Florence Seyvos, scénariste et romancière, autrice de " Un perdant magnifique" (l’Olivier), est l'invitée de Léa Salamé.
- Florence Seyvos, écrivaine et scénariste
Elle publie l'un des plus jolis livres de cette rentrée littéraire de janvier pour Léa Salamé, remarqué et loué par toute la critique. Il avait reçu le Goncourt des lycéens pour son roman Les Apparitions (éditions de L'Olivier, 1995). Et depuis, elle bâtit une œuvre singulière et sensible entre ses romans, ses livres pour enfants et les scénarios qu'elle co-signe – notamment presque tous les films de Noémie Lwowski sont co-écrits avec elle.
Ce nouveau roman, Un Perdant magnifique, son septième, sur l'histoire de Jacques, ce perdant magnifique, est un des petits bijoux de cette rentrée littéraire. Il raconte la drôle de relation entre un beau-père et ses deux belles-filles, Anna et Irène, entre le Havre et Abidjan, en Côte d'Ivoire.
Le personnage du beau-père, flamboyant et instable
Le héros de ce nouveau livre est un beau-père flamboyant, fantasque, menteur et instable. Jacques est un homme insaisissable, à la fois généreux et autoritaire, aimant et tyrannique, et qui n'a surtout aucun sens des réalités matérielles. Il couvre sa femme et ses belles-filles de cadeaux absurdes, alors qu'il est endetté jusqu'au cou. Pour sa femme, c'est un homme exceptionnel. Pour ses filles, c'est un fou, à la fois ridicule et attachant, un perdant qui croit qu'il est un gagnant, un personnage profondément ambivalent. C'est d'ailleurs ce qui intéresse l'autrice, l'ambivalence, l'impureté des sentiments, quand les choses ne sont pas très claires. L'invitée parle de son personnage : "C'est un perdant qui se voit comme un gagnant et qui est incapable de vivre dans le présent. Il est toujours en train de mettre en scène le futur. Et c'est un joueur aussi. Et il ne se rend pas compte de la mise. Et à un moment, il va jusqu'à risquer sa propre peau."
Florence Seyvos aime faire des portraits. C'est peut-être pour elle une façon de rattraper les traces du passé et d'essayer de les imprimer avant qu'elles ne disparaissent complètement. Elle raconte : "J'ai souvent été attirée par des personnes comme ça, qui exagéraient, qui étaient au bord de la folie, qui étaient un peu extrême, qui avaient des comportements extrêmes, qui se mettaient en danger. J'ai toujours éprouvé pour elles un mélange d'affection et d'admiration aussi, je crois, et au fond de gratitude, parce que ce sont des personnes avec qui la vie est plus forte. Elles vibrent davantage, elles exaltent l'existence. On vit plus fort avec ce genre de personnes. Ce n'est pas facile, mais en même temps, on vit, on ressent."
Les relations dans les familles recomposées
Ce qui fascine et passionne Florence Seyvos, ce sont les rencontres entre les personnes qui n'auraient jamais dû se rencontrer. "Le hasard les met en présence et elles s'adoptent mutuellement, il se passe quelque chose." Elle-même a vécu dans une famille recomposée et ça a été pour elle un enrichissement extraordinaire. Elle raconte que quand elle était enfant, c'était une époque où les enfants n'existaient pas tellement dans le regard des adultes. "Alors quand tout à coup un adulte posait un regard sur vous, vous regardait vraiment et vous accordait une attention, c'était extraordinaire et ça vous portait. Et c'est ça que fait Jacques avec ses belles-filles."
Florence Seyvos : "Au départ, ce beau-père ne connaissait pas ces deux belles-filles, mais il les adopte presque instantanément. Il les aime d'une façon inconditionnelle. Par exemple, à un moment, il souhaite absolument qu'elles viennent s'installer là où il vit et travaille, à Abidjan, et il fait faire des travaux phénoménaux dans la maison, une chambre pour chacune, avec de jolis meubles. Il a envie, mais même un peu de force, que tout le monde soit heureux dans le monde qu'il est en train de construire."
-> Pour en savoir plus, écoutez cet entretien passionnant...
À écouter
L'équipe
- Journaliste libano-française
