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« Ce fut pour lui une découverte » : l'auteur du livre emporté en prison par Nicolas Sarkozy se confie

Nicolas Sarkozy le 21 octobre 2025 avant son incarcération.
Nicolas Sarkozy le 21 octobre 2025 avant son incarcération. © HGC / Hans Lucas via AFP
Arthur Herlin

INTERVIEW - Incarcéré depuis le 21 octobre, l'ancien président de la République a emporté trois livres : « Le Comte de Monte-Cristo », « L'anthologie de la poésie française » de Georges Pompidou et « Jésus » de Jean-Christian Petitfils. Ce dernier nous répond.

Jean-Christian Petitfils est un historien français spécialiste du Grand Siècle et de l'histoire religieuse. Auteur d'une œuvre abondante consacrée notamment à Louis XIV, Louis XVI et la Révolution française, il s'est également distingué par ses travaux sur la figure historique de Jésus. Son ouvrage « Jésus », paru en 2011 aux éditions Fayard, propose une enquête historique rigoureuse sur la vie du Christ, loin des approches purement confessionnelles. Ce livre, qui a rencontré un vif succès, a particulièrement marqué Nicolas Sarkozy, qui a choisi de l'emporter avec lui lors de son incarcération. L'historien revient pour « Paris Match » sur ses rencontres avec l'ancien président et sur les raisons qui ont pu motiver ce choix symbolique.

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Paris Match : Comment avez-vous réagi lorsque vous avez appris que Nicolas Sarkozy emportait votre ouvrage sur la vie de Jésus ? Avez-vous été surpris ?

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Jean-Christian Petitfils : Avec un certain étonnement oui, je ne vous le cache pas, même si je savais que Nicolas Sarkozy avait lu avec grand intérêt, il y a environ quatre ans, mon livre sur Jésus (paru en 2011 aux éditions Fayard, puis publié au Livre de poche). Il m'avait témoigné directement de son enthousiasme et en avait même parlé au cours d'une conférence publique.

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À quelle occasion avez-vous rencontré Nicolas Sarkozy et quel a été le contenu de ces rencontres ?

Il m'a invité à trois reprises, après son quinquennat présidentiel, dans ses bureaux parisiens, comme il le faisait très souvent pour de nombreuses personnalités de la politique, du spectacle ou de la culture. La première fois c'était avec un groupe d'historiens et nous avions parlé très librement de divers sujets politiques, littéraires et historiques, car ce sont des sujets qui naturellement le passionnent. Il voulait confronter ses idées à celles de ses invités. La seconde fois, c'était un entretien particulier à la suite de la lecture attentive qu'il avait faite de mon livre sur Jésus. La troisième fois, c'était un déjeuner en tête-à-tête à propos de mon livre sur le Saint Suaire de Turin, paru chez Tallandier en 2022, et dans lequel je défendais – et défends toujours – la thèse de l'authenticité. Dans les deux derniers cas, il n'avait pas manqué de me témoigner son enthousiasme.

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Jean-Christian Petitfils, auteur de « Jésus ».
Jean-Christian Petitfils, auteur de « Jésus ». © BALTEL/SIPA

Comment expliquez-vous cette fascination de Nicolas Sarkozy pour la figure de Jésus ?

Je pense qu'il a été très surpris de découvrir l'étendue de mon enquête sur la personne de Jésus, qu'il ne connaissait, m'a-t-il dit, qu'à travers quelques vieilles leçons de catéchisme. Ce fut pour lui une découverte. Mon livre en effet n'est pas un ouvrage religieux, mais une approche historique de l'homme. Il s'agissait de reconstituer le plus exactement possible la chronologie (sa date de naissance, la durée de son ministère public, les conditions de sa Passion et son exécution sur la croix), de s'interroger sur l'homme. Qui était-il vraiment ? Un prophète, un réformateur juif, le messie attendu par Israël ? Pensait-il être le Fils de Dieu ? Pour quelle raison a-t-il été exécuté et à l'instigation de qui, les Romains ou les autorités juives de Jérusalem ? Bref de replacer Jésus dans son environnement religieux, culturel, économique, politique de la Palestine de son temps. Cette enquête, j'ai essayé de la mener en historien de la manière la plus objective possible, tout en restant ouvert sur la foi, contrairement par exemple au Jésus d'Ernest Renan, marqué par le scientisme, et qui écrivait : « Si le miracle a quelque réalité, mon livre n'est qu'un tissu d'erreurs. » Pour autant, l'historien ne peut se prononcer, en tant que tel, sur les miracles, les exorcismes et a fortiori sur la Résurrection. Cela n'appartient pas à sa science, cela n'entre pas dans son domaine de compétence.

Il a même voulu réaliser à partir de mon livre un film grand public et a contacté un producteur

 

Que lui a apporté la lecture de votre livre ? Quel aspect de la vie de Jésus l'a marqué ? Y a-t-il un passage en particulier qui lui plaît tout particulièrement ?

Je ne peux évidemment pénétrer dans sa conscience, mais d'après ce qu'il m'a témoigné je pense qu'il a été très marqué par cette vie de Jésus qu'il connaissait mal. Il s'est intéressé au message, à la personne de Jésus et bien entendu au mystère de sa Résurrection, qui est le point essentiel pour les chrétiens. Cela le fascinait. Il a même voulu réaliser à partir de mon livre un film grand public et a contacté un producteur. L'affaire finalement ne s'est pas faite.

Pourquoi a-t-il choisi de l'emporter malgré tout selon vous ?

Il est assez facile, me semble-t-il, de lire le message qu'il a voulu délivrer en emportant deux livres, le roman du Comte de Monte-Cristo d'Alexandre Dumas et mon étude historique sur Jésus. Dans les deux cas, il s'agit de deux victimes de l'injustice des hommes.

Que peut-il y puiser pour traverser l'épreuve de l'incarcération ?

Je pense qu'il peut puiser tout ce que tout chrétien trouve en contemplant la vie de Jésus : l'espérance et le sens de la transcendance.

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