remarque en outre sur l'estrade : MM. Chapuis et de Langenhagen, s�nateurs ; Marin et de Ludre, d�put�s ; M. Escavy, avou� � Senlis, vice-pr�sident de la F�d�ration des Associations d�partementales des sinistr�s, un des orateurs que nous allons entendre ; M. Maurice de Wendel, secr�taire de cette F�d�ration : M. Jambois, conseiller g�n�ral, pr�sident du Comit� d'assistance des r�fugi�s de Meurthe-et-Moselle ; M. Michel, maire de Tomblaine, pr�sident de la Soci�t� d'agriculture : M. Keller maire de Lun�ville; MM. Krug, Bertrand-Oser, Dannhauser ; Rolland, professeur � la Facult� de droit de Nancy, qui voudra bien remplacer l'un des conf�renciers annonc�s, M. J�ze, processeur � la Facult� de droit de Paris, que la mobilisation a emp�ch� de venir ; M. Mavaile, l'actif secr�taire g�n�ral de la Chambre de Commerce, etc., etc.

M. VILGRAIN
Avant de donner la parole aux conf�renciers, M. Vilgrain tient � remercier tous les concours qui ont afflu� au premier appel.
�� Quand il appr�t que la premi�re conf�rence de la F�d�ration aurait lieu � Nancy, pr�s de la fronti�re, son impression fut qu'on allait venir ici pr�cher des convertis. En effet si la vaillance de nos soldats et l'habilet� de leurs chefs ont heureusement pr�serv� la ville de Nancy des horreurs de l'occupation et du pillage, syst�matique, nous sommes trop pr�s des r�gions d�vast�es pour ne pas compatir profond�ment � la d�tresse des populations �prouv�es. Je suis certain qu'il ne viendrait � la pens�e d'aucun Nanc�ien, d'aucun Lorrain, de se refuser � accepter sa part des charges qu'imposera la r�paration des dommages subis. �
L'honorable pr�sident de la Chambre de Commerce fait conna�tre les excuses de MM. Lebrun de Wendel et Fringant, d�put�s, et il donne lecture d'une lettre o� M. Lebrun, apr�s s'�tre excus� d'�tre retenu ailleurs par la mobilisation, �crit :
�� Il y a ici un corps d'arm�e de l'extr�me-Midi J'ai eu souvent l'occasion de parler � des soldats, leur r�ponse a �t� unanime : �� Comment voudriez-vous que nous restions insensibles aux malheurs qui vous accablent ? Et quand la guerre sera finie, que nous aurons retrouv� nos village intacts et nos foyers inviol�s, il nous sera impossible, dans notre bonheur, d oublier ce que nous avons vu ici.
L'union se poursuivra � ce moment pour le redressement des ruines, comme elle s'est faite pour la r�sistance � l'envahisseur, et nous dirons � nos repr�sentants de consentir en notre nom tous les sacrifices n�cessaires. �
Cette promesse de solidarit� nationale est salu�e de vigoureux applaudissements.

M. Maurice de WENDEL
M. Maurice de Wendel, secr�taire de la F�d�ration, expose en quelques phrases pr�cises les raisons pour lesquelles doivent s'unir tous ceux qui ont eu � subir un pr�judice mat�riel de la guerre. Quand les soldats de nos r�gions rentreront vainqueurs, dans leurs communes, il ne faut pas qu'ils n'y retrouvent qu'un foyer d�vast�. La France enti�re sera � l'honneur. Il faut aussi que toutes les r�gions paient leur part de cette gloire. Il faut une solidarit� nationale.

M. ROLLAND
M Rolland a bien voulu se charger de la partie essentiellement juridique. Chaque phrase est un argument. L'ancienne jurisprudence n'admettait pas d'indemnit� l�gale aux victimes de la guerre. Mais, depuis, le principe de l'�galit� a �t� inscrit dans la Constitution. Si la collectivit�, c'et-�-dire l'Etat, ne supportait pas les dommages de guerre subis par les particuliers, l'�galit� des citoyens d'une m�me nation serait rompue. Et n'est-il pas inadmissible en effet, alors que tous les contribuables sont �gaux devant les charges collectives, qu'une certaine cat�gorie de ces contribuables ait � supporter toute la part des dommages nationaux ?
Or, ceux qui supporteraient, seuls, ces dommages mat�riels auraient par dessus le march� � subir des dommages moraux ? Non... L'�galit� ne serait plus qu'un vain mot.
Le partage des d�g�ts entre tous les citoyens n'est pas une id�e sentimentale. C'est une id�e de justice et de raison.

M. ESCAVY
M. Escavy est un orateur remarquable. Les aridit�s de la jurisprudence ne l'emp�chent point de trouver les images qui frappent et les p�riodes qui �meuvent jusqu'aux larmes.
Il y a une certaine �l�gance, dit-il, � discuter les dommages de la guerre, � quelques kilom�tres des tranch�es, au bruit de ce canon qui cause les d�sastres.
Que nous ayons droit � la r�paration int�grale, la question ne fait pas de doute. La Chambre de commerce et le Conseil municipal de Nancy ont �mis des voeux dans ce sens.
La question d'�valuation est d�licate. Pour mon compte, je serai intransigeant. Je n'admettrai pas qu'on nous parle de v�tust�. Et comment pourra-t-on jamais nous rendre les mille objets familiers, dont la perte, si sensible � nos coeurs, remplacera au centuple le coefficient de v�tust� ? Quand les joies et quand les gloires sont partag�es int�gralement par un pays tout entier, il est juste que ce pays tout entier partage les pertes et les souffrances.
Aujourd'hui, la guerre est une oeuvre nationale. Ce sont les enfants de tout un pays qui d�fendent un m�me sol et un m�me id�al, et les d�partements envahis sont devenus comparables � un vaste champ de manoeuvres choisi pour la d�fense nationale.
La loi n'a pas admis, jusqu'ici, la r�paration int�grale. Son texte parle simplement de r�paration. Il faudra qu'on la modifie, et � bref d�lai dans le sens que la justice exige. Il ne faut pas nous contenter de promesses, car ce n'est pas sur des promesses que les banques consentiront � nous faire des avances.
Il faut que la loi soit compl�t�e au cours des hostilit�s. Un bon tien vaut mieux que deux tu l'auras. Si nous nous contentons de promesses, il est � craindre que nos ruines ne restent des ruines apr�s la guerre.
Je sais bien qu'on vous invite � rentrer dans vos foyers et � recommencer la culture de vos terres, mais vos foyers restent en ruines, o� vous abriterez-vous ? Mais vos �curies sont vides et vos instruments de travail sont d�truits. Quels chevaux s'attelleront donc � la charrue et quelle charrue tracera le sillon ? Il faut donc que l'on vous donne d'abord les moyens de vous abriter et ceux de cultiver vos terres.
M. Escavy termine par urne �mouvante invocation � la Patrie, qui mouille de larmes bien des yeux.

M. MARIN
M. Louis Marin compte dans sa circonscription de nombreux villages d�vast�s. Il rappelle que, dans notre d�partement, on trouve encore des communes qui payent des centimes additionnels impos�s lors de l'occupation de 1870-73.
Il n'est pas juste que la Lorraine, parce qu'elle est � la fronti�re, alors que tous ses enfants, tous ses hommes de 20 � 48 ans, sont partis depuis le d�but de la guerre, subisse encore des dommages mat�riels particuliers.
Beaucoup de parlementaires des r�gions �loign�es ne comprenaient pus autrefois cette dette nationale, mais les temps sont aujourd'hui chang�s et l'union de tous s'est faite aussi sur ce point. Aujourd'hui, l'�go�sme a disparu.
La France a des capacit�s financi�res insoup�onn�es. On ne saurait donc parler d'impuissance du Tr�sor.
Au point de vue l�gislatif, la loi doit fixer les conditions des r�parations. Il faut nous unir pour que nos r�clamations aient plus d'autorit�.
Les �valuations exactes seront difficiles, et qui pourra �valuer ? Les commissions officielles seront-elles suffisamment comp�tentes ? Elles s'attacheront peut-�tre beaucoup plus � des questions d'hygi�ne, d'alignement, d'esth�tique qu'� des questions d'aisances pour le travail agricole. A c�t� de ces commissions, il en faut d'autres, compos�es d'hommes connaissant les aspirations et les besoins de l'agriculture.
M. Marin dit ensuite qu'il faut se mettre au travail sans tarder, car chaque saison qui passe est une r�colte perdue. Il faut que la loi permette des acomptes sur l'indemnit� globale, pour que le paysan se construise des logements provisoires, remonte son cheptel, ach�te ses chevaux et ses instruments agricoles.
O� trouvera-t-on assez de ma�ons pour reconstruire d'un coup tant de villages ? O� trouvera-t-on assez de mati�res premi�res et comment les transportera-t-on, avec des canaux et des chemins de fer aux ponts d�molis ?
M. Marin conclut que c'est pour le droit que la France s'est jet�e dans la m�l�e. Il faut donc que l'on rende � chacun ses droits.
On remarque avec plaisir l'allusion qu'il fait � l'entr�e prochaine, tr�s prochaine d'une grande puissance dans le conflit aux c�t�s des alli�s.

M. LE PR�FET
M. le pr�fet souhaite aussi la constitution de commissions cantonales, qui pourront fournir des �valuations pr�cises aux commissions officielles.
Mais, ajoute-t-il, il convient, de ne pas manifester d'impatience, et de laisser l'Etat ma�tre de l'heure. Et l'Etat ne faillira pas � son devoir.
Il faut surtout que l'ennemi sache que toutes nos aspirations se tournent d'abord vers la victoire et que nous faisons passer l'honneur avant la r�paration.

Ces patriotiques paroles sont accueillies par les bravos prolong�s de cette immense assistance de r�fugi�s, qui n'a pu trouver place tout enti�re dans la vaste salle des f�tes de l'h�tel de ville.
J. MORY.

REIMS PAIE UNE S�RIE D'�CHECS ALLEMANDS
Partout o� l'ennemi a prononc� des attaques, en Champagne, dans l'Aisne, en Argonne, en Wo�vre, en Alsace, il a �t� repouss�

Paris, 20 avril, 15 heures.
Rien � ajouter au communiqu� de ce matin en ce qui concerne les op�rations en lorraine et dans les Vosges.
Sur le reste du front, actions d'artillerie particuli�rement vives dans la r�gion de Soissons, le secteur de Reims et l'Argonne.

Paris, 21 avril, 0 h. 35.
Voici le communiqu� officiel du 20 avril.
23 heures : Cinquante obus incendiaires ont �t� lanc�s sur Reims.
En Champagne, en Argonne, lutte d'artillerie sans intervention d'infanterie.
Entre la Meuse et la Moselle, au bois de Mortmare, pr�s de la route de Flirey � Essey, nos attaques ont progress� l�g�rement.
Au bois Le Pr�tres l'ennemi, apr�s avoir violemment bombard� nos positions dans la r�gion de la Croix-des-Carmes, a esquiss� une tentative d'attaque qui a �t� aussit�t enray�e par notre artillerie.
Canonnade assez vive et combats d'avant-postes � la lisi�re de la for�t de Parroy.
Dans la soir�e du 19 avril, deux contre-attaques allemandes contre Hartmansvilerkopf ont �t� repouss�es.

Condamn�s pour espionnage

Nancy, 20 avril.
Dans l'extrait des condamnations prononc�es par le conseil de guerre permanent de la 20e r�gion de corps d'arm�e pendant la cours du premier trimestre de l'ann�e 1915, on rel�ve les condamnations suivantes : Le 7 janvier 1915, Charles-Marie-Emile Lallemand, ouvrier d'usine � Champigneulle, a �t� condamn� pour espionnage � la d�portation dans une enceinte fortifi�e. Le 13 f�vrier, Gaston-Marie-Louis Papelier, comptable � Leyr, a �t� condamn� � la d�portation dans une enceinte fortifi�e. Le 11 f�vrier �galement, Ida J�r�me, femme Papetier, m�nag�re � Leyr, a �t� condamn�e pour complicit� d'espionnage � dix ans de d�tention.

LES TAUBES

Nancy, 21 avril.
Lundi matin, les avions ennemis ont essay� � deux reprises de venir sur Nancy, du c�t� de Malz�ville. La premi�re fois, vers 7 heures moins un quart, le �� taube �, accueilli � coups de canon, s'est empress� de faire demi-tour.
Une heure apr�s, un autre avion a essay� �galement de venir sur Nancy, mais les artilleurs lui ont barr� le chemin par des projectiles bien dirig�s. Comme le pr�c�dent, il s'est enfui aussit�t.

LA VICTOIRE DES �PARGES.
R�CIT OFFICIEL

La magnifique action qui nous a rendu: ma�tres, le 9 avril au soir, de la totalit� de la cr�te des Eparges, est la conclusion d'un effort prolong� et violent.
C'est une victoire, analogue par la s�ret� de La m�thode et l'intensit� de l'offensive, � celle qui nous a conduits au sommet de l'Hartmasviller, plus importante, si l'on consid�re le chiffre des effectifs engag�s et l'accumulation des moyens r�alis�s par l'ennemi.

UNE FORTERESSE FORMIDABLE
La cr�te des Eparges est un long �peron de 1400 m�tres, d'une altitude de 346 m�tres, qui domine � l'est des Hauts-de-Meuse, l'immense plaine de la Wo�vre. Les flancs en sont abrupts et glissants. De nombreuses sources les sillonnent. Il y pleut souvent. C'est une montagne de boue.
Cette montagne est particuli�rement importante par sa situation. Qui tient les Eparges voit chez nous, a nos routes sous son feu, nous interdit toute action sur la partie sud-ouest de la Wo�vre. C'est pourquoi, s'�tant saisis des Eparges, le 21 septembre dernier les Allemands s'y �taient aussit�t formidablement organis�s.
Du sommet, ils dominaient les vall�es de 70 � 80 m�tres de hauteur. Entre le sommet et les vall�es, ils avaient install� plusieurs lignes de tranch�es. En certains points, cinq �tages de feux se superposaient les uns aux autres. Partout ailleurs, il y en avait au moins deux.
Par leurs canons, leurs mitrailleuses et leurs fusils, les Allemands nous condamnaient � l'immobilit� tant sur la croupe de Montgirmont (nord des Eparges) que dans les villages du pays bas, les Eparges, Mesnils-sous-les C�tes, Mont-sous-les-C�tes, Bonz�e et Tresauvaux.
Pour notre s�curit� comme pour le d�veloppement ult�rieur des op�rations, il �tait indispensable d'enlever la cr�te, v�ritable tour de Malaloff dress�e aux lisi�res de la Wo�vre.

LA PR�PARATION DE L'ATTAQUE
Le d�but de notre action offensive nous trouvait � la lisi�re du village des Eparges, � 600 m�tres environ des premi�res tranch�es allemandes, faisant face, par cons�quent, aux pentes ouest de la position.
Du plateau de Montgirmont, que nous tenions, nous faisions face aux pentes nord. Entre Montgirmont et ces pentes, un chemin de terre traverse le col qui s�pare les deux massifs.
Nous �tions oblig�s d'attaquer d'abord la partie ouest du massif (A). Mais notre attaque ne pouvait avoir de r�sultat d�cisif que si nous atteignions aussi le point culminant situ� � l'est (D)
Nous ne pouvions, par cons�quent, proc�der que lentement, car un assaut de vive force sur ces pentes boueuses, h�riss�es de fortifications, nous e�t co�t� tr�s cher sans nous rien donner.
D�s la fin d'octobre, pas � pas, � la sape, nous nous rapprochions des tranch�es Allemandes de l'ouest. En m�me temps nous nous infiltrions dans les bois, assez �pais, qui, dans la partie nord-est, couvrent les francs d'un ravin creus� au coeur du massif.
Les Allemands, confiants dans la valeur de leur position, nous laiss�rent proc�der � ces premi�res approches sans r�agir tr�s violemment Mais, par de nouveaux travaux, ils rattach�rent fortement la partie ouest de leurs d�fenses au point culminant dont ils firent un formidable bastion.
De notre c�t�, nous perfectionnions nos tranch�es, surplomb�es par les travaux ennemis. On atteignit ainsi la mi-f�vrier.

LA BATAILLE DE F�VRIER
Le 17, nos mines, pouss�es sous le secteur ouest, y provoqu�rent une explosion si formidable que, sans coup f�rir, nous p�mes nous installer dans la premi�re ligne ennemie. Les Allemands, d'abord surpris, se ressaisirent et, le 18, d�valant les pentes, ils contre-attaqu�rent furieusement.
Un combat acharn� s'engagea, qui dura jusqu'au 21 au soir, marqu� par des contre-attaques violentes de la part de nos adversaires, par des attaques r�p�t�es de notre part.
Le 18, dans la journ�e, nous avions presque tout reperdu de notre gain du 17. Mais le 18 au soir, nous avions tout repris.
Le 19, deux nouvelles sorties des Allemands furent repouss�es. Nous tenions la partie ouest (A). Mais l'exigu�t� de notre position nous soumettait � une concentration de feux qui la rendait intenable. Il fallait ou reculer ou nous donner de l'air et, sur un front �largi, nous mettre � m�me de faire plus ais�ment face aux retours offensifs.
Cette extension fut l'oeuvre des journ�es du 20 et du 21. Par une attaque brusque, nous d�bouchions du ravin bois� ci-dessus d�crit vers un bois de sapins, qui nous rapprochait du sommet.
La lutte fut sauvage. Le colonel Bacquet, commandant le r�giment d'infanterie, charg� de l'attaque, fut bless� mortellement � la t�te de ses troupes. Nous ne p�mes pas enlever la totalit� du bois de sapins. Mais les Allemands ne purent pas nous en faire sortir.
A la fin de ces cinq jours de combat, la situation �tait la suivante. Nous tenions tout le bastion ouest et vers le bastion est (point culminant D) nous avions commenc� � progresser en enlevant aux Allemands 300 m�tres de tranch�es.
Nos acquisitions sur ces deux points avaient �t� aussit�t reli�es, face aux d�fenses ennemies, par des tranch�es, des boyaux et des places d'armes. C'�tait une base pour de nouvelles attaques.
Le renforcement continu des ouvrages ennemis, l'entr�e en action de 16 batteries lourdes allemandes diss�min�es dans la plaine nous renseignaient pleinement sur les difficult�s de la t�che qui restait � accomplir.

L'ASSAUT DE MARS
Un nouveau bond en avant fut r�alis� � la mi-mars. Une pr�paration d'artillerie minutieuse et violente y avait pr�lud�.
Le 18 mars, avec trois bataillons, nous repr�mes l'offensive. La premi�re ligne ennemie fut enlev�e en partie, notre artillerie ayant, avec un plein succ�s, interdit aux Allemands de la garnir. Mais, de la deuxi�me ligne, de violentes contre-attaques d�bouch�rent aussit�t.
Ce fut le d�but d'une lutte plus �pre encore que celle de f�vrier et qui dura jour et nuit jusqu'au 21 au soir.
A l'issue de cette bataille, notre droite avait gagn� 100 m�tres seulement. Mais notre gauche, visant le sommet, avait enlev� 350 m�tres de tranch�es allemandes, en infligeant � l'ennemi des pertes �lev�es.
D�s ce jour, - les prisonniers furent unanimes � le constater, - nos adversaires, bien que remarquablement braver, eurent le sentiment que la partie �tait perdue et que la position leur �chapperait t�t ou tard.
Une nouvelle division allemande, une division active, la 10e, toute fra�che et recompl�t�e, vint prendre la suite des op�rations ; c'est � elle que devait �choir la t�che ingrate de perdre les Eparges.
Avant d'obtenir le r�sultat total, un nouvel effort pr�paratoire va pourtant nous �tre n�cessaire : ce sera l'attaque du 27 mars. Il s'agit toujours de nous rapprocher du sommet.
Un bataillon de chasseurs m�ne cette fois l'attaque principale. Son commandant et, tous les capitaines de compagnies engag�es sont bless�s. Mais de plus en plus nous serrons de pr�s le bastion ennemi et ce progr�s a une grosse importance.
Nous avions constat�, en effet, dans les pr�c�dentes attaques, que les Allemands avaient eu le temps, pendant notre marche d'approche, de quitter avec fusils et mitrailleuses leurs abris de bombardement et de venir par des galeries souterraines garnir leurs parapets boulevers�s.
A l'avenir, la zone � parcourir par nos troupes �tant sensiblement r�duite, cette facult� leur sera interdite.

L'ASSAUT D�CISIF D'AVRIL
C'est dans ces conditions que, le 5 avril, � 16 heures, nous tentons l'effort d�cisif. Deux r�giments sont engag�s. Il s'agit d'enlever la partie de la cr�te � l'ouest du sommet D et la partie, l�g�rement descendante, qui s'�tend � l'est de ce commet jusqu'� l'extr�mit� du plateau.
A l'heure prescrite, nos troupes d�bouchent. Il pleut et le terrain est encore plus impraticable que de coutume. Nos fantassins avancent pourtant sous le feu de l'ennemi, sortant avec effort leurs pieds de la boue o� ils enfoncent jusqu'aux cuisses.
Par un corps � corps violent, ils p�n�trent et s'installent dans les tranch�es allemandes. Le soir, ils en tiennent une partie importante. A l'est seulement, ils ont �t� arr�t�s par les torpilles a�riennes, que l'ennemi a lanc�es sur eux, pulv�risant parfois des rangs entiers avec un seul projectile.
Le 6, � 4 h. 30 du matin, les Allemands contre-attaquent. Les troupes fra�ches qu'ils ont amen�es se battent admirablement. Nos hommes, sous le feu depuis la veille, r�sistent, mais finalement reculent. L'affaire est � recommencer.
Elle recommence, en effet, - et le soir m�me. A l'extr�mit� est du plateau, nous enlevons une tranch�e que nous retournons aussit�t face � l'ennemi. Au centre, nous ne gagnons rien. A l'ouest, nous progressons vers le sommet.

LA CHARGE DANS LA NUIT
Nos magnifiques soldats n'entendent pas en rester l�. La nuit, sous la pluie, qui tombe toujours, ils chargent � la ba�onnette et pied � pied refoulent les Allemands. Le 7, au matin, tremp�s, boueux, enlis�s, mais victorieux, ils font le compte de leurs gains depuis le 5 : 500 m�tres de tranch�es et plus de 100 prisonniers, dont plusieurs officiers.
Nous approchons du but : mais nous n'y sommes pas encore. L'ennemi contre-attaque constamment Il est repouss� tant�t par des charges, tant�t par des tirs de barrage.
A 5 heures du matin, le 7, il tente un nouvel effort. Son attaque est fauch�e avant d'atteindre nos tranch�es. Il arrive alors du village de Combres de gros renforts. Il va de toute �vidence contre-attaquer � fond.
Mais alors intervient de nouveau notre artillerie. D�s que les rassemblements sont signal�s, elle les prend sous son feu et les emp�che en partie de d�boucher. Nous ne reculons que sur un point, malgr� la violence de l'attaque, la plus forte qu'on e�t encore vue.
Nos renforts pourtant ont grand'peine � arriver.
Les boyaux sont effondr�s, encombr�s, canonn�s Il nous faut attendre au lendemain pour continuer l'op�ration. L'ennemi, qui a re�u un coup s�rieux, ne contre-attaque pas de toute la nuit.

NOUS APPROCHONS DU SOMMET
Le 8, d�s neuf heures du matin, nous reprenons l'attaque. Deux r�giments d'infanterie et un bataillon de chasseurs ont l'ordre d'enlever le sommet. Il pleut toujours. Les culasses sont encrass�es. A la ba�onnette, par cons�quent !
A dix heures, le sommet et la cr�te � l'ouest sont � nous. Nous poussons sur la cr�te qui est � l'est du sommet. Partout nous progressons et, sous le feu, nous retournons les tranch�es allemandes.
A minuit, apr�s quinze heures ininterrompues d'une lutte furieuse, la presque totalit� de la position des Eparges nous appartient. L'ennemi ne tient plus qu'un petit triangle � l'extr�mit� est (X). Il contre-attaque mollement. Nous avons enlev� quinze cents m�tres de tranch�es, dont le bastion formidable du sommet (D), qui est la clef de la position.
La nuit du 8 au 9 et la matin�e du 9 sont calmes. Nous r�ussissons � op�rer sans incident la rel�ve de nos troupes. Un r�giment frais est amen�. Pour le mettre, en place, il faut quatorze heures, tant le terrain est impraticable.
C'est � lui qu'est confi�e la mission de mettre le point final � notre victoire.

LES �PARGES SONT A NOUS
A quinze heures, nous attaquons, le sol est creus� de cuvettes profondes o� les hommes disparaissent parfois. La pluie fait rage, ainsi que le vent.
Nos fantassins, pr�c�d�s par le feu absolument pr�cis de nos canons, avancent pourtant et ils atteignent l'extr�mit� est du plateau. Mais, � ce moment, une calotte de brouillard s'abat sur les Eparges. Nos canons ne peuvent plus tirer. L'ennemi contre-attaque et nous reculons.
Ce n'est d'ailleurs qu'un recul provisoire. Une demi-heure plus tard, une charge furieuse nous rend la totalit� de notre gain. A dix heures du soir, nous tenons tout le massif des Eparges. Notre long effort est couronn� de succ�s. Le 10, l'ennemi, �cras�, ne bouge plus.
Il contre-attaque dans la nuit du 11 au 12. Il est repouss�. Les Eparges sont d�finitivement perdues pour lui.
Une seule ressource lui reste, et il en use : c'est de d�baptiser la cr�te et de donner son nom aux hauteurs plus au sud qu'il tient et que nous n'avons pas attaqu�es.
Le grand �peron, qui domine la Wo�vre dans toutes les directions, est en notre pouvoir. Nul ne nous en d�logera.

L'IMPORTANCE DE NOTRE VICTOIRE
Pour garder cette position, les Allemands n'ont rien n�glig�. On a vu quelle �tait la puissance de leur organisation d�fensive. On a vu qu'� la fin de mars ils ont amen� aux Eparges une de leurs meilleures divisons.
Ils y avaient joint cinq bataillons de pionniers, les mitrailleuses de la place de Metz, un grand nombre de lance-bombes de 21 et 24. Leurs abris-cavernes, creus�s � loisir, comportaient un chemin de fer � voie �troite, des chambres de repos, un cercle pour les officiers. Leurs renforts �chappaient � nos vues. Les n�tres �taient sous le feu de leurs canons, de leurs mitrailleuses, voire m�me de leurs fusils, et l'on con�oit quelles, �taient pour nous les difficult�s du ravitaillement tant en vivres qu'en munitions.
C'�taient l� les indices certains d'une volont� arr�t�e de tenir t�te � toutes nos attaques. Effectivement, nous avons trouv� sur les officiers prisonniers les ordres qui prescrivaient de tenir � tout prix. L'�tat-major allemand �tait r�solu � tout sacrifier pour garder cette cr�te ma�tresse. Il a fourni le maximum de r�sistance. Les troupes qu'il a engag�es ont eu une conduite magnifique. Pour s'assurer de leur fermet�, rien n'a �t� n�glig�, et pour �viter aux mitrailleurs la tentation de cesser le feu, on est all� jusqu'� les encha�ner � leurs pi�ces. Malgr� tout, nous avons �t� vainqueurs.
La nature des choses pourtant favorisait singuli�rement la r�sistance allemande. Pentes abruptes, sol d�tremp� opposaient � nos attaques le plus redoutable des obstacles. Nous avons eu des hommes non bless�s noy�s dans la boue. Quant aux bless�s, beaucoup n'ont pu �tre sauv�s � temps de la fondri�re o� ils �taient tomb�s. Les obusiers et les lance-torpilles allemands nous visaient � coup s�r, puisque l'ennemi tenait les sommets. Malgr� tout, nous avons �t� vainqueurs.
Il y a deux mois, les Allemands, des Eparges, voyaient chez nous. D�sormais, nous voyons chez eux. La hauteur m�me de Combres, qu'ils tiennent, est r�duite � l'�tat d'�lot entre nos mitrailleuses des Eparges et de Saint-R�my. Et nous avons obtenu ce r�sultat en infligeant � l'ennemi des pertes doubles que celles que nous avons subies.
Qu'est-ce � dire, sinon que la victoire des Eparges d�montre, apr�s tant d'autres, la sup�riorit� croissante de notre arm�e ?
Nous attaquons ; l'ennemi se d�fend. Il tient les hauteurs ; nous les lui enlevons. Il a l'avantage de la position ; nous le chassons de ses tranch�es.
Quand on a v�cu ces combats, on sait, que notre triomphe est s�r et qu'il a d�j� commenc�. Cette certitude est le plus bel hommage que la France reconnaissante puisse offrir aux morts h�ro�ques des Eparges.
(Journal Officiel).

(� suivre)

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