Caspar Johann Nepomuk Scheuren, Portrait de Charlemagne 1825 ©Getty - De Agostini Editorial

Série

« Les envahisseurs »

Charlemagne

Dimanche 21 septembre 2025 (première diffusion le jeudi 3 juillet 2025)

C’est le conquérant et l’unificateur du continent, le modèle impérial par excellence. Né en France vers l’an 747, sacré à Rome en l’an 800, mort en Allemagne en l’an 814, il est le précurseur de l’espace pan-européen.

Avec

Régine Le Jan, historienne médiéviste, professeure émérite à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, spécialiste du haut Moyen Âge
Bruno Dumézil, professeur d’histoire médiévale à Sorbonne Université et à l’École polytechnique
Geneviève Bührer -Thierry, historienne, Professeur d’histoire médiévale

Le fondateur de la dynastie carolingienne a largement dessiné la carte politique de l’Europe telle que nous la connaissons, et les limites de son empire ressemblent beaucoup à celles de l’Union européenne actuelle.

Né vers 748, probablement en Francie occidentale, Charlemagne grandit dans un monde en pleine mutation. Sacré empereur à Rome en l’an 800, il meurt en 814 en Allemagne. Son biographe Éginhard le décrit comme un homme d’une stature imposante, à la physionomie à la fois gaie et autoritaire, reflet d’un souverain hors du commun.

L'architecte d'une nouvelle Europe

Charlemagne est souvent salué comme le conquérant, l'unificateur du continent, le modèle de l'empereur par excellence. Les frontières de son vaste empire ressemblent d'ailleurs "beaucoup à celle de l'Union européenne actuelle". Bien que les débuts de Charlemagne soient ambigus, Éginhard lui-même "n'a rien entendu dire sur la jeunesse du personnage", d'après l'historienne Régine Le Jan, ce qui a conduit à l'idée que son début de règne fut "très très difficile et surtout très contesté". Il parlait une langue protoromane, qu'on peut appeler le "protofrançais", mais était aussi "bilingue" en vieux haut allemand. Contrairement au mythe de l'illettré, il "savait probablement lire" (Le Jan) et a reçu une éducation religieuse complète.

Empereur, diplomate et défenseur de la Foi

Le couronnement de Charlemagne comme empereur par le Pape Léon III le jour de Noël 800 ne fut pas une stratégie préméditée, mais plutôt un "concours de circonstances" qu'il saisit, d'après l'historienne Geneviève Bührer-Thierry. Cet acte établit l'archétype du pouvoir impérial en Occident, influençant "tous les empires qui vont succéder à l'Empire carolingien". Il se concevait comme "le défenseur de la foi, le protecteur du dogme". Charlemagne introduisit le terme "Filioque" (signifiant "et le Fils"), affirmant que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils. Ce changement, qui n'enthousiasma "pas du tout" le pape, est en grande partie "à l'origine du schisme entre les orthodoxes et les catholiques qui persiste jusqu'à aujourd'hui", d'après Dumézil.

L'image durable

L'impact profond de Charlemagne réside peut-être moins dans ses seules victoires militaires que dans le récit puissant construit autour de lui. Si la défaite mineure de Roncevaux acquit une immense renommée grâce à la "Chanson de Roland", c'est la "Vie de Charlemagne" d'Éginhard qui forgea son image. Ce texte a servi de modèle à des souverains ultérieurs de Louis XIV à Napoléon et au Kaiser Guillaume II, tous cherchant à s'inscrire dans la lignée du "nouveau Carolus Magnus". Comme le souligne Dumézil, "La vie de Charlemagne, c'est l'un des textes qui a le plus circulé au Moyen Âge. Il faut se dire que ce texte qui présente un empereur parfait, qui a unifié l'empire, qui aurait contrôlé tout le territoire et qui est faux, ça a eu un retentissement extraordinaire.".

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58 min

Bibliographie

Le Jan, Régine. Amis ou ennemis? Émotions, relations, identités au Moyen Âge. Paris: Seuil, 2024.
Dumézil, Bruno. Charlemagne. Paris: PUF, 2024.
Geneviève Bührer-Thierry, L'Europe carolingienne: 714-888 , Paris: Armand Colin, 2010.