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NOS SUCC�S entre MEUSE et MOSELLE
Plus de 1, 000 Allemands tu�s aux Eparges. - Les
seuls survivants d'une compagnie sont faits
prisonniers au bois de Morville. - Succ�s dans les
bois d'Ailly et de Mortmare.
De VERDUN au BOIS LE PR�TRE
Paris, 8 avril, 15 heures.
Combats d'artillerie, en Belgique, dans la vall�e de
l'Aisne et � l'est de Reims.
Les r�sultats obtenus entre Meuse et Moselle, et
signal�s hier soir, sont confirm�s.
Les pluies de ces jours derniers ont profond�ment
d�tremp� le sol argileux de la Wo�vre, ce qui rend
les mouvements d'artillerie difficiles et emp�che
les projectiles d'�clater.
Nos troupes ont consolid� les progr�s faits la
veille. Nous avons maintenu tous nos gains, malgr�
des contre-attaques extraordinairement violentes Aux
Eparges, notamment, la derni�re contre-attaque des
Allemands, men�e par un r�giment et demi, a �t�
compl�tement repouss�e.
Ils ont subi d'�normes pertes. Leurs cadavres
couvrent le terrain. Trois cents hommes, qui avaient
un moment pu progresser en avant des lignes
allemandes, ont �t� fauch�s par nos mitrailleuses.
Aucun d'eux n'a �chapp� Au bois Br�l�, nous avons
enlev� une tranch�e ennemie.
Communiqu� officiel du 8 avril, 23 heures :
Malgr� le mauvais temps persistant, nous avons �
enregistrer de nouveaux succ�s entre Meuse et
Moselle, dans la nuit du 7 au 8 avril et dans la
journ�e du 8.
Aux Eparges, une attaque de nuit nous a permis de
faire un nouveau bond en avant. Nous avons maintenu
notre progr�s, malgr� trois, violentes
contre-attaques.
Nous avons d�j� compt� sur le terrain plus de, mille
cadavres allemands.
Plus au sud, au bois de la Morville, dans une vive
action d'infanterie, nous avons d�truit une
compagnie allemande dont il n'est rest� que dix
survivants, qui ont �t� faits prisonniers par nous.
Au bois d'Ailly, nous avons enlev� de nouvelles
tranch�es et repouss� deux contre-attaques.
Au bois de Mortmare, au nord de Flirey, nous avons
pris pied dans les organisations d�fensives de
l'ennemi et nous nous y sommes maintenus, en d�pit
des efforts qu'il a faits pour les reconqu�rir.
Au nord-ouest de ce bois, � Pannes, un ballon captif
allemand a eu son c�ble coup� par un nos obus et
s'en est all� � la d�rive dans nos lignes, vers le
sud-est.
En r�sum�, les reconnaissances offensives et les
attaques que nous poursuivons depuis le 4 avril
entre la Meuse et la Moselle, nous ont donn�, d�s
maintenant, les r�sultats, suivants :
1� Sur les fronts nord-est et est de Verdun, nous
avons gagn�, sur un front de vingt kilom�tres de
long, de un � trois kilom�tres en profondeur. Nous
avons occup� les hauteurs qui dominent le cours, de
l'Orne et enlev� les villages de Gussainville et de
Fremezey ;
2� Sur les Hauts-de-Meuse, aux Eparges nous avons
conquis la presque totalit� des fortes positions
tenues par l'ennemi sur le plateau qui domine
Combres, et conserv� le terrain gagn�, malgr� des
contre-attaques nombreuses et extr�mement violentes
;
3� Plus au sud, pr�s de Saint-Mihiel nous nous
sommes empar�s de toute la partie sud-ouest du bois
d'Ailly, o� les Allemands �taient fortement �tablis
et qu'ils n'ont pas pu reprendre, malgr� des
contre-attaques r�p�t�es ;
4� Dans, la vall�e de la Wo�vre m�ridionale, entre
le bois de Mortmare et le bois Le Pr�tre, nous avons
conquis, sur un front de sept � huit kilom�tres de
long, trois kilom�tres en profondeur et enlev� �
l'ennemi les villages de Fey-en-Haye et R�gnieville.
Sur tous ces points, les Allemands ont subi des
pertes, dont le nombre des cadavres trouv�s aux
Eparges permet d'appr�cier l'importance.
DEVANT LE FRONT
LA GUERRE SOUS BOIS
Nous roulons � grande allure de Chalons vers Nancy.
L'activit� militaire se manifeste sur les routes par
la rencontre de nombreux v�hicules : tant�t ce sont
des trains de voitures r�gimentaires ou des convois
automobiles que nous croisons, tant�t nous longeons
dans les bourgs ou en pleine campagne de v�ritables
parcs de moyens de transport. De temps � autre on
rencontre des patrouilles de mar�chauss�e. Mais dans
ces r�gions de la zone des arm�es, on ne voit pas de
troupes en armes, on ne fend pas des flots de
soldats, contrairement � l'opinion populaire et �
l'image qu'on se fait de la guerre. Les soldats sont
� leurs postes. Ils semblent, cach�s, m�me hors des
tranch�es. Souvent, dans certains villages, on
trouve des cantonnements paisibles qui rappellent
plut�t les grandes manoeuvres. Des hommes pansent des
chevaux ; d'autres, les bras nus, en corps de
chemise, les ferrent, devant la porte d'une remise.
Dans les villes, toujours des voitures et des
voitures. On dirait d'une guerre de livraisons.
Nous avons constat� que partout on a remu� de la
terre. Des travaux de d�fense nombreux s'�chelonnent
et t�moignent que les le�ons de retranchements ont
�t� vite et bien apprises. Les fils de fer h�riss�s
�tendent leurs r�seaux inextricables autour de ces
terrassements profonds. En chemin, nous avons �t�
re�us par le g�n�ral X..., qui commande une arm�e.
Install� dans une �cole, o� l'on n'a jamais
travaill� avec autant de z�le, le g�n�ral nous
accueille dans une salle tapiss�e de cartes
d'�tat-major ray�es de larges traits. �� Vous allez
au bois Le Pr�tre, nous dit-il, vous verrez ce
qu'est la guerre sous bois, la guerre de sape. Vous
vous rendrez compte des difficult�s que nous avons �
vaincre et de la valeur incomparable de nos soldats.
Le g�n�ral R..., qui vous conduira - c'est lui qui
dirige les op�rations du bois Le Pr�tre - est
pr�venu. Il vous attend.� La r�ception a �t� courte.
Nous reprenons la route d�tremp�e, dans les orni�res
de laquelle les autos font jaillir des gerbes ou
plut�t des faux de liquides boueux.
Voici Nancy. Les habitants vont et viennent comme en
temps normal ; et c'est une surprise de cette guerre
paradoxale que cette ville, qui �� pouvait � �tre
prise d�s le d�but d�s, hostilit�s, qu'il fallait le
cas �ch�ant, sacrifier � des n�cessit�s
strat�giques, ait gard� sa physionomie, son calme et
sa force, tandis que Lille, qui n'est pas sur la
fronti�re allemande, conna�t la dure loi de
l'occupation. Nancy, de fait, a une tenue admirable.
Chacun y reste � son poste, fier du r�le qu'il a �
remplir: les �� coeurs inutiles � sont partis.
Il est midi quand nous arrivons dans la noble cit�
lorraine. Deux heures apr�s, nous repartions pour
Pont-�-Mousson et le bois Le Pr�tre. Dans la partie
de Pont-�-Mousson que nous avons travers�e, nous
n'avons pas vu les effets du bombardement presque
quotidien. Quelques, soldats et de rares civils
marchent le long des maisons, �vitant le milieu de
la rue. A partir de Pont-�-Mousson, les autos qui
nous m�nent ont la consigne de garder une assez
longue distance entre elles, par mesure de prudence.
Notre procession automobile s'�gr�ne. A l'endroit
fix�, le g�n�ral R..., accompagn� de ses officiers
d'ordonnance, nous accueille tr�s aimablement.
Nouvellement promu, sur place, le g�n�ral, un ��
sapeur �, colonel du g�nie de la veille, porte un
uniforme sans indignes visibles : une longue capote
� une rang�e de boutons de drap bleu sombre, un k�pi
de m�me couleur ; deux �toiles en acier bruni sar
les manches et le couvre-chef marquent le grade.
Elles n'attirent pas le regard. Aussi ai-je entendu
un soldat que le g�n�ral interrogeait r�pondre : ��
oui, mon... �. Le soldat voyait bien qu'il avait
affaire � un chef, mais il ne savait pas son grade.
Messieurs, nous dit le g�n�ral, nous allons de ce
pas au bois Le-Pr�tre. Nous monterons d'abord sur ce
plateau qui domine la position et d'o� vous pourrez
voir tous les environs. Puis nous irons � la maison
du p�re Hilarion, qui a �t� le th��tre d'un combat
acharn�.
Le Bois Le Pr�tre
La contr�e qui �tait devant nos yeux offrait,
quoique � une �chelle r�duite, tous les caract�res
des pays de for�ts et de montagnes. De grands
mouvements de terrain formaient des alternances de
vall�es nues et de hauteurs bois�es, espaces
labour�s et masses noires de sapins. A notre gauche,
sur un flanc d�couvert, � mi-coteau, on apercevait
des ouvertures carr�es de distance en distance,
entr�e d'une ligne de tranch�es ; devant nous une
for�t de haute futaie s'infl�chissait vers un repli
de terrain, - o� �tait tapie la maison du p�re
Hilarion - et sur notre droite la for�t se
redressait presque � pic et se terminait par une
croupe arrondie couverte d'arbres dont l'extr�me
pointe touffue faisait �� la corne� du Bois. Le ciel
�tait couvert ; le vent soufflait par rafales ; de
gros nuages noirs couraient au-dessus des collines
et semblaient s'accrocher et se d�chirer aux piques
de sapins. Une pluie glaciale et drue nous fouettait
le visage. Une boue �paisse, gluante et glissante
g�nait notre marche. Par un chemin montant, un
sentier plut�t, nous nous rendions sur le plateau
dont avait parl� le g�n�ral. Le bruit des
d�tonations ne cessait de r�sonner, r�percut� par
les �chos. C'�taient des coups sourds ou �clatants,
non pas un roulement continu mai� des explosions
intermittentes qui donnaient � la solitude et au
silence de ce paysage grave je ne sais quoi de
tragique. Les officiers, nos guides, nous ��
pr�sentaient � ces d�tonations : �� Celle-ci, c'est
une pi�ce lourde allemande ; celle-l� c'est une
bombe boche ; ah ! voil� que notre grosse artillerie
r�pond. � Parfois un grondement qui �branlait l'air
nous avertissait qu'une mine venait d'exploser.
Soudain, tout pr�s, devant nous, � un d�tour du
sentier et se d�tachant sur l'horizon sombre,
apparurent quatre hommes portant une civi�re. Nos
regards se fix�rent sur deux pieds d�mesur�s, sur
deux masses de boue qui d�passaient la couche
portative et qui avan�aient, Nous nous range�mes sur
les c�t�s, �tant nos chapeaux. Nous v�mes, alors,
quand il passa devant nous, un soldat �tendu, la
t�te band�e, le front et les joues avec des tra�n�es
de sang frais, le nez pinc� et blanc. Le pauvre
gar�on venait d'�tre tu� un instant auparavant dans
les tranch�es voisines. La mort frappait dans ces
parages.
Sur le plateau, la pluie redoubla de violence. Le
g�n�ral R... nous fit un petit �� topo �
d'orientation. Il nous d�signa tous les bois des
environs, toutes les cr�tes et nous montra la
direction de nos lignes et celle des Allemands. ��
L�-bas, derri�re cette colline, c'est Xon, que nous
occupons, et plus loin les hauteurs de Norroy, d'o�
l'ennemi bombarde journellement Pont-�-Mousson.
Devant nous s'�tend le bois Le-Pr�tre. Nous en
occupons la plus grande partie, � partir de la corne
du bois. Les Allemands l'ont tenue longtemps. Leur
premi�re ligne de tranch�es se trouvait presque �
l'entr�e du bois.
Nous la verrons tout � l'heure. Ils y �taient
solidement retranch�s, ainsi que vous pourrez en
juger. Mais nous les avons forc�s � les �vacuer
apr�s une lutte terrible. Poursuivant notre
avantage; nous nous sommes avanc�s dans la m�me
direction � plusieurs centaines de m�tres; nous
avons d'autre part, tandis que se produisait cette
attaque de front, attaqu� la colline oppos�e,
prenant l'ennemi de flanc. Il a recul�, apr�s des
alternatives d'attaques et de contre-attaques,
notamment dans le repli o� s'�l�ve la maison du p�re
Hilarion. Il s'est port� � plus d'un kilom�tre en
arri�re de la lisi�re de la for�t qui, �tant donn�
la nature du terrain, marque pour lui un gros �chec.
Depuis, nous nous �� moulons � sur les lignes
ennemies. Partout nous sommes nez � nez. Nous avons
entrepris un r�seau de sape, dans lequel
l'ing�niosit� de nos hommes et leur vaillance font
merveille. Ce sont sans cesse des �pisodes qui
prouvent, que nous avons acquis l'ascendant sur
l'adversaire. � J'ai retrac� d'une mani�re g�n�rale
et vague les paroles pr�cises du g�n�ral R... pour
une raison qui se comprend facilement. Du haut du
plateau, la vue embrassait l'ensemble de la vall�e
et la lisi�re du bois. On voyait sortir de la for�t
des hommes qui suivaient les sentiers et les routes
en terrain d�couvert par petits groupes, � la file
indienne ou deux par deux. Et par un mouvement
inverse, d'autres hommes montaient de la vall�e vers
la for�t. Ce tableau �voquait assez l'image des
cort�ges de fourmis qui se croisent, mais qui
partent toutes d'une m�me fourmili�re ou y
aboutissent. Ici on devinait sans peine ce qu'�tait
la fourmili�re, le trou invisible qui d�terminait
cette activit�. Parmi ces hommes, les uns avaient
�t� relev�s de leur poste, les autres �taient de
corv�e. Ils montaient des seaux � incendie remplis
d'eau potable. Ils avaient des costumes �tranges.
Certains rev�taient une fa�on d'imperm�able qui
d�fie la description exacte. C'�tait un
caoutchouc-sac d'une couleur o� se heurtaient toutes
les nuances du vert ou du jaune. Ni peau de l�zard,
ni peau de grenouille, il semblait avoir �t� tremp�
dans une d�coction de mousse, de feuilles s�ches
dor�es, de frondaisons rouill�e s, d'aiguilles de
sapin d'un vert cru, de foug�res fonc�es. Par un
ph�nom�ne de mim�tisme curieux, les habitants de ces
lieux avaient pris les couleurs vari�es d'un bois
�pais, les couleurs de ses quatre saisons. D'autres
portaient des esp�ces de cuirasses de peau de mouton
: la toison �tait tourn�e � l'ext�rieur. Les bras
restaient libres et d�gag�s dans les manches de la
capote r�glementaire. Ces soldats des bois avaient
vraiment un pittoresque hardi et une tournure
martiale.
La maison du p�re Hilarion
Nous p�n�trons dans le bois. Une odeur lourde de
champignons moisis et des senteurs acides de
cyclamens vous frappent vivement. Nous suivons une
all�e bord�e de grands arbres qui d�coupent dans le
ciel comme un canal gris lumineux dans la masse de
la futaie obscure. Mais le canal d�verse tout son
contenu sur nos t�tes. Nous enfon�ons de plus en
plus dans la boue. De droite et de gauche, partent
des layons jonch�s de feuilles qui brillent. Nous
voici � la premi�re tranch�e allemande conquise par
nos troupes. Ce sont au ras du sol des trous
profonds qui vus du dehors, ne semblent pas
communiquer entre eux. Recouverts de branches et de
feuillage, ils ont form�s de cavit�s larges pouvant
contenir sept ou huit hommes et s�par�s par un boyau
�troit. Derri�re est le poste de commandement de
l'officier. Tout autour des arbres sont coup�s. A
mesure que nous avan�ons, le concert de l'artillerie
para�t s'accentuer. Les coups succ�dent aux coups,
les explosions aux explosions. Une note nouvelle
s'ajoute � cette bruyante orchestration. On croirait
s'approcher d'un stand. Le claquement sec des coups
de fusil larde les �chos de la for�t. Nous arrivons
� la maison du p�re Hilarion. C'est une masure
rustique blanche et rose, rendez-vous des
Mussipontains pendant les beaux jours. Ils y
trouvaient des victuailles et � c�t� une source
fra�che et pure. C'est m�me pour la possession de
cette fontaine qu'on s'est battu avec tant
d'acharnement. Une inscription sur une planche de
sapin nous avertit qu'il est d�fendu de laver son
linge � cette fontaine. A gauche de la maison du
p�re Hilarion, une all�e que coupe la premi�re,
celle que nous avons d�j� suivie, nous montre � deux
cents m�tres une barri�re, et, plus loin, une clart�
diffuse tr�s p�le indique, ou une clairi�re ou la
lisi�re du bois. C'est � cet endroit clair que se
trouve la ligne allemande. De quatre � cinq cents
m�tres nous en s�parent. Les Allemands retranch�s
sur la droite n'ont pas la vue de l'all�e. Deux
balles sifflent dans les arbres. �� C'est des Boches!
� nous dit l'officier. Nous sommes pr�s du front et
cependant nous ne voyons pas un soldat � son poste.
Tout le travail se fait sous terre. Seuls les canons
nous signalent que les positions sont bombard�es.
Nous revenons par le m�me chemin, sous la m�me pluie
glaciale, dans la m�me boue gluante et glissante.
Nous croisons des soldats, qui montent ou
descendent, en petits groupes s�par�s. Les uns ont
des fusils les autres des pelles. Qui dira jamais
l'admiration que m�ritent ces h�ros ? Quelle
endurance il leur faut pour lutter contre ces
�l�ments qui s'appellent la pluie, la boue, le froid
! Quelle �nergie pour vivre sous terre, dans ce
bois, et pour mener une attaque incessante ! Dans
cette guerre de mines, l'engagement ne conna�t ni
tr�ve, ni repos. L'action continue de jour et de
nuit. Et voil� des mois que cela dure. Mais quand on
a vu le terrain, on s'explique pourquoi un gain de
quelques m�tres repr�sente un fait d'armes
important. Soldats et chefs sont pleins d'entrain,
malgr� leurs tr�s dures �preuves. Ils ont de la
belle humeur et une confiance souriante. Je
remarquai des soldats qui se pressaient autour de
quelques-uns d'entre nous qui leur distribuaient du
tabac et des cigares. Ils avaient l'air d'�coliers
en vacances. A leur figure, on voit qu'ils ne
souffrent pas de la faim. Le service de
l'alimentation n'est certainement pas en d�faut sur
cette partie du front. Le g�n�ral R... nous a
invit�s � prendre le th� � son poste de
commandement. C'est une ferme fort simple : une
entr�e �troite en forme de couloir que les hommes
balayent tant telle est envahie par l'eau; une assez
vaste pi�ce basse, �clair�e mod�r�ment par une lampe
� p�trole, une chemin�e monumentale en pierre �
tablier et � colonnes dans laquelle flambe un fagot
imposant. Sur la table, une table dress�e, une nappe
blanche, au milieu une couronne de fleurs des bois,
et tout autour des bouteilles, des g�teaux, une
brioche, de grande pointure. De jeunes officiers
font les ma�tresses de maison. La salle donne
directement sur l'�curie ; une autre porte ouverte
nous montre une pi�ce avec des tables rondes
charg�es de cartes, de papiers et d'�critures ; un
t�l�phone brille sur un bureau. La fen�tre; de la
salle n'a plus qu'un ou deux carreaux de verre, des
carr�s de papier blanc bouchent le reste de la
fen�tre. �� Hier, nous dit le g�n�ral, un obus est
tomb� devant la fen�tre, � quelques m�tres et a
bris�, les vitres. � Le son du canon nous rappelle
que nous sommes pr�s des premi�res lignes. Tout �
l'heure d'ailleurs, � une crois�e de chemins, tandis
que les autos �taient arr�t�es, un obus a �clat� �
une vingtaine de m�tres de la route, � c�t� d'un
abri dans lequel un soldat a eu juste le temps de se
glisser. Et plus tard, au retour, apr�s avoir pris
cong� du g�n�ral, au moment o� les chauffeurs
allumaient les phares, une d�tonation effroyable
nous avertissait qu'il n'�tait pas l'heure de
musarder en chemin.
Un autre aspect de for�t
Le d�cor change. Nous visitons un autre th��tre de
la guerre sous bois. Mais actuellement ce th��tre
fait rel�che. Nous sommes dans une for�t aux
environs de Nancy, qu'il est inutile que je nomme. A
la pluie de la veille ont succ�d� un soleil �clatant
et un froid qui mord. Le sol est d�tremp� et c�de
sous les roues des autos qui s'enfoncent. Des
artilleurs doivent d�sembourber une de nos voitures.
Partout le silence. Aucun coup de canon pas le
moindre coup de fusil. Avant d'entrer dans la for�t,
nous avons long� de nombreuses tombes, petits
tertres rectangulaires de terre surmont�s d'une
croix portant un petit drapeau ou un k�pi. A un des
croisements de chemins qui s'appellent d'ordinaire
la �� Croix du Grand-Veneur � ou la �� Croix des
Gardes �, nous mettons pied � terre. Nous entrons
sous bois. Nous voici dans un village d'une �poque
primitive. Ce ne sont que des huttes, faites de
branches d'arbres. Je p�n�tre dans l'une d'elles
d'o� s'�chappe une fum�e abondante. J'y trouve un ��
poilu � devant un fourneau improvis� sur lequel bout
une grande marmite app�tissante.
C'est un rata de pommes de terre. Les hommes qui
habitent ce village portent tous la capote grise.
Ils sont propres et ne ressemblent gu�re dans leur
uniforme clair aux �� mineurs � du bois Le-Pr�tre.
Nous avons visit� la hutte du capitaine, qui loge
avec son lieutenant : il faut descendre une ou deux
marches ; la pi�ce n'est pas vaste ; une table sur
laquelle on voit une cuvette en caoutchouc, un
blaireau, une lampe, quelques livres ; un po�le et
au fond une esp�ce de lit de camp, plan, inclin� o�
on remarque un sommier � gauche et un matelas �
droite. Le premier est pour le capitaine, le second
pour le lieutenant. Nous visitons aussi une
hutte-abri pour les soldats : longue galerie divis�e
en deux parties ; la premi�re contient les sacs, les
fusils, c'est le refuge de jour ; l'autre couverte
de paille, est le couloir profond et sombre d'une
section. La tranch�e o� on nous conduit a �t� faite
d'apr�s le dernier cri de r�gles de l'art : le toit
en est form� de branches solides, l'int�rieur est
clayonn� soigneusement, des sacs de terre ext�rieurs
encadrent les meurtri�res. Une pompe d'�puisement
assure l'ass�chement de la tranch�e. Il nous a �t�
donn� de voir un des gros canons de marine servi par
des canonniers de la flotte. L'engin formidable est
cach� dans une coupole sur b�ton et recouvert d'une
carapace �paisse de terre. La premi�re ligne de
tranch�es est � peu de distance de la for�t. De la
lisi�re de celle-ci on aper�oit, en terrain
d�couvert, des villages de la Lorraine annex�e, dont
les clochers se dressent dans le ciel bleu. Dans ce
coin qui appartient au �� Grand-Couronn� � de Nancy,
il n'y a pas, en c moment, d'activit� offensive ou
d�fensive.
On y attend. Mais on y attend avec calme parce qu'on
sait qu'on est pr�t. Les troupes qui occupent ces
postes avanc�s ne se sont pas crois� les bras. Les
travaux tr�s importants qui ont �t� ex�cut�s
permettent d'envisager l'avenir avec confiance. Tous
ceux, qui entrent dans cette for�t y trouvent
l'esp�rance.
(�� Le Temps �). JOSEPH GALTIER.
LES BOMBARDEMENTS DE PONT-A-MOUSSON
ont-�-Mousson, 9 avril.
Au cours des derniers bombardements, notamment de
celui de mardi, la place du Paradis et l'avenue de
Metz ont encore une fois de plus souffert. Les
maisons Houpert et Renard sont inhabitables ; les
projectiles crevant le toit, ont tout boulevers� �
l'int�rieur des maisons et les locataires ont d�
�vacuer leurs appartements. Deux bless�s, l�g�rement
toutefois, M. Claisse et Mme Gauthier, qui habitent
place du Paradis.
Toute, la position des Eparges
EST A NOUS
Quinze attaques allemandes au bois de Mortmare ont
abouti � quinze �checs et � des monceaux de morts
allemands.
Paris, 9 avril, 15 heures.
Les troupes britanniques ont repouss�, dans la nuit
du 7 au 8, une attaque allemande entre Kenimel et
Wulverghem.
Entre Meuse et Moselle, de nouveaux progr�s ont �t�
r�alis�s. Aux Eparges nous avons encore gagn� du
terrain, retourn�, face � l'ennemi, les tranch�es
allemandes qui �taient encombr�es de cadavres, et
repouss�, � la fin de la journ�e, deux
contre-attaques.
Au bois d'Ailly, o� nous avons pris six
mitrailleuses et deux lance-bombes, l'ennemi n'a
plus contre-attaqu� depuis hier midi.
Au bois de Mortmare, tous nos progr�s ont �t�
maintenus, malgr� une tr�s violente contre-attaque
qui s'est produite hier, � 19 heures.
Paris, 10 avril, 0 h. 58.
Voici le communiqu� officiel du 9 avril, 23 heures :
Apr�s une nouvelle et brillante attaque,
l'importante position des Eparges, qui domine la
plaine de la Wo�vre, et que l'ennemi d�fendait
obstin�ment, est tout enti�re en notre pouvoir.
Nous avions enlev�, hier, plus de 1.500 m�tres de
tranch�es et, ce matin, les Allemands ne
conservaient plus, sur le plateau, que deux �lots de
quelques m�tres encore fortement tenus.
Nous nous en sommes empar�s cet apr�s-midi, en
faisant 150 prisonniers ces derniers jours.
Plus au sud, au bois d'Ailly, nous avons maintenu
tout notre gain de deux cents m�tres de profondeur
sur quatre cents m�tres de front, et repouss� trois
contre-attaques.
Au bois de Mortmare, les Allemands ont prononc�
quinze attaques pour reprendre les tranch�es que
nous leur avions enlev�es hier. Ils ont �t� quinze
fois repouss�s. Il y a sur le terrain des monceaux
de cadavres allemands.
Sur l'Yser, en Champagne et en Alsace
Sur le reste du front, les actions � signaler sont
les suivantes :
En Belgique, pr�s de Driedgrachten, une attaque
allemande, a occup� un �l�ment de tranch�e sur la
rive gauche de l'Yser, tandis qu'une attaque belge,
d�bouchant non loin de l�, sur la rive droite, y
installait une t�te de pont.
En Champagne, une action d'infanterie, toute locale,
mais tr�s vive, s'est d�roul�e au nord de
Beaus�jour. Les Allemands ont essay� de reconqu�rir
une partie des tranch�es perdues par eux le mois
dernier, mais leur attaque a �t� fauch�e, sauf sur
un point, o� ils ont r�ussi, hier soir, �
s'installer dans un �l�ment avanc�.
Aujourd'hui, nous les avons contre-attaqu�s. Nous
avons repris cet �l�ment et ramen� l'ennemi � son
point de d�part en lui infligeant des pertes
sensibles.
Sur les pentes sud-est de Hartmansviler, le nombre
de prisonniers faits par nous dans la derni�re
journ�e est de 150.
Nouvelles du Pays meusien
Pareid. - Un �l�ve de l'�cole Saint-Louis, r�cemment
rapatri�, adresse de Grignon (Savoie), la lettre
suivante :
�� Le 27 ao�t, nous v�mes des dragons allemands qui
vinrent en �claireurs et coup�rent les fils
t�l�graphiques. Durant huit jours, on les vit aussi
mais ils ne firent aucun mal � Pareid, mon pays
natal. A Maizeray, qui se trouve � 2 kilom�tres
environ, le t�l�phoniste qui avait mal compris les
ordres de la receveuse des postes de Fresne fut tu�
dans la plaine en tentant de rejoindre ce village
avec ses appareils.
Le 4 ou le 5 septembre, au soir, arriva le gros de
l'arm�e. Ce fut alors que commenc�rent pour nous les
douleurs de l'invasion. Le lendemain, les Boches
r�quisitionn�rent hommes, chevaux et voitures, et
enlev�rent toutes les poutres, planches, volets et
m�me les portes qu'ils purent trouver. Les maisons
inhabit�es furent soumises � un pillage m�thodique
et en r�gle. Il n'y resta que les quatre murs.
Ils commenc�rent leurs tranch�es couvertes dans la
plaine et, afin de faciliter leur besogne, ils
faisaient couper les avoines par des hommes qu'ils
conservaient ensuite comme otages. Ils arr�t�rent le
cur�, le maire et plusieurs conseillers municipaux,
les enferm�rent dans une maison et ne les
rel�ch�rent qu'au bout de quelques jours.
Du matin au soir, des bandes de pillards entraient
dans toutes les maisons et y volaient tout ce qu'ils
voulaient. On n'avait rien � dire et ils nous
mena�aient lorsque nous n'�tions pas contents. De
plus, nous avions continuellement des troupes �
loger. Ils nous r�quisitionnaient tout. Le village
�tait sous une v�ritable terreur ; il fallait se
cacher pour manger, cuire le pain, etc... Il fallait
tout dissimuler, ou bien ils nous volaient tout.
Lorsqu'ils d�couvraient des provisions quelconques
ou tombaient sur des caves bien garnies, c'�tait une
maison mise � sac.
On vivait aussi sous la perp�tuelle menace de se
voir tous fusill�s et de voir en m�me temps le
village br�l�. Ils nous accusaient d'espionnage ou
de faire les francs-tireurs.
Cependant, ils ne fusill�rent personne � Pareid. Il
y eut des morts caus�es par une �pid�mie de faux
chol�ra, dont les Boches avaient une frousse
terrible. Leurs majors soignaient les malades.
Le village n'avait aucunement souffert avant mon
arrestation.
Le 30 septembre, on arr�ta tous les hommes et on les
enferma dans l'�glise. On prit les noms et les �ges.
Nous y pass�mes la nuit et, � 2 heures du matin, un
sous-officier, qui parlait fran�ais, vint avec une
liste et nous appela � vingt. Nous part�mes pour
Metz.
On nous incarc�ra. Nous all�mes ensuite � Darmstadt.
Les autres hommes, � partir de 48 ans, rest�rent
enferm�s � l'�glise, puis � la mairie. Ils durent
arracher les pommes de terre pour les Boches.
Ensuite, on �vacua le village trois semaines apr�s
notre arrestation. �
UN TAUBE SUR NANCY
Nancy, 11 avril.
Samedi, vers cinq heures du soir, plusieurs
d�tonations ont averti les habitants de Nancy que
nos braves artilleurs post�s sur les collines
tiraient sur un �� taube � qui essayait de venir
survoler la ville.
L'avion ennemi, s'apercevant qu'il �tait d�couvert,
s'empressait de faire demi-tour et de regagner les
lignes allemandes.
LEURS PERTES AUX �PARGES
Durant les deux derniers mois les pertes allemandes
auraient atteint l� 30.000 hommes. - Nous avions en
face de nous leurs meilleures troupes.
Paris, 10 avril, 15 heures.
Rien � ajouter au communiqu� d'hier soir.
Des rapports compl�mentaires arriv�s dans la nuit
relatent que les deux attaques qui nous ont rendus
ma�tres, hier, des derni�res positions allemandes
aux Eparges, ont donn� lieu � des combats acharn�s �
la ba�onnette.
Paris, 11 avril, 0 h. 58.
Communiqu� officiel du 10 avril, 23 heures :
Entre Meuse et Moselle, nous avons conserv� tout le
terrain gagn� et fait de nouveaux progr�s.
Entre l'Orne et la Meuse, il n'y a eu aucun
engagement.
Aux Eparges, l'ennemi n'a r�agi ni par son
infanterie ni par son artillerie. La journ�e a �t�
calme. La totalit� de la position est en notre
pouvoir.
Les d�clarations des prisonniers soulignent
l'importance de notre succ�s.
Les Allemands, depuis la fin de f�vrier, avaient
engag�, sur cette partie du front, toute la 33e
division de r�serve, puis vers la fin de mars, quand
cette division fut �puis�e, ils y envoyaient la 10e
division active du 5e corps d'ann�e, constitu�e avec
les meilleures troupes de leur arm�e. C'est cette
division qui vient de perdre une v�ritable
forteresse, �difi�e sur l'�peron des Eparges.
Ces troupes avaient re�u, � diverses reprises,
l'ordre de tenir co�te que co�te. Il leur avait �t�
sp�cifi� que la position �tait de la plus haute
importance et leur g�n�ral avait dit que pour la
conserver il sacrifierait �� la division, le corps
d'arm�e, cent mille hommes s'il le fallait �.
Les pertes subies aux Eparges par les Allemands,
dans les deux derniers mois, atteignent trente mille
hommes.
Dans le bois de Mortmare, nous avons enlev� une
nouvelle ligne de tranch�es et repouss� une
contre-attaque.
Au nord de Regni�ville, nous avons consolid� et
�largi l�g�rement notre position.
En Lorraine, une demi-compagnie qui, dans la nuit du
9 au 10 avril, avait pouss� jusqu'au village de
Bezange-la-Grande, situ� entre nos lignes et les
lignes allemandes, a �t� envelopp�e par des forces
sup�rieures et faite prisonni�re.
A HOUDELAINCOURT
Nous recevons de M. Mage, notaire a Houdelaincourt,
la lettre suivante :
�� Dans l'int�r�t de la v�rit�, afin de rendre � un
bon Fran�ais la justice qui lui est due, je vous
serai oblig� de rectifier l'article que vous avez
fait para�tre dans votre journal, relatant
l'incendie � la ferme de Toulon.
Votre correspondant vous fait dire que cette ferme ��
�tait afferm�e � un sieur Schmitt, sujet allemand,
qui, au d�but des hostilit�s, s'est empress� de
repasser la fronti�re �.
La v�rit� est toute autre.
Schmitt est Fran�ais, et bien Fran�ais. Il a fait
son service militaire en France, et, actuellement,
il est soldat et combat avec les n�tres contre
l'Allemagne, qu'il ex�cre, cela, je puis vous
l'assurer.
Son fr�re unique, qui a �galement fait son service
en France, combat aussi avec nous contre les
Allemands (le bruit a m�me couru qu'il �tait tu�).
Quant aux p�re et m�re Schmitt, qui sont encore
existants et habitent Horville, canton de
Gondrecourt (Meuse), ce sont de ces Alsaciens
r�int�gr�s dans leur qualit� de Fran�ais, qui
d�testent nos ennemis, plus qu'aucun de nous.
Ce pauvre Schmitt n'est peut-�tre pas m�me assur�
contre l'incendie, ou l'est insuffisamment. Ce sera
assez p�nible pour lui de faire cette perte et de
risquer sa vie tous les jours pour la France, que de
se voir encore traiter d'Allemand.
Je connais particuli�rement Schmitt et sa famille.
C'est moi qui lui ai lou� la ferme. C'est pourquoi
j'estime que je dois le d�fendre de cette
accusation, en son absence.
Le chiffre des pertes indiqu�es est bien inf�rieur �
la r�alit�, mais cela n'a pas d'importance. �
ENTRE MEUSE & MOSELLE
Progr�s au Bois Le Pr�tre et dans celui de Mortmare
Pas, 11 avril, 15 h 05.
En Belgique, sur l'Aisne et en Champagne, actions
d'artillerie.
Les progr�s entre Meuse et Moselle, signal�s dans le
communiqu� de Ce matin, sont confirm�s.
Au bois de Mortmare, le front conquis a �t� �tendu
vers l'Est par l'enl�vement de nouvelles tranch�es.
Plusieurs contre-attaques ont �t� repouss�es.
Au Bois-le-Pr�tre, une avance a �t� r�alis�e � la
lisi�re Ouest du te Quart en r�serve �. Une
mitrailleuse allemande a �t� prise.
La neige, la pluie et le vent ont fait rage presque
toute la journ�e.
�CHECS ALLEMANDS
pr�s d'Albert et dans l'Argonne
Paris, 12 avril, 3 heures.
Voici le communiqu� officiel du 11 avril, 23 heures:
Au Nord d'Albert, les Allemands ont prononc�, dans
la nuit du 10 au 11 avril, une attaque sur les deux
rives de l'Ancre, au centre de nos tranch�es de
Hamel et du bois de Thiepval. Ils ont �t� repouss�s
apr�s un combat corps � corps.
Dans l'Argonne, une lutte tr�s vive s'est d�roul�e
pendant toute la nuit. Nous avons d�moli un
blockhaus ennemi, pris trois cents m�tres de
tranch�es et maintenu notre gain, malgr� deux
contre-attaques allemandes.
Entre Meuse et Moselle, aucune action d'infanterie
n'est signal�e dans la r�gion des Eparges et de
Combres depuis notre succ�s du 9 avril.
Au bois d'Ailly, une attaque lanc�e dans la soir�e
du 10 avril, nous a rendus ma�tres d'une nouvelle
ligne de tranch�es.
Au bois de Mortmare, les Allemands ont r�ussi, dans
la nuit, � reconqu�rir les tranch�es qu'ils avaient
perdues au cours de la journ�e, mais les positions
que nous avions conquises le 8 avril demeurent tout
enti�res en notre possession.
Dans le bois Le-Pr�tre, � la lisi�re Ouest du ��
Quart en r�serve �, deux violentes contre-attaques
ennemies ont �chou� sous notre feu d'artillerie.
Nos avions ont lanc� des obus de 155 sur la gare
maritime et sur la fonderie de Bruges.
UN ZEPPELIN m NANCY
Six bombes pour un incendie
Pas de victimes
Nancy, 12 avril.
Dans la nuit de dimanche � lundi, par un ciel
magnifiquement constell� d'�toiles, Nancy a eu sa
seconde, visite de zeppelin. Il y avait bien eu, on
le sait, depuis le 26 d�cembre, un certain nombre
d'autres tentatives, mais les mastodontes a�riens
avaient toujours jug� prudent de ne pas d�passer les
points d'o� l'on peut efficacement les canonner. Il
�tait un peu plus d'une heure, lorsque deux fortes
d�tonations, pour ainsi dire accoupl�es, et bient�t
suivies d'une troisi�me, r�veill�rent, divers
quartiers de Nancy en sursaut.
On pourrait croire que, se conformant � de sages
recommandations, chacun s'�tait h�t� de descendre �
la cave, ou de gagner du moins les �tages
inf�rieurs.
Il n'en fut rien, pour la plupart des Nanc�iens, qui
s'empress�rent, au contraires de se mettre � leurs
fen�tres., afin de jouir du spectacle.
On ne pouvait cependant avoir aucun doute sur la
nature de cette alerte nocturne. On entendait tr�s
distinctement le bruit des moteurs, que l'on peut
comparer celui d'une batteuse ou encore d'une
locomotive haletant sur quelque plaque tournante mal
ajust�e.
Nos r�flecteurs inondaient le ciel d'immenses rubans
de clart�, tandis que les canons, tiraient de tous
c�t�s sur le bandit des airs.
Ce dernier jugea prudent de ne pas insister
davantage, et, sans prendre le temps de nous lancer
de nouveaux engins, il filait � toute vitesse vers
la fronti�re.
Un quart d'heure s'�tait � peine �coul� depuis son
apparition, que le bruit de ses moteurs
s'�vanouissait dans le lointain.
Le zeppelin, pendant son cours passage au-dessus de
Nancy, avait donc envoy� six bombes. H�tons-nous de
dire qu'elles n'ont fait heureusement aucune
victime. Mais elles ont provoqu� un incendie, deux
commencements d'incendie et les d�g�ts mat�riels
sont, assez importants.
Rue Victor
L'incendie s'est d�clar� rue Victor, 16, dans les
d�p�ts de M. Maurice, n�gociant en couleurs et
vernis, rue des Carmes. L�, dans un vaste enclos, se
trouvent trois constructions parall�les et
perpendiculaires � la rue. Elles renferment des
mati�res destin�es � la pr�paration des couleurs :
des alcools et des essences de p�trole et de
t�r�benthine, le tout, on le comprend,
essentiellement inflammable.
C'est dans le b�timent du milieu, construit en
planches, que la bombe incendiaire est tomb�e. En
peu d'instants, le feu s'est d�velopp�. Le
camionneur de M. Maurice, qui s'�tait, r�veill� au
bruit de la d�tonation, s'est lev� aussit�t - il
�tait alors 1 h. 25. Voyant que l'incendie prenait
des proportions, il s'est empress� d'appeler les
voisins, d'organiser les premiers secours et de
faire avertir les sapeurs-pompiers.
Ceux-ci, pr�venus quelques minutes auparavant qu'un
commencement d'incendie s'�tait d�clar� rue de la
Prairie, 13, dans les chantiers de MM. Bernanose et
Lhomm�e, entrepreneurs, s'�taient d�j� rendu � cette
adresse, mais l�, � leur arriv�e, tout �tait �teint.
Le lieutenant Collignon, qui commande les sapeurs,
aper�ut alors la vive lueur d'incendie des entrep�ts
de M. Maurice. Il se dirigea imm�diatement de ce
c�t�.
A son arriv�e sur les lieux, il organisa les secours
avec l'effectif de la compagnie accouru avec le
mat�riel au complet.
Le feu fut rapidement combattu. Apr�s une heure de
travail, nos braves sapeurs �taient ma�tres du
sinistre, malgr� la violence des flammes qui avaient
trouv� un aliment facile dans les mati�res enferm�es
dans le b�timent ; les autres constructions o� se
trouvaient des mati�res aussi dangereuses avaient pu
�tre pr�serv�s. Il y avait notamment un petit
b�timent, distant seulement de quelques m�tres, et
o� �taient emmagasin�es plusieurs pipes d'alcool et
des f�ts de benzine.
A deux heures et demie, les sapeurs rentraient � l�
caserne, laissant sur les lieux un piquet pour
continuer � arroser les d�combres.
Les d�g�ts sont assez importants. Ils peuvent �tre
�valu�s � cent mille francs environ.
A une trentaine de m�tres des magasins de M.
Maurice, � l'angle de la rue du Progr�s, une bombe
est tomb�e sur la chauss�e, o� elle a fait un trou
�norme d'une profondeur d'environ un m�tre sur trois
m�tres de diam�tre.
L'explosion fut particuli�rement violente. Un mur en
briques, �lev� en fa�ade de la rue du Progr�s,
s'effondra, sur une longueur de trois m�tres,
renvers�, laissant apercevoir l'int�rieur des
magasins de M. Henri Essig, fabricant de meules �
�meri.
La partie de la construction sur la rue Victor a �t�
disloqu�e, mais n'est pas tomb�e.
Fait qui m�rite d'�tre constat� : en explosant, la
bombe n'a envoy� que tr�s peu d'�clats, car les
maisons voisines ne portent presque pas de traces.
Une autre bombe explosive est tomb�e dans le pr�
situ� entre le boulevard d'Austrasie et la rue des
Chaligny, devant l'abattoir. Elle a creus�
simplement un �norme trou en terre.
Sur le quai du canal, devant les chantiers de M.
Kronberg, n�gociant en houilles, une bombe, en
explosant, a fait aussi au trou dans le sol,
soulevant les pav�s, brisant les rails d'une petite
voie ferr�e qui sert au d�chargement des bateaux.
Un morceau de la bombe a �t� lanc� avec une telle
force qu'il est all� retomber de l'autre c�t� du
canal, o� il a �t� retrouv�.
Rue de la Prairie, n� 13, une bombe incendiaire est
venue tomber sur un petit appentis peu �lev�,
construit en planches, en bordure de la rue. Elle a
travers� la toiture peur venir s'abattre sur le sol.
Au brait de la d�tonation, M. Bernanier, chef de
chantier de la maison Bernanose, qui habite la
maison voisine, s'est lev� et avec le plus grand
sang-froid, a ouvert la porte de la maisonnette
atteinte. Apercevant sur le sol une bombe en train
de br�ler en projetant une grande lueur, il l'a
saisie par l'anse, au risque de se br�ler et s'en
est all� la placer sous une fontaine du voisinage.
L'engin, une fois bien d�tremp�, a pu �tre rapport�
dans le chantier de M. Bernanose. Ajoutons qu'�
l'aide de quelques seaux d'eau, on avait pu �teindre
le l�ger commencement d'incendie, avant m�me
l'arriv�e des sapeurs-pompiers.
La derni�re bombe est venue s'abattre pr�s de la
panne fa�ti�re du toit de l'�cole maternelle du quai
de la Bataille. Apr�s avoir bris� quelques tuiles,
elle est all�e heurter le plancher du grenier, o� le
choc a provoqu� l'explosion, qui la fit rouler pr�s
du mur.
En achevant de br�ler, elle a communiqu� le feu au
plancher et au plafond de l'unique �tage, qu'elle a
travers�s pour s'abattre sur le plancher d'une
chambre � coucher, o� fort heureusement, il n'y
avait personne.
Le plancher a brul� tr�s lentement et c'est vers
quatre heures seulement que Mme Schwab la directrice
de l'�cole, qui couche dans une autre pi�ce, aper�ut
la lueur et qu'elle donna l'alarme.
Les pompiers accoururent. Ils purent rapidement
conjurer tout danger. Les d�g�ts caus�s � cet
immeuble sont peu importants.
Mme Schwab, qui est d�j� d'un certain �ge, habite
seule � la maison maternelle. Un peu apr�s une
heure, elle avait entendu la d�tonation produite par
la bombe, et avait cru que celle-ci �tait tomb�e
dans la cour ; justement, effray�e, elle n'avait pas
os� sortir de son lit. Ce n'est que lorsque
l'incendie se d�clara qu'elle prit la r�solution de
se lever.
Mme Schwab a d�j� �t� �prouv�e par la guerre, car un
de ses fils, capitaine d'infanterie, a �t� tu� au
d�but de la campagne, et ses autres enfants sont
encore sur le front.
Aussi, lorsqu'elle nous eut racont� les incidents de
cette nuit terrible, elle ajouta: �� Lorsque mes
enfants vont savoir cela, ils auront encore plus de
courage pour combattre et exterminer ces Allemands.
�
Puis, toute tremblante encore, Mme Schwab rentre
dans son logement, en maudissant les Barbares qui
commettent de tels m�faits, sans n�cessit�
militaire.
L'engin tomb� sur le quai du canal devait �tre
particuli�rement puissant, car un pav� en granit,
arrach� du sol, fut en partie bris� et projet�
jusqu'� la rue Lasalle, o� il tomba sur la toiture
de la maison portant le num�ro 26.
Il traversa la toiture et vint s'abattra sur le sol
de la cage de l'escalier, sans causer d'autre d�g�t,
ni d'accident de personne. Ce morceau de pierre p�se
deux kilogrammes cinq cents grammes.
Beaucoup de Nanc�iens �taient sortis dans la rue au
bruit des d�tonations. Ils ont pu constater que le
dirigeable ennemi avait �t� parfaitement rep�r� par
nos projecteurs, et c'est sans doute pour cela qu'il
s'�loigna sans avoir �puis� l'habituelle provision
de bombes.
Lundi matin, Nancy avait sa physionomie laborieuse
et calme de tous les jours.
Nous avons organis� nos gains
ENTRE MEUSE et MOSELLE
UNE BONNE PRISE
Paris, 12 avril, 15 heures.
Il n'a pas �t� signal� d'action d'infanterie pendant
la journ�e du 11 avril.
En Belgique, sur l'Ancre, entre l'Oise et l'Aisne et
en Champagne, canonnades de part et d'autre.
Entre Meuse et Moselle, nous nous sommes organis�s
sur les positions conquises par nous au cours des
combats pr�c�dents. L'ennemi n'a pas contre-attaqu�.
Nous avons, le 10 avril, au bois d'Ailly et au bois
Le-Pr�tre, pris cinq mitrailleuses et un
lance-bombes.
Des Eparges au Bois Le Pr�tre
ILS NOUS
contre-attaquent mais vainement
Paris, 13 avril, 0 h. 02.
Voici le communiqu� du 12 avril, 23 heures :
Aux Eparges, pendant la nuit du 11 au 12 avril,
apr�s une canonnade et une fusillade assez vives,
les Allemands ont contre-attaqu� � 4 h 30 et ont �t�
repouss�s.
Au bois d'Ailly, dans la r�gion de Flirey, actions
d'artillerie violentes, mais sans engagement
d'infanterie.
A u bois Le-Pr�tre, le 11 avrils vers vingt heures,
une tentative d'attaque de l'ennemi, dans la partie
du �� Quart de r�serve �, a �t� facilement enray�e.
Au cours de la journ�e du 12 avril, nous avons
chass� les Allemands d'un �l�ment de tranch�e d'une
ligne pr�c�demment conquise et dans lequel ils
avaient r�ussi � se maintenir.
Dans la nuit du 11 au 12 avril, vers 1 h. 30, un
dirigeable allemand a jet� sur Nancy sept bombes,
dont une est tomb�e pr�s de l'h�pital civil et une
autre pr�s d'une �cole. Deux commencements
d'incendie ont �t� rapidement �teints.
LE ZEPPELIN ET LES TAUBES
Nancy, 13 avril.
Dans la matin�e de lundi, plusieurs habitants de
notre ville ont signal� qu'en plus des six bombes
dont on avait retrouv� les traces � la premi�re
heure, d'autres engins avaient �t� lanc�s par le
zeppelin, pendant son court passage au-dessus de
Nancy.
Dans la rue du Mar�chal-Oudinot, � l'angle du
boulevard d'Alsace Lorraine, une bombe est tomb�e
dans un jardin au pied d'un arbre en faisant un
simple trou en terre.
A peu de distance de l�, dans la propri�t� de
Saurupt, appartenant � M. de Villars, un autre
projectile n'a �galement fait aucun mal.
Rue du Montet, n� 13, un engin a travers� la toiture
d'un atelier de la manufacture de chaussures de M.
Laurent. Il est all� s'abattre sur une table,
provoquant un commencement d'incendie, qui a �t�
rapidement �teint par M. Laurent � l'aide de
quelques seaux d'eau. La table et quelques paires de
chaussures ont �t� d�truites ; plusieurs carreaux
ont �t� bris�s.
Une autre bombe s'est abattue dans le jardin de
l'hospice Saint-Julien devant la chapelle. L�
encore, il n'y a eu qu'une petite excavation dans la
terre.
Enfin, pr�s de la Meurthe, dans le prolongement du
boulevard d'Austrasie, un projectile a creus� aussi
son trou.
Sur le territoire de Tomblaine, au lieu dit La
M�chelle, plusieurs bombes sont tomb�es dans les
pr�s. Deux ont fait explosion. Le r�sultat a �t� des
excavations assez vastes.
Enfin, � Vandoeuvre et � Nab�cor, deux bombes sont
venues s'abattre, l'une dans un jardin, l'autre dans
une cour pr�s d'un b�timent. Il n'y a eu aucun
d�g�t. Pr�s de la ferme de Brichambeau, un
projectile a fait aussi une excavation dans un
champ.
Gomme on peut le constater, � part les d�g�ts caus�s
rue Victor et rue du Progr�s, la visite du zeppelin
n'a eu pour les Allemands aucun r�sultat pratique.
Quant � la population de notre ville, on peut
r�p�ter qu'elle a tout son sang-froid et n'a �t�
nullement impressionn�e. Lundi, chacun �changeait
tranquillement ses impressions sur cette visite
nocturne.
Nous avons eu la visite des taubes.
Dans la matin�e de lundi, vers sept heures et demie,
trois avions ennemis, qui essayaient de traverser
nos lignes du c�t� de Frouard ont �t� accueillis par
une vive canonnade. Tous trois se sont empress�s de
regagner leurs hangars.
Dans l'apr�s-midi, � quatre heures, un taube venant
du c�t� de Seichamps a �t� �galement canonn� et
s'est empress� de fuir au plus vite, pour �chapper �
nos projectiles, dans prendre le temps de nous
apporter les siens.
Lutte de mines et de grenades
DE TRANCH�E A TRANCH�E
Nos avions sur Vigneulles
Paris, 13 avril, 15 h. 05.
De la mer � l'Aisne, rien � signaler, si ce n'est
quelques actions d'artillerie.
A l'est de Berry-au-Bac, nous nous sommes empar�s
d'une tranch�e allemande.
En Argonne, luttes de mines et combats � coups de
bombes et de grenades d'une tranch�e � l'autre.
Entre Meuse et Moselle, journ�e relativement calme.
Nos troupes sont parvenues en plusieurs points au
contact du r�seau de fils de fer de la d�fense
ennemie.
Paris, 14 avril, 1 heure.
Le communiqu� officiel du 13 avril, 23 heures, dit :
Journ�e calme sur l'ensemble du front.
Nous avons maintenu et consolid� nos positions sur
les divers points o� nous avons progress� depuis
huit jours.
Nos avions ont bombard�, avec succ�s les hangars
militaires de Vigneulles-en-Wo�vre, et dispers� non
loin de l� un bataillon allemand en marche.
INT�GRAL ?
Nancy, 14 avril.
Pendant que nos soldats combattent pour d�fendre la
Patrie, il est bon que les civils pr�parent ou
r�tablissent pour eux les foyers d�laiss�s et dont
quelques-uns ont �t� d�truits.
Ce n'est pas une oeuvre vaine de pol�mique que l'on a
entreprise en sollicitant, en exigeant du
gouvernement, et des repr�sentants du peuple la
r�paration des dommages caus�s par la guerre. La
justice n'existerait pas si elle ne commandait �
tout le pays de donner aux combattants qui
reviendront et � leurs familles la possibilit� de
reprendre avec courage et confiance le travail que
le salut national a interrompu.
La Lorraine a �t� pour une grande partie envahie,
bombard�e, pill�e, d�vast�e, br�l�e. Il faut qu'elle
revive comme elle vivait avant, et que les cruels
sacrifices ardemment consentis ne soient pas
aggrav�s par la-perte de ce qui est le motif
principal de vivre.
Le principe a �t� adopt� par le gouvernement. Mais
il a �t� entour� de telles r�ticences, d'une si
obscure explication que certaines personnes se
demandent avec angoisse si la promesse formelle aura
sa r�alisation compl�te. Nous avons trop de foi en
la R�publique pour en douter un seul instant.
Pourtant, afin que n'existe plus aucune ambigu�t�,
ni aucune crainte, disons ce qui est n�cessaire de
dire.
Certains s'effarent un peu devant le mot �� int�gral
� que nos amis veulent ajouter au mot �� r�paration
�. Ils estiment que ce serait aller trop loin, qu'on
peut ainsi demander r�paration non point seulement
des dommages mat�riels et constat�s, mais aussi des
r�percussions plus ou moins indirectes, et aussi du
�� manque � gagner �.
- Prenons, disent-ils, l'exemple des chapeaux de
paille. Il n'est pas contestable que la guerre en a
arr�t� la fabrication. Devrons-nous aussi payer ce
dommage ?
C'est pousser trop loin la logique. En demandant la
r�paration int�grale des dommages caus�s par la
guerre, nous n'entendons pas que l'on rembourse �
tous les Fran�ais ce que la guerre leur a enlev� de
b�n�fices � bon droit escompt�s. Les commer�ants que
la guerre aura enrichis n'ont nullement l'intention
de rendre l'argent qu'ils auront gagn�. Il ne
saurait donc �tre question de d�bourser des millions
pour les commer�ants ou les industriels qui auront
�t� pendant la campagne priv�s de leurs b�n�fices
habituels.
Mais ce que nous demandons, c'est que le
propri�taire de toute maison incendi�e, bombard�e ou
pill�e, soit d�dommag� int�gralement. C'est que le
possesseur ou le fermier d'un champ dont la r�colte
a �t� ravag�e par la bataille soit d�dommag�
int�gralement.
C'est que la famille dont le foyer a �t� d�truit ou
d�t�rior� soit d�dommag�e int�gralement.
C'est que le soldat, apr�s la victoire, ait �
nouveau en ses mains int�gralement le bien qu'il
faisait fructifier, et les moyens de le travailler.
Il a donn� son coeur, son corps, son sang � la
patrie. Il s'est vou� enti�rement � sa d�fense. La
patrie pendant la paix a en �change le devoir de le
d�fendre aussi.
- Mais alors, objecte-t-on, si un collectionneur a
�t� par l'envahisseur d�poss�d� de la collection de
timbres qu'il avait amoureusement rassembl�e dans
son ch�teau maintenant incendi�, il faudra lui payer
sa collection de timbres qu'il estimera un ou deux
millions ? O� irons-nous ?
Eh! oui il faudra lui payer ses timbres non pas au
prix qu'il estimera, mais � dire d'experts. Et on
n'ira pas plus loin que la justice.
Que comptent d'ailleurs les belles collections, dans
le r�glement final, au regard de toutes les
chaumi�res, de toutes les fermes, de toutes les
maisons br�l�es ou d�molies, des r�coltes perdues,
des sources nourrici�res taries dans les r�gions
envahies ? Quand vous aurez donn� quelques millions
pour les collections, enlev�es, cela n'ajoutera pas
grand'chose aux milliards que vous devez donner �
l'agriculture, au commerce, � l'industrie que les
Allemands ont r�duits � rien dans certaines
contr�es.
Ne laissons pas d�vier une id�e de justice vers
l'examen sp�cieux des sophismes.
Les propri�taires expuls�s par la fusillade, la
canonnade ou les n�cessit�s militaires, les
commer�ants ruin�s par la guerre, les industriels
dont les usines ont �t� arr�t�es ont droit � la
justice. La justice, en cette circonstance, est la
r�paration int�grale des dommages.
Que l'on remplace �� int�gral � par un autre mot, si
l'on veut. Nous ne tenons pas � la formule. Nous ne
r�clamons que le droit, mais le droit pr�cis, et
�crit dans une loi claire.
Ren� MERCIER.
LA BATAILLE DU GRAND-COURONN�
Nancy, 14 avril.
Nous partons de Nancy � huit heures et demie du
matin. C'est le 4 mars. Le ciel, gris d'abord, un
petit soleil de premier printemps va l'�clairer. Des
automobiles militaires, servies par des chauffeurs
de l'�tat-major, sont mises � notre disposition.
Elles filent vers l'est sur la route nationale, qui
tend � la Lorraine annex�e, et auraient bient�t
pass� la fronti�re, nous conduisant �
Ch�teau-Salins, Morhange et Sarreguemines, si les
tranch�es allemandes n'�taient pas l�, sur l'autre
rive de la Seille.
D�s qu'on est sorti de la ville, le regard fouille
un vaste horizon. La contr�e est tr�s ouverte et
sem�e de collines de grand relief. Les prairies,
d'aspect maigre, alternent avec les bois d�feuill�s.
Les villages et les maisons isol�es sont assez
rares. La vue est ferm�e devant nous � quinze ou
vingt kilom�tres par une cr�te en demi-cercle,
qu'occupent encore les Allemands. Bien qu'aucun
engagement important ne se livre dans la journ�e, le
canon tonne � notre gauche, vers le bois Le Pr�tre,
au nord de Pont-�-Mousson, devant nous, pr�s de
Nomeny.
Nous faisons halte sur un tertre, o� l'officier
d'�tat-major commis � ce soin nous explique la
bataille qui pr�serva Nancy de l'occupation
allemande. Il faut d'abord la situer dans l'histoire
de la guerre pour en montrer l'importance et les
r�sultats.
La deuxi�me et la troisi�me semaines d'ao�t avaient
�t�, pour l'arm�e fran�aise, heureuses et presque
faciles. La double offensive pr�vue par l'�tat-major
progressait. L'arm�e du g�n�ral Pau, apr�s s'�tre
rendue ma�tresse des d�fil�s des Vosges, passait en
Alsace. Mulhouse avait �t� une seconde fois occup�e
et Les avant-gardes avaient atteint les acc�s de
Colmar. Dans la Lorraine annex�e, les arm�es du
g�n�ral Sarrail et du g�n�ral de Castelnau, une fois
le Donon, sommet septentrional des Vosges, en leurs
mains, avaient pouss� hardiment dans le terrain qui
s'�tend au sud de Metz. D'abord, tout alla bien ; au
del� de la Seille, les Fran�ais avaient, le 19 ao�t
au soir, atteint Delme, Dieuze et Morhange. Ils ne
s'�taient heurt�s qu'� des troupes de couverture.
C'est le 20 que commen�a la malempar�e. Plusieurs
corps d'arm�e allemands attaqu�rent tout � coup. La
droite fran�aise c�da la premi�re, entra�nant apr�s
elle le centre et la gauche, qui pouvaient �tre
d�bord�s. Le grand �tat-major allemand lan�a le 21
ao�t un bulletin triomphant :
Conduites par le prince h�ritier de Bavi�re, des
troupes appartenant � toutes les races germaniques
ont remport� hier une victoire dans des batailles
livr�es avec des forces consid�rables entre Metz et
les Vosges.
L'ennemi s'avan�ant en Lorraine a �t� rejet� avec de
grosses pertes sur toute la ligne.
Le succ�s total ne peut pas �tre encore appr�ci�,
attendu que l'�tendue du champ de bataille est plus
grande que ne le fut celle des luttes de toutes nos
arm�es en 1870-1871.
Anim�es d'un �lan irr�sistible, nos troupes
poursuivent l'ennemi et continuent � le combattre
aujourd'hui.
Le lendemain, 22 ao�t :
Les troupes fran�aises battues hier entre Metz et
les Vosges ont �t� poursuivies et leur retraite a
d�g�n�r� en fuite. Jusqu'ici, plus de dix mille
prisonniers ont �t� faits et au moins cinquante
canons pris. Les forces ennemies battues
comportaient plus de huit corps d'arm�e.
L'empereur adressait au roi de Bavi�re une d�p�che
de f�licitations pour les haut faits du prince
Ruprecht. A Munich, devant le palais des
Wittelsbach, ce fut un d�lire et, du haut de son
balcon, le roi Louis III haranguait la foule en ces
termes:
Je suis fier de voir mon fils remporter de si beaux
succ�s � la t�te de ses vaillantes troupes ; mais
ceci n'est qu'un d�but. De grandes victoires nous
attendent encore. J'ai la confiance dans la qualit�
de l'arm�e allemande, qui restera victorieuse quel
que soit le nombre des ennemis.
Eh bien ! la bataille du Couronn� de Nancy devait
pourvoir � ce que les Allemands fussent arr�t�s net,
sur la fronti�re m�me, apr�s leur victoire de Metz,
comme ils disent, de Morhange, comme l'appellent les
Fran�ais.
Ce r�sultat allait permettre � Joffre de rallier son
arm�e sur la Marne, quand venant de Belgique les
Allemands eurent d�bord� sur le Nord de la France
apr�s la bataille de Charleroi. Sans la r�sistance
du Grand-Couronn�, ce formidable coup d'arr�t e�t
�t� impossible. Avan�ant de l'Est � l'Ouest les
Allemands eussent franchi la trou�e de Charmes et
d�bord� la droite du g�n�ralissime, rendant sa
position intenable, soit, qu'ils eussent march�
droit devant eux vers l'Ouest., soit qu'ils eussent
pris le plateau de Langres pour objectif. Joffre
aurait d� reculer au moins jusqu'� la ligne de la
Seine.
L'arm�e imp�riale comptait bien cueillir rapidement
les fruits de son succ�s du 20 ao�t. Le premier qui
s'offrait �tait de choix : Nancy. Cette ville n'est
pas une forteresse. En 1870, elle fut occup�e, sans
coup f�rir, par une avant-garde de uhlans. On la
consid�rait comme sacrifi�e. Si les Allemands
prenaient l'offensive, c'est derri�re la ligne
Epinal-Toul-Verdun et les Hauts-de-Meuse que l'arm�e
pourrait opposer une premi�re r�sistance efficace.
La litt�rature militaire fran�aise ne le mettait pas
en doute. La litt�rature militaire allemande, moins
encore. Si bien que certaines cat�gories de
r�servistes avaient, d�s le d�but de la guerre, re�u
l'ordre de rejoindre leur corps � Nancy, dans les
derniers jours d'ao�t. Une entr�e triomphale sur la
place Stanislas, l'une des plus �l�gantes de
l'Europe avec sa ceinture de grilles dor�es �tait
pour sourire � Guillaume II. Nancy, Nanzig, comme
ils disent, devait devenir, apr�s la paix, une ville
allemande, capitale de la Westfranken, ou Franconie
occidentale. Le 22 ao�t l'empereur arrivait � Delme,
avec le r�giment des cuirassiers blancs, pour
pr�parer ce grand spectacle.
Qui donc e�t imagin� qu'apr�s huit mois de guerre se
d�roulant en majeure partie sur le sol fran�ais,
Nancy serait encore inviol�e et confiante? C'est une
surprise, presque un miracle. Comment la bataille du
Grand-Couronn�, dont les r�sultats furent si
d�cisifs, n'a-t-elle pas, d�s aujourd'hui, sa place
au rang des plus m�morables ?
J'avais cru que le Grand-Couronn� �tait un ensemble
de travaux du g�nie construits � loisir en temps de
paix. Il n'en est rien. C'est une position naturelle
renforc�e, o� il fallait, par des ouvrages de
campagne h�tifs. Supposez une demi-lune, un
demi-cercle de hauteurs, les unes bois�es, les
autres d�nud�es, prot�geant Nancy du Nord au Sud, la
Meurthe sinueuse, large et lente en formant la
corde. Il commence au Nord, vers Pont-�-Mousson,
pour se fermer au Sud vers Saint-Nicolas-du-Port,
Dombasle et la for�t de Vitrimont. Les collines dont
il est fait sont �lev�es d'une centaine de m�tres,
tr�s allong�es, � pentes sym�triques, sans angles
morts, avec de grands champs de tir.
Le g�n�ral de Castelnau avait pour mission de
d�fendre le Grand-Couronn�.
Il disposait � cet effet de quatre corps d'arm�e,
ceux qui avaient combattu � Morhange, o� les
d�p�ches officielles allemandes pr�tendaient en
avoir mis huit �� en fuite �. C'�taient les 9e, 15e,
16e et 20e corps. Ils �taient appuy�s par trois
divisions de r�serve, la 68e, la 59e et une autre
dont le num�ro m'�chappe. Les Fran�ais �taient donc
un peu moins de deux cent mille.
L'attaque allemande se produisit sur deux directions
principales. L'arm�e du prince royal de Bavi�re,
venant de Delme, avait pour objectif le secteur nord
du Grand-Couronn� ; des �l�ments de la garnison de
Metz et l'arm�e du g�n�ral Heeringen, venant de
Sarrebourg et de Dieuze, devaient attaquer, en
partie directement sur Nancy, par la for�t de
Champenoux, en partie plus au sud, par Cirey,
Bl�mont, Badonviller, Baccarat, Gerb�viller,
tournant la droite de la position fran�aise.
Cette aile de l'arm�e �tait beaucoup la plus
avanc�e, puisque apr�s un vif combat, elle occupa
Lun�ville le 21 ao�t.
Je ne puis retracer toutes les phases de la
bataille, qui, avec des accalmies, dura une douzaine
de jours et ne fut achev�e que vers le 6 au 7
septembre, avant - notons-le bien - qu'e�t commenc�
la bataille de la Marne.
L'arm�e venant de Delme vint se heurter au sud de
Mousson, au mont Sainte-Genevi�ve, qui commande la
vall�e de la Moselle. Apr�s des combats r�p�t�s,
dont plusieurs corps � corps furieux, l'attaque fut
abandonn�e le 7 septembre. Depuis lors, l'arm�e
allemande a recul� de quelques kilom�tres. Les m�mes
troupes tiraillent encore chaque jour dans le bois
Le Pr�tre, dont nous entendons distinctement le
canon.
Ce n'est pas cette partie du grand champ de bataille
que nous avons parcourue, mais la partie sud.
L'officier qui nous sert de guide la raconte de la
fa�on la plus saisissante, sans grand d�ballage de
d�tails tactiques, mais nous montrant ce qu'il a vu.
�� Notre �tat-major �tait l�. A l'aide de nos
jumelles, nous avons aper�u les premiers Allemands
sortant de la lisi�re de ce grand bois, l�-bas, �
gauche. Alors nos 75, en batterie derri�re cette
cr�te, ont ouvert le feu. � Et ainsi de suite.
Racont�e de la sorte, sur les lieux, par un t�moin
bien disant et expert; le r�cit prend vie et nous
voyons les principaux �pisodes de la bataille.
A notre gauche, se dresse le Grand-Mont d'Amance,
avec un village entre le Petit et le Grand-Mont,
comme Monnetier entre le Petit et le Grand-Sal�ve.
Il a jou� pour le secteur sud le r�le sauveur du
mont Sainte-Genevi�ve pour le secteur nord, bien
qu'il ait �t� �cras� d'obus, plusieurs jours durant,
par des batteries lourdes allemandes qu'on
n'arrivait pas � rep�rer et auxquelles il e�t �t� du
reste inutile de chercher � r�pondre, puisque leur
port�e �tait plus longue que celle des pi�ces dont
les Fran�ais disposaient alors.
Un des �pisodes les plus sanglante fut rentr�e en
ligne de la brigade de Toul form�e des 168� et 169e
de ligne.
�� Elle �tait dans ce bas-fond. Elle a re�u l'ordre
de traverser l�, � gauche de la route, ce saillant
de la for�t de Champenoux, puis, arriv�e � l'autre
lisi�re, de gravir � couvert la pente qui aboutit au
petit plateau que vous voyez, de le traverser, de
franchir la route et de marcher sur le bois
d'Erb�viller, qui s'�tend � droite. Nous suivions
d'ici tout ce mouvement La brigade s'est calmement
d�ploy�e: Nous l'avons vue peu � peu dispara�tre
sous bois. Pas un coup de canon. Pas un coup de
fusil. Apr�s une longue attente, ses lignes ont
�merg� de la for�t, � l'angle fix�. Apr�s une
conversion bien ex�cut�e pour prendre la nouvelle
direction, elle a gravi le coteau en ordre, toujours
sans �tre inqui�t�e. Mais, quand elle a d�bouch� sur
le petit plateau, nous l'avons vue fauch�e en
quelques minutes. A la lisi�re du bois d'Erb�viller,
les Allemands avaient soigneusement dissimul� douze
mitrailleuses qui, tout � coup, sans que rien e�t
r�v�l� leur pr�sence, se mirent � cracher � trois ou
quatre cents m�tres. Leurs gerbes de balles
balayaient le sol. En vain nos hommes se jetaient �
terre pour riposter. Ils �taient touch�s � la t�te.
Quelques-uns avaient mis leur sac devant eux.
Rempart illusoire. Presque tout ce qui avan�ait au
sommet du coteau est tomb�. La terrasse �tait
encombr�e de morts et de bless�s qui se touchaient
tous sur plusieurs centaines de m�tres carr�s... �
Nous allons voir. Sept mois ont pass� et les traces
du charnier restent toujours apparentes. D'abord ce
sont de longues, longues tombes anonymes, o� des
centaines de jeunes hommes dorment c�te � c�te. Une
croix surmont�e d'un k�pi rouge, parfois aussi d'une
ceinture bleue, et quelques inscriptions sommaires.
Nous nous d�couvrons, la gorge serr�e.
Le canon du bois Le Pr�tre, � quelques kilom�tres,
nous rappelle qu'il s'agit, non d'un �mouvant
spectacle d'histoire, mais de la r�alit� pr�sente et
toute voisine.
(Journal de Gen�ve) ALB. B.
LA FIN D'UN TAUBE
Nancy. 14 avril.
Mardi matin, un taube, venant de la fronti�re,
semblait se diriger sur Lun�ville, Il fut aper�u par
un de nos avions, qui lui livra aussit�t line chasse
acharn�e.
Le taube, atteint probablement dans son r�servoir
d'essence, ne tarda pas � prendre feu et alla
s'abattre pr�s de Croismare.
Les uns disent que les deux officiers qui le
montaient ont �t� carbonis�s ; d'autres assurent
qu'ils sont seulement bless�s et faits prisonniers.
CALME SUR LE FRONT D'OCCIDENT
Un Zeppelin a tu� trois civils et nous avons abattu
trois avions allemands
Paris, 14 avril, 15 h. 15.
Rien � signaler depuis le communiqu� de ce matin.
Un zeppelin a jet� des bombes au-dessus de Bailleul.
Il visait le terrain d'aviation qu'il n'a pas
atteint Trois civils ont �t� tu�s.
Deux avions allemands ont �t� oblig�s d'atterrir
dans nos lignes, l'un pr�s de Braine, l'autre pr�s
de Lun�ville. Les aviateurs ont �t� faits
prisonniers.
Un troisi�me appareil ennemi, atteint par le feu de
nos avant postes, est tomb� pr�s d'Ornes (nord de
Verdun), � six cents m�tres de nos lignes. Un des
aviateurs a �t� atteint par une balle.
CONTRE-ATTAQUE ALLEMANDE
Ils sont arr�t�s et repouss�s, � Perthes, aux
Eparges, au bois d'Ailly et au bois de Mortmare.
Paris, 15 avril, 0 h. 15.
Voici le communiqu� officiel du 14 avril, 23 heures
:
Pr�s de Berry-au-Bac, nous avons enlev�, hier soir,
une tranch�e allemande que l'ennemi a reprise;
pendant la nuit. Nous avons pu nous installer �
proximit� dans une tranch�e nouvelle.
En Champagne, dans la r�gion de Perthes, un
d�tachement d'infanterie allemande a tent� de sortir
de ses tranch�es. Il a �t� arr�t� sur place par
notre feu.
Aux Eparges, une contre-attaque allemande a
d�bouch�, hier soir, de Cambres. Elle a �t�
imm�diatement arr�t�e par notre artillerie.
Dans le bois d'Ailly, nous avons �largi notre front
et repouss� une contre-attaque.
Dans le bois de Mortmare, nous avons progress� �
l'ouest de notre ligne et repouss� deux
contre-attaques. Nous avons fait des prisonniers,
pris un canon de 37 et beaucoup de fusils et de
munitions sont rest�s entre nos mains.
NOUVEAUX PROGR�S DE L'ARGONNE � L'ALSACE
Paris, 15 avril, 15 h. 15.
Pr�s de La Boisselle, notre artillerie lourde a
compl�tement boulevers� les tranch�es et les abris
de l'ennemi, � Ovillers.
En Argonne, pr�s de. Fontaine-aux- Charmes, une
action toute locale, de tranch�es � tranch�es, s'est
poursuivie � notre avantage. Notre ascendant sur
l'ennemi s'affirme de plus en plus dans ce secteur.
Aux Eparges, l'ennemi a bombard� nos positions, mais
n'a pas attaqu�.
Au bois d'Ailly, nos derniers progr�s nous ont
rendus ma�tres d'une partie de la tranch�e
principale allemande, et, au nord de cette tranch�e,
d'une bande de terrain de 400 m�tres de long sur 100
m�tres de profondeur.
Pr�s de la route Essey-Flirey-bois de Mortmare, la
nouvelle tranch�e que nous avons conquise est
toujours en notre pouvoir.
Pr�s de Fey-en-Haye, bombardement sans attaque
d'infanterie.
Au bois Le-Pr�tre, apr�s avoir conquis, le 13, une
partie de la ligne ennemie, nous avons, hier,
maintenu nos gains et arr�t� une contre-attaque.
En Alsace, au nord le la Lauch, nous avons progress�
de quinze cents m�tres dans la direction du
Schnepfenriethkopf, au sud-ouest de Metzeral.
BRILLANT SUCC�S PRES DE NOTRE-DAME-DE-LORETTE
Leur acharnement inutile, de la Meuse � la Moselle,
surtout aux Eparges, dans le bois de Mortmare et au
bois Le Pr�tre
Paris, 16 avril, 1 heure.
Communiqu� officiel du 15 avril, 23 heures :
Au nord d'Arras, nous avons remport� un brillant
succ�s, qui compl�te celui du mois dernier. Tout
l'�peron sud-est de Notre-Dame-de-Lorette a �t�
enlev� � la ba�onnette par nos troupes, qui tiennent
maintenant la totalit� des pentes du sud-est,
jusqu'� lia lisi�re d'Ablain-Saint-Nazaire. Nous
avons fait 160 prisonniers, dont plusieurs
officiers, et pris trois lance-bombes et deux
mitrailleuses.
A Thi�val et � La Boisselle, dans la r�gion
d'Albert, l'ennemi a tent� deux attaques, qui ont
�t� imm�diatement arr�t�es.
En Argonne, � Bagatelle, notre artillerie a d�moli
la tranch�e principale des Allemands.
Plus � l'est, aux Nourrissons, nous avons repouss�
une attaque.
Aux Eparges, l'ennemi a contre- attaqu� trois fois,
dans la nuit de mercredi � jeudi, pour nous
reprendre le saillant est, mais il a �t� repouss� et
a subi de fortes pertes.
A midi, il a violemment bombard� nos positions, mais
il n'a pas attaqu�.
Dans le bois de Mortmare, nous avons repouss� une
contre-attaque et poursuivi sur le terrain conquis
le 13, l'inventaire de notre butin qui se compose de
deux canons-revolvers, de deux lance-bombes, d'une
mitrailleuse, de plusieurs centaines de fusils et de
milliers de cartouches et de grenades.
Dans le bois Le-Pr�tre, nous avons repouss� une
attaque et fait des prisonniers.
UN TAUBE ABATTU
Paris, 16 avril, 15 heures.
Aucune action nouvelle sur le front depuis le
communiqu� de ce matin.
Notre artillerie a abattu, hier apr�s-midi, un avion
qui est tomb�, en face des lignes anglaises en
arri�re des, tranch�es allemandes, au nord d'Ypres.
LEUR RAGE INUTILE CONTRE
Notre-Dame-de-lorette et les Eparges
Succ�s d'artillerie � Mortmare
Paris, 17 avril, 0 h. 40.
Voici le communiqu� officiel du 16 avril, 23 heures
:
A Notre-Dame-de-Lorette, les Allemands ont
contre-attaqu� trois fois, en pr�parant chaque
contre-attaque par un violent bombardement. Ils ont
�t� toutes les fois arr�t�s.
Ils ont �chou� �galement dans une tentative de
contre-attaque aux Eparges, la nuit derni�re.
Au bois de Mortmare, combat d'artillerie. Nous avons
r�duit au silence trois batteries et fait sauter un
d�p�t de munitions.
UN TAUBE SUR BELFORT
Pars, 17 avril, 18 h. 05.
BELFORT. - Ce matin, � neuf heures, un avion
allemand a survol� Belfort, � une tr�s grande
hauteur. Il a jet� trois bombes. L'une d'elles, en
�clatant, a bless� mais peu gri�vement un homme et
une femme. Les deux autres n'ont caus� que des
d�g�ts mat�riels insignifiants.
Vivement canonn� par les forts et pourchass� par un
de nos aviateurs, le taube a regagn� vite les lignes
allemandes.
NOS VAILLANTS AVIATEURS
Ils bombardent une fabrique d'obus une poudrerie et
une usine d'�lectricit� puis battent, au retour, 3
aviatiks
Paris, 17 avril.
Notre aviation s'est montr�e tr�s active. Dix bombes
ont �t� jet�es sur les ateliers du chemin de fer �
la gare de L�opoldsthohe, � l'est de Huningue,
actuellement utilis�s pour la fabrication des obus.
Dix obus mit �t� lanc�s sur la poudrerie de
Rothweil. Six ont port�. Une grande flamme rouge
s'est �lev�e, surmont�e d'une �paisse fum�e. Nos
aviateurs ont re�u des �clats d'obus dans leur
appareil mais ils sont rentr�s sains et saufs.
Quarante obus, dont la plupart ont port�, ont �t�
jet�s sur le central �lectrique de
Maizi�res-les-Metz, � quinze kilom�tres au nord de
Metz, usine qui fournit la force et l'�clairage � la
ville et aux forts de Metz. Une �paisse fum�e s'est
�lev�e du b�timent central.
A leur retour, nos aviateurs rencontrant trois
aviatiks leur ont donn� la chasse et les ont forc�s
� atterrir.
Ils n'ont eu aucun accident, malgr� la violente
canonnade des forts de Metz.
LE 88e BOMBARDEMENT DE PONT-A-MOUSSON
Pont-�-Mousson, 17 avril.
Un de nos confr�res re�oit des d�tail sur le 88e
bombardement de Pont-�-Mouson, qui a eu lieu lundi :
�� Lundi, vers six heures du soir, alors que les
habitants vaquaient tranquillement � leurs
occupations, des obus siffl�rent. Une dizaine de
projectiles de gros calibre (du 210) tomb�rent sur
la ville, en diff�rents endroits.
La maison qui abrite les bureaux de la r�gie eut sa
fa�ade endommag�e, ainsi que les maisons voisines.
Beaucoup de vitres bris�es et quelques arbres
mutil�s.
Un �clat d'obus fracassa le bras gauche du jeune
Baillard, �g� de 18 ans. Transport� � l'ambulance la
plus proche, ce jeune homme re�ut les soins
n�cessaires et son �tat est aussi satisfaisant que
possible.
Un projectile a �clat� dans une courette, causant
des d�g�ts mat�riels tr�s importants dans les
maisons Mar�chal, Demairon, Toussaint et Sellier, o�
heureusement il n'y a pas eu de victimes. Les murs
sont en partie �croul�s ou souffl�s, gondol�s comme
du carton. Les logements des �tapes sup�rieurs sont
inhabitables, remplis des d�combres de la toiture.
Mme Mar�chal a d� �vacuer son logement, qui ne
pr�sente plus de s�curit�, certaines cloisons �tant
pr�tes � tomber au moindre choc ; plusieurs poutres
des appartements ont �t� arrach�es par la force de
l'explosion et projet�es � quelques m�tres plus
loin.
Mardi les Allemands ont encore bombard�
Pont-�-Mousson avec des pi�ces de gros calibre.
La malheureuse petite ville en est � son 88e
bombardement. �
NOS SUCC�S DE LA SOMME A L'ALSACE.
Paris, 17 avril, 15 heures.
Rien n'a �t� signal� depuis le communiqu� de ce
matin.
Paris, 18 avril, 1 h. 04
Communiqu� officiel du 17 avril, 23 heures :
A Notre-Dame-de-Lorette, nous avons arr�t� net, dans
la nuit de vendredi � samedi, trois contre-attaques,
moins fortes que celles de la nuit pr�c�dente.
Nos troupes se sont organis�es solidement sur la
position conquise.
Dana la vall�e de l'Aisne, notre artillerie lourde a
bombard� les grottes de Pasly, qui servent, d'abri
aux troupes allemandes. Des explosions successives
ont t�moign� de l'effondrement de plusieurs d'entre
elles.
En Champagne, au nord-ouest de Perthes, l'ennemi a
fait exploser deux mines � proximit� de nos
tranch�es. Il a occup� les deux entonnoirs, mais
nous l'avons chass� de l'un d'eux aussit�t. Il a
conserv� l'autre et aucune partie de nos tranch�es
n'a �t� occup�e par lui.
Non loin de l�, au nord de Mesnil, une attaque
contre un des saillants de notre ligne a �t�
facilement repouss�e.
Dans la Wo�vre, combat d'artillerie, notamment dans
la r�gion du bois de Mortmare, mais aucune action
d'infanterie ni hier, ni aujourd'hui.
Dans les Vosges, nous avons r�alis� des progr�s
sensibles sur les deux rives de la Fecht.
Sur la rive nord, nous nous sommes empar�s de
l'�peron ouest de Sillakerwasen, � l'ouest, de
Metzeral, et nous avons d�bouch� dons le ravin qui
descend vers la Fecht.
Sur la rive sud, nos chasseurs, apr�s une attaque
brillante, ont enlev� le somment du
Schnepfenriethkopf, qui a 1.235 m�tres d'altitude au
point culminant du massif qui s�pare les deux
vall�es aboutissant � Metzeral
Un Taube abattu
Un de nos dirigeables sur Fribourg
Un avion anglais a abattu un avion allemand en
Belgique, pr�s de Boesinghe. L'appareil est tomb�
dans nos lignes. Le pilote a �t� tu� et
l'observateur fait prisonnier.
Un de ros dirigeables a bombard� la gare et les
hangars d'aviation de Fribourg-en-Brisgau.
HUIT OBUS SUR SAINT-DI�
Saint-Di�, 18 avril.
On nous �crit :
�� Depuis plusieurs semaines, notre ville semblait
devoir �tre tranquille, et ne recevait plus que
quelques visites de Taubes ou d'Aviatiks.
�� Jeudi soir, vers 1 heures de l'apr�s-midi, huit
obus de petit calibre sifflaient au-dessus de nos
t�tes. En un clin d'oeil, les rues �taient d�sertes.
Les obus tomb�rent sur plusieurs points, la plupart
sans �clater : rien que des d�g�ts mat�riels. C'est
le 26� bombardement. �
HOMMAGE AUX FEMMES DE LORRAINE
Nancy, 18 avril.
Notre ami Louis Michel, maire de Tomblaine,
pr�sident de la Soci�t� centrale d'agriculture de
Meurthe-et-Moselle, fait aux F�d�rations agricoles
et � la presse, sous le titre : �� Rendons hommage
aux femmes des agriculteurs lorrains �, la
communication suivante :
Les habitants du Centre, du Midi ou de l'Ouest de la
France seraient tr�s �tonn�s s'ils visitaient le
d�partement de Meurthe-et-Moselle, en voyant
l'activit� d�ploy�e dans les campagnes par les
femmes de nos agriculteurs mobilis�s.
Le d�partement de Meurthe-et-Moselle comprend 600
communes, dont 171 sont occup�es ou �vacu�es. Sur
les 429 communes, actuellement libres, 145 ont �t�
sinistr�es et ont touch� de l'Etat, � titre d'avance
sur les indemnit�s qui leur seront vers�es plus
tard, des semences de printemps et quelques
instruments agricoles pour leur permette de
travailler.
Le d�partement de Meurthe-et-Moselle ensemence, en
ann�e normale, environ 70.000 hectares d'avoine, ce
qui repr�sente sensiblement 100.000 quintaux de
semences.
Dans les communes qui n'ont pas �t� touch�es par la
guerre, les ensemencements sont faits compl�tement,
aussi bien en bl� qu'en avoine, malgr� le manque
d'hommes et de chevaux.
Aux 145 communes sinistr�es, il a �t� distribu�
12.000 quintaux d'avoine, et l'on estime qu'un
certain nombre de cultivateurs de ces r�gions,
pouvant se passer du concours de l'Etat, en ont sem�
environ 4.000 quintaux. Ces 145 communes ont donc
ensemenc� 16.000 quintaux, c'est-�-dire 70 % de leur
ensemencement normal, qui n�cessite 23.000 quintaux.
Comment ne pas admirer ces femmes, dont les maris
sont mobilis�s, dont les maisons sont br�l�es pour
la plupart, et qui ont pris la direction de leurs
fermes ?
Les hommes sont dans les tranch�es, le canon tonne
de toute part, la charrue, en tra�ant son sillon,
descend fr�quemment dans les trous creus�s par les
obus ; peu importe, le travail se fait normalement.
A cinq heures du matin, les femmes de nos
cultivateurs sont dans les champs ; elles
surveillent les ouvriers d'occasion, que le hasard
leur a mis sous la main, les leurs �tant mobilis�s.
Elles d�ploient une �nergie que l'on ne rencontre
pas souvent, m�me chez les hommes.
Si, dans quelques coins de la France, se trouvent
des personnes impatientes ou d�courag�es, qu'elles
jettent un regard sur nos vaillantes femmes
lorraines, leurs coeurs se raffermiront en pr�sence
de tant de courage et d'abn�gation.
Un pays qui poss�de de telles forces ne peut �tre
vaincu.
Louis MICHEL,
Pr�sident de la Soci�t� Centrale d'Agriculture de
Meurthe-et-Moselle et des F�d�rations agricoles du
Nord-Est de la France.
Les Fran�ais que les affaires conduisent en Lorraine
ou la curiosit� de savoir ce qui se passe �� presque
� sur le front, ont maintes fois manifest� leur
�tonnement de la prodigieuse vitalit� qu'ils
rencontrent � Nancy visit� par les Zeppelins, �
Pont-�-Mousson bient�t � son centi�me bombardement,
� Lun�ville que les Allemands occup�rent pendant
vingt jours, et o� ils assassin�rent et br�l�rent,
de ci de l�. Ils n'ont, pas assez de termes
admiratifs pour rendre leur surprise et aussi leur
�motion.
Ce calme sto�que et cette souriante tranquillit�
sous les obus, sous les bombes, sous la menace
germaine, seront, quand on �crira plus tard
l'histoire de la grande guerre, les titres de gloire
les plus �clatants pour la Lorraine.
Le courage des femmes dans nos grandes cit�s est
partout cit� en exemple. Mais nos visiteurs d'un
jour ou d'une semaine, si on leur procure la
possibilit� de s'approcher des tranch�es, n'ont pas
le temps de voir la vie dans les villages. Ils ne
savent pas que nos �vacu�s allaient parfois, parmi
la mitraille, regarder leurs champs, les cultiver,
arracher la r�colte abandonn�e, et que, par amour de
la terre o� ils sont n�s, o� ils travaillent, ils
bravaient tous les p�rils pour aller quelques heures
la toucher de leurs mains calleuses, la caresser de
leur regard reconnaissant.
Il fallait qu'une parole autoris�e rend�t aux femmes
des cultivateurs l'hommage qui leur est d�. M. Louis
Michel, qui conna�t et qui aime d'une profonde
affection le sol lorrain et tous ceux et toutes
celles qui vivent sur ce sol, a voulu que la
vaillance des villageoises lorraines f�t connue de
toute la France.
Et il a cit� devant le pays le noble travail des
Lorraines de la campagne comme on cite devant
l'arm�e les exploits h�ro�ques des combattants.
Il n'est pas besoin de chercher des mots magiques
pour glorifier les actes en temps de guerre. La
parole se sent faible devant le regard tranquille
qui dit : �� Je fais mon devoir �.
Ainsi que nos soldats les femmes des cultivateurs
accomplissent leur devoir, qui est fait de ferme
volont� et d'indestructible esp�rance.
Honneur � celles qui aux mains des hommes r�clam�s
par le salut de la patrie ont saisi la robuste
charrue, et, dans le tumulte de la bataille qui
s'�loigne, continuent � tracer sans peur le sillon,
un jour interrompu, au creux de notre terre deux
fois sacr�e par le sang et par le travail !
REN� MERCIER.
POURQUOI UN ZEPPELIN
a bombard� Nancy
Nancy, 18 avril
Le communiqu� officiel allemand du 12 avril nous
apprend pourquoi un zeppelin est venu jeter quelques
bombes sur Nancy, dans la nuit de dimanche � lundi.
Il dit :
�� A titre de repr�sailles de l'attaque a�rienne du 5
avril, contre la ville ouverte de Mulheim, o� trois
femmes ont �t� tu�es, un de nos dirigeables a arros�
abondamment de bombes incendiaires Nancy, centre du
groupe des fortifications de ce nom. �
Le communiqu� aurait bien d� ajouter, le lendemain,
pour la plus grande joie des Boches, que le �� centre
des fortifications de Nancy � avait, d� beaucoup
souffrir, puisque les bombes avaient atteint une
�cole maternelle et failli toucher un h�pital et
l'abattoir !
UN TAUBE A NANCY
Nancy, 18 avril.
Les Nanc�iens ont eu le plaisir, vendredi soir, vers
heures, de voir un Taube de tout pr�s. Mais il ne
survolait pas les maisons pour leur lancer des
bombes, car charg� sur une auto sp�ciale, solidement
encha�n�, le sinistre oiseau �tait conduit de la
gare vers Toul, d'o� il ira, dit-on, � Paris.
Cet avion boche, dont les ailes �taient dispos�es
sur le chariot de fa�on � bien montrer leur grand
croix noire, �tait celui descendu ces jours derniers
pr�s de Croismare, et qu'on avait dit d'abord avoir
�t� incendi�.
LES BOMBARDEMENTS DE PONT-A-MOUSSON
Pont-�-Mousson, 18 avril.
Pont-�-Mousson a encore �t� bombard� � deux
reprises, dans l'apr�s-midi et la nuit de mardi avec
des projectiles de gros calibre. Fort heureusement
il n'y a eu aucune victime.
Le fond du jardin de M. Bonnette p�re fut
copieusement labour� et la toiture de la loge de ce
jardin fut projet�e sur les arbres des environs. Un
obus alla se perdre dans l'�le d'Esch.
Les maisons situ�es entre le caf� Janin et la
boulangerie Kauffmann furent s�rieusement atteintes.
Il en fut de m�me, sur un autre point, de la maison
de M. Marchal, dont le propri�taire et sa femme
r�fut�s dans le couloir furent litt�ralement
soulev�s par l'explosion.
Les obus du second bombardement �clat�rent � peu
pr�s aux m�mes points que ceux du premier. Un cheval
fut enseveli sous les d�combres de l'�curie de M.
Gaudiot. Les maisons de M. Lejaille, conducteur des
ponts et chauss�es, de M. Isler, de Mme Dieudonne et
la boulangerie Beno�t ont beaucoup souffert. Il n'y
a eu heureusement, pas d'accidents de personnes, et
pourtant, � cette beure (1 h. 10, ainsi qu'en
t�moigne la pendule de M. Lejaille, qui s'est
arr�t�e), tout le monde �tait couch�, ses lits
occup�s furent, travers�s, on a retrouv� des �clats
dans les sommiers, les paillasses, etc.
Enfin, le dernier obus �clata sur le groupe scolaire
Saint-Charles, causant aussi des d�g�ts aux maisons
avoisinantes.
VIOLENTE ATTAQUE REPOUSS�E
pr�s d'Orbey, en Alsace
Paris, 18 avril, 15 heures
Une attable allemande pr�par�e par un violent
bombardement, a �t� prononc�e par un bataillon
contre nos positions au nord-ouest d'Orbey (Alsace).
Elle a �t� repouss�e. L'ennemi a laiss� de nombreux
morts devant nos tranch�es. Nous avons fait une
quarantaine de prisonniers.
Un avion belge a abattu un avion allemand pr�s de
Roulers.
Dans la m�me r�gion, une de nos escadrilles a
efficacement bombard� un terrain d'aviation.
UNE JOURN�E D'�CHECS ALLEMANDS
Dans l'Aisne, en Champagne en Lorraine et en Alsace
Paris, 19 avril, 6 h. 40.
Communiqu� officiel du 18 avril, 23 heures :
Journ�e relativement calme, marqu�e surtout par des
combats d'artillerie et par quelques action
d'infanterie toutes locales. Dans la vall�e de
l'Aisne, au bois de Maintmard, l'ennemi a attaqu�
nos tranch�es sur la fin de l'apr�s-midi. Notre
artillerie l'a arr�t� net puis une charge � l�
ba�onnette lui a inflig� des pertes s�rieuses.
En Champagne, au nord-ouest de Perthes, les
Allemands ont d� �vacuer un entonnoir qu'ils
occupaient encore, � proximit� de nos lignes.
Par explosion de mines, suivie d'une attaque, nous
avons enlev� soixante m�tres de tranch�es ennemies.
Dans la Wo�vre, simple canonnade.
L'ennemi � prononc�, en Lorraine aux environs de la
for�t de Parroy, plusieurs petites attaques, avec de
faibles effectifs, notamment pr�s de Bures,
Mouacourt, Emberm�nil et Saint-Martin. Toutes, ces
tentatives ont �t� facilement repouss�es. En Alsace,
les Allemands ont attaqu� trois fois, sans aucun
succ�s, nos tranch�es du petit Reichackerkopf. Nous
avons fait de nouveaux progr�s dans la r�gion de
Schnepfenrieth.
PROGR�S EN BELGIQUE
ET SUR LES DEUX RIVES DE LA FECHT
Paris, 19 avril, 15 heures.
Les troupes britanniques ont enlev� hier, en
Belgique pr�s de Zvartelen, deux cents m�tres de
tranch�es allemandes. Malgr� plusieurs
contre-attaques, elles ont conserv� le terrain gagn�
et consolid� leurs positions.
En Alsace, progr�s sensibles. Notre avance se
poursuit sur les deux rives de la Fecht.
Sur la rive nord, nous avons occup� la cr�te du
Burgkopfte (sud-ouest du Schilleckervassen), qui
commande directement la vall�e.
Sur la rive sud, dans la r�gion de Schnepfenrietch,
nous avons notamment progress� en marchant du sud au
nord.
Dans la direction de la Fecht et de Metzeral, nous
avons occup� notamment une s�rie de hauteurs dont la
plus septentrionale commande le cours de la Fecht,
face au Burgkopfle. Au cours de cette action, nous
avons pris une section d'artillerie de montagne,
deux canons de 74 et deux mitrailleuses.
Les Taubes sur Belfort
es avions allemands qui ont survol� Belfort ont
jet� quatre bombes. Celles-ci ont endommag� deux
hangars et mis le feu � quelques caisses de poudre.
Il n'y a au ni accidents de personnes ni d�g�ts
s�rieux.
ATTAQUE VAINE CONTRE LES �PARGES
Nos progr�s en Alsace
Paris, 30 avril, 1 h. 10.
Voici le communiqu� officiel du 19 avril, 23 heures
:
Dans la nuit du 18 avril, � 3 h. 30, une
contre-attaque allemande s'est produite aux Eparges.
Elle a �t� compl�tement repouss�e.
Au bois de Mortmare, action d'infanterie, sans
r�sultat appr�ciable, ni d'une part ni de l'autre.
Dans la r�gion de Regni�ville, lutte d'artillerie
assez violente, o� nous avons pris nettement
l'avantage.
Dans les Vosges, nos attaques men�es sur les deux
rives de la Fecht, ont accentu� nos progr�s et forc�
l'ennemi � �vacuer pr�cipitamment Eselsbrucke, en
amont de Metzeral, o� il a abandonn� un nombreux
mat�riel.
Garros prisonnier
'aviateur Garros, oblig� d'atterrir � lngelmunster,
� dix kilom�tres au nord de Courtrai, a �t� fait
prisonnier dans la soir�e du 18 avril.
Nouvelles du Pays meusien
Braquis. - Tr�sauvaux. - Beauz�e. -
M�nil-sous-les-C�tes. - Moranville. -
Mont-sous-les-C�tes.-L'autorit� militaire a fait
�vacuer en ces derniers temps les villages ci-dessus
par leurs habitants qui ont �t� dirig�s sur Verdun
o� ils furent hospitalis�s dans les meilleures
conditions possibles.
Cette mesure fut prise pour faciliter nos op�rations
dans la Wo�vre qui �taient entrav�e par la pr�sence
de ces populations.
Les Allemands mettent en s�ret� les, merveilles
d�rob�es aux Fran�ais. - On a transport� � Metz,
dans la chapelle des Templiers, les oeuvres d'art
provenant des localit�s fran�aises situ�es �
proximit� du front.
On y remarque surtout une statue gothique de
Ligier-Richier, datant de 1523 et un panneau sculpt�
d�tach� d'une chaire. Ces deux objets proviennent de
Hattonch�tel.
A Etain, les Allemands ont enlev� un groupe de
pierre, par Ligier-Richier, datant die 1528 et
repr�sentant Marie devant le cadavre du Christ,
ainsi qu'un splendide b�nitier en bronze avec
inscription gothique.
Les Boches disent bien qu'ils ont proc�d� �
l'enl�vement de ces oeuvres d'art, afin de les
pr�server d'une destruction imminente, mais il est
peu probable qu'ils aient l'intention de les
restituer.
APR�S LES OBUS, LES BOMBES
Saint-Di�, 20 avril.
Samedi, � 2 heures 25 de l'apr�s-midi, un Taube, qui
survolait la ville, lan�a simultan�ment deux bombes
qui tomb�rent dans un jardin, sans causer aucun
d�g�t, ni faire de victimes, fort heureusement.
DES BOMBES DANS LES PR�S
Bruy�res, 20 avril.
Vendredi, vers 9 heures du matin, un Taube a lanc�
six bombes, qui sont toutes heureusement tomb�es
dans un pr�. Les pissenlits ont beaucoup souffert.
L'oiseau boche a d� souffrir aussi, car il tanguait
fortement en fuyant sous nos obus.
LES TAUBES
Verdun, 20 avril.
Deux Taubes ont lanc� cette semaine des bombes sur
Verdun. Pas de victimes et d'insignifiants d�g�ts.
Un de ces engins est entr� dans l'h�tel du ��
Coq-Hardi � par la verri�re de la salle � manger, o�
il a bris� une demi-douzaine d'assiettes et fait une
grosse tache d'huile sur le parquet. L'autre est
tomb�e sur le bateau �� Jeune-Augusta �, au
Pont-Chauss�e, et a d�moli divers ustensiles de
cuisine. D�cid�ment, les bombes boches, comme leurs
propri�taires, en veulent � nos salles � manger.
Ajoutons que quelques autres bombes sont tomb�es
dans les champs, o� elles ont fait un petit trou.
LA R�PARATION DES DOMMAGES DE GUERRE
Une tourn�e de conf�rences
La premi�re a lieu � l'H�tel de Ville de Nancy
Nancy, 20 avril.
On sait que la Soci�t� d'assistance aux r�fugi�s
�vacu�s et sinistr�s de Meurthe-et-Moselle a
organis� une s�rie de conf�rences sur la tr�s
int�ressante question de la r�paration des dommages
caus�s par la guerre. Il convient, en effet, que les
populations �prouv�es soient mises au courant de
leurs droits et qu'elles connaissent exactement la
fa�on la plus efficace de les faire valoir.
Telle est la double t�che, entreprise par les
conf�renciers.
La premi�re de ces conf�rences a eu lieu dimanche, �
quatre heures et demie de l'apr�s-midi, dans le
grand salon de l'h�tel de ville, mis obligeamment �
la disposition des organisateurs par la municipalit�
de Nancy.
Notre chambre de commerce, que l'on trouve toujours
� la t�te des oeuvres sociales, si intimement li�es a
la prosp�rit� �conomique du pays, avait accord� son
haut patronage � cette r�union Aussi, pouvait-on
remarquer, parmi la nombreuse assistance, plusieurs
des grands noms de l'industrie de l'agriculture et
du commence de notre Lorraine .
M. Vilgrain, pr�sident de la Chambre de Commerce,
pr�side avant � sa droite M. le pr�fet et � sa
gauche M. Simon, maire de Nancy.
On remarque en outre sur l'estrade : MM. Chapuis et
de Langenhagen, s�nateurs ; Marin et de Ludre,
d�put�s ; M. Escavy, avou� � Senlis, vice-pr�sident
de la F�d�ration des Associations d�partementales
des sinistr�s, un des orateurs que nous allons
entendre ; M. Maurice de Wendel, secr�taire de cette
F�d�ration : M. Jambois, conseiller g�n�ral,
pr�sident du Comit� d'assistance des r�fugi�s de
Meurthe-et-Moselle ; M. Michel, maire de Tomblaine,
pr�sident de la Soci�t� d'agriculture : M. Keller
maire de Lun�ville; MM. Krug, Bertrand-Oser,
Dannhauser ; Rolland, professeur � la Facult� de
droit de Nancy, qui voudra bien remplacer l'un des
conf�renciers annonc�s, M. J�ze, processeur � la
Facult� de droit de Paris, que la mobilisation a
emp�ch� de venir ; M. Mavaile, l'actif secr�taire
g�n�ral de la Chambre de Commerce, etc., etc.
M. VILGRAIN
Avant de donner la parole aux conf�renciers, M.
Vilgrain tient � remercier tous les concours qui ont
afflu� au premier appel.
�� Quand il appr�t que la premi�re conf�rence de la
F�d�ration aurait lieu � Nancy, pr�s de la
fronti�re, son impression fut qu'on allait venir ici
pr�cher des convertis. En effet si la vaillance de
nos soldats et l'habilet� de leurs chefs ont
heureusement pr�serv� la ville de Nancy des horreurs
de l'occupation et du pillage, syst�matique, nous
sommes trop pr�s des r�gions d�vast�es pour ne pas
compatir profond�ment � la d�tresse des populations
�prouv�es. Je suis certain qu'il ne viendrait � la
pens�e d'aucun Nanc�ien, d'aucun Lorrain, de se
refuser � accepter sa part des charges qu'imposera
la r�paration des dommages subis. �
L'honorable pr�sident de la Chambre de Commerce fait
conna�tre les excuses de MM. Lebrun de Wendel et
Fringant, d�put�s, et il donne lecture d'une lettre
o� M. Lebrun, apr�s s'�tre excus� d'�tre retenu
ailleurs par la mobilisation, �crit :
�� Il y a ici un corps d'arm�e de l'extr�me-Midi J'ai
eu souvent l'occasion de parler � des soldats, leur
r�ponse a �t� unanime : �� Comment voudriez-vous que
nous restions insensibles aux malheurs qui vous
accablent ? Et quand la guerre sera finie, que nous
aurons retrouv� nos village intacts et nos foyers
inviol�s, il nous sera impossible, dans notre
bonheur, d oublier ce que nous avons vu ici.
L'union se poursuivra � ce moment pour le
redressement des ruines, comme elle s'est faite pour
la r�sistance � l'envahisseur, et nous dirons � nos
repr�sentants de consentir en notre nom tous les
sacrifices n�cessaires. �
Cette promesse de solidarit� nationale est salu�e de
vigoureux applaudissements.
M. Maurice de WENDEL
M. Maurice de Wendel, secr�taire de la F�d�ration,
expose en quelques phrases pr�cises les raisons pour
lesquelles doivent s'unir tous ceux qui ont eu �
subir un pr�judice mat�riel de la guerre. Quand les
soldats de nos r�gions rentreront vainqueurs, dans
leurs communes, il ne faut pas qu'ils n'y retrouvent
qu'un foyer d�vast�. La France enti�re sera �
l'honneur. Il faut aussi que toutes les r�gions
paient leur part de cette gloire. Il faut une
solidarit� nationale.
M. ROLLAND
M Rolland a bien voulu se charger de la partie
essentiellement juridique. Chaque phrase est un
argument. L'ancienne jurisprudence n'admettait pas
d'indemnit� l�gale aux victimes de la guerre. Mais,
depuis, le principe de l'�galit� a �t� inscrit dans
la Constitution. Si la collectivit�, c'et-�-dire
l'Etat, ne supportait pas les dommages de guerre
subis par les particuliers, l'�galit� des citoyens
d'une m�me nation serait rompue. Et n'est-il pas
inadmissible en effet, alors que tous les
contribuables sont �gaux devant les charges
collectives, qu'une certaine cat�gorie de ces
contribuables ait � supporter toute la part des
dommages nationaux ?
Or, ceux qui supporteraient, seuls, ces dommages
mat�riels auraient par dessus le march� � subir des
dommages moraux ? Non... L'�galit� ne serait plus
qu'un vain mot.
Le partage des d�g�ts entre tous les citoyens n'est
pas une id�e sentimentale. C'est une id�e de justice
et de raison.
M. ESCAVY
M. Escavy est un orateur remarquable. Les aridit�s
de la jurisprudence ne l'emp�chent point de trouver
les images qui frappent et les p�riodes qui �meuvent
jusqu'aux larmes.
Il y a une certaine �l�gance, dit-il, � discuter les
dommages de la guerre, � quelques kilom�tres des
tranch�es, au bruit de ce canon qui cause les
d�sastres.
Que nous ayons droit � la r�paration int�grale, la
question ne fait pas de doute. La Chambre de
commerce et le Conseil municipal de Nancy ont �mis
des voeux dans ce sens.
La question d'�valuation est d�licate. Pour mon
compte, je serai intransigeant. Je n'admettrai pas
qu'on nous parle de v�tust�. Et comment pourra-t-on
jamais nous rendre les mille objets familiers, dont
la perte, si sensible � nos coeurs, remplacera au
centuple le coefficient de v�tust� ? Quand les joies
et quand les gloires sont partag�es int�gralement
par un pays tout entier, il est juste que ce pays
tout entier partage les pertes et les souffrances.
Aujourd'hui, la guerre est une oeuvre nationale. Ce
sont les enfants de tout un pays qui d�fendent un
m�me sol et un m�me id�al, et les d�partements
envahis sont devenus comparables � un vaste champ de
manoeuvres choisi pour la d�fense nationale.
La loi n'a pas admis, jusqu'ici, la r�paration
int�grale. Son texte parle simplement de r�paration.
Il faudra qu'on la modifie, et � bref d�lai dans le
sens que la justice exige. Il ne faut pas nous
contenter de promesses, car ce n'est pas sur des
promesses que les banques consentiront � nous faire
des avances.
Il faut que la loi soit compl�t�e au cours des
hostilit�s. Un bon tien vaut mieux que deux tu
l'auras. Si nous nous contentons de promesses, il
est � craindre que nos ruines ne restent des ruines
apr�s la guerre.
Je sais bien qu'on vous invite � rentrer dans vos
foyers et � recommencer la culture de vos terres,
mais vos foyers restent en ruines, o� vous
abriterez-vous ? Mais vos �curies sont vides et vos
instruments de travail sont d�truits. Quels chevaux
s'attelleront donc � la charrue et quelle charrue
tracera le sillon ? Il faut donc que l'on vous donne
d'abord les moyens de vous abriter et ceux de
cultiver vos terres.
M. Escavy termine par urne �mouvante invocation � la
Patrie, qui mouille de larmes bien des yeux.
M. MARIN
M. Louis Marin compte dans sa circonscription de
nombreux villages d�vast�s. Il rappelle que, dans
notre d�partement, on trouve encore des communes qui
payent des centimes additionnels impos�s lors de
l'occupation de 1870-73.
Il n'est pas juste que la Lorraine, parce qu'elle
est � la fronti�re, alors que tous ses enfants, tous
ses hommes de 20 � 48 ans, sont partis depuis le
d�but de la guerre, subisse encore des dommages
mat�riels particuliers.
Beaucoup de parlementaires des r�gions �loign�es ne
comprenaient pus autrefois cette dette nationale,
mais les temps sont aujourd'hui chang�s et l'union
de tous s'est faite aussi sur ce point. Aujourd'hui,
l'�go�sme a disparu.
La France a des capacit�s financi�res insoup�onn�es.
On ne saurait donc parler d'impuissance du Tr�sor.
Au point de vue l�gislatif, la loi doit fixer les
conditions des r�parations. Il faut nous unir pour
que nos r�clamations aient plus d'autorit�.
Les �valuations exactes seront difficiles, et qui
pourra �valuer ? Les commissions officielles
seront-elles suffisamment comp�tentes ? Elles
s'attacheront peut-�tre beaucoup plus � des
questions d'hygi�ne, d'alignement, d'esth�tique qu'�
des questions d'aisances pour le travail agricole. A
c�t� de ces commissions, il en faut d'autres,
compos�es d'hommes connaissant les aspirations et
les besoins de l'agriculture.
M. Marin dit ensuite qu'il faut se mettre au travail
sans tarder, car chaque saison qui passe est une
r�colte perdue. Il faut que la loi permette des
acomptes sur l'indemnit� globale, pour que le paysan
se construise des logements provisoires, remonte son
cheptel, ach�te ses chevaux et ses instruments
agricoles.
O� trouvera-t-on assez de ma�ons pour reconstruire
d'un coup tant de villages ? O� trouvera-t-on assez
de mati�res premi�res et comment les
transportera-t-on, avec des canaux et des chemins de
fer aux ponts d�molis ?
M. Marin conclut que c'est pour le droit que la
France s'est jet�e dans la m�l�e. Il faut donc que
l'on rende � chacun ses droits.
On remarque avec plaisir l'allusion qu'il fait �
l'entr�e prochaine, tr�s prochaine d'une grande
puissance dans le conflit aux c�t�s des alli�s.
M. LE PR�FET
M. le pr�fet souhaite aussi la constitution de
commissions cantonales, qui pourront fournir des
�valuations pr�cises aux commissions officielles.
Mais, ajoute-t-il, il convient, de ne pas manifester
d'impatience, et de laisser l'Etat ma�tre de
l'heure. Et l'Etat ne faillira pas � son devoir.
Il faut surtout que l'ennemi sache que toutes nos
aspirations se tournent d'abord vers la victoire et
que nous faisons passer l'honneur avant la
r�paration.
Ces patriotiques paroles sont accueillies par les
bravos prolong�s de cette immense assistance de
r�fugi�s, qui n'a pu trouver place tout enti�re dans
la vaste salle des f�tes de l'h�tel de ville.
J. MORY.
REIMS PAIE UNE S�RIE D'�CHECS ALLEMANDS
Partout o� l'ennemi a prononc� des attaques, en
Champagne, dans l'Aisne, en Argonne, en Wo�vre, en
Alsace, il a �t� repouss�
Paris, 20 avril, 15 heures.
Rien � ajouter au communiqu� de ce matin en ce qui
concerne les op�rations en lorraine et dans les
Vosges.
Sur le reste du front, actions d'artillerie
particuli�rement vives dans la r�gion de Soissons,
le secteur de Reims et l'Argonne.
Paris, 21 avril, 0 h. 35.
Voici le communiqu� officiel du 20 avril.
23 heures : Cinquante obus incendiaires ont �t�
lanc�s sur Reims.
En Champagne, en Argonne, lutte d'artillerie sans
intervention d'infanterie.
Entre la Meuse et la Moselle, au bois de Mortmare,
pr�s de la route de Flirey � Essey, nos attaques ont
progress� l�g�rement.
Au bois Le Pr�tres l'ennemi, apr�s avoir violemment
bombard� nos positions dans la r�gion de la
Croix-des-Carmes, a esquiss� une tentative d'attaque
qui a �t� aussit�t enray�e par notre artillerie.
Canonnade assez vive et combats d'avant-postes � la
lisi�re de la for�t de Parroy.
Dans la soir�e du 19 avril, deux contre-attaques
allemandes contre Hartmansvilerkopf ont �t�
repouss�es.
Condamn�s pour espionnage
Nancy, 20 avril.
Dans l'extrait des condamnations prononc�es par le
conseil de guerre permanent de la 20e r�gion de
corps d'arm�e pendant la cours du premier trimestre
de l'ann�e 1915, on rel�ve les condamnations
suivantes : Le 7 janvier 1915, Charles-Marie-Emile
Lallemand, ouvrier d'usine � Champigneulle, a �t�
condamn� pour espionnage � la d�portation dans une
enceinte fortifi�e. Le 13 f�vrier,
Gaston-Marie-Louis Papelier, comptable � Leyr, a �t�
condamn� � la d�portation dans une enceinte
fortifi�e. Le 11 f�vrier �galement, Ida J�r�me,
femme Papetier, m�nag�re � Leyr, a �t� condamn�e
pour complicit� d'espionnage � dix ans de d�tention.
LES TAUBES
Nancy, 21 avril.
Lundi matin, les avions ennemis ont essay� � deux
reprises de venir sur Nancy, du c�t� de Malz�ville.
La premi�re fois, vers 7 heures moins un quart, le ��
taube �, accueilli � coups de canon, s'est empress�
de faire demi-tour.
Une heure apr�s, un autre avion a essay� �galement
de venir sur Nancy, mais les artilleurs lui ont
barr� le chemin par des projectiles bien dirig�s.
Comme le pr�c�dent, il s'est enfui aussit�t.
LA VICTOIRE DES �PARGES.
R�CIT OFFICIEL
La magnifique action qui nous a rendu: ma�tres, le 9
avril au soir, de la totalit� de la cr�te des
Eparges, est la conclusion d'un effort prolong� et
violent.
C'est une victoire, analogue par la s�ret� de La
m�thode et l'intensit� de l'offensive, � celle qui
nous a conduits au sommet de l'Hartmasviller, plus
importante, si l'on consid�re le chiffre des
effectifs engag�s et l'accumulation des moyens
r�alis�s par l'ennemi.
UNE FORTERESSE FORMIDABLE
La cr�te des Eparges est un long �peron de 1400
m�tres, d'une altitude de 346 m�tres, qui domine �
l'est des Hauts-de-Meuse, l'immense plaine de la
Wo�vre. Les flancs en sont abrupts et glissants. De
nombreuses sources les sillonnent. Il y pleut
souvent. C'est une montagne de boue.
Cette montagne est particuli�rement importante par
sa situation. Qui tient les Eparges voit chez nous,
a nos routes sous son feu, nous interdit toute
action sur la partie sud-ouest de la Wo�vre. C'est
pourquoi, s'�tant saisis des Eparges, le 21
septembre dernier les Allemands s'y �taient aussit�t
formidablement organis�s.
Du sommet, ils dominaient les vall�es de 70 � 80
m�tres de hauteur. Entre le sommet et les vall�es,
ils avaient install� plusieurs lignes de tranch�es.
En certains points, cinq �tages de feux se
superposaient les uns aux autres. Partout ailleurs,
il y en avait au moins deux.
Par leurs canons, leurs mitrailleuses et leurs
fusils, les Allemands nous condamnaient �
l'immobilit� tant sur la croupe de Montgirmont (nord
des Eparges) que dans les villages du pays bas, les
Eparges, Mesnils-sous-les C�tes,
Mont-sous-les-C�tes, Bonz�e et Tresauvaux.
Pour notre s�curit� comme pour le d�veloppement
ult�rieur des op�rations, il �tait indispensable
d'enlever la cr�te, v�ritable tour de Malaloff
dress�e aux lisi�res de la Wo�vre.
LA PR�PARATION DE L'ATTAQUE
Le d�but de notre action offensive nous trouvait �
la lisi�re du village des Eparges, � 600 m�tres
environ des premi�res tranch�es allemandes, faisant
face, par cons�quent, aux pentes ouest de la
position.
Du plateau de Montgirmont, que nous tenions, nous
faisions face aux pentes nord. Entre Montgirmont et
ces pentes, un chemin de terre traverse le col qui
s�pare les deux massifs.
Nous �tions oblig�s d'attaquer d'abord la partie
ouest du massif (A). Mais notre attaque ne pouvait
avoir de r�sultat d�cisif que si nous atteignions
aussi le point culminant situ� � l'est (D)
Nous ne pouvions, par cons�quent, proc�der que
lentement, car un assaut de vive force sur ces
pentes boueuses, h�riss�es de fortifications, nous
e�t co�t� tr�s cher sans nous rien donner.
D�s la fin d'octobre, pas � pas, � la sape, nous
nous rapprochions des tranch�es Allemandes de
l'ouest. En m�me temps nous nous infiltrions dans
les bois, assez �pais, qui, dans la partie nord-est,
couvrent les francs d'un ravin creus� au coeur du
massif.
Les Allemands, confiants dans la valeur de leur
position, nous laiss�rent proc�der � ces premi�res
approches sans r�agir tr�s violemment Mais, par de
nouveaux travaux, ils rattach�rent fortement la
partie ouest de leurs d�fenses au point culminant
dont ils firent un formidable bastion.
De notre c�t�, nous perfectionnions nos tranch�es,
surplomb�es par les travaux ennemis. On atteignit
ainsi la mi-f�vrier.
LA BATAILLE DE F�VRIER
Le 17, nos mines, pouss�es sous le secteur ouest, y
provoqu�rent une explosion si formidable que, sans
coup f�rir, nous p�mes nous installer dans la
premi�re ligne ennemie. Les Allemands, d'abord
surpris, se ressaisirent et, le 18, d�valant les
pentes, ils contre-attaqu�rent furieusement.
Un combat acharn� s'engagea, qui dura jusqu'au 21 au
soir, marqu� par des contre-attaques violentes de la
part de nos adversaires, par des attaques r�p�t�es
de notre part.
Le 18, dans la journ�e, nous avions presque tout
reperdu de notre gain du 17. Mais le 18 au soir,
nous avions tout repris.
Le 19, deux nouvelles sorties des Allemands furent
repouss�es. Nous tenions la partie ouest (A). Mais
l'exigu�t� de notre position nous soumettait � une
concentration de feux qui la rendait intenable. Il
fallait ou reculer ou nous donner de l'air et, sur
un front �largi, nous mettre � m�me de faire plus
ais�ment face aux retours offensifs.
Cette extension fut l'oeuvre des journ�es du 20 et du
21. Par une attaque brusque, nous d�bouchions du
ravin bois� ci-dessus d�crit vers un bois de sapins,
qui nous rapprochait du sommet.
La lutte fut sauvage. Le colonel Bacquet, commandant
le r�giment d'infanterie, charg� de l'attaque, fut
bless� mortellement � la t�te de ses troupes. Nous
ne p�mes pas enlever la totalit� du bois de sapins.
Mais les Allemands ne purent pas nous en faire
sortir.
A la fin de ces cinq jours de combat, la situation
�tait la suivante. Nous tenions tout le bastion
ouest et vers le bastion est (point culminant D)
nous avions commenc� � progresser en enlevant aux
Allemands 300 m�tres de tranch�es.
Nos acquisitions sur ces deux points avaient �t�
aussit�t reli�es, face aux d�fenses ennemies, par
des tranch�es, des boyaux et des places d'armes.
C'�tait une base pour de nouvelles attaques.
Le renforcement continu des ouvrages ennemis,
l'entr�e en action de 16 batteries lourdes
allemandes diss�min�es dans la plaine nous
renseignaient pleinement sur les difficult�s de la
t�che qui restait � accomplir.
L'ASSAUT DE MARS
Un nouveau bond en avant fut r�alis� � la mi-mars.
Une pr�paration d'artillerie minutieuse et violente
y avait pr�lud�.
Le 18 mars, avec trois bataillons, nous repr�mes
l'offensive. La premi�re ligne ennemie fut enlev�e
en partie, notre artillerie ayant, avec un plein
succ�s, interdit aux Allemands de la garnir. Mais,
de la deuxi�me ligne, de violentes contre-attaques
d�bouch�rent aussit�t.
Ce fut le d�but d'une lutte plus �pre encore que
celle de f�vrier et qui dura jour et nuit jusqu'au
21 au soir.
A l'issue de cette bataille, notre droite avait
gagn� 100 m�tres seulement. Mais notre gauche,
visant le sommet, avait enlev� 350 m�tres de
tranch�es allemandes, en infligeant � l'ennemi des
pertes �lev�es.
D�s ce jour, - les prisonniers furent unanimes � le
constater, - nos adversaires, bien que
remarquablement braver, eurent le sentiment que la
partie �tait perdue et que la position leur
�chapperait t�t ou tard.
Une nouvelle division allemande, une division
active, la 10e, toute fra�che et recompl�t�e, vint
prendre la suite des op�rations ; c'est � elle que
devait �choir la t�che ingrate de perdre les
Eparges.
Avant d'obtenir le r�sultat total, un nouvel effort
pr�paratoire va pourtant nous �tre n�cessaire : ce
sera l'attaque du 27 mars. Il s'agit toujours de
nous rapprocher du sommet.
Un bataillon de chasseurs m�ne cette fois l'attaque
principale. Son commandant et, tous les capitaines
de compagnies engag�es sont bless�s. Mais de plus en
plus nous serrons de pr�s le bastion ennemi et ce
progr�s a une grosse importance.
Nous avions constat�, en effet, dans les pr�c�dentes
attaques, que les Allemands avaient eu le temps,
pendant notre marche d'approche, de quitter avec
fusils et mitrailleuses leurs abris de bombardement
et de venir par des galeries souterraines garnir
leurs parapets boulevers�s.
A l'avenir, la zone � parcourir par nos troupes
�tant sensiblement r�duite, cette facult� leur sera
interdite.
L'ASSAUT D�CISIF D'AVRIL
C'est dans ces conditions que, le 5 avril, � 16
heures, nous tentons l'effort d�cisif. Deux
r�giments sont engag�s. Il s'agit d'enlever la
partie de la cr�te � l'ouest du sommet D et la
partie, l�g�rement descendante, qui s'�tend � l'est
de ce commet jusqu'� l'extr�mit� du plateau.
A l'heure prescrite, nos troupes d�bouchent. Il
pleut et le terrain est encore plus impraticable que
de coutume. Nos fantassins avancent pourtant sous le
feu de l'ennemi, sortant avec effort leurs pieds de
la boue o� ils enfoncent jusqu'aux cuisses.
Par un corps � corps violent, ils p�n�trent et
s'installent dans les tranch�es allemandes. Le soir,
ils en tiennent une partie importante. A l'est
seulement, ils ont �t� arr�t�s par les torpilles
a�riennes, que l'ennemi a lanc�es sur eux,
pulv�risant parfois des rangs entiers avec un seul
projectile.
Le 6, � 4 h. 30 du matin, les Allemands
contre-attaquent. Les troupes fra�ches qu'ils ont
amen�es se battent admirablement. Nos hommes, sous
le feu depuis la veille, r�sistent, mais finalement
reculent. L'affaire est � recommencer.
Elle recommence, en effet, - et le soir m�me. A
l'extr�mit� est du plateau, nous enlevons une
tranch�e que nous retournons aussit�t face �
l'ennemi. Au centre, nous ne gagnons rien. A
l'ouest, nous progressons vers le sommet.
LA CHARGE DANS LA NUIT
Nos magnifiques soldats n'entendent pas en rester
l�. La nuit, sous la pluie, qui tombe toujours, ils
chargent � la ba�onnette et pied � pied refoulent
les Allemands. Le 7, au matin, tremp�s, boueux,
enlis�s, mais victorieux, ils font le compte de
leurs gains depuis le 5 : 500 m�tres de tranch�es et
plus de 100 prisonniers, dont plusieurs officiers.
Nous approchons du but : mais nous n'y sommes pas
encore. L'ennemi contre-attaque constamment Il est
repouss� tant�t par des charges, tant�t par des tirs
de barrage.
A 5 heures du matin, le 7, il tente un nouvel
effort. Son attaque est fauch�e avant d'atteindre
nos tranch�es. Il arrive alors du village de Combres
de gros renforts. Il va de toute �vidence
contre-attaquer � fond.
Mais alors intervient de nouveau notre artillerie.
D�s que les rassemblements sont signal�s, elle les
prend sous son feu et les emp�che en partie de
d�boucher. Nous ne reculons que sur un point, malgr�
la violence de l'attaque, la plus forte qu'on e�t
encore vue.
Nos renforts pourtant ont grand'peine � arriver.
Les boyaux sont effondr�s, encombr�s, canonn�s Il
nous faut attendre au lendemain pour continuer
l'op�ration. L'ennemi, qui a re�u un coup s�rieux,
ne contre-attaque pas de toute la nuit.
NOUS APPROCHONS DU SOMMET
Le 8, d�s neuf heures du matin, nous reprenons
l'attaque. Deux r�giments d'infanterie et un
bataillon de chasseurs ont l'ordre d'enlever le
sommet. Il pleut toujours. Les culasses sont
encrass�es. A la ba�onnette, par cons�quent !
A dix heures, le sommet et la cr�te � l'ouest sont �
nous. Nous poussons sur la cr�te qui est � l'est du
sommet. Partout nous progressons et, sous le feu,
nous retournons les tranch�es allemandes.
A minuit, apr�s quinze heures ininterrompues d'une
lutte furieuse, la presque totalit� de la position
des Eparges nous appartient. L'ennemi ne tient plus
qu'un petit triangle � l'extr�mit� est (X). Il
contre-attaque mollement. Nous avons enlev� quinze
cents m�tres de tranch�es, dont le bastion
formidable du sommet (D), qui est la clef de la
position.
La nuit du 8 au 9 et la matin�e du 9 sont calmes.
Nous r�ussissons � op�rer sans incident la rel�ve de
nos troupes. Un r�giment frais est amen�. Pour le
mettre, en place, il faut quatorze heures, tant le
terrain est impraticable.
C'est � lui qu'est confi�e la mission de mettre le
point final � notre victoire.
LES �PARGES SONT A NOUS
A quinze heures, nous attaquons, le sol est creus�
de cuvettes profondes o� les hommes disparaissent
parfois. La pluie fait rage, ainsi que le vent.
Nos fantassins, pr�c�d�s par le feu absolument
pr�cis de nos canons, avancent pourtant et ils
atteignent l'extr�mit� est du plateau. Mais, � ce
moment, une calotte de brouillard s'abat sur les
Eparges. Nos canons ne peuvent plus tirer. L'ennemi
contre-attaque et nous reculons.
Ce n'est d'ailleurs qu'un recul provisoire. Une
demi-heure plus tard, une charge furieuse nous rend
la totalit� de notre gain. A dix heures du soir,
nous tenons tout le massif des Eparges. Notre long
effort est couronn� de succ�s. Le 10, l'ennemi,
�cras�, ne bouge plus.
Il contre-attaque dans la nuit du 11 au 12. Il est
repouss�. Les Eparges sont d�finitivement perdues
pour lui.
Une seule ressource lui reste, et il en use : c'est
de d�baptiser la cr�te et de donner son nom aux
hauteurs plus au sud qu'il tient et que nous n'avons
pas attaqu�es.
Le grand �peron, qui domine la Wo�vre dans toutes
les directions, est en notre pouvoir. Nul ne nous en
d�logera.
L'IMPORTANCE DE NOTRE VICTOIRE
Pour garder cette position, les Allemands n'ont rien
n�glig�. On a vu quelle �tait la puissance de leur
organisation d�fensive. On a vu qu'� la fin de mars
ils ont amen� aux Eparges une de leurs meilleures
divisons.
Ils y avaient joint cinq bataillons de pionniers,
les mitrailleuses de la place de Metz, un grand
nombre de lance-bombes de 21 et 24. Leurs
abris-cavernes, creus�s � loisir, comportaient un
chemin de fer � voie �troite, des chambres de repos,
un cercle pour les officiers. Leurs renforts
�chappaient � nos vues. Les n�tres �taient sous le
feu de leurs canons, de leurs mitrailleuses, voire
m�me de leurs fusils, et l'on con�oit quelles,
�taient pour nous les difficult�s du ravitaillement
tant en vivres qu'en munitions.
C'�taient l� les indices certains d'une volont�
arr�t�e de tenir t�te � toutes nos attaques.
Effectivement, nous avons trouv� sur les officiers
prisonniers les ordres qui prescrivaient de tenir �
tout prix. L'�tat-major allemand �tait r�solu � tout
sacrifier pour garder cette cr�te ma�tresse. Il a
fourni le maximum de r�sistance. Les troupes qu'il a
engag�es ont eu une conduite magnifique. Pour
s'assurer de leur fermet�, rien n'a �t� n�glig�, et
pour �viter aux mitrailleurs la tentation de cesser
le feu, on est all� jusqu'� les encha�ner � leurs
pi�ces. Malgr� tout, nous avons �t� vainqueurs.
La nature des choses pourtant favorisait
singuli�rement la r�sistance allemande. Pentes
abruptes, sol d�tremp� opposaient � nos attaques le
plus redoutable des obstacles. Nous avons eu des
hommes non bless�s noy�s dans la boue. Quant aux
bless�s, beaucoup n'ont pu �tre sauv�s � temps de la
fondri�re o� ils �taient tomb�s. Les obusiers et les
lance-torpilles allemands nous visaient � coup s�r,
puisque l'ennemi tenait les sommets. Malgr� tout,
nous avons �t� vainqueurs.
Il y a deux mois, les Allemands, des Eparges,
voyaient chez nous. D�sormais, nous voyons chez eux.
La hauteur m�me de Combres, qu'ils tiennent, est
r�duite � l'�tat d'�lot entre nos mitrailleuses des
Eparges et de Saint-R�my. Et nous avons obtenu ce
r�sultat en infligeant � l'ennemi des pertes doubles
que celles que nous avons subies.
Qu'est-ce � dire, sinon que la victoire des Eparges
d�montre, apr�s tant d'autres, la sup�riorit�
croissante de notre arm�e ?
Nous attaquons ; l'ennemi se d�fend. Il tient les
hauteurs ; nous les lui enlevons. Il a l'avantage de
la position ; nous le chassons de ses tranch�es.
Quand on a v�cu ces combats, on sait, que notre
triomphe est s�r et qu'il a d�j� commenc�. Cette
certitude est le plus bel hommage que la France
reconnaissante puisse offrir aux morts h�ro�ques des
Eparges.
(Journal Officiel).
(�
suivre) |